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11 octobre 2012 4 11 /10 /octobre /2012 18:32

Si la France paie un très lourd tribut à la crise, avec le nombre des demandeurs d’emploi qui a depuis le printemps dernier dépassé la barre des 5 millions, toutes catégories confondues, et celui des pauvres qui s’apprête à franchir la barre des 10 millions (lire Vers les 10 millions de pauvres et les 5 millions de chômeurs), il est une catégorie de Français qui ignore la dépression et vit même dans une spectaculaire opulence : ces sont les patrons et les cadres dirigeants des plus grands groupes qui, loin d’avoir dû se serrer un peu la ceinture, ont vu leurs rémunérations de nouveau exploser en 2011. C’est ce qui transparaît du rapport annuel qu’a publié ce jeudi 11 octobre l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Pour le patronat, ce rapport arrive au plus mauvais moment. Surfant sur la campagne  de communication menée par quelques « business angels », qui se sont habilement fait passer pour des « pigeons » (alors que certains d’entre eux sont en réalité des évadés fiscaux), le Medef et les autres instances patronales essaient de faire campagne pour arracher au gouvernement d’autres reculades fiscales et tentent d’accréditer l’idée que les chefs d’entreprise sont les mal-aimés de la gauche et les premières victimes de la tempête économique historique que nous traversons (lire Comment le gouvernement s’est fait plumer par les « pigeons »). De très nombreuses organisations patronales ont même eu le culot de publier un communiqué commun le 10 octobre (il est ici), se faisant passer pour les premières victimes de la politique gouvernementale et décrétant « l’état d’urgence entrepreuneurial ».

Le rapport de l’AMF vient donc ruiner cette démonstration en dressant, en creux, un constat strictement opposé : malgré la crise, la gabegie et les excès continuent plus que jamais dans les sphères les plus élevées des grandes entreprises, où un seul précepte semble de mise : toujours plus !

Mais pour le gouvernement aussi, ce rapport est pour le moins embarrassant. Car dans la foulée de l’élection présidentielle, une première mesure a été prise visant à plafonner à 450 000 euros le plafond brut annuel des rémunérations des PDG des entreprises publiques (on peut consulter ici l’annonce faite sur le portail du gouvernement). Mais, comme le rappelle le rapport de l’AMF, le gouvernement avait promis de faire plus : « Au-delà des entreprises publiques, des mesures seront prises pour encadrer les modalités de rémunération des dirigeants mandataires sociaux qui ont donné lieu aux excès les plus choquants et pour renforcer la gouvernance et le contrôle en matière de rémunérations. Après une phase de concertation, le gouvernement présentera à l'automne un projet de loi permettant d'interdire ou d'encadrer certaines pratiques et de rénover la gouvernance des entreprises privées afin de renforcer le contrôle exercé sur les rémunérations. »

Alors, que va faire le gouvernement ? Lui qui a reculé si vite devant les faux « pigeons », avant même que le projet de loi de finances pour 2013 n’arrive devant l’Assemblée, aura-t-il l’énergie de tenir son engagement ? Ou bien s’arrêtera-t-il en chemin, accréditant l’idée qu’il ne peut pas faire grand chose contre l’avalanche actuelle des plans sociaux, mais aussi contre les rémunérations de plus en plus folles que se servent les PDG des grands groupes ? C’est l’intérêt majeur de ce rapport : au choix, il souligne l’urgence qu’il y a à légiférer en la matière ; ou ce qu’il y aurait de choquant à ne pas légiférer.

Avant d’en examiner le détail, voici donc ce rapport de l’AMF :

Un record à 16 millions pour Maurice Lévy

Pour établir ce rapport, l’AMF a dépouillé les documents de référence pour l’année 2011 de 60 entreprises parmi les plus importantes qui existent en France, dont 35 entreprises sont cotées au CAC 40 et 25 autres sociétés de taille également très importante (on en trouve la liste détaillée à la page 95 du rapport).

Et ce qu’il y a de très spectaculaire dans ce document, c’est qu’il met en évidence un mouvement de fond : depuis que la crise économique historique a commencé, en 2007, elle n’a incité à aucun moment les plus grands patrons français à jouer la carte de la modération des rémunérations pour eux-mêmes et leurs cadres dirigeants. Au contraire, d’année en année, les excès ont été plus spectaculaires.

Une première série de chiffres donne le tournis : l’AMF révèle dans le tableau ci-dessous (extrait de la page 37 du rapport) que sur cet échantillon de 60 sociétés, 14 d’entre elles ont à leur tête des présidents non exécutifs (président de conseil de surveillance ou de conseil d’administration…) qui ont pour beaucoup d’entre des rémunération mirobolantes :

 

 

Pour présider quelques réunions par an, mais sans responsabilité opérationnelle, 3 grands patrons ont perçu en 2011 entre 174 000 € et 460 000 € ; 3 grands patrons ont reçu entre 460 000 € et 694 000 € et 4 entre 694 000 € et 1 084 million €. Autrement dit, 7 de ces grands patrons sont au-dessus du plafond autorisé pour les PDG des entreprises publiques alors qu’à la différence de ces derniers, ils n’ont pas même à mettre les mains dans le cambouis.

Mais c’est surtout un autre tableau, que l’on peut consulter ci-dessous (ou à la page 67 du rapport), qui donne l’exacte mesure des rémunérations de plus en plus exorbitantes qui sont versées aux cadres dirigeants des grandes groupes 

:

 

Dans ce tableau, l’AMF présente sur les trois années 2009, 2010 et 2011, l’évolution des rémunérations versées aux PDG, aux présidents de directoires, directeurs généraux et gérants de sociétés, pour les seules entreprises du CAC 40, en divisant les rémunérations en quatre compartiments distincts : les 25 % les moins élevées, les 25 % juste au-dessus, les 25 % encore supérieurs et les 25 % les plus élevées.

Or, ce qu’il y a de spectaculaire, c’est que dans tous les compartiments, les rémunérations s’envolent. À titre d’exemple, les 25 % des dirigeants du CAC 40 les moins bien lotis (si l’on peut dire) avaient une rémunération comprise entre 0 € et 1 033 million € en 2009 ; rémunération qui est passée dans une fourchette comprise entre 719 000 € et 1 538 million € en 2011. Et pour les 25 % les mieux lotis, la fourchette est passée de 2,5 millions €/4 millions € en 2009 à 2,9 millions €/4,5 millions € en 2011.

À titre de comparaison, le pouvoir d’achat par ménages ne cesse de baisser en France depuis quatre ans et devrait reculer de -1,2% en 2012 aussi bien qu’en 2013.

Mais les outrances vont bien au-delà. Parfois elliptique, se gardant de nommer précisément les PDG qu’il mentionne, le rapport n’en dresse pas moins un stupéfiant florilège des dérives en tous genres du monde patronal. Débordant d’inventivité quand il s’agit de leur sort personnel, certains PDG se sont ainsi servis, avec l’accord de leur conseil, des magots exceptionnels. Entre autres exemples, l’AMF cite celui-ci : « 1 société a versé une rémunération conditionnelle différée d’un montant de 16.187.800 euros à son président du directoire. La société indique que cette somme est due au titre de l’engagement d’assurer ses fonctions à compter de 2003 jusqu’au 31 décembre 2011. Selon la société, elle constitue depuis l’origine un outil de fidélisation. Le versement de cette rémunération différée était subordonné à la réalisation des conditions de performance et de durée de présence, indépendantes et cumulatives. »

Le nom de l’heureux bénéficiaire n’est pas mentionné, mais on devine sans peine qu’il s’agit du président de Publicis Maurice Lévy, qui s’est montré si gourmand que cela a fini par embarrasser ses pairs et par lui coûter son poste de président de l’Association française des entreprises privées (lire Le patronat se cherche un représentant moins encombrant que Maurice Lévy). Quand elle avait été révélée, cette prime exorbitante (équivalente aux revenus annuels de plus de 1 200 smicards) avait fait beaucoup de bruit. Et le patron de Publicis avait dû se défendre de ne pas avoir monté ce système avec effet en 2011 pour échapper au taux de 75 % d’imposition proposé par François Hollande pour les revenus supérieurs à 1 million d’euros empochés en… 2012 !

