Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
28 septembre 2013 6 28 /09 /septembre /2013 14:22

 

 

mediapart.fr

Axa : menacés de licenciement pour avoir parlé à Mediapart

|  Par Martine Orange

 

 

 

Depuis quatre ans, deux membres d’Axa, syndicalistes en Haute-Savoie, interrogent le groupe d’assurances sur la légalité de ses contrats. Pour avoir dénoncé les pratiques publiquement et nous avoir parlé, une procédure de licenciement a été engagée à leur encontre.

 

Il ne fait pas bon être lanceurs d’alerte chez Axa et d’en parler à Mediapart. Deux salariés du groupe d’assurances, travaillant en Haute-Savoie, sont sur le point de payer chèrement le fait d’avoir dénoncé les pratiques de leur maison. Jeudi dernier, Alain Arnaud et Stéphane Legros, respectivement délégué du personnel et représentant de la CFDT, ont été convoqués pour un entretien préliminaire en vue de leur licenciement  disciplinaire. Ils sont convoqués lundi à un entretien avec un inspecteur du travail, qui doit se prononcer sur la légalité de leurs licenciements, puisque leur mandat leur donne un statut de salariés protégés.

Leur faute ? Axa les accuse d’avoir « un comportement déloyal allant à l’encontre des obligations les plus essentielles qui découlent de leur contrat de travail, et ce, dans l’intention, non dissimulée, de nuire à l’entreprise et ses dirigeants ». Il leur est reproché d’avoir dénoncé publiquement l’illégalité du contrat phare d’assurance-vie du groupe, Euractiel.

« Le contentieux qui oppose mes clients à Axa dure depuis plusieurs années. Un recours aux prud’hommes a été déposé pour discrimination syndicale et harcèlement moral contre Alain Arnaud. Une action a été engagée devant la justice pour non-respect de la loi sur le contrat Euractiel, les heures supplémentaires, usage de domicile pour fins professionnelles et discrimination syndicale. La chambre sociale de la Cour de cassation doit se prononcer en octobre sur le dossier. Mais incontestablement, c’est l’article de Mediapart qui a déclenché la procédure de licenciement », dit Thierry Billet, avocat des deux syndicalistes.

« Nous dénonçons les pratiques d’Axa depuis longtemps. Il y a eu un tract syndical dans lequel il était dénoncé l’illégalité du contrat Euractiel, auquel le groupe n’a pas répondu. Ce que le groupe ne supporte pas aujourd’hui, c’est que tout ce que nous dénoncions à l’intérieur soit désormais connu du grand public », renchérit Stéphane Legros.

« Mediapart n’est en rien responsable de la mise en cause de ces personnes. Les faits sont antérieurs et n’ont rien à voir à l’exercice de leurs mandats syndicaux. Axa est très attaché au dialogue social et au respect des mandats syndicaux. À l’origine du dossier, il y a une lettre ouverte publiée à la mi-juillet où il est porté des dénigrements à l’égard du groupe et de ses dirigeants », dit Sybille Queré-Becker, responsable des relations sociales dans le groupe.

À lire le dossier constitué par Axa pour enclencher la procédure de licenciement contre les deux syndicalistes, si la lettre publique est mentionnée, le fait d’avoir parlé à Mediapart, d’avoir commenté l’article, d’avoir créé un blog sur notre site, d’avoir diffusé l’information sur d’autres sites paraît être ce qui pèse le plus lourd.  

Parmi les preuves citées de ce que le groupe considère comme un « comportement déloyal », AXA cite des commentaires qu’Alain Arnaud avait fait sous l’article en empruntant un pseudo. Celui-ci notamment :

 

 

« M. Arnaud a pu être identifié comme étant l’auteur de ces écrits », est-il insisté dans le dossier transmis à l’inspecteur du travail. « Ces commentaires démontrent que M. Arnaud a donné certaines informations à ce média », est-il noté. Le groupe lui reproche aussi d’avoir créé un blog sur Mediapart. Il est notamment accusé d’avoir écrit que « le pdg d’Axa a (fait) un don de 7 500 euros à l’association Répondre à gauche avec François Hollande ». Il se voit mis en cause pour avoir posté des commentaires sur d’autres sites, parlant « de l’énorme fraude mise en place par l’assureur français. (…) L’assureur n’ayant pas satisfait à ses obligations légales engrange ainsi près de 20 millions d’euros par an de cotisations en toute illégalité ».

Ces nouveaux cas illustrent une nouvelle fois le rapport de forces totalement déséquilibré entre les salariés lanceurs d’alerte et leur entreprise. Dénoncer des pratiques illégales revient à un acte de déloyauté. En parler publiquement s’assimile à une rupture de contrat. Quant à créer un blog, c’est tout simplement de la haute trahison. 

