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13 mars 2013 3 13 /03 /mars /2013 14:40

 

Le Monde.fr avec AFP | 13.03.2013 à 10h15 • Mis à jour le 13.03.2013 à 11h13


 

 
L'économie tunisienne est toujours anémique tandis que le pays est paralysé par une crise politique.

Le jeune vendeur à la sauvette de 27 ans, Adel Khadri, qui s'est immolé par le feu mardi matin à Tunis est mort à l'aube mercredi "des suites de ses graves brûlures", a indiqué Imed Touibi, le directeur du centre des grands brûlés Ben Arous. 

Ce vendeur de cigarettes ambulant s'était immolé par le feu mardi matin sur l'avenue Habib-Bourguiba, en plein centre de Tunis, en hurlant "voilà la jeunesse qui vend des cigarettes, voilà le chômage".

Ce geste est hautement symbolique, la révolution de janvier 2011, la première du printemps arabe, ayant été déclenchée par l'immolation d'un marchand ambulant, excédé par la misère et les brimades de policiers, à Sidi Bouzid.

La pauvreté et le chômage étaient au cœur des causes du soulèvement qui a renversé le régime de Zine El-Abidine Ben Ali, or deux ans après l'économie tunisienne est toujours anémique tandis que le pays est paralysé par une crise politique. Un nouveau gouvernement, dirigé par l'islamiste Ali Larayedh doit obtenir mercredi la confiance des députés.

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12 mars 2013 2 12 /03 /mars /2013 17:52

 

 

Rue89 - En image 12/03/2013 à 11h40
Pierre Haski | Cofondateur Rue89

 

A 9 heures ce mardi matin, devant le théâtre municipal de Tunis, avenue Bourguiba, en plein centre de la capitale tunisienne : Adel Khedri, 27 ans, vendeur de cigarettes à la sauvette, crie « voilà le chômage », et met le feu à ses vêtements.

Les passants lui ont aussitôt porté secours, et le jeune homme a été transporté encore en vie et conscient à l’hôpital, où le pronostic vital est toutefois engagé.

 


Immolation d’un chômeur mardi matin à Tunis (via @HayenAyari sur Twitter)

 

La scène a aussitôt été relayée sur les réseaux sociaux, avec cette photo terrible qui, au-delà du choc, force à s’interroger sur le désespoir social d’un homme de 27 ans.

Cette scène évoque évidemment auprès des Tunisiens le souvenir de Mohamed Bouazizi, le vendeur à la sauvette de Sidi Bouzid qui s’est immolé en décembre 2010, déclenchant sans le savoir la révolution qui chassa un mois plus tard le président Ben Ali du pouvoir.

Un peu plus de deux ans après, cette nouvelle immolation d’un jeune chômeur, originaire de Jendouba, dans le nord-ouest du pays, vient montrer que le changement de pouvoir n’a pas réglé la question sociale, au cœur du mécontentement de la population, hier comme aujourd’hui.

Ce geste désespéré en évoque d’autres, du Tibet sous le joug chinois, où plus de cent personnes se sont immolées depuis deux ans, à la France, où, le mois dernier, un homme de 43 ans, chômeur en fin de droits, s’est lui aussi immolé devant une agence de Pôle emploi à Nantes.

 

 

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Tunisie. Un nouveau Mohamed Bouazizi s'immole avenue Bourguiba

 

Marianne - Rédigé par Martine GOZLAN le Mardi 12 Mars 2013 à 19:40

 

Adel Khadri, 27 ans, vendeur de cigarettes à la sauvette, a tenté de s'immoler par le feu sur les marches du Théâtre municipal de Tunis, au coeur de la capitale. Avant de s'asperger d'essence, il a crié " Voilà la jeunesse qui vend des cigarettes, voilà le chômage!"...

 

Timbre édité en hommage à Mohamed Bouazizi
Timbre édité en hommage à Mohamed Bouazizi

 Il est originaire de Jendouba, ville pauvre comme l'était et l'est toujours le Sidi-Bouzid d'où est partie la révolution tunisienne après le suicide par le feu de Mohamed Bouazizi, le 17 décembre 2010. Comme l'homme qui est devenu le martyr officiel de la chute de la dictature, Adel Khadri est jeune, chargé de famille, issu d'un foyer sans père et dont il est le seul soutien. Comme Bouazizi ne possédait que sa brouette de légumes renversée par une policière, Khadri ne possède que son éventaire de cigarettes. Dans la capitale, le spectacle des marchands ambulants qui s'étaient crus brièvement protégés des interdictions par le symbole Bouazizi est devenu familier. Avenue de Paris, ils s'entassent, se disputent ou s'entr'aident.
Adel n'est pas le premier à vouloir mourir. En 2012, une vague de suicides par le feu a secoué à nouveau le pays, de Gafsa, au coeur du bassin minier des phosphates à l'avenue Jean Jaurès, en plein Tunis. Une femme, plusieurs hommes, un mort, on ne sait pas trop: ces victimes ne sont pas devenues des emblêmes de la souffrance comme leur malheureux prédécesseur. C'est qu'il faut un vaste mouvement de révolte, latent, et prêt à exploser pour qu'une collectivité s'empare d'un destin individuel et fasse sienne sa tragédie. Jusqu'à ces derniers mois, en Tunisie, la colère était partout mais sans parvenir à s'accorder. L'incapacité du gouvernement islamiste et de ses alliés théoriquement de gauche ( le Congrès pour la République du président Marzouki et Ettakatol du président de l'Assemblée Constituante Mustapha Ben Jaafar) à satisfaire le besoin de justice sociale et à donner du travail - il y a toujours 800 000 chômeurs -  était encore voilée par de multiples alibis: le temps court donné au pouvoir depuis octobre 2011, les "contre-révolutionnaires" dans la coulisse, etc...Ennahda gouvernait sur la fiction  d'un credo religieux guérisseur et nourricier.
Les immolations de 2012 sont donc passées à la trappe des désespoirs obscurs.
Or, en cette fin d'hiver 2013, un cap a été franchi dans la perception que le peuple tunisien se fait du gouvernement élu. L'assassinat de Chokri Belaid, le 6 février dernier, a cristallisé le sentiment d'écoeurement, soudé l'opposition, rappelé que les leaders de la gauche sociale comme Belaid- à la tête du Front Populaire- étaient haïs d'un pouvoir à la fois bigot et ultra-libéral. Les attaques contre les syndicalistes de l'Union Générale des Travailleurs Tunisiens se sont multipliées, imputables la plupart du temps aux Ligues de protection de la révolution, bras armé d'Ennahda. Qui gouverne, au fond,  la Tunisie pauvre et populaire, affamée de pain, de travail et de "karama", la fameuse "dignité" arabe révolutionnaire? Une extrême-droite religieuse ultra-réactionnaire et ultra-capitaliste! Les deux autres partenaires de la "troika", reconduits dans le nouveau cabinet dirigé par Ali Laarayedh n'ont qu'à se taire.
Le contraste entre les rêves pour lesquels le peuple a voté et la réalité est devenu abyssal. Plus personne ne se fait d'illusions sur le riche parrain des islamistes tunisiens, le Qatar et autres bailleurs de fonds du Golfe wahhabite.  Le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie, Cheryf Ayari, reconnaissait la semaine dernière, lors d'une rencontre privée à Paris: " Toutes les tentatives faites auprès de ces pays se sont révélées très décevantes. Un petit prêt nous a été consenti, mais à un taux extrêmement dur..." Bonjour la solidarité islamique! De même que les moutons de l'Aid, la fête de la fin du Ramadan, distribués par Ennahda en pleine campagne électorale de l'automne 2011, ne peuvent pas ressusciter, les illusions sur la manne venue des amis de Rached Ghannouchi, se sont fânées.
Plus aucune manne n'arrivera, en dehors de celle, très contrôlée, du prêt consenti par le Fonds monétaire international. Cheryf Ayari, qui vient de le négocier, s'insurgeait contre la vague de protestations qui monte, caisse de résonance de l'inquiétude sur de nouvelles mesures de rigueur. " Nous n'avons pas le choix, martelait-il, qui va combler les trous? Du reste, tout le monde, jusqu'aux pays arabes frères, nous questionne sur nos relations avec le FMI. C'est pour cela que j'ai tenu à ce que la délégation du Fonds monétaire à Tunis rencontre la société civile, les partis , les syndicalistes..."
Entre un gouverneur de la banque centrale, qui en appelle désespérement à la fois au FMI et aux investissements européens, surtout français " pour éviter que la Tunisie ne tombe dans le piège de la violence et du fanatisme", et la tentative d'immolation d'un jeune vendeur de cigarettes, il y a une relation mathématique, dramatique. A l'heure où Adel Khadri  se précipitait vers les marches du joli Théâtre municipal, blanc, rococo, aérien, pour en faire le décor de son embrasement, le nouveau Premier ministre Ali Laarayed soumettait la liste de son gouvernement à l'approbation de l'Assemblée Constituante. En même temps personne n'était dupe à Tunis des profondes fractures  au sein même du parti islamiste, de sa dérive autoritariste, de son ambivalence vis à vis de l'extrémisme ( les Ligues de protection de la révolution sont dissoutes seulement pour un mois) et de ses incapacités sécuritaires et économiques.
C'est sur cette toile de fond d'un pays où le malheur  s'aggrave de trop de songes trahis qu'un jeune homme a allumé le feu de sa douleur solitaire.
Sera-t-elle entendue et reprise, comme il y a un peu plus de deux ans, par un faubourg, une ville, un chant, un deuil, un peuple? Rien n'est moins sûr. Et, en même temps, à Tunis, tout est possible.

