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7 février 2016 7 07 /02 /février /2016 20:11

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

zapnet
Ahurissant : un drone montre ce qu’il reste de Homs, en Syrie
 

 

 

 

« La prochaine de fois que quelqu’un se demande pourquoi les réfugiés risquent tout pour venir en Europe, montrez lui ceci » écrit The Independent sur sa page Facebook. Le journal britannique publie sur son site une vidéo ahurissante (à voir ici).

Il s’agit d’un survol par un drone de la ville de Homs, en Syrie, dont nous publions la version originale, postée sur YouTube par la chaîne russe RT.

Tout n’est plus que ruines et désolation. Bastion du soulèvement contre le régime de Bachar al Assad, Homs, qui était la troisième ville du pays avec près d’un million d’habitants, a été complètement dévastée par les bombardements. Le siège de la ville a officiellement pris fin le 1er décembre 2015, à la signature d’un accord de capitulation signé par les rebelles de Waer, le dernier quartier de la ville aux mains de l’opposition, sous la supervision des Nations unies.

La vidéo a été vue 7,4 millions de fois sur Facebook. Les images sont signées de la société Russia Works, qui avait déjà publié en octobre dernier une vidéo ambiance « Call of Duty » d’un drone survolant un quartier de Jobar, à l’est de Damas. Il s’agit là encore évidemment d’une vidéo de propagande en faveur de l’intervention russe en Syrie. Mais elle rappelle l’ampleur des dévastations de cette guerre qui dure depuis cinq ans.

Dans un contraste saisissant, circule depuis quelques heures ce cliché de mariés posant dans Homs dévastée.

 

L’amour plus fort que tout, un retour à la normale ? Une autre forme de propagande.

 

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

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1 février 2016 1 01 /02 /février /2016 17:26

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Paroles d’exilés

Syrie : « Les bombardements ne changent rien, seuls les civils paient »

par

 

 

 

Quelques jours après les attentats du 13-Novembre, l’armée française intensifiait ses frappes militaires en Irak et en Syrie, contre des sites contrôlés par Daech. Depuis le début du conflit, 4,5 millions de Syriens ont fui leur pays, et la France n’accueille des réfugiés qu’en nombre très limité. Que pensent les premiers concernés de l’intervention militaire française ? Basta ! a recueilli le point de vue de deux Syriennes installées en France, depuis plusieurs années. Elles donnent leurs avis sur la réponse militaire française aux attaques, l’accueil des réfugiés, et la situation politique en Syrie.

Des pourparlers de paix sur la Syrie doivent commencer ce 29 janvier 2016 à Genève, alors que les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, avec l’appui de l’Allemagne, et la Russie participent aujourd’hui aux opérations militaires en Syrie [1]. La France avait commencé à frapper des cibles de l’État islamique en Irak en 2014, puis en Syrie à partir de septembre 2015. Après les attentats du 13-Novembre, le gouvernement français a décidé d’y intensifier son intervention militaire. Et d’en modifier la base juridique, en passant d’un régime de défense de l’État irakien – face aux attaques de Daech – à un régime plus ambigu de « légitime défense individuelle », selon l’expression du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian [2]. Au cours des mois de décembre et de janvier, la France aurait opéré 140 bombardements, selon le ministère de la Défense, soit deux par jour en moyenne [3].

La Russie, qui a entamé une intervention militaire juste après l’été, ne s’attaque pas seulement à des cibles de l’État islamique. Moscou, qui soutient le régime de Bachar el-Assad, cible aussi largement l’opposition et les rebelles non djihadistes. Ces frappes auraient déjà fait des centaines de victimes civiles, selon Amnesty International. L’ONG accuse la Russie de bombarder des zones d’habitations, et même des structures médicales.

Pendant ce temps, les Syriens continuent de fuir massivement leur pays. 4,5 millions se sont exilés à l’étranger, dont 2,5 millions en Turquie, 1 million au Liban, plus de 600 000 en Jordanie, 250 000 en Irak, plus de 100 000 en Égypte [4]. Plus de la moitié des 850 000 réfugiés qui ont rejoint l’Europe par les côtes grecques en 2015 sont syriens [5]. La plupart d’entre eux sont venus trouver refuge en Allemagne, où un million de personnes ont déposé une demande d’asile l’année dernière, dont 400 000 Syriens et plus de 100 000 Irakiens. La France n’accueille des réfugiés syriens qu’en nombre très limité : 3 553 demandes d’asile ont été déposées par des Syriens en 2015, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur. Ces chiffres ne prennent pas en compte les personnes qui ont pu arriver en France avec un visa.

