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30 décembre 2013 1 30 /12 /décembre /2013 16:50

 

 

  • Assemblée "Programme" des indignés de Paris RDM
  • Samedi, 5 Janvier, 2013 - 15:00
  • Café juste à la sortie du Métro Couronnes. SOYEZ À L'HEURE !

 

  • Salut !

     Ce pad pour y rassembler les titres, résumés et liens que doit contenir le "programme" ou autrement dit les positions, ce que les indignés de RDM Paris veulent.

       Les sujets que nous avons évoqués en tracts (la finance, les banques, la consommation, le nucléaire, etc) depuis le début, en 2011, ceux que nous avons travaillé, comme la démocratie, l'écologie, le logement, la constituante, etc. 

    ( On peut aussi rassembler les slogans (mais à la fin du pad) )

     

    https://etherpad.mozilla.org/fRHlvgmvPo

     

    L'idée est de montrer ce que nous sommes et qu'il n'y ait pas de confusion possible avec d'autres. 

    Chaque fois, si nous l'avons fait, il faut la critique, le sujet et la proposition. Écrivez un petit résumé et pas un discours.

    C'est aussi bien un travail d'archives persos et collectives qu'une démarche qui va en même temps montrer nos manques. Mais ce sont 2 étapes différentes : d'abord ce qui a déjà été évoqué dans le mouvement.

    Et puis R-V, pour mettre ça en forme ensemble à l'Assemblée du Dimanche 5 janvier à 15h00 au café qui est tout juste à la sortie du Métro Couronnes.

    Bossons bien d'ici là chez soi et à bientôt.

    Et n'oublions pas " Les raisons de la colère " :

    http://www.youtube.com/watch?v=5061gg0LYSk

    Ce que nous avons fait et que nous pouvons refaire :

    http://www.dailymotion.com/video/xlpyhh_15-octobre-les-indignes-paris-hotel-de-ville_news

     


Secrétariat Démocratie Réelle Paris http://paris.reelledemocratie.net/
_______________________________________________
 
Mouvement Démocratie Réelle Maintenant / Occupy / Indignés
Groupe de travail sur l'économie commun à différentes assemblées du mouvement afin de partager informations, réflexions et analyses sur ce sujet.
 
Pour envoyer un mail aux inscrits à la mailing list, écrire à gt-economie@lists.takethesquare.net
 
Pour se désabonner ou changer vos options (ex. mails groupés) : https://lists.takethesquare.net/mailman/listinfo/gt-economie
 
 
Merci d'utiliser cette liste avec modération, de respecter vos interlocuteurs et l'objet de la liste.
 
Site agrégateur national officiel regroupant les informations émanant des différentes assemblées : http://reelledemocratie.info/
 
Sites de coordination/réseaux :
http://coordinationdemocratique.wordpress.com
http://indigne-e-s.net/

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29 décembre 2013 7 29 /12 /décembre /2013 17:48

 

Source : alternatives.blog.lemonde.fr

 

Delevoye : « Nous avons deux France : celle qui croît à toute vitesse, et celle qui disparaît »

 

 

 

 
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Street art de l'artiste Banksy

"Parce qu'elle sait que ça va mal", la société adapte ses comportements et s'organise en réseaux. Rares sont les élites qui saisissent ce monde en marche : totalement dépassées par le numérique, "elles ne soupçonnent pas la lame de fond sociétale qui se forme", souligne la journaliste Laure Belot dans cet article.

Comment les aider à comprendre cette nouvelle culture et s'adapter ? Voici quelques éléments de réponse avec Jean-Paul Delevoye, président du CESE et maire de Bapaume, auparavant médiateur de la République, parlementaire et ministre, qui fait partie de ceux qui arrivent à prendre du recul sur les enjeux actuels... au point de bousculer au sein même de son institution.

 

A suivre vos prises de parole, on vous sent non seulement en phase avec la société actuelle, mais aussi serein avec le monde qui vient. Qu'est-ce qui, dans votre parcours bien rempli, explique cette posture ?
Le président du Conseil économique, social et environnemental, Jean-Paul Delevoye, à l'Elysée à Paris, le 21 mars 2011. | AFP/LIONEL BONAVENTURE

Le président du Conseil économique, social et environnemental, Jean-Paul Delevoye, à l'Elysée à Paris, le 21 mars 2011. | AFP/LIONEL BONAVENTURE

Voilà une question que je ne me suis jamais posée... Mes parents ont divorcé quand j’avais 14-15 ans. Ce fut une première épreuve enrichissante sur la réalité de la vie. De même, mon parcours d'entrepreneur m'a confronté au fait d’avoir des échéances, des cautions, des batailles, etc.

Je ne suis pas diplômé, non plus : j’ai fait une première année de fac mais j’ai été viré pour raisons soixante-huitardes… aussi n'ai-je jamais eu de souci à transférer mes incompétences sur les compétences des autres, et je n’ai pas de souci d’ego. Mais j’ai été, en revanche, élevé par le doute socratique.

A bien réfléchir me vient aussi à l'esprit l'époque où j'étais pensionnaire au collège de la Providence à Amiens. On ne s'en rend pas compte à cet âge-là, mais la solitude et l'isolement marquent profondément. D'ailleurs, nous profitions de la conférence Saint-Vincent-de-Paul pour sortir du pensionnat et aller boire un chocolat en compagnie de personnes âgées... ou pour aller peindre des logements de femmes dont les maris étaient détenus à la prison d'Amiens. Je me souviens avoir régulièrement vu cinq ou six gamins s'entasser dans une pièce de 20 mètres carrés, j'ai très tôt été interpellé par cette réalité de la vie.

A mon sens l’action ne vaut que par le sens qu’on lui donne, le pouvoir n’a jamais été un objectif, il doit défendre un humanisme, un projet de partage.

C’est d'ailleurs un débat avec mes collaborateurs depuis quinze ou vingt ans : ils me trouvent courageux de dire ce que je pense, mais c’est le contraire qu’il faut condamner. Ma parole n’est pas portée par les calculs, elle est rare mais je n'attends rien si ce n'est de faire bouger les choses.

Est-ce le courage qui manque le plus en politique ?

La soif de pouvoir perturbe les hommes politiques, ils sont plus dans le calcul et dans la gestion de leur carrière que dans la conviction et la croyance dans un projet de société. Il faut donc interroger le sens du pouvoir et retrouver la cause politique qui les amènera à se transcender.

Prenons un exemple : la question qui préoccupe l’Europe est celle du maintien de l'euro, mais cela n'est qu'un moyen. La question est celle du choix de société pour l'Europe et de son rôle dans l'équilibre du monde.

En France, il faut aussi retrouver la lecture politique d'un projet de société, restaurer la politique et le syndicalisme, accepter les bonnes questions pour avoir les bonnes réponses. On est incapable d'ouvrir des débats qui pourtant sont essentiels pour l'avenir de notre société : est-ce l'énergie ou la croissance ? Un travail pour tous ? Une activité pour tous ? Doit-on aller d'une société d’acquisition à une société de partage ?

Je suis convaincu que l'on doit redéfinir le contrat du partage, accepter par exemple que le travail ne peut pas payer santé et retraite, revoir les principes de prise en charge médicale et le principe de la dépense, savoir si la gratuité doit être offerte à tous... Tous ces principes représentent une occasion aujourd’hui de rebâtir un vrai projet politique construit non dans un souci de séduction ou d'impact électoral, mais dans un souci de mobilisation citoyenne.

Et vos collègues politiques, qu'en disent-ils ?

Les politiques sont assez lucides sur la fragilité du système mais sans pour autant changer de cap pour le modifier. Quand on regarde par exemple les échéances européennes, certains reconnaissent que leur préoccupation n'est pas le projet, mais les têtes de gondole, les leaders qui doivent être mis sur les listes pour équilibrer le pouvoir au sein d'un parti ou améliorer l'impact électoral... ici encore l’image l’emporte sur la compétence, c'est assez pathétique. Ce système va imploser ou exploser par les forces citoyennes qui se rebellent de façon assez saine contre un système qui nous met dans le mur.

Regardez l'alternance Sarkozy-Hollande : ce n'est pas Hollande qui a gagné, mais Sarkozy qui a perdu. L'opinion a compris, par cette alternance, que la gauche applique quand elle est dans la majorité ce qu'elle dénonçait quand elle était dans l'opposition. Les gens ont vite la sensation qu'il n’y a pas de convictions, mais que des postures.

Quand la société est déboussolée et que les dirigeants semblent impuissants, les sentiments deviennent des ressentiments. Aujourd'hui, nous sommes dans ce moment où les sentiments d'adhésion au système se transforment en ressentiments contre le système car on a l’impression de ne plus s’en sortir. On exprime donc sa colère avec l'impression que la république, construite au départ pour protéger le faible, laisse la loi du plus fort et du plus violent l’emporter. L’Etat n’est plus capable de corriger les inégalités, avec des produits de la rente qui sont supérieurs aux produits de la production... jusqu'où allons-nous accepter cela ?

Comment voyez-vous l'alternative dans ces conditions ?

Les parcours ne sont plus assumés pour tous, au cœur du déclassement de la classe moyenne, on voit des Virgin disparaître et des Amazon se renforcer, Peugeot fermer et Airbus triompher... on est soumis à des tempêtes économiques incroyables, la hargne est en train de gagner le pays. Cela peut être la source de forces libératrices absolument extraordinaires pour adhérer à une société nouvelle qui émerge avec l'économie numérique.

Le "burn out", le stress individuel et les sentiments d'humiliation sont en train d'évoluer vers une inquiétude collective qui entraîne une perte de confiance dans la capacité de l’économie nouvelle à nous répondre. Entre l'économie ancienne qui disparaît et la nouvelle qui apparaît, la plus-value et l'espérance future ne sont pas plus fortes que la douleur de la disparition de ce qui existe. Nous sommes donc dans une forte période d’instabilité qui va durer cinq à dix ans.

Ce basculement d'un système ancien à un système nouveau est une période compliquée, difficile et dangereuse, mais c'est aussi la plus exaltante, avec des espoirs nouveaux : sur le terrain, je vois plein de jeunes innover, créer, parfois par nécessité, mais ça bouge de partout, il y a une fertilité extraordinaire avec un système qui n'a pas compris que l'avenir sera dans l'innovation et qui se raidit à son encontre, car l'innovation, c’est la contestation de ce qui existe. 