 

 

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12 mars 2013 2 12 /03 /mars /2013 17:40

 

LE MONDE | 12.03.2013 à 10h26 • Mis à jour le 12.03.2013 à 10h49 Par Francine Aizicovici


 
Le leader mondial des centre d'appels emploie 6 000 personnes en Tunisie.

Si les grèves sont devenues courantes en Tunisie depuis la "révolution du jasmin", le mouvement social que connaît Teleperformance, le leader mondial des centres d'appel, qui emploie 6 000 salariés dans le pays, a pris une forme extrême.
Pour protester contre des licenciements jugés abusifs, le 26 février, six syndicalistes se sont enfermés dans une salle de réunion du siège tunisois de Teleperformance, et quatre s'y trouvent toujours. Puis, le 5 mars, trois ont entamé une grève de la faim.

Lundi 11 mars, cette action s'est étendue : dans chacun des centres d'appel de l'entreprise, à Tunis, à Ben Arous, dans la banlieue de la capitale, et à Sousse, sur la côte est, au moins cinq salariés ont observé, à tour de rôle, une journée de grève de la faim. En France, les syndicats Sud et CGT des centres d'appel soutiennent ce mouvement.

L'élément déclencheur a été, selon Slim Ben Romdhane, secrétaire général adjoint du syndicat Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) de Teleperformance à Ben Arous, "le conseil de discipline du 26 février, qui a débouché sur des licenciements et des sanctions abusifs", dit-il.

Selon M. Ben Romdhane, de telles réunions ont lieu tous les quinze jours, pour vingt personnes, pour des "motifs divers – retard, absence injustifiée d'une journée, traitement non conforme d'un appel téléphonique, etc. En général, ces personnes sont licenciées ou mises à pied, pour des raisons non valables. Certaines ont huit ou dix ans d'ancienneté." Les syndicalistes demandent "l'annulation de toutes les décisions du conseil de discipline du 26 février". Mais pour la direction du groupe, "il ne peut y avoir de dialogue raisonnable tant que les personnes ne cessent pas l'occupation illégale des locaux". Les occupants attendent, eux, qu'un accord soit signé pour quitter les lieux.

Teleperformance précise que la direction locale a eu trois réunions avec l'UGTT depuis le 26 février, qu'un accord a été trouvé avec "un des principaux dirigeants de l'UGTT", et qu'il doit être, selon elle, présenté aux représentants syndicaux. Mais le 11 mars, aucune solution ne semblait en vue.

 

 CONFLIT SUR L'ANCIENNETÉ

Autre élément du conflit : selon le syndicat, un accord a été signé, en décembre 2010, prévoyant des augmentations salariales sur trois ans, et la mise en place d'une grille de classification qui devait faire l'objet de négociations pour être applicable au 1er janvier 2012. Elles ont abouti à un projet de grille, mais direction et syndicat n'ont pas pu se mettre d'accord sur les augmentations liées à l'ancienneté.

Teleperformance a proposé "que les négociations se poursuivent au niveau du secteur des centres d'appel, dans le cadre de la mise en place d'une convention" collective. Et décidé unilatéralement d'appliquer des augmentations salariales supérieures à celles qui avaient été négociées en 2010 afin, explique-t-elle, "de compenser le retard de la mise en place de la grille de classification", soit 11 % sur 2012-2013, au lieu de 8 %. Mais l'UGTT refuse que la négociation des classifications chez Teleperformance, qui dessinent des évolutions de carrière, soit abandonnée.

Mardi, une réunion devait avoir lieu au ministère tunisien des affaires sociales avec la direction de Teleperformance et l'UGTT.

Ce conflit survient à un mauvais moment pour la société. Le 21 mars se tiendra à Paris une réunion du comité pour l'attribution du label de responsabilité sociale, auquel le groupe postule et qui fait la part belle à la gestion des ressources humaines et au dialogue social... Son obtention est une exigence inscrite dans le cahier des charges de certains donneurs d'ordre.

Francine Aizicovici

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22 février 2013 5 22 /02 /février /2013 14:31

 

 

laviedesidees.fr

 

Sur le soulèvement tunisien et la transition démocratique

  par Leyla Dakhli , le 19 février

                                                                                                                                                                                                                          La révolution en Tunisie s’est-elle retournée contre elle-même, portant au pouvoir un parti peu enclin à défendre les libertés individuelles ? Le processus démocratique est-il définitivement enterré ? La réalité, montre Leyla Dakhli, est bien plus complexe, et si trahison il y a, elle réside dans l’incapacité de la classe politique tunisienne à prendre en compte la demande de justice sociale.

 

Télécharger ce(s) document(s) :

 

Le soir du 14 janvier 2011, un homme seul criait sur l’avenue Bourguiba : « Ben Ali hrab ! » (Ben Ali s’est enfui), célébrant ainsi la stupéfiante victoire d’une révolution. Dans ce cri, il fallait entendre l’admiration pour le peuple, l’amour pour la liberté, la tristesse pour les morts. Il était seul, dans le noir, sur cette avenue qui quelques heures plus tôt était envahie par la foule en colère. C’était un avocat, un de ces nombreux avocats qui soutinrent la révolte de toutes leurs forces.

Le 8 février 2013, plus de deux ans plus tard, c’est un autre lieu de la capitale, son principal cimetière, qui est envahi par la foule, une foule triste et enragée, venue accompagner un autre avocat révolutionnaire, Chokri Belaïd, devenu un opposant virulent, assassiné devant son domicile.

Entre ces deux moments, le peuple tunisien n’est pas sorti fêter sa liberté, ni crier sa colère d’une seule voix. Alors que les mobilisations se poursuivaient continûment dans le pays, une forme de déception, de découragement s’est installée. Depuis la révolution, pas une semaine ne se passe sans mobilisation, grèves, voire émeutes (dans certaines villes comme Le Kef, Sidi Bouzid, Siliana ou Gafsa, les affrontements avec les forces de l’ordre sont monnaie courante). Le sentiment d’une révolution trahie coexiste à présent avec le constat, visible, que le processus révolutionnaire est encore en cours. Comment expliquer ce paradoxe ?

La plupart des commentateurs font de l’élection du parti islamiste Ennahda après les élections d’octobre 2011 la figure de la trahison. La révolution des jeunes, épris de liberté et de justice, aurait accouché d’un monstre islamiste, conservateur et liberticide. Les premières élections libres post-révolutionnaires auraient porté au pouvoir des adversaires de la démocratie et de la liberté.

A l’analyse, il apparaît que s’il y a eu “trahison” de la révolution, elle ne se situe pas forcément dans l’opposition entre “conservateurs religieux” et “progressistes laïcs”. La mise dos à dos de ces deux camps, largement orchestrée par le jeu politique partisan, masque la difficulté de l’ensemble de la classe politique à répondre aux demandes populaire de justice sociale.

L’oubli du caractère social de la révolte de 2011
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Willisfromtunis, 2013

Les manifestations de décembre 2010 et janvier 2011, si elles sont apparues comme une « surprise » pour de nombreux observateurs, ont fait écho à d’autres moments forts de contestation sociale, notamment les révoltes du bassin minier de Gafsa en 2008 [1]. Mouvement social d’une ampleur majeure, mobilisant les ouvriers et leurs familles pendant de longs mois, il fut violemment réprimé dans l’indifférence quasi totale du reste du pays. D’autres moments de forte contestation, comme à Ben Guerdane en août 2010, dans la région agricole de Sidi Bouzid, Kasserine et Thala dans le centre-ouest du pays en décembre 2010, n’ont pas non plus déclenché à leur suite de « contagion révolutionnaire ». Les émeutes de décembre 2010, parties des mêmes villes déshéritées du centre de la Tunisie, qui donnèrent le premier élan à la révolution populaire, n’étaient pas si différentes de celles qui les ont précédées. Elles trouvent leur source dans la conjonction entre un système de corruption clientéliste à large échelle, et des blocages sociaux empêchant la grande majorité d’avoir une vie digne, décente.

Si dans l’hiver 2011, les grandes villes de la côte (particulièrement la ville industrieuse de Sfax, mais aussi bien sûr la capitale), ont rejoint le mouvement de révolte, c’est après trois semaines d’émeutes dans l’intérieur du pays et parce qu’en ce moment précis les intérêts de tous ont convergé, produisant le moment révolutionnaire que l’on a pu observer. La conjonction s’est opérée sous la pression des militants syndicaux (y compris contre leur hiérarchie), et grâce à des « agents » minoritaires : jeunes activistes du Net, artistes et passeurs, militants anonymes, engagés au nom de la liberté, de la solidarité, de l’égalité — voire de l’anarchie — aux côtés des émeutiers. Ils furent également bien vite rejoints par l’opposition dite démocratique : militants des droits de l’homme, féministes, intellectuels critiques...