 

Inventivité pour contourner le code Afep-Medef

Mais cet exemple n’est en vérité que la partie émergée de l’iceberg. Car à plusieurs reprises, Mediapart a pointé ces dernières années (et récemment au travers de cette enquête de ma consœur Martine Orange Rémunérations : la nouvelle martingale patronale) que de nombreux grands patrons cherchaient à contourner le code établi par le patronat (Medef et Afep) en inventant de nouveaux systèmes de rémunération, autour par exemple de clauses de non concurrence. L’AMF le confirme en pointant de nombreuses voies, plus ou moins discrètes, utilisées par les grands patrons, qui ne sont pas encadrées par le code patronal : « L’AMF constate également en 2011 la mise en place de dispositifs non encadrés par les dispositions du code AFEP-MEDEF : régimes de retraite, indemnités diverses, “retention plan”, rémunération conditionnelle différée, “cash incentives” (actions synthétiques, etc), rémunération variable “ad hoc”. »

En clair, l’inventivité est sans limite. Et dès que le patronat fait mine d’encadrer certaines pratiques, d’autres sont aussitôt mises en place. Les systèmes de retraite pour les cadres dirigeants sont ainsi sans cesse aménagés pour offrir de nouveaux pactoles à leurs bénéficiaires. Il y a ainsi les « retraites-chapeau », qui défraient la chronique depuis longtemps et qui sont toujours distribuées dans des conditions de forte opacité : « L’AMF constate que 44 sociétés sur 60 ont instauré des régimes de retraite supplémentaire à prestations définies pour leurs dirigeants mandataires sociaux ; -15 sociétés contre 14 en 2010 présentent une information complète sur les droits ouverts à titre individuel. Une société, Alcatel, précise que le bénéfice du régime de retraite n’est pas soumis à une condition de présence. 29 sociétés ne donnent pas d’information individualisée sur les prestations des régimes de retraite supplémentaire à prestations définies que pourront percevoir leurs dirigeants. 15 de ces 29 sociétés indiquent néanmoins le pourcentage ou le plafond de la rémunération de référence que représentent les doits des dirigeants mandataires sociaux au titres des régimes de retraite. »

Mais en plus de ces retraites-chapeau, il y a d’autres formes de dotations qui apparaisssent : « L’AMF constate que plusieurs sociétés ont versé à leurs dirigeants, hors régimes de retraite supplémentaire à prestations définies, des sommes destinées à être investies exclusivement dans un régime de retraite. » Les sociétés Unibail, Crédit agricole, Publicis, Société Générale ou encore PPR ont ainsi des dispositifs particuliers en ce domaine. Dans ce dernier cas, celui de PPR, le rapport précise : « PPR a décidé d’accorder à un de ses dirigeants un avantage de retraite sous la forme du versement d’une dotation d’un montant de 3,568 millions d’euros pour fonder des droits à une retraite (avec droit à réversion) exigibles à partir de son âge légal de retraite à taux plein, sans condition de présence dans le groupe. »

Et à côté de cela, il y a encore des modes de rémunération aussi controversés mais plus anciens, comme les stock-options. Dans ce cas, la crise n’a pas plus incité les grands groupes à se montrer plus raisonnable. L’AMF souligne qu’en 2011, parmi les 60 sociétés de l’échantillon, 35 sociétés ont attribué des stock-options à leurs dirigeants mandataires sociaux, soit 71 personnes. Et là encore, la surenchère est stupéfiante, puisque l’étude souligne que ces attributions représentent « en moyenne 42 % de la rémunération globale (rémunération fixe, rémunération variable, jetons de présence, avantages en nature, options et actions gratuites66) des dirigeants due au titre de l’exercice 2011 contre 32 % pour les attributions ayant eu lieu en 2010 (à échantillon non comparable) ».

Alors que va faire le gouvernement ? Lui qui avait annoncé un projet de loi pour l’automne afin de contenir ces dérives, tiendra-t-il parole ? Avec l’AMF, l’enjeu du débat est au moins souligné : sans encadrement législatif, certains grands patrons resteront toujours aussi boulimiques…

 

 

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11 octobre 2012 4 11 /10 /octobre /2012 18:04

 

Marianne - Jeudi 11 Octobre 2012 à 16:15

Par Laurence Dequay

 

Embourbé dans le chômage de masse, notre service public de l'emploi ne parvient pas à remplir ses missions. Entre problèmes structurels lourds et anomalies bureaucratiques, il y aurait pourtant beaucoup à faire pour tenter de conjurer au mieux la conjoncture... Enquête sur une administration défaillante.

 

(Lionel Cironneau/AP/SIPA)
(Lionel Cironneau/AP/SIPA)
Cela fait trois ans que Maurice* K. est inscrit à Pôle emploi. Trois ans que ce cadre commercial de 55 ans regarde avec angoisse les chiffres du chômage grimper, et le marché du travail se tendre. Trois ans, enfin, qu'il estime avoir été insuffisamment pris en charge par un service public défaillant. Alors, appuyé par la CGT Précaires, notre homme a porté plainte, le 10 septembre dernier, accusant son conseiller de Pôle emploi de ne l'avoir reçu que quatre fois depuis 2009, et de ne lui avoir jamais transmis les offres de travail existantes correspondant à son profil, l'obligeant ainsi en fin de droits à survivre d'un job à temps partiel de porteur de journaux. En référé, la justice administrative a, en première instance, tranché en sa faveur. Citant, même, dans ses ordonnances, le préambule de la Constitution de 1946 (« Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi »), et la Déclaration des droits de l'homme. Mais, en appel, les magistrats ont annulé le référé, arguant que la condition d'urgence n'était pas remplie...

Et pourtant. Au moment même où des milliers de Maurice K. reprochent au service public de les négliger, ce dernier renonce officiellement, faute de budget et faute de troupes, à convoquer mensuellement ses 4,73 millions d'inscrits. C'était pourtant, en 2008 encore, la grande ambition du nouveau service de l'emploi (né de la fusion entre l'ANPE et les Assedic) : offrir, comme en Angleterre ou en Allemagne, un soutien suivi et individualisé à chaque inactif. Mais, quatre ans plus tard, on est encore très loin des performances de nos voisins aux derniers pointages, Pôle emploi disposait d'un ratio de 71 agents à temps plein pour 10 000 chômeurs, contre 113 en Grande-Bretagne et 110 outre-Rhin.



Renoncements contraints

Tellement loin, donc, que le nouveau directeur de l'administration, l'inspecteur des finances Jean Bassères, a décidé de battre en retraite : désormais, les 45 400 conseillers de Pôle emploi ne seront plus tenus d'organiser que quatre rendez-vous au cours des neuf premiers mois d'inactivité. Et seuls les 300 000 inscrits les plus éloignés de l'emploi se verront proposer un suivi plus assidu, avec des agents n'ayant pas plus de 70 chômeurs dans leur portefeuille. Sans doute faut-il reconnaître à la démarche un certain pragmatisme, comme l'ont fait le gouvernement et la CFDT. Reste qu'en période d'explosion du chômage ces renoncements contraints par l'absence de moyens paraissent insupportables aux inscrits.

Et les choses ne sont hélas pas près de s'arranger. D'abord parce que le sous-emploi de masse est en train d'enrayer totalement ce service public, dont les bénéficiaires comprennent de moins en moins le fonctionnement. Ces derniers temps, en effet, Pôle emploi a dû faire face à une explosion du nombre de ses inscrits (+ 7 % au premier semestre 2012), tandis que le nombre d'offres de recrutement, lui, chutait.

Ajoutez à cela que la qualité des jobs proposés, elle, s'est drastiquement dégradée en 2011, 11 millions de contrats portaient sur une durée inférieure à une semaine et vous comprendrez pourquoi, désormais, 62 % des dossiers traités par Pôle emploi concernent les cas complexes de chômeurs enkystés comme Maurice K. dans un dispositif dit d'« activité réduite », cumulant, au mois le mois, des petits jobs éphémères aux salaires ultrachiches, avec un peu d'allocation de retour à l'emploi (ARE), une pincée de revenu de solidarité active (RSA) ou encore un bout d'allocation spécifique de solidarité (ASS). Un dispositif si alambiqué que, selon la dernière enquête de l'Unedic, 92,4 % des bénéficiaires en ignorent les règles précises d'indemnisation ! Et, côté administration, c'est une galère sans nom.

« Cette énorme surcharge de travail embourbe Pôle emploi », s'alarme ainsi Jean-Louis Walter, médiateur de ce service public, et ancien secrétaire général de la CFE-CGC. De sorte qu'en cette rentrée les 32 000 conseillers en charge de l'accueil des chômeurs ne consacrent que deux ou trois demi-journées par semaine à cette activité.

propositions de postes rares

Autre aberration qui vient plomber l'agenda des conseillers : en plus d'une bureaucratie de plus en plus chronophage, il leur faut aussi dénicher les offres d'emploi auprès des entreprises. Car, contrairement à ce que pensent beaucoup de gens, la grande majorité des propositions de postes échappent à Pôle emploi (50 % du marché ouvert !). Et, crise oblige, celles qui finissent par passer par les listes du service public se raréfient ( 16,8 % sur un an). « En 2013, on ne va quand même pas les inventer, les jobs ! » s'inquiète Stéphanie Drouin, conseillère dans la banlieue de Toulouse, où Sanofi lance de sévères restructurations. Pour elle, comme pour beaucoup de ses collègues, ce n'est hélas pas la création de 2 000 postes d'agents de Pôle emploi annoncée en juin par Michel Sapin qui viendra à bout du problème.