Quand on renverse un système (de la royauté, de la république, etc.), on le fait avec une vision alternative, mais là nous ne sommes plus dans ce type de révolte, nous sommes dans une révolte des affamés et des humiliés qui se nourrit de désespérance et veut juste mettre un terme à sa survie du quotidien. On est dans ce moment, qui n'est même pas collectif car nous avons deux France : celle qui croît à toute vitesse, et celle qui disparaît (hôtellerie, restauration, petits commerces...)

Vous avez présidé l’association des maires de France : comment voyez-vous le rôle des municipalités ?

La dimension du problème impose la dimension des réponses. Si on veut une attractivité mondiale, il faut une réponse à l'échelle des continents. Si on veut travailler une attractivité internationale, c’est à l’échelle des métropoles. La puissance dans la réponse dépend du défi que l'on veut relever. Si on veut jouer à l'échelle de la commune, on agit à l'échelle de l'intercommunalité, ce qui pose la question du potentiel des territoires (certains seront sensibles à la qualité environnementale et à la protection de la biodiversité, d'autres joueront sur l'habitat, etc.) avec des conséquences fiscales qui ne sont pas les mêmes. Nous sommes guidés dans nos choix par des préférences fiscales plutôt que politiques.

Nous allons passer d'une société de la performance à une société de l'épanouissement. Les maires qui étaient des faiseurs de rois, puis de construction, doivent devenir des faiseurs d'espérances individuelles pour nourrir les espérances collectives. La vitalité sociale et la solidarité de proximité sont au cœur des phénomènes de stabilisation des sociétés chahutées. Il faut analyser la dépendance des territoires par rapport à des systèmes monoéconomiques – quand on supprime des usines sur un territoire... la condamnation de l'usine condamne le territoire.

Cette société de l'épanouissement, du bonheur de vivre et du partage va renforcer le rôle des maires dans la société : ils n'auront plus un enjeu de pouvoir mais un enjeu relationnel. Les administrations doivent rentrer elles aussi dans cette logique de services et d’usage, là aussi c'est un choc culturel.

La société du partage n’est-elle pas une bulle médiatique, ces pratiques ne sont-elles pas simplement en train de renouveler le système D ?

J'ai les mêmes interrogations. La notion de partage est née par l’impasse de la société d’acquisition. Comme on va entrer dans une croissance faible, on ne pourra plus acquérir comme les générations précédente. Si on est dans l'impasse de l'acquisition, seules la location et la gestion des usages nous permettront de bien vivre. On est dans une notion de partage de biens collectifs (vélos, voitures, etc.) mis en commun pour les optimiser au maximum.

La dimension morale se pose aussi. Une ami marocain me disait un jour cette phrase terrible : "Au Maroc, on a beaucoup de pauvreté mais pas de misère, en France vous avez beaucoup de pauvreté mais aussi beaucoup de misère." Ce qui est pour certains superficiel est essentiel pour d’autres.

Le troisième enjeu est un enjeu sociologique majeur : le XXIe siècle est le siècle de l’isolement. La vertu la plus rare est celle du temps, du temps que l'on consacre pour soi et de celui que l'on accorde aux autres. Cette notion du partage du temps et du partage avec l’autre est un enjeu qui pose aussi celle du lien, entre individus, car il faut redéfinir la liaison des individus pour faire le collectif.

Aujourd'hui la notion du partage est évidente chez les plus jeunes, les groupes, les bandes, les amis… Estimant que l’avenir sera compliqué, ils survalorisent le moment présent. En 68, on rêvait de liberté pour renverser le système, aujourd'hui on revient à la dimension humaine : on aura moins de fric mais on veut être plus heureux, l'avenir est compliqué mais on veut vivre le temps présent si bien qu'ils développent la richesse des relations humaines basées sur la confiance et le partage. Cela s'observe même au niveau des couples qui se font confiance de manière différente...

Pour ce qui est de la citoyenneté du monde maintenant, c’est le partage de responsabilité. Pour réveiller la citoyenneté, il faut qu'on accepte de dire que nous sommes tous responsables de la planète, etc.

Mais est-ce que le pouvoir citoyen peut tout ? Ne faut-il pas cocréer ?

Les citoyens doivent être des coproducteurs du futur. Mais le pouvoir a peur du pouvoir citoyen. Le pouvoir économique a intégré le pouvoir citoyen sous la pression des consommateurs. D'ailleurs, si on revient un peu sur l'histoire religieuse, c'est l'évolution de l'opinion qui a façonné la croyance religieuse, et non l'inverse. C'est l'opinion qui a fait flancher l'Eglise quant aux thèses de Galilée, qu'elle réfutait. On a surestimé les croyances religieuses, alors que ce sont les opinions qui ont obligé l’Eglise politique a reconnaître que la Terre est ronde.

Le consommateurs ont déjà modifié l’offre des entreprises, et nos institutions vont évoluer sous l'impulsion des attentes citoyennes. Le citoyen va à terme modifier l'offre politique.

Aura-t-on besoin d’un régime présidentiel ? Ou d'un régime parlementaire avec un président qui rassemble ? Avec une capacité de coalition et de partage autour d'un projet collectif qui doit aussi être regardé avec la volonté pour certains de ne pas partager ? Là réside toute la complexité de la métamorphose.

Les partis politiques ont-ils encore de l’importance ? Vous qui venez de quitter l’UMP pour soutenir un candidat PS...

Il n’y aura pas de destruction des partis, mais une recomposition des partis politiques. On a besoin de partis politiques et d'idéologie politique, de croyance collective, car les peuples ont besoin de croire en quelque chose. C’est un enjeu important où les politiques doivent redéfinir les lignes. On souffre d’un excès de politiciens, ils sont à l'image de notre société : c’est tout, tout de suite, avec une jouissance qui l’emporte sur le long terme.

Il faut retrouver le sens de la vision politique et prendre le temps nécessaire de construire des convictions plutôt que de gérer des émotions. Le choc de temporalité est d'ailleurs un choc de pouvoir...

Le développement des territoires se fera autour de projets et d'hommes en mesure de rassembler des philosophies, des cultures et des natures différentes. A titre personnel, j'ai choisi de suivre un homme qui rassemble. Même si je le combats sur le champs des idées, je reste gaulliste et réfléchis en fonction de l’intérêt des habitants.

Que pensez-vous du collectif Roosevelt et du parti Nouvelle Donne ?

Le collectif porté par Larouturou est ancien. Mais c'est un exemple de ce qui va émerger: les listes citoyennes vont se multiplier avec des projets coélaborés de manière collective, pour que chacun apporte sa contribution, comme le proposent Parlements et Citoyens.

La stabilisation citoyenne fait désormais partie de la décision politique : plus aucune décision politique ne sera imposée sans être appropriée par ceux qui la subissent. Cela implique une temporalité politique nouvelle, avec en premier lieu la pédagogie des enjeux et la compréhension des débats, puis l'acceptation de la contestation et de la remise en cause, les pouvoirs doivent apprendre à obéir aux forces citoyennes associatives, philosophiques, experts... en révisant les équations de la république.

La réaction citoyenne actuelle est saine, elle fait émerger des questions de fond auxquels les politiques n'ont jamais répondu. Les politiques séduisent les électeurs même s'ils perdent les citoyens. On oblige les politiques à accepter un débat qu'ils ont mis un talent fou à refuser... Le collectif Roosevelt pose la question des quatre jours, aucun parti ne s'en est emparé.

Pour finir, trois questions du tac au tac, en lien avec l'actualité [l'entretien a été réalisé au début de décembre 2013]. Si je vous dis "bonnets rouges" et écotaxe, vous me dites...

Explications – Le fait d'avoir imposé l'écotaxe sans expliquer l'importance de la fiscalité environnementale engendre ce genre de crispation de ceux qui payent, il manquait une pédagogie des enjeux.

Si je vous dis prostitution, vous me dites...

Réalité – Est-ce qu’en pénalisant le client je vais supprimer la prostitution ? Non, la vraie question est comment permettre à chacune des femmes de pouvoir rester digne dans l'exercice de sa profession ? En pénalisant le client ? Ne devrait-on pas ouvrir le débat sur la création de maison de prostitution ? C'est la question de la transformation de la loi comme posture morale qui se pose ici comme dans le cas de la dépénalisation de certaines drogues...

Si je vous donne le pouvoir demain, par quoi commencez-vous ?

Par le refuser, le pouvoir se conquiert.

Anne-Sophie Novel / @SoAnn sur twitter

A lire pour aller plus loin

 

 

Source : alternatives.blog.lemonde.fr

 

 

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29 décembre 2013 7 29 /12 /décembre /2013 17:25

 

 

Source : www.lemonde.fr

 

L'heure de la revanche pour les lanceurs d'alerte

LE MONDE GEO ET POLITIQUE | 11.12.2013 à 11h03 • Mis à jour le 12.12.2013 à 17h24 | Propos recueillis par Yves Eudes

 
 

Depuis le début du millénaire, des groupes de hackers et de militants de l'Internet libre expliquaient que les agences de renseignement des Etats-Unis mettraient en place un système de surveillance d'envergure planétaire, capable d'espionner des pays entiers. Parmi ces lanceurs d'alerte, Christopher Soghoian, Jérémie Zimmermann et Jacob Appelbaum. Les médias les écoutaient, puis les oubliaient, car ils n'apportaient pas de preuves matérielles exploitables. On les prenait parfois pour des paranoïaques ou des extrémistes égarés par leur antiaméricanisme.

Tout change au printemps 2013, quand un consultant de l'Agence de sécurité nationale (NSA) américaine, Edward Snowden, fournit aux médias des milliers de documents authentifiés de facto par le gouvernement des Etats-Unis, qui n'a pas contesté leur provenance. Aujourd'hui, les théories et les intuitions des militants de l'Internet libre ont acquis un nouveau poids.

Jacob Appelbaum.

Informaticien, militant de l'Internet libre, Jacob Appelbaum est l'un des concepteurs du projet TOR, vaste réseau de serveurs permettant de naviguer sur Internet sans se faire repérer. Il a aussi été le porte-parole de WikiLeaks aux Etats-Unis. En 2013, il s'est installé à Berlin pour fuir le harcèlement policier dont il était victime dans son pays.