Le moment révolutionnaire, éphémère, a fait apparaître alors un peuple uni, soudé. Pendant quelques semaines, malgré la peur et la panique semées par l’ancien pouvoir qui s’écroulait, une atmosphère nouvelle a régné. Mais la béance sociale n’a pas mis longtemps à ressurgir. Alors que les forces révolutionnaires réclamaient une table rase et la chute des premiers gouvernements provisoires afin d’aller plus loin dans le processus révolutionnaire (sit-ins de la Kasbah, manifestations sur l’avenue Bourguiba en février qui aboutirent au rétablissement de l’état d’urgence, à la mort de manifestants et à la fermeture de l’avenue à toute manifestation publique), des voix de plus en plus nombreuses appelaient à l’apaisement, au compromis. Il fallait être modéré, aller lentement, ne pas tout rejeter en bloc. Le tyran et ses proches étaient partis, il fallait conserver une forme de stabilité pour ne pas nuire à l’image du pays, à la bonne marche des affaires, etc. Un discours identitaire se développait même sur le caractère doux et pacifique des Tunisiens, qui avaient conduits une « révolution du jasmin », une révolution fleurie et parfumée... Les discours enragés contre cette appellation édulcorée furent légion à l’époque, les habitants de l’intérieur parlant parfois de révolution du hindi (cactus ou figuier de barbarie, plus présent dans leurs régions que le jasmin côtier — et évidemment plus piquant).

Ce discours, émanant de la bourgeoisie et des classes moyennes urbaines, a très vite pris des allures de mépris social envers tous ceux qui plantaient leurs tentes en pleine ville, à l’entrée monumentale de la vieille ville de Tunis, sur sa belle avenue plantée d’arbres, et parlaient avec un accent (paysan) très marqué. Passée l’admiration première pour l’extraordinaire événement du 14 janvier, on se mit à se méfier de ces révolutionnaires : ils pouvaient bien être manipulés, semblaient très éloignés des idéaux laïcs des élites urbaines [2] (on voyait certains d’entre eux prier dans les tentes), ils se comportaient mal, etc. Cette tendance « révolutionnaire modérée » s’est notamment illustrée par la critique sévère de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et de ses dirigeants, alléguant qu’ils auraient tous été à la solde de l’ancien régime. Si le gouvernement de Ben Ali avait en effet réussi à infiltrer l’organisation syndicale, il s’était principalement allié les dirigeants et certaines fractions des syndicats. La plupart des sections sont restées autonomes, certaines se sont d’emblée constituées en front d’opposition comme le syndicat des enseignants du second degré.

Un rassemblement à la Qobba (coupole), cité sportive du quartier bourgeois d’el Menzah à Tunis, a lieu le 6 mars 2011, après la chute du gouvernement hérité de Ben Ali. On y célèbre la révolution, la solidarité nationale, mais on marque bien la différence avec ceux de la Kasbah (qui campent sur la place du gouvernement). On s’assemble pour soutenir le Premier Ministre sortant, Ghannouchi, considéré comme de bonne volonté et « dégagé » par les occupants de la Kasbah. Un article du journal en ligne Kapitalis a beau titrer « Kasbah et Qobba, même combat », il ne s’agit pas du même monde. Alors qu’à la Kasbah on parle au nom du peuple et l’on s’unit derrière le slogan « On a dégagé le dictateur, maintenant, dégageons la dictature », à la Qobba, on parle au nom de la « majorité silencieuse » et l’on appelle au retour au travail. Travail et propreté sont considérés comme des symboles, définissant en miroir les jeunes révolutionnaires politisés comme chômeurs et peu soucieux de propreté, voire comme fainéants et sales. Ainsi entend-on régulièrement lors de la fête de la Qobba, un message diffusé par haut-parleurs :

« Nous avons fixé des sacs poubelles au pied des palmiers. Ne jetez rien par terre. Nous devons montrer à tout le monde qu’on est un peuple sain, propre et civilisé. C’est ça notre révolution. C’est ça notre esprit, c’est ça notre exemple aux pays voisins et frères qui aiment construire leur démocratie. Nous allons prouver au monde entier que nous sommes le peuple des dignes... »source.

Si je reviens à ces épisodes un peu oubliés des semaines révolutionnaires qui suivirent la fuite du dictateur, qui peuvent sembler anecdotiques mais qui sont restés présents dans la mémoire des Tunisiens, c’est pour donner sens à ce qui s’exprime aujourd’hui dans les rues de Tunisie. Car les voix de la contestation sociale ne se sont jamais tues : elles ont occupé les places de la capitale jusqu’au mois de mars, elles ont occupé les usines, assiégé les ministères et, à nouveau, occupé les rues de Sidi Bouzid à l’été 2012, contestant et harcelant cette fois, non plus le régime de Ben Ali, mais bien le gouvernement provisoire dirigé par le parti Ennahda. Elles sont réunies sous un slogan simple, qui fut celui de la révolution bien avant le « Dégage » final : « Travail, liberté et dignité nationale » (‘amal, hurriyya, karama wataniyya), dont une des variations hivernales fut parfois « Pain, eau, Ben Ali non ! » (Khobz, mâ’, Ben’alî lâ).

Aujourd’hui il y a donc, comme une « basse continue », une colère sociale qui ne s’apaise pas. À cette colère, montée en force sous Ben Ali, s’ajoute le spectacle de plus en plus transparent des inégalités et des intérêts divergents entre une élite urbaine et côtière, et l’intérieur du pays [3]. Elle a été dirigée contre la dictature, elle se dresse à présent contre le gouvernement en place. Les ouvriers, les journaliers, les chômeurs n’ont pas trouvé de réponse à leurs angoisses avec le vote et la constitution d’un nouveau gouvernement, ils ne posent en aucun cas les questions en terme de religion, de libertés ou même de Constitution. Ils parlent de justice, de droits, d’égalité. La question sociale demeure au centre des problèmes à régler et des ressorts de mobilisation populaire. Elle se matérialise de manière de plus en plus claire dans l’affrontement actuel entre l’UGTT et le parti au pouvoir, dont l’un des signes les plus forts a été l’appel à la grève générale (massivement suivi) du 8 février dernier. Le rôle de ce syndicat dans les mouvements révolutionnaires tunisiens est aujourd’hui réévalué par de nombreuses études qui montrent à quel point son soutien logistique et la présence de ses militants dans les rues ont été déterminants dès le départ [4].

La « transition démocratique »

La prise en considération des fractures sociales montre bien à quel point l’affrontement auquel il a été donné tant d’ampleur dans les journaux français entre « laïcs » et « religieux » n’est pas au cœur des préoccupations. Il ne s’agit pas de le nier : il y a certes eu des manifestations pour protéger le statut de la femme tunisienne, il y a également une présence manifeste de jeunes islamistes radicalisés dans les rues de Tunisie qui entendent faire régner un ordre puritain et orthodoxe. Pourtant la lecture en termes identitaires des tensions sociales en Tunisie, imposée à la fois par les défenseurs de la laïcité (spécificité tunisienne, héritage bourguibiste) et par les islamistes (qui masquent ainsi leur incapacité à répondre à la demande sociale de justice), est un leurre. Après les élections d’octobre 2011, les islamistes qui avaient beaucoup insisté pendant la campagne sur les persécutions dont ils ont été victimes sous l’ancien régime et leur religiosité — censée, notamment, les garder de la corruption — ont soudain perdu leur potentiel subversif : après avoir été persécutés, après s’être présentés comme des « purs », ils sont à présent au pouvoir. Plutôt que de considérer que la révolution les a portés au pouvoir, il est plus juste de dire que l’événement les a mis face à la réalité.

Le 14 janvier 2011, il semblait que la surprise tunisienne sortait précisément la région d’une alternative binaire qui avait dominé pendant des décennies (notamment depuis la guerre civile algérienne) : autorité ou révolution islamique [5]. En Tunisie, le « pays sans bruit », selon la belle expression de Jocelyne Dakhlia [6], le régime de Ben Ali s’était effondré avec fracas. Le chef et son clan quittaient le territoire et se réfugiaient en Arabie Saoudite — bel exemple de démocratie laïque, au passage — alors que la foule scandait un drôle de slogan, « Dégage ! », devant l’un des symboles du pouvoir, le ministère de l’Intérieur dont les sous-sols avaient été le théâtre, caché mais bien connu, d’innombrables tortures.

Quelques mois plus tard, les premières élections libres dans la Tunisie post-révolutionnaire ont donné aux islamistes une majorité (relative) qui leur permet aujourd’hui, grâce à des accords avec deux autres partis (ce que l’on appelle la troïka), de diriger un gouvernement (de coalition et de transition). La juxtaposition de ces deux signes peut donner l’impression que la révolution du 14 janvier a porté les islamistes au pouvoir. Mais les islamistes n’ont pas été portés au pouvoir par la révolution, ils ont conquis le pouvoir dans le cadre des élections qui ont suivi. C’est notamment en déplaçant les débats sur le terrain identitaire qu’ils ont pu remporter ces élections, alors que les partis, notamment de gauche, échouaient à construire un discours audible et singulier dans la confusion qui régnait. Les lignes ne cessaient de bouger, selon que l’on se plaçait d’un côté ou de l’autre de la « frontière laïque », des questions internationales (la Libye, la Syrie, les États du Golfe...), de la nation et de ce qui la définit (arabité, laïcité, islam...). C’est probablement dans l’envahissement du débat démocratique par ces questions que se situe l’une des formes de la « trahison ».

Il faut creuser un peu plus profondément dans les sillons de la « transition démocratique » et dans l’histoire des mouvements politiques tunisiens pour comprendre l’écart qui existe entre ce qui était observable dans les rues de décembre de mars 2010 à mars 2011 et l’expression de la volonté populaire à travers les urnes en octobre 2011. Cela peut nous aider à comprendre également pourquoi les mobilisations n’ont pas cessé et pourquoi la ville de Sidi Bouzid, notamment, et avec elle tant d’autres depuis (Siliana, Le Kef,...), s’est de nouveau enflammée à plusieurs reprises, pourquoi le bassin minier de Gafsa est encore en ébullition, etc.

