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6 octobre 2011 4 06 /10 /octobre /2011 13:32
Tefy Andriamanana - Marianne | Jeudi 6 Octobre 2011 à 15:01 


Une récente étude se penche enfin sur le quotidien des personnels chargés de la vidéosurveillance. Conclusion : ses caméras servent à beaucoup de choses mais pas forcément… à surveiller les rues.



Nicolas Sarkozy en a fait son dada. La vidéosurveillance était censée pallier les failles d’une police soumises aux baisses d’effectifs. Mais jusque récemment, il était difficile d’avoir une évaluation fiable du système. Une faille réparée avec le dernier rapport de la Cour des comptes  sur les politiques de sécurité pointant l’inefficacité d'un tel dispositif. En effet, il n’y a pas d’influence de la vidéosurveillance sur l’efficacité des services de police dans une commune donnée : « Le taux d’élucidation des faits de délinquance de proximité n’a pas davantage progressé dans ces CSP (circonscriptions de sécurité publique, à l’échelle d’une ou plusieurs villes) équipées de caméras de vidéosurveillance de la voie publique que dans celles qui ne le sont pas. » (page 148). 
 
L'étude du sociologue Tanguy Le Goff pour l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de la région Île-de-France va plus loin. Elle se base sur un travail ethnographique et des entretiens avec les personnels municipaux de deux villes de banlieue parisienne (non citées) équipées de caméras. « Alphaville » est une ville plutôt « bourgeoise » de 50 000 habitants, « Bétaville » est plus populaire et peuplée de 30 000 habitants.

Premier enseignement : il est humainement impossible que les opérateurs aient  vingt-quatre heures sur vingt-quatre leurs regards braqués sur toute la ville du fait du manque d’effectifs, le dispositif de surveillance étant à la charge des Mairies.  A Alphaville, les opérateurs sont censés être deux en permanence dans la salle de surveillance (avec des roulements) pour une soixantaine de caméras, mais avec les RTT, il arrive souvent qu’il n’y ait qu’un seul opérateur pour toute la ville. De plus, l’encadrement est très relâché, le ou les opérateurs étant le plus souvent autonomes. Bétaville est un peu mieux lotie, les opérateurs sont deux (bientôt 3) pour 28 caméras, et le chef de salle est plus impliqué. 

Méfiance des policiers municipaux
A quoi et surtout à qui servent ces caméras ? Ici, apparaît l’ambivalence du dispositif. Conçu comme un système dépendant de la Mairie, les caméras sont également destinées à aider la police nationale pour élucider les crimes et délits. Quitte à créer des bisbilles entre les services municipaux. L’étude de Tanguy Le Goff montre bien cette dualité. 
 
A Alphaville, le dispositif de vidéosurveillance est « au cœur de la chaîne pénale ». Et les opérateurs entretiennent de bien meilleures relations avec la police nationale qu’avec leurs collègues municipaux. « Cette grande proximité des opérateurs avec les policiers nationaux, le travail en collaboration direct expliquent que les policiers municipaux aient été méfiants à l’égard de leurs propres collègues municipaux perçus comme travaillant plus pour la police nationale que pour la municipalité » (page 21). 
 
Les discours officiels sur une plus grande implication des villes dans la sécurité via la vidéosurveillance et les polices municipales sont donc à relativiser. Mais le sociologue précise que le nouveau patron de la police municipale d’Alphaville a souhaité mettre fin à cette relation privilégiée entre opérateurs et policiers nationaux notamment en obligeant les opérateurs à passer par la police municipale pour avertir d’un problème sur la voie publique. 

Les policiers fliqués ?
Autre problème : les caméras peuvent être aussi utilisées pour assurer les arrières des policiers municipaux lors de leurs interventions. Mais ces derniers peuvent l'interpréter comme une mesure de « flicage » de la part de leur direction. Ce qui n’améliore pas la collaboration entre opérateurs et policiers : « La confiance entre les opérateurs et les policiers est déterminante car les policiers craignent que le regard protecteur de la caméra se transforme en un regard inquisiteur dont la fonction est moins de veiller sur eux que de contrôler ce qu’ils font. » (page 59). L’évolution technologique se heurte donc aux réalités sociales du travail de police. A trop miser sur la technique, on en oublie qu’il est difficile de changer les mentalités par arrêté municipal. 

L’étude de Le Goff montre également que l’image d’un Big Brother est quelque peu écornée par la réalité du travail des opérateurs de vidéosurveillance. Au delà du travail de surveillance générale de la ville et de recherche de flagrants délits, les personnels derrières les caméras font de multiples tâches qui les détournent de leur mission initiales.

Des surveillants qui ne surveillent pas
Pour le Goff, le temps accordé à la surveillance ne regroupe au maximum…que 60% du temps de travail des opérateurs : « Beaucoup d’autres activités prescrites ou qu’ils se créent pour rompre l’ennui de la seule surveillance, occupent leur temps de travail. Elles contribuent, avec les dysfonctionnements techniques des systèmes de vidéosurveillance, à limiter le temps effectivement consacré par les opérateurs à leurs missions de surveillance à distance » (page 36). Et plus les communes tailleront dans les effectifs, du fait du manque de moyens, plus ce détournement des opérateurs des activités de surveillance classiques augmentera.

Parmi les obstacles à la surveillance permanente, il y a tout d’abord les problèmes techniques. Pour le sociologue, au minimum 5% des caméras des deux villes tests sont indisponibles chaque jour. Et pour les réparer, les communes ne peuvent compter que sur elles-mêmes, l’Etat ne finançant que les nouvelles caméras et non le matériel existant. D’où la tentation de laisser les caméras sombrer définitivement pour pouvoir tout remplacer. L’aménagement urbain peut aussi poser problème : arbres, panneaux de signalisations. … autant de dispositifs qui peuvent nuire au champ de vision des caméras.

Autre difficulté : le temps pris par le travail… de relecture des images à la demande des policiers municipaux ou nationaux, les opérateurs assurant toute la chaîne de surveillance. Et bien souvent, cela ne mène pas à grand chose : « S’ils valorisent ces tâches de relecture, les opérateurs reconnaissent pourtant que, dans bien des cas, elles ne conduisent à aucune identification, en particulier la nuit car la visibilité des images est très réduite » (page 41).

Précarité
De fait, si les opérateurs n’ont pas les yeux rivés en permanence sur la ville, le niveau d’insécurité s’en ressent : « La démultiplication du regard sur l’espace public ne se traduit pas par une augmentation exponentielle du nombre de ‘flags’ et d’arrestations » (page 57).

La vidéosurveillance souffre aussi d’un problème de formation de ses personnels. « Jusqu’à il y a peu, en effet, aucune formation spécifique sur l’outil et l’environnement institutionnel dans lequel travaillent les opérateurs municipaux, n’existait pas. », écrit le Goff. Ce qui peut causer des problèmes pour le respect des procédures et donc l’efficacité de la chaîne pénale : « Ainsi, sur les deux sites, les opérateurs font des relectures d’images voire les gravent sans en avoir eu systématiquement une réquisition signée par l’officier de police judiciaire territorial » (page 51).

Sans compter la précarité dans le secteur et le manque de perspectives professionnelles : « Dotés de pouvoirs de surveillance importants tout en étant des travailleurs sans pouvoirs : telle est l’étonnante situation des opérateurs municipaux de vidéosurveillance » (page 60). Une situation bancale qui n’aide guère à motiver les personnels et nuit donc encore plus à l’efficacité de la vidéosurveillance. 
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