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18 avril 2013 4 18 /04 /avril /2013 21:23

 

 

Médiapart

 

 

Jeudi matin, au deuxième jour du débat à l’Assemblée sur le mariage pour tous, un député de l’opposition a dérapé. Son nom : Philippe Cochet, député UMP du Rhône. « Nous devons toujours avoir en tête la défense du plus faible, lance l’élu à la majorité. Moi je vous accuse mesdames et messieurs de la gauche : Vous êtes en train de créer un précédent, vous êtes en train d’assassiner des enfants, c’est scandaleux ! »

Hurlements sur les bancs de la gauche, rappel à l’ordre de Claude Bartolone, suspension de séance. « Le terme n’était pas approprié », admettra ensuite Cochet. Trop tard. « L’opposition a franchi toutes les limites », tweete la porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem, dénonçant des « propos inacceptables ». « À entendre P. Cochet parler “d'assassins d'enfants”, c'est de rage que je pleurerais », réagit la députée écologiste Véronique Massonneau.


Vendredi soir, le Parlement devrait voter le mariage pour tous. Le scrutin solennel est prévu mardi. L’opposition le sait : le combat législatif est perdu. D’ailleurs, ses ténors ont discrètement abandonné le combat dans l’hémicycle, et bien des amendements ne sont pas défendus. Mercredi, ils n’étaient qu’une dizaine de députés de droite à siéger.

Pourtant, l’UMP ne lâche rien. Les quelques députés présents en séance continuent d’appeller à manifester. Ils attribuent même les violences au gouvernement et refusent de lancer tout appel au calme. Une attitude jusqu’au-boutiste, qui contribue, quoi que les responsables de la droite en disent, à alimenter un détestable climat homophobe.

Bien sûr, le parti de Jean-François Copé prend soin de se démarquer de toutes les violences homophobes, attribuées à des « groupuscules » d’extrême droite. Mais les faits sont têtus. Mercredi, alors que les députés étaient en train de débattre, les incidents de sont multipliés aux abords de l’Assemblée nationale, mais aussi dans plusieurs villes.

Deux bars gays ont été attaqués à Lille et Bordeaux. Deux attaques contre des établissements gays en quelques heures. Difficile de ne pas y voir un lien avec le climat actuel, marqué par une libération inouïe de la parole et des actes homophobes. Act-up appelle d’ailleurs à un grand rassemblement ce dimanche place de la Bastille contre le « déferlement de la haine ».

À Lille, ce sont quatre jeunes « de 25-35 ans », « crânes rasés » et « tatoués », qui ont investi un bar gay lillois en criant qu’il voulaient « casser du pédé », selon le patron du bar. « Ils ont pris des tables et chaises à l'entrée qu'ils ont lancées contre la vitrine, dégradée. Le regroupement de notre clientèle avec celle d'un bar en face leur a fait peur et ils se sont sauvés », raconte-t-il à Nord Éclair. Selon lui, « depuis l'annonce du mariage gay, ça part en vrille. On se sent de plus en plus en danger : j'ai l'impression qu'on est retournés vingt ans en arrière. »

Les quatre agresseurs présumés ont été placés en garde à vue. Il s’agirait de membres des groupuscules d’extrême droite “Jeunesses nationalistes révolutionnaires”, “Troisième Voie”, “Génération Identitaire”. La porte-parole de la Manif pour tous à Lille, Sophie Delpierre, fournit elle une drôle d’explication : « Peut-être que ce sont des initiatives citoyennes…, mais certainement pas des membres de la Manif pour tous » (voir les images de France 2, à 11’10).

Au même moment, des inconnus ont fait irruption dans un établissement gay de Bordeaux, blessant un client à coup de crosse. Les agresseurs ont pris la fuite, une enquête est en cours.

À Lyon, une quinzaine de militants des Jeunesses nationalistes ont tenté d'occuper la permanence du Parti socialiste, avec une banderole « Mariage, adoption, pas question », provoquant des échauffourées avec la police. Et deux députés socialistes de Vendée, Sylviane Bulteau et Hugues Fourage, ont fait l’objet de violentes intimidations des anti-mariage pour tous, qui ont menacé les élues « d’enlèvement », de les faire « sauter aux explosifs », ou encore de « saccager (leur) maison », selon Sylviane Bulteau.

