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26 septembre 2012 3 26 /09 /septembre /2012 17:55

 

 

Le Monde.fr | 26.09.2012 à 17h38 • Mis à jour le 26.09.2012 à 17h55

 

Alors que le Royaume-Uni a promis, mardi 25 septembre, 1 million de livres (1,6 million de dollars) pour tenter de lutter contre les viols utilisés comme arme de guerre dans les conflits, d'anciens prisonniers syriens témoignent, dans une série d'interviews données à la chaîne de télévision britannique BBC, des violences sexuelles qu'ils ont subies ou observées dans les geôles de l'armée syrienne.

Parmi les victimes, un jeune militant des droits de l'homme raconte qu'il a été violé par trois officiers après son arrestation en novembre. "Les trois hommes, ils étaient comme des animaux. J'ai essayé de me protéger, mais je suis juste un homme petit. Lorsqu'ils étaient en train de me violer, j'ai commencé à dire : 'S'il vous plaît, ne faites pas ça... s'il vous plaît, ne faites pas ça'", témoigne-t-il. Au cours de son agression, ses agresseurs se sont moqués de lui : "Tu veux qu'Assad parte ? Ça c'est pour avoir dit que tu n'aimais pas Bachar Al-Assad."

Une femme arrêtée à Homs l'année dernière lui a également raconté que ses gardes avaient fait usage de rats pour la violer. "Ils ont inséré un rat dans son vagin. Elle hurlait. Après, nous avons vu du sang sur le sol. [Le garde] lui a dit : 'C'est assez pour toi ?' Ils se moquaient d'elle. Il était évident qu'elle était à l'agonie. Nous pouvions la voir. Après ça, elle ne bougeait plus", a raconté le jeune homme. En juin, l'organisation Human Rights Watch avaient déjà mis en lumière l'usage des violences sexuelles en Syrie.

 

Lire : violents combats à l'intérieur du siège de l'état-major à Damas

 

 
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24 septembre 2012 1 24 /09 /septembre /2012 16:29

 

L'imputation de ses forfaits aux autres, vieille stratégie du régime

Il y a quelques semaines, l'arrestation de l'ancien ministre libanais Michel Samaha, devenu agent stipendié de Bachar Al Assad et incapable - certains savent sans doute pourquoi... - de refuser quoi que ce soit à ses âmes damnées Bouthayna Chaaban et Ali Mamlouk, a semé le trouble dans son pays. A la demande des responsables syriens, il avait rapporté à Beyrouth, dans sa voiture, en compagnie du général Jamil Al Sayyed et de Pierre Daher, des bombes sophistiquées destinées à un attentat contre le patriarche maronite Bichara Raï. Dans la logique des moukhabarat syriens, les opinions publiques locales et occidentales n'auraient pas manqué d'attribuer cette opération à des "islamistes fanatiques", le patriarche en question s'étant montré au cours des mois écoulés - allez aussi savoir pourquoi... - l'un des défenseurs les plus fidèles du pouvoir en place à Damas.

 

Congrès national de Salut de la Syrie (la tribune)

Congrès national de Salut de la Syrie (l'assistance)

 

Il y a quelques jours, jeudi 20 septembre, des agents du service de renseignements de l'armée de l'air ont arrêté, sur la voie rapide menant de l'aéroport international de Damas à la capitale, trois membres dirigeants du Comité de Coordination des Forces de Changement National Démocratique, Abdel-Aziz Al Khayyer, Iyas Ayyach et Maher Tahhan, qui rentraient d'une visite en Chine. Les moukhabarat espéraient que le positionnement prudent du Comité, qui se préparait à réunir à Damas des opposants de l'intérieur et de l'extérieur - finalement absents, faute d'avoir obtenus les garanties de sécurité réclamées... - considérés comme "halal" par le régime, suffirait encore une fois à orienter les regards et diriger les accusations vers  les groupes "terroristes armés". Le stratagème n'ayant pas fonctionné, les médias syriens ont affirmé le lendemain que l'enlèvement avait été le fait "d'éléments appartenant à l'Armée Syrienne Libre", désireux de "faire capoter le Congrès" en question. Comme si l'ASL était préoccupée par une initiative de ce genre... convoquée par un rassemblement de politiciens dans lequel la rue syrienne ne s'est jamais reconnue. On notera d'ailleurs que, passant sous silence la "disparition" de leurs amis dont elles persistent à attribuer la responsabilité aux moukhabarat, les Forces de Changement en question se sont réunies, comme si de rien n'était, dimanche 23 septembre, en présence des ambassadeurs de Russie, de Chine et d'Iran.

Personne ne prétend que la révolution syrienne est exemplaire

Elle se voulait pacifique. Elle a été entraînée malgré elle dans la voie d'un affrontement armé avec les forces de protection du régime. Elle ne voulait pas  emprunter cette voie, mais elle a été contrainte de s'y engager pour protéger les populations et mettre fin au plus vite à la folie éradicatrice du pouvoir. A son tour, comme on pouvait le craindre, elle s'est rendue coupable d'agissements totalement condamnables. Toutefois, il existe entre les deux camps une différence fondamentale. Syriens ou étrangers, les menhebbakjis et autres "adorateurs de Bachar" n'expriment jamais la moindre compassion pour les victimes civiles du conflit, toutes assimilées en bloc à des "terroristes", et ils observent un silence complice ou approbateur sur la violence débridée des prétendues "forces de l'ordre" contre tous ceux qui leur tombent sous la main. En revanche, ces actes ont provoqué parmi les partisans de la révolution des critiques et des débats, qui ont abouti à l'adoption de mesures censées prévenir la répétition de telles actions.

 

"Ainsi étions-nous au début et tu n'as pas compris. Voici ce que nous sommes : cette fois-ci tu vas comprendre"

 

Mais, comme on l'a déjà souligné, la révolution est aussi victime dans ce domaine de la désinformation du régime dont l'expérience et les moyens restent, là comme ailleurs, bien supérieurs à ceux dont les activistes disposent. Les deux exemples qui figurent plus haut n'en sont que des illustrations récentes. La diffusion, sur France 2, du reportage "Houla. Autopsie d'un massacre", auquel ce blog avait consacré toute une série d'articles, ne suffira à réduire au silence ni ceux qui "savent"... sans être jamais allés en Syrie, ni ceux qui préfèrent répéter les affirmations sans fondement d'experts mal informés ou irresponsables dont les propos servent leurs pétitions de principe.