Que répondez-vous à ceux qui disent : « Tout ça ne me concerne pas, je n'ai rien à cacher » ?

Jacob Appelbaum : Quand quelqu'un vous sort cette phrase, répondez-lui : « Alors déshabille-toi, mets-toi nu devant moi, tout de suite. » Non seulement il ne le fera pas, mais il se mettra en colère, parce qu'il comprendra que vous essayez de prendre le pouvoir sur lui. Ensuite, ça le fera réfléchir.

Que faire face à la NSA quand on est un simple citoyen ?

Au niveau personnel, pas grand-chose. Se protéger tout seul dans son coin, c'est comme recycler trois déchets pour sauver la planète. Ce nouveau système de surveillance de masse est totalitaire au sens strict du terme, car il n'y a pas d'échappatoire. Même si on ne va pas sur Internet, on est surveillé, identifié, localisé, de mille façons, y compris quand on utilise son passe électronique dans le métro – mais vous allez encore dire que je suis parano…

Beaucoup n'ont pas encore compris qu'ils peuvent être surveillés, même s'ils ne sont pas intéressants pour les services secrets. Vous serez fiché parce que vous êtes l'ami d'un ami de quelqu'un qui les intéresse, ou que vous le côtoyez par hasard. Plutôt que de sélectionner les informations, la NSA garde les données de tout le monde, pour toujours. Compte tenu de leurs moyens et de la baisse continue des coûts de stockage, c'est faisable.

Que peut faire l'Europe ?

D'abord, les Européens doivent comprendre que cette mise sous surveillance de pays entiers est une nouvelle forme de colonisation. Quand j'ai demandé à des élus allemands pourquoi leur pays n'accordait pas l'asile politique à Edward Snowden (actuellement réfugié en Russie), plusieurs m'ont répondu : « C'est impossible, il ne serait pas en sécurité ici. » C'est un aveu implicite : face aux Etats-Unis, l'Allemagne n'est pas tout à fait un pays indépendant.

Le téléphone d'Angela Merkel est sur écoute depuis 2002, bien avant qu'elle soit devenue chancelière. Alors, ne croyez surtout pas qu'elle est la seule responsable allemande à être espionnée par la NSA. Or, face aux Etats-Unis, l'Union européenne est faible, elle pratique la politique désastreuse de l'apaisement. Il faudrait au contraire enquêter en profondeur, tout mettre sur la table, tout publier, puis lancer une grande opération de type « Vérité et réconciliation ».

Et si personne ne réagit ?

Tout va empirer. En collectant sans cesse des masses de données vous concernant, le système de surveillance fabrique votre doppelgänger numérique, un double qui devient plus vrai que vous. Votre profil et votre graphe social (cartographie de votre entourage) sont sans doute remplis d'informations erronées, mais vous ne pourrez jamais les faire rectifier, car vous ignorez leur existence.

Dans des pays où les Etats-Unis mènent des attaques de drones pour tuer des personnes identifiées comme des ennemis, la culpabilité d'une personne peut être décrétée par des machines, qui surveillent les communications et les déplacements de son téléphone. Pas besoin de connaître son nom, il est condamné à mort par un ordinateur, à cause de son téléphone. Je prédis que les Etats-Unis vont étendre leur programme d'attaques de drones, y compris dans des pays qui, aujourd'hui, se croient totalement à l'abri.

Le pire dans cette affaire, c'est que les gens de la NSA sont assurés de l'impunité. Moi, si je mens sous serment devant le Congrès, ou si je pirate des serveurs, je vais en prison. Pas eux. Cela dit, je peux aussi m'estimer heureux. Si je suis toujours en vie, c'est sans doute parce que je suis citoyen américain, que je suis juif et que j'ai la peau blanche. Si j'étais étranger, noir ou musulman, je serais mort aujourd'hui.

Quelle contre-offensive serait efficace ?

La seule solution est de multiplier les fuites de documents secrets. Le monde a besoin de plus d'hommes courageux comme Edward Snowden, qui risquent leur vie pour imposer la transparence. Il est facile aujourd'hui pour un jeune bien formé techniquement d'infiltrer ces agences, car elles ont sans cesse besoin de nouveaux talents. Nous devons aussi changer la tonalité du discours ambiant. Tout le monde parle de « cyberguerre » comme si elle était inéluctable. Il faudrait arrêter un peu, et parler plutôt de « cyberpaix ». Notre rôle est de pacifier Internet.

Christopher Soghoian.
  • « C'est comme si j'avais répété à un ami fumeur qu'il allait attraper le cancer » Christopher Soghoian, 32 ans, américain, britannique et français.

Christopher Soghoian possède trois passeports. Après une vie aventureuse de hacker et de militant indépendant, il a été embauché en 2012 par l'American Civil Liberties Union comme expert en « liberté d'expression, respect de la vie privée et technologie ». Il vit à Washington.

Quel effet cela fait-il d'avoir eu raison avant tout le monde ?

Christopher Soghoian : Ce n'est pas réjouissant, c'est un peu comme si j'avais répété à un ami fumeur qu'il allait attraper le cancer. Le jour où il découvre qu'il a le cancer, je ne vais pas aller le narguer en criant : « Je te l'avais bien dit ! » Je suis terrifié par les révélations d'Edward Snowden. Je savais que l'Etat américain nous surveillait, mais j'avais sous-estimé l'ampleur des moyens mis en oeuvre. Cela dit, ça fait plaisir de constater que mes copains ont cessé de croire que j'étais complètement parano. C'est une période exaltante pour les gens comme moi.

Avez-vous changé votre comportement quotidien ?

Déjà, avant les révélations de Snowden, je payais mes achats en liquide, je n'avais pas de compte Facebook et, quand je participais à une réunion importante, j'ôtais la batterie de mon téléphone. Désormais, je prends encore plus de précautions, j'ai renforcé la sécurité de mes communications et de mes appareils. Pour les entretiens importants, je demande à mes interlocuteurs de venir se promener avec moi dans un parc de Washington.

Les choses vont-elles changer aux Etats-Unis ?

J'ai quelques espoirs du côté des entreprises. De nombreux informaticiens travaillant dans le privé sont très en colère. Leurs relations avec les agences officielles vont se distendre. Certains grands services Internet vont sans doute renforcer les systèmes de protection des données personnelles, notamment grâce au cryptage. On peut aussi imaginer que les géants comme Google ou Facebook se retrouvent concurrencés par des nouveaux venus, proposant aux usagers des services mieux sécurisés. Par le simple jeu du marché, la sécurité pourrait progresser partout.

Et pour l'Europe ?

Les Européens doivent comprendre que les élus américains, même ceux qui sont très critiques à l'égard de la NSA, n'ont pas vocation à protéger les étrangers. Le salut de l'Europe ne viendra pas de ce côté. D'autre part, même si le gouvernement des Etats-Unis promet aux Européens de ne plus les espionner, il ne respectera pas sa parole, il continuera à tricher et à mentir.

Pour les Européens, la seule solution est technologique. Ils peuvent décider de ne plus utiliser les services, les logiciels et les matériels américains. Cela dit, le problème est profond. La création d'un « cloud souverain » européen ne mènera pas très loin. Même si les Européens conservent leurs données sur leur territoire, tant que leurs serveurs seront connectés à Internet, les services secrets américains pourront les pénétrer. Ils sont très forts.

D'autre part, un pays qui est incapable de fabriquer ses propres équipements de communication est dans une posture d'infériorité fondamentale face aux pays fournisseurs de matériels. Tant que les responsables politiques et économiques français utiliseront des iPhone, ils n'auront aucun espoir d'échapper à la surveillance américaine.

Jérémie Zimmermann.
  • « Si nous perdons la liberté d'avoir une vie privée, nous perdrons toutes les autres » Jérémie Zimmermann, 35 ans, français.

Jérémie Zimmermann est le cofondateur de La Quadrature du Net, association de défense des libertés des citoyens sur Internet, installée à Paris.

Comment se sent un militant de l'Internet libre aujourd'hui ?

Jérémie Zimmermann : Le fait d'avoir alerté l'opinion sur ce problème depuis des années nous donne aujourd'hui une grande responsabilité, car la société dans son ensemble se tourne vers nous pour trouver des solutions. Nous sommes aux avant-postes de cette bataille, et nous allons la livrer. C'est la mère de toutes les batailles car, si nous perdons la liberté d'avoir une vie privée, nous allons perdre toutes les autres.

Comment les pays visés doivent-ils réagir ?

La première étape consiste à admettre que le problème existe, ce qui n'est pas évident, et la deuxième à avoir envie de le résoudre. Dans certains pays, comme l'Allemagne ou le Brésil, l'opinion est en train de franchir ces deux étapes. La troisième consistera à imaginer une alternative. C'est l'affaire des experts et des militants de l'Internet libre. D'abord, nous devons faire un audit des services et applications utilisés par le grand public. Tout ce qui vient des grandes sociétés américaines est irrécupérable au niveau sécurité : poubelle direct.

Même chose pour les logiciels propriétaires fermés, dont on ne peut pas inspecter le fonctionnement interne. Mais cela va plus loin. Il faut aussi examiner les logiciels libres et les systèmes de cryptage, pour voir si certains n'ont pas été compromis. Ensuite, nous devrons concevoir des solutions alternatives – imposer les logiciels libres un peu partout, construire des réseaux décentralisés, installer des systèmes de cryptage automatique pour toutes les communications…

Et à plus long terme ?

Pour finir, il faudra appliquer nos solutions dans le monde réel, ce sera l'affaire de la société tout entière. Nous devrons commencer par les pays ayant la volonté politique de lancer ce chantier.
Nous devrons aussi combler notre retard dans le domaine du « matériel libre ». Jusqu'à présent, les hackers se sont concentrés sur les logiciels libres, et n'ont pas su proposer une alternative crédible en ce qui concerne les appareils. C'est une erreur.

Nous ne nous sommes pas assez battus contre l'arrivée des nouveaux appareils proposés par les grands fabricants, dont la stratégie commerciale est entièrement fondée sur la collecte d'informations et le contrôle. Aujourd'hui, on peut dire qu'un smartphone est une machine à espionner permettant aussi de téléphoner.