Quant aux Syriens qui vivent en France, que pensent-ils de l’intervention militaire ? Comment observent-ils la crise migratoire ? Comment analysent-ils la situation dans leur pays ? Basta ! est allé posé ces questions à deux Syriennes installées en France [6].

« On a l’argent pour faire la guerre, mais pas pour accueillir les réfugiés politiques ? »

Jasmine [7] a la trentaine. Elle est arrivée en France en 2011, après avoir terminé ses études dans un autre pays européen :

« Quand je suis partie de Syrie, ce n’était pas encore un conflit. Il y avait l’oppression, mais ce n’était pas encore la guerre. C’était la révolution. C’était beau. Mais j’ai essayé de partir rapidement, parce que, pour moi, c’était un peu évident que ça allait se transformer en quelque chose de moche. J’ai vécu presque toute ma vie avec ce régime-là, je le connais bien. Ils sont vraiment très durs.

Je pense que les interventions militaires, dans l’histoire, ont parfois été nécessaires, pendant la guerre des Balkans, en Bosnie, par exemple. En Syrie aussi, il y avait un moment où c’était nécessaire. En 2013, après les attaques chimiques, je ne voyais pas d’autres solutions pour régler ce conflit que l’intervention militaire. À l’époque, il n’y avait pas encore Daech. Mais l’Union européenne n’a rien dit. Obama a d’abord dit que les armes chimiques constituaient une ligne rouge. Puis il a changé d’avis, car la Russie a déclaré que le régime syrien allait rendre ses armes chimiques. Puis tout le monde a oublié. Mais le régime a continué la violence avec toutes sortes d’armes non chimiques, conventionnelles. C’était scandaleux. Il fallait intervenir à ce moment-là. Maintenant, on intervient juste contre Daech.

Cette intervention militaire française me déçoit. Et c’est triste que les Français ne réagissent pas. J’ai l’impression qu’ils ne savent rien. Que si l’État dit qu’il faut aller faire la guerre, on va y aller. Mais c’est la guerre, il y a aussi des innocents derrière. Et comment fait-on la guerre contre Daech ? Où est Daech ? Parmi les civils, comme à Rakka [Syrie, Ndlr], où vivent un demi-million d’habitants [8]. Pour l’instant, on n’a pas vu de victimes civiles des frappes françaises. Mais de celles de la Russie, oui. Et les Russes bombardent des villes aux mains de l’opposition, de l’armée libre.

C’est une question très grave que de faire la guerre en Syrie. Je pense qu’il faut la poser aussi aux Français eux-mêmes. Personne ne leur a demandé. Cela représente aussi beaucoup d’argent. On a l’argent pour faire la guerre, mais pas pour accueillir les réfugiés politiques ? La France a joué un rôle très important dans les débuts de la révolution. Elle a accueilli des opposants, elle a rapidement rompu ses relations diplomatiques avec le régime. Mais là, j’ai l’impression que la France a été entraînée dans cette guerre par les attentats. Et je n’aurais pas imaginé que l’Allemagne décide, elle aussi, d’aller faire la guerre en Syrie.

Je connais beaucoup de Syriens qui sont partis en Allemagne. Je n’aurais jamais imaginé cette vague de migration avant. Bien sûr, je ne pensais pas que les Syriens allaient continuer à supporter ce régime. Je pensais que beaucoup allaient émigrer pour chercher un peu de dignité. Mais pas dans cette proportion. Là, on est en train de vider un pays entier. Les Syriens qui sont en Allemagne, je ne pense pas qu’ils vont rentrer. Et après leur avoir offert une éducation et la protection, l’Allemagne ne va pas les laisser partir si facilement. Mais la crise migratoire, ce n’est pas seulement la crise syrienne, c’est la crise de ce tiers-monde qui est vraiment désespéré et qui veut faire partie du monde. Je me demande pourquoi la France rejette cette migration ? » 

« Nous voulions négocier avec Assad, c’était naïf »

Samar Diab [9] est activiste au sein d’une association humanitaire franco-syrienne. Elle vit en France depuis plus de vingt ans :

« L’Ouest a encouragé la révolution, mais a fait très peu pour l’aider. Les gens sur le terrain, ils s’en fichaient de ce que Hollande disait ici. Là-bas, ce qu’ils veulent, c’est ne pas mourir, ils veulent quelqu’un qui les aide. Aucun Syrien n’a demandé une intervention militaire au début. Moi, au début du conflit, j’étais aussi contre l’envoi d’armes à l’opposition démocratique. Nous voulions négocier avec Assad pour qu’il parte. C’était naïf.