François Hollande a condamné jeudi des actes « homophobes » et « violents », en rappelant qu'« aucune manifestation » ne devait « dégénérer ». Tout en rejetant tout « amalgame » avec la majorité du mouvement anti-mariage pour tous, Jean-François Copé a lui aussi dénoncé ces agressions dans un communiqué. En réalité, l’UMP s’en remet désormais à la rue pour faire plier le gouvernement, au risque d’encourager tous les dérapages d’un « mouvement social », décrit comme « paisible, joyeux » (« la France optimiste », « la France sourire », dixit l’UMP Hervé Mariton). Mais dont certains éléments prônent pourtant la haine homophobe.

L'UMP affirme ne pas souffler sur les braises. Pourtant, mardi soir, en amont des incidents, son président a envoyé un mail aux militants pour les encourager à participer « en masse » à la manifestation contre mariage pour tous du 21 avril et « montrer à ce gouvernement (...) que nous mènerons le combat jusqu'au bout » (lire notre condidentiel). Le parti a même affrété des bus pour dimanche.

« Taubira à Cayenne ! »


Le député UMP Daniel Fasquelle dans la manifestation derrière l'Assemblée nationale, le 17 avril. 
Le député UMP Daniel Fasquelle dans la manifestation derrière l'Assemblée nationale, le 17 avril.© M.T.


Mercredi, à la suspension de séance de 20 heures, plusieurs députés UMP ont ainsi ostensiblement rejoint la manifestation quotidienne des “anti”, derrière l’Assemblée nationale, bouclée par une armada de CRS et de hautes barrières.  

 

Hervé Mariton dans la manifestation. 
Hervé Mariton dans la manifestation.© M.T.

En tête d’un cortège de quelques milliers de personnes (2 400 selon la police, 8 000 selon le collectif), Frigide Barjot hurle des « François, on est là ! » et invite les manifestants à revenir défiler le lendemain, « chacun avec un ami » supplémentaire. « On est en train de faire l’Histoire ! » nous explique une manifestante, dont les amis ont été placés en garde à vue quelques jours plus tôt. J'ai fait toutes les manifs avec des amis, certains sont d'ailleurs homos et ils n'en font pas des tonnes, ils savent bien que ce n'est pas naturel, le mariage, c'est un homme et une femme. »


Frigide Barjot en tête de cortège, le 17 avril. 
Frigide Barjot en tête de cortège, le 17 avril.© M.T.

Vers 22 heures, alors que la manif est censée se disperser, plusieurs centaines de manifestants se massent devant le barrage de CRS, rue de l’Université. Les slogans fusent : « CRS en banlieue ! », « Taubira à Cayenne ! » et « Si t’es pas un flic en civil frappe dans tes mains ! » Dans la foule, des pancartes et sweat-shirts de la Manif pour tous bien sûr, mais aussi de nombreux drapeaux français, des soutanes, des drapeaux de l’organisation catholique intégriste Civitas.

 

Un manifestant devant le barrage de CRS, le 17 avril.  
Un manifestant devant le barrage de CRS, le 17 avril. © M.T.


Un groupe de jeunes se rassemblent (photos ci-dessous), se masquent le visage avec une écharpe et font l’état des lieux de leurs munitions sorties des sacs à dos : petites bombes lacrymogènes, fumigènes, un tambour décoré de la fleur de lys, emblème des royalistes.

 

 
© M.T.



 
© M.T.


Quelques minutes plus tard, les CRS reçoivent jets de fusées, bouteilles et pierres. Deux voitures de police et des biens publics sont dégradés, les vitres d’une voiture sont cassées. « Attention, on est filmés ! » lance un jeune type à un quinquagénaire qui vient d’envoyer une pierre sur les policiers.

 

Des manifestants devant le barrage de CRS, le 17 avril.  
Des manifestants devant le barrage de CRS, le 17 avril. © M.T.

Deux journalistes de LCP agressés

Plus loin, un groupe de jeunes court vers le pont Alexandre III aux cris de « À l’Elysée ! » Bloqués par des travaux sur le quai d’Orsay, ils créent une barricade avec les panneaux qu’ils lancent contre les policiers. Deux journalistes de la chaîne LCP qui assistent à la scène sont agressés : leur caméra est projetée à terre par un individu au crâne rasé portant un bouc (voir photo) ; en tentant la récupérer, ils reçoivent ensuite des coups à la tête et aux bras.