Car ce pays, berceau de grands mouvements réformateurs dès le XIXe siècle, n’a pratiquement pas eu d’expérience de construction nationale autonome et démocratique avant cette année 2011. Pourtant, la révolution n’a pas eu lieu sur un terrain social « en friche », ou sur une tabula rasa. Le mouvement national et la lutte pour l’indépendance contribuèrent à la formation des élites politiques et administratives. Le long règne de Bourguiba ne fut pas que terreur et n’a pas pu empêcher le développement d’un mouvement syndical puissant ; et d’un mouvement féministe toujours actif malgré l’entreprise de mise en étendard de la question féminine par le pouvoir bourguibien d’abord, qui s’est construit une image de libérateur du pays et de ses femmes [7], et par la dictature de Ben Ali ensuite, qui y puisa un bon alibi pour gagner ses galons de despote moderniste, rempart contre la menace islamiste. Cette richesse de mobilisation et la vigueur des mouvements sociaux ont connu un destin paradoxal : ils ont produit des caractéristiques reconnues comme majeures de la Tunisie moderne (notamment, la laïcité et la condition des femmes) tout en étant les victimes d’une répression souvent mal connue, à la fois à l’extérieur et à l’intérieur du pays.

Au début des années 1980, à la suite de la répression des grands mouvements syndicaux et des contestations émanant de la gauche radicale, les mouvements islamistes ont pris leur place, devenant à la fois les principaux ennemis du régime (mise à part la parenthèse de 1987-1989), mais aussi les détenteurs d’une forme « d’espoir social ». Certains parcours, comme celui du leader actuel du parti Ennahda, Rached Ghannouchi, syndicaliste dans les années 1960, nassérien dans sa jeunesse, sont là pour nous rappeler que les trajectoires furent plus complexes qu’on ne le pense souvent. Elles ne sont pas anecdotiques parce qu’elles nous permettent de sortir les critères d’analyses contemporains de leur schématisme et de leurs différenciations automatiques, dont la plus vigoureuse est celle qui oppose laïcs et islamistes.

L’oubli de cette période récente de l’histoire tunisienne a plusieurs origines : d’abord l’ampleur de la répression qui a frappé les mouvements de gauche de 1968 à 1978, sous le pouvoir Bourguibien, et qui s’est ensuite abattue sur les islamistes ; la mise en œuvre d’un enseignement « sélectif » de l’histoire contemporaine dans les écoles et lycées, la propagande Benaliste venant simplement remplacer celle de Bourguiba ; enfin, hors des frontières tunisiennes, la force d’une lecture en terme d’affrontements civilisationnels qui est venue appuyer une conception très orientaliste des sociétés arabes, accordant de moins en moins de place à la société, aux classes sociales et aux mouvements sociaux [8].

Ayant fait le constat de la disparition, y compris physique parfois, d’une génération militante progressiste (à la fois dans la gauche socialiste et dans le milieu des nationalistes arabes), certains adoptent une position fataliste qui s’exprime ainsi : aujourd’hui, tout changement social au Maghreb et au Moyen Orient ne peut que déboucher sur une prise de pouvoir par des conservateurs, retournant l’argument du conformisme moderniste « pro-occidental » pour faire du retour à une supposée tradition l’unique voie de la subversion, de la radicalité révolutionnaire et de la dignité nationale. C’est faire peu de cas du rôle des mouvements syndicaux et des mouvements militants progressistes (y compris d’inspiration anarchiste) dans les soulèvements qui ont eu lieu en Tunisie, en Egypte, au Yémen et qui se poursuivent en Syrie [9] (et l’on pourrait ajouter : à Bahrein, au Liban, en Jordanie, etc.). Ce discours était devenu commun — au moins au sein des élites intellectuelles —, bien avant 2011, en Tunisie comme ailleurs.

Début 2011, pendant un bref moment, la distance et l’indifférence sociales ont semblé s’évaporer, pour ressurgir avec force dès le lendemain de la fuite de Ben Ali. Par la suite, la campagne électorale et la victoire du parti islamiste Ennahda a produit d’autres transferts, observables notamment dans la constitution du parti conduit par l’ancien Premier ministre de transition Béji Caïd Essebsi, Nida Tounès. Une telle agglomération de forces politiques n’aurait pas été imaginable quelques années plus tôt : en effet, ce parti réunit de nombreux anciens du régime de Ben Ali — et de Bourguiba — comme Essebsi lui-même, une fraction de la gauche post-communiste, sous la bannière d’une lutte contre les islamistes et pour l’identité moderne de la Tunisie. On y trouve des gens qui furent longtemps des adversaires, dans un discours qui prend bien soin de se situer du côté de l’identité nationale (notamment vis-à-vis de l’étranger), du “progressisme” et de la modernité pour éviter les questions sociales et idéologiques. Il se place en face d’Ennahda, comme son miroir inversé. L’émergence d’une telle force, dont on ne sait pas aujourd’hui ce qu’elle peut représenter en terme de score électoral, montre l’effet de « trahison rétrospective » produit par le passage d’une situation révolutionnaire à un nouveau contexte de démocratie électorale, sans qu’on n’ait eu le temps ou le soin de constituer des relais sociaux pour asseoir la démocratie : la presse reste très faible et se contente le plus souvent de donner la parole aux acteurs politiques sans approfondir les enjeux. Les associations sont très présentes mais peu d’entre elles se sont emparées de la question démocratique en tant que telle (à l’exception peut-être de celles qui s’étaient engagées durant la campagne).

Pour l’instant, seul le travail syndical semble offrir d’autres repères, et l’on voit qu’il prend une place de plus en plus importante dans le paysage politique post-révolutionnaire. M. Houcine Abbassi, secrétaire général de l’UGTT lance au parti Ennahda le 25 février 2012 : « Ils veulent étouffer notre voix pour décider seuls de notre sort. Ils veulent semer la peur dans nos cœurs pour nous empêcher de défendre notre cause et nos droits, mais nous ne céderons et ne nous soumettrons pas » [10]. Le syndicat a par ailleurs réaffirmé son autonomie et sa volonté de s’engager « aux côtés de la société civile et du peuple tunisien dans sa diversité pour défendre non seulement la masse ouvrière, mais aussi et surtout la République et ses institutions » [11]. Il n’est pas surprenant que l’UGTT soit la seule force à occuper le terrain. Elle s’appuie sur ses 517 000 adhérents, sur le maillage territorial de ses sections, et sur son histoire. Elle seule semble pouvoir opposer une telle force aux partis au pouvoir.

Ailleurs, tout est encore un peu faible. L’énergie révolutionnaire a libéré des forces insoupçonnées, mais elle s’est heurtée à une logique démocratique qui a forcé chacun à choisir, qui a mené beaucoup à une forte déception politique, ceci dans un climat de débat continu. La classe politique, prise dans des logiques d’alliances et de tractations, accentue de jour en jour cette déception. Les conversations bruissent des critiques virulentes de ces hommes et ces femmes qui ne cherchent qu’à négocier des postes, à s’allier pour garder leurs privilèges. Les débats de la Constituante se déroulent dans une agitation peu propice à la construction d’un socle de valeurs partagées.

Dans sa première chronique parue tout juste au lendemain de la révolution tunisienne, l’historienne Kmar Bendana écrivait :

« cette vie (celle d’avant le 14 janvier) ressemble aujourd’hui à une hibernation qui nous a conservés vivants, dans quelques niches, mais nous a laissés lents à nous décongeler, indolents et mous, assommés et engourdis, inaptes à nous mêler encore à cette onde qui enfle et qui grossit » (Kmar Bendana, Chronique d’une transition, Les éditions Script, Tunis, décembre 2011.).

La sortie de cette hibernation charrie avec elle de nombreuses questions laissées en suspens depuis des décennies. Toutes ces questions se résument probablement à la difficile émergence de ce que l’on pourrait appeler un consensus national minimal. Chacun croit savoir sur quoi il repose, et l’interprète à sa guise, il est pourtant en complète réécriture, plus certainement dans la rue qu’au Parlement. Car aujourd’hui, la société tunisienne est plongée dans une incertitude qui fait osciller entre des moments d’enthousiasme et de désespoir. Et les mécanismes qui, selon Claude Lefort, « peuvent contribuer à réduire la fluidité politique des transitions, à gérer l’incertitude. La rédaction d’une constitution, la mise en place de nouvelles institutions, la codification de nouvelles règles (...) ces procédés de "l’invention démocratique" » [12], sont mis en question par une forme de méfiance diffuse. Celle-ci est renforcée dans un temps de surinformation, de propagation rapide des informations, d’individualisation extrême des canaux de formation et d’information qui font que chaque citoyen ne cesse d’osciller. L’effet du régime autoritaire est également à l’œuvre, sapant la confiance placée dans les autorités, qu’elles soient l’administration, le syndicat, l’école ou, bien entendu, les partis et les élus.