« La nouvelle majorité a beau avoir fait de la lutte contre le chômage une priorité nationale, c'est le serpent qui se mord la queue, critique Emmanuel M'Hedhdi, du SNU Pôle emploi FSU. Comment allons-nous convaincre en 2013 des patrons d'embaucher des jeunes en contrat d'avenir ou de génération si nous ne connaissons pas précisément leurs besoins ? » Même constat du côté du médiateur, Jean-Louis Walter, qui regrette que la collecte des postes disponibles « soit devenue la variable d'ajustement de l'activité de Pôle emploi ». « Quand un conseiller n'a pas d'offre à transmettre à un chômeur, tous les discours qu'il lui tient sur la nécessité de se former tombent un peu à l'eau », ajoute cet Alsacien de 60 ans à la bouille ronde.

 

formations opportunistes

La formation, c'est justement le nerf de la guerre contre le chômage. C'est dans la formation, en effet, que réside le succès des services de placement scandinaves, et les insuffisances de notre système à cet égard constituent un véritable scandale. Sans cet instrument (dont le financement et le fonctionnement dépendent en grande partie des régions), Pôle emploi a vite fait de se transformer en agence d'intérim au rabais. « Le service public n'a pas vocation à appeler des chômeurs à 22 heures pour leur proposer un boulot de nuit qu'un employeur a posté à 20 heures, comme je l'ai déjà vu ! tonne Gaby Bonnand, ancien président de l'Unedic, et auteur d'un livre sur Pôle emploi (1). Nous devons à tout prix sortir de ce court-termisme. » Un défi qui suppose une meilleure adéquation entre les formations financées par les régions et les besoins des salariés fragilisés.

Car, on peut le regretter, Pôle emploi propose surtout des formations opportunistes, sur les métiers dits en tension BTP, commerce, aide à domicile, ou des préparations opérationnelles sur des embauches ciblées. Par ailleurs, tout le dispositif de formation des chômeurs est pénalisé par le naufrage de l'Afpa, une association à but non lucratif qui dispense de l'apprentissage aux métiers manuels, avec laquelle Pôle emploi collabore fructueusement depuis des décennies.

Chômage de masse qui enraye la machine, manque de temps et d'agents pour s'occuper des demandeurs d'emploi et pour dénicher des offres, dégradation du dispositif de formation... A ces problèmes structurels lourds s'ajoutent des aberrations administratives qui pourrissent la vie des chômeurs. A ce titre, l'exemple des « contrôles suspensifs » est édifiant : les malchanceux tirés au sort par Pôle emploi (pour vérifier la régularité de leur situation) sont privés d'indemnités pendant la durée des contrôles. « Les chômeurs ont beau être patients dans leur très grande majorité, c'est le genre d'épreuve qui fait monter la tension au guichet ! » se désole Suzanne, conseillère dans le sud de la France, où les arrêts pour maladie de ses collègues repartent à la hausse...

Fragilité financière

Dans cette veine kafkaïenne, on peut également signaler l'absurdité des radiations rétroactives : souvent, les ordinateurs biffent les demandeurs d'emploi de leurs listings sans attendre que le chômeur reçoive un courrier motivant sa désinscription, comme le voudrait la loi (2). Un dysfonctionnement qui plonge certains dans une grande fragilité financière certains chômeurs apprenant dix ou vingt jours plus tard que leurs subsides ont été coupés. « Cette pratique nous expose à de nouvelles poursuites judiciaires », prévient Jean-Louis Walter. Mais l'Unedic, par pingrerie, préfère attendre la sanction du Conseil d'Etat pour l'interdire. Bravo, les partenaires sociaux !

Pour ces petits scandales du quotidien comme pour les problèmes structurels, syndicats et patronats ont du pain sur la planche. Et les discussions qui s'ouvrent ces jours-ci sur la sécurisation de l'emploi seront décisives. « Si on ne nous donne pas plus de moyens, nous allons droit dans le mur », martéle le secrétaire général de l'Unsa Pôle emploi, Dominique Nugues. Rêveur, il se souvient que, pendant la présidentielle, le député PS Alain Vidalies, alors pressenti pour la Rue de Grenelle, n'excluait pas d'aller plus loin que les 10 % des cotisations reversées aujourd'hui par l'Unedic à Pôle emploi, afin de passer le périlleux cap de 2013. Une audace bienvenue qui permettrait peut-être à Maurice K. et à des milliers d'autres de retrouver un travail...

* Le prénom a été modifié.

(1) Pôle emploi : de quoi j'me mêle, de Gaby Bonnand, éditions de l'Atelier.

(2) Les chômeurs en difficulté peuvent s'adresser au site recours-radiation.fr

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11 octobre 2012 4 11 /10 /octobre /2012 16:58
11/10/2012 à 19h29
Pascal Riché | Redchef Rue89

 

 

Aïe...Le FMI a fait une découverte : l’austérité a un impact plus sévère que prévu sur l’économie. Après avoir fait boire bien des potions amères, pendant des decennies, à des pays en crise, le Fonds monétaire semble constater que ses prescriptions n’étaient pas forcément adaptées.

François Hollande, qui s’est engagé dans une course folle à la réduction du défict, avec pour objectif un chiffre totemique, les « 3% du PIB », devrait lire cette étude. (résumée page 41 de l’Economic Outlook, ici en PDF) Que dit elle ?

Gare au « multiplicateur »

Avant d’entrer dans le vif de celle-ci, il faut faire un détour par le « multiplicateur keynésien ». Ne fuyez pas, vous allez voir, c’est assez simple à comprendre.

Depuis l’économiste John Maynard Keynes, la plupart des économistes l’admettent : sauf circonstances exceptionnelles, l’austérité budgétaire (baisse des dépenses publiques) ou fiscale (hausse des impôts) n’est pas bonne pour la croissance. Symétriquement, les mesures de relance prises par l’Etat, baisse d’impôts ou hausses des dépenses, dopent la croissance.

Le lien entre l’intervention budgetaire et fiscale de l’Etat et la croissance est appelé le « multiplicateur ».

Jusque là, le FMI considérait que pour les économies avancées, ce multiplicateur était de 0,5. Autrement dit : 10 euros de hausse d’impôt (ou de baisse des dépenses) entrainait une perte pour la croissance de 5 euros.

Le FMI estime aujourd’hui que cette évaluation était erronée. Selon leurs recherches, qui portent sur les huit dernières decennies, le multiplicateur serait situé entre 0,9 et 1,7.

Autrement dit : si un Etat augmente ses impôts ou baisse ses dépenses de l’équivalent de 1% du PIB, l’impact pour la croissance se situera entre 0,9 et 1,7 point, selon la conjoncture.

Sérieux ou stupidité budgétaire ?

Si cette étude du FMI est exacte, conduire une politique d’austérité en période de crise est d’une stupidité sans nom (ce que beaucoup d’économistes savent déjà, mais l’orthodoxie économique ambiante les dissuadent de le crier trop fort).

Bercy ne dévoile pas le multiplicateur qu’il retient pour ses prévisions budgétaires – une opacité regrettable. Mais il y a de fortes chances que ce dernier soit proche de 0,5, car la prévision de croissance officielle pour 2013, de 0,8%, est plus élevée comparé que les projections d’autres organismes.

Prenez par exemple l’Observatoire français des conjonctures économiques : le multiplicateur fiscal que ses chercheurs ont retenu est de 0,9 et leur prévision de croissance « sort » à 0%.

Pour un homme politique, réduire le déficit budgétaire sur la base d’un multiplicateur de 0,5 peut-être une option efficace. Mais si le multiplicateur est de 1,7 toute politique d’austérité ne peut qu’être inefficace.

« C’est ce qui se passe en Espagne »

Avec un multiplicateur de 1,7, l’effort budgétaire et fiscal qui nous est aujourd’hui demandé (environ 1,8% de PIB : 28 milliards de hausses des prélèvements obligatoires et 8 milliards d’euros de réduction des dépenses) nous fera tout droit plonger en récession, avec des conséquences dramatiques en terme de chômage.