En 2013, il y a eu les armes chimiques. C’est la deuxième fois que l’Ouest n’a rien fait. Les États-Unis ont dit que l’emploi d’armes chimiques par le régime était une ligne rouge. Mais quand Assad l’a dépassée, personne n’a rien fait.

Après les attentats du 13-Novembre, Hollande devait faire quelque chose, c’est sûr. Mais il a choisi quelque chose qui n’a pas de sens. L’existence de Daech est liée à l’existence d’Assad. L’Ouest n’a pas aidé l’opposition modérée à se rassembler et à avoir un relais sur le terrain. Maintenant, vu la situation, on ne peut plus dire qu’il n’y aura pas d’intervention militaire. Mais l’intervention aérienne n’apporte rien. Ou alors il faut apporter un soutien logistique militaire aux brigades de l’armée libre. Les bombardements ne changent rien. Seuls les civils paient. Surtout avec les bombardements russes. S’il n’y a pas de stratégie pour résoudre le conflit, ce n’est pas avec des bombardements qu’on le résoudra. Il faut le départ de Bachar el-Assad et une intervention sur le terrain. Ou bien aider ce qui reste de l’armée libre.

Sur la question kurde, moi, en tant que Syrienne, j’aimerais que nous trouvions un terrain d’entente avec les Kurdes syriens. Il faut qu’on leur donne l’assurance d’être des citoyens à part entière. Ce qui n’était pas le cas avant. Le problème, c’est que nous, les Syriens arabes, nous ne connaissions pas toutes les discriminations que les Kurdes subissaient.

Dans notre association, nous sommes de générations, de milieux sociaux, de communautés très différentes. Il y a des musulmans, des Druzes, des alaouites, des chrétiens… Mais l’engagement est dur, parce que la situation en Syrie descend toujours plus bas. Quand on voit les Français qui nous aident, ça nous fait tenir. Même si nous voyons que les gens ont peur des réfugiés. Moi, j’ai la nationalité française, j’ai fait venir ma mère, qui a plus de 75 ans. Ça a pris quatre mois de démarches pour qu’elle obtienne un visa de visiteur, de seulement six mois, sans droit à aucune aide. »

- En photo : dans la ville de Homs, tenu par les rebelles syriens, en juin 2014. Depuis, la cité a aussi subi des bombardements de l’aviation russe / CC Pan Chaoyue

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12 janvier 2016 2 12 /01 /janvier /2016 14:23

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

En Syrie : des photos de bouffe pour narguer les affamés
 

 

 

Dans le sud de la Syrie, la ville de Madaya meurt de faim. Les 30 000 à 42 000 habitants (leur nombre n’est pas établi, d’autant qu’elle a accueilli de nombreux réfugiés) avalent des feuilles d’olivier et de mûrier et improvisent des bouillons en mélangeant des épices à l’eau chaude.

 

Carte de Syrie

Carte de Syrie - AFP/Valentina Breschi et Thomas Saint-Cricq
 

Selon une habitante, certains se sont résignés à manger chiens et chats. Un autre dit qu’il n’y a plus guère de chiens et de chats dans les rues. Un résident de Madaya indique au Monde :

« Il n’y a rien que les habitants n’aient pas essayé. A Madaya, on vit comme des animaux. »

Depuis six mois, la ville montagnarde est prise en étau par l’armée de Bachar el-Assad et celle du Hezbollah libanais. Madaya est « punie » pour son soutien à l’opposition (même s’il n’y a, officiellement, plus de combattants opposés au régime).

 

Madaya sous la neige

Madaya sous la neige - page Facebook « Madaya »
 

L’état de siège a précipité la malnutrition et la famine parmi la population. Coupée du monde, elle l’est aussi du ravitaillement. Les convois humanitaires se font rares. Le régime syrien a autorisé un premier acheminement de vivres et de médicaments en octobre 2015. Un deuxième convoi est en cours.