Surtout, et pour horribles qu'aient été la liquidation des membres de la tribu des Berri à Alep ou l'exécution de soldats ou de chabbiha faits prisonniers, aussi fermement condamnées par les contestataires que par le Conseil National Syrien et l'Armée Syrienne Libre, la révolution ne se résume pas en Syrie au tableau sinistre qu'en dresse la propagande du pouvoir. Comme le racontent, depuis plusieurs mois, les "Lettres de Syrie", et comme le décrivait, avant-hier, le témoignage intitulé "La société syrienne se mobilise pour faire vivre la révolution", cette révolution est faite aussi de gestes concrets d'humanité, de dévouement, d'abnégation, de partage et de solidarité. Ce sont ces gestes qui permettent aux Syriens de continuer de descendre dans les rues, lors des centaines de manifestations organisées chaque vendredi, en dépit des dangers auxquels ils s'exposent. Ce sont eux qui permettront aux jeunes Syriens et aux jeunes Syriennes, décidés à ne plus se laisser faire et à ne pas connaître les humiliations infligées un demi-siècle durant à leurs parents, d'aller au bout d'une démarche qui est moins destinée à détruire qu'à construire. Ils esquissent, pour qui sait voir, les grands traits de cette Syrie nouvelle.

Pour ne pas dire que nous ne savions pas...

Alors que les massacres succèdent aux massacres, faisant comme à Daraya plus d'un millier de morts, que des files d'attente devant les boulangeries sont bombardées quotidiennement et que les actes les plus abominables sont perpétrés sur des enfants..., ceux qui ne veulent pas se plaindre plus tard  d'avoir été mal informés - et surtout "ré-informés"... - ont à leur disposition nombre de sites en diverses langues qui fournissent des témoignages et décryptent les informations. Faute de pouvoir les mentionner tous, on suggèrera la visite de SouriaHouria, de La Révolution syrienne en France, de Syrianfacts, de A l'encontre, de Sur les murs de Syrie, de Dans l'enfer de Homs, de Quand la peur change de camp..., mais aussi, en anglais, la consultation de Syrian Revolution Digest, en arabe celle de Syrian Revolution, et dans ces deux langues du Strategic Research and Communication Centre.

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10 septembre 2012 1 10 /09 /septembre /2012 18:55

 

A l'affût des révolutions (46/50)

 

Une chronique de Nadia Aissaoui et Ziad Majed


Comment expliquer cette inertie, voire ce manque d’intérêt pour ce qui se passe en Syrie ? Il est possible de lister cinq éléments d’analyse pour tenter de comprendre cette posture.

Le premier élément est lié à une perplexité voire une paralysie face à ce que beaucoup appellent la complexité du « Moyen-Orient ». Une région de conflits depuis des décennies et un bastion de « l’islam politique » qui inquiète et suscite peu de sympathie. Cet imaginaire peuplé de clichés et de généralisations offre une image réductrice et masque la réalité de la vie de millions de femmes et d’hommes, de leurs luttes au quotidien, et de leurs véritables aspirations qui ont mené ces deux dernières années aux soulèvements contre le despotisme. Cette trame, ancrée dans les esprits, conforte une certaine tendance culturaliste dont peu arrivent à se défaire.

 

Manifestation à Mawazini, DamasManifestation à Mawazini, Damas

Il s'agit là du deuxième élément d’analyse, à savoir que les « populations de cette région », habituées aux conflits, le sont également à la violence. Ces révolutions ne sont donc qu’un nouveau conflit, s’ajoutant à d’autres, qu’il est préférable de tuer dans l’œuf. De cette logique découlent deux idées récurrentes sur les sociétés arabes à savoir que, d’une part, elles ne sont pas prêtes pour la démocratie, et plus encore, qu'il faut s’opposer à importer la démocratie chez elles. Sous le prétexte fallacieux du respect de la diversité des cultures, la démocratie devient un concept breveté de l’Occident dont l’usage est mis en doute ailleurs. Les aspirations démocratiques dans le monde arabe ne seraient donc que des lubies agitées par des minorités politiques ou par des courants manipulés par l’extérieur.

Le troisième élément s’inscrit dans cette même logique. La victoire des Frères musulmans aux élections tunisiennes et égyptiennes n’a fait que renforcer la peur et alimenter des relents islamophobes caricaturaux. Très peu tiennent compte du fait que les transitions politiques post-dictatures ne se font pas du jour au lendemain sans accrocs et que la victoire des mieux organisés et financés, et surtout les plus opprimés sous les dictatures déchues (ici les islamistes), est une conséquence de décennies de bâillonnement. Très peu misent sur le fait que la libération de la parole et la construction progressive d’institutions politiques soient une promesse que les choix des majorités (quelles qu’elles soient) soient respectés. Pour aller plus loin, combien seraient prêts à considérer dans le futur que les citoyens arabes ayant brisé le tabou de la peur seront de plus en plus en mesure de juger leurs élus sur la base de programmes politiques, et les sanctionner si leurs engagements n’étaient pas tenus ?

"Nous resterons ici". A Dael, région de Deraa 
"Nous resterons ici". A Dael, région de Deraa

 

Le quatrième élément affectant la mobilisation en France, comme en Europe, a une dimension idéologique marquée par l’endoctrinement persistant d’une certaine gauche « anti-impérialiste ». Ainsi, après l’enthousiasme qui a accompagné le début des révolutions tunisienne et égyptienne (contre deux régimes considérés pro-occidentaux), la militarisation de la révolution en Libye, suite à la répression du régime Kadhafi, puis l’intervention militaire onusienne à travers les forces de l’OTAN ont changé la configuration de ce qu’on appelait déjà le « printemps arabe ».

Très vite, les débats habituels concernant les complots impérialistes, les enjeux économiques et le pétrole se sont imposés. Une vision apocalyptique des révolutions a émergé, dépeignant une alliance entre un Occident guidé par ses seuls intérêts stratégiques et les forces obscurantistes de la région dites tantôt salafistes tantôt jihadistes, tantôt les deux ensemble.

 

Gauche des « complots »

En ce qui concerne la Syrie, faire barrage aux islamistes et aux forces impérialistes est devenu le leitmotiv de cette gauche « pavlovienne », armée des arguments de la propagande du régime de Damas, soi-disant menacé par ces deux fléaux.

Malgré des centaines de milliers d’images, de films et de dizaines de rapports d’organisations humanitaires établissant la cruauté d’Assad (à côté duquel les autres dictateurs de la région passent pour des « tendres ») contre son peuple, qui a lutté pacifiquement pendant des mois avant que certains ne prennent les armes, on continue d’évoquer l’impérialisme et les complots. Les auteurs de cette gauche, faisant abstraction des peuples, font même délibérément diversion sur les causes du peuple syrien en Syrie en questionnant la démocratie en Arabie saoudite ou les ambitions du Qatar ou encore « l’encerclement israélo-occidental » de l’Iran ! 

Tout se passe comme si l’absence de libertés en Arabie et les ambitions du Qatar délégitimaient le soulèvement populaire contre un régime despotique qui gouverne la Syrie depuis 42 ans. Ou comme si le meurtre de plus de 25.000 Syriens par al-Assad n’était pas en soi un motif suffisant pour exiger son départ et son jugement, indépendamment de tous les enjeux régionaux.