Et le résultat de cette politique de « sérieux budgétaire », en terme de réduction du déficit public, sera nul.

Ce scénario n’est pas imaginaire. « C’est ce qui se passe actuellement en Espagne où malgré les efforts budgétaires, le déficit public reste à près de 8%. Cela a un coût social énorme : le chômage atteint 25% », commente Mathieu Plane, de l’OFCE.

Et l’effet dévastateur est démultiplié par le fait que tous les pays européens sont partis dans cette course délirante aux 3% : dans cette sarabande funeste, chacun importe la rigueur de l’autre, et l’ensemble du continent glisse vers la dépression.

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11 octobre 2012 4 11 /10 /octobre /2012 15:09

 

 

Toutes ces dernières années, il ne s’est agi que "d’incivilités". Mais samedi soir, les choses ont changé : on est passé au stade de la vraie délinquance. La nuit du 6 au 7 octobre a été chaude à Florange, même si la plupart des 11 000 habitants de cette petite ville de Moselle n’ont appris que le lendemain, par la presse locale, ce qui s’était passé : voitures saccagées, poubelles incendiées, agression homophobe… Tout cela était l’œuvre de jeunes, certains mineurs, d’un même quartier, dit "sensible". Rien de vraiment dramatique, mais un tournant pour Florange.

 

© Florence Beaugé/LeMonde

 

Vingt-quatre heures plus tard, nouveau choc : la population découvre, là encore par la presse, qu’un inconnu s’amuse ces temps-ci à lâcher dans les rues des morceaux de saucisses fourrées de… lames de rasoir. "Qui veut la peau de nos chiens ?", se demandent les Florangeois, abasourdis.  "C’est ignoble ! Quand je pense qu’un enfant pourrait ramasser ça...", s’indigne Brigitte, propriétaire d’un berger américain. "On est aux aguets tout le temps, à présent. C’est la première fois qu’il nous arrive une chose pareille. Les gens ne respectent plus rien. Il n’y a plus d’entraide, plus de savoir-vivre", répète-t-elle plusieurs fois, l’air dégoûtée.

Florange a le sentiment de vivre la fin d’un monde. Pas de psychose, mais une fatigue manifeste, une incompréhension douloureuse. Ils avaient déjà ArcelorMittal et la fermeture des hauts-fourneaux. Les voilà en plus confrontés à la violence, ouverte ou, encore pire, sournoise…

 

© Florence Beaugé

 

Philippe Tarillon est sur tous les fronts. Lundi, la poitrine barrée de son écharpe de maire, il défilait aux côtés des syndicalistes CFDT à travers les rues de Florange, pour, disait-il, protester contre "le cynisme" de Mittal, "ce patron que personne n’a jamais vu, sauf la seule fois où il est venu ici en hélicoptère".

Dans l’ensemble, les gens aiment bien leur maire. S’ils le reconduisent à la tête de la municipalité depuis 2001, ce n’est pas tant pour son étiquette socialiste – le Front national a fait un carton à Florange, au premier tour des présidentielles et des législatives de mai dernier  - que pour sa personnalité. Ils l’admirent pour son dévouement, même si quelques uns ronchonnent contre le fait que, disent-ils, "il en fait trop pour les étrangers, plus que pour nous". Philippe Tarillon, c’est vrai, mène une politique sociale très active. Florange, dont la population compte quelque 15% d’immigrés, essentiellement maghrébins, offre ainsi 30% de logements sociaux.

 

Le maire Philippe Tarillon (à droite) au milieu des sidérurgistes de ArcelorMittal © DR

Le maire Philippe Tarillon (à droite) au milieu des sidérurgistes d'ArcelorMittal © DR

 

Sinistrée, sa ville ? Le maire refuse de se laisser gagner par le pessimisme ambiant. La tache est rude pourtant. Le vent a tourné à partir de 2008. En quatre ans, les chiffres du chômage ont plus que doublé sur la commune pour s’établir à 15%. "On encaisse à la fois la crise nationale, la crise de la sidérurgie et celle qui se produit au Luxembourg. Même modeste, comparé à la France, le ralentissement dans le grand Duché a un impact direct chez nous, souligne l'élu. Les frontaliers sont les éléments de flexibilité. On voit maintenant arriver au Pôle emploi des gens qui travaillaient jusque là au Luxembourg ».

ArcelorMittal et le Luxembourg sont aujourd’hui encore les deux principaux employeurs de Florange et sa région. Un actif sur deux, dans la commune, travaille dans le grand Duché. Les salaires y sont plus élevés qu’en France, les avantages sociaux aussi. Du coup, Florange a des allures de ville dortoir, tandis le Luxembourg fait figure d’Eldorado. La réalité est cependant moins rose. Beaucoup s’usent les nerfs et la santé en trajets et en embouteillages, n’ayant pas les moyens de s’offrir un logement de l’autre côté de la frontière.

Et surtout, leurs emplois sont rarement qualifiés. "On nous fait faire tous les petits boulots dont personne ne veut au Luxembourg : les femmes font le ménage, les hommes sont éboueurs ou manutentionnaires. Ils sont rares, ceux qui réussissent à être cadres dans une banque. Et le pire, c’est qu’on est mal considérés là bas, avouent les plus lucides de ces transfrontaliers. Faut dire la vérité : on est un peu leurs « bougnoules », aux Luxembourgeois".

 

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A lire également : Bons baisers de Florange !

 

 

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10 octobre 2012 3 10 /10 /octobre /2012 15:09

 

 

Le Monde.fr | 10.10.2012 à 09h34 • Mis à jour le 10.10.2012 à 11h11

Par Charlotte Chabas

 

A partir de 18 heures, les portes battantes qui marquent l'entrée de l'internat ne cessent de s'ouvrir et de se refermer dans un bruit sourd. Chaque claquement marque la fin d'une journée de travail, ou le début d'une autre. Entre la cuisine et la salle à manger, ceux qui vivent là se croisent dans un ballet incessant, rythmé par quelques anecdotes sur la journée achevée. "Le petit avec la crise d'asthme, j'ai pas du tout géré", débriefe, face au frigidaire en inox, une jeune femme brune qui achève sa première année d'internat, devant le visage compatissant d'une de ses aînées. "Et en plus, j'ai découvert cet après-midi que j'étais de garde ce soir", renchérit-elle, lugubre.

Sur la grande table de cantine en formica bleu qui trône au milieu de la salle à manger, les plateaux-repas sont vite engloutis. On se plaint du chauffage, qui ne sera pas réparé avant le 2 novembre. Pourtant, le thermomètre tombe déjà à 14 °C la nuit dans les chambres de cet internat de l'est de la France, qui accueille chaque semestre une vingtaine d'étudiants en médecine, venus faire leurs armes dans l'hôpital voisin pour un stage de six mois. Certains, restés en blouse blanche, stéthoscope autour du cou, s'accordent une courte pause avant de repartir assurer leur garde de nuit, et aligner ainsi au moins 24 heures de travail consécutives. Astreinte oblige, le plus âgé de la tablée, qui affiche déjà bac +10 au compteur, surveille du coin de l'œil ses deux téléphones qui pourraient à chaque instant le rappeler illico à son service.

A 21 h 30, la dernière interne fait son entrée dans le bâtiment, après une journée de travail de plus de douze heures. Pas de bol, "c'est toujours elle qui rentre le plus tard. Dans son service, ils font des horaires de fous", explique un de ses collègues.

Les internes – qui ont presque tous demandé à être cités anonymement pour ne pas compromettre leur carrière – ne sont officiellement encore qu'en formation. Mais la réalité hospitalière est toute autre. Tous assument déjà, souvent dans la plus grande illégalité, le travail et les responsabilités d'un médecin diplômé, poussés à bout par un système hospitalier en sous-effectif chronique, saturé par la demande.

85 % TRAVAILLENT PLUS QU'ILS NE LE DEVRAIENT

En septembre, le principal syndicat d'internes, l'Isnih (Inter-syndicat national des internes des hôpitaux), a publié les résultats d'une vaste enquête (PDF) menée dans les hôpitaux français. Dans ses conclusions, le rapport montrait ainsi que 85 % des internes – ils sont 21 000 au total – travaillaient bien au-delà des 48 heures hebdomadaires réglementaires, avec une moyenne de 60 heures par semaine. De même, le "repos de sécurité", imposé depuis 2002 après chaque garde de nuit pour empêcher un interne de travailler plus de 24 heures consécutives, n'est pas respecté dans 21 % des cas.