Mais ce n’est pas suffisant. 23 personnes seraient mortes au seul mois de décembre. Acheter un kilo de riz à Madaya coûterait entre 100 et 230 euros.

Des images de corps squelettiques

Pour alerter sur la famine en cours, la page Facebook « Madaya » (qui parle de l’actualité de la ville depuis 2013) a diffusé début janvier des photos d’enfants, aux corps rongés par la malnutrition. Le cliché de cette gamine est repris par de nombreux médias.

 

 

 
 
 

مضايا madaya

Photographe · 11 580 J’aime

· 5 janvier, 10:52 ·

‫#‏مضايا‬
‫#‏انقذوا_المحاصرين‬
أطفال مضايا نتيجة الجوع ..

 
 

Les jours suivants, les signes de la famine en cours se multiplient sur Twitter (mais aussi des fakes). Un infirmier syrien envoie plusieurs preuves à une correspondante de ABC News :

 

Permalien de l'image intégrée

Permalien de l'image intégrée

Permalien de l'image intégrée

The aid still hasn't reached & the horror continues. New photos from hardworking medical team inside

 

 

« Toujours pas d’aide humanitaire à Madaya, l’horreur continue. »

 

Un homme, se présentant comme un aide-soignant dans un hôpital de la ville, capture ces images :

 

 

 

Des images de bouffe sordides

En parallèle de la diffusion de ces images, un autre hashtag est partagé sur Twitter et sur Facebook : « #متضامن_مع_حصار_مضايا » en arabe, à traduire en français par « Je soutiens le blocus contre Madaya ».

L’idée, sordide, consiste à poster une image de repas faste et copieux, accompagnée de ce hashtag. Plusieurs internautes arabophones se prêtent au jeu. Il semblerait qu’il s’agisse à chaque fois de partisans du régime de Bachar el-Assad ou du Hezbollah libanais.

Comme cet utilisateur Facebook, dont la photo de profil est à l’effigie de Bachar el-Assad et de son père, Hafez el-Assad :

« Poisson et entrées.
JeSoutiensLeBlocusContreMadaya »

 

تنابل آل سعود متضامنين مع حصار مضايا
و شو وقفت علينا؟
و قال حتطين الحق عالشيعة و جمهور حزب الله قال 😂😂😂😂😂😂
‫#‏متضامن_مع_حصار_مضايا‬

 
 
 
 

Repérés par le site Beirut Syndrome, certains internautes ont diffusé des photos de squelettes (effacés depuis, mais accessibles en cache).

Tweet de @zeinabatallah22

Tweet de @zeinabatallah22

« Une femme de Madaya attendant son homme »

« J’ai trouvé l’homme en question. »

 

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

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11 janvier 2016 1 11 /01 /janvier /2016 17:23

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

Sur Facebook, les réfugiés syriens dénoncent les agressions de Cologne

 

 

 

Les violences de la nuit du réveillon ont fait réagir les Syriens fraîchement arrivés en Allemagne, fustigeant à coups de hashtag ces comportements qui jettent le discrédit sur leur communauté. Beaucoup redoutent l’amalgame et le rejet, certains imaginent un complot de l’extrême droite ou d’Assad.

 

(De Berlin) Dimanche 10 janvier, la police de Cologne a indiqué en fin d’après-midi qu’elle avait enregistré plus de 516 plaintes liées aux incidents qui ont eu lieu lors de la nuit du réveillon. Environ 40% des plaintes visent des infractions d’ordre sexuel.

En réaction à ces violences de masse dans diverses villes allemandes, la chancelière Angela Merkel a plaidé, samedi 9 janvier, pour un durcissement des règles d’expulsion des demandeurs d’asile et du droit pénal en matière sexuelle.

La police a ajouté ce week-end que les suspects étaient « majoritairement des personnes originaires d’Afrique du Nord », des « demandeurs d’asile ou des personnes, qui se trouvent en Allemagne en situation illégale ». Un groupe de personnes assez vague, mais dont la définition laisse croire à certains qu’il s’agirait de migrants majoritairement syriens arrivés cette année, malgré l’absence de preuves concrètes.

Soupçon médiatique infondé

Comme après les attentats de novembre, j’ai contacté Monis Bukhari, le modérateur du groupe Facebook La Maison syrienne en Allemagne, pour connaître le ressenti des réfugiés syriens face aux violences qui ont eu lieu.