Quant à dénoncer les intérêts des acteurs externes et s’en indigner, c’est faire la démonstration d’une grande naïveté politique puisque l’essence même des relations internationales est basée sur la quête des intérêts propres des protagonistes (Iran, Russie et Chine compris) !

Le cinquième élément est le facteur temps qui s’ajoute à l’éloignement géographique (et ce fut également le cas pour le Yémen et Bahreïn), provoquant lassitude et désintérêt. En effet la durée n’a pas joué en faveur des révolutions. Ainsi, la révolution syrienne, la seule qui se poursuit après le départ du président du Yémen, l’étouffement (temporaire) du soulèvement bahreïni et la fin des contestations en Afrique du Nord (voisin), est reléguée au rang des faits divers pour beaucoup de gens, même si les horreurs de la répression font souvent la Une dans la presse et sont prioritaires dans l’agenda de la politique française. L’inertie de la diplomatie et le sentiment d’impuissance face à ce qui se déroule, alors que les réunions et les congrès se multiplient, offrent encore moins d’horizons et d’espoir auxquels une mobilisation pourrait se raccrocher. 

Pourtant, aujourd’hui, il s’agit de s’élever contre des massacres annoncés, d’assurer la protection de populations civiles (femmes et enfants) qui perdent la vie par centaines quotidiennement. C’est avant tout une conception humanitaire et éthique de la solidarité qui est en jeu et qui devrait transcender tous les autres clivages.

Les révolutions arabes, et surtout la révolution syrienne, ont eu le mérite de mettre une partie de l’opinion publique dans plusieurs pays face à ses contradictions. Une question préliminaire s’impose toutefois avant toute réflexion : qui consentirait à être gouverné par un père et son fils, un parti unique, des lois martiales, un État policier, des chars et des réseaux mafieux pendant 42 ans ? Qui s’accommoderait de voir dans son propre pays s’allonger la liste des victimes, des disparus, des prisonniers politiques et des exilés ? Seule une réponse tranchée est à même de construire une solidarité respectueuse de la dignité et la liberté de l’autre, et donnerait une légitimité à tout débat.

Vacances... 
Vacances...

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30 août 2012 4 30 /08 /août /2012 17:24

 

Rue89 - Le Yéti

  yetiblog.org
Publié le 30/08/2012 à 18h23

 

 

 

Des foyers de tension du Moyen-Orient, nous ne savons souvent que ce qu’on nous en dit à travers les médias du microcosme. Mais émergent parfois des points de vue iconoclastes exprimés par quelques journalistes opérant en marge des sentiers battus officiels. Voici les opinions de deux d’entre eux, britanniques, sur le conflit syrien.

Le premier, Robert Fisk, est l’envoyé spécial du journal anglais The Independent, dans cette effervescente région.

L’autre se nomme Dan Glazebrook, journaliste indépendant, spécialiste des relations internationales, et collaborant à différents médias comme The Guardian.

Une armée de libération très professionnelle

Dans un article intitulé « La vérité sanglante sur la guerre de Syrie », Robert Fisk rapporte la surprise de l’armée syrienne régulière devant la puissance de feu insoupçonnée de leurs adversaires à Homs. Des « centaines de roquettes », des « milliers d’explosions » qui obligèrent les soldats d’Assad à évacuer leurs positions.

Très professionnellement planifiées sont aussi les offensives menées par une Armée syrienne libre (ASL), loin d’être constituée comme on le dit par les seuls déserteurs de l’armée régulière. C’est le cas de l’assaut qui visa l’école d’artillerie à Alep où étaient supposés entreposés les missiles antiaériens censés répondre à une attaque d’Israël ou de l’Otan.

On est loin des premières manifestations spontanées et non-violentes de la première révolte civile anti-Assad. Même si Fisk rappelle que les caméras d’Al Jazeera avaient dès le début débusqué d’étranges pèlerins solidement armés au côté des manifestants pacifiques.

Nul doute pour Fisk, les forces de l’ASL reçoivent une aide financière et logistique conséquente de l’Occident. Tout comme avaient été financés et armés les combattants moudjahidines d’un certain Ben Laden pour bouter les Russes hors d’Afghanistan dans les années 80.

Fisk se voit ainsi conforté dans sa thèse exprimée lors d’une précédente chronique :

« En fin de compte, toute ce que veulent Israël et ses alliés occidentaux, c’est briser l’Iran – via la Syrie. »

« Sécuriser l’environnement régional »

Citant la répression musclée (ignorée de nos médias) de manifestations chiites à Qatif en Arabie saoudite, Dan Glazebrook est tout aussi catégorique :

« Tout ce qui se passe aujourd’hui au Moyen-Orient doit être compris dans le contexte de préparation de la guerre contre l’Iran. »

L’objectif, comme en Syrie : « sécuriser l’environnement régional » en réduisant au maximum toutes éventualités de réactions populaires – notamment chiites – contre les intérêts occidentaux de la région après le déclenchement de l’opération finale contre l’Iran.

Pour Glazebrook, la guerre Otan-Iran est bel et bien engagée. Avec l’aide de quelques régimes satellites comme celui d’Arabie saoudite.

 

 

Interview de Glazebrook

Devant de telles assertions, il s’en trouvera bien évidemment pour hurler au conspirationnisme (comme il y en eut pour dénoncer les causes humaines du réchauffement de la planète) et suggérer une trouble faiblesse des « conspirateurs » pour le régime d’Assad.

Ni Fisk, ni Glazebrook ne sont pourtant soupçonnables d’une quelconque empathie pour le régime brutal du dictateur syrien. Fisk n’a pas de mots assez durs pour dénoncer les exactions de l’armée régulière syrienne.

Leurs thèses ont au moins le mérite d’alimenter la réflexion et d’apporter un éclairage différent de celui abondamment diffusé dans nos médias occidentaux.

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27 août 2012 1 27 /08 /août /2012 16:05

 

 

LE MONDE | 27.08.2012 à 12h10 • Mis à jour le 27.08.2012 à 14h01

Par Claire Talon

 
Plusieurs centaines de corps ont été retrouvés à Daraya, près de Damas, le 26 août.

Des centaines de corps empilés, adultes et enfants mêlés, dégoulinants de sang, enveloppés à la hâte dans des draps ou des couvertures, apparaissent tour à tour, devant l'œil blafard de la caméra. "Massacre de la mosquée Abou Souleimane à Daraya, 25 août 2012, vengeance des hommes de main de Bachar Al-Assad", halète la voix du cameraman en zigzaguant entre les cadavres.

C'est la moins insoutenable des vidéos diffusées par des rebelles syriens sur la macabre découverte qu'ils auraient faite dimanche dans les caves et les maisons de cette ville majoritairement sunnite située à 7 kilomètres de Damas. L'offensive avait commencé cinqjours plus tôt par des bombardements, avant que les hommes de Bachar Al-Assad soient envoyés à l'assaut des maisons.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), au moins 330 corps, dont ceux de femmes et d'enfants, auraient été retrouvés dans les sous-sols de Daraya, que l'armée syrienne se vante d'avoir purifiée des "terroristes mercenaires qui terrorisent les habitants et s'attaquent aux biens publics et privés". Les insurgés affirment que les victimes auraient été tuées à bout portant.
Selon l'AFP, au moins une vidéo montre des cadavres d'enfants assassinés d'une balle dans la tête.