Selon le syndicat, "aucune région ne respecte aujourd'hui la législation", et ces entorses au règlement ne sont pas sans conséquences. D'après l'étude, 15 % des étudiants affirment avoir commis des erreurs de prescription, de diagnostic ou d'acte opératoire en lendemain de garde, alors que 39 % déclarent en avoir "probablement réalisé". Des chiffres dans l'ensemble largement "sous-évalués", selon de nombreux internes, qui reconnaissent avoir eux-mêmes minimisé leurs réponses au questionnaire.

 "L'OUVRIER DE L'HÔPITAL"

Les internes sont une "main d'œuvre corvéable et bon marché pour faire tourner les hôpitaux", conclut sans ménagement le syndicat dans son rapport. Un constat amer partagé par ceux qui ont répondu en grand nombre à un appel à témoignages publié sur Le Monde.fr, qui les interrogeait sur leurs conditions de travail.

Le "dernier maillon de la chaîne alimentaire de l'hôpital", le "bouche-trou", la "variable d'ajustement" ou encore "l'ouvrier de l'hôpital", c'est par ces titres peu enviables que se définissent de nombreux internes interrogés. "Dans les services, chaque corps de métier a une tâche bien définie, sauf l'interne qui n'a pas de charge précise. Du coup, tout ce que les médecins ne veulent pas faire ou n'ont pas le temps de faire, c'est sur nous que ça retombe, sous prétexte qu'on doit apprendre de tout", explique Manon, qui termine sa première année d'internat à Lyon. A l'interne revient alors la partie la plus chronophage de la relation avec le patient, mais aussi les basses besognes comme "gérer la paperasse", voire parfois "brancarder les patients" et "vider les poubelles".

CERTAINS ONT "PIQUÉ DU NEZ EN BLOC OPÉRATOIRE"

"Le travail ne diminue jamais, ça n'existe pas des lits fermés parce qu'il n'y a pas assez de médecins", explique Jean, 28 ans, interne à Paris. Et les conditions d'exercice s'en ressentent. Travailler vingt jours d'affilée sans un jour de repos, faire des semaines de plus de 80 heures de travail, ou encore travailler 36 heures consécutives, quand le repos de garde n'est pas respecté, n'est pas chose rare pour un interne. "Qu'on soit capable ou non de tenir le coup, la question ne se pose même pas, on doit continuer", explique Anne, 27 ans, qui s'estime "chanceuse" de ne pas avoir besoin de beaucoup de sommeil.

Tous reconnaissent pourtant qu'après 23 heures éveillé, on ne peut pas faire de la "bonne médecine". "La nuit, on fait du symptomatique, pas du curatif, pour aller plus vite", explique Claire, 25 ans, interne à Lyon, qui avoue penser souvent la nuit "plus que dix heures, et je pourrai pleurer". "On est dans le réflexe, donc on passe souvent à deux doigts des grosses erreurs, et on en fait des tonnes de petites", reconnaît Jérémy, 25 ans. Dans les témoignages, certains parlent notamment d'"échange de prescription entre deux patients", d'"erreur dans un dosage", d'autres racontent même avoir déjà "piqué du nez en bloc opératoire, avec la chaleur et la nécessité de rester immobile."

Pour Marie, 27 ans, "c'est le relationnel qui en pâtit le plus". A cette heure avancée de la nuit, la fatigue rend "plus agressif, à fleur de peau". "Parfois, j'aimerais avoir un cadran affiché sur ma blouse où s'inscrirait le nombre d'heures depuis que je suis réveillé", avoue Jean, interne en 4e année. "Les gens devraient savoir le prix humain de leur système de santé", renchérit Thibaut, spécialisé en médecine interne à Paris.

PASSAGE OBLIGÉ DE LA FORMATION ?

Du côté des chefs de service, on se défend d'exploiter outre mesure les internes. Tous ont leur propre interprétation de la législation, et les conditions changent du tout au tout en fonction des différents services. Une inégalité de traitement qui perturbe d'autant plus les internes, confrontés au règne de l'arbitraire. La justification est toujours la même : "c'est soit ça, soit on ferme boutique", confie un chef de service à l'hôpital parisien de La Pitié-Salpêtrière. S'ils ont conscience d'être dans l'illégalité, la plupart assument, sous couvert d'anonymat, tout de même. "De notre temps, c'était bien pire, on travaillait sans arrêt, je me souviens d'un week-end de Noël pendant mon internat où j'avais commencé le vendredi matin pour n'en sortir que le lundi", raconte un chef de service d'un CHU du grand Ouest.

L'épuisement des internes, passage obligé de la formation ? "L'argument 'de notre temps, c'était pire', on l'entend à longueur de temps", explique une interne en neurologie, qui met cela sur le compte "du mythe du sacrifice du médecin". Mais en réalité, beaucoup d'internes ont le sentiment que les conditions d'exercice à l'hôpital sont plus dures aujourd'hui. "Avant, on n'était pas appelés en permanence pour rendre un avis sur la moindre douleur", explique un interne en chirurgie digestive à Paris. "Maintenant, tout le monde cherche à se couvrir pour éviter l'erreur médicale, et surtout tout le monde cherche à refiler les patients à d'autres services, pour désengorger le sien."

LES PATIENTS, TOUJOURS PLUS NOMBREUX

Le trop grand nombre de patients est une souffrance quotidienne, surtout pour ceux qui tiennent à rappeler qu'ils "sont là parce qu'ils aiment leur boulot et veulent passer du temps avec leurs patients". Le défilé des urgences est surement le plus révélateur, pour les internes qui s'y essaient. "A 4 heures du matin, alors qu'on n'a même pas eu le temps de se reposer quelques minutes, on voit des gens arriver pour tout et n'importe quoi : des angines, des maux qui traînent depuis des mois, des bobos de rien du tout." Garder son calme, dans ces cas là, est un défi permanent.

Chaque interne dit redouter le moment où, lâché sans filet dans son service, il ira "trop loin". Cette "zone rouge" décrite par Guillaume, interne à Belfort, "celle où tu peux faire une gaffe, où il n'y a pas de retour en arrière possible". D'autant que pour ceux à qui on impose de rester en lendemain de garde, la responsabilité en cas d'erreur est entièrement à la charge de l'interne. "Mais on prend le risque, parce que si on se fait saquer, c'est fini, on n'a plus aucune chance d'approcher du bloc opératoire, et pour nous ça veut dire plus de formation, et autant d'études pour rien", explique un interne en 2e année de neurochirurgie, qui travaille en moyenne cent heures par semaine.

"SI J'AVAIS SU, JE SERAIS PAS VENUE"

Face à toutes ces difficultés, la question de savoir si tout ça "vaut le coup" trotte forcément dans les méninges de ces étudiants bien particuliers, excédés par les conditions matérielles précaires de l'hôpital public, où on peut même "attraper des puces dans le lit de garde" de son service. Certains parlent de "tout plaquer", de prendre une année de disponibilité, mais cela signifie repousser d'autant la fin des études.

A lire : Futur médecin, 'bac +10, 80 heures par semaine, 2 000 euros'

Beaucoup connaissent quelqu'un autour d'eux qui est au bord de craquer. "Je me suis rendu compte que j'étais en burn-out alors que je conduisais pour rentrer chez mes parents, après vingt-et-un jours de boulot consécutif. J'étais sur la quatre-voies, et je me suis demandé si c'était un rêve ou la réalité. J'ai réalisé à quel point j'étais épuisée", explique Nathalie, 27 ans. Dans ce cas là, "on se rend compte à quel point on est seuls, on n'a aucun interlocuteur". "On perd le sens de ce qui est normal ou de ce qui ne l'est pas", explique une interne en neurologie, qui affirme que le plus difficile est de "prendre du recul" sur ce rythme infernal.

Autour de la table de formica du petit internat de l'est de la France, certains parlent de "ras-le-bol". "Le soutien, on ne l'a jamais, on n'a pas le droit de craquer", reprend une jeune interne qui achève son stage aux urgences. Autour d'elle, les gens acquiescent. Une autre ose, sur le ton de la plaisanterie, "si j'avais su, je serais pas venue". Des hochements de tête saluent le bon mot.

Charlotte Chabas

 

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9 octobre 2012 2 09 /10 /octobre /2012 19:55

 

 

 

Les ministres des finances des 17 pays de la zone euro ont signé lundi 8 octobre à Luxembourg l'acte mettant en place officiellement le Mécanisme européen de stabilité (MES) de 500 milliards d'euros devant servir à recapitaliser les banques sans grever la dette des États. La prochaine étape est la création d'un mécanisme commun de supervision bancaire, prévu au plus tôt au début de l'année 2013.