Si les syndicalistes en sont arrivés à recourir aux médias et aux réseaux sociaux, la faute en revient à Axa qui, depuis des années, élude la question de la légalité de ses pratiques, soulevée par les salariés eux-mêmes.

Stéphane Legros et Alain Arnaud reconnaissent qu’ils ont découvert le sujet par hasard. Jusqu’en 2009, ces salariés d’Axa chargés de commercialiser les contrats du groupe travaillaient sans se poser de questions et étaient bien vus de leur hiérarchie. Puis arriva l’incident fatal. En juin 2009, Stéphane Legros, qui travaille chez AXA depuis trois ans, démarche un couple et leur fait signer un contrat Euractiel. Ses supérieurs le félicitent en découvrant le nom du souscripteur : il s’agit du sénateur UMP de Haute-Savoie, Jean-Claude Carle, aujourd’hui vice-président du Sénat. Ce dernier n’a pas retourné nos appels alors que nous cherchions à avoir sa version des faits.

« Ce parlementaire pourrait nous causer des ennuis »

Ce qui aurait dû être un succès se transforme pourtant en enfer : les services centraux qui doivent homologuer le contrat refusent de le faire. Motif avancé : « Il m’a été expliqué que le parlementaire pouvait nous causer des ennuis, en raison de ses nombreuses relations », raconte-t-il. Non seulement le contrat est annulé, mais Axa, en plus, lui reproche auprès de ses clients comme à l’intérieur, d’avoir fait une faute.

Indigné par ce traitement, Stéphane Legros cherche à comprendre. Après maintes recherches et questions, il finit par découvrir le pot aux roses : le contrat Euractiel ne devrait plus être commercialisé depuis 2007 ! La loi de 2005 ne permet plus la pratique des frais précomptés, base du contrat Euractiel, qui consiste à prélever en une seule fois les frais de gestion d’un contrat censé durer au moins dix ans. D’un seul coup, les souscripteurs voient diminuer leur apport de près de moitié. S'ils cassent leur contrat avant la fin, ils ont toutes les chances de ne pas retrouver l’intégralité de leur apport de départ. Même s’ils restent jusqu’au terme prévu, leur épargne leur rapportera moins puisque les intérêts sont calculés sur la somme investie, amputée de la totalité des frais de gestion prélevés au départ.

Cette technique a été jugée tellement désavantageuse pour les épargnants que les législateurs ont décidé d’y mettre fin, en spécifiant que les frais de gestion ne pouvaient plus dépasser 5 % des sommes investies. Les élus donnent alors deux ans aux assurances pour se mettre en conformité avec la loi et revoir leurs conventions collectives, puisqu’une partie de leurs commerciaux étaient rémunérés sur des commissions prélevées sur ces frais de gestion.

L’ennui est que le texte ne prévoit aucune sanction au cas où un groupe d’assurances ne se mettrait pas en conformité avec la loi. Tout est laissé à la charge des souscripteurs, s’ils sont mécontents. Mais qui prendra le risque d’engager une procédure longue et coûteuse pour rentrer dans ses droits ?

Stéphane Legros réalise qu’Axa n’a fait ni l’un et que partiellement l’autre, les conventions collectives n’ayant pas été totalement revues. Avec quelques autres salariés, il commence à se mobiliser. Ils alertent leur syndicat, la CFDT, puis les autres, posent des questions à la hiérarchie, puis montent plus haut. À chaque fois, ils se heurtent au même mur du silence. En 2012, ils décident d’alerter les pouvoirs publics, écrivent au président du Sénat, de l’Assemblée nationale, de la présidence de la République. Hormis un simple accusé de réception, leurs lettres restent sans réponse. Axa continue à l’intérieur à envoyer le même message aux salariés : le groupe d’assurances ne saurait avoir des pratiques illégales. Il a consulté des juristes qui lui ont confirmé la parfaite validité de leur contrat Euractiel.

Auteur de la réforme du Code des assurances de 2005, Philippe Marini, aujourd’hui président de la commission des finances du Sénat, ne laisse pourtant planer aucune ambiguïté sur le sens de son amendement : « Il s’agissait bien d’en finir avec les mécanismes des frais pré-comptés dans les contrats d’assurance-vie », a-t-il déclaré à Mediapart . « L’amendement, qui a été adopté à mon initiative, plafonne à 5 % la diminution des valeurs de rachat par imputation sur celles­-çi des frais d’acquisition du contrat. Cela revient à interdire de facto les contrats dits “à frais précomptés” (…) », répète-t-il dans Le Dauphiné Libéré, qui s’est également saisi du dossier.