De nombreux cas d'exécutions sommaires ont été signalés en Syrie depuis le début du conflit, notamment à Houla, près de Homs, où les cadavres de plus de 100 personnes, dont une cinquantaine d'enfants, ont été retrouvés en mai dernier.

 DES MILLIERS DE RÉFUGIÉS

Mais la guerre que se livrent l'armée et les rebelles a atteint un niveau de violence inégalée depuis le début du conflit, qui a déjà fait entre 18000et 25000morts, selon les estimations. Ces derniers jours, l'aviation s'est distinguée en bombardant notamment les longues queues de civils qui s'allongent devant les boulangeries et les fours à pain, faisant des dizaines de morts.

Selon l'OSDH, les affrontements auraient tué 440 personnes pour la seule journée de samedi et 149 dimanche, précipitant sur les routes des milliers de nouveaux réfugiés qui s'entassent à la frontière turque. La Turquie, qui a déjà accueilli 80000 ressortissants syriens, affirme ne plus avoir les moyens d'en prendre en charge et réclame la mise en place de camps temporaires côté syrien, sous la protection de l'ONU.

Sur le terrain, le rapport de forces n'a pas connu d'évolution notable malgré l'intensification des frappes aériennes sur Alep et les environs de Damas. Les rebelles affirment toujours contrôler la moitié d'Alep. Sans que cette information ait pu être vérifiée, l'ASL fait état de la défection de 18officiers du régime, dont le général Mohammed Al-Kherat, commandant en chef de la 7e division de l'armée syrienne.

Mais Bachar Al-Assad affichait ses soutiens dimanche, d'abord en la personne de son vice-président sunnite, Farouk Al-Chareh, réapparu après un mois d'absence et de rumeurs de défection. Mais surtout en compagnie d'une délégation iranienne tout sourire, venue manifester son soutien au président, qui a affirmé qu'il "vaincrait à n'importe quel prix", sans négocier. 

Claire Talon

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26 août 2012 7 26 /08 /août /2012 14:59

 

Libération - 26 août 2012 à 11:00
Un combattant de l'armée libre tente de mettre à l'abri une femme durant des combats à Alep, le 12 août.
Un combattant de l'armée libre tente de mettre à l'abri une femme durant des combats à Alep, le 12 août. (Photo Goran Tomasevic. Reuters)

article + vidéo L'opposition syrienne dénonce un massacre après la découverte de centaines de corps à Darya, près de Damas.

 

Des centaines de personnes ont été tuées à Daraya depuis que l’armée syrienne a lancé mardi une vaste opération pour chasser les rebelles de cette localité proche de Damas, l’opposition dénonçant un nouveau massacre.

Dans cette localité de 200.000 habitants, située à 7 km au sud de Damas, au moins 320 corps ont été retrouvés, a rapporté dimanche l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), précisant que la majorité des victimes ont été tuées depuis le début de l’opération militaire lancée il y a cinq jours.

Les militants hostiles au régime du président Bachar al-Assad ont diffusé des vidéos où des dizaines de corps ensanglantés apparaissent gisant au sol, dénonçant un «massacre odieux commis par les gangs du régime d’Assad».

Il est impossible de confirmer ou authentifier le bilan et les vidéos de source indépendante.

L’agence officielle Sana a rapporté de son côté que les forces armées ont «purifié» Daraya des «terroristes mercenaires qui ont commis des crimes contre les habitants de la localité, les ont terrorisés et ont détruit les propriétés publiques et privés».

Le régime à Damas a été accusé à plusieurs reprises par l’opposition de commettre des massacres à travers la Syrie notamment à Houla (centre) le 25 mai (108 personnes dont une cinquantaine d’enfants) et Al-Koubeir (centre) en juin (55  personnes dont des femmes et des enfants). A chaque fois, Damas a démenti toute implication, accusant des «gangs terroristes armés».

D’après les militants, le régime «criminel a imposé un blocus et coupé les approvisionnements vers Daraya, puis a bombardé sans discernement avec des avions et des armes lourdes. Des bandes criminelles ont mené par la suite des exécutions sommaires, (des victimes) ont été démembrées, brûlées».

Alors que le mois d’août est déjà le plus meurtrier du conflit syrien avec plus de 4.000 morts en trois semaines, les découvertes macabres, souvent les cadavres de personnes victimes d’une exécution sommaire, se multiplient en Syrie depuis quelques semaines.

Samedi, les violences ont fait au moins 183 morts à travers le pays «dont au moins 34» à Daraya, a indiqué l’OSDH, organisation basée en Grande-Bretagne qui s’appuie sur des militants et des témoins.

Damas met en garde Brahimi

Face aux violences qui ne faiblissent pas après plus de 17 mois de conflit, Lakhdar Brahimi, nouveau médiateur international pour la Syrie, s’est dit «flatté, touché» mais aussi «effrayé» par la mission qui l’attend, lors d’un entretien avec le chef de l’ONU Ban Ki-moon.

La presse officielle syrienne a prévenu ce week-end M. Brahimi qu’il ne devait pas suivre le même chemin que son prédécesseur, Kofi Annan, dont la mission a échoué en raison des divisions internationales, accusant M. Annan de s'être «plié aux pressions occidentales et américaines».

«Pour que la mission de Brahimi soit un succès et pour que l’expérience Annan ne se répète pas (l'émissaire) doit passer par la porte syrienne et respecter les règles approuvées par Damas», a indiqué le quotidien gouvernemental As-Saoura.

M. Brahimi travaillera depuis New York, tandis que la mission de l’ONU, chargée en avril de surveiller un cessez-le-feu jamais appliqué, a plié bagages après avoir dû interrompre ses patrouilles en juin face à la recrudescence des violences. Son chef, le général sénégalais Babacar Gaye, a quitté Damas samedi.

Dans la ville d’Alep (nord), poumon économique du pays ravagé par plus d’un mois de combats, de nouvelles violences ont éclaté dimanche dans certains quartiers tandis que d’autres étaient bombardés par l’armée.

Dans la vieille ville, «la plupart des gens sont partis», a affirmé un rebelle. Ceux qui n’ont pas encore fui se pressent devant les boulangeries, formant de longues files d’attente, a constaté une journaliste de l’AFP.

Dans plusieurs quartiers, l’Armée syrienne libre (ASL, rebelles), qui revendique 60% de la ville, semble contrôler la situation, avec des barrages visibles, selon la journaliste.

Depuis le début de la révolte contre le président Bachar al-Assad en mars 2011, les violences ont fait 25.000 morts, selon l’OSDH, et poussé plus de 200.000 Syriens à fuir vers les pays voisins, selon le Haut Commissariat aux réfugiés de l’ONU (HCR).