Yves Eudes
Grand reporter

 

 

Source : www.lemonde.fr

 

 


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29 décembre 2013 7 29 /12 /décembre /2013 17:10

 

 

Source : www.mediapart.fr


ISF : le conseil constitutionnel censure le bouclier fiscal

|  Par Laurent Mauduit

 

 

 

Le conseil constitutionnel a censuré le plafonnement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) prévu dans la loi de finances 2014. Nous republions un parti-pris publié début décembre, qui mettait en garde contre les méfaits du retour du « bouclier fiscal ».

Le conseil constitutionnel a censuré le plafonnement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), dans le cadre de son examen du projet de loi de finances 2014 (lire l'intégralité de sa décision publiée dimanche). Au total, les sages, qui avaient été saisis par le groupe UMP de l'assemblée nationale, ont bloqué 24 des 236 articles du projet de loi 2014 et de la loi de finance rectificative de 2013. Ils ont en revanche donné leur feu vert à la taxation à 75% sur les hauts revenus, dont ils avaient bloqué une première mouture l'an dernier. Nous republions le parti-pris de Laurent Mauduit sur les dangers d'un retour du « bouclier fiscal », publié le 5 décembre 2013.

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S’il y a un dispositif qui symbolise le quinquennat de Nicolas Sarkozy et les injustices qu’il a générées, c’est assurément celui du bouclier fiscal. À juste titre, c’est ce que n’a cessé de faire valoir la gauche en général et les socialistes en particulier : ce mécanisme qui faisait obligation à l’État de rendre des millions d’euros aux contribuables les plus fortunés assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) était assurément très emblématique de la politique conduite à l’époque par le « président des riches ».

Eh bien voilà que le symbole fonctionne aujourd’hui en sens contraire. Car depuis que François Hollande, sitôt arrivé au pouvoir, a décidé de conduire une politique d’austérité budgétaire et salariale, de relever le plus inégalitaire des impôts qu’est la TVA, d’apporter 20 milliards d’euros aux entreprises sous forme de crédit d’impôt sans la moindre contrepartie, de flexibiliser encore davantage le marché du travail, de renier sa promesse faite aux ouvriers de Florange, de conduire une réforme des retraites qui épargne le capital et accable le travail, il est apparu au fil des mois qu’il ne restait plus grand-chose qui distinguât sa politique économique et fiscale de celle impulsée par son prédécesseur. Il ne restait plus guère précisément que la suppression de ce fameux bouclier fiscal, si vivement et si justement dénoncé par la gauche.

Eh bien non ! Même cette différence n’en est plus une. Et la droite va pouvoir, à bon droit, se moquer d’une gauche qui, après lui avoir fait un procès en injustice fiscale, pratique exactement la même politique fiscale qu’elle, y compris dans le cas de l’ISF. C’est ce qui transparaît très clairement des statistiques sur l’ISF que le président (UMP) de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Gilles Carrez, est arrivé après bien des difficultés à obtenir du ministre des finances, Pierre Moscovici. Évoqués jeudi matin par le quotidien Les Échos, les chiffres livrés par Bercy font en effet très clairement apparaître que le gouvernement socialiste a mis au point un dispositif très proche de ce fameux bouclier fiscal de Nicolas Sarkozy. Dans le cadre de la loi de finances pour 2013, il a instauré un mécanisme de plafonnement permettant de limiter à 75 % des revenus l’ensemble des impôts payés, ISF compris. Du même coup, 7 630 contribuables assujettis à l’ISF ont bénéficié en 2013 de ce plafonnement, ce qui a diminué le montant de leur impôt de 730 millions d’euros.

Par un courrier en date du 24 septembre, Gilles Carrez avait en effet demandé aux ministres des finances et du budget de lui transmettre des données sur les effets du nouveau plafonnement à 75 % instauré pour 2013, et qui a donc pris effet pour l’ISF payable cette année, au plus tard le 15 juin dernier. Les deux ministres ont visiblement traîné des pieds puisqu’ils n’ont transmis une réponse que le 3 décembre. À la lecture du document, on comprend le peu d’empressement de Bercy, tant les chiffres sont embarrassants pour le gouvernement.

Voici les documents transmis par les deux ministres à Gilles Carrez :

640 millions € pour 2 674 contribuables

Des deux tableaux transmis, c’est le second qui apparaît comme le plus important :

 

 

Ce tableau fait apparaître que sur les quelque 300 000 contribuables assujettis à l’ISF (pour un rendement l’an passé de près de 5 milliards d’euros), une infime minorité, soit 7 630 contribuables, ont profité d’un cadeau de 730 millions d’euros, du fait de ce plafonnement. C’est même encore plus spectaculaire que cela ! Ce sont 2 674 contribuables, ceux qui disposaient d’un patrimoine net taxable supérieur à 10 millions d’euros, qui se sont partagé l’essentiel du magot, soit 640 des 730 millions.

En somme, exactement comme sous les années Sarkozy, ce sont les ultrariches qui ont bénéficié de ce cadeau. À preuve, pour ces 2 674 contribuables chouchoutés par le gouvernement socialiste, la minoration d’ISF induite par le plafonnement a été en moyenne de 237 663 euros.

Sous Nicolas Sarkozy, ce n’était certes pas exactement le même dispositif. Les contribuables payaient leur ISF, et ensuite, c’était l’administration fiscale qui leur restituait le trop-perçu, si la somme de tous les impôts payés par le contribuable dépassait 50 % de ses revenus. Mais en vérité, il n’est pas certain que le dispositif inventé par les socialistes soit moins critiquable. C’est même exactement l’inverse. Au moins, sous Sarkozy, c’était l’administration fiscale qui faisait le calcul du trop-perçu, tandis qu’en 2013, ce sont les contribuables, lors du paiement de l’ISF, qui ont eux-mêmes arrêté le cadeau qu’ils se faisaient à eux-mêmes. Et puis, sous Nicolas Sarkozy, les effets du bouclier fiscal étaient… moins spectaculaires. Pour l’année 2010, le journal Le Monde avait par exemple révélé que 14 443 contribuables avaient au total profité du bouclier, pour un montant total de 591 millions d’euros. Le nombre de contribuables avait donc été supérieur à celui de l’année 2013, mais le cadeau fait par Nicolas Sarkozy avait été nettement inférieur à celui décidé par François Hollande. La seule chose qui, d’un quinquennat à l’autre, n’a pas changé, c’est la clientèle la plus chouchoutée. Sous le quinquennat précédent, c'étaient aussi les ultrariches qui avaient été les plus choyés, un peu moins de 1 000 contribuables assujettis à l’ISF se partageant 352 millions d’euros de restitution d’impôt.

Gilles Carrez fait donc remarquer, à bon droit, que le dispositif si critiqué de Nicolas Sarkozy avait au moins le mérite d’être plus transparent que celui inventé par les socialistes – sur le modèle de ce que Pierre Bérégovoy avait institué à la fin du second septennat de François Mitterrand. Au cours du quinquennat de Nicolas Sarkozy, les services de Bercy étaient en effet dans l’obligation de rendre public le montant des restitutions, ce qui n’est plus le cas. Et l’on parvenait ainsi à savoir parfois, avec un peu de pugnacité, le montant du chèque fabuleux que le Trésor public faisait à certains contribuables. Mediapart avait ainsi révélé que pour 2008 Liliane Bettencourt avait perçu un chèque de restitution de 30 millions d’euros (lire Liliane Bettencourt : cherchez l’impôt !). Mais pour 2013, quel a été le gain offert par le gouvernement à la même milliardaire ? Mystère et boule de gomme…

Ce cadeau apparaît d’autant plus spectaculaire qu’il n’est pas le seul et surtout qu’il est en contradiction totale avec les engagements pris par François Hollande. Pendant la campagne présidentielle, le candidat socialiste mène en effet la charge contre le « président des riches » et promet qu’il supprimera le bouclier fiscal et rétablira un ISF vidé de sa substance. La promesse est consignée dans la plate-forme du candidat (elle est ici) – c’est sa proposition n° 17 : « Je reviendrai sur les allègements de l’impôt sur la fortune institués en 2011 par la droite, en relevant les taux d’imposition des plus gros patrimoines. »

Mais François Hollande n’a pas, ensuite, honoré son engagement. S’il a rétabli des taux d’imposition progressifs pour l’ISF, il a porté le taux marginal à seulement 1,5 %, pour les patrimoines supérieurs à 10 millions d’euros, comme on peut le constater dans le tableau ci-dessous, qui présente les tranches d'imposition en vigueur pour 2013.

 

 

Mais, sans que personne ne le remarque et sans que cela ne fasse débat, François Hollande n’a en fait pas honoré totalement son engagement, car au tout début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, le taux marginal de l’ISF était non pas de 1,5 % mais de 1,8 %.

Pourquoi Hollande ne paie pas l'ISF

Et puis surtout, il y a eu une autre reculade. Pendant son quinquennat, Nicolas Sarkozy avait en effet décidé que la première tranche d’imposition à l’ISF commencerait à partir de 800 000 euros de patrimoine comme par le passé, mais à la condition – et c’était cela la mesure de Nicolas Sarkozy – que le contribuable dispose d’un patrimoine d’au moins 1,3 million d’euros. En clair, le barème de l’impôt  était resté inchangé, mais le seuil de déclenchement de l’impôt avait été relevé de 800 000 euros de patrimoine à 1,3 million d’euros. On trouvera ici, sur le site internet de l’administration des impôts, les détails du mécanisme.

Or, sans tambour ni trompettes, cette mesure pour transformer l’ISF en gruyère, avec plein de trous permettant aux contribuables d’y échapper, a été maintenue par François Hollande. Et précisément, le seuil de déclenchement de l’ISF a été maintenu à 1,3 million d’euros, et non pas rabaissé à 800 000 euros, comme on aurait pu le penser au vu de la promesse du candidat.