Au téléphone, Monis Bukhari me raconte d’abord que les réfugiés syriens se sont rendu compte des incidents du Nouvel An en même temps que tout le monde lorsqu’ils ont lu ou vu les informations dans les médias arabes ou grâce à la version arabe de la Deutsche Welle :

« Les Syriens ont eu très peur et ils sont encore choqués car la majorité des médias ont mentionné les migrants et les Syriens dans les premières informations. Les Syriens eux-mêmes ont commencé à croire que des Syriens étaient impliqués alors que la police n’avait rien dit dans ce sens. Jusqu’à aujourd’hui, il n’y a toujours pas de preuve. »

Jeudi 7 janvier, Die Welt titrait « la majorité étaient des demandeurs d’asile fraîchement arrivés » et rapportait les propos des policiers qui disaient avoir contrôlé en majorité des Syriens.

Ni une, ni deux, certains twittos français ont fait le lien entre « contrôle d’identité » et culpabilité de viols à Cologne, y compris des journalistes (bon, rien de très étonnant de la part de Valeurs actuelles).

Un complot de Pegida ou d’Assad ?

Comme dans la foulée des attentats du 13 Novembre, avec l’affaire du passeport syrien indestructible, ces premières informations ont semé la confusion et participé à l’élaboration de théories complotistes. Monis Bukhari ajoute  :

« Cette nuit-là, à cause du passeport syrien qui avait été retrouvé, beaucoup ont pensé qu’il s’agissait d’un complot pour faire du mal aux Syriens. Aujourd’hui, c’est pareil. Les Syriens se demandent si [le mouvement allemand d’extrême droite, ndlr] Pegida ou le régime de Bachar el-Assad ne sont pas derrière tout ça. »

Les soupçons sur le régime syrien sont dus au fait, selon lui, que « l’agence russe RT a été la première à sortir cette information en disant que 1 000 migrants étaient à l’origine de ces crimes ». Effectivement, la chaîne russe n’a pas hésité à faire le raccourci entre les 1 000 personnes alcoolisées qui jetaient dangereusement des pétards devant la gare de Cologne et les suspects de type arabe ou nord-africain qui ont commis des agressions, tels qu’ils sont cités dans les communiqués de la police.

Les Syriens accusent les Maghrébins

Parmi les nombreux commentaires postés sur le groupe Facebook, beaucoup nient que des Syriens aient pu participer à ces violences. Le modérateur rapporte les témoignages de compatriotes présents ce soir-là devant la cathédrale de Cologne et qui accusent les Arabes originaires du Maghreb :

« Sur le groupe Facebook, des Syriens qui étaient à Cologne ce soir-là racontent qu’ils ont vu des gens du Nord-Ouest de l’Afrique boire de l’alcool, commettre des vols et entourer les femmes pour les agresser. Le problème c’est que nous les Syriens, on ne sait pas faire la différence entre un Marocain ou un Tunisien. Mais certains ont reconnu les gangs qui ont fait ça. »

 

Capture d'écran du groupe La Maison syrienne en Allemagne

Capture d’écran du groupe La Maison syrienne en Allemagne - Facebook

 

Dimanche 10 janvier, la police de Cologne a indiqué qu’elle avait arrêté un homme de 19 ans de nationalité marocaine, qui serait coupable du vol d’un téléphone portable appartenant à une femme de 23 ans. La veille, la police avait également arrêté un suspect marocain en possession de lettres sur lesquelles étaient maladroitement traduites des « phrases de drague » telles que « gros seins », « je veux fucker » et d’autres mots crus.

Comment dire son soutien ?

Les incidents du Nouvel An, tout comme les attentats de novembre, participent à la stigmatisation des réfugiés en Allemagne, selon Monis. Ces événements ont d’ailleurs déjà des conséquences sur la vie de certains Syriens et sur le regard que leur portent les Allemands. Il me rapporte l’histoire d’une Syrienne, qui avait l’habitude de prendre le café tous les jours avec ses voisins et qui ont cessé de la voir depuis la nouvelle année.