Le même jour, le Fonds monétaire international (FMI) a revu son pronostic estimant que « la crise de la zone euro s'est aggravée en dépit des décisions politiques visant à la résoudre ». Le Fonds ajoute que cela « suggère que la faiblesse se répand de la périphérie vers l'ensemble de la zone euro », touchant tous les pays, y compris l'Allemagne. Il s'attend désormais à une récession de 0,4 % en zone euro cette année, contre 0,3 % dans ses précédentes prévisions en juillet, et ne prévoit une croissance que de +0,2 % en 2013 contre +0,7 % précédemment. « Si des actes supplémentaires ne sont pas mis en œuvre rapidement, l'amélioration récente sur les marchés financiers risque de n'être qu'éphémère », estime l'institution.

En ce qui concerne la France, le FMI pense que Paris ne respectera ni cette année ni l'an prochain ses engagements chiffrés de réduction du déficit public. Le produit intérieur brut (PIB) de la France devrait progresser cette année de 0,1 %, contre 0,3 % escompté en juillet, et de 0,4 % l'année prochaine, deux fois moins que prévu cet été. Le déficit de l'État, des collectivités locales et de la Sécurité sociale sera plutôt de 4,7 % du PIB fin 2012 et de 3,5 % fin 2013. Le taux de chômage s'aggraverait de 10,1 % en 2012 en France et 10,5 % en 2013 après 9,6 % en 2011. L'inflation annuelle moyenne, de 2,1 % en 2011, devrait être de 1,9 % cette année et décroître à 1,0 % en 2013.

Lundi toujours, 8 000 manifestants ont défilé à Athènes en scandant des slogans anti-austérité et en brandissant des banderoles contre la visite de la chancelière allemande Angela Merkel, mardi 9 octobre, en soutien aux mesures d'austérité mises en place par le gouvernement de coalition d'Antonis Samaras.

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9 octobre 2012 2 09 /10 /octobre /2012 18:24

 

Compte rendu | Le Monde.fr | 01.10.12 | 15h02   •  Mis à jour le 09.10.12 | 16h12

 
 

 

Jorge Sampaio, l'ancien chef de l'Etat portugais, à la tribune de l'Assemblée nationale en France.

Jorge Sampaio, l'ancien chef de l'Etat portugais, à la tribune de l'Assemblée nationale en France.AP/CHARLES PLATIAU


Dans un chat, mardi 9 octobre, Jorge Sampaio, ancien président de la République du Portugal analyse l'état de la démocratie dans le monde, spécialement en Europe.

Dans un chat, mardi 9 octobre, Jorge Sampaio, ancien président de la République du Portugal analyse l'état de la démocratie dans le monde, spécialement en Europe.

 

André : Pourquoi à votre avis, la démocratie semble avoir reculé ?

Jorge Sampaio : Je pense que la démocratie ne recule pas. Au contraire, elle avance. C'est peut-être paradoxal parce qu'elle avance alors qu'elle fait face à de nouveaux défis et qu'il faut peut-être la redéfinir.

Je voudrais récupérer ici la définition de "démocratie" à partir d'un auteur indien assez connu, Amartya Sen, professeur, prix Nobel d'économie en 1998. J'en retiens deux idées phares :

1) la démocratie est un concept uniquement occidental qui serait inadapté aux autres civilisations. Cela veut dire que je refuse une conception trop réductrice de la démocratie, résumant celle-ci aux élections libres et au pluralisme des partis, même si ce sont des choses essentielles.

La démocratie doit être appréhendée plus globalement - d'après cet auteur - comme une culture de la délibération, du débat public, qui n'est nullement exclusif à l'Occident. Et nous nous souvenons bien entendu qu'il y a de nombreux exemples au sein des civilisations asiatiques, arabes, africaines, qui effectivement mettent en exergue le pluralisme des racines de la démocratie. A partir de ce constat, il faut redéfinir le système démocratique, souligner sa vocation à l'universalité, sachant qu'il représente une source incontournable de progrès social.

C'est pour cela, si je regarde la situation d'un point de vue général, qu'il faut mettre en exergue ce caractère fondamental de la démocratie comme gouvernement par la discussion, ce qui requiert bien sûr que le débat public soit pris au sérieux et canalisé par des moyens d'information, de communication libres et responsables.

2) Ce gouvernement par la discussion - c'est essentiel - est soutenu par la quête de réaliser une société juste. Je voudrais dire aussi que la démocratie est un moyen, dans une société humaine, essentiel. Elle n'est pas un but en soi. Effectivement, la démocratie, ainsi que les droits de l'homme, est un moyen pour réaliser l'équité. Même s'il est impossible, malheureusement, de réaliser parfaitement une société juste, cela n'exclut certainement pas qu'on fasse tout pour éliminer ce qui est manifestement injuste. C'est ici précisément que les défis se posent.

 

Visiteur : Parler de racines de la démocratie sous-entendrait quand même qu'elle est exogène aux différentes civilisations que vous venez de citer. Est-ce le cas ?

Jorge Sampaio : C'est précisément le contraire. Je viens de dire que le concept de démocratie n'est pas un concept uniquement occidental, ce qui veut dire qu'il y a de nombreux exemples au sein de plusieurs civilisations. Ce qui n'est pas du tout la même chose, c'est de dire qu'il n'y a qu'un modèle. Il y a des choses essentielles dans ce modèle, mais des manifestations qui sont toujours démocratiques, à mon avis.

 

Louis : Comment expliquez-vous le fossé qui se creuse entre les pouvoirs et les sociétés ?

Jorge Sampaio : En regardant l'Europe, je me place du côté des Etats nationaux. Il faut absolument, par exemple, que les citoyens se reconnaissent dans la construction d'une Europe démocratique et surtout, qu'ils aient la possibilité d'avoir leur mot à dire.

Aujourd'hui, ce que la crise montre, c'est qu'il y a des épreuves très sérieuses au niveau des Etats nationaux. Je vous donne quatre exemples qui essaient de répondre largement à la question.
Au niveau économique, que faire du chômage croissant et de la perte de vitesse économique ? Autre question essentielle pour l'avenir ; au niveau des fonctions de l'Etat providence, comment garantir cette fonction essentielle à mon avis de l'Etat en tant que garant de la cohésion, de l'égalité entre les citoyens, de la justice sociale, etc. ? Troisième point : au niveau de la gouvernance de la diversité culturelle, comment réconcilier la diversité croissante de nos sociétés et la cohésion identitaire ?
Et cela autour de quelles valeurs ?

Finalement, je rejoins la question du début : il y a un paradoxe politique énorme aujourd'hui en Europe : les gens continuent à être européens même si la statistique en sa faveur diminue. Nous sommes plongés dans la globalisation, et l'Europe en tant qu'Europe est la seule réponse collective et multilatérale. Mais en même temps, les gens, dans chaque pays, sont pour certains plus nationalistes que jamais, et sont concernés par des problèmes immédiats et des incertitudes qui sont aujourd'hui un peu partout.

Il y a donc deux tensions contradictoires : la nécessité d'une vision multilatérale qui puisse attaquer les problèmes globaux, et de l'autre côté, le chômage, les nouveaux problèmes d'insécurité au niveau des entreprises, au niveau des retraites, etc. Cela incite les gens à une certaine méfiance vis-à-vis des partis politiques et des politiques en général. C'est très dangereux, et il faut faire un nouvel effort pour rapprocher les citoyens des institutions politiques.

 

Visiteur : Est-ce encore aujourd'hui possible de concilier démocratie et mondialisation ?

Jorge Sampaio : Ce qu'il faut, c'est précisément essayer de trouver une réponse dossier par dossier, de traduire les défis globaux dans davantage d'équité et de solidarité au niveau des Etats nationaux.

C'est la grande question, nous sommes plongés dans une globalisation interminable, nous avons besoin d'une gouvernance mondiale, les institutions internationales datent de la fin de la guerre de 1939-1945, et le monde a beaucoup changé entretemps. Nous avons besoin d'une nouvelle articulation entre les institutions à créer de la gouvernance mondiale, qui n'existe pas, et les institutions au niveau régional et au niveau national. Un exemple : on est passé du G7 à G8, du G8 au G20, mais que signifie cela au niveau de la gouvernance mondiale ? Il y a des manques énormées là-dessus.

 

Marina : Peut-on gouverner tout en étant proche du peuple, sans cynisme ni mépris tout en évitant les pièges du populisme ?

Jorge Sampaio : J'espère que les citoyens se sentent représentés par ceux qui sont élus. C'est une question de système électoral, de transparence, de démocratie au niveau local, de connexions avec les réseaux sociaux qui existent maintenant et ont une influence croissante, même si c'est insuffisant pour la constitution d'institutions.