 

(AFP)

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19 août 2012 7 19 /08 /août /2012 14:18

 

 

Le régime de Bachar El-Assad paraît désormais résister autour de son noyau dur : le clan Assad, l’appareil militaro-sécuritaire alaouite et ses milices. Aussi spectaculaires soient-elles, les récentes défections ne concernent que la communauté sunnite au sein de l’élite politique et militaire. De plus, le pouvoir met en avant ses capacités de nuisance, à l’intérieur de ses frontières en jouant la carte de la partition territoriale et communautaire ; à l’extérieur en tentant de déstabiliser le Liban et en brandissant la menace d’armes chimiques et le danger jihadiste à l’attention de l’Occident et d'Israël. Cette politique de la terre brûlée pourrait s’accentuer à mesure que le clan Assad perd du terrain.  Mais ces capacités de déstabilisation sont bien moindres qu’il ne le laisse entendre alors qu'en face, la société syrienne continue de s'organiser et de se réapproprier son pays.

 

J.-P. Filiu 
J.-P. Filiu

 

Professeur à Sciences-Po (Paris) et familier de la Syrie depuis plus de trente ans (son premier séjour remonte à 1980), Jean-Pierre Filiu revient sur la nature du régime Assad, l’aveuglement persistant de la communauté internationale qui considère le système Assad comme un Etat et non « une mafia identifiée à un clan et un homme », et la nouvelle construction nationale produite par le processus révolutionnaire.

Le Liban avait jusqu’à présent assez bien résisté à la crise syrienne en dépit de sa grande vulnérabilité. Faut-il y voir un effet de la révolution syrienne ou bien une instrumentalisation du régime syrien qui exercerait ses capacités de nuisance ?

L’élément le plus important est que, durant dix-huit mois, les niveaux hallucinants de violence atteints en Syrie n’ont pratiquement pas eu de conséquences sur le Liban voisin. Beaucoup d’observateurs s’attendaient à ce que le Nord-Liban devienne une plaque tournante du soutien à la révolution syrienne, du fait de l’engagement historique des militants du sunnisme local conte le régime Assad. Or il n’en a rien été, car c’est de la frontière turque qu’est venu l’essentiel de l’appui extérieur à l’insurrection.

De même, le Hezbollah, tout en apportant un soutien inconditionnel à Bachar El-Assad, et en contribuant au moins au début à la répression de la contestation en Syrie, s’est bien gardé d’« importer » ce différend au Liban même.

Les incitations du régime syrien à un « réchauffement » du front libanais avec Israël, dans le même esprit que les provocations de ce régime sur le Golan en mai et juin 2011, n’ont pas été suivies d’effet, malgré la volonté de Bachar de soulager ainsi la pression intérieure. Il est évident que le régime syrien, s’il le pouvait, déstabiliserait une fois de plus le Liban en plongeant le pays dans la violence. Il n’est pas certain qu’il en soit encore capable, même si ses agents ont encore une considérable capacité de nuisance au Liban.

Le fait que les auteurs de la répression appartiennent en grande partie à la communauté alaouite a ravivé le ressentiment de la majorité sunnite à son encontre. Dans le même temps, à la différence des années 1980, cette ligne de clivage sunnite/alaouite n’est-elle pas dépassée par le clivage sunnite/chiite, renforcé par les dynamiques régionales, notamment le soutien de l’Iran et de son allié le Hezbollah ?

 

Dessin d'Ali Ferzat, caricaturiste syrien. 
Dessin d'Ali Ferzat, caricaturiste syrien.
Mon premier séjour en Syrie remonte à 1980, lorsque des commandos jihadistes à Alep combattaient un régime explicitement condamné comme « hérétique », car alaouite. Dans le cadre de ma recherche en cours, je viens de consulter une cinquantaine d’enregistrements très récents de constitution d’unités rebelles (il en apparaît une par jour !). Elles s’engagent toutes à défendre l’honneur de la nation et l’intégrité de ses habitants contre un régime « criminel ». Même si ces proclamations sont saturées de références islamiques, elles ne sont pas d’ordre confessionnel. L’Armée syrienne libre (ASL), comme son nom l’indique, veut libérer le pays d’un régime rejeté comme étranger et soutenu par l’étranger, la Russie et l’Iran.

La menace jihadiste semble surévaluée. Mais les puissances occidentales, en refusant de soutenir militairement les révolutionnaires,  favorisent une radicalisation puisque les sources de financement et de soutien émanent du Golfe et en particulier d’acteurs privés voire de réseaux salafistes. Quelle peut être à terme l’influence de ces groupes salafistes ?

Il faut bien distinguer les salafistes, tenants d’un ordre moral volontiers agressif, mais agissant dans le cadre syrien, des jihadistes, pour qui la Syrie n’est qu’une « terre de jihad » parmi d’autres. Avec toutes les précautions d’usage pour ce type d’estimation, l’insurrection armée compte aujourd’hui 40 000 partisans pour quelque 200 000 combattants actifs dans les rangs gouvernementaux, qui jouissent en outre d’une puissance de feu incomparable.

La très grande majorité des groupes insurgés se réclame de l’ASL, même s’ils ne sont pas tous intégrés à une chaîne de commandement claire. La plupart des groupes autonomes sont présentés comme « salafistes », tel celui des « Hommes libres de Cham », dans la province d’Idlib, mais ils arborent le drapeau national. Il reste les jihadistes, qui seraient de l’ordre d’un millier, avec une forte composante « irakienne », soit des Syriens ayant combattu en Irak entre 2003 et 2008 (avec le soutien alors des « services » syriens, d’où les probabilités actuelles d’infiltration réciproque), soit des anciens guérilleros irakiens.

Aucune puissance n’assiste l’ASL en tant que telle, ce qui affaiblit la cohérence opérationnelle et politique de la rébellion. C’est un processus inverse qui est à l’œuvre, avec des groupes locaux qui émergent et se fédèrent progressivement de « katiba » (bataillon) en « liwa » (brigade). Cette armée, en se constituant par le bas, redécouvre la « guérilla » au sens où cette « petite guerre » est née, comme concept, dans la résistance espagnole, à l’invasion napoléonienne de 1808. Chaque groupe s’arme sur place (par coup de main ou achat à des officiers corrompus), ou bien dispose de ses relais à l’étranger. A cet égard, l’abstention occidentale représente un avantage déterminant pour les groupes salafistes et jihadistes.

 

« Cette révolution affectera tout le Moyen-Orient »
A Alep, les portraits noircis des Assad 
A Alep, les portraits noircis des Assad

 

La constitution d’un réduit alaouite vous semble-t-elle probable ? Le danger ne vient-il pas davantage de la région kurde et de la posture des partis kurdes dans la révolution ? Le fort sentiment d’appartenance nationale est-il capable de prévenir le risque de partition du territoire syrien ?

