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25 février 2014 2 25 /02 /février /2014 16:04

 

Source : www.mediapart.fr

 

Les manifestations au Venezuela, premier test pour Maduro

|  Par Thomas Cantaloube

 

 

 

Nicolas Maduro est confronté depuis 15 jours à de vastes manifestations dénonçant les difficultés économiques croissantes du pays et la criminalité persistante. Une mobilisation qui a conduit le gouvernement à réagir très violemment, soulignant la faiblesse de Maduro, qui ne possède ni le charisme ni le talent politique de son prédécesseur Hugo Chavez.

Après plus de deux semaines de manifestations et une douzaine de morts dans les rangs des contestataires, les protestations se sont poursuivies en ce début de semaine au Venezuela. Si plusieurs médias sud et nord-américains y ont vu des similarités avec ce qui se déroule en Ukraine, voire en Thaïlande, la comparaison semble plutôt hasardeuse. Tout d’abord parce que le Venezuela est familier des grands (et parfois violents) mouvements populaires. Ensuite parce que le pouvoir du président Nicolas Maduro, le successeur et héritier désigné d’Hugo Chavez, semble solidement assis grâce à un mélange de soutien populaire et de main de fer autoritaire. Mais il n’empêche : selon la plupart des analystes qui observent ce qui se passe ces jours-ci à Caracas et dans les régions de l’ouest, ces manifestations sont bien le symptôme des difficultés de Maduro à s’imposer dix mois après son élection, et de la crise que traverse le « chavisme » en raison de ses choix économiques.

Les manifestations ont démarré début février dans la ville de San Cristobal, à l’ouest du pays, un des bastions de l’opposition, suite à la tentative de viol d’une étudiante. Ses camarades sont descendus dans la rue afin de faire part de leur ras-le-bol du climat d’insécurité qui règne dans leur ville et dans l’ensemble du pays. Le Venezuela a beau avoir cessé de publier ses statistiques criminelles depuis dix ans, plusieurs ONG qui compilent les crimes estiment que le pays pointe en troisième position mondiale en matière de criminalité, juste derrière le Honduras et le Salvador, avec 79 meurtres par 100 000 habitants (les États-Unis, en comparaison, affichent 4,7 homicides par 100 000 habitants, et la France 1,4).

La réaction des autorités a été d’arrêter les étudiants et, selon les plaintes de plusieurs d’entre eux, de les violenter en détention. Au lieu de calmer les protestataires, cela n’a fait que les enflammer et les manifestations ont fait boule de neige dans d’autres villes du pays, jusqu’à parvenir à la capitale. Très vite, la lamentation sur les problèmes d’insécurité a cédé la place aux revendications économiques, principalement l’inflation et les pénuries de biens essentiels. Aujourd’hui, malgré les mesures drastiques de contrôle des prix et les admonestations du gouvernement à l’encontre des entreprises et des commerçants, le taux d’inflation est l’un des plus élevés au monde : 56 % l’an dernier. Quant aux carences en biens alimentaires essentiels comme la farine, l’huile, le café ou le riz, qui durent depuis plus d’un an, elles résultent de plusieurs facteurs : contrôle des prix, contrôle des changes et dépendance extrême des importations. Dans un pays qui est un des plus gros exportateurs de pétrole et qui possède les plus grosses réserves d’hydrocarbures de la planète, cela paraît incompréhensible à de nombreux Vénézuéliens.

 

Un manifestant défile devant la police anti-émeutes à Caracas, le 12 février 2014 
Un manifestant défile devant la police anti-émeutes à Caracas, le 12 février 2014 © Jorge Silva/Reuters

Le gouvernement, quand il n’accuse pas la CIA d’être à l’origine de ces pénuries, reconnaît qu’elles existent (de même que l’inflation), mais il souligne, à juste titre, que ces maux sont compensés par les bénéfices étatiques offerts à plusieurs millions de citoyens des classes populaires, notamment grâce à des prix réduits pour l’achat de denrées alimentaires. Cela explique aussi pourquoi les manifestants actuels sont principalement issus des classes moyennes et aisées, qui acceptent mal les restrictions et les prix galopants.

Un économiste de l’Université de Caracas, qui se réclame d’un soutien « raisonné » au chavisme mais préfère ne pas être cité dans la presse étrangère, avance les explications suivantes : « La faiblesse de l’économie vénézuélienne est le résultat du modèle pétro-étatique qui a été poussé à outrance. L’augmentation considérable des prix du pétrole dans les années 2000 nous a permis de créer un système de subventions sociales qui a sorti des millions de personnes de la misère. Mais dans le même temps, le gouvernement a également tenu à contrôler les prix, les importations, et la distribution de devises, ce qui aboutit à des pénuries et à des marchés noirs parallèles. Aujourd’hui, bien que le prix du pétrole reste élevé, le gouvernement a de moins en moins d’argent. »