La proximité est quelque chose d'essentiel. Un exemple populiste : si un membre du gouvernement se déplace dans une voiture Renault haut de gamme, noire, dans certains quartiers, c'est terrible, même si on ne doit pas s'aligner sur cette sorte de raisonnement. Il faut donc trouver les moyens de la proximité. Ici, je vois les mairies, les comités de quartier, les écoles, les professeurs, qui sont des agents nouveaux de participation avec lesquels on doit compter. Les syndicats sont essentiels, mais ne représentent pas tout le monde du travail, en fin de compte, et c'est cela qui est difficile.

Autre exemple : une mairie va faire un plan d'urbanisation d'un quartier. Comment consulter les gens ? Comment les faire participer ? On peut donner des milliers d'exemples. Nous sommes donc dans une société en transition qui essaie de traduire une façon que je qualifierai de modérée - en combattant les extrémismes -, en trouvant les consensus pour faire avancer les progrès.

C'est peut-être très théorique, mais d'après mon expérience comme maire ou président de la République, au-delà des angoisses, au-delà des fondamentalismes et des extrémismes, il faut établir un dialogue profond, une connaissance et une éducation de l'autre, et en cela je rejoins ce que j'ai dit en commençant : il faut avoir comme but de réaliser une société juste, une gouvernance responsable, et une culture de débat public, qui est aujourd'hui difficile à organiser.

 

Paulo : L'austérité qui sévit dans les pays du sud de l'Europe peut-elle détruire les démocraties ?

Jorge Sampaio : Excellente question pour un ancien président de la République d'un pays du sud de l'Europe. C'est évident, je vois ce qui se passe dans d'autres pays du sud. Pendant des décennies, on parlait de l'Europe, maintenant on parle d'Europe du Nord et d'Europe du Sud, et je déteste ça, car cela signifie la fin d'une solidarité nécessaire. Mais je dois dire que l'austérité pour l'austérité, l'austérité à outrance peut nuire terriblement à la démocratie.

Pourquoi ? Parce que la démocratie nécessite de l'espoir. Et si on ne voit pas la fin du tunnel, l'espoir s'en va, il y a des gens prêts à croire à n'importe quoi, et c'est ainsi que les extrémismes sont en train de fleurir.

 

Lévi : Considérez-vous que l'Europe se fait, pratiquement dès le début, sans ses citoyens ?

Jorge Sampaio : La fondation de l'Europe a effectivement donné de nouvelles racines à la paix, et la paix est bien sûr la chose la plus belle que les citoyens peuvent avoir. A partir du moment où la bureaucratie de Bruxelles et les décideurs politiques risquent de perdre leur but au niveau de la solidarité générale, à cause de pressions de toute sorte, on court le risque de voir les citoyens se distancer de l'Europe.

C'est là qu'on voit encore une fois cette contradiction : quand on a un référendum, les gens se prononcent sur tout sauf sur l'Europe. Un exemple : il faut essayer de faire des élections pour le Parlement européen le même jour dans toute l'Europe. Il faut avoir des partis vraiment européens par l'addition des partis nationaux. Je sais que c'est difficile, mais il faut donner aux citoyens la raison d'être, il faut leur faire comprendre que quand ils votent il votent pour l'espace européen, qu'ils soient concernés par les 27 pays.

Enfin, il y a énormément de choses à faire pour rapprocher les citoyens de l'Europe. C'est toute une nouvelle réalité que j'ai essayé d'exprimer. Les choses ne sont pas ce qu'elles étaient il y a cinquante ans, les nouvelles générations ont d'autres aspirations, et il y a d'autres défis d'une complexité énorme.

 

Claire : La démocratisation de l'UE doit-elle nécessairement passer par la perte de souveraineté des Etats membres ?

Jorge Sampaio : Il est clair que dès le commencement il y a eu des petits transferts de souveraineté au niveau des institutions européennes. A titre personnel, je pense que pour défendre l'idée d'une Europe solidaire et qui cherche l'équité, il faut renforcer démocratiquement certaines institutions européennes.

Par exemple, j'ai toujours été en faveur de la création d'un Sénat au niveau de l'UE, bien avant le traité de Lisbonne. Ce serait une façon essentielle de renforcer le caractère démocratique de l'Europe et de faire respecter le principe d'égalité des Etats. Et de protéger la souveraineté. Plus précisément, un Sénat, comme une deuxième chambre à côté du Parlement européen qui siège aujourd'hui. Je ne vois pas d'autre manière institutionnelle de respecter le principe de l'égalité des Etats. Autre possibilité : l'élection du président de la Commission européenne directement par le peuple.

En résumé, je suis concerné par ce qui se passe en France, et ce qui se passe au Portugal concerne les Français. Il faudrait que cela soit valable dans les 27 pays.

 

Anonyme : Démocratie globalisée et capitalisme occidental peuvent-ils aller de pair ?

Jorge Sampaio : On voit qu'il y a des difficultés croissantes. En tant qu'homme de gauche, qui essaie de trouver des réponses aux défis modernes, je pense que le grand défi est précisément de construire une alternative. Et pour le moment, je dois avouer que c'est très difficile. Mais je garde l'espoir. J'espère qu'on pourra avancer sur la régulation, mais je sais aussi que les forces majeures du monde de la finance sont supérieures à l'économie réelle. Et je voudrais bien que le politique en tant que tel puisse dominer, réguler le monde de la finance.

 

Visigoth : Quelle est, très franchement, la responsabilité des politiques dans cette désaffection à l'égard de la politique et de la démocratie ?

Jorge Sampaio : Je pense que c'est quelque chose de très partagé. Mais il faut combattre le désespoir à tous les niveaux. Pour avoir une société démocratique, il ne faut jamais s'arrêter d'innover, de proposer. Il ne faut jamais perdre l'espoir.

 

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9 octobre 2012 2 09 /10 /octobre /2012 16:56

 

 

Le Monde.fr avec AFP | 09.10.2012 à 17h34 • Mis à jour le 09.10.2012 à 17h58 


Michèle Delaunay, ministre aux Personnes âgées, a prévu d'instaurer une nouvelle taxe de 0,15% sur les retraites en 2013.

Plus des deux tiers des retraités (70 %) vont payer le nouveau prélèvement instauré dans le cadre du budget de la Sécurité sociale, soit environ 10 millions de personnes, a-t-on appris mardi 9 octobre dans l'entourage de la ministre aux personnes âgées, Michèle Delaunay.

Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), le gouvernement a prévu d'instaurer un nouveau prélèvement sur les retraites de 0,15 % en 2013 pour renflouer les comptes de la Sécu, puis de 0,3 % en 2014 pour financer la dépendance des personnes âgées.

 

 LA CONTRIBUTION SOLIDARITÉ AUTONOMIE

De fait, il s'agit de soumettre certains retraités à la contribution solidarité autonomie (CSA), créée en 2004 pour financer la dépendance des personnes âgées, alors qu'ils en sont actuellement exemptés.

Lire : Taxation des retraités imposables, le Rubicon est enfin franchi

Les retraités assujettis à la taxe seront les retraités imposables à la CSG au taux réduit de 3,8 % (qui ne payent pas l'impôt sur le revenu mais s'acquittent de la taxe d'habitation), soit 15 % des retraités, ainsi que les retraités imposables à la CSG au taux de 6,6 % (qui payent l'impôt sur le revenu), soit 55 % d'entre eux, a-t-on indiqué dans l'entourage de Mme Delaunay.

Ce sont plus de 10 millions de retraités qui devraient payer cette taxe, qui doit rapporter 350 millions d'euros à la Sécurité sociale en 2013. La semaine dernière, Michèle Delaunay avait précisé que cette contribution représentait 1,80 euro par mois pour une retraite moyenne de 1 200 euros bruts.

 

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8 octobre 2012 1 08 /10 /octobre /2012 16:42

 

Marianne - Lundi 8 Octobre 2012 à 16:45

 

Journaliste économique à Marianne En savoir plus sur cet auteur

 

Le statut d'autoentrepreneur n'en finit pas de dévoiler ses vices cachés. En plus de permettre à certains employeurs de contourner le droit du travail, il est désormais des cas de fonctionnaires, notamment un membre du conseil d'Etat, qui cumulent des activités dans le secteur privé...

