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24 avril 2014 4 24 /04 /avril /2014 21:51

CADTM

 

 

Source : cadtm.org

 

Le FMI poursuit sa route en Ukraine (partie 3)

Le FMI ou l’asphyxie du choix unique

23 avril par Jérome Duval

 

 


Au cours de cette série, l’histoire tumultueuse du FMI en Ukraine est décryptée depuis le déclenchement de la crise de 2007/2008 jusqu’à aujourd’hui, avec une attention particulière sur la période post-insurrectionnelle de 2014. Le plan d’endettement approuvé au forceps par le gouvernement non élu à l’issue du mouvement révolutionnaire est une aubaine pour l’institution et lui permet de renforcer ses recettes capitalistes dans l’ancienne Union soviétique.

Le nouveau gouvernement de Iatseniouk, une aubaine pour le FMI

Les événements insurrectionnels survenus en Ukraine en février 2014, offrent une opportunité rêvée pour le FMI de reprendre la mainmise sur la politique ukrainienne, afin d’imposer à la population ses politiques directement issues du « consensus de Washington » (qui désigne la thérapie de choc appliquée à l’ensemble des pays du Sud au lendemain de la crise de la dette du tiers-monde de 1982).
Pour l’actuel Premier ministre Arseni Iatseniouk, il n’existerait aucune alternative aux diktats du FMI. Déjà en octobre 2008, lorsqu’il était alors président du Parlement, Iatseniouk déclarait à propos du programme du FMI : « Nous n’avons pas le choix. Ce n’est pas une question de politique, c’est une question vitale pour l’activité du pays ». |1| Cinq ans et demi plus tard, en mars 2014, Iatseniouk, devenu Premier ministre du gouvernement transitoire, affirme à propos d’un imminent programme d’austérité du FMI : « Le gouvernement répondra à toutes les conditions fixées par le FMI, parce que nous n’avons pas d’autre choix. » |2|

Pressions diplomatiques et empressement du FMI pour de nouveaux prêts en échange de contre-réformes
Le 21 février 2014, au lendemain des violents affrontements entre les manifestants et la police qui ont fait au moins soixante morts à Kiev, Standard & Poor’s abaisse à "CCC" (ultra spéculatif et proche du défaut de paiement) la note de la dette souveraine ukrainienne. L’agence de notation étasunienne craint que le pays ne puisse rembourser ses créanciers : le soutien financier de la Russie a été suspendu en janvier et l’Ukraine doit encore rembourser d’anciens crédits arrivant à échéance, dont ceux du FMI. Le 23 février, Christine Lagarde confirme, depuis Sydney où elle participe à une réunion des gouverneurs des banques centrales du G20, que l’organisation qu’elle préside est disposée à aider l’Ukraine si le pays en formule la demande. Dans la foulée, elle publie un communiqué commun avec le secrétaire au Trésor des États-Unis, Jack Lew, dans lequel ils estiment que « l’Ukraine a besoin d’un soutien à la fois multilatéral et bilatéral pour un programme de réformes ». Une fois de plus, le FMI unit sa voix à celle de son actionnaire majoritaire et montre à nouveau son déficit démocratique. Les 25 et 26 février, à la veille de l’installation du nouveau gouvernement, des délégués du département du Trésor étasunien et des conseillers économiques de la Maison blanche accompagnent le secrétaire d’État adjoint William Burns en Ukraine |3|. http://fr.reuters.com/article/frEur... . Compte tenu du fait que le président Viktor Ianoukovitch est en fuite (il quitte la capitale dans la nuit du 21 au 22 février) et que le nouveau gouvernement n’est pas encore formé, cet empressement du FMI et l’incessant ballet diplomatique étasunien constituent dès lors une ingérence flagrante dans les affaires d’État.

Le 27 février, le FMI indique avoir reçu, suite au vote du Parlement instituant un gouvernement de transition, une demande d’aide officielle de l’Ukraine. "Nous sommes prêts à y répondre", s’est empressé sa directrice générale Christine Lagarde, avant de dépêcher une mission du Fonds conduite sur place dès le 4 mars par Nikolay Gueorguiev. |4| Le FMI répond ainsi à l’appel d’Arseni Iatseniouk, qui trois jour auparavant, avant même qu’il soit nommé premier ministre par intérim, avait déclaré, le 24 février : « Nous avons besoin d’une aide financière urgente de la part de nos partenaires européens et il faut reprendre immédiatement le programme de coopération avec le FMI ». |5| Iatseniouk estimait alors à 35 milliards de dollars (quelques 25 milliards d’euros) pour les deux prochaines années, les besoins de Kiev pour rembourser sa dette |6| et faire face à la crise profonde du pays au bord de la cessation de paiement |7|. Mais la somme nécessaire pourrait encore augmenter si on prend en compte les milliards de dollars que Iatseniouk soupçonne avoir été dérobés par l’ancien régime pour être mis sur des comptes off-shore. "Le trésor national a été pillé", accuse t-il. Si tel est le cas, les Ukrainiens sont en droit de réclamer à la Suisse et aux autres pays complices (comme la City de Londres ou la France) qu’ils restituent à l’Ukraine les avoirs soi-disant gelés de l’ancien président en fuite et ceux d’autres hauts fonctionnaires responsables de détournements de fonds publics |8|.

Nouvellement investi Premier ministre, Arseni Iatseniouk se dit prêt à mettre en place des "mesures extraordinairement impopulaires" pour arriver à stabiliser les finances. « Les comptes publics sont vides, tout a été volé. Je ne promets pas d’amélioration, ni aujourd’hui ni demain ». |9| Nous voilà averti. Sa détermination est telle que, de retour de Kiev, le directeur du département Europe du FMI Reza Moghadam, affirmera après l’avoir rencontré : "Je suis positivement impressionné par la détermination des autorités, leur sens des responsabilités et leur engagement à un programme de réformes économiques et à la transparence". |10| Le terrain serait-il mûr pour un plan d’austérité à la grecque ?

Partie 1
Partie 2

Notes

|1| "We have no choice. It is not a political issue, it is an issue of the country’s vital activity." Yatsenyuk : Parliament will adopt unpopular conditions in exchange for IMF aid, Oct. 27, 2008. http://www.kyivpost.com/content/ukr...

|2| "The government will meet all the conditions set by the IMF, because we have no other choice," Yatsenyuk said during a meeting with members of the European Business Association (EBA). Ukraine vows to meet IMF loan conditions, Xinhua, March 3, 2014 http://www.china.org.cn/world/Off_t...

|3| Reuters, 24 février 2014 : Des conseillers économiques avec William Burns en Ukraine

|4| Initialement prévue jusqu’au 14 mars, la mission sera prolongée jusqu’au 21 mars puis jusqu’au 25 mars. Ukraine : Arseni Iatseniouk dirigera un "gouvernement de kamikazes", La Tribune, 27/02/2014. http://www.latribune.fr/actualites/... IMF Sends Fact-Finding Team to Ukraine, IMF, 5 mars 2014. http://www.imf.org/external/pubs/ft.... Les dernières missions du FMI en Ukraine se sont déroulées en février, en avril et du 17 au 29 octobre 2013.

|5| Ukraine : le pro-européen Arseni Iatseniouk désigné pour le poste de Premier ministre, HuffigtonPost avec AFP, 26/02/2014. http://www.huffingtonpost.fr/2014/0...

|6| 13 milliards de dollars seraient nécessaire rien que pour cette année. Renaud Vivien, Ukraine la nouvelle proie du FMI, http://cadtm.org/Ukraine-la-nouvell...

|7| Le rendement des obligations arrivant à échéance en avril subissaient une ascension fulgurante à près de 44,8%. (AFP, le 3 mars 2014).

|8| D’après El País, daté du 6 mars 2014, les actifs de 18 fonctionnaires ukrainiens responsables de détournements de fonds publics auraient aussi été gelés. Lucia Abellán, Bruselas ofrece 11.000 millones a Ucrania para evitar la quiebra.

|9| Ukraine : Arseni Iatseniouk dirigera un "gouvernement de kamikazes, latribune.fr, 27/02/2014. http://www.latribune.fr/actualites/...

|10| Ukraine : Le FMI "impressionné" par la volonté des autorités, AFP, 07 mars 2014. http://www.lalibre.be/economie/actu...

 

 

 

Source : cadtm.org

 

 

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11 mars 2014 2 11 /03 /mars /2014 18:16

 

Source : www.bastamag.net


 

Ukraine : « Un mouvement de libération non extrémiste de désobéissance civique »

par Collectif 11 mars 2014

 

 

 

 

Quel est le rôle exact des groupes d’extrême droite au sein du mouvement protestataire en Ukraine ? Comment cela est-il analysé et relayé par les médias internationaux depuis quelques semaines ? Des chercheurs, spécialistes du nationalisme ukrainien, ont publié en février une déclaration collective pour dénoncer une déformation de l’impact et de la prépondérance de l’extrême-droite ukrainienne dans le mouvement en cours. Ils se disent « choqués par une dangereuse tendance qui se manifeste dans trop de reportages des médias internationaux au sujet des récents événements en Ukraine ». Des reportages qui sous couvert d’antifascisme font le jeu de l’impérialisme russe. Tribune.

Nous sommes un groupe de chercheurs comprenant des spécialistes dans le domaine des études sur le nationalisme ukrainien, et nous sommes pour la plupart des experts de la droite radicale ukrainienne post-soviétique. Plusieurs d’entre nous publient régulièrement dans des journaux scientifiques et dans la presse universitaire. D’autres mènent leurs recherches au sein d’organisations gouvernementales ou non-gouvernementales, spécialisées dans l’observation de la xénophobie en Ukraine.

Du fait de notre spécialisation professionnelle et de notre expérience de recherche, nous sommes conscients des problèmes, des dangers et des conséquences potentielles de l’engagement de certains groupes extrémistes de droite dans les manifestations ukrainiennes. Après des années d’études approfondies sur ce sujet, nous comprenons mieux que beaucoup d’autres commentateurs, les risques que cette participation de l’extrême droite entraîne pour l’Euromaïdan. Plusieurs de nos commentaires critiques envers les tendances nationalistes ont déclenché des réponses de colère de la part d’ethnocentristes en Ukraine et dans la diaspora ukrainienne en Europe de l’ouest.

 

Déformation par les médias

Bien que nous soyons critiques envers l’activisme de l’extrême droite dans l’Euromaïdan, nous sommes néanmoins choqués par une dangereuse tendance qui se manifeste dans trop de reportages des médias internationaux au sujet des récents événements en Ukraine. Un nombre croissant d’évaluations du mouvement protestataire ukrainien, à un degré ou à un autre, déforment le rôle, la prépondérance et l’impact de l’extrême-droite ukrainienne dans le mouvement protestataire. De nombreux reportages prétendent que le mouvement pro-européen a été infiltré, qu’il est conduit ou dominé par des groupes radicaux ethnocentristes et fanatiques. Plusieurs présentations donnent l’impression trompeuse que les acteurs ultranationalistes et leurs idées sont le cœur ou le moteur des manifestations ukrainiennes. Les photographies graphiques, les citations croustillantes, les comparaisons excessives et les sombres références historiques sont très demandées. Tout cela se mêle avec une prise en compte disproportionnée d’un élément particulièrement visible, bien que politiquement mineur, dans la mosaïque confuse formée par les centaines de milliers de manifestants avec leurs motivations aussi diverses que le sont leurs parcours et leurs buts.

La résistance à Kiev, qu’elle soit violente ou non, inclut des représentants de toutes les tendances politiques, aussi bien que des personnes sans idéologie qui auraient du mal à se situer politiquement. Non seulement les manifestants pacifiques, mais aussi ceux qui font usage de bâtons, de pierres et même de cocktails Molotov dans leur confrontation physique avec les unités spéciales de la police et les voyous employés par le gouvernement, constituent un vaste mouvement, qui n’est pas centralisé. La plupart des manifestants n’usent de violence qu’en réponse à la férocité policière grandissante et à la radicalisation du régime de Ianoukovytch. Les manifestants comprennent des conservateurs, des socialistes et des libéraux, des nationalistes et des internationalistes, des chrétiens, des non-chrétiens et des athées.

 

Le mouvement reflète la totalité de la population ukrainienne

Il est vrai qu’il existe, parmi les manifestants violents et non-violents, une diversité de radicaux d’extrême droite comme d’extrême gauche. Pourtant, le mouvement considéré dans son ensemble reflète la totalité de la population ukrainienne, jeune et âgée. La focalisation pesante sur les extrémistes de droite dans les reportages des médias internationaux est donc injustifiée et erronée. Une telle sur-représentation a plus à voir avec le potentiel sensationnaliste des slogans, des symboles ou des uniformes extrémistes ethno-nationalistes, qu’avec la situation actuelle, sur le terrain.