La thèse principale de mon essai en cours est que la révolution syrienne est en train de légitimer, par sa lutte même, le cadre territorial imposé par le partage colonial de 1920. Pour la première fois en près d’un siècle, ces frontières vont être celles assumées par un peuple qui a significativement repris à son compte le « drapeau de l’indépendance », aboli par le Baas. C’est pourquoi cette révolution, en renversant la perspective au profit des peuples, affectera tout le Moyen-Orient, où les constructions nationales sont souvent le fruit du diktat d’un hégémon extérieur, ou au mieux d’une transaction avec lui.

Le système Assad n’est pas seulement condamné par l’ampleur de ses crimes, il l’est par sa vision profondément passéiste (partagée d’ailleurs avec son parrain russe) qui l’amène aujourd’hui à ressusciter le projet d’Etat alaouite, mis en œuvre sous le mandat français, de 1922 à 1936. Il est cependant clair que le régime syrien, à mesure qu’il perdra pied, jouera la fragmentation : il a déjà abandonné des pans entiers du nord du pays aux nationalistes kurdes et il arme les populations chrétiennes, à Damas comme ailleurs. 

Les exactions commises par des membres de l’ASL, comme à Alep avec l’exécution du clan Berri (redoutables collaborateurs du régime d'Assad), augurent-elles d’un tournant alors que les actes de revanche avaient été plutôt limités jusqu'alors en dépit des provocations du régime ? Dans quelle mesure, l’ASL, dont le commandement a signé un acte de bonne conduite, est-elle en mesure de contrôler ces dérapages ?

Cela fait des mois que les insurgés mettent en ligne des images révoltantes d’exécutions et d’« interrogatoires » d’individus présentés comme des agents ou des militaires du régime. Human Rights Watch a dénoncé dès mars les liquidations, tortures et autres exactions perpétrées par des rebelles à titre individuel ou collectif. Le « code de bonne conduite » que vous évoquez n’est pas une initiative du commandement de l’ASL, mais émane d’une icône révolutionnaire, l’ancien footballeur Abdelbasset Sarout, grande figure du siège de Homs. C’est lui qui a convaincu des commandants locaux de signer cet engagement sur une page Facebook dédiée.

Si l’on veut se sortir de ces bricolages baroques et aller vers des engagements formels, la seule voie passe par la reconnaissance de la révolution syrienne, y compris dans sa branche armée, en contrepartie de son strict respect, assorti de sanctions internes, des conventions internationales et du droit de la guerre. Dans le cas contraire, les dérives miliciennes seront toujours aussi choquantes et dramatiques.

 

Dans la banlieue de Damas : les révolutionnaires se sont réapproprié le drapeau de l'Indépendance. 
Dans la banlieue de Damas : les révolutionnaires se sont réapproprié le drapeau de l'Indépendance.

 

Les « militaires libres » ont notamment élaboré un projet de transition (prévoyant l’établissement d’un Conseil supérieur de la défense chargé de créer un conseil présidentiel composé à égalité de militaires et de civils) et semblent prendre aujourd'hui l'ascendant. La complémentarité qui existe entre le mouvement civil révolutionnaire et les militaires libres suffit-elle à prévenir leur hégémonie dans l’après Assad ? Quel peut être leur rôle dans la transition et peuvent-ils y associer des éléments alaouites de l’institution militaro-sécuritaire sachant que le noyau dur du régime ne se fissure pas ?

Je ne suis pas convaincu que les « militaires libres » aient la haute main sur le processus actuel. Cela participe d’une dynamique complexe, visant entre autres à encourager les défections de généraux.

Vous avez raison de souligner que le « noyau dur » alaouite a été épargné par ces fissures, parce qu’un tel système ne se « fissure » pas, il s’écroule, et nul n’en verra les signes annonciateurs tant le culte du secret y est prégnant. C’est là que la Russie, si elle voulait sortir de son soutien inconditionnel à Bachar El-Assad, pourrait contribuer à limiter les conflits internes, à défaut de promouvoir une authentique transition pacifique.

Tout cela va favoriser durant un temps les intrigues militaires, mais la page des putschs politiques, inaugurés dès 1949, juste après l’indépendance de la Syrie, est bien tournée. C’est le pouvoir civil qui prévaudra. Des structures mixtes, associant civils et militaires, existent déjà dans toutes les zones « libérées », pour en assurer le fonctionnement quotidien.

L’essentiel est que c’est l’intérieur qui va définir la Syrie de demain, et non je ne sais quelle combinaison définie à l’extérieur. C’est pourquoi il est urgent pour un pays comme la France de reprendre langue avec cette Syrie profonde. J’ai récemment proposé (Libération du 16 août) une assistance volontariste au système de santé alternatif, mis en place par les comités révolutionnaires (les blessés peuvent être torturés ou éliminés dans les hôpitaux des zones gouvernementales, où la Banque de sang dépend du ministère de la défense).

Je crois aussi que la France conserve un vrai capital de confiance au sein de la communauté alaouite, dont il est crucial de dissocier le devenir de celui d’un régime condamné. Je pense enfin que nous devrions (et cela ne concerne pas que le gouvernement) jouer un rôle beaucoup plus actif dans l’appui aux médias libres de Syrie et à leurs reporters-citoyens, qui ont payé un très lourd tribut à la répression. Paris a toutes les raisons de devenir une plate-forme assumée, publique et professionnelle, de cette information libre, qui circule aujourd’hui sur Internet, avec les failles que l’on sait.

 

« Cette mafia est identifiée à un clan et à un homme »

 

Damas. 
Damas.© Lens young dimasqhi

 

Les milices peuvent-elles combattre jusqu’au bout ? A la différence des unités d’élite, elles ne sont pas animées d’une culture militaire et la solidarité de minoritaire, sur laquelle s’appuie le pouvoir, n’est pas infaillible. Le fait que le président Assad soit de plus en plus isolé jusqu’à limiter ses apparitions publiques ne peut-il jouer dans ce sens et briser cette solidarité ?

Le système Assad est en train de se révéler pour ce que Michel Seurat (1947-1986) avait décrit trente ans plus tôt, un « Etat de barbarie ». Le plus surprenant est que la communauté internationale continue de le considérer comme un « Etat » tout court, avec ses attributs, ses reconnaissances et ses immunités. C’est cette fiction qu’il faut dénoncer en soulignant que nous avons affaire à une mafia, dont une partie a des grades, des uniformes et des chars russes T-72 , tandis que l’autre s’affiche en bandes, tue au couteau et à la hache. Cette mafia est identifiée à un clan et à un homme.

C’est pourquoi Kofi Annan a fait la preuve de son aveuglement persistant en affirmant dans son « ultime avis pour sauver la Syrie », publié dans le Financial Times au lendemain de sa démission : « Le futur de la Syrie ne dépend pas du sort d’un seul homme. » Eh bien, si, justement. Et c’est cela que la Russie, la France ou l’ONU gagneraient à marteler, entre autres aux Alaouites, qui doivent avoir toute leur place dans la Syrie de demain. La victoire de la révolution sera avant tout politique, quels que soient les moyens militaires qui l’auront favorisée.