Les temps révolutionnaires ont d’abord débouché sur un processus démocratique, offrant, par le vote, la possibilité aux citoyens de se prononcer pour une offre politique qui était encore le reflet du « monde d’avant ». Ils se poursuivent aujourd’hui dans une forme de temporalité très spécifique : les Tunisiens écrivent une histoire, un peu chaotique, ils se réapproprient leurs références communes, redessinent un destin national autour de ce qui leur semble important : les affaires, les paysages, la laïcité, la culture, la langue (arabe, dialectale, le bilinguisme etc.). Tout est contesté et tout est sans cesse balloté entre des phases de surengagement militant et des phases de déception forte. Le pays ne cesse alors d’alterner entre des moments de « réconciliation révolutionnaire » éphémère et des moments de divergence où tout semble hors de contrôle et où le pouvoir appartient de nouveau à ceux qui en font profession. Il y aurait là une forme de trahison nécessaire de la « révolution démocratique », difficile à percevoir et à décrypter, très amère pour ceux qui la ressentent, mais qui ne se résume certainement pas à la prise de pouvoir par l’un ou l’autre des partis représentatifs.

par Leyla Dakhli , le 19 février


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19 février 2013 2 19 /02 /février /2013 18:51

 

  

Rue89 - Révolution 18/02/2013 à 17h32

  Ramses Kefi | Journaliste Rue89

 

 


Le Kef, en Tunisie, au printemps 2012 (Ramsès Kefi)

 

Au Kef, au Nord-Ouest de la Tunisie, le mot révolution ne fait plus frémir grand monde. Quand vous y évoquez la démocratie, la liberté ou la Constitution, on vous parle d’emblée du chômage, de l’inflation et des pénuries.

Il y a ceux qui ne se cachent plus quand ils relativisent certains « bons côtés » de la dictature. La nostalgie de l’ordre, de la sécurité et du rêve impossible, quand finalement, il n’y avait que des certitudes. Et ceux qui admettent avoir sous-estimé le travail à accomplir pour bâtir la Tunisie nouvelle, bercés par la fuite presque trop facile du clan présidentiel.

Je me rends au Kef plusieurs fois par an. Mon père y est né bien avant l’indépendance de 1956 et une partie de ma famille y vit encore. Une ville magnifique, mais abandonnée, y compris par la révolution, qui n’aura jusque-là permis qu’une seule chose : on peut enfin s’y plaindre librement.

On peut se réjouir, certes, qu’un Tunisien ne risque plus des années de prison et de harcèlement pour un mot ou une opinion. Mais on peut aussi s’en inquiéter, parce que le fatalisme, dont on croyait qu’il s’était exilé avec Ben Ali, teinte de nouveau le discours des Keffois.

Cette frange d’Ennahdha qui divise les Tunisiens

Je les ai longuement écoutés parler de la scène politique tunisienne. De l’Assemblée constituante – qui en plus d’un an d’existence, n’a toujours pas produit de Constitution– et du gouvernement, dont ils ne discutent pas la légitimité, mais déplorent l’impuissance.

Ils ne comprennent pas le décalage entre le sacrifice auquel ils ont consenti pour faire chuter le régime et la récompense en retour, entre l’urgence de la situation économique et l’incapacité du gouvernement à proposer quelque chose de concret.

Ils ne s’attendaient pas à un miracle, parce qu’ils sont conscients qu’on ne sort pas indemne de plusieurs décennies de dictature et de mensonge. Seulement à des signaux positifs, qui marqueraient l’avènement de quelque chose de différent. Là, rien. Alors, comme les Keffois sont très fiers, ils se sentent insultés.

Ils s’épanchent forcément sur Ennahdha, le parti islamiste au pouvoir, qui avait beaucoup (trop) promis pour remporter les élections. Sur leur déception, pas seulement au regard de son bilan, mais sur les conséquences de l’influence d’une frange du mouvement sur la société tunisienne.

Ils accusent le parti de vouloir éduquer les Tunisiens à sa manière, avec des codes et des traditions venus d’ailleurs, dans lesquels ils ne se reconnaissent pas. D’avoir largement contribué à diviser la société tunisienne. Musulmans contre laïcs, pratiquants contre non-pratiquants ou encore progressistes contre conservateurs : en fait, ils en ont assez de ces scissions inutiles et des clichés que cela engendre, comme le présumé fondamentalisme des Tunisiens.

Moncef Marzouki a déçu

Ils se rappellent de la révolution, quand tous ces clivages n’existaient pas. Ils notent, à juste titre, que si cela avait été le cas, Ben Ali serait toujours là et Rached Ghannouchi, fondateur d’Ennahdha et tenant de la ligne conservatrice, serait encore en exil à Londres, interdit de territoire. Alors, ils invitent ce dernier à plus d’humilité, parce que le soulèvement populaire, par essence, n’appartient ni à un homme, ni à un parti, mais au peuple.

Ils remarquent d’ailleurs que si l’opposition avait fait front commun aux élections de 2011, le gouvernement ne serait pas exclusivement dominé par un parti. Qu’un résultat plus serré aurait poussé à plus d’unité et de prudence, ce qui aurait certainement permis d’avancer et de réfléchir beaucoup plus vite aux priorités.

Mes amis et mes cousins keffois, jeunes ou moins jeunes, avec lesquels je squatte souvent au café Rim, se taisent un moment, puis reprennent, en s’apercevant que cette opposition ne propose finalement aucune alternative claire, car « dégager » Ennahdha n’est pas un programme en soi.

Ils s’étonnent de la posture des deux partis de gauche qui composent la troïka avec Ennahdha – le CPR et Ettakatol ; le CPR, dont est issu le président de la République provisoire, l’opposant historique au régime de Ben Ali, Moncef Marzouki.

Ils n’ont pas assez entendu leur raïs, alors qu’il était l’un des hommes politiques les plus prometteurs et les plus à même d’assurer la transition entre la dictature et la démocratie. Ils ne lui pardonnent pas son inertie. Il avait promis d’être un contrepoids au gouvernement et de lui administrer une piqûre de rappel si celui-ci, d’aventure, oubliait les objectifs de la révolution. Il n’en fut rien.

Alors, quand il s’exprime, ils ne l’écoutent plus vraiment, parce qu’ils trouvent qu’il a beaucoup perdu en crédibilité. Ils l’accusent presque à demi-mot d’avoir pris goût au pouvoir, sinon, s’interrogent-ils, pourquoi reste-t-il en place puisqu’il n’a de toute manière aucune incidence sur la politique du pays, tandis que celui-ci vacille ?

La veuve de Belaïd, une parente éloignée

J’ai entendu mes tantes, mes oncles, mes cousins, pleurer la mort de Chokri Belaïd, assassiné il y a une dizaine de jours à Tunis. De loin. Cette fois-ci, je n’étais pas au Kef, mais à Paris. Pour certains d’entre eux, Besma Khalfaoui, sa veuve, est une parente éloignée. Alors, au téléphone, les cris étaient plus forts et les larmes, j’imagine, encore plus difficiles à sécher. Ils pleurent l’opposant de gauche, le père de famille mais aussi la Tunisie. Est-ce qu’ils ont fait une révolution pour que des hommes se fassent abattre devant chez eux ?

Bien sûr, à ce stade de l’enquête, les supputations n’ont pas de sens. Autrement dit, toutes les factions politiques peuvent tirer profit du chaos, tant la Tunisie semble vulnérable. Mais ils ne dédouanent pas le gouvernement, qui depuis son élection, a progressivement laissé s’installer la haine, en excusant trop souvent la violence.

Le choc est profond. Plus encore que ne le croit Moncef Marzouki. Ils craignent que ce genre de modus operandi ne se banalise ; que les mots, de plus en plus durs, ne rejoignent les actes et que les divisions au sein de la société mènent à très court terme à un affrontement violent.

Les Keffois se portent mieux sans la dictature

Il y a quelques jours, j’ai dit à mon cousin Hamma que j’écrirais un article. Un jeune étudiant en informatique, brillant, qui a bricolé un petit musée de la révolution dans sa chambre. Des grenades lacrymogènes, des cartouches, des photos, des vidéos. Chaque fois que je viens au Kef, il m’y traîne et me tend un cahier, où il consigne ce que, de France, j’aurais pu rater. Des coupures de presse, des remarques ou des témoignages, écrits au fil de la plume, dans un café ou un amphithéâtre.

Il a souhaité que j’insiste sur une chose essentielle dans mon billet : même quand ils se plaignent et que certains d’entre eux peuvent donner l’impression du contraire, les Keffois – et c’est une certitude – se portent mieux sans la dictature.

MERCI RIVERAINS ! Tilô
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8 février 2013 5 08 /02 /février /2013 20:59

 

 

Le Monde.fr avec AFP et Reuters | 08.02.2013 à 09h35 • Mis à jour le 08.02.2013 à 19h26


 
Marée humaine autour du cercueil de Chokri Belaïd, vendredi à Tunis.

Jamais une foule aussi nombreuse ne s'était rassemblée pour des obsèques en Tunisie depuis celles, en 2000, d'Habib Bourguiba, le "père" de l'indépendance et premier président du pays.   Scandant des slogans hostiles aux islamistes, au moins 50 000 personnes – 40 000 selon la police – ont gagné les rues de la capitale, vendredi 8 février, pour participer aux funérailles de Chokri Belaïd, dont l'assassinat a accentué la crise profonde que traverse le pays, berceau du "printemps arabe".

Lire : Stupeur à Tunis après le meurtre de Chokri Belaïd

Le corps de l'opposant tunisien a été mis en terre vers 16 heures à Tunis. Au moment de l'inhumation, des milliers de voix ont crié "Allah Akbar" ("Dieu est le plus grand") avant d'entamer l'hymne national et de réciter la fatiha, premier verset du Coran.