Nous soupçonnons même que, dans plusieurs reportages semi-journalistiques, spécialement ceux des médias sous influence du Kremlin, l’attention excessive portée aux éléments d’extrême-droite dans le mouvement protestataire en Ukraine n’ait rien à voir avec l’antifascisme. Paradoxalement, la production, l’influence et la diffusion de tels reportages peuvent eux-mêmes êtres motivés par une forme d’impérialisme ultranationaliste — russe, en ce cas précis. En discréditant fondamentalement l’une des plus impressionnantes actions de masse de désobéissance civile dans l’histoire de l’Europe, ces reportages contribuent à fournir un prétexte pour une implication politique de Moscou, voire peut-être même à une intervention militaire russe en Ukraine, comme en Géorgie en 2008. (Dans un blog éclairant, Anton Shekhovstov a récemment détaillé les activités d’institutions clairement pro-Kremlin, leurs connections et leurs responsables. La liste n’est probablement pas exhaustive.)

 

Angoisse quotidienne d’un peuple

Étant donné ces menaces, nous appelons les commentateurs, spécialement ceux situés politiquement à gauche, à prendre des précautions lorsqu’ils expriment des critiques justifiées sur l’ethno-nationalisme ukrainien. Les déclarations les plus alarmistes sur l’Euromaïdan sont susceptibles d’être instrumentalisées par les “techniciens politiques” du Kremlin, afin de servir la mise en œuvre des projets géopolitiques de Poutine. En fournissant des munitions à la lutte de Moscou contre l’indépendance de l’Ukraine, un tel alarmisme aide involontairement une force politique qui est une menace beaucoup plus sérieuse pour la justice sociale, les droits des minorités et l’égalité politique, que tous les ethnocentristes ukrainiens rassemblés.

Nous appelons aussi les commentateurs de l’Ouest [de l’Europe] à montrer de l’empathie pour un état-nation qui est très jeune, encore fragile, et qui subit une grave menace étrangère. La situation fragile dans laquelle se trouve encore l’Ukraine et les complications énormes de la vie quotidienne dans une telle société en transition donnent naissance à une grande diversité d’opinions, de comportements et de discours étranges, destructeurs et contradictoires. Le soutien au fondamentalisme, à l’ethnocentrisme et à l’ultra-nationalisme a souvent plus à voir avec la confusion permanente et l’angoisse quotidienne d’un peuple vivant dans de pareilles conditions, qu’avec ses convictions profondes.

 

Interpréter la radicalisation politique grandissante

Enfin, nous appelons tous ceux qui n’ont pas d’intérêt particulier ou pas de connaissance particulière de l’Ukraine, à ne pas commenter les questions nationales complexes de cette région sans s’être livré au préalable à une recherche approfondie. Étant des spécialistes de ce domaine, plusieurs d’entre nous luttent quotidiennement pour interpréter la radicalisation politique grandissante et la dérive paramilitaire du mouvement protestataire ukrainien. En contrepartie, on doit toujours rappeler que face à la terreur d’État exercée contre la population ukrainienne, un nombre grandissant de personnes ordinaires ou d’intellectuels ukrainiens à Kiev, arrivent à cette conclusion que, pour être préférable, la résistance non-violente n’est plus possible concrètement. Les reporters qui ont le temps nécessaire, l’énergie et les moyens, doivent venir visiter l’Ukraine, et / ou faire des lectures sérieuses sur les publications qui leur servent de références pour leurs articles. Ceux qui n’ont pas la possibilité de le faire doivent plutôt se consacrer à des sujets qui leur sont plus familiers, plus accessibles et présentent moins d’ambiguïté. Cela permettra d’éviter, à l’avenir, les nombreux clichés hélas, les erreurs factuelles et les opinions mal informées qui accompagnent souvent les débats sur les événements en Ukraine.

 

Signataires :

Iryna Bekeshkina, researcher of political behavior in Ukraine, Sociology Institute of the National Academy of Sciences, Ukraine ; Tetiana Bezruk, researcher of the far right in Ukraine, Kyiv-Mohyla Academy, Ukraine ; Oleksandra Bienert, researcher of racism and homophobia in Ukraine, PRAVO. Berlin Group for Human Rights in Ukraine, Germany ; Maksym Butkevych, researcher of xenophobia in post-Soviet Ukraine, “No Borders” Project of the Social Action Center at Kyiv, Ukraine ; Vitaly Chernetsky, researcher of modern Ukrainian and Russian culture in the context of globalization, University of Kansas, USA ; Marta Dyczok, researcher of Ukrainian national identity, mass media and historical memory, Western University, Canada ; Kyrylo Galushko, researcher of Ukrainian and Russian nationalism, Institute of Ukrainian History, Ukraine ; Mridula Ghosh, researcher of human rights abuses and the far right in Ukraine, East European Development Institute, Ukraine ; Olexiy Haran, researcher of Ukrainian political parties, Kyiv-Mohyla Academy, Ukraine ; John-Paul Himka, researcher of Ukrainian nationalist participation in the Holocaust, University of Alberta, Canada ; Ola Hnatiuk, researcher of right-wing tendencies in Ukraine, University of Warsaw, Poland ; Yaroslav Hrytsak, researcher of historic Ukrainian nationalism, Ukrainian Catholic University at L’viv, Ukraine ; Adrian Ivakhiv, researcher of religio-nationalist groups in post-Soviet Ukraine, University of Vermont, USA ; Valeriy Khmelko, researcher of ethno-national structures in Ukrainian society, Kyiv International Institute of Sociology, Ukraine ; Vakhtang Kipiani, researcher of Ukrainian nationalism and samizdat, « Istorychna pravda » (www.istpravda.com.ua), Ukraine ; Volodymyr Kulyk, researcher of Ukrainian nationalism, identity and media, Institute of Political and Ethnic Studies at Kyiv, Ukraine ; Natalya Lazar, researcher of the history of the Holocaust in Ukraine and Romania, Clark University, USA ; Viacheslav Likhachev, researcher of Ukrainian and Russian xenophobia, Euro-Asian Jewish Congress, Israel ; Mykhailo Minakov, researcher of Russian and Ukrainian political modernization, Kyiv-Mohyla Academy, Ukraine ; Michael Moser, researcher of languages and identities in Ukraine, University of Vienna, Austria ; Bohdan Nahaylo, researcher of ethnic tensions in Eastern Europe and the CIS, formerly with UNHCR, France ; Volodymyr Paniotto, researcher of post-Soviet xenophobia, Kyiv International Institute of Sociology, Ukraine ; Olena Petrenko, researcher of war-time Ukrainian nationalism, Ruhr University of Bochum, Germany ; Anatolii Podolskyi, researcher of genocide history and antisemitism, Ukrainian Center for Holocaust Studies at Kyiv, Ukraine ; Alina Polyakova, researcher of radical right movements, University of Bern, Switzerland ; Andriy Portnov, researcher of modern Ukrainian, Polish and Russian nationalism, Humboldt University of Berlin, Germany ; Yuri Radchenko, researcher of war-time Ukrainian nationalism, Center on Inter-Ethnic Relations in Eastern Europe at Kharkiv, Ukraine ; William Risch, researcher of Ukrainian nationalist thought and politics, Georgia College, USA ; Anton Shekhovtsov, researcher of West and East European right-wing extremism, University College London, United Kingdom ; Oxana Shevel, researcher of Ukrainian national identity and historical memory, Tufts University, USA ; Myroslav Shkandrij, researcher of inter-war Ukrainian radical nationalism, University of Manitoba, Canada ; Konstantin Sigov, researcher of post-Soviet discourse strategies of the “Other,” Kyiv-Mohyla Academy, Ukraine ; Gerhard Simon, researcher of contemporary Ukrainian history and nationality affairs, University of Cologne, Germany ; Iosif Sissels, researcher of hate speech and antisemitism, Association of Jewish Organizations and Communities (VAAD) at Kyiv, Ukraine ; Timothy Snyder, researcher of historic Ukrainian nationalism, Yale University, USA ; Kai Struve, researcher of Ukrainian radical nationalism and the Holocaust, University of Halle, Germany ; Mykhaylo Tyaglyy, researcher of genocide and antisemitism, Ukrainian Center for Holocaust Studies at Kyiv, Ukraine ; Andreas Umland, researcher of the Russian and Ukrainian post-Soviet extreme right, Kyiv-Mohyla Academy, Ukraine ; Taras Voznyak, researcher of Ukrainian intellectual life and nationalism, Magazine “JI” (L’viv), Ukraine ; Oleksandr Zaitsev, researcher of Ukrainian integral nationalism, Ukrainian Catholic University at L’viv, Ukraine ; Yevgeniy Zakharov, researcher of xenophobia and hate crimes in today Ukraine, Kharkiv Human Rights Protection Group, Ukraine

Coordinateur du projet : Andreas Umland

La déclaration a été aussi déposée sur le site du journal de Kiev Le Jour.

Traduit de l’anglais par Olivier Favier (Voir le texte original ici).

Photo : Ivan Bandura, Standing in the snow, 9 décembre 2013, Kiev, Urkaine / CC

 


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Source : www.bastamag.net

 

 

 

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3 mars 2014 1 03 /03 /mars /2014 18:55

 

Source : www.mediapart.fr

 

Les milices et les forces spéciales russes ont pris le contrôle de la Crimée

|  Par Amélie Poinssot

 

 

La capitale régionale de la Crimée, Simferopol, vit depuis dimanche dans un calme qui n'est qu'apparent. Une armée sans insigne, de fait constituée par les forces spéciales russes, contrôle  tous les sites stratégiques de la péninsule et bloque les casernes des troupes ukrainiennes, imposant à cette région de deux millions d'habitants une occupation qui ne dit pas son nom. Reportage de notre envoyée spéciale.

 Crimée, de notre envoyée spéciale

La capitale régionale de Crimée s'est réveillée dans le calme ce dimanche matin. Pas un homme armé n'était visible autour du parlement, les habitants vaquaient à leurs occupations ordinaires. Mais les milices non identifiées qui ont pris le Parlement régional dans la nuit de mercredi à jeudi n'étaient pas loin. Il suffisait d'approcher son œil des portes d'entrée bloquées par du mobilier pour apercevoir policiers ukrainiens et militaires cagoulés.

Comme toujours depuis jeudi, personne n'était en mesure d'expliquer qui étaient ces hommes armés à l'intérieur. « Il ne s'agit pas de soldats, ce sont des équipes d'autodéfense comme il y en avait sur le Maïdan », veut nous faire croire Grigori Dimidov, conseiller parlementaire qui sort tout juste du bâtiment. « Ils sont venus simplement pour nous protéger. » Et l'homme de raconter la manifestation de mercredi lorsque des milliers de Tatars se sont rassemblés devant le Parlement : « C'était devenu très dangereux pour la ville, cela risquait de dégénérer et le Parlement était sous pression. Nous pensions que le bâtiment allait être pris par des pro-Maïdan. »

C'est ainsi qu'il justifie la prise du Parlement et le vote en présence d'hommes armés pour un nouveau gouvernement, survenu jeudi après-midi. Un changement de gouvernement « parfaitement légal », selon lui. Ce qu'il veut pour l'avenir de la Crimée ? « Plus de pouvoir, plus d'autonomie budgétaire, plus de décentralisation » pour cette région qui bénéficie toutefois déjà d'un statut à part, celui de République autonome au sein de l'Ukraine.

Quelques heures plus tard, c'est devant une salle comble remplie de caméras que le président du parlement régional, Vladimir Konstantinov, s'exprime au cours d'une conférence de presse. Un bel exercice de langue de bois qui se déroule au siège de la télévision publique régionale et où, malgré les questions insistantes des journalistes, on aura bien de la peine à retenir une ligne. Les autorités régionales reconnaissent-elles le gouvernement de Kiev ? L'homme noie le poisson, puis pressé de répondre, finira par dire : « L'opposition a rompu l'accord avec Ianoukovitch, c'est elle qui est sortie du processus légal. (…) Ce qui s'est passé à Kiev est un très mauvais exemple de prise de pouvoir, ils ont fait preuve d’extrémisme et cela montre que tout peut être fait en dehors du cadre de la loi. »

Il faut se pincer pour écouter ses paroles sans broncher : « La situation en République de Crimée est stabilisée grâce à Dieu. (...) Les gens sourient aux forces de sécurité qui sont dans la rue. » Plusieurs journalistes ukrainiens s'agacent ouvertement et perdent patience. Les ennemis sont identifiés : « Les services secrets américains, les bandes de nazis du Maïdan », tandis que le président du parlement évoque, sans le nommer, « l'actuel président légal du pays qui a donné une conférence de presse samedi, élu par la majorité des citoyens du pays ». Il s'agit bien évidemment de Viktor Ianoukovitch.