La révolution a mis en exergue une capacité remarquable de la société syrienne à s’organiser et à s’autogérer. Quel sera l’avenir des coordinations locales et des conseils révolutionnaires dans l’après-Assad ? Ne peut-on y voir une nouvelle forme d’organisation de la société alors que la communauté internationale redoute un scénario irakien marqué par l’effondrement des institutions et le chaos ?

Vous pointez fort justement ce qui est le plus extraordinaire dans ce processus révolutionnaire, et ce qui malheureusement est le moins traité aujourd'hui, du fait de la difficulté de l'accès au terrain et de la focalisation sur le militaire au sens strict. Nous assistons à rien de moins qu’une recomposition par le bas d’un pays qui a toujours été construit, gouverné, voire pillé, par le haut. C’est une ré-vo-lu-tion, un renversement de perspective dont nous aurons du mal à appréhender toutes les conséquences avant longtemps. Elle a été rendue possible parce que la société syrienne, entre autres dans ces villes moyennes qui ont porté la vague révolutionnaire, a tenu bon sous les coups de l’Etat de barbarie. C’est la solidarité horizontale entre ces communautés locales qui neutralise la répression infligée par un pouvoir pensé comme inaccessible. C’est pourquoi la contestation ne transigera jamais sur son exigence d’un renversement du régime.

 

Dans les zones libérées comme à Kfar Nabel, la société s'organise. 
Dans les zones libérées comme à Kfar Nabel, la société s'organise.

 

Au regard de la trajectoire particulière du régime des Assad habitué à survivre dans la confrontation, Bachar El-Assad est-il encore convaincu de l’emporter ?


Bachar El-Assad est convaincu qu’aucune puissance extérieure, ni les Etats-Unis, ni la Turquie, ni a fortiori Israël, n’a les capacités ni la volonté d’intervenir en Syrie. En revanche, il lui faut agiter ce chiffon rouge pour conforter la cohésion de son « noyau dur » et consolider, si besoin était, le soutien de la Russie et de l’Iran. Les déclarations sur les armes chimiques visent, dans la logique Assad, à valoriser le régime comme le moindre mal aux yeux de l’extérieur, tout en suscitant des rodomontades militaires du côté d’Israël et des Etats-Unis, recyclées ensuite par la propagande gouvernementale en Syrie.

A mon avis, seule une crise majeure entre Israël et l’Iran pourrait aujourd’hui permettre au régime de se maintenir. C’est sans doute le pari de la dictature syrienne, une fois de plus en phase avec les « faucons » américains et israéliens : gagner du temps jusqu’à une frappe israélienne sur l’Iran et/ou l’élection d’un président républicain à la Maison Blanche.

 

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8 août 2012 3 08 /08 /août /2012 14:16

 

http://www.youtube.com/watch?v=veMib6xWo-c

 

 

Publiée le 26 juil. 2012 par OfficialOTVQTV

Episode 3 Saison 1
Débat houleux sur la Syrie avec:
Serge Michel, Directeur adjoint des rédactions au Monde
Bahar Kimyongür, auteur de Syriana, la conquête continue
Jean-Baptiste Beauchard, Doctorant et spécialiste du Proche-Orient

http://www.otvqtv.com

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1 août 2012 3 01 /08 /août /2012 13:51

 

 

Pierre Haski | Cofondateur Rue89

Relations publiques 31/07/2012 à 14h01

 


Capture d’écran de l’article « Asma al-Assad : a rose in the desert », daté du 25 février 2011, via Wayback.archive.org (Vogue/Wayback.archive.org)

 

En mars 2011, au moment où démarrait le soulèvement syrien contre Bachar el-Assad, le célèbre magazine américain Vogue publiait un portrait très complaisant de la femme du dictateur syrien, sous le titre sans nuance : « Une rose dans le désert »...

Avec la montée de la violence en Syrie, qui a déjà fait quelque 20 000 morts et mis des centaines de milliers de Syriens sur les routes, fuyant les combats et la répression, cet article est devenu une source d’embarras pour le magazine de mode, complice d’une magnifique orchestration des relations publiques d’une dictature.

L’article a été retiré du site en mai 2011. Mais aujourd’hui, l’auteur, Joan Juliet Buck, ancienne rédactrice en chef du Vogue français jusqu’en 2001 et longtemps l’une des grandes signatures du magazine, raconte pour la première fois comment, selon ses propres termes, elle s’est « fait avoir » par la séduisante Mme Assad, les services syriens, et la société de relations publiques américaine à leur service.

Joan Juliet Buck ne se confie pas à Vogue, mais publie un long plaidoyer pro domo sur le site The Daily Beast, dirigé par la journaliste Tina Brown.

Son « scoop », Joan Juliet Buck ne l’a pas obtenu à force de contacts et de travail : il lui a été offert sur un plateau. L’interview a été organisée par une boîte de relations publiques payée par la présidence syrienne, et par la rédaction de Vogue.

« Nous ne voulons pas de politique »

La journaliste raconte qu’elle a été sollicitée par une rédactrice en chef de Vogue le 1er décembre 2010. Sa première réaction :

« Je ne veux pas voir les Assad et eux-même ne voudront pas voir une juive »...

Elle poursuit :

« La rédactrice en chef m’expliqua que la Première dame était jeune, jolie, et qu’elle n’avait jamais donné d’interview. Vogue essayait de l’obtenir depuis deux ans. Désormais, il y avait une société de relations publiques qui l’avait sans doute convaincue d’accepter. »

La journaliste : « Envoyez une journaliste politique. »

La rédactrice en chef :

« Nous ne voulons pas de politique, pas de politique du tout. Elle ne veut parler que de culture, d’antiquités, de musées. Tu aimes la culture, tu aimes les musées. Elle veut te parler à toi. Tu dois partir dans une semaine. »

Joan Juliet Buck se laisse convaincre par ce projet « excitant », surmontant ses doutes et ses objections personnelles.

Mais elle ajoute dans ce long récit à The Daily Beast :

« Je ne savais pas que j’allais rencontrer un assassin.

Je n’avais aucun moyen de savoir que Assad, le doux ophtalmo un peu geek, tuerait plus de gens que son propre père, en torturerait des milliers d’autres, y compris des enfants.

Je n’avais aucun moyen de savoir, alors que j’admirais les événements de la place Tahrir, que je serais atteinte parce que j’avais écrit sur les Assad. Je n’avais aucun moyen de savoir que cet article me coûterait mon gagne-pain, et mettrait fin à mon association avec Vogue qui durait depuis que j’avais 23 ans. »

Une belle opération de com’

Joan Juliet Buck a été la victime consentante d’une belle opération de com’ destinée à redorer le blason d’un des régimes les plus répressifs du Moyen-Orient, et à accréditer l’idée que le fils de Hafez el-Assad et sa jeune épouse étaient « modernes » et donc nécessairement réformateurs.