 

CHAUVEAU NICOLAS/SIPA
CHAUVEAU NICOLAS/SIPA
Alors qu'il permet à certains employeurs de contourner allègrement le droit du travail, le statut d'autoentrepreneur a encore de beaux jours devant lui, puisque le gouvernement n'envisage de mettre fin qu'aux avantages fiscaux et sociaux qu'il comporte. Et pourtant, ce dispositif est porteur de nombreuses dérives, à commencer par un cumul de fonctions plus que curieuses qui permet aux fonctionnaires d'exercer également une activité dans le secteur... privé. Ainsi, que faut-il penser du cas de ce magistrat au Conseil d'Etat (la plus haute juridiction administrative) devenu petit entrepreneur dans le business du conseil en droit ? Laurent Olléon, maître des requêtes au Conseil d'Etat, bombardé récemment directeur de cabinet de la ministre déléguée chargée de la Décentralisation et compagnon de Fleur Pellerin, la ministre déléguée chargée des PME, de l'innovation et de l'économie numérique, a aujourd'hui mis sa petite «structure» en veille.

Pas assez vite cependant pour faire oublier que, depuis 2009, ce magistrat a multiplié les prestations auprès de lobbies. «Ma mission auprès de l'Association des régions de France (ARF) était connue de ma hiérarchie, se défend-il. D'ailleurs, auparavant, d'autres membres du Conseil d'Etat assuraient ce job.» Pour le magistrat, c'est évident : sa mission n'a pas d'autre vocation que l'enseignement. «Le statut de la fonction publique permet aux fonctionnaires, y compris aux membres du Conseil d'Etat, l'enseignement et, par extension, l'activité de formation», rappelle Jacques Arrighi de Casanova, nouveau patron de la Commission de déontologie de la fonction publique. Pourtant, recevoir des émoluments d'une association dont les membres, à savoir les régions, pourraient demain avoir un dossier en contentieux devant le Conseil d'Etat, est-ce vraiment raisonnable ?

Pour Daniel Lebègue, patron de Transparence France International, c'est non : «Le rapport de Jean-Marc Sauvé [vice-président du Conseil d'Etat] sur les conflits d'intérêts est clair: ils sont inévitables. C'est donc aux fonctionnaires de faire attention à ne pas en multiplier les occurrences possibles, et ce fonctionnaire-là a l'air de l'avoir oublié.» Du côté du Conseil d'Etat, on est visiblement gêné. «Laurent Olléon a bien obtenu un agrément pour l'ARF, comme le confirme un porte-parole de l'institution, nous ignorions que cela se faisait sous le statut d'autoentrepreneur.» Autrement dit, l'institution ignorait qu'il y avait eu facturation et surtout que le magistrat offrait en réalité ses services au marché.

Suite à l'enquête de Marianne, Jean-Marc Sauvé a décidé de saisir le Collège de déontologie de l'institution. Ses membres pourront relever la liste des clients de Laurent Olléon où figure, par exemple, le cabinet de lobbying Boury Tallon & associés - une mission oubliée, alors que Tallon et Olléon sont copains de promo d'HEC et ont monté une boîte ensemble -, qui organise en mai 2011 un séminaire de formation sur les lois de finances et le débat budgétaire à destination des directeurs et responsables des affaires publiques d'entreprises. Un événement qui se conclura, ainsi que l'indique la plaquette, sur un déjeuner «autour de Philippe Marini». Bref, une mise en bouche avec le très puissant sénateur de la commission des Finances du Sénat, connu pour son ouverture d'esprit aux lobbyistes, en présence de notre conseiller d'Etat, spécialiste de la fiscalité, qui aura peut-être plus tard à apprécier certains montages juridiques faits par ces mêmes grandes entreprises.

On peut se féliciter qu'un tel mélange des genres soit soumis au Collège de déontologie du Conseil d'Etat. Mais lorsqu'on l'interroge sur le nombre d'agréments donnés à ses magistrats pour cumuler des activités privées, et sur la nature de ces activités, le Conseil d'Etat dit ne rien savoir. Ou ne rien vouloir savoir ?

Article complété à 18h19
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8 octobre 2012 1 08 /10 /octobre /2012 16:34

 

Rue89 - Le Yéti - yetiblog.org

Publié le 08/10/2012 à 00h32

 

 

Samedi 6 octobre, alors que l’opération de police battait son plein, suivie en quasi directe par les médias comme de bien entendu, France Info annonça une action contre des « salafistes ». Il fut aussi révélé que le chef présumé du dangereux « réseau » de « terroristes » « islamistes » « radicaux », se prénommait... Jérémie !

Ce diable de Jérémie était mort les armes à la main (Magnum 357, on ne se prive de rien dans les jardins d’Allah), non sans avoir balancé au préalable sa purée de plomb sur le casque d’un poulardin miraculé.

On apprenait deux/trois autres choses intéressantes à propos de ce sulfureux personnage au fil des dépêches incendiaires. AFP, via Libé :

« Jérémie, qui s’est radicalisé progressivement en arrêtant l’alcool et en allant rencontrer des imams dans des pays du Maghreb... »

Bon, on a les lieux de désintoxication qu’on peut. La mosquée vaut peut-être mieux, finalement, qu’un café du « Joyeux chasseur » où un repenti sirote tristement son verre d’eau du robinet en lorgnant la bouteille de Ricard qui l’aguiche sur le zinc.

Un microbe sous-cutané

Mais le Jérémie en question, tout comme d’ailleurs ses compagnons de « cellule » (« des Français convertis » dixit Manuel Valls, en appuyant la charge : « des Français mu-sul-mans ») n’était pas seulement un soiffard invétéré. Mais bel et bien un ex-petit délinquant vaguement dealer et racketter sur les bords.

En plus il venait des « quartiers ». De NOS « quartiers ». Un microbe sous-cutané, en quelque sorte. Brice Hortef... Manuel Valls en est tout marri :

« C’est toute la difficulté... Il ne s’agit pas de réseaux terroristes qui viennent de l’extérieur, il s’agit de réseaux qui sont dans nos quartiers. »

Marrant, personne qui se demande pour quelle diantre raison, nos petites frappes de banlieues se transforment soudain en suppôts de Ben Laden. Personne qui ne s’inquiète de découvrir, dissimulée sous un austère niqab, une ravissante blondinette à yeux bleus qui, il y a encore quelques temps, déambulait en short-jean effrangé à ras le bonbon.

Personne qui ne se pose la question de savoir pourquoi toutes ces conversions se font systématiquement vers l’islam, et non vers le catholicisme ou le judaïsme.

Le diable est à l’intérieur

La réponse ne me paraît pourtant pas si compliquée. Qui, sinon la réaction islamiste, s’oppose aujourd’hui à ce monde occidental qui les cantonne dans des ghettos ? Qui les rejette en les accusant de communautarisme ? Qui leur enlève absolument tout repère, tout modèle sur lequel se construire et tout espoir d’y parvenir un jour ?

Je serais Claude Gué... Valls, je me méfierais que cette contamination ne déborde les « quartiers » pour toucher l’immense masse des jeunes sans avenir, sans travail.

Tiens, je lui suggérerais même d’aller ausculter les faux-plafonds des commissariats d’où sont partis le policiers venus arrêter nos dangereux comploteurs. Voir si d’aventure, ces forces de l’ordre fonctionnaires ne recèlent pas quelques exemplaires sataniques de corans extorqués à leurs proies. Et comment est organisé en douce le ramadan dans leurs casernes. Sait-on jamais.

Diversion

Parce que vous avez vu, ça tombe quand même assez bien ce martial coup de filet. Juste assez, dis donc, pour remplacer dans les manchettes l’affaire des flics ripoux de Marseille nord.

D’ailleurs, écoutez l’exploitation émotionnelle qu’en font immédiatement nos responsables en titre, de Nicolas Sark... Hollande (« l’intransigeance qui sera celle des pouvoirs publics pour lutter contre le racisme et l’antisémitisme ») au pourtant bien effacé François Fill.. Ayrault (« la détermination entière de l’Etat à protéger les Français contre toutes formes de menaces terroristes »).

Demain, paraîtront à coup sûr des sondages signifiant qu’une majorité de Français (pas convertis pour un sou) soutient mordicus l’action de son gouvernement.

Et petit à petit, il sera donné raison à l’analyse du sociologue Michel Wieviorka condamnant d’un seul tenant les dangers du communautarisme intolérant et du nationalisme à œillères.

On ne va pas reprocher au gouvernement du président Hollande de lutter contre la délinquance sous toutes ses formes. Mais en procédant de façon partialement et grossièrement stigmatisante, la bande de notre Mister Pédalo ne garantit pas seulement le triomphe commercial des bouchers halal. Elle allume la mèche d’un énorme pétard qui pourrait bien lui, nous, sauter à la figure.

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