 

Le président du parlement de Crimée Vladimir Konstantinov s'exprime devant les journalistes 
Le président du parlement de Crimée Vladimir Konstantinov s'exprime devant les journalistes © Amélie Poinssot

Quant aux forces armées qui ont pris le contrôle de tous les points stratégiques de la péninsule, leur identité ne sera pas révélée. « S'ils ont pris le contrôle de toutes les routes, c'est pour nous protéger, pas pour nous envahir. » Dans un étrange revirement de situation, il appelle même le pouvoir à Kiev « à ne pas engager la guerre contre ses citoyens ». Une information cependant : la tenue d'un référendum sur le statut de la Crimée est confirmée, pour le 30 mars.

S'il ressort de ces déclarations que la situation dans la péninsule est sous contrôle du gouvernement régional, les forces en présence sur le terrain montrent le contraire. Non seulement les soldats sans insigne, transportés dans des blindés ou des camions immatriculés en Russie, contrôlent tous les points stratégiques et voies d'accès de la péninsule et ne répondent assurément pas aux ordres de Simferopol. Mais de plus, différentes milices se sont formées çà et là dans la région depuis une semaine, rendant la situation potentiellement incontrôlable.

Formation de milices armées pro-russes

À l'aéroport de Simferopol, nous faisons ainsi la connaissance d'un homme, Anatoly Lebedev, qui se présente comme le porte-parole d'une organisation, « Crimée loyale », fondée il y a tout juste une semaine. Il s'agit d'une milice qui compte déjà treize « bataillons » d'une centaine de personnes chacun, explique-t-il. De fait, cette milice est présente, aux côtés des forces armées d'occupation, dans les principaux sites de la ville – aéroport, Parlement régional, gouvernement régional, bâtiments relevant du ministère de la défense.

Mais l'homme dément toute intervention de Moscou. « Nous sommes une organisation complètement autonome. Nous avons créé cette milice car après le putsch de Kiev, le ministère des affaires intérieures et les forces de police ukrainiennes sont complètement discréditées en Crimée et leurs ordres ne sont plus écoutés ici. » Une milice parmi d'autres: à Sébastopol par exemple, à une centaine de kilomètres au sud de Simferopol, d'autres groupes se formaient en début de semaine, sous l'impulsion notamment du parti politique Bloc Russie (voir notre reportage ici).

 

A l'aéroport de Simferopol, un milicien et deux militaires sans insigne 
A l'aéroport de Simferopol, un milicien et deux militaires sans insigne © Amélie Poinssot

À Simferopol, la milice arbore un brassard rouge barré du mot « droujnik » (à l'époque impériale, le droujnik était l'ami du prince, son associé volontaire). En voilà une dizaine gardant l'entrée d'un bâtiment de l'aéroport. Derrière eux, deux hommes en tenue de militaires, kalachnikov en bandoulière. Mais les miliciens n'ont soi-disant « aucun contact » avec ces soldats, ne savent pas qui ils sont, ni de quelle nationalité. Eux ne font que les « protéger contre les hooligans » et « protéger la population de la panique et des affrontements » ; ils ne sont même pas intéressés de savoir qui sont ces hommes armés avec qui ils collaborent ! Anatoly Lebedev lui-même ne semble pas croire à ce qu'il dit. Sans surprise, lorsque l'aéroport se vidait en fin de journée et que les hommes relâchaient leur vigilance, on pouvait voir miliciens et soldats discuter et blaguer entre eux...

Cela ne fait aucun doute pour personne en Crimée : ces soldats sans insigne sont des membres des forces spéciales de l'armée russe. Pour Ali Khamzin, membre du Mejlis, l'assemblée des Tatars de Crimée, en charge des affaires étrangères, c'est évident : on fait face là à « une occupation par la Russie alors que la Crimée fait partie de l'Ukraine. Une invasion par des soldats soi-disant non identifiés, qui a commencé avant même la procédure légale », c'est-à-dire la décision prise samedi par le parlement russe d'envoyer des troupes en Crimée.

« Ils ont pris petit à petit tous les bâtiments importants de Simferopol, y compris le SBU de Crimée, la direction des services de sécurité. » Le chef local de la SBU a d'ailleurs démissionné. La communauté tatare (300.000 personnes, 15% de la population de Crimée) en appelle au respect de l'accord de Budapest de 1994, lors duquel Union européenne, États-Unis et Fédération de Russie se sont engagés à respecter les frontières de l'Ukraine et cette dernière a renoncé à se doter de l'arme nucléaire. « Une erreur, juge Ali Khamzin. Si nous avions la force de dissuasion nucléaire, Poutine ne pourrait pas nous dominer de cette façon... »

Edouard Grikowski, du petit parti Soyouz (cinq députés au parlement régional, dominé par le Parti des régions de l'ex-président Ianoukovitch qui y compte quatre-vingts députés), interrogé par Mediapart, avait refusé jeudi de répondre à la convocation des députés pour voter sous la pression des hommes armés qui avaient pris possession du parlement. Il ne s'est pas rendu à l'assemblée et n'a pas pris part au vote qui a conduit à la destitution du gouvernement et la nomination d'un nouvel exécutif. « Il s'agissait de voter le pistolet sur la tempe ! » s'exclame-t-il.

Il ne cautionne donc pas ce nouveau gouvernement dirigé par Sergueï Axionov : « Une décision adoptée sous la pression des kalachnikovs n'est en aucun cas une décision légale. » Le député parle lui aussi d'occupation de Moscou et la seule issue possible selon lui est le départ des soldats russes, afin que « la population de Crimée décide d'elle-même de son sort ». Mais l'homme représente bel et bien une minorité parmi les élus aujourd'hui en Crimée.

Le pouvoir dans la région est détenu par les pro-Russes, et derrière eux, le président déchu. D'après Vadim Kolesnitchenko, ce député du Parti des régions élu au parlement de Kiev sur une circonscription de Sébastopol, c'est Viktor Ianoukovitch, alors en cavale, qui a placé son homme jeudi à la tête de la Crimée, en la personne de Sergueï Axionov.

« Il a fait parvenir un document mentionnant le nom d'Axionov », affirme cet homme joint par téléphone, alors qu'il se trouve actuellement en Crimée. Ce proche de Ianoukovitch était l’initiateur des lois liberticides votées en janvier à Kiev. Il nous donne à entendre le même discours qui revient ici à Simferopol : « Ce qui s'est passé à Kiev est un putsch. Si d'autres en Ukraine agissent à l'encontre des lois, la Crimée a le droit d'en faire autant. »

Le procureur général d'Ukraine, Oleg Makhnitskii, a pourtant envoyé un message sans équivoque ce dimanche, déclarant que la désignation de Sergueï Axionov au poste de premier ministe de Crimée était « contraire à la Constitution et aux lois ukrainiennes ». Ce nouveau gouvernement régional « doit prendre ses responsabilités puisqu'il a outrepassé la loi ». Autrement dit, une procédure judiciaire n'est pas à exclure. L'état-major ukrainien avait pris par ailleurs quelques heures plus tôt la décision de mobiliser les réservistes du pays...

Mais la Crimée semblait ce dimanche se détacher de plus en plus du pouvoir central et basculer sous le contrôle d'une occupation qui ne dit pas son nom. Sur la base militaire de Perevalnoye, de jeunes garde-côtes ukrainiens étaient bloqués par des soldats russes. En fin de journée, le commandant en chef de la marine ukrainienne, l'amiral Denis Berezovski, a en outre prêté allégeance au nouveau gouvernement de Crimée, et ce, depuis l’état-major de la flotte russe à Sébastopol... L'amiral avait été nommé vendredi à la tête de la marine ukrainienne par le président du pays par intérim, Olexandr Tourtchinov. Les pro-Russes de Crimée depuis jeudi avançaient leurs pions. Cette fois, ils ont conquis de nouvelles positions.

 

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Source : www.mediapart.fr

 

 

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3 mars 2014 1 03 /03 /mars /2014 17:04

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Source : cadtm.org

 

Ukraine, la nouvelle proie du FMI

28 février par Renaud Vivien

 

 

CC - Vassia Atanassova


Le 26 fevrier, les autorités provisoires ukrainiennes ont sollicité un prêt du FMI pour pouvoir rembourser la dette du pays dans les délais, soit 13 milliards de dollars rien que pour cette année. Le FMI a répondu positivement et a décidé d’envoyer une mission d’« experts » en Ukraine pour discuter des conditions attachées à ce prêt.

Alors que le pays est en pleine ébullition, le remboursement de la dette publique apparaît comme la priorité absolue de Kiev et de ses créanciers. Les besoins de la population passent quant à eux au second plan. Cette situation pourrait même encore se dégrader si un accord est conclu avec le FMI, qui est en position de force pour imposer une cure d’austérité au peuple ukrainien en échange du prêt.

En effet, les difficultés financières de l’Ukraine sur fond de trouble politique sont une nouvelle opportunité pour le FMI d’imposer une thérapie de choc, à l’instar de la Grèce, du Portugal et de l’Irlande, qui appliquent, depuis l’éclatement de la crise, de violentes mesures d’austérité dictées par la « Troïka », qui est composée du FMI, de la Commission européenne et la Banque centrale européenne.

Dans ces pays, le risque de défaut de paiement à l’égard des créanciers (principalement les banques privées) a été le point de départ de l’intervention du FMI et des acolytes européens. Ainsi, la Grèce, le Portugal et l’Irlande, qui n’avaient plus accès aux marchés financiers en raison des taux d’intérêt prohibitifs, se sont tournés vers la Troïka qui en a profité pour leur proposer des prêts, certes moins onéreux, mais assortis de programmes d’austérité connus sous le nom de « memorandum ». La liste des mesures contenues dans ces memoranda est toujours la même : privatisations des secteurs stratégiques de l’économie, baisse des salaires, des pensions, augmentation d’impôts injustes comme la TVA, licenciements massifs dans la fonction publique, coupes drastiques dans les budgets sociaux, etc.

L’Ukraine se trouve aujourd’hui dans une situation similaire puisqu’elle est au bord de la cessation de paiement et ne peut raisonnablement plus emprunter sur les marchés financiers suite à la dégradation de sa note par les agences de notation. Pour pouvoir emprunter sur le court terme, l’Ukraine doit aujourd’hui payer un taux d’intérêt exorbitant de 34,5 %, contre 5 % il y a seulement cinq mois. Par ailleurs, elle ne peut plus compter sur la Russie qui vient d’annuler le versement de la deuxième tranche d’un prêt de 15 milliards de dollars, suite à la destitution de l’ancien président Viktor Ianoukovitch.

L’Ukraine dispose donc actuellement d’une faible marge de manœuvre. Toutefois, le FMI ne peut en aucun cas faire partie de la solution vu les conséquences dramatiques des programmes d’austérité qu’il impose aux populations depuis plus de trente ans. Dans tous les pays qui ont conclu des accords avec cette organisation, on observe de manière générale une augmentation de la pauvreté et des inégalités. C’est le cas de la Grèce, de l’Irlande et du Portugal mais également des pays du Sud soumis aux plans d’ajustement structurel (PAS) depuis le début des années 80 et des pays de l’Europe de l’Est qui ont aussi subi une thérapie de choc administrée par ce même FMI dans les années 90.

Au lieu de s’endetter auprès du FMI pour régler les dettes passées, il faudrait plutôt s’interroger sur la légalité et la légitimité des dettes que l’Ukraine compte payer avec ce prêt du FMI. En effet, le remboursement des dettes publiques n’est pas une obligation absolue du point de vue politique et juridique. Rappelons aussi qu’en droit international public, les devoirs d’un État envers sa population sont supérieurs aux engagements pris envers ses créanciers et que l’obligation de rembourser ne vaut que pour les dettes « contractées dans le cadre d’un accord valide et légitime |1| » comme le souligne l’Expert des Nations unies sur la dette Cephas Lumina. Si les dettes sont illégales ou illégitimes alors l’Ukraine n’a aucune obligation de les rembourser et par conséquent, n’a aucun intérêt d’emprunter au FMI.

Un audit des dettes ukrainiennes permettrait d’identifier la part illégitime qui doit être annulée sans condition. L’audit permet notamment de répondre à ces questions : Qui a contracté ces dettes ? Étaient-ils juridiquement compétents pour contracter ces prêts ? Qui en a profité ? Les prêteurs ont-ils mis des conditions à l’octroi des prêts ? Ces conditions violent-elles le droit national du pays emprunteur ? A combien s’élève le montant des intérêts engrangés par les prêteurs ? Quels sont les projets financés par la dette ? etc.