Pour la petite histoire – mais n’est-ce que la petite histoire ? –, on peut d’ailleurs relever qu’il y a un contribuable qui n’a sans doute pas à se plaindre de ce choix : c’est… François Hollande lui-même ! Si l’on en croit sa déclaration de patrimoine (elle peut être consultée ici), le président socialiste dispose d’un patrimoine total de 1,17 million d'euros, constitué pour l'essentiel par des biens immobiliers. Officiellement, il n’est donc pas redevable de l’ISF, compte tenu des contours actuels de l’ISF. Mais sans doute le serait-il s’il avait choisi d’honorer sa promesse.

Pour qui connaît François Hollande, ce stupéfiant conservatisme fiscal n’est, en vérité, pas très surprenant. Déjà lors d’un face-à-face enregistré en vidéo par Mediapart le 28 janvier 2011 avec l’économiste Thomas Piketty (lire Hollande – Piketty : confrontation sur la révolution fiscale), François Hollande avait fait montre de beaucoup de prudence sur l’ISF.

 

Et, dans une drôle de formule (à écouter vers 12’00’’), il avait fait comprendre le bonheur qu’il y avait à être propriétaire : « L'ISF pour l'essentiel est un impôt immobilier, ce qui n'est d'ailleurs pas choquant dès lors qu'une façon de vivre sa richesse est de la connaître dans l'immobilier. »

Mais par-delà sa situation personnelle de contribuable, il y a quelque chose de beaucoup plus choquant : avec François Hollande, l’un des rares symboles qui subsistaient encore pour distinguer une politique économique hollandaise d’une politique économique de droite s’est d’un seul coup effondré. Le premier ministre a beau appeler de ses vœux une « remise à plat de la fiscalité », le constat malheureusement saute aux yeux : de différence, il n’y en a presque plus aucune. Alors que François Hollande avait, bien avant le Front de gauche, plaidé pour une « révolution fiscale », c’est aujourd’hui, avec la hausse de la TVA ou le plafonnement de l'ISF, une contre-révolution qui est en cours…

 

 

Lire aussi

 

 

Source : www.mediapart.fr

 

 

 

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 22:24

 

 

Source : www.agoravox.fr

 

par olivier cabanel (son site) vendredi 27 décembre 2013 -  
 
La fable du « ruissellement »

 

Cette vielle théorie, chère aux libéraux et aux capitalistes de tout crin, qui voudrait que « plus les riches s’enrichiront, moins les pauvres le seront  », le débordement de la richesse leur étant bénéfique, a fait son temps…

 

Cette théorie aurait été imaginée par un certain Will Rogers, acteur dans de nombreux westerns, qui déclara, au sujet des baisses d’impôts décidées par le Gouvernement d’Herbert Hoover, en 1928 : «  on a mis tout l’argent en haut de l’échelle, en espérant qu’il finisse par ruisseler vers les nécessiteux. Monsieur Hoover (…) ne savait pas que l’argent ruisselle toujours vers le haut  ». lien

On sait aujourd’hui, et depuis un certain temps, ce qu’il en est, puisque la France d’aujourd’hui regorge de riches de plus en plus riches, des pauvres toujours plus pauvres, entrainant dans leur chute la classe moyenne.

L’année 2013 a été l’occasion de faire ce constat accablant, révélé en juillet 2013 par la revue Challenges publiant le classement des 500 plus grosses fortunes de France (lien) prouvant que l’écart entre riches et pauvres n’en finit pas de se creuser, illustré par le film de Michel Munz « ah ! Si j’étais riche  » : dans un échange savoureux : « finalement, quand on est riche, ça ne s’arrête jamais ? Rassurez-vous, c’est pareil quand on est pauvre ». lien  

Aujourd’hui, 500 français se partagent un gâteau de 350 milliards, et 2013 compte 10 milliardaires de plus qu’en 2012, portant leur nombre à 55…

Si la moitié du patrimoine des 500 plus grosses fortunes françaises était distribués aux 2,7 millions d’enfants qui vivent dans les familles pauvres, ils recevraient chacun 61 000 euros.

En 1996, le capital des 10 français les plus riches représentaient 25% du patrimoine des 500 plus grosses fortunes…en 2013, il en représente 40%...

Etonnante situation sous une présidence se prétendant socialiste, avec à la tête de l’état un homme qui affirmait, droit dans ses bottes, avant son investiture : «  mon adversaire, c’est le monde de la Finance  ». lien

On ne demande qu’à le croire, mais quasi au 1/3  de son mandat, on serait en droit de douter de la parole présidentielle.

Rien ne l’empêche aujourd’hui de légiférer sur la séparation des banques de dépôt, et des banques d’affaires…ni de décider, comme il le voulait, une échelle de salaire qui ne dépasse pas de 1 à 20 alors qu’elle est aujourd’hui de 1 à 400lien

Et quid de la taxe à 75% sur les plus hauts salaires, de la fin des stock-options, de la limitation des bonus, du plafonnement des rémunérations des dirigeants des entreprises publiques, et de l’encadrement de celles des patrons d’entreprises privées ?

On attend en vain des idées neuves, comme celle de mettre en place un revenu de base, quasi seule solution pour remettre l’égalité, la fraternité, au cœur de la République, faisant reculer la misère, et relancer la consommation.

Il voulait renégocier le traité européen, mais a finalement abandonner l’idée…

Pourtant récemment, une grande avancée aurait été réalisée au niveau bancaire européen, s’il faut en croire Michel Barnier ou Pierre Moscovici, évoquant l’un après l’autre « un changement révolutionnaire dans le secteur financier européen" et « un accord historique » affirmant que l’Europe vient de prendre une décision capitale, destinée, parait-il à organiser le contrôle des banques…

C’est sans compter sur l’analyse lucide qu’a fait le 23 décembre, l’économiste (et jésuite) Gaël Giraud, chercheur en économie au CNRS, et auteur de « lire l’économie » (éditions de l’atelier-prix lycéen du livre).

Il a qualifié cet accord « d’union de façade qui ne garantit aucune sécurité pour le secteur bancaire européen  ».

En principe cet accord devait casser le lien entre les banques et les états, afin de ne pas faire payer les erreurs des banques aux contribuables comme ça a été le cas jusqu’à présent, et même si un fond européen de résolution des banques a été décidé, « ça n’est pas suffisant » a-t-il déclaré.

Ce fond sera, dans 10 ans, à la hauteur de 55 milliards d’euros, et même si la somme parait considérable, elle est largement insuffisante.

Comme le rappelle l’économiste, l’actif au bilan de BNP-Paribas, c’est plus de 2000 milliards aujourd’hui, et lors de l’épisode Dexia, la France avait mis en garantie plus de 80 milliards…quant au fond de résolution français il ne contient que 2 ridicules milliards, et si la loi bancaire envisagée par Moscovici prévoit de le faire monter à 20 milliards c'est seulement dans 10 ans, donc beaucoup trop tard… si des problèmes surgissent, ce qui est probable, les citoyens seront une fois de plus mis à contribution.

Comme les banques savent qu’en cas de pépin, ce seront de nouveau les contribuables qui seront mobilisé pour les sauver, elles ont tout fait pour limiter le montant de l’accord.

De plus, cette loi protège les créanciers et les actionnaires, puisqu’elle fixe pour leur éventuelle contribution un plafond de 8% sur le passif de la banque, et comme les fonds de résolution sont trop modestes, c’est une fois de plus le contribuable qui sera sollicité.

L’objectif de cette loi était donc bon, mais le résultat final est pour le moins décevant, malgré les félicitations que se sont partagés les décideurs européens.

De plus, ce nouveau choix donne a la Banque Centrale Européenne, la mission de superviser les banques européennes, et pour Gaël Giraud, avant tout ça, il aurait fallu mettre en place toute une série de réformes.

S’il est évident qu’il faudrait avancer vers un véritable fédéralisme européen, aujourd’hui on retire aux états le contrôle de leur secteur bancaire, on le donne à la BCE, qui n’a pas de mandat démocratique, qui est très soumise à la pression et aux lobbys bancaires, et qui va devoir constamment arbitrer entre sa fonction de régulatrice de l’inflation, et sa fonction de supervision du secteur bancaire, se décrédibilisant en ayant ses deux mandats.

Aujourd’hui donc, cet accord dépossède les états d’un droit de regard légitime sur leurs secteurs bancaires, mais aussi de tous les attributs de leur souveraineté.

Giraud rappelle qu’une banque ne dira jamais quand elle va mal, tout comme la BCE, car si elle refusait l’opacité, elle pourrait mettre en faillite une partie du secteur bancaire européen…comme le dit avec humour l’économiste, « le ciel est bleu même quand il pleut  », ajoutant que les stress test mis en place par la BCE ne sont pas crédibles, et qu’ils seront calibré, afin que la casse soit minimale, ce qui permettra d’épargner les banques françaises et allemandes, les pertes n’étant déclarées que pour les pays déjà naufragés comme l’Espagne, la Grèce, le Portugal... lien

Pas étonnant dès lors que les bonnets rouges en France et les fourches en Italie soient de sortie…

Car si la naissances des bonnets rouges à une origine au départ plutôt corporative, le peuple des Fourches italien rassemble maintenant des chômeurs, des étudiants, des syndicats, alors qu’à sa création en Sicile en 2012, ce n’était qu’un mouvement corporatiste, dans lequel on ne trouvait que des agriculteurs, des pécheurs, et des routiers en colère contre l’austérité du gouvernement de technocrates de Mario Monti. lien

Ce « mouvement des fourches » prend de l’ampleur, multiplie les manifestations, et promet de marcher sur Rome en 2014, soutenu qu’il est par le « mouvement 5 étoiles  », lequel avait crée la surprise lors des dernières élections, emportant un joli nombre de sièges.

En France, on le sait, les bonnets rouges ont été à l’origine lancés en Bretagne pour lutter contre l’écotaxe, voulue par de pseudo-écolos, en manque d’imagination, portés par la volonté de pénaliser les poids lourds, sans imaginer une seconde qu’elle n’enlèverait que peu de camions sur les routes, et qu’au final, c’est le consommateur qui serait pénalisé.