Là encore, le gouvernement ne publie pas de statistiques fiables mais le déficit budgétaire en 2012 et 2013 se serait élevé à respectivement 12 % et 17 % du PIB. La Chine, qui finance ce déficit, aurait récemment demandé que ses prêts soient gérés directement par Pékin, afin de mieux contrôler leur allocation. Dans un rare accès de franchise, ou alors de dissension polie dans les rangs des « chavistas », le vice-président en charge de l’économie, Rafael Ramirez, a déclaré il y a quelques mois dans un entretien télévisé : « Nous savons combien de dollars nous avons (tirés des ressources pétrolières, ndlr), mais le problème est que nous n’avons aucune planification pour les utiliser. Environ 30 % des fonds dépensés par le gouvernement sont détournés de leur objectif premier. » Gabegie, inefficacité, corruption, il ne s’est pas étendu, mais son message était clair. « Le paradoxe du chavisme », poursuit l’économiste de l’Université de Caracas, « est qu’il prêche le socialisme en même temps qu’il encourage le consumérisme. Cette approche n’est tenable que tant que l’argent du pétrole coule à flot et qu’il est utilisé efficacement. » 

La répression violente découlerait d’un gouvernement moins assuré de sa position

Après le succès et la spontanéité des premières manifestations début février, l’opposition s’est réveillée et a commencé à appeler à la démission de Nicolas Maduro. Mais, comme souvent au Venezuela, c’est l’opposition la plus radicale qui a été la plus véhémente, alors même que l’opposant de Chavez puis de Maduro à la présidentielle, Henrique Carpiles, s’est d’abord montré assez réservé avant de finalement prendre le train en marche. Le souvenir de la tentative de coup d’État de 2002 (Chavez fut « démis » pendant 36 heures), puis des manifestations de 2007, a conduit le gouvernement à réagir très violemment, ce qui a surtout eu pour effet de souligner la faiblesse de Maduro, qui ne possède ni le charisme ni le talent politique de son mentor et prédécesseur. L’accusation de « fascisme » a été brandie en permanence et à toutes les sauces contre les manifestants, les éternels boucs émissaires ont été vilipendés (les États-Unis, les médias étrangers, les « contre-révolutionnaires »), mais des groupes paramilitaires à moto, les « colectivos » ont été toutefois envoyés à proximité des rassemblements pour ouvrir le feu, avec des tactiques ressemblant à celles des « bassidji » iraniens. Des contre-manifestations de soutien au gouvernement ont été organisées et, si elles ont été massives, elles ont paru manqué d’enthousiasme.

Car même si Maduro essaie d’imiter Chavez, voire de faire dans la surenchère (dans la rhétorique et la poigne de fer), il ne possède pas sa capacité de conviction ni d’entraînement. Pour Yon Goicoechea, un des leaders étudiants de 2007, la grande différence avec ce qui s’est passé il y a sept ans est que « Chavez est mort. Les manifestants se battent donc contre un gouvernement plus faible, ce qui augmente leur potentiel de réussite ». La répression violente découlerait donc d’un gouvernement moins assuré de sa position. Même s’il est difficile de savoir ce qui se passe réellement à l’intérieur des cercles dirigeants, il est également possible que certains « chavistes » cherchent à affaiblir Maduro, notamment celui qui fut son principal concurrent pour la succession du « commandante », le président de l’Assemblée Diosdado Cabello. Si ce dernier a affiché son soutien au gouvernement, c’est néanmoins lui qui s’est montré pour escorter un des leaders de l’opposition, Leopoldo Lopez, quand celui-ci s’est rendu aux autorités, alors qu’il ne possède aucune autorité policière ou judiciaire…

 

 

Une attaque de "colectivos" filmée par un témoin

Depuis son accession au pouvoir, Nicolas Maduro s’est également attaché à museler les médias locaux et à intimider les médias étrangers comme cela n'avait jamais été entrepris sous Chavez. Depuis un an, presque tout ce qui restait de journaux ou de chaînes de télévision indépendants a été racheté par des proches du pouvoir et c’est désormais l’autocensure qui règne. Au point que plusieurs groupes de journalistes se sont rassemblés dans des comptes Twitter collectifs et anonymes afin de pouvoir s’exprimer librement sur les événements dans leur pays (voir ici ou ). Du coup, alors que les chaînes de télévisions ne parlent quasiment pas des manifestations qui se déroulent depuis deux semaines, ce sont les réseaux sociaux qui ont pris le relais, contribuant à déborder le gouvernement. « L’absence de couverture des événements et de décryptage du comportement erratique du gouvernement ne fait qu’aggraver la situation », explique Daniel Lansberg-Rodriguez, un analyste politique plutôt hostile au chavisme. « En tentant d’étouffer toute critique domestique, le régime court le risque de s’exposer à une contestation de plus grande ampleur. »

Alors que l’opposition commence à présenter un front uni, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici, elle a finalement refusé de rencontrer Maduro lundi 24 février. Cela signifie qu’elle entend capitaliser sur les mouvements de rue qui se poursuivent, mais aussi que les manifestations sont en train de basculer sur le terrain politique. Or l’opposition vénézuélienne a toujours été son propre pire ennemi depuis vingt ans. Clanique et représentant les classes privilégiées du pays, elle n’a jamais su tendre la main aux « chavistes » modérés des classes moyennes et populaires. Du coup, elle contribue à cliver la nation autant que les harangues de Maduro, pour qui il est facile de mobiliser les classes populaires qui ont toujours défendu Chavez.

 

 

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Source : www.mediapart.fr

 

 

 

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