Vu l’urgence, une réponse immédiate pourrait être la suspension du remboursement de la dette (avec gel des intérêts) et le gel des négociations avec le FMI dans l’attente (au minimum) des résultats des prochaines élections prévues le 25 mai et d’un vrai débat public sur les implications d’un prêt du FMI et les alternatives à l’endettement.

Les arguments pour décréter ce type de moratoire ne manquent pas. L’Ukraine et ses créanciers pourraient invoquer « un changement fondamental de circonstances » suite au renversement de Ianoukovitch et la nature provisoire du gouvernement mis en place le 26 février. Seul manque aujourd’hui la volonté politique aussi bien de la part des autorités provisoires de l’Ukraine que de l’Union européenne qui se déclare pourtant du côté du peuple ukrainien…

Notes

|1| Principes directeurs relatifs à la dette extérieure et aux droits de l’homme, Annexe au rapport de l’expert indépendant Cephas Lumina du 10 avril 2012 (A/HCR/20/23). Sauf mention contraire, les citations sont issues de ce rapport.

 

Source : cadtm.org

 

 

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25 février 2014 2 25 /02 /février /2014 14:59

 

 

Source : www.mediapart.fr

Ukraine, les inconnues du jour d'après

|  Par Amélie Poinssot

 

 

 

Après une journée où tout a basculé à Kiev, avec la destitution du président Ianoukovitch votée par le parlement et la libération de l'ancienne opposante Ioulia Timochenko, quels sont les scénarios politiques possibles ? Si une élection présidentielle a été convoquée pour le 25 mai, la Rada reste pour l'heure inchangée. Mais une vaste recomposition est déjà à l'œuvre. Explications.

Viktor Ianoukovitch parti, l'intérim est assuré par Olexandre Tourtchinov, le nouveau chef du parlement, jusqu'à l'élection présidentielle, qui aura lieu le 25 mai. D'ici là, une vaste recomposition de l'échiquier politique est à prévoir.

 

Une majorité peut-elle se dessiner au parlement ?

Pour l'heure, aucune majorité n'émerge du parlement. Trois blocs sont en présence : l'ancienne majorité gouvernementale, constituée du Parti des régions et du Parti communiste ; les groupes parlementaires de l'opposition, à savoir Batkvichtchina (Patrie) – la formation de Ioulia Timochenko –, Oudar (Alliance démocratique ukrainienne pour la réforme) et Svoboda (Liberté) ; enfin, un ensemble de non-inscrits, grandissant ces derniers jours – les députés qui ont fait défection au Parti des régions. Ce dimanche après-midi, les deux premiers blocs pesaient presque le même poids (163 députés pour le premier, 166 pour le second) ; le dernier comptait 118 députés (voir la répartition des sièges). Or pour disposer de la majorité à la Rada, le parlement ukrainien, il faut pouvoir compter sur 226 parlementaires : différents partis doivent former une coalition.

Dès lors, trois scénarios sont possibles. Soit le Parti des régions, nettoyé de ses éléments les plus compromettants, forme une coalition avec les partis de l'opposition, se mettant d'accord au moins pour un gouvernement de transition jusqu'à l'élection présidentielle. Soit un certain nombre de non-inscrits rejoignent les groupes parlementaires de l'opposition, et les trois partis anti-Ianoukovitch parviennent ainsi à glaner les 60 sièges qui leur manquent pour atteindre la majorité. Soit une partie des transfuges du Parti des régions crée une nouvelle formation politique. Mais les non-inscrits, de fait, ne peuvent rien faire en tant que tels : pour faire partie d'une coalition au parlement ukrainien, il faut avoir rejoint un parti.

Dans tous les cas, la situation n'est pas simple et implique que les ennemis d'hier coopèrent dès demain. Sans parler des divergences entre les composantes de l'opposition… « Il n'est pas certain que les gens du Maïdan acceptent une alliance entre l'opposition et le Parti des régions, même s'il est débarrassé de ses députés les plus odieux. Le Maïdan, avec ses quelque 80 morts, maintient une pression sur le parlement », observe l'Ukrainien Wolodymyr Poselsky, vice-président de l'association L'Ukraine dans l'Europe, basée à Paris. Le président de la Rada a donné aux députés un délai de trois jours pour former une nouvelle majorité et un gouvernement d'unité nationale.

Le mandat du parlement actuel, élu en octobre 2012, court jusqu'en 2016 : malgré le renversement du gouvernement Ianoukovitch, la Rada peut théoriquement restée inchangée encore deux ans… Mais le plus probable est que des élections parlementaires aient lieu rapidement après l'élection présidentielle du mois de mai – même si le retour à la Constitution d'avant 2004, qui limitait les pouvoirs du président, empêche celui-ci de dissoudre directement l'assemblée. « Il aurait été plus logique d'organiser simultanément élection présidentielle et scrutin législatif, estime le chercheur ukrainien Mykola Riabchuk. Mais cela posait le problème d'une vacance du pouvoir. Les différentes forces politiques jusqu'à présent ennemies sont donc forcées de coopérer, et elles n'ont pas le droit à l'erreur, après le nombre de morts qu'on a eus. »

Mykola Riabchuk, de l'Académie des sciences de Kiev, est actuellement chercheur invité à l'Institut des sciences humaines de Vienne. En observateur avisé des évolutions de son pays depuis son indépendance, auteur de plusieurs ouvrages sur ces transformations et de nombreux articles depuis le début de la crise ukrainienne, ce politologue voit dans la révolution de cet hiver 2013-2014 l'achèvement de la transition postsoviétique qui a eu lieu en 1989-1990 dans les anciennes démocratiques populaires du bloc de l'Est. « L'indépendance de l'Ukraine en 1991 n'était pas parvenue à affranchir le pays de la tutelle de Moscou ni de la nomenklatura, explique-t-il à Mediapart. La révolution orange de 2004 n'avait pas réussi non plus ; cette fois-ci, le régime est tombé. »


Quels sont les défis du prochain gouvernement ?

Plusieurs dossiers attendent les futurs dirigeants de l'Ukraine. Tout d'abord, il va falloir relancer l'économie du pays, en récession, et trouver une solution pour régler les prochaines créances : l'État est au bord de la faillite. Mais surtout, les événements de ces derniers jours et de ces trois derniers mois posent de nombreuses questions. Qui a ordonné de tirer sur les manifestants ? Qui est à l'origine des nombreuses violences qui ciblaient opposants et journalistes ? Qui a été payé pour effectuer les basses œuvres ?

Autre défi : les archives découvertes samedi dans la résidence du président déchu, qui révèlent déjà l'ampleur des détournements d'argents effectués ces dernières années au plus haut niveau de l'État, ainsi que le système répressif qui avait été mis en place : une liste de journalistes à surveiller a été trouvée. De nombreux Ukrainiens appellent donc à une loustratsia – terme qui vient du latin lustratio (cérémonie de purification dans la Rome antique) et désigne, dans l'ex-bloc de l'Est, l'épuration des anciens cadres ou collaborateurs du système soviétique. Contrairement à sa voisine la Pologne, qui a mené cette opération dans les années 2000, notamment dans le milieu politique mais aussi au sein des institutions ecclésiastiques, l'Ukraine n'a jamais épuré ses appareils policier ou judiciaire. « La justice est complètement corrompue, discréditée, rien n'a changé depuis l'indépendance, explique Wolodymyr Poselsky. La société a maintenant besoin de vérité. »

Déjà, le ministre de l'intérieur par intérim, Arsen Avakov, a annoncé ce dimanche l'ouverture d'une enquête sur les auteurs des crimes de ces derniers semaines. Pour l'heure, une trentaine de hauts responsables de la police sont visés. Reste à mener l'enquête et à condamner les coupables, alors que plusieurs dirigeants sont en fuite et restaient introuvables ce dimanche, à commencer par Viktor Ianoukovitch lui-même… De nombreuses réformes institutionnelles sont par ailleurs nécessaires pour bâtir l'État de droit qui manquait jusqu'à présent. Mais l'un des principaux défis pour le futur pouvoir, estime Mykola Riabchuk, sera de trouver des personnalités vierges de tout soupçon. « C'est pour cela que la société reste mobilisée sur le Maïdan : elle veut exercer un contrôle et s'assurer que les enquêtes seront bien menées, que l'on mettra fin à la corruption, que les politiciens compromis ne reviendront pas. »


Retournement de veste

 

Y a-t-il une chance pour que Ioulia Timochenko revienne au pouvoir ?

Le retour triomphal de l'ancienne premier ministre samedi soir sur le Maïdan ne peut que susciter des interrogations. Certes, l'icône de la révolution orange a fait l'objet d'une persécution politique de la part du clan Ianoukovitch. Mais cette femme d'affaires n'a pas toujours eu les mains propres, comme nous l'expliquions déjà en novembre dans Mediapart (voir à ce sujet l'enquête d'Agathe Duparc). « Sa candidature ne serait pas un bon signe pour une grande partie de la société qui veut voir de nouvelles personnes, sur lesquelles ne pèse aucun soupçon de corruption », estime Mykola Riabchuk. L'intéressée a indiqué ce dimanche qu'elle ne serait pas candidate au poste de premier ministre – mais elle ne s'est pas encore prononcée au sujet du scrutin présidentiel. Or ce sont ses proches qui ont été nommés aux postes clés (le ministre de l'intérieur par intérim et le nouveau président du parlement)…

Du côté des autres leaders, il y a de fortes chances de voir les trois figures dans la course pour la présidentielle : Vitali Klitschko (Oudar), Arseni Iatseniouk (Batkvichtchina) et Oleh Tyahnybok (Svoboda). Des trois, le champion du monde de boxe poids lourds Vitali Klitschko semblait le plus populaire ces dernières semaines (voir la question 6 de ce sondage du mois de janvier), mais ces trois figures pourraient aussi pâtir de l'accord signé vendredi avec la médiation européenne, où ils avaient accepté le maintien de Ianoukovitch jusqu'en décembre – compromis refusé par le Maïdan.

Une autre personnalité pourrait également émerger, celle de Petro Porochenko, rival de Timochenko au sein de Batkvichtchina : certes lui aussi issu du monde du business, il recueille toutefois une certaine adhésion au sein de la société. À la tête de la plus grande société de confiserie ukrainienne, Roshen, il a été l'un des premiers touchés par la guerre économique de Poutine l'été dernier, lorsque Moscou avait prononcé un embargo sur les importations de sa production en Russie. Depuis, il a fortement soutenu le mouvement du Maïdan, notamment à travers le canal 5, la chaîne de télévision dont il est propriétaire.

Enfin, autre élément du futur échiquier politique ukrainien : l'ancien leader du Parti des régions et ancien premier ministre Mykola Azarov ayant démissionné, c'est Sergueï Tihipko qui est en train de prendre la tête de ce qu'il reste du parti. L'ancien troisième homme de l'élection de 2010 sera lui aussi candidat à l'élection présidentielle et pourrait s'avérer le grand gagnant de cette recomposition en représentant les régions de l'Est, lui qui est originaire de Dnepropetrovsk. Il a surtout comme atout de n'avoir pas fait partie du gouvernement Ianoukovitch. Ce dimanche, par un prompt retournement de veste, le parti des régions a par ailleurs jugé Viktor Ianoukovitch comme étant « le seul responsable des événements tragiques » et a condamné sa « trahison ». La plupart des membres de l'ancien gouvernement ont pris la fuite.

 

Le risque de scission du pays est-il écarté ?

« Le risque de scission n'a jamais existé, estime Mykola Riabchuk, sauf si elle avait été provoquée par Poutine. Excepté une infime minorité, personne ne le souhaite en Ukraine. » Depuis samedi, plusieurs manifestations ont éclaté dans les régions de l'est (Kharkiv, Donetsk) et dans le sud, en Crimée, où l'on peut voir des pro-Ianoukovitch s'en prendre parfois violemment à des partisans du Maïdan. Derniers soubresauts de l'émancipation de la tutelle moscovite ?

La clientèle du système Ianoukovitch dans les régions de l'est, de fait, est en train de se disloquer : le gouverneur de la région de Kharkiv et le maire de la ville ont pris la fuite, puis le maire, revenu dimanche, a déclaré que Ianoukovitch appartenait désormais à l'Histoire. L'homme fort de la région de Dnepropetrovsk, Igor Kolomoyskyi, s'est également prononcé samedi contre le séparatisme concernant le pays. Les derniers piliers du système Ianoukovitch sont définitivement en train de tomber.

 

 

Lire aussi

 

Source : www.mediapart.fr

 

 

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 19:18

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

Explicateur 23/02/2014 à 18h29
La prochaine guerre ? La Crimée, enjeu entre la Russie et l’Ukraine
Pierre Haski | Cofondateur Rue89

 

 

Il est temps de réviser votre histoire et votre géographie avant le prochain conflit. La Crimée, ça vous dit quelque chose ? La « guerre de Crimée », un vague souvenir scolaire ? Yalta, un peu plus ? Sébastopol, autre chose qu’une station de métro parisien ?