Alors, en 2014, allons-nous assister à la mutation de ce mouvement, tout comme en Italie, puisque récemment Christian Troadec, l’un des leaders, maire de Carhaix et animateur du festival des vieilles charrues, à décidé de rejoindre la lutte de Notre Dame des Landes ? lien

En tout cas, devant l’acharnement d’Ayrault à imposer son inutile et dévastateur aéroport à NDDL (lien) il ne serait pas impossible que la colère se propage…d’autant que les grands projets inutiles, comme le « Lyon Turin » et d’autres, se multiplient, avec l’accord du premier personnage de l’état. lien

Alors si Hollande n’est pas le Père Noel que l’on attendait pour la France, braqué sur son illusoire inversion de courbes du chômage (lien) on sait au moins qu’il est le Père Noel de sa bonne ville de Tulle, qui constate que, depuis 2012, les subventions pleuvent généreusement. lien

Devant l’exaspération citoyenne de voir appliquer de mauvaises solutions à des problèmes réels, ces colères ne devraient pas être une surprise.

En continuant d’augmenter les taxes, impôt injuste puisqu’il pénalise toujours plus les pauvres, François Hollande ne semble pas avoir dans sa boite à outils ni les moyens de réparer les erreurs commises…ni les outils pour combattre celui qu’il prétend désigner comme son adversaire… le monde de la finance…

Comme dit mon vieil ami africain : « celui qui rame dans le sens du courant fait rire les crocodiles  ».

L’image illustrant l’article vient de « herboyves.blogspot.fr »

Merci aux internautes de leur aide précieuse

Olivier Cabanel

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Signer la pétition pour la séparation des banques : ici

 

 

Source : www.agoravox.fr

 

 


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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 22:02

 

Source : www.bastamag.net

 

 

Spéculation financière

Le trading haute fréquence : « Un choix idéologique et politique »

par Anthony Laurent 23 décembre 2013

 

 

 

 

 

6 mai 2010, krach éclair à Wall Street. En moins de 10 minutes, près de 1 000 milliards de dollars se sont envolés. Du jamais-vu. Un bug informatique en serait à l’origine. De plus en plus d’opérateurs boursiers effectuent leurs transactions financières via des ordinateurs et des algorithmes ultra-sophistiqués. Véritable « boîte noire » de l’économie moderne, ce système, dénommé trading haute fréquence représente 40% des ordres passés en Europe – 50% sur le CAC 40 – et près de 75% aux États-Unis. Quels sont les nouveaux risques liés à ces techniques ? Entretien avec Gérard Paul, ancien cadre bancaire.

Basta ! : Le trading haute fréquence, c’est quoi ?

Gérard Paul [1] : Le trading haute fréquence (THF) consiste en l’exécution à grande vitesse de transactions financières pilotées par des algorithmes, dit le dictionnaire. Il s’agit d’une modalité du trading automatique. Les opérateurs de marché virtuels peuvent exécuter des opérations sur les marchés boursiers à l’échelle de la microseconde (0,000001 seconde). La vitesse de transaction du THF était encore de 20 millisecondes à la fin de la décennie 2010. Elle est passée à 113 microsecondes en 2011 (une vitesse 181 fois supérieure, ndlr). A partir de ces moyens techniques, les opérateurs de THF mettent en œuvre des tactiques de trading. Il vaut mieux, à mon sens, parler de « tactique » – à très court terme – plutôt que de stratégie, qui implique une vision de plus long terme.

L’informatique a pénétré les marchés financiers depuis quelques années déjà. En quoi le trading haute fréquence change-t-il la donne ?

On n’en sait strictement rien... Il me semble que le boursicoteur moyen n’a vu aucun changement concernant le mode traditionnel de fonctionnement des marchés boursiers. Je ne suis pas certain que les gérants de portefeuille, y compris les gérants de SICAV, aient vu changer fondamentalement les conditions de leurs propres transactions. A titre d’exemple, le développement du THF ne semble pas – je reste prudent – avoir généré des écarts de cours quotidiens, ou « intradays », supérieurs à ceux constatés au temps où les transactions s’effectuaient sur un mode plus traditionnel. Mais nous manquons cruellement d’études sur le sujet, tant empiriques que théoriques.

Quelles sont les conditions, techniques et politiques, qui ont permis l’essor du trading haute fréquence ?

La pratique du THF n’est pas contraire aux lois, elle est très peu réglementée. Elle repose sur des techniques informatiques et mathématiques parfaitement maîtrisées. Elle permet des gains réguliers et substantiels. Ceci suffit à expliquer son essor : on sait depuis longtemps que toute innovation technique sera mise en œuvre un jour ou l’autre. Sauf dans les cas où la rentabilité n’est pas au rendez-vous.

A qui profitent ces algorithmes ?

Le THF génère des gains. Pour un opérateur boursier, c’est un intérêt suffisant. C’est même la seule motivation. D’autant plus qu’à mon avis – mais, je le répète, nous manquons d’études – l’utilisation du THF à très court terme n’empêche nullement de faire également des profits sur des stratégies de moyen ou long terme. Ce ne sont pas nécessairement les mêmes opérateurs qui utilisent les deux modes d’intervention. De même qu’au sein d’une banque généraliste, on peut gagner de l’argent sur des opérations aussi différentes que le trading, les prêts immobiliers ou la gestion des cartes bancaires. Dans tous les cas, le moteur est le même : la recherche du profit.

Le Prix Nobel d’Économie Paul Krugman a fortement critiqué l’utilité sociale du trading haute fréquence [2]. L’utilité des places boursières est-elle encore davantage compromise par cette nouvelle technique ?

Il ne me semble pas que l’utilité sociale originelle de la Bourse – financer, partiellement, l’économie et faciliter les échanges d’actifs en assurant leur liquidité – soit fondamentalement compromise par le THF. Encore une fois, nous connaissons très insuffisamment l’impact du THF sur le fonctionnement des marchés. Mais je suis d’accord avec la critique de Paul Krugman, ou celle de l’économiste français Gaël Giraud : hormis les gains que peuvent en tirer les opérateurs, je ne crois pas que le THF apporte quoi que ce soit à la liquidité des marchés. La bonne question est : le THF est-il possiblement générateur de risques, de nuisances, voire de catastrophes ?

Justement, le 6 mai 2010, un « krach éclair » à Wall Street fait plonger l’indice boursier Dow Jones de près de 10% en moins de 10 minutes. Quels sont les risques concrets du THF ?

Cet épisode a été longuement analysé par les autorités de marché et par de nombreux économistes. Il est assez difficile de reconstituer exactement ce qui s’est passé, hormis évidemment le constat de la variation des cours et des indices au fil du temps : l’indice Dow Industrial a chuté en quelques minutes de 10% avant de remonter aussi brutalement de 7%. Ces événements sont survenus dans un contexte de marché à tendance nettement baissière. Les analyses sont bien entendu quelque peu divergentes. Toutefois, il me paraît à peu près certain que le trading automatique a joué un rôle dans l’accélération du phénomène. Mais les programmes informatiques sont présents tous les jours et sur tous les marchés, et tout le trading automatisé ne peut être ramené au THF, qui n’en est qu’une modalité.

Diriez-vous que les ordinateurs et leurs algorithmes ultra-sophistiqués ont pris le pouvoir sur les marchés financiers ?

Non. Ce qui ne veut pas dire qu’ils n’ont pas modifié – en partie seulement – le fonctionnement des Bourses. Mais partout sur les marchés, ce sont des hommes qui sont à la manœuvre. Il y a d’abord et avant tout la tendance à la financiarisation de l’économie toute entière. Ensuite, parallèlement, la mainmise des mathématiciens sur la production d’instruments financiers et d’instruments d’analyse des tendances. Enfin, la mise en œuvre de stratégies et de tactiques de trading. Nous ne sommes en présence que de choix humains : idéologiques et politiques, puis techniques et opérationnels.

Des krachs boursiers graves, sinon gravissimes, se sont produits au 19ème siècle, en 1929, en 1974. Le THF n’existait pas. Et en 1974, je pense, sans l’avoir vérifié, que le trading informatisé en était à ses balbutiements. Je crois me souvenir que la « Corbeille » fonctionnait encore au Palais Brongniart (qui accueillait la Bourse de Paris, ndlr).

Le trading haute fréquence facilite-t-il les manipulations financières, comme le délit d’initié ?

La mise en œuvre des différentes tactiques de THF repose sur des analyses ultra-rapides des carnets d’ordres, analyses suivies de lancement d’ordres destinées à modifier le fonctionnement du marché. On peut en effet parler de manipulation. Mais l’effet sur la tendance profonde du marché et d’éventuels désagréments subis par les opérateurs « traditionnels » – pour autant qu’il en reste ! – ne me paraît pas évidente.

Concernant le délit d’initié, tout dépend de la définition qu’on lui donne. On peut dire que tout le THF repose sur « l’initiation » puisque les programmes informatiques analysent les carnets d’ordres avec quelques secondes d’avance, voire moins, sur d’autres opérateurs. La définition traditionnelle et juridiquement bien établie du délit d’initié n’inclut pas la pratique du THF : il s’agit, par exemple, de l’utilisation par des personnes – administrateurs, banquiers, hauts fonctionnaires, juristes, etc. – d’une information qu’elles devraient garder confidentielle, comme la décision de lancer une OPA (Offre Publique d’Achat, ndlr), la conclusion d’un marché important, un plan social, un avertissement sur résultats, etc. Verrons-nous un jour les techniques du THF mises au service de l’exploitation d’une information confidentielle ? Je ne sais pas en imaginer aujourd’hui les modalités. Mais ce qui me paraît certain, c’est que le délit d’initié serait, en tout état de cause, constitué en amont de l’utilisation du THF.

Le 21 octobre dernier, dans le cadre du débat sur la loi de finances 2014, les députés français ont refusé de renforcer la taxe sur le trading haute fréquence [3]. Que faut-il attendre des responsables politiques français ? Et des autorités européennes, alors que le Royaume-Uni et les Pays-Bas semblent réticents à toute forme de régulation ?

L’économie est largement globalisée, la finance encore davantage. Le problème est la concurrence internationale des places boursières et l’interconnexion des marchés. Sur le plan éthique, ou simplement sur les plans politique voire idéologique, les positions des différents États divergent. On peut interdire le THF en France. Plus difficilement dans toute l’Union Européenne. Quant à l’ensemble des places boursières, il suffit de voir la lenteur des processus de lutte contre les paradis fiscaux et la fraude fiscale mondialisée...