Hamma Hammami, dirigeant du Front populaire, la coalition de partis de gauche et d'extrême gauche à laquelle appartenait l'opposant, a prononcé une oraison funèbre, avant que la foule n'observe une minute de silence solennelle.

La foule s'était d'abord massée vendredi matin devant la maison de la culture de Djebel Jelloud, dans la banlieue sud de la capitale, où reposait le corps de cet avocat, figure médiatique de l'opposition de gauche laïque, tué de quatre balles mercredi devant chez lui. "Le peuple veut une nouvelle révolution", scandaient les participants, parmi d'autres slogans hostiles au parti islamiste Ennahda au pouvoir. Ils ont aussi entonné l'hymne national.  

Lire le portrait : Chokri Belaïd, un tribun devenu l'ennemi juré des islamistes

Recouvert du drapeau tunisien, le cercueil de l'avocat, baigné par une véritable marée humaine, a ensuite été placé sur une camionnette de l'armée, pour gagner le cimetière du Djallez.

 

David Thomson @_DavidThomson

Au cimetière #Jallez la foule crie "Degage Nahda" en attendant le cortège funéraire de #ChokriBelaid pic.twitter.com/zsFu65ZG

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C'est là que des heurts ont éclaté, pendant l'inhumation, entre des manifestants et des forces de l'ordre. La police a tiré des grenades lacrymogènes et des coups de feu en l'air pour disperser des jeunes qui saccageaient des voitures dans les rues alentour, provoquant un bref mouvement de panique comme en ont témoigné sur Twitter des journalistes sur place.

 

Elise Deleve @EliseDeleve

Les gens sortent du cimetière à cause des gazs lacrymogène pic.twitter.com/sBTDkiey

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La police a aussi pourchassé à coups de matraque et de lacrymogènes des jeunes manifestants scandant "dégage, dégage" sur l'avenue Habib-Bourguiba. Sur cette avenue – où siège notamment le ministère de l'intérieur – épicentre des heurts entre policiers et manifestants qui ont éclaté après la mort de M. Belaïd, des camions de l'armée ont été déployés pour renforcer un dispositif policier, déjà très important. Le ministère de l'intérieur a fait état de 132 arrestations à Tunis et jugé que le calme régnait "grosso modo" en Tunisie.

Lire : La Tunisie en prise à un climat délétère de haine et de violence

 

Sur l'avenue Habib-Bourguiba, vendredi après-midi.

TOUS LES VOLS ANNULÉS

Le pays tournait au ralenti après l'appel à la grève générale par des partis et la centrale syndicale historique, l'Union générale tunisienne du travail (UGTT, 500 000 membres), la première de cette ampleur depuis 2011. Tous les vols depuis et vers la Tunisie ont été annulés à l'aéroport de Tunis-Carthage, le principal du pays, selon des sources aéroportuaires. En ville, les rues étaient largement vides et seuls de rares bus étaient visibles. Le tramway de Tunis semblait fonctionner, mais les rames étaient désertes.

Les soldats ont été également déployés dans les villes de Zarzis (sud), autre point chaud près de la frontière libyenne, à Gafsa (centre), et à Sidi Bouzid, berceau de la révolution de 2011 qui a renversé le régime de Zine El Abidine Ben Ali. Des centaines de personnes y défilaient également en scandant "Assassins" et "Chokri, repose-toi, on continuera ton combat".

 CRISE POLITIQUE AGGRAVÉE

Sans précédent dans les annales contemporaines, l'assassinat de Chokri Belaïd, mercredi, a déclenché deux jours de violences opposant policiers et manifestants à travers le pays lors desquel un policier a été tué. "Mon fils est un homme qui a vécu avec courage et dans la dignité. Il n'a jamais eu peur, il est parti en martyr pour son pays", répétait Salah Belaïd vendredi matin aux visiteurs venus s'incliner devant la dépouille couverte de fleurs dans le domicile familial orné du drapeau national. Sa veuve, Besma, n'a cessé de répéter ces trois derniers jours que la mort de son mari avait été commanditée par les islamistes au pouvoir du parti Ennahda.

Sa veuve, Besma Khalfaoui Belaïd, sur le chemin du cimetière vendredi.

Depuis mercredi, les chaînes de télévision multiplient les chansons engagées et talk-shows enflammés donnant la parole à des politiques et de simples citoyens qui laissent libre cours à leur tristesse, leur colère et leur peur que le pays ne bascule dans l'instabilité.  

Signe de la profondeur de la crise politique, le premier ministre islamiste, Hamadi Jebali, a appelé dès mercredi soir à la création d'un gouvernement restreint de technocrates, ce que son propre parti, Ennahda, a rejeté fermement. La présidence a indiqué jeudi ne pas avoir "reçu de démission du premier ministre, ni les détails d'un cabinet restreint de technocrates" et M. Jebali n'est pas apparu en public depuis trente-six heures.

Lire l'analyse du politologue Vincent Geisser : En Tunisie, il y a eu un repli sur un discours identitaire et populiste

L'ambassade de France a appelé ses quelque 25 000 ressortissants à la prudence et annoncé la fermeture des écoles françaises (plus de 7 000 élèves) vendredi et samedi. Le ministère de l'enseignement supérieur a annoncé la fermeture des universités jusqu'à lundi.

Le premier ministre réitère sa volonté de former un gouvernement de technocrates

 

En marge des manifestations, le premier ministre tunisien, Hamadi Jebali, a déclaré vendredi qu'il s'en tenait à sa décision de former un gouvernement de technocrates, malgré un désaveu de son parti islamiste Ennhada. "La composition de ce gouvernement est quasiment prête", a-t-il ajouté.

Le premier ministre avait déjà fait une telle annonce mercredi 6 février, mais son parti a a opposé une fin de non-recevoir à l'initiative de M. Jebali, pourtant numéro deux de la formation islamiste, et a affirmé que celui-ci n'avait pas consulté sa direction. La présidence de la république a rappelé que tout changement de pouvoir devait passer par l'ANC, dont Ennahda contrôle 89 des 217 sièges.

 

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8 février 2013 5 08 /02 /février /2013 20:52

 

 

Rue89 - Tribune 08/02/2013 à 09h48
Lotfi Achour | Metteur en scène

 

 

N. passait d’une pièce à l’autre avec cette fluidité des enfants. D’un couloir à une chaise. D’un genou plein d’affection sur lequel elle se posait en légèreté, à une main aimante qui passait dans ses cheveux noirs. J’ai passé une partie de la soirée à essayer d’imaginer dans quelle partie de la pièce elle avait l’habitude de se tenir avec lui. A quel endroit elle l’attendait le soir. Sur lequel de ses genoux elle sautait avec le plaisir qu’ont les enfants à sauter dans les flaques. Mais sans y parvenir.

 


La fille de Chokri Belaïd sur le cercueil de son père (Courrier de l’Atlas, via Twitter)

La mort chez nous ne dépouille pas seulement ceux qui restent de l’être aimé, mais elle dépouille aussi les maisons de leurs meubles qu’on plaque contre les murs pour élargir les espaces, ou qu’on stocke dans des pièces voisines, pour faire de la place à d’autres meubles. Les chaises de la mort. Qu’on loue pour que les visiteurs venus partager la peine puissent s’asseoir. Puissent pleurer assis et se recroqueviller sur ces quelques centimètres carrés et sur leur douleur.

N. semblait savoir et ne rien savoir de tout cela. Elle savait que son père était mort. Elle savait comment aussi. Elle savait que quelque chose avait changé dans la disposition de sa maison, dans laquelle visages connus et inconnus défilaient souvent somnambuliques.

« Maintenant je vais continuer le travail de papa »

Elle savait que son père lui avait dit quelques jours auparavant que s’il lui arrivait quelque chose, il fallait « continuer le travail qu’il avait commencé ». Et elle disait elle-même avec une étrange détermination : « maintenant je vais continuer le travail de papa. »

Ce que N. apprendra peut-être plus tard, mais qu’elle ne comprendra certainement jamais, c’est qu’on puisse abattre froidement un matin, un père qui venait d’embrasser ses enfants parce qu’il ne pense pas comme son tueur. Le vrai tueur n’étant pas toujours celui qui a tenu l’arme.

Elle comprendra ce paradoxe d’être parfois incapable de tuer physiquement celui qui vous destine à une mort certaine. Que ses idées peuvent parfois l’emporter sur son corps.

N. est pour le moment dans une autre cohérence, que les tueurs de son père essayent de lui voler. Mais elle semble plus forte qu’eux. Elle semble avoir déjà hérité de la détermination d’un père qui a été celle d’une vie cohérente. Jusqu’au bout.

L’irruption de la mort

N. pensera longtemps au tueur. Elle vivra avec cette pensée. Elle voudra le voir un jour. Elle voudra peut-être lui parler, mettre un visage et une voix sur la mort. Ce jour arrivera peut-être et N. comprendra alors qu’il n’est que l’arme du crime et non pas le doigt qui a appuyé sur la tête, la poitrine et le cœur. Celui de son père et sur le sien au même instant.

Que le vrai tueur à la barbe blanche caresse lui aussi les cheveux de ses petits enfants, d’une main tout aussi aimante. Mais qu’il appartient à une autre part de la même humanité que son père. Qu’il en est l’autre face. Une face qui peut sembler incompréhensible à N.

Elle, que l’irruption de la mort a déjà changée, et qui sait que la vie est précieuse. Et qu’en aucun cas elle ne se rangera du côté de la barbarie qui peut l’ôter à quiconque simplement parce qu’il ne pense pas comme elle.