La Crimée et ses 2 millions d’habitants ont tout pour devenir le nouveau point chaud de la crise ukrainienne, après l’euphorie qui a suivi l’issue du carnage de Kiev ces derniers jours.

Vous avez aimé l’Ossétie du Sud, voici le tour de la Crimée. L’Ossétie du Sud, c’est cette région de Géorgie dont la majorité des habitants sont russes, et qui, après avoir unilatéralement fait sécession, a été l’enjeu de la brève guerre russo-géorgienne de 2008. Elle reste aujourd’hui séparée de la Géorgie et occupée par l’armée russe.

La Crimée peut potentiellement suivre la même voie. C’est la seule partie de l’Ukraine à avoir une population majoritairement russe, et la flotte russe de la Mer noire y est basée. C’est peu dire que les développements politiques à Kiev sont vécus de manière particulièrement dramatique en Crimée.

Des milices russes en formation

Cette photo (tweetée dimanche par Paul Sonne, un journaliste du Wall Street Journal sur place) de Russes de Simferopol, capitale de la Crimée, s’inscrivant pour rejoindre des milices de protection contre les opposants pro-européens désormais aux commandes à Kiev, ressemble à s’y méprendre aux veillées d’armes nationalistes qui ont conduit aux désastres dans les Balkans et ailleurs.

 

Voir l'image sur Twitter

Will Russia abet or restrain? @JoeWSJ: Ominous @PaulSonne: Russian-speaking Crimeans signing up to brigades

 

François Heisbourg, président de l’Institut international des études stratégiques (IISS) de Londres, pose la bonne question en retweetant la photo : « La Russie soutiendra-t-elle, ou calmera-t-elle » cet embryon de guerre civile en Crimée ? C’est à Moscou, en effet, que tout se décidera.

Sus aux « fascistes »

On voit dans cette vidéo, filmée également ces derniers jours en Crimée, à quel point les tensions sont vives. Un meeting de l’opposition pro-européenne est attaqué par des Russes aux cris de « fascistes » et de maigres forces de police tentent de protéger les Ukrainiens des coups et des insultes.

On les voit également brûler un drapeau américain, en écho aux accusations de Moscou contre les Occidentaux qui attiseraient le feu à Kiev.

 

 

Rassemblement de l’opposition ukrainienne attaquée aux cris de « fascistes » par des pro-Russes

Un coup d’œil à la carte permet de comprendre l’enjeu. Depuis le début de la crise ukrainienne, les commentateurs décrivent un pays clivé coupé en deux, entre une région ouest qui regarde vers l’Europe, et une région orientale qui lorgne vers la Russie.

On en oubliait presque la Crimée, cette péninsule au sud de l’Ukraine, bordant la Mer noire, la seule région dont plus de 60% de la population est d’origine russe, et qui abrite la flotte russe.

 


Carte de la population de l’Ukraine : la Crimée est la seule région majoritairement russe (« Atlas des peuples d’Europe centrale » de J. Sellier et A. Sellier, éd. La Découverte, 2002)

 

Plongée dans l’histoire

Le passage par l’histoire est nécessaire pour comprendre la situation. La Crimée est dans l’orbite de l’empire russe depuis le XVIIIe siècle après avoir fait partie de l’empire ottoman.

 


Victoire française à Malakoff durant la guerre de Crimée, par Horace Vernet, 1858 (Wikimedia Commons)

 

Mais la Russie doit faire face, de 1853 à 1856, à la « guerre de Crimée », considérée par les historiens comme la première guerre « moderne », qui vit l’empire russe s’opposer aux armées ottomane, britannique et de la France napoléonienne. Guerre extrêmement meurtrière (la France perdit 90 000 hommes) mais gagnée par la coalition hétéroclite anti-Russie.

Au XIXe siècle, l’aristocratie russe fait de cette région au climat agréable, dotée de vignobles et de stations balnéaires comme la célèbre Yalta (où se retrouvèrent Churchill, Roosevelt et Staline en 1945), son centre de villégiature.

Glamour pour les aristos russes, la Crimée a une histoire tragique pour ses habitants. Sous l’empire, sous les Soviets, face aux Nazis, cette région a payé le prix fort.

En 1954, pour le 300e anniversaire du rattachement de l’Ukraine à la Russie, le numéro un soviétique, Nikita Khrouchtchev, décide de placer la Crimée au sein de la République socialiste soviétique d’Ukraine plutôt qu’à celle de Russie. Une décision qui pèse lourd dans l’équation actuelle.

Personne, alors, ne pouvait imaginer un jour l’URSS éclater, et encore moins l’Ukraine accéder à une indépendance dont l’histoire l’a plusieurs fois privée.

Accès aux mers chaudes

Depuis l’éclatement de l’Union soviétique en 1991, et l’accession de ses républiques à l’indépendance, la Crimée fait l’objet d’accords spécifiques entre Kiev et Moscou, dont l’un, prévu pour vingt ans, jusqu’en 2017, permet la présence de la flotte russe de la Mer noire au port de Sébastopol.

C’est l’accès aux mers chaudes qui est en jeu, et Moscou ne peut pas accepter de perdre ce point d’ancrage historique. En 2008, au moment du conflit en Géorgie voisine, le site spécialisé DeDefensa.org écrivait à propos de la Crimée et du port militaire de Sébastopol :

« Il est difficile de trouver un casus belli plus significatif, avec toutes les implications possibles, dans un pays (l’Ukraine) lui-même soumis aux mêmes tensions antagonistes. »

C’est le message diffusé ces derniers jours, notamment dans les confidences d’un officiel russe au Financial Times, soulignant qu’en cas d’éclatement de l’Ukraine (entre ses parties est et ouest), la Russie interviendrait militairement en Crimée.

La naissance de milices russes en Crimée pourrait lui en offrir le prétexte si elle en voulait un, en s’abritant derrière une opinion majoritaire comme dans les Républiques d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, dont les indépendances unilatérales vis-à-vis de la Géorgie ne sont reconnues que par... la Russie.

N’oublions pas les Tatars de Crimée

On en oublierait presque les Tatars, peuple aux origines turques et mongoles, composé en grande partie de musulmans, qui a subi un sort impitoyable, d’abord à l’époque impériale où il fut poussé à l’émigration, puis de la part de Staline après la Seconde Guerre mondiale, qui reprochait aux Tatars de Crimée d’avoir favorablement accueilli l’armée allemande en 1941.

Staline décréta que les Tatars devaient tous être expulsés de Crimée, et ils le furent, déportés en Asie centrale dans des conditions telles que près de la moitié d’entre eux moururent de faim ou de maladie.

A la mort de Staline, ils furent autorisés à revenir au compte-gouttes en Crimée, mais n’y constituent aujourd’hui que quelque 10% de la population. Leur langue n’est toujours pas reconnue (seuls l’ukrainien et le russe sont langues officielles) et la spoliation économique qu’ils ont subie n’a jamais été réparée.

Pas de surprise, dès lors, à ce qu’ils veuillent, eux aussi, se faire entendre à la faveur des bouleversements que connaît actuellement l’Ukraine. Ce week-end, eux aussi organisaient un rassemblement à Simferopol, pour que les Tatars ne soient pas, une fois de plus, les victimes d’une histoire qui s’est remise en mouvement.

 

Voir l'image sur Twitter

Rally of Crimean Tatars in Simferopol.

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22 février 2014 6 22 /02 /février /2014 18:41

 

Source : www.lemonde.fr

 

 

Ukraine : le président Ianoukovitch destitué, l'opposante Timochenko libérée

Le Monde.fr avec AFP, AP et Reuters | 22.02.2014 à 09h38 • Mis à jour le 22.02.2014 à 19h14

 
 

 

 

Des manifestants devant le Parlement le 22 février.

 

 

La crise politique s'accélère en Ukraine. Samedi 22 février, les députés ukrainiens ont destitué le président Viktor Ianoukovitch et fixé au 25 mai la tenue de la prochaine élection présidentielle. Les députés de la Rada ont déclaré le chef de l'Etat, qui a quitté Kiev, dans l'incapacité constitutionnelle d'exercer ses fonctions. Viktor Ianoukovitch, qui avait auparavant dénoncé un « coup d'Etat », a essayé de prendre un avion pour la Russie, selon le président du Parlement.

Dans le même temps, l'opposante ukrainienne Ioulia Timochenko, condamnée en 2011 pour abus de pouvoir, est sortie de l'hôpital pénitentiaire où elle purgeait sa peine depuis trente mois. Elle a annoncé qu'elle se rendait à Kiev, sur Maïdan, la place de l'Indépendance occupée depuis trois mois par des milliers d'opposants.

Suivez la situation en direct

  • Ianoukovitch, destitué par les députés, dénonce un « coup d'Etat »

 

 

Viktor Ianoukovitch, le 21 février à Kiev.

 

 

Par 328 voix, la Rada, où siègent 450 députés, a destitué Viktor Ianoukovitch, le déclarant « dans l'incapacité constitutionnelle d'exercer ses fonctions ». Le texte de la motion, lu par le nouveau président de la chambre, Oleksander Tourchinov, un allié de l'opposante Ioulia Timochenko, souligne que le chef de l'Etat, qui a quitté Kiev, « a abandonné ses responsabilités constitutionnelles, ce qui menace le fonctionnement de l'Etat, l'intégrité territoriale et la souveraineté de l'Ukraine ».

« Viktor Ianoukovitch a essayé de prendre un avion à destination de Russie, mais il en a été empêché par des gardes-frontières. Il se cache actuellement quelque part dans la région de Donetsk », région pro-russe dans l'est de l'Ukraine dont il est originaire, a déclaré le président du Parlement Olexandre Tourtchinov, cité par l'agence Interfax.

Peu avant, dans une interview accordée à la télévision ukrainienne UBR, Viktor Ianoukovitch avait exclu de démissionner, dénoncé un « coup d'Etat » et rejeté la légalité des décisions prises par les députés. « Ce qui se passe aujourd'hui est du vandalisme, du banditisme, un coup d'Etat », avait-il lancé. « Je n'ai pas l'intention de quitter le pays », avait-il alors souligné, affirmant que sa voiture avait été visée par des coups de feu à Kiev. « Mais je n'ai pas peur », avait-il ajouté.

Dans la capitale, les lieux symboliques du pouvoir de Ianoukovitch ont été peu à peu investis. De nombreux journalistes ont pénétré sans difficulté dans la résidence du président — dans la banlieue de Kiev —, d'habitude sous très haute protection. L'opposition explique que les gens se rendent nombreux vers ce lieu « afin de constater dans quelles conditions vivait Ianoukovitch ces dernières années ».

Lire : La résidence façon parc d'attractions du président ukrainien

  • Timochenko libre se rend à Maïdan

 

 

L'opposante et ex-premier ministre Ioulia Timochenko, battue de justesse par Viktor Ianoukovitch à l'élection présidentielle d'avril 2010, est sortie de l'hôpital pénitentiaire de Kharkiv, dans le nord-est du pays, où elle était emprisonnée depuis trente mois. « Ioulia libérée ! », scandaient des centaines de personnes près du centre pénitentiaire. L'ancienne égérie de la « Révolution orange » de 2004, arborant sa tresse emblématique, les a saluées de la main, et son entourage a annoncé qu'elle se rendait à Kiev, sur Maïdan, la place de l'Indépendance occupée depuis trois mois par des milliers d'opposants.

« La dictature est tombée non grâce aux hommes politiques et aux diplomates, mais grâce aux gens qui sont sortis dans la rue, qui ont réussi à protéger leurs familles et leur pays », s'est-elle félicitée sur le site Internet de son parti. Le Parlement avait voté plus tôt dans la journée sa « libération immédiate ».

 

 

Au centre (assis), Volodymyr Rybak, l'ancien président de la Rada entouré par plusieurs députés ukrainiens, le 21 février 2014.

 

 

Dans la matinée de samedi, le président de la Rada a quitté ses fonctions. Dès l'ouverture de la séance, Volodymyr Rybak, membre du Parti des régions et proche de Viktor Ianoukovitch, a annoncé sa démission pour « des raisons de santé ». Plusieurs députés du Parti des régions, au pouvoir, ont également annoncé qu'ils quittaient leur formation.

Dans la foulée de la démission de M. Rybak, l'assemblée ukrainienne a élu Olexandre Tourtchinov, bras droit de Ioulia Timochenko, à la tête de la présidence de la Rada. « Le pouvoir en Ukraine reprend son travail pour stabiliser la situation », a-t-il déclaré après avoir été désigné par 288 voix sur un total de 450. 

