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16 août 2013 5 16 /08 /août /2013 18:51

 

 Médiapart

 

|  Par lorraine kihl

 

 

 

La chaîne de magasins hard discount Aldi profite de la précarité de ses salariés pour leur faire faire des heures supplémentaires à l’œil. Malgré un sévère redressement de l’Urssaf, il est plus intéressant pour l’entreprise de payer les amendes plutôt que de se conformer au droit du travail. Des syndicalistes ont écrit au ministre.

La note avait été salée. En janvier 2012, l’Urssaf priait Aldi de lui verser 5,5 millions d’euros au titre des cotisations sociales non versées pour les milliers d’heures de travail que l’entreprise avait omis de déclarer. L’organisme de la sécurité sociale, alerté par des incohérences comptables, avait mené une vaste opération de contrôles dans tout le pays, vérifiant la comptabilité des années 2007 à 2009. Il apparaissait alors que la chaîne de magasins avait recours de manière généralisée et systématisée au travail dissimulé.

Aldi et ses clones ont conquis environ 40 % du marché allemand de la grande distribution, contre seulement 12 % en France. Fondée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la chaîne a fait de ses deux fondateurs, les frères Albrecht, les hommes les plus riches du pays. La success story de la consommation à très bas coût s’est faite au prix des conditions de travail de ses salariés, dévoilées progressivement, au fil des années, par la presse allemande.

Si l’Urssaf a recouvré les sommes qui lui étaient dues, les salariés, eux, n’ont pas vu la couleur de l’argent qui aurait dû leur revenir. Selon les syndicats, plus d’un an plus tard, la situation demeure inchangée. Début juillet, l’inspection du travail a de nouveau épinglé la centrale de Toulouse du discounter allemand pour travail dissimulé.

Le travail dissimulé comprend aussi bien le travail au noir (le « salarié » est payé mais pas déclaré) que le travail non rémunéré. Le seul moyen pour le salarié d’être indemnisé est de porter le litige aux prud’hommes. En cas de rupture de contrat, un dispositif lui permet de récupérer une indemnité forfaitaire de six mois de salaire. L’employeur peut être redressé par l’Urssaf – comme dans le cas d’Aldi – mais aussi sanctionné pénalement, avec une amende de 250 000 euros. Voilà pour la théorie.

 

 

« Les outils législatifs ne manquent pas vraiment, en matière de travail dissimulé, explique un avocat spécialisé dans le droit du travail. Le problème, c’est qu’un texte n’est pas auto-réalisateur. Même lorsque l’inspection du travail fait un PV, il est rare que le parquet entame des poursuites. » Le procès-verbal établi par l’inspection du travail permettra aux syndicats de se porter partie civile, mais ils ont peu d’espoir que le procureur donne suite. « On essaie d’encourager les salariés à faire de même mais la plupart ne peuvent pas prendre le risque d’être courageux », regrette Daniel Auseski, délégué syndical à Ennery (Moselle) et secrétaire du comité d’entreprise (CGT).

D’après les syndicats, Aldi favorise le recrutement d’une population fragile (mères célibataires, femmes en instance de divorce, jeunes) qui ne pourront pas s’offrir le luxe de jouer leur place. « Intenter une action représente non seulement un risque mais demande de l’argent et du temps, note un avocat. Or quand on travaille jusqu’à 19 ou 20 heures, que l’on doit ensuite s’occuper des enfants, il ne reste que les week-ends. Et alors les permanences syndicales et les cabinets d’avocats sont fermés. Sans compter que les procédures ont un coût. »

Dans un documentaire diffusé en janvier, Frédéric Brunnquell décrivait les conditions de travail des salariés d’Aldi et de son jumeau et concurrent Lidl : horaires insensés, harcèlement, suspicion permanente… (voir l'émission d'Arrêt sur image).