Sur le groupe des Syriens en Allemagne, plusieurs manifestations de soutien ont été organisées, même si l’adhésion n’est pas totale, comme l’explique Monis Bukhari :

« Certains Syriens ont décidé d’organiser des manifestations de soutien pour s’excuser auprès des Allemands, même s’ils ne sont pas convaincus que des Syriens aient pris part au chaos dans les villes allemandes. D’autres, comme moi, pensent qu’il ne faut pas s’excuser pour quelque chose que nous n’avons pas fait, mais nous devons soutenir toutes les manifestations qui dénoncent ces agressions. »

Cette mobilisation a aussi lieu sur les réseaux sociaux, où des hommes et des femmes postent des photos d’eux-mêmes tenant une pancarte dénonçant le sexisme en arabe et en allemand, via le hashtag en allemand #SyrerGegenSexismus (#LesSyriensContreLeSexisme).

 

Capture d'écran d'un post #SyrerGegenSexismus

Capture d’écran d’un post #SyrerGegenSexismus - Facebook
 

De manière plus surprenante, Monis Bukhari a décidé de détourner le hashtag #Rapefugee (#RéfugiéVioleur), utilisé par des militants d’extrême droite sur les réseaux sociaux pour désigner les « réfugiés violeurs » du réveillon :

« Je suis un Syrien réfugié en Allemagne et j’ai honte des viols. Je demande aux autorités de condamner ces violeurs à la plus grande peine #Rapefugee. »

 

I'm Syrian refugee in Germany and I'm ashamed of rape, I ask the authorities to treat those rapists for the maximum punishment

 

Il nous explique sa démarche :

« Le hashtag #Rapefugee a été lancé par l’extrême droite. Comme ça ne servait à rien que je réponde à ces personnes, qui m’auraient forcément attaqué sur Internet, j’ai décidé d’utiliser leur hashtag en publiant mon message et j’ai encouragé les Syriens à faire pareil en postant des messages en allemand et en anglais. »

Des commentaires haineux

Après la médiatisation des incidents de Cologne, de nombreuses personnes n’ont pas hésité à demander des comptes sur Facebook aux organismes qui viennent en aide aux réfugiés. Le plus souvent ces remarques sont publiées dans les commentaires.

Jointe par messagerie Facebook, la plateforme Flüchtlinge Wilkommen (Bienvenue aux réfugiés), qui met en relation des réfugiés avec des personnes prêtes à les héberger, raconte :

« Comme vous pouvez le voir, les gens parlent des événements constamment dans les commentaires, quel que soit le sujet du post. Nous supprimons les commentaires inappropriés, c’est-à-dire les contenus insultants, menaçants ou qui font l’apologie de la violence. Tout le reste est conservé mais nous ne leur répondons pas. »

Même constat chez l’ONG Flüchtlinge helfen (Aide aux réfugiés), qui reçoit également de nombreux commentaires haineux, qu’elle supprime à chaque fois. Une tâche qui prend du temps et dont elle se passerait bien :

« Nous sommes avant tout une page qui s’occupe des réfugiés et qui se concentre sur cette mission. Nous ne sommes pas une page de débat. Nous avons clairement pris position : ces incidents sont inacceptables et devront être poursuivis devant la justice. Mais il y a trop d’émotion en ce moment et nous ne voulons pas y prendre part. »

Si ces associations ont décidé de modérer en silence, la page Facebook officielle de l’Office fédéral pour la migration et les réfugiés a décidé de répondre aux commentaires à l’aide de ce message standardisé et prudent :

« Salut [...], les évènement de Cologne sont graves. L’enquête de police sur les incidents est toujours en cours – on ne sait toujours pas si des réfugiés se trouvent parmi les délinquants. La police et la ville de Cologne vont certainement prendre les mesures nécessaires, pour protéger la population. Lors de la procédure de demande d’asile, la reconnaissance en tant que réfugié est exclue si le demandeur d’asile est considéré pour des raisons graves comme un danger pour la sécurité de la République fédérale d’Allemagne ou pour la société, parce qu’il a été condamné à une peine d’emprisonnement d’au moins trois ans pour une infraction criminelle ou pour une infraction particulièrement grave. »

La vidéo pédago de youtubeuses

Ce week-end de nombreuses associations ont également décidé de partager la dernière vidéo YouTube du duo germano-syrien Deutschland für Anfänger (L’Allemagne pour les débutants). Isabella Müller-Reinhardt et Abir Alhaffar y rappellent gravement, en alternant en allemand et en arabe, que des femmes ont été agressées dans de nombreuses villes d’Allemagne la nuit du réveillon.