En dépit de la loi, des déclarations du rapporteur du texte législatif, des multiples propos tenus lors des débats à l’Assemblée nationale et du Sénat lors de la discussion sur la réforme du Code des assurances, qui toutes parlent d’en finir avec les frais précomptés, malgré un arrêt de la Cour de cassation qui mentionne leur interdiction, Axa assure qu’il agit en parfaite légalité et que la loi ne concerne pas son contrat d’assurance-vie. « Imaginez-vous qu’Axa pourrait commercialiser des produits non-conformes à la réglementation ? Nous avons fait vérifier par plusieurs juristes : tous nous disent que nos contrats sont parfaitement légaux. Nos contrats d’ailleurs n’ont jamais été retoqués. En six ans, nous aurions dû avoir un jugement. Cela n’a jamais été le cas »,soutient Oliver Mariée, directeur épargne-vie d’Axa France.

Au dossier de licenciement contre les deux syndicalistes, adressé à l’inspection du travail, le groupe d’assurances a joint un nouvel avis d’expert, le professeur de droit Luc Mayaux, qui souligne la parfaite conformité de son contrat d’assurance-vie avec la loi. Un avis tout à fait indépendant : M. Luc Mayaux est directeur de l’institut des assurances à Lyon. Il a animé notamment en 2010 une table ronde avec le directeur des ressources humaines d’Axa Sud et un responsable de la fédération française des assurances sur le thème : “L'assurance, des métiers d’avenir pour les jeunes.”

Si Axa est si sûr de son interprétation, pourquoi ne fait-il pas appel à la justice pour trancher définitivement le différend ? Le groupe d’assurances en avait l’occasion : le recours devant la Cour de cassation soulevait précisément le problème de la légalité de son contrat Euractiel. Le rapporteur devant la Cour a estimé opportunément que les magistrats de la Cour de cassation n’avaient pas à étudier ce problème pour se concentrer sur le seul problème social.  Le flou va donc perdurer.

« Les commerciaux d’AXA doivent savoir. La loi prévoit que leur responsabilité peut être engagée en même temps que celle du groupe s’ils ont vendu des produits non-conformes », insiste Alain Arnaud. Les deux syndicalistes sont décidés à défendre leur cause jusqu’au bout. Le parti socialiste de Haute-Savoie leur a apporté son soutien et a décidé de saisir le gouvernement de leur cas.

 

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

P
Je viens seulement de découvrir votre article, qui m'a très fortement intéressé, non pas à cause du contrat d'assurance vie d'AXA (quoique), mais à la fois parce qu'il s'agit de salariés protégés<br /> et parce qu'il concerne un projet de licenciement consécutif à une communication sur un média internet, en l'espèce Médiapart. Serait-il possible de savoir quelle a été la décision de l'inspecteur<br /> du travail et, plus globalement, où en est l'affaire ?
Répondre
D
<br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> Comme vous avez pu le constater, cet article est issu du site Médiapart et a été rédigé par une journaliste ; il s'agit en l'occurence de Marine Orange. Vos pouvez peut être la contacter sur son<br /> blog pour en savoir plus : http://blogs.mediapart.fr/blog/martine-orange.<br /> <br /> <br /> Nous ne faisons que difuser l'information<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> <br /> <br />
C
Un grand merci pour ce merveilleux article, qui va sûrement plaire à tous les internautes qui auront la chance de tomber sur un tel article..merci à vous !!
Répondre
D
<br /> <br /> Cet article étant issu du site "Médiapart", vos remerciements leur revient. Ils apprécieront certainement lire votre commentaire. Si comme nous, vous jugez que la haute valeur de leurs articles<br /> se doit d'être diffusée, je vous rappelle que pour conserver leur liberté de parole, ils ne subsistent que grâce aux abonnements. J'espère vous avoir donné envie de les lire et invite tous les<br /> lecteurs à participer à l'existence de ce média libre. Merci à eux et merci à vous d'apprécier leur travail<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Cordialement <br /> <br /> <br /> <br />

Présentation

  • : Démocratie Réelle Maintenant des Indignés de Nîmes
  • : Le blog des Indignés de Nimes et de la Démocratie Réelle Maintenant à Nimes
  • Contact

Texte Libre

INFO IMPORTANTE

 

DEPUIS DEBUT AOÛT 2014

OVERBLOG NOUS IMPOSE ET PLACE DES PUBS

SUR NOTRE BLOG

CELA VA A L'ENCONTRE DE NOTRE ETHIQUE ET DE NOS CHOIX


NE CLIQUEZ PAS SUR CES PUBS !

Recherche

Texte Libre

ter 

Nouvelle-image.JPG

Badge

 

          Depuis le 26 Mai 2011,

        Nous nous réunissons

                 tous les soirs

      devant la maison carrée

 

       A partir du 16 Juillet 2014

            et pendant l'été

                     RV

       chaque mercredi à 18h

                et samedi à 13h

    sur le terrain de Caveirac

                Rejoignez-nous  

et venez partager ce lieu avec nous !



  Th-o indign-(1)

55

9b22