 

L'un des deux journalistes de LCP agressés par des manifestants.  
L'un des deux journalistes de LCP agressés par des manifestants. © Twitter / @denislaurent33
La caméra des journalistes de LCP cassée par des manifestants.  
La caméra des journalistes de LCP cassée par des manifestants. © Louis Baguenault

À l’issue de la manifestation, douze personnes ont été placées en garde à vue. Jeudi soir, Frigide Barjot a tenté de reprendre la main médiatiquement en demandant à Manuel Valls que « tous les groupuscules identitaires et nationaux soient préventivement mis hors d'état de nuire ». Elle-même avait pourtant dérapé le 12 avril, après l'adoption du texte par le Sénat, en déclarant « Hollande veut du sang, il en aura. »

Dimanche, alors que les députés auront fini d’examiner le texte, la Manif pour tous appelle, derrière Frigide Barjot, à une nouvelle manifestation au départ de Denfert-Rochereau. Quelques élus UMP devraient être présents pour un cortège qui sera surveillé de très près par les forces de l’ordre, sur les nerfs après les débordements de la dernière grande manifestation des anti, le 24 février. Laurent Wauquiez, qui fait de brèves apparitions, dit qu’il compte « descen(dre) encore dans la rue, car c’est un thème de conviction ».

Les principaux responsables du parti se retrouveront également le 26 mai, pour la grande manifestation anti-mariage pour tous, annoncée de longue date« Après votre victoire à la Pyrrhus, le combat doit se poursuivre sur d'autres formes, a lancé l’UMP Georges Fenech à la gauche. Les manifestations continueront et s'amplifieront. » Comme nombre de ses collègues, Christian Jacob, président du groupe UMP, continue de proclamer que son parti reviendra sur la loi si la droite est de retour au pouvoir.

Un peu seul contre son camp, l’UMP Franck Riester, l'un des deux seuls députés à avoir voté le mariage pour tous en première lecture, n’y croit pas une seconde. « On ne va pas s’engager à violer la loi, dire qu’on va revenir sur le texte est dangereux », dit-il à Mediapart.

Rien n’y fait. Pour l’instant, l’UMP reste sur sa ligne : encourager les manifestations de rue et condamner « avec la plus grande fermeté les paroles et les actes d’homophobie », tout en accusant le gouvernement de les avoir « attisés » (lire dans notre article).

Sauf qu’à ce jeu-là, le principal parti d’opposition risque bien d’être débordé par le Front national. Mercredi soir, à l’Assemblée nationale, Marion Maréchal-Le Pen, qui se verrait bien en nouvelle icône des anti-mariage, a livré un authentique discours d’extrême droite, justifiant tous les débordements. Les manifestants interpellés ? Des « prisonniers politiques », « je pèse mes mots ». Les indignations de la gauche ? Une « propagande antifasciste ». Pour la députée frontiste, la foule anti mariage pour tous est composée du « bon peuple de France » qui « se lève tôt », de « cette jeunesse qui laisse sa place aux personnes âgées dans le métro ».

 

À l’occasion des débats, Mediapart a d’ailleurs pu assister à un curieux ballet sur les bancs de l’Assemblée. Marion Maréchal-Le Pen, installée d'habitude tout en haut à droite de l'hémicycle, est descendue s’asseoir dans les rangs de l’UMP. Pendant une pause, loin des caméras, son collègue UMP Gérald Darmanin lui a claqué la bise, avant que ne débute une conversation de quelques minutes, polie et souriante, entre les deux jeunes députés, mais aussi Jacques Bompard, autre élu d'extrême droite, et l'UMP Jean-Frédéric Poisson, proche de Christine Boutin. Ce n’est pas la première fois que l’on observe dans l’hémicycle ce genre de rapprochements entre des élus UMP et frontistes (lire notre article).

Ce rapprochement rejoint le mouvement qui s’esquisse dans la rue depuis quelques semaines. Pour Jean-Yves Camus, chercheur associé à l’IRIS et spécialiste de l’extrême droite« on voit se constituer un mouvement à cheval entre la droite de gouvernement et la droite de la droite. Il s’agit de contester la légitimité du pouvoir de gauche, comme après l'accession de François Mitterrand et de la gauche à la présidence et au gouvernement en 1981 ». Le but : réaliser le vieux rêve de l’union de toutes droites, dans la rue et dans l'hémicycle.

 

 

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