 

MERCI RIVERAINS ! Pierrestrato, Tilô
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8 février 2013 5 08 /02 /février /2013 20:44

 

 

Rue89 - Thierry Brésillon - Journaliste

Publié le 08/02/2013 à 17h26

 

Une foule considérable, pleine d’émotion et de colère, a assisté vendredi aux obsèques de Chokri Belaïd, l’un des leaders de la gauche tunisienne (Front populaire) assassiné mercredi matin devant chez lui.

Une grève générale avait été organisée par la principale centrale syndicale, l’UGTT, co-organisatrice des funérailles avec le propre parti de Chokri Belaïd, le Patriote des Patriotes démocrates unifié.

Après un moment de recueillement dans un centre culturel à proximité de la famille de son père dans la banlieue Sud de Tunis, un immense cortège s’est dirigé vers le cimétière du Jellaz où il a été inhumé dans le carré des martyrs de la République. Des dizaines de milliers de personnes, submergées par l’émotion étaient rassemblées dans l’enceinte du cimetère, encore sous le choc d’un événement sans précédent, lourd de conséquences sur la suite du processus démocratique en Tunisie. Les slogans désignaient nommément Rached Ghannouchi, le président d’Ennahdha, comme le responsable de l’asassinat du leader d’extrême gauche.

A l’extérieur, des incidents ont éclaté entre casseurs forces de l’ordre aux alentours du cimetière. Les fumées de gaz de lacrymogène ont même atteint les allées du cimetière en cette journée ventée et froide.

Plusieurs personnes ont été dépouillées sous la menace d’armes blanches. Tandis que des personnes quittant le cimetière ont été prises à partie, comme le raconte une jeune femme :

« Des types aux allures de clochard nous ont dit “c’est vous les laïcs ! Vous les filles vous allez presque nues, on peut arracher vous vêtements. Aujourd’hui vous enterrez celui-là, demain vous en enterrerez d’autres !”

Le centre ville était le théâtre d’affrontements entre jeunes casseurs et forces de l’ordre.

Voici, en six photos tweetées, les moments forts de l’enterrement.

 


Thierry Bresillon @ThBresillon

Cohue et larmes autour du cercueil de #chokribelaid pic.twitter.com/LjD0TbcE

Voir l'image sur Twitter
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7 février 2013 4 07 /02 /février /2013 16:51

 

Rue89 -

 Thierry Brésillon - Journaliste

 

Publié le 07/02/2013 à 12h23

 

Au lendemain de l’assassinat du leader de gauche laique Chokri Belaïd, la Tunisie vit des heures intenses, jeudi et vendredi. Sur trois « fronts » :

  • Les funérailles de Chokra Belaïd sont prévues vendredi après-midi ;
  • La proposition du premier ministre de former un gouvernement de technocrates fait des vagues, notamment dans son propre camp, celui du parti islamiste Ennahdha ;
  • Les avocats et magistrats sont en grève ce jeudi à la mémoire de leur collègue assassiné, suivis vendredi par une grève générale en Tunisie.

Les événements en chronologie inversée (pensez à rafraichir cet article qui sera enrichi en permanence).

17h50

Ça dégénère grave à Kélibia, vile côtière du nord-est de la Tunisie. Un poste de police brûlé. Des magasins saccagés et volés. Renfort militaire. (Essabah News)

17h30

Amira Yahyaoui, blogueuse et activiste de la société civile, tweete :

« Je sors de la maison de Chokri Belaid le cœur déchiré, sa femme me dit “tu as vu, les exécutions continuent” en parlant de Zouhair... »

« Zouhair » fait référence à Zouhair Yahyaoui, cyberdissident tunisien arrêté à l’époque de Ben Ali, en 2002, et mort d’une crise cardiaque en 2005.

17h05

« Pour avoir une idée sur l’escalade qu’a vécu Gafsa, regardez cette photo », écrit sur son compte Twitter @Azyyoz, un des activistes de la révolution tunisienne. A noter que le policier en civil tient apparemment une arme tirant des balles en plastique.

C’est à Gafsa, bastion ouvrier du sud de la Tunisie, que se sont ptoduits les principaux heurts entre manifestants et forces de l’ordre au lendemain de l’assassinat à Tunis du leader de gauche Chokri Belaïd.


Forces de l’ordre à Gafsa, dans le sud de la Tunisie, jeudi (Ali Garboussi via Facebook)

16h40

Selon Amira Yahyaoui, membre de la société civile, jeudi au siège de la centrale syndicale UGTT, des SMS, mails et appels au standard avec des menaces de mort.

16h30

Les députés démocrates se sont retirés de la constituante : ils estiment indécent de siéger avant les funérailles de Chokri Belaïd prévues vendredi après-midi.

16h20

Prière a la Constituante pour Chokri Belaid. Les députés divisés sur la tenue d’une plénière.

16h15

Le site indépendant tunisien Nawaat.org s’est livré à un exercice délicat en posant la question « à qui profite le crime », l’assassinat de Chokri Belaïd. La réponse est nuancée :

« Les bénéficiaires sont nombreux et variés, allant des barbouzes de l’ancien régime à ses nostalgiques en passant par les dictateurs en puissance, quelle que soit leur couleur idéologique, rêvant d’un nouvel ordre liberticide en Tunisie, bâillonnant à nouveau le peuple, remettant le pays dans la cage de laquelle il est sorti tout seul avec sa Volonté de vivre et son désir de s’émanciper.

Le but premier des criminels est de faire avorter l’expérience démocratique naissante en Tunisie, et il peut être donc celui d’aventuriers de la politicaillerie, n’appartenant pas nécessairement à un même camp ni à une même sensibilité idéologique ou politique.

C’est cet aspect des choses qui fait l’extrême gravité du drame qui vient d’endeuiller le pays. Mais ne soyons pas dogmatiques, ne nous laissons pas aller à nos sentiments basiques, quoique légitimes, en ne manquant pas d’analyser sereinement les choses sans amalgame ni manichéisme. »

La suite sur Nawaat.

15h35

Mohamed Abbou secrétaire général du Congrès pour la République (CPR), membre de la coalition gouvernementale tunisienne : « nous ne sommes pas contre la proposition » du premier ministre Hamadi Jebali de former un cabinet de technocrates. Mais il ajoute : « mais nous voulons voir la liste d’abord. Pas d’ex pro Ben Ali ».

15h30

Pourquoi les Tunisiens n’aiment toujours pas leur police... (vidéo à voir jusqu’au bout...).

 

Tunis, mercredi 6 février

14h55

Bilan de la réunion de la « troïka » au pouvoir : contrer le discours de « BCE » (Béji Caïd Essebsi), le président du parti d’opposition Nidaa Tounes, sur la dissolution de l’ANC (l’assemblée constituante). Divergence entre les partis CPR et Ennahdha sur la proposition du premier ministre Hamadi Jebali de former un gouvernement de technocrates.

14h00

Heurts entre policiers et manifestants dans la ville de Gafsa, bastion ouvrier dans le sud de la Tunisie.

13h50

C’est la photo qui résume cette journée de deuil : un homme au visage fermé, entièrement vêtu du drapeau tunisien, brassard noir au bras, passe des policiers anti-émeutes prêts à tout dans le centre de Tunis. Photo via Facebook, sur la page de Yahyaoui Chokri.


La Tunisie est en deuil (Yahyaoui Chokri via Facebook)

13h47

L’UGTT, la principale centrale syndicale tunisienne, décrète la grève générale vendredi, jour des funérailles de Chokri Belaïd. L’UGTT co-organisera ces funérailles avec le parti du leader de gauche assassiné.

13h45

Les larmes d’une enfant. La petite fille de Chokri Belaïd pleure sur le cercueil de son grand-père, jeudi matin à Tunis.

13h42

Principe de précaution : les dix écoles françaises de Tunisie seront fermées vendredi, jour des funérailles de Chokri Belaïd.

13h20

Réunion informelle des partis de la « Troika » qui forment le gouvernement actuel, y compris les Islamistes d’Ennahdha. Habib Ellouz, l’un des hommes forts d’Ennahdha, appelle à calmer le discours contre l’opposition.

Amel Azzouz, une députée islamiste, s’exclame :

« Que toutes les idéologies politiques aillent au diable, il faut s’unir ».

13h15

Matinée de conclaves à tunis : UGTT, groupes parlementaires, Ennahdha. Le jour où tout peut arriver.

13h10

Beaucoup d’émotion au siège du watad, le parti de Chokri Belaïd.

13h05

Manif en cours Ave Habib Bourguiba, dans le centre de Tunis. Déploiement d’un service d’ordre musclé, la charge est imminente.

13h00

Devant le ministère de l’intérieur à Tunis : « degage » crie la foule. Face a eux, des policiers protègent leur ministère.

12h15


La une du Temps

Le quotidien tunisien Le Temps titre en manchette : « Un tournant grave ».

Et, relève Courrier International, il rapporte que « la famille de Chokri Belaïd accuse directement Ennahda ».

Le Temps se demande si le pays est face à un « début d’une série de meurtres planifiés ».

 

 

11h49

Un bon portrait de Chokri Belaïd dans African Manager.


Le portrait de Chokri Belaïd par le site African Manager (capture d’écran)

10h54

Certains cadres dirigeants du parti islamiste au pouvoir Ennahdha refusent la proposition du premier ministre, Hamadi Jabali, de former un gouvernement de technocrates. C’est le cas d’Abdelhamid Jelassi, membre du bureau exécutif du parti islamiste.