Ceci étant, l’Italie a pris récemment des mesures unilatérales en instituant une taxe sur les transactions à haute fréquence [4]. J’espère que nous disposerons dans quelques temps d’analyses sur les effets de cette décision. Mais Milan n’est pas une place boursière de tout premier rang.

Quelles sont les solutions, techniques et politiques, pour contrecarrer l’expansion du trading haute fréquence ? Est-il même possible de le réguler – en mettant en place des « coupe-circuits » ou en instaurant des temps de latence d’au moins une demi-seconde, par exemple ?

Les coupe-circuits existent depuis longtemps, avant même que ne se développe le THF : il s’agit de la suspension des cotations. Par ailleurs, les autorités boursières ne sont pas dépourvues de moyens d’action, comme on l’a vu le 6 mai 2010, où toutes les transactions de la période litigieuse ont été annulées.

A court terme, en l’absence d’une meilleure connaissance des effets du THF sur le fonctionnement des marchés, il serait illusoire de fixer des temps de latence. Que fera-t-on lorsque les opérateurs disposeront demain d’ordinateurs deux fois plus puissants ? Le régulateur s’engagera-t-il dans une poursuite infinie ? On l’on surveille les risques intrinsèques du THF – en s’efforçant tout de même de les connaître un peu mieux qu’actuellement –, ou bien on interdit ces pratiques. Mon choix personnel est l’interdiction.

Selon Michael Kearns, chercheur en informatique à l’université de Pennsylvanie et ex-concepteur d’algorithmes pour Wall Street, « la finance est devenue une espèce de vaste système automatisé qu’aucune science ne peut décrire. » [5]. Le trading haute fréquence ne rend-il pas encore plus opaque le fonctionnement des marchés financiers ?

Bien sûr. Le THF participe à l’opacification des marchés. Mais à mon sens dans une mesure relativement faible. Je ne connais pas Michael Kearns, mais il pose une vraie question. Je mettrais volontiers entre parenthèses l’adjectif « automatisé ». Jacques Ellul [6] parlait fort justement de « système technicien ». C’est le titre d’un de ses livres. Si on élargit le questionnement du THF à la finance, ce n’est pas l’automatisation qui est l’élément principal puisque aujourd’hui tout est automatisé ou susceptible de l’être. Ce qui me paraît problématique, c’est le constat de Kearns : « un vaste système qu’aucune science ne peut décrire ». Il a raison. Ce qui me paraît tout aussi problématique est que le constat soit fait par un chercheur en informatique. Aujourd’hui, les analyses les plus pertinentes du fonctionnement de notre « système économique globalisé de capitalisme financiarisé » ne sont pas le fait d’économistes – ou en tout cas proviennent de personnes qui ne sont pas seulement économistes – mais de philosophes, anthropologues, biologistes, psychologues, etc. Il me paraît clair que la science économique est à reconstruire comme une science humaine pour devenir l’outil de description dont Kearns pointe le manque. Peut-être n’est-on encore que dans la phase de déconstruction d’une science économique dépassée, et devenue incapable d’embrasser son propre objet.

Propos recueillis par Anthony Laurent

Notes

[1Ex-conseiller bancaire, Gérard Paul est également co-éditeur d’ouvrages de Jacques Ellul, penseur critique de la technique du 20ème siècle.

[2Lire ici.

[3Christian Eckert (PS), rapporteur de la commission des finances de l’Assemblée nationale, a retiré l’amendement 240 – dont il était l’auteur – qui étendait le champ d’application de la taxe sur les transactions financières (TTF), de 0,2%, aux transactions dites « intraday », c’est-à-dire initiées, modifiées ou annulées dans la même journée. Lire ici.

[4Voir ici.

[5Voir le livre de Jean-Luc Porquet, Jacques Ellul, l’homme qui avait (presque) tout prévu. Nucléaire, nanotechnologies, OGM, propagande, terrorisme..., Ed. Le Cherche Midi, janvier 2012, p. 211.

[6Jacques Ellul (1912-1994) était un historien du droit romain et des institutions, un théologien et un sociologue. Penseur de la technique dans le monde contemporain, il est l’auteur de trois ouvrages majeurs : La Technique ou l’enjeu du siècle (1954), Le système technicien (1977) et Le bluff technologique (1988).

 

 

Source : www.bastamag.net

 

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 21:39

 

Source : www.midilibre.fr

 

Smic, TVA, carte d'identité : ce qui change au 1er janvier
AFP
27/12/2013, 11 h 17 | Mis à jour le 28/12/2013, 11 h 33
Le taux normal de la TVA passera de 19,6% à 20% au 1er janvier 2014.
Le taux normal de la TVA passera de 19,6% à 20% au 1er janvier 2014. (Archive AFP/JACK GUEZ)

La liste des principaux changements qui surviendront le 1er janvier. 

Augmentation du Smic, hausse de la TVA, tabac et timbres plus chers, validité de la carte d'identité plus longue :  voici les principaux changements qui interviendront le 1er janvier.

  • SMIC : il passe de 9,43 à 9,53 euros brut de l'heure (+1,1%). En net pour un temps plein, le gain est de 12 euros environ par mois.
  • RETRAITE : les pensions complémentaires du privé (Agirc et Arrco) seront versées chaque mois et non plus chaque trimestre. Les cotisations acquittées par les entreprises et les salariés, augmentent, ainsi que celles du régime général de base. Les majorations de pension des retraités ayant eu au moins trois enfants sont désormais soumises à l'impôt.
  • TVA : le taux normal passe de 19,6% à 20%, le taux intermédiaire de 7% à 10% (hôtellerie, restauration, transports ...). Pas de changement pour le taux réduit (5,5%). Pour les tickets de cinéma, la TVA baissera de 7 à 5,5%, comme les livres et les spectacles vivants. Pour les centres équestres, elle augmente de 7 à 20% pour se conformer à la réglementation européenne. Par ailleurs, une taxe sur les boissons énergisantes (1 euro par litre) entre en vigueur.
  • QUOTIENT FAMILIAL : le plafond de ce dispositif réduisant l'impôt des familles en fonction du nombre d'enfants et des revenus baisse de 2 000 à 1 500 euros par demi-part.
  • RSA : le revenu de solidarité active "socle" augmente de 1,3% à 499 euros pour une personne seule, 749 euros avec un enfant.
  • PRESTATIONS FAMILIALES : les plafonds d'attribution pour les prestations familiales (allocation rentrée scolaire, prestation d'accueil du jeune enfant...) augmentent de 1,9%.
  • FONCTIONNAIRES: abrogation de la journée de carence, non indemnisée en cas d'arrêt maladie. En outre, les fonctionnaires les moins bien payés (catégorie C, 47% des agents) bénéficient d'un coup de pouce (au 1er février) de 4,6 euros à quelque 46 euros mensuels.
  • EMPLOI : la durée minimale des temps partiels passe à 24 heures hebdomadaires (pour les contrats en cours, les entreprises ont jusqu'au 1er janvier 2016 pour se conformer).
  • EMPLOI/UE : Les Bulgares et Roumains sont désormais libres de venir travailler en France, au nom du principe de la libre circulation des travailleurs européens. Ces deux pays sont membres de l'UE depuis 2007.
  • TIMBRE : les plus courants vont coûter 3 centimes de plus. La lettre verte passe à 0,61 euro et la lettre prioritaire à 0,66 euro. 
  • TABAC : à partir du 6 janvier, le paquet de cigarettes augmente de 20 centimes, portant le plus onéreux à 7 euros. Le tabac à rouler grimpe de 50 centimes.
  • ENERGIE : Les factures d'électricité devraient augmenter d'environ 2%, en raison d'une hausse de la Contribution au service public de l'électricité (CSPE), une taxe sur la facture d'électricité. En outre, les tarifs TTC de l'énergie vont répercuter les variations de TVA. Le gaz et l'électricité passent ainsi de 19,6 à 20%. Les abonnements restent au taux de 5,5%.
  • ENVIRONNEMENT : chacun pourra faire mesurer l'exposition aux ondes électromagnétiques dans les habitations et lieux publics. Il suffira d'en faire la demande à l'Agence nationale des fréquences.
  • TRANSPORTS EN COMMUN : les tarifs sont majorés de 3% en Ile-de-France. Deux exceptions: le ticket à l'unité reste à 1,70 euro et le pass mensuel Navigo des zones 1-5 est maintenu à 113,20 euros.
  • POLICE : policiers et gendarmes disposent d'un nouveau code de déontologie, qui préconise le vouvoiement, encadre les contrôles d'identité, la palpation des suspects, et prévoit que les forces de l'ordre portent sur leur uniforme un numéro permettant de les identifier.
  • CARTE D'IDENTITÉ : sa validité passe de 10 à 15 ans, sauf pour les mineurs.
  • JUSTICE : suppression du timbre fiscal à 35 euros. Depuis octobre 2011, il devait être acquitté par tout justiciable (sauf les éligibles à l'aide juridictionnelle) désirant saisir la justice pour un problème civil, commercial, prud'homal, social, rural ou la justice administrative.
  • JEUX : c'est désormais la chaîne privée TF1, et non plus France 2, qui retransmet les tirages du Loto (en direct) et d'Euro Millions (en différé).

 

 

Source : www.midilibre.fr

 

 

 

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 21:21

 

Source : www.marianne.net/martinegozlan

 

Turquie: Le "modèle" était bien une imposture!

 

Rédigé par Martine GOZLAN le Vendredi 27 Décembre 2013 à 20:04

 

Le scandale de corruption au coeur de l'Etat-Erdogan constitue le révélateur d'une réalité que les admirateurs du "modèle turc" ont trop longtemps refusé de regarder en face...