Ainsi, pour retenir les employés, Aldi utilise la paie. Réputé meilleur payeur que la concurrence, la chaîne joue sur la prime d’intéressement pour encourager ses salariés à faire des heures supplémentaires non déclarées. Le bonus est calculé en fonction du chiffre d’affaires du magasin et ramené au nombre d’heures travaillées, afin de juger de l’efficacité de vente des employés. Du coup, en notant les heures réellement effectuées le ratio diminue et la prime avec. « Mais même dans un magasin qui fait beaucoup de chiffre, la prime est loin de représenter l’équivalent des heures supplémentaires effectuées », assure Daniel Auseski.

Les responsables des magasins sont les plus touchés. Caisse, rayonnage, stocks, contrôles qualité, comptabilité, sécurité, propreté, ils doivent gérer tout le magasin avec, généralement, un seul autre employé et sur des plages horaires pouvant aller de 8 heures à 20 heures. 

Sapin « botte en touche »

© Reuters


 

 

 Nos vies discount, le documentaire de Frédéric Brunnquell

« Tant qu’il n’y aura pas de pointeuse, les abus continueront, estime Daniel Auseski. Mais la direction répond que les machines ne sont pas fiables. C’est sûr que remplir une feuille de papier sur laquelle les employeurs pourront ensuite passer un coup de correcteur est beaucoup plus fiable… » À l’Urssaf, on confirme à mots couverts que des signalements pour travail dissimulé continuent de leur parvenir.

Tous les acteurs interrogés le reconnaissent : il est plus rentable pour certaines entreprises de continuer d’ignorer le droit du travail, en payant des amendes ponctuelles que de s’y conformer.

Depuis quelques mois des syndicalistes tentent de faire voter une loi plus dissuasive pour les entreprises et protectrice pour les salariés. Le principe serait d’instaurer une indemnisation systématique des salariés lorsqu’une entreprise est convaincue de travail dissimulé, que ce soit par l’Urssaf, l’inspection du travail ou la justice. Avec une pareille loi, ce n’est pas 5,5 mais 11 millions d’euros qu’Aldi aurait dû débourser.

« On a tapé à toutes les portes, contacté députés et sénateurs qui tour à tour ont affirmé prendre le projet en main, avant de laisser tomber. On est allé jusqu’au ministre du travail, assure Daniel Auseski. Il a dit qu’il étudierait le dossier avec attention. » Il a pourtant fallu quatre mois à son cabinet pour répondre à une question écrite d’un député qui portait sur le sujet. Marc Dolez y demandait si Michel Sapin envisageait « de déposer un projet de loi pour permettre aux salariés victimes (de travail dissimulé, ndlr) d'être dédommagés automatiquement », sans que ceux-ci aient besoin de mettre un terme à leur contrat et d’aller aux prud’hommes. Dans le bref texte publié en retour le 6 août, le ministère s'en tient au droit et répond sur le seul travail au noir : « Si le contrat de travail se poursuit, l'objectif central doit être le rétablissement des droits du salarié par régularisation des cotisations dues. Aussi, l'indemnisation forfaitaire du préjudice n'a principalement de sens que dans l'hypothèse d'une rupture de la relation de travail. »

« Le ministère botte en touche ! » s’emporte Serge Matha. Ce syndicaliste retraité n’a jamais travaillé à Aldi mais il mène une croisade contre l’enseigne allemande depuis qu’il a découvert les conditions de travail de son fils et le harcèlement dont il était victime. « On va essayer de saisir la commission des loi », poursuit Serge Matha. Qu’il s’agisse d’une esquive ou de simple méconnaissance du sujet, le fait est que la lutte contre le travail dissimulé ne mobilise pas. Dans la plupart des métiers le travail dissimulé ne représente que quelques heures cumulées sur l’année. « Les députés devraient se sentir un peu plus concernés, reproche l’ancien syndicaliste. On parle de 4 200 employés à travers tout le pays et d’une réelle menace : le système Aldi devient un modèle pour toute la grande distribution. »

Contacté, Aldi s’en tient à sa ligne : on ne communique pas avec la presse (voir sous l'onglet Prolonger).

 

 

 

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