10h38

L’UGTT, le syndicat tunisien qui joue un rôle politique clé, tient une conférence de presse à Tunis au lendemain de l’assassinat de Chokri Belaïd.

10h09

Grève générale des avocats et magistrats tunisiens, ce jeudi, par solidarité avec leur collègue Chokri Belaïd.

9h44

La dépouille mortelle de Chokra Belaïd a quitté jeudi matin l’immeuble où il habitait dans le quartier de Menzah 6, direction Jebel Jelloud, le lieu de son enfance.

 

  • Paco Picopiedra
    Paco Picopiedra
    Ami de Crackity Jones
     

    Ce syndicat qui incarne l’opposition tunisienne

    « Dix mois après l’arrivée au pouvoir d’Ennahda (1), Sidi Bouzid, la ville d’où est partie la “ révolution de la dignité ”, a été à nouveau le théâtre de plusieurs mouvements revendicatifs incluant aussi bien des agriculteurs que des ouvriers du bâtiment ou des chômeurs. L’Union générale tunisienne du travail (UGTT) a soutenu ces actions. Le 14 août 2012, elle a appelé à la grève générale pour réclamer des mesures de développement régional et exiger la libération des jeunes chômeurs arrêtés lors de manifestations violemment réprimées par la police. Le bureau local d’Ennahda, lui, a invité la base et les structures du syndicat à s’abstenir de tout engagement politique et à préserver leur indépendance.
    Ce face-à-face Ennahda-UGTT a débuté le 25 février 2012, avec une manifestation qui a rassemblé environ cinq mille personnes à Tunis à l’appel de la centrale. Les protestataires dénonçaient les déversements d’ordures perpétrés, selon eux, par des militants d’Ennahda devant plusieurs locaux syndicaux à la suite du mouvement social des employés municipaux, l’une des catégories les plus démunies en Tunisie. »

    Les défenseurs des peuples génent c’est un fait sur cette planète d’oligarques...

  • Visiteur89
    Visiteur89
    Indépendant
     

    Il faut absolument qu’ils se calment, sinon notre Chef de Guerre tricolore va envoyer l’armée pour éliminer tous ces terroristes !
    Nous les bombarderons après avoir survolé l’Algérie, de surcroit, pour ajouter une petite touche personnelle à la Libération.
    Et le monde entier nous remerciera.
    Surtout la presse française !

  • Fantomiald
    Fantomiald
    Entrepreneur
     

    Habib Ellouze qui demande au calme après deux ans à appeler, pardon, à hurler au meurtre des « ennemis de la révolution » ? On parle bien de la même personne qui propose de couper des mains et des pieds aux délinquants ? Lui ? Qui demande de calmer les discours « contre » l’opposition ?

    Il leur aura fallu le pire des braconniers pour leur rappeler combien ils sont, tout au moins, d’une maladresse politique dangereuse !

  • Le tunisien
    Le tunisien
    ingénieur

     

     

     

    voici une interview du témoin du meurtre et qui est elle et sa famille des amis et des voisins de Chokri Belaïd, elle est journaliste et elle s’appelle Nadia Daoud.
    Elle dit qu’elle a vu un homme parler au chauffeur de M. Belaïd quelque minute avant le drame, et que lorsque M. Belaïd entre dans la voiture un homme arrive à vive allure et tire une balle dans la vitre du véhicule, puis 3 coups de feu sur M. Belaïd très rapidement. Puis le meurtrier monte sur une vespa bleu foncé ou noir avec un complice qui s’enfuit à vive allure.

    Elle dénonce le calme complice du chauffeur qui n’a pas réagit au premier coup de feu mais qui était impassible comme s’il n’en avait rien à faire, elle a été très choqué par sa réaction. elle déclare aussi que le chauffeur est en ce moment en détention, et que pendant sa détention, il a menti plusieurs fois aux enquêteurs.
    Exemple :
    - il dit qu’il n’a pas parlé à un homme quelque minute avant le meurtre, alors qu’il attendait M. Belaïd dans la voiture de location.
    - il a menti sur ces derniers contacts téléphonique, alors que la police connaissaient ces derniers appels.

    Son chauffeur est membre du parti al watad de M. Belaïd.

    témoignage du témoin du meurtre

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6 février 2013 3 06 /02 /février /2013 19:53

 

 

Rue89 - Thierry Brésillon - Journaliste

Publié le 06/02/2013 à 12h43

Chokri Belaid, le 18 février 2012 (Thierry Brésillon)

 

Chokri Belaid, leader du Parti unifié des patriotes démocrates, un parti d’extrême gauche, a été assassiné ce mercredi matin devant son domicile. Cet assassinat intervient à un moment de tension et de vulnérabilité extrême du processus de transition.

Atteint d’au moins deux balles, l’une dans la tête, l’autre dans le cou, il a succombé rapidement à ses blessures.

D’après le porte parole du Ministère de l’Intérieur, un individu a tiré à bout portant et le deuxième l’attendait sur une moto pour s’enfuir.

 


La voiture de Chokri Belaid mercredi à Tunis (Al Pacino via Twitter)

 

Il était l’une des principales figures du Front populaire, une coalition de partis d’extrême gauche que son parti, bien implanté dans les structures syndicales de l’UGTT, a contribué à fonder en novembre dernier.

Avocat, ancien opposant au régime de Ben Ali dont il a été l’un des premiers à demander le départ en décembre 2010, il était surtout l’un des figures les plus virulentes de l’opposition au gouvernement dirigé par Ennahdha.

L’opposition accuse le parti islamiste d’être plus ou moins directement responsable de sa mort comme le clame son frère, rapporté dans ce « tweet » :

« J’emmerde tout le mouvement Ennahda et j’accuse Rached Ghannouchi d’avoir fait assassiner mon frère. »

Tandis que son père déclarait devant la clinique Ennasr où il a été transporté :

« Bourguiba n’a pas tué mon fils, Ben Ali n’a pas tué mon fils, Rached Ghannouchi la fait ! »

Depuis plusieurs semaines, le climat de violence politique monte et des réunions de partis d’opposition ont été perturbées par des partisans d’Ennadha. Hamma Hamami, autre leader du Front populaire, estime que

« L’assassinat a été organisé et perpétré par des spécialistes ».

Il met en cause

« l’indulgence coupable du gouvernement, et de certains hommes politiques à l’égard des appels à la violence ».

Pour l’instant aucun élément de preuve ne permet de désigner les responsables, mais le fait est que le gouvernement le considérait comme l’un des instigateurs de l’agitation sociale, comme lors des émeutes de Siliana en novembre dernier. Souvent pris à partie, il affirmait être l’objet de menaces.

D’ailleurs Chokri Belaid estimait hier que la montée de la violence était liée à la crise interne d’Ennahdha.

Manifestations à travers le pays

L’émotion et colère enflent rapidement. Des centaines de manifestants convergent vers la clinique et vers le ministère de l’Intérieur où la tension monte rapidement.

A travers le pays, plusieurs locaux d’Ennahdha sont attaqués et des tirs auraient été entendus à Sousse en fin de matinée.

 

 

Mercredi devant la clinique où a été transporté Chokri Belaid

La Révolution assassinée

De son côté le Premier ministre Hamadi Jebali appelle à ne pas tomber dans le piège de la provocation. Cet assassinat est « un acte terroriste, un acte criminel visant non seulement Chokri Belaïd mais aussi toute la Tunisie ».

Il a déclaré à la télévision nationale  :

« Attention à ne pas réagir violemment à chaud. Ce serait permettra aux comploteurs d’atteindre leur but : empêcher la démocratie en Tunisie. »

Tandis que Rached Ghannouchi, président d’Ennahdha, appelle à une journée de deuil national.

La recette du chaos

Cet assassinat, dont la dimension politique est flagrante, intervient en effet au pire moment d’une crise majeure, alors que le gouvernement est fragilisé par les tensions au sein de la coalition et par les divergences internes à Ennahdha.

Elle fait franchir à la tension palpable depuis des mois, un seuil rarement atteint dans le pays depuis la fin des années 50, dans les pires heures de la répression des nationalistes par la France, puis celle des opposants youssefistes par Habib Bourguiba.

  • D’un côté, l’opposition désigne Ennahdha et les Ligues de Protection de la Révolution, déjà mises en cause dans la mort dans des circonstances controversées de Lotfi Nagdh, un responsable de Nidaa Tounes, le 18 octobre. Le Majliss ech’choura d’Ennahdha avait demandé samedi, la libération des personnes détenues dans le cadre de cette affaire.
  • De l’autre, les soupçons vont se porter vers les partisans de l’ancien régime qui, juste après le départ de Ben Ali, n’avaient pas hésité à organiser une campagne de déstabilisation.

En tout état de cause, la rupture du dialogue semble consommée. On ne voit pas pour l’instant qui aura la force de le rétablir, alors que la rédaction de la Constitution, préalable à la tenue d’élections, nécessite encore plusieurs mois de débats.

Mis à jour : Réactions à l’étranger

A l’étranger, les réactions ont été rapides et vives. A Paris, l’Elysée a publié un communiqué de François Hollande condamnant « avec la plus grande fermeté » cet assassinat.

Et à Strasbourg, où se trouve le président tunisien Marzouki, le Parlement européen a observé une minute de silence à la mémoire de Chokri Belaïd.


Minute de silence mercredi au Parlement européen à Strasbourg (Parlement europ&eacute ; en via Flickr)

 

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