  • Les forces de l'ordre refusent d'affronter le peuple

Les forces armées ukrainiennes ont annoncé qu'elles se tiendraient à l'écart de la crise politique en cours. « Les forces armées d'Ukraine sont loyales à leurs obligations constitutionnelles et ne peuvent être impliquées dans un conflit politique intérieur », peut-on lire dans un communiqué de l'état-major mis en ligne sur le site du ministère de la défense.

Les chefs de quatre organes des forces de sécurité, dont le patron des Berkout, la police anti-émeutes, ont parallèlement déclaré devant le Parlement qu'ils n'affonteraient pas le peuple. Le ministère de l'intérieur a exprimé pour sa part son soutien à un « changement rapide  » et a demandé aux citoyens de s'unir pour protéger la sécurité et établir un « pays européen indépendant, démocratique et juste ».

Lire notre reportage : A Kiev, les « centuries » de Maïdan investissent des rues désertées par la police

Les présidents de la Commission européenne, José Manuel Barroso, et du Parlement européen, Martin Schulz, ont salué samedi la libération de Ioulia Timochenko. Le ministre britannique des affaires étrangères William Hague s'est dit de son côté prêt, avec le ministre allemand des affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, à soutenir « un nouveau gouvernement » et le déblocage d'une aide financière du Fonds monétaire international.

Lire : Ukraine : Londres prêt à soutenir "un nouveau gouvernement"

A l'opposé, la Russie a dénoncé l'attitude de l'opposition ukrainienne après l'accord conclu la veille avec le président Viktor Ianoukovitch et mis en garde contre une menace sur la souveraineté du pays. « L'opposition n'a non seulement pas rempli une seule de ses obligations mais avance de nouvelles exigences, se soumettant aux extrémistes armés et aux pillards dont les actes constituent une menace directe pour la souveraineté et l'ordre constitutionnel de l'Ukraine », a déclaré le ministère russe des affaires étrangères dans un communiqué.

  • A l'est, la légitimité du parlement de Kiev remise en cause

Dans l'Est, russophile, ces changements ne semblent pas au goût de tous les politiques. Le gouverneur de la région de Kharkiv, Mikhaïlo Dobkine, a ainsi révélé qu'un congrès des régions ukrainiennes pro-russes s'était ouvert samedi à Kharkiv, en présence de députés et de gouverneurs russes. 

Les dirigeants des régions majoritairement russophones, partisans du président Viktor Ianoukovitch, ont remis en cause samedi la légitimité de la Rada et déclaré qu'ils conservaient le seul contrôle de leurs territoires.

Lire notre chronologie : Ukraine : des premières manifestations au compromis fragile

 

Source : www.lemonde.fr

 

 

 

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20 février 2014 4 20 /02 /février /2014 15:45

 

Source : www.mediapart.fr

 

Ukraine : une centaine de morts dans de nouveaux affrontements jeudi

|  Par La rédaction de Mediapart

 

 

Alors qu'une délégation européenne est à Kiev pour tenter de trouver une solution politique à une situation devenue incontrôlable, de nouveaux affrontements jeudi matin ont fait une centaine de morts près de la place de l'Indépendance de la capitale. La situation heure par heure.

La trêve proposée par le pouvoir n'aura donc pas vu le jour. Le centre-ville de Kiev est de nouveau jeudi le théâtre de violents affrontements entre manifestants et policiers anti-émeute, alors que la présidence reçoit une délégation européenne composée de plusieurs ministres des affaires étrangères. Les affrontements, avec tirs à balles réelles, ont déjà fait 100, selon le chef du service médical de la place Maïdan. Les cadavres ont été découverts devant la poste centrale et dans les halls d'hôtels devenus des hôpitaux de fortune.

Accusée par l'opposition de tirer sur son peuple, la présidence ukrainienne, qui reçoit actuellement les ministres des affaires étrangères allemand, français et polonais, a affirmé que « des dizaines de policiers » ont également été tués, accusant des snipers de l'opposition de se livrer à des tirs isolés : « Ils sont passés à l'offensive. Ils fonctionnent en groupes organisés. Ils utilisent des armes à feu, notamment des fusils de snipers. Ils tirent pour tuer. » Des propos non corroborés par d'autres sources. Amnesty International affirme de son côté que des snipers sont présents, mais du côté des forces de l'ordre.

16H15 - Kiev : Les ministres des affaires étrangères allemand, français et polonais sortent d'une réunion de plusieurs heures avec le président ukrainien Ianoukovitch. La délégation européenne doit désormais rejoindre l'opposition pour de nouveaux pourparlers. Les affrontements sont toujours aussi violents autour de la place Maïdan. L'AFP et Le Monde ont confirmé la mort de plus de 100 manifestants lors des violences de jeudi. 

 

Laurent Fabius         @LaurentFabius

Après 5 heures de discussion avec Viktor Ianoukovitch, nous allons rencontrer à nouveau les trois leaders de l'opposition

 

15H20 - Kiev : L'Union européenne étudierait un embargo sur les armes et le matériel utilisés pour la répression. Ces mesures de rétorsion pourraient également s'accompagner de sanctions ciblées contre les responsables du pouvoir. Washington annonce avoir interdit de visas une vingtaine de hauts responsables ukrainiens et envisage un gel de leurs avoirs économiques.

15H00 - Kiev : Citant le chef du service médical de la place Maïdan, Oleg Musi, le correspondant de CNN annonce que les affrontements de jeudi ont déjà fait «100 morts et 500 blessés ».

14H00 - Kiev : Le premier ministre russe Dmitri Medvedev exprime son soutien à Viktor Ianoukovitch : « Il faut que le pouvoir en exercice en Ukraine soit légitime et efficace (...) Le pouvoir doit se concentrer sur la défense des gens, des forces de l'ordre qui préservent les intérêts de l'État. »

13H55 - Kiev : La chancelière allemande, Angela Merkel, presse le président ukrainien, Viktor Ianoukovitch, d'accepter une médiation internationale entre le gouvernement et l'opposition. « Chercher à gagner du temps ne ferait qu’alimenter un peu plus le conflit », a déclaré un porte-parole d’Angela Merkel dans un communiqué.

12H55 - Kiev : Le bilan des affrontements s'alourdit. Selon plusieurs sources citées par l'AFP, au moins 50 cadavres ont été découverts.

 

 

12H50 - Kiev : Le maire de Kiev, Vladimir Makeenko, annonce sa démission, dénonçant un « bain de sang » dans la capitale.

12H45 - Kiev : Le ministre russe des affaires étrangères, cité par le Guardian, critique la promesse de sanctions de l'UE, parlant de chantage. Son porte-parole, Alexander Lukashevich, estime dans un communiqué que les menaces ne feraient qu'aggraver la situation.

12H30 - Kiev : Les blessés affluent dans des hôpitaux de fortune et les halls de bâtiments aux mains des manifestants pro-européens. Plusieurs dizaines de personnes touchées par des tirs de balles et l'explosion de grenades assourdissantes, selon Reuters.

 

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Bloody hell, literally, in Ukraine hotel lobby that was turned into makeshift hospital for the protesters

 

11H20 - Kiev : Les Berkout, les forces de police anti-émeute armées de kalachnikov, de bombes lacrymogènes et de grenades assourdissantes, tentent de reprendre la place “Maïdan” aux manifestants. L'envoyé spécial du Monde a retrouvé des douilles et des goupilles de grenades utilisées par les policiers contre les manifestants armés de battes et boucliers.

 

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Restes des balles de Kalashnikov et de grenades utilisées ce matin par la police. Tirs pour tuer.

 

11H15 - Kiev : Les forces de l'ordre ont lancé une contre-offensive sur la place Maïdan. L'AFP dénombre officiellement une dizaine de morts après les 28 recensés mercredi. Selon l'organisation internationale Amnesty international, plusieurs snipers de la police ont été positionnés sur le toit des immeubles entourant la place “Maïdan” pour tirer sur l'opposition.

11H05 - Kiev : Le pouvoir ukrainien impute les violences du matin aux opposants. « Ils sont passés à l'offensive. Ils fonctionnent en groupes organisés. Ils utilisent des armes à feu, notamment des fusils de snipers. Ils tirent pour tuer », écrit la présidence dans un communiqué. « Le nombre de morts et de blessés parmi les policiers se chiffre en dizaines », ajoute la présidence sur son site internet.

11H00 - Kiev : Les manifestants reprennent les barricades de la place “Maïdan” et se réarment avant l'offensive des forces anti-émeute. Planches de bois, métaux, meubles et poubelles permettent aux manifestants de se protéger d'un assaut des forces de police pour leur reprendre la place de l'Indépendance.

09H00 - Kiev : Dix corps découverts après le premier assaut des manifestants. Les manifestants les ont recouverts de couvertures dans un recoin de la place, théâtre d'une recrudescence de violences entre manifestants et policiers. 

09H00 - Kiev : Les ministres des affaires étrangères allemand, français et polonais arrivent à Kiev pour rencontrer le président, Viktor Ianoukovitch, et trouver une sortie de crise au conflit. Ils doivent également rencontré les représentants de l'opposition.

 

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, earlier today: FM @LaurentFabius @sikorskiradek arrive at the office of Pres.

 

08H15 : Des centaines de manifestants chargent le cordon des policiers anti-émeute sur la place Maïdan à Kiev, reprenant le contrôle du centre névralgique de la capitale. La trêve proposée après une nuit de violence, qui a fait 28 morts, prend officiellement fin.

Pour suivre la situation en direct dans la capitale :

 

 


Source : www.mediapart.fr

 


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19 février 2014 3 19 /02 /février /2014 14:28

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

Live blogging 19/02/2014 à 07h59
L’Ukraine compte ses morts : cinq questions sur un pays qui s’embrase
Imanol Corcostegui | Journaliste Rue89

 

* Dernière mise à jour à 16h23

 

 

uneguardian_0.jpg

La une du Guardian le 19 février (DR)

 

Un homme en flammes qui se protège le visage avec les mains. La une du Guardian ce mercredi matin illustre avec force l’embrasement brutal de la situation en Ukraine dans la nuit de mardi à mercredi 19 février.

Mardi, en fin de journée, le gouvernement a lancé l’offensive contre les manifestants et ce mercredi, le situation est toujours tendue à Kiev, sur la Place de l’Indépendance.

Le bilan des victimes varie en fonction des sources : le ministère de la Santé chiffre à 26 le nombre de victimes.

Des milliers de policiers antiémeutes sont partis à l’assaut des barricades, face au mur de feu dressé par les manifestants.

Espreso TV propose un live en streaming :

 

 

Espreso TV en direct

                                                                                                                                                                                                                             1 Où en est-on mercredi ?

 

Ce mercredi, le centre de Kiev ressemble à un champ de ruines après la bataille. La situation est toujours tendue, c’est un statu quo électrique. Les forces de l’ordre ont pris position autour de la Place de l’Indépendance, au milieu de la fumée et des barricades.

Elles contrôlent la moitié de la place tandis que la maison des syndicats, le QG des opposants, a en grande partie brûlé pendant la nuit – Le Monde.fr a fait une bonne carte sur Google maps. Les manifestants continuent de tenir les barricades.

 

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Barricade @ #Kiev's main street, leads to #Maidan. Smoke from trade unions building still on fire @ 8:00 am

 

Les autorités ont fermé la circulation et le métro pour empêcher l’arrivée de nouveaux renforts parmi les manifestants.

Le président Ianoukovitch a annoncé une journée de deuil national jeudi 18 février. Le pouvoir lance, par ailleurs, une enquête contre « certains hommes politiques », sans les nommer, soupçonnés d’avoir tenter un coup d’Etat.

                                                                                                                                                                                                                             2 Que s’est-il passé dans la nuit de mardi à mercredi ?

 

Mardi, en fin de journée, l’assaut a été lancé à Kiev contre les manifestants. Trois blindés et des milliers de policiers – 10 000 selon des estimations – ont fait face au mur de feu et aux cocktails molotov des opposants, pour la plupart armés.

Selon les opposants, les tirs venaient aussi de civils, « les titouchkis » payés par le pouvoir. Un activiste a mis en ligne cette vidéo :

 

 

 

Des tirs sur les opposants au pouvoir

Les combats ont fait 26 victimes et 241 personnes sont hospitalisées, selon les chiffres du gouvernement : c’est le bilan le plus lourd depuis le début du conflit, en novembre. Parmi les victimes, dix policiers et Viatcheslav Vérémiï, un journaliste du quotidien ukrainien Vesti.

Cette nuit, la Place de l’Indépendance ressemblait à un champ de bataille. Le site Mashable propose une sélection de photos marquantes de la nuit.