Elle a entraîné dans sa chute l’un des grands photojournalistes américains, James Natchwey, qui doit regretter aujourd’hui la mise en scène à laquelle il a prêté son talent.

 


Capture d’écran de l’article « Asma al-Assad : a rose in the desert », daté du 25 février 2011, via Wayback.archive.org (Vogue/Wayback.archive.org)

 

Une campagne orchestrée par la société de relations publiques Brown Lloyd James, qui, sur son site, se garde bien aujourd’hui de citer Assad parmi ses clients passés, préférant nommer... le Qatar ou la Fondation Tony Blair pour la foi !

Brown Lloyd James a par la suite affirmé que sa collaboration avec la Syrie avait pris fin en décembre 2010, mais selon des documents révélés ce mois-ci par WikiLeaks (via Owni.fr), la firme a rédigé en mai 2011 un mémorandum pour le gouvernement syrien, avec des conseils pour améliorer son image de marque...

Une « stagiaire » chargée d’espionner

Pour son voyage, dont le visa a été arrangé par la société de RP, la journaliste américaine a été accompagnée par un des dirigeants de Brown Lloyd James, Mike Holtzman, un ancien de l’administration Clinton, et par une « stagiaire », qui se trouvait être la fille de l’ambassadeur syrien à l’ONU...

Grâce à des fuites d’e-mails organisées par WikiLeaks, la journaliste américaine a découvert la semaine dernière seulement que la « stagiaire », qui répondait au doux prénom de Sheherazade, avait été chargée de l’espionner, et rapportait ses moindres faits et gestes à la société de relations publiques.

La journaliste raconte ainsi qu’elle a rencontré l’ambassadeur de France en Syrie dans un hall d’hôtel et lui a demandé ce qui se passait dans le pays. Avant de répondre, raconte-t-elle, il a enlevé la batterie de leurs téléphones portables.

« Cela a dû déclencher une alerte, car nous vîmes subitement arriver Sheherazade devant nous. »

Les « valeurs » de Vogue

Plus tard, la jeune « stagiaire » lui dit :

« Nous ne voulons pas que vous parliez à l’ambassadeur de France »...

Elle constatera plus tard que son ordinateur, resté dans sa chambre, avait été « visité ».

A son retour à New York, alors que la Tunisie vivait déjà ses heures révolutionnaires, bientôt suivie de l’Egypte, de la Libye, et enfin de la Syrie, la direction de Vogue lui demanda de ne « pas parler à la presse ». Ce qu’elle fit jusqu’à ce que son contrat avec Vogue expire à la fin de l’année, sans être renouvelé.

En mai 2011, l’article sur Asma el-Assad fut retiré du site de Vogue, après une série de critiques sévères. Vogue publia un communiqué particulièrement faux-cul déplorant la répression en Syrie et constatant que les « valeurs » du magazine ne pouvaient plus être en accord avec ce qui se passait en Syrie.

Mais s’il n’y avait pas eu tous ces crimes, Vogue et sa journaliste auraient paisiblement pu continuer à prospérer en sachant pertinemment qu’ils avaient contribué à une opération de manipulation de l’opinion mondiale centrée sur le charme et la douceur de la Première dame syrienne. Pas de chance.

 

MERCI RIVERAINS !

 


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30 juillet 2012 1 30 /07 /juillet /2012 15:12

 

 

 

Trois jours arès le début de l'offensive des hommes de Bachar al-Assad lancée pour reprendre le contrôle d'Alep, capitale économique de la Syrie, les combats continuent de faire rage. Les rebelles ont pris le contrôle d'un poste de contrôle stratégique à Anadan, qui leur permet désormais d’acheminer renforts et munitions dans la ville et de relier la frontière turque, située à 45 km, selon un journaliste de l’AFP. « Le poste de contrôle d’Anadan, à cinq km au nord-ouest d’Alep, a été pris ce matin à 5 h après dix heures de combats », a indiqué sur place le général Ferzat Abdel Nasser, un officier rebelle qui a déserté il y a un mois. Si ces derniers arrivent à s'emparer d'Alep, une « zone sécurisée » serait instaurée dans le nord du pays. Suite à cette avancée des rebelles, la Turquie a placé près de la frontière une vingtaine de véhicules de transport de soldats, des batteries de missiles et des véhicules blindés.

 

De leur côté, les forces armées du régime ont affirmé avoir repris le contrôle d’une partie de Salaheddine, quartier situé dans le sud-ouest d'Alep et principal bastion des insurgés, ce que les rebelles ont démenti. Abdel Jabbar al-Oqaidi, chef du conseil militaire rebelle d’Alep, a assuré à l'AFP que les soldats n’avaient « pas avancé d’un seul mètre ». Depuis dimanche, l'agence officielle Sana avait annoncé que les soldats étaient en train de « nettoyer » la zone de Salaheddine des « terroristes ». Cela fait maintenant dix jours que la guerre a envahi Alep, située à 355km au nord de Damas, offensive qui dure malgré le renfort de chars et d'hélicoptères qui depuis plusieurs jours pilonnent les quartiers rebelles. Près de 200.000 habitants ont dû fuir les combats pour se réfugier en Turquie ou dans des villes épargnées par les affrontements.

 

Le chef des observateurs de l'ONU en Syrie, le lieutenant Babacar Gaye, a également fait part à la presse de bombardements constatés à Homs et Rastane, avec « un pilonnage intense d'artillerie et (d'obus) de mortier […] un pilonnage continu des quartiers ». 


La France a décidé de demander une réunion d'urgence du conseil de sécurité de l'ONU. Le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a déclaré sur RTL : Puisque la France prend la présidence du Conseil de sécurité des Nations-unies au 1er août, nous allons donc demander avant la fin de cette semaine la réunion du Conseil de sécurité, probablement au niveau ministériel à la fois pour essayer d'arrêter les massacres et pour préparer la transition politique. Il a également évoqué les livraisons d'armes aux rebelles par les Occidentaux: « Il y a des armes qui leur sont livrées, d'après les informations qu'on a, à la fois par le Qatar, l'Arabie Saoudite, probablement d'autres (...). Mais pas nous ». Le secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta a de son côté estimé qu'au bout du compte Bachar al-Assad « creuse sa propre tombe » dans cette bataille « tragique ».

 

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), les violences auraient fait 13 morts lundi et 125 dimanche. À Deraa, berceau du soulèvement contre le régime, 17 personne ont été tuées pour la seule journée d'hier. L'OSDH a également indiqué que le régime de Bachar al-Assad menait lundi des campagnes de perquisition et d'arrestations massives dans plusieurs quartiers de Damas et des environs dont elles ont récemment repris le contrôle. En 16 mois de conflit, la guerre a fait, selon l'OSDH, plus de 20.000 morts, dont 14.000 civils.

 

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