 
L’Allemagne pour les débutants : les agressions sexuelles de la Saint-Sylvestre à Cologne

Elles invitent les témoins de ces scènes à aider les policiers avant d’insister sur le droit des femmes en Allemagne :

« Une valeur importante en Allemagne est qu’ici les femmes ont les mêmes droits que les hommes. Les femmes mais aussi les petites filles doivent être traitées avec respect, quelle que soit leur nationalité ou leur religion. »

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

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7 janvier 2016 4 07 /01 /janvier /2016 17:08

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Cultures de combat

Syriens, Afghans, Congolais... Portraits d’artistes en résistance qui bataillent pour la liberté d’expression

par

 

 

 

Ils sont artistes, mais leur pays est en guerre, sous le joug d’une dictature ou en proie à une corruption massive. Ils continuent pourtant à s’exprimer, parfois en exil. Comment résistent-ils ? Comment font-ils vivre la liberté d’expression et de création, malgré les menaces physiques, les pressions politiques, l’absence de moyens ou même l’interdiction de la musique. Réponses avec une chanteuse syrienne, des comédiens afghans, un marionnettiste burkinabé et un metteur en scène congolais. Tous bataillent pour faire se rencontrer artistes et public, tous ont fait de leur création une résistance.

Dans certains pays, s’exprimer sur scène est un défi. Les lieux dont ont besoin les musiciens et les comédiens pour rencontrer le public y sont fragilisés, voire inexistants, pour des raisons économiques ou de sécurité. En Syrie, le conflit armé et la présence de Daech – qui interdit toute pratique musicale – rendent pratiquement impossible la vie culturelle publique. La jeune chanteuse Waed Bouhassoun en témoigne. Elle réside en France et se rend régulièrement dans sa région, au sud de Damas. Les soirées autour de la musique et de la poésie, encore nombreuses, partout sur le territoire, avant 2012, y perdurent avec peine. La destruction de la vieille ville d’Alep empêche la tenue de concerts et de cérémonies musicales des confréries soufies. Les musiciens qui sont restés ne peuvent plus travailler.

 

Sous la menace d’attentats

Pourtant, la population syrienne continue à célébrer les rites de mariages et de funérailles. « Et quelques personnes courageuses arrivent à organiser des rencontres au milieu de l’après-midi, raconte Waed Bouhassoun, mais il y a beaucoup d’angoisse et d’inquiétude car circuler est devenu très dangereux. » Cette étoile montante de la musique arabe, venue en France avant le conflit pour étudier, poursuit désormais ses recherches en ethnomusicologie (à l’université Paris X-Nanterre) ainsi que ses activités de chanteuse et de joueuse de oud (le luth arabe). Waed Bouhassoun se produit dans des festivals européens et de pays arabes, notamment aux côtés du grand musicien Jordi Savall.

En République islamique d’Afghanistan, si la guerre se déroule principalement dans les montagnes, le terreau n’est pas non plus propice à la création, en particulier pour les arts du spectacle. Le théâtre afghan a certes connu un âge d’or dans les années 1970, mais il a été laminé par le règne des talibans (1993-2001), lesquels condamnent eux aussi toute forme d’art. Pour l’aider à renaître, de jeunes hommes et femmes ont fondé le Théâtre Aftaab en 2005. Ils ont réussi à travailler cinq années durant à Kaboul, avec le soutien du centre culturel français [1] et le parrainage du fameux Théâtre du Soleil, compagnie d’Ariane Mnouchkine. Ils affrontent de multiples pressions et intimidations, allant jusqu’à l’agression physique, de la part d’inconnus mais aussi de leur entourage. Nombre d’Afghans considèrent encore l’art dramatique comme un péché.

« S’exporter » pour vivre de son métier

Les treize membres de la compagnie, qui comprend deux femmes, venus se former en France, ont décidé de ne pas repartir, au moment de la vague d’attentats qui frappe Kaboul en 2010. « Nous avons choisi de construire une vie stable, ici, tout en retournant travailler là-bas, » explique Omid Rawendah, rencontré à la Cartoucherie de Vincennes dans les locaux du « Soleil ». « Nous nous sommes rebaptisés “Le Théâtre Aftaab en voyage”, car notre vocation reste de faire vivre une “maison de théâtre” à Kaboul et de transmettre ce que nous avons appris. » Le risque de subir une attaque terroriste ciblée les en a dissuadés. Un attentat-suicide a eu lieu dans la salle de spectacle de l’institut français, pendant une représentation, en décembre 2014. Hormis le danger, l’absence de financements reste un sérieux obstacle à leur retour.