 

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ці батько й син — це УКРАЇНА сьогодні #Україна #Київ 18.02.2014 #Ukraine #Kyiv

 

La violence ne se limite pas qu’à Kiev. Dans certaines villes de l’ouest, à Lviv notamment, le pouvoir a aussi tenté de déloger les opposants des bâtiments publics qu’ils occupaient. L’est du pays, traditionnellement plus favorable au pouvoir pro-russe, est beaucoup moins touché.

                                                                                                                                                                                                                                3 Pourquoi le conflit s’est-il embrasé ?

 

 

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Nuit de violences à Kiev le 19 février 2014 (Emeric Fohlen/Nur Photo/Sipa)

L’offensive des forces de l’ordre a commencé mardi en fin d’après-midi. Plus tôt dans la journée, le pouvoir avait lancé un ultimatum aux opposants, leur demandant de quitter la Maison des officiers, bâtiment public proche du Parlement, que les manifestants occupent.

Mécontents de voir la réforme constitutionnelle qu’ils attendaient déprogrammée de la session parlementaire, les opposants venaient de durcir le ton, les plus radicaux s’en sont pris au siège du Parti des Régions, celui du pouvoir en place.

Face au non-respect de l’ultimatum, le pouvoir a lancé l’assaut. Par ailleurs, le président Viktor Ianoukovitch a estimé, pendant la nuit, que les opposants « ont franchi les limites » en apportant des armes à feu sur la place de l’Indépendance.

Il leur reproche de rester alliés aux radicaux d’extrême droite et de ne pas avoir attendu une session parlementaire où « des lois qui auraient changé l’Ukraine auraient pu être approuvées ».

Le conflit ukrainien a démarré en novembre, né du refus du pouvoir de se rapprocher de l’Union européenne plutôt que de la Russie. L’opposition reproche au pouvoir de céder aux pressions de Moscou, qui a octroyé en décembre à Kiev un crédit de quinze milliards de dollars et un rabais sur le prix du gaz.

                                                                                                                                                                                                                             4 Quelles sont les réactions internationales ?

 

Pour l’instant, le pouvoir se montre inflexible, malgré les critiques venues de l’étranger. Le vice-président des Etats-Unis, Joe Biden, a appelé Ianoukovitch a retirer les forces de l’ordre des rues de Kiev ; l’Allemagne a menacé le gouvernement ukrainien de sanctions.

La Pologne a réagi ce mercredi matin, le Premier ministre entend appeler l’Union européenne à prendre des sanctions.

Laurent Fabius a annoncé qu’il y aurait « probablement » des sanctions contre les responsables des violences. François Hollande a précisé « des sanctions individuelles ».

 

 

La France et l’Allemagne, mercredi après-midi, ont communiqué une position commune : des sanctions devraient être prises lors de la réunion extraordinaire des 28 ministres des Affaires étrangères des pays de l’UE jeudi.

Seul soutien pour l’instant, la Russie a dénoncé « une tentative de coup d’Etat » et appelé les manifestants à cesser la violence.

                                                                                                                                                                                                                             5 Qu’attendre de l’avenir ?

 

Face aux opposants, malgré la violence de la nuit, le gouvernement ukrainien reste intransigeant. L’ancien opposant Vitali Klitschko a été reçu par le Président durant la nuit. Il raconte avoir fait face à un mur, Ianoukovitch accuse les manifestants d’être responsables de l’embrasement.

Le Président parle de « tentative de coup d’Etat » et a brandi la menace de sanctions pénales pour les manifestants.

Il a même menacé de durcir le ton si les opposants ne prenaient pas leurs distances avec les manifestants les plus radicaux.

 

Tweets d'une liste de Rue89

  1. Security Service of #Ukraine says it is beginning antiterrorist operation http://www.kyivpost.com/content/kyiv/euromaidan-rallies-in-ukraine-feb-19-live-updates-337098.html  #EuroMaidan

  2. IOC turns down request from #Ukraine's Olympic team to wear black armbands to honor those killed in #Kyiv http://www.kyivpost.com/content/kyiv/euromaidan-rallies-in-ukraine-feb-19-live-updates-337098.html 

  3. Mashable: 'He must go': Kyiv protesters will fight president until the end http://www.kyivpost.com/content/ukraine-abroad/mashable-he-must-go-kyiv-protesters-will-fight-president-until-the-end-337143.html 

  4. PARIS (AP) — French President Hollande says those who started violence in Ukraine 'will be sanctioned'

  5. Best photo yet from Vasily Fedosenko in #Kiev #Ukraine. See them all here http://reut.rs/13ClIvQ   pic.twitter.com/8gN1DETpqe

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  6. An anti-government protester walks in Independence Square in central Kiev. Vasily Fedosenko http://reut.rs/13ClIvQ   pic.twitter.com/HQuUl2kg2A

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  7. Incredible #Kiev image from @reuterspictures photographer Vasily Fedosenko More at the link: http://reut.rs/13ClIvQ   pic.twitter.com/e538jI725Q

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  8. Video shot by @kgorchinskaya of protesters preparing, stockpiling Molotov cocktails on Maidan. http://youtu.be/jZfzAn7yny4   @KyivPost #EuroMaidan

  9. More photos coming in from inside Mikhailovsky Zlatoverkhy Cathedral. Others at the link: http://reut.rs/13ClIvQ   pic.twitter.com/tEnn0J7Xkg

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  10. Video shot by @kgorchinskaya of protesters digging up, stockpiling paving stones on Maidan. http://youtu.be/_DW6dOP5jjc   @KyivPost #EuroMaidan

  11. European Investment Bank has frozen its activities in #Ukraine http://reut.rs/13ClIvQ  

  12. Confrontation continues on Maidan: explosions and shouts at the barricades, speeches and prayers from the stage #euromaidan

  13. UN Human Rights Chief Pillay urges restraint in Ukraine, calls for investigation into possible use of excessive force http://reut.rs/13ClIvQ  

  14. My piece for @AJEnglish on the clashes in #Kiev http://tinyurl.com/kkatn6w   #Ukraine #euromaidan

  15. Cryptic message from Security Service of #Ukraine says criminal case launched into attempted coup by opp politicians http://www.kyivpost.com/content/kyiv/euromaidan-rallies-in-ukraine-feb-19-live-updates-337098.html 

  16. New link: http://reut.rs/13ClIvQ   RT @ReutersLive: Watch Live: Clashes between police and protesters in Ukraine

  17. Watch Live: Clashes between police and protesters in Ukraine http://reut.rs/1bkPYlK  

  18. Watch Live: Clashes between police and protesters in Ukraine [Pic: Interior Ministry officers at Independence Square] pic.twitter.com/iaOfpBO9i2

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  19. Fires rage on Independence Square as clashes between police, protesters continue on Feb. 19 http://www.kyivpost.com/multimedia/photo/fires-rage-on-independence-square-as-clashes-between-police-protesters-continue-on-feb-19-337106.html  pic.twitter.com/UzQn4NEagU

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  20. EuroMaidan rallies in Ukraine (Feb. 19 live updates) http://www.kyivpost.com/content/kyiv/euromaidan-rallies-in-ukraine-feb-19-live-updates-337098.html 

  21. два слова: КИЇВ ВСТАВАЙ #Україна #Київ 19.02.2014 #Ukraine #Kyiv

  22. a scene from last might in Kyiv #euromaidan #ukraine pic.twitter.com/S0uVCRjro3

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  23. #Ukraine Interior Ministry says 10th police officer killed, bringing total count of police & protesters killed to 26 http://mvs.gov.ua/mvs/control/main/uk/publish/article/983996 

  24. Protesters digging in for fight on #Kyiv's Independence Square http://www.kyivpost.com/content/kyiv/euromaidan-rallies-in-ukraine-feb-19-live-updates-337098.html  #EuroMaidan #Ukraine

  25. Def Min Lebediev says sent 500 airborne troops from Dnipropetrovsk to Kyiv, can't guarantee armed forces won't deploy http://lb.ua/news/2014/02/19/255986_lebedev_potverdil_otpravku.html 

  26. Mood calm and determined on Maidan, protesters preparing Molotov cocktails, crushing pavement for rocks, giving food pic.twitter.com/w4EYuAeDM8

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  27. Тітушки під прикриттям міліції розгромили машини швидких pic.twitter.com/WbHGuDR1OJ

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  28. #EuroMaidan rallies in #Ukraine (Feb. 19 live updates) http://www.kyivpost.com/content/kyiv/euromaidan-rallies-in-ukraine-feb-19-live-updates-337098.html

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  • Embattled Yanukovych remains defiant, blames opposition for violence http://www.kyivpost.com/content/politics/embattled-yanukovych-remains-defiant-blames-opposition-for-violence-337087.html 

  • Lva Tolstoho, machine gun carrying traffic police. #euromaidan #Ukraine #kiev #kyiv pic.twitter.com/X7igVxUQVO

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  • #Euromaidan protester walks out of the wall off fire pic.twitter.com/XkbAMegnur

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  • 2 trains between west #Ukraine & #Kyiv delayed b/c of reports they are carrying explosives, reports @interfax_news http://www.interfax.ru/world/news/359433 

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  • Arbuzov calls events in Kyiv attempt to seize power by force. #Євромайдан #Maidan #Euromaidan http://bit.ly/1ggyPal  

  • Reuters reporting 25 now dead in #Kiev protest #Maidan #Ukriane

  • Barricades to #Kiev's main st leading to square, smoke from trade unions building #Euromaidan pic.twitter.com/zVGsn1MHFH

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  • Video: Fire @ trade unions building, protesters at barricades @ #Kiev's main st leading to #Maidan @ 8 am http://tinyurl.com/ohfpojg  

  • Barricade @ #Kiev's main street, leads to #Maidan. Smoke from trade unions building still on fire @ 8:00 am pic.twitter.com/2w8uLz5Cek

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  • Protesters, some with sticks others wearing helmets, march to barricades @ #Kiev's main st leading to #Maidan pic.twitter.com/y5xthePaRu

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  • At daybreak, police and protesters remain on #Kyiv Independence Square; death toll rises to at least 25 http://bit.ly/1jOAfhK   #euromaidan

  •  

     

     

    Source : rue89.nouvelobs.com

     

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    15 février 2014 6 15 /02 /février /2014 16:21

     

     

    Source : rue89.nouvelobs.com


     

    SVOBODA 15/02/2014 à 13h36
    A Kiev, dans le « village » des irréductibles ukrainiens
    Tania Sollogoub | Economiste

     


    Maïdan, à Kiev, face aux forces de l’ordre ukrainiennes (Tania Sollogoub)

    Il faut aller à Kiev le dimanche. Il faut voir ça. Le taxi vous laissera avenue Kreschiatik, devant un portrait de Gandhi, dessiné hâtivement sur une grande banderole sale qui décorent l’une des premières barricades.

    Tout le centre-ville est bloqué. Les barricades sont faites de sacs de sable, de vieux vêtements, de chaises et d’un peu n’importe à vrai dire (les sacs Leroy Merlin, très solides, sont d’ailleurs l’une des présences les plus évidentes de la France en Ukraine aujourd’hui…).

    Ensuite, en vous rapprochant de la place centrale, vous verrez de loin une mer de drapeaux bleus avec des étoiles d’or. Et ce mot, « Europe », associé à celui qui veut dire liberté en Ukrainien : « SVOBODA ».

    « Ukraine », « Europe », « Liberté »… C’est écrit partout. Sur les murs mais aussi sur les joues des jeunes femmes, comme pendant les matchs de foot. Les Ukrainiens ont réussi à faire tomber leur gouvernement.

    « On est les seuls à s’opposer à Poutine »

    A présent, ils veulent une nouvelle constitution et des élections anticipées. Ils veulent leur liberté et ils ne veulent pas de Poutine. Igor, le chauffeur de taxi se retourne, et me dit en souriant :

    « Alors comme ça, on est les seuls à s’opposer à lui, en Europe, aujourd’hui ! »

    Surtout, ils veulent mettre fin à cette corruption qui dévore le pays depuis son indépendance en 1991. C’est vrai. Il faut les croire. L’ambassadeur de France me l’avait dit, en off, il y a trois ans :

    « Dites aux gens, dans votre société, que ce pays est dangereux politiquement, que les élites sont totalement corrompues ».

    Comme ailleurs ? Non : plus qu’ailleurs, et mieux qu’ailleurs. Et les gens en crèvent. Donc, avec le mot « SVOBODA », il y en a un autre qu’on entend très souvent : « Des bandits, tous des bandits ». N’importe quel investisseur sait bien que c’est la vérité.

    Le vrai grand ras le bol du siècle

    Cette fois, me dit-on, ça ne sera pas comme la révolution orange en 2004. A l’époque, c’était un parti contre un autre. Là, c’est le bazar, c’est certain, mais c’est le changement ! Le vrai grand ras le bol qui soulève les pays une fois par siècle.