 

Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan - AP/SIPA
Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan - AP/SIPA

Ainsi, tout était faux. La prétendue pureté du gouvernement islamiste turc. Les grands discours de Recep Tayyip Erdogan, Premier ministre à l'autoritarisme sultanesque, leader de l'AKP,  parti (supposé) de la Justice et du Développement. Aïe, voici cette AKP brusquement décapée de son vernis vertueux. Trois ministres, les plus proches d'Erdogan, dont celui de l'Intérieur et de l'Economie, se retrouvent mouillés jusqu'au cou dans une énorme affaire de fraude et de blanchiment d'argent. Depuis quelques jours, les révélations se succèdent, les démissions s'enchainent: les trois ministres impliqués et des députés AKP en rupture de ban avec le parti. La livre turque plonge. Les cabinets d'analystes financiers alertent sur " une incertitude majeure'". Les manifestations ont repris.  Comme on comprend les jeunes Turcs descendus les 25 et 27 décembre dans les rues d'Istanbul, d'Izmir et d'Ankara pour réclamer la démission d'Erdogan... Elle a volé en éclats, cette illusion selon laquelle les valeurs religieuses alliées à l'ultra-libéralisme pouvaient guider le peuple dans la voie du salut matériel et divin!  Une fois de plus, le système sur lequel Erdogan a construit le mythique édifice du " modèle islamiste" se révèle un montage cynique, dans lequel les intérêts des puissants et leur gloutonnerie financière ont pris le pas sur le souci du bien public et balayé toute solidarité avec le peuple.
Que la corruption soit une affaire universelle, on en conviendra aisément: mais quand ceux qui la pratiquent sans vergogne ont l'obscénité de se draper dans le manteau de la morale, c'est une autre histoire. Ce dernier volet d'une imposture que je dénonce depuis  plusieurs années, dans les colonnes de Marianne comme dans un  essai paru en 2011(" L'imposture turque", Grasset) est bien l'aboutissement d'un scandale total. Dans la  Turquie révisée et corrigée ( à la dure) par Erdogan, il n'y a pas plus de souplesse démocratique que de liberté d'expression. L'embastillement de centaines de journalistes a déjà valu au régime de dégringoler en bas du classement international de Reporters sans Frontières. Les simulacres de procès, les condamnations pour présumé "complot"  éclairent d'une obscure clarté le fictif chateau de cartes islamo-turc. Comme la  déferlante obcurantiste qui consiste à trainer en justice artistes et écrivains; à faire l'apologie de la femme parfaite, voilée et mère au foyer de trois enfants minimum; à interdire raki et autres menus plaisirs chers aux natifs de la sublime Istanbul. Aujourd'hui, le sultan Erdogan est nu et les enfants d'un peuple trompé descendent à nouveau dans la rue, comme en juin dernier, lors de la révolte de Gezi Park. A nouveau, la police charge.
En mars 2014, se dérouleront des élections municipales. En août 2014, Recep Tayyip Erdogan tentera de briguer la présidence, le pouvoir suprême qui lui permettrait d'opérer la métamorphose complète de la république fondée par Atatük. Un enjeu majeur que le dernier scandale de goinfrerie économique du gouvernement "modèle" va peut-être remettre en cause.

 

Source : www.marianne.net/martinegozlan

 

 

 

 

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 20:13

 

Source : www.rfi.fr

 

ARABIE SAOUDITE
Article publié le : samedi 28 décembre 2013 à 07:36 - Dernière modification le : samedi 28 décembre 2013 à 07:36

Nouvelle manifestation de Saoudiennes pour le droit de conduire

 

 

Une Saoudienne au volant.
Une Saoudienne au volant.
Reuters

Par RFI

                                                                                                                                                                                                                         Les Saoudiennes réclament le droit de conduire elles-mêmes leurs voitures. Ce samedi 28 décembre, elles vont manifester au volant de leurs véhicules dans les rues de Riyad. C'est la deuxième manifestation de ce type, et l'appel à conduire a été lancé sur le réseau social Twitter. Eman al-Nafjan fait partie de ces femmes très actives sur les réseaux sociaux. Elle est responsable de la campagne en faveur des Saoudiennes au volant.

Eman al-Nafjan

Militante

Il y a des femmes qui vont prendre le volant à Riyad et il y a de fortes possibilités qu'elles manifestent aussi à Jeddah. C'est un mouvement spontané, il n'y a pas de leader particulier. Notre mouvement regroupe des hommes et des femmes qui veulent s'exprimer sur l'interdiction faite aux femmes de conduire en Arabie saoudite.

Propos recueillis par Dalia Raad Jawad

Eman al-Nafjan
(00:40)

Militante

 

Source : www.rfi.fr

 

 

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28 décembre 2013 6 28 /12 /décembre /2013 19:57

 

 

Source : www.reporterre.net

 

"La décroissance permet de s’affranchir de l’impérialisme économique"

Entretien avec Serge Latouche

samedi 21 décembre 2013

 

 

 

Dans un entretien avec Reporterre, Serge Latouche rappelle l’histoire de la décroissance, et prend ses distances avec la gauche.


Serge Latouche est professeur émérite d’économie et un des principaux inspirateurs du mouvement de la décroissance. On avait envie de le revoir, pour retracer les racines de la décroissance, entre Club de Rome, Illich et Gorz, et savoir où il en est par rapport au pouvoir, aux économistes altermondialistes, et à la gauche.

Reporterre - Quelle est l’histoire de la décroissance ?

Serge Latouche - L’histoire de la décroissance, en tant qu’étiquette, est très brève. Cette appellation a été inventée dans les années 2000 par des « casseurs de pub ». Elle a pour fonction de casser la langue de bois. Comme le dit Paul Ariès, c’est un « mot-obus ». Mais derrière ce mot, il y a tout un projet d’objection de croissance. Et ce projet a une assez longue histoire.

Elle débute en 1972 avec la publication du rapport au Club de Rome Les limites de la croissance. En tant que projet de société socialiste anti-productiviste et anti-industraliste, la décroissance est alors proche de l’écosocialisme qui apparaît dans les mêmes années avec André Gorz. Cette première phase de la décroissance est essentiellement une phase de critique de la croissance : on veut l’abandonner car elle n’est pas soutenable. C’est une phase « écologique ».

Mais un second courant, porté par Ivan Illich – qui a d’ailleurs refusé de participer au Club de Rome –, est apparu en disant que ce n’est pas parce que la croissance est insoutenable qu’il faut en sortir, mais parce qu’elle n’est pas souhaitable ! C’est la critique du développement – terme que l’on utilise dans les pays du Sud comme équivalent de la croissance au Nord –, c’est le mouvement post-développementiste. Personnellement, je me rattache à ce courant-là depuis que j’ai viré ma cuti au milieu des années 1960 alors que j’étais au Laos. La fusion de ces deux courants s’est opérée à l’occasion du colloque organisé en février-mars 2002 à l’Unesco « Défaire le développement, refaire le monde ».

Pourquoi la croissance n’est-elle pas souhaitable ?

Elle n’est pas souhaitable parce qu’elle est, comme le disait Illich, la destruction du vernaculaire. C’est la guerre aux pauvres. Une guerre qui transforme la pauvreté en misère. La croissance développe les inégalités, les injustices, elle détruit l’autonomie. Illich a développé cette thèse avec la critique des transports, de l’école, de la médecine, en analysant la façon dont les institutions engendrées par le développement et la croissance acquièrent un monopole radical sur la fourniture de ce qui permet aux gens de vivre et qu’ils se procuraient jusqu’alors par leurs propres savoir-faire traditionnels. Ayant travaillé sur le Tiers-Monde, j’ai effectivement vu, en Afrique, en Asie, comment le rouleau compresseur de l’occidentalisation détruisait les cultures.

Quel regard portez-vous sur les économistes ?

L’économie est une religion, et non pas une science. Par conséquent, on y croit ou on n’y croit pas. Les économistes sont des prêtres, des grands ou des petits, des orthodoxes ou des hétérodoxes. Même mes amis Bernard Maris ou Frédéric Lordon – les meilleurs d’entre eux. Les altermondialistes, par exemple, dont la plupart sont des économistes, ont tendance à réduire tous les malheurs du monde au triomphe du néo-libéralisme. Mais ils restent dans le productivisme et la croissance. Or le mal vient de plus loin. La décolonisation de l’imaginaire que je préconise vise précisément à extirper la racine du mal : l’économie. Il faut sortir de l’économie !

Quelle est votre définition de la décroissance ?

C’est très difficile de définir la décroissance car je considère que ce n’est pas un concept, c’est une bannière, un drapeau. Pour moi, c’est un mot d’ordre qui permet de rallier les objecteurs de croissance. C’est aussi un horizon de sens vers lequel chacun chemine comme il l’entend. La décroissance permet surtout de s’affranchir de la chape de plomb de l’impérialisme économique pour recréer la diversité détruite par l’occidentalisation du monde. Elle n’est pas à proprement parler une alternative, mais plutôt une matrice d’alternatives : on ne va pas construire une société décroissance de la même façon au Chiapas et au Texas, en Amérique du Sud et en Afrique... Il y a des histoires et des valeurs différentes.

Avec la décroissance, on n’est plus dans l’intérêt, l’égoïsme, le calcul, la destruction de la nature, dont l’homme serait maître et possesseur, ce qui définit le paradigme occidental. On veut vivre en harmonie avec elle et, par conséquent, retrouver beaucoup de valeurs des sociétés traditionnelles. On sort aussi de la vision « économiciste » de la richesse, de la pauvreté, de la rareté. D’où l’idée d’« abondance frugale », qui semble être un oxymore du fait de la colonisation de notre imaginaire, mais qui dit en réalité qu’il ne peut y avoir d’abondance sans frugalité et que notre société dite d’abondance est au fond une société de rareté, de frustration et de manque. La décroissance implique aussi évidemment une autre répartition des richesses, une autre redistribution, le changement des rapports de production, une démondialisation, pas seulement économique – à la Montebourg –, mais aussi culturelle. Il faut retrouver le sens du local et, naturellement, réduire notre empreinte écologique, réutiliser, recycler, etc., ce que l’on a définit par les « 8 R ».

Comment les idées décroissantes peuvent-elles avancer dans notre société ?

Pour moi, même si on a en face de nous à une énorme machine médiatique qui matraque et qui manipule, tous les terrains sont bons. Comme le terrain politique, par exemple. Je crois beaucoup, non pas à la politique de participation, mais à la politique d’interpellation. On ne veut pas le pouvoir. Le pouvoir est toujours mauvais, mais c’est une triste nécessité. On veut seulement que le pouvoir respecte nos droits. La décroissance doit être un mouvement d’interpellation du pouvoir, qu’il soit de droite ou de gauche.

 

*Suite de l'article sur www.reporterre.net

 

 

 

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