    Il faut dire que l’Ukraine a vécu vingt ans de transition pour rien du tout ou presque, des revenus qui sont au niveau de ceux de l’Algérie et une situation catastrophique dans l’éducation et la santé.


    La foule, tous les dimanches, sur Maïdan (Tania Sollogoub)

    Bien sûr, les gens qui manifestent ne savent pas encore pour qui ils pourraient voter (les représentants de l’opposition sont souvent en prison) mais ils sont là comme l’explique Igor :

    « On verra après. Les partis vont s’organiser. On sait bien que ça prendra du temps, ce sera dur, mais on est prêts. C’est une révolution vous savez. C’est comme ça les révolutions. »

    Le dimanche dans la « ville libre de Kiev »

    Igor sourit tout le temps. Il lui manque une dent à droite, en plein milieu du sourire, mais le dentiste c’est cher. Au fond, je crois qu’il a raison. Les vrais leaders apparaissent souvent quand l’histoire a besoin d’eux et en général, on ne les connaît pas avant !

    Ceux qu’on connaît, les hommes politiques normaux, ceux-là n’ont pas la trempe pour sauver les pays.

    Alors, tous les dimanches depuis la fin novembre, on se retrouve à Maïdan et on refait encore et toujours le même pied de nez à Poutine. Non, l’Ukraine ne sera pas à la botte de Moscou, même si la moitié des Ukrainiens sont russophones…

    Il y a tout de même une différence entre parler une langue ou avoir des origines, et décider de s’asservir. Les russophones sont mécontents, partagés, mais silencieux et inquiets. Et comme les autres, ils regardent ce peuple immense, calme et résolu, qui converge vers le centre-ville, tous les dimanches matins, vers la « ville libre de Kiev »...

    Maïdan, c’est un village de gaulois

    Maïdan, c’est un village de gaulois. Des tentes hétéroclites, des baraques en bois, et tout ce qui peut servir au campement. Il y a des quartiers et des commandants de quartier, qui vous font visiter ce qui ressemble à des yourtes.


    Maïdan, à Kiev, la ville des irrédictibles ukrainiens (Tania Sollogoub)

    On entre en soulevant un rideau ou un vieux tapis. Des gens dorment les uns à côté des autres, par terre. Dans un coin, des amas de vêtements. Chaque tente arbore bien sûr des drapeaux européens et ukrainiens, mais aussi une pancarte avec une appartenance politique, ou bien le nom de la ville dont on vient.

    Toute l’Ukraine est là d’ailleurs, y compris les fameuses villes russophones de l’Est telles Dinepopetrovsk, Kharkov…

    Partout, des hommes coupent du bois – c’est aussi la grande bataille de l’hiver – et comme sur les chantiers, des feux sont allumés dans de grands containers qui brûlent la peau quand on s’en approche trop.


    La soupe collective sur Maïdan (Tania Sollogoub)

    Des hommes et des femmes touillent la soupe en plein air dans d’immenses bassines. Ça sent la Kacha. Ça fume parce qu’il fait froid. On étale du miel sur de grandes tartines.

    Tout est sale, à la fois triste le matin et réjouissant le soir, quand les citoyens ordinaires apportent aux insurgés leurs bocaux de cornichons fabriqués maison.

    Ils ont tenu là par -20° en décembre, mais à présent que cela se réchauffe un peu, il y de la gadoue partout. Et des rangées de latrines qui puent.

    Les visages sont fatigués, pauvres. Beaucoup de vieux, bien sûr, qui ont ressortis leurs uniformes militaires ; ces marginaux dont ne cesse de parler le gouvernement (mais les marginaux aussi, ont droit à la colère), des étudiants, des artistes (je tombe sur une table de ping-pong à côté d’une tente de jeunes peintres) et des agriculteurs paraît-il, parce que c’est une saison calme pour eux.

    Ces gars là savent manier la barre de fer

    Les visages sont noirs, rudes, les mains épaisses. A force de voir des films qui montrent de fausses guerres, on n’imagine pas les révolutionnaires comme ça.

    Mais quand ils disent : « Je suis prêt à mourir » (et ils le disent tous), on se souvient que c’est vrai. Ils peuvent mourir. Je passe la soirée avec eux, assise sur une bûche. Au fond, il vaut mieux que ce ne soient pas des révolutionnaires de salon. Ces gars-là doivent effectivement savoir manier une barre en fer.


    Un visage souriant dans la révolution (Tania Sollogoub)

    Et puis parfois, une image miraculeuse : une femme avec le visage de Marina Vlady sort devant moi d’une tente, dans un long manteau de fourrure noire. « I’m a guest », me dit-elle. On se sourit. Elle va fumer une cigarette en regardant la place. Un peu plus loin, un type est en train de couper les cheveux d’un autre.

    Très vite, on ne peut plus bouger. De l’ordre de 100 000 personnes sont sur place, et cela a grimpé jusqu’au million en janvier. Des grands-mères, beaucoup de grand-mères ! Car elles ont tout vu du siècle, m’expliquent-elles, elles n’en peuvent plus.

    L’une d’entre elles, qui distribue les tracts, me dit :

    « Taniouchka, on n’a plus rien à perdre tu sais ! Alors, en semaine, pendant que Kiev travaille normalement, nous, on garde Maïdan. »

    Il y a aussi ces mamans en chapka, avec leurs petites filles à la main (bonnets à pompon roses, nattes blondes et délicieuses petites filles slaves), des étudiants, des filles incroyablement belles (Marina, sur la barricade, avec des ongles peints en doré !).

    Evidemment pas des extrémistes. Cela, c’est juste la propagande russe qui fonctionne à plein, comme les Chinois l’ont fait pendant vingt ans, pour réécrire Tian’AnMen. Et il paraît d’ailleurs qu’ils ont réussi, puisque certains jeunes chinois ne connaissent même pas l’existence du massacre [du 4 juin 1989, ndlr].

    C’est toujours la même arme que les régimes autoritaires ressortent quand ils veulent effacer l’histoire : la grande bataille de la désinformation, contre laquelle les démocraties sont bien trop honnêtes.

    Sur Télé-Poutine, que des hommes cagoulés

    Il suffit de regarder la télévision russe en ce moment pour comprendre : Poutine sous toutes les coutures, Poutine avec des gosses, des sportifs, des scientifiques, un visage rond, une voix douce. Et de Maïdan, on ne montre que des hommes en cagoule, avec des barres de fer. Moscou inonde les réseaux sociaux. Ils savent faire. Mais c’est tout simplement faux.


    Maïdan, à Kiev, face aux forces de l’ordre ukrainiennes (Tania Sollogoub)

    Il suffit d’aller à Kiev le dimanche. « Dites-leur que c’est faux », me demandent les gens. Alors bien sûr, à deux rues près, la ville est calme. Mais que vaut cet argument ? C’est normal ! C’est ce qu’on appelle une insurrection ! C’était déjà comme cela au XIXe siècle en France !

    A Maïdan, on écoute les discours qui se succèdent sans arrêt sur l’estrade géante de la place centrale (ça commence à 7 heures du matin !). Klitchko, le boxeur, a une très belle gueule et une voix qui fait trembler. On sait bien qu’il n’est pas très compétent en politique mais il est bien entouré, paraît-il.

    Igor, encore :

    « C’est un gars correct, c’est un boxeur. Un loyal celui-là, tu comprends ? Son fric, il l’a gagné avec ses poings. »

    Et puis, on chante, on chante beaucoup. Et même (parce qu’on est slave), des gens récitent des poèmes à la tribune, devant 100 000 personnes au bord des larmes. Force ou faiblesse de ces peuples, je ne sais pas, mais je pleure avec les autres.

    Un peu partout, sont affichées des caricatures du président Yanoukovitch et de Poutine. Le Président, c’est un pantin de Moscou ! me dit-on.

    Lui, il est très bête, tout le monde le sait, même ses amis oligarques. Mais ils peuvent nous en sortir un autre plus dur du chapeau, un vrai petit Poutine.

    Que se passera-t-il après Sotchi ?

    Parce que le problème de l’Ukraine, c’est Poutine. Le problème, c’est ce qui va se passer à la fin des jeux de Sotchi : le président russe est en échec à Kiev mais comment peut-il l’accepter ?

    Difficile d’appliquer des méthodes dures face à des grands-mères, ça pourrait être un bain de sang. Evidemment jouer l’épuisement (d’où l’importance de la communication) ? Mais pour l’instant, le mouvement ne s’épuise pas.


    Maïdan, à Kiev, la ville des irrédictibles ukrainiens (Tania Sollogoub)

    Alors quel genre de compromis Poutine peut-il trouver pour éviter de perdre la face ? Un référendum d’autodétermination qui lui permettrait de récupérer quelques régions de l’Est ? C’est possible.

    Mais si l’Ukraine éclate, ce ne sera donc pas le résultat d’une guerre civile comme on l’entend trop souvent. C’est complètement faux. Il n’y pas de manifestations pro-russes aujourd’hui. Aucun affrontement au sein de la population.

    En fait, les russophones aimeraient surtout revenir au statu quo géopolitique (ni russe, ni européen). Malheureusement ils seront peut-être obligés de choisir, et ils choisiront peut-être la Russie… Mais à ce jour, ils ne l’ont pas réclamé. On les entend peu. Si l’Ukraine implose, si cela arrive, ce sera pour que Poutine n’ait pas perdu la face. Ce sera surtout pour cela.

    « Regarde ça, c’est de la vraie guerre ! »

    Dans l’après-midi, tout le monde se dirige vers la barricade devant l’Hôtel Dniepro, pour regarder à quelques mètres la ligne noire des forces de l’ordre. Immobile, surréelle. Mais c’est pourtant vrai et ça peut chauffer (les vendeurs de magnets me disent : « Regarde, ça c’est la vraie guerre ! tu m’achètes ? Pour ton frigo ? »).

    Vraies aussi les tentatives pour dégager Maïdan par la force, à deux reprises depuis deux mois, à 4 heures du matin. Un échec (et des morts) car les Ukrainiens sont tous venus, prévenus on ne sait comment par les réseaux sociaux. Il paraît que les taxis descendaient gratuitement les gens vers le centre-ville.

    Aujourd’hui Maïdan a donc ses héros, dont on voit les portraits un peu partout. A l’entrée d’une des barricades, un stand expose les balles utilisées par le pouvoir.

    Il paraît aussi que lors de l’adoption des lois liberticides (abrogées depuis peu), interdisant notamment de manifester et de porter un casque pendant les rassemblements, tout le monde est sorti le dimanche suivant avec une casserole ou un seau sur la tête ! Slava Ukraïna !

    La démocratie tirée par les dents

    Vraies enfin, les tentatives d’assassinat au fond des bois, la présence de troupes russes d’élite (les « Berkut »), la torture de ce type qui a eu l’idée géniale de « l’auto Maïdan » (un rassemblement de voitures bloquant le quartier du Président).


    Les Babouchkas contre Poutine (Tania Sollogoub)

    Tout cela, c’est vrai et ça dure. Il faut en parler. Dire que les Babouchkas ukrainiennes, tous les dimanches, sont les seules capables de s’opposer à Poutine ! Dire que tout cela peut évidemment disparaître dans le sang ou même le froid, mais que cela existe, a existé.

    Sur la barricade, dimanche dernier, tout le monde a ouvert des parapluies, pour faire un signe aux démocrates russes, dont une radio vient d’être fermée. Elle s’appelait « la pluie ».

    La monnaie est attaquée, le pays est au bord du défaut de paiement, la croissance risque de s’effondrer, et on espère que certains oligarques vont enfin bouger au Parlement (cette semaine peut-être ?).

    Reste que ce dimanche, comme tous les dimanches, les Ukrainiens s’en foutaient. Ils tiraient le changement et la démocratie par les dents. Et beaucoup de Russes les regardent avec intérêt, ces petits parapluies qui tournent, qui tournent sur les barricades, pour leur dire bonjour de loin.


    Les parapluies, en référence à la télé russe (Tania Sollogoub)

    Et d’autres aussi, mes deux jeunes amis allemands, venus pour trois jours, Anna et Georg, juste trois jours :

    « On voulait être là à côté des Ukrainiens, vous comprenez ? »

    Bien sûr. Nous sommes nombreux, à Kiev, venus pour écouter le cœur de l’Europe qui palpite encore là-bas…

    Alors, quand le douanier français me demande au retour ce que j’ai dans mon sac à dos (et flute il y a la grève des taxis !), j’ai envie de lui dire : une furieuse sensation de fraternité !

    Rappelez-vous que Tian’AnMen n’a duré que deux mois. Mais c’est profond les racines d’une idée. Slava Ukraïna…

     

     

    Source : rue89.nouvelobs.com

     

     

     

     

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