Car l’argent est bien le nerf de l’art. Dans un pays comme le Congo, vivre de son métier est également une utopie pour un acteur : il n’y a tout simplement pas d’argent. À moins de tenter de passer par le réseau des instituts français fréquentés par l’élite, marche-pied pour « s’exporter » vers la France. Ce qui signifie aussi renoncer à jouer devant ses compatriotes. Une logique présente dans d’autres pays d’Afrique francophone. « L’art est inexistant, il y a une absence totale de soutien de la part de l’institution », affirme Dieudonné Niangouna, homme de théâtre congolais, qui nous a accordé une interview au Tarmac, lieu parisien qui programme régulièrement ses pièces. Lui ne s’est pas contenté de sa réussite personnelle en France, où il publie des textes [2], joue et met en scène des spectacles, y compris au prestigieux Festival d’Avignon (où il était artiste associé en 2013). « L’art, on ne le fait pas pour soi, mais pour les autres, déclare-t-il. Revenir au pays, c’est donner de l’énergie. Et pour croire à ce que l’on fait, on n’a pas besoin de moyens. L’important est d’abord d’y aller ! »

À cheval entre la France et le Congo, cet homme déterminé bataille ferme depuis douze ans pour que vive le festival « Mantsina sur scène ». Avec des bouts de ficelle, l’équipe du festival maintient à bout de bras un espace où le public peut venir entendre de « vraies paroles » dans un pays traumatisé par la guerre civile de 1997, et où le despote Denis Sassou-N’Guesso finance des artistes pour chanter ses louanges. Cette année, le festival met à l’honneur l’écrivain Sony Labou Tansi, grand nom du théâtre congolais à son apogée au début des années 1990.

« L’activité culturelle est la meilleure arme pour combattre le mouvement djihadiste »

Au Burkina Faso, où les premières élections démocratiques viennent de se tenir après vingt-sept années de corruption, de dictature et de néocolonialisme politique, le spectacle vivant, en dehors de la musique, est aussi un gagne-pain incertain. Les artistes n’ont d’autre choix que de travailler pour des ONG qui leur passent commande de spectacles « éducatifs », sur la prévention du sida, par exemple. Le collectif Acmur (Association arts, clowns, marionnettes et musique dans nos rues), dirigé par Boniface Kagambega, a conquis un nouveau lieu pour diffuser ses propres spectacles : la rue.

Leur festival annuel [3] propose aux habitants de Ouagadougou, de Bobo-Dioulasso et de la campagne, tous peu accoutumés à ce type d’événement, de découvrir des marionnettistes, des danseurs, des acrobates, des comédiens, venus de toute l’Afrique de l’Ouest. Lui-même marionnettiste, Boniface Kagambega a suspendu sa création personnelle pour mettre sur pied cette manifestation qui repose en grande partie sur la solidarité de festivals et de compagnies françaises. C’est la coopération « Sud-Nord », précise-t-il en inversant, avec un brin de malice, l’expression consacrée.

« Notre ambition est la démocratisation et la décentralisation de l’art et de la culture, souligne le militant artistique. Démocratiser, cela veut dire s’adresser à tous mais aussi permettre une parole libre qui peut aborder des sujets sociaux, comme la parité ou l’excision. » En ce sens, oser produire la comédie satirique Démocratie, I love you, que l’on a vue dans plusieurs festivals français l’été dernier, est un acte courageux. Trois comédiens burkinabés, habillés en gugusses bonimenteurs, décrivent par le menu comment fabriquer un « roi » selon les règles de la corruption, de l’électoralisme et dans le mépris des citoyens – au passage, l’hypocrisie des institutions mondiales n’échappe pas au vitriol. Un vrai succès. « C’est un spectacle qui fait rire avec ce qui nous fait mal », ont confié des spectateurs burkinabés. L’engagement de l’ACMUR se concrétise également par sa participation au mouvement issu de la société civile, Le Balai citoyen, qui a contribué à évincer du pouvoir Blaise Compaoré, à neutraliser le coup d’État de septembre dernier, et à la bonne tenue des élections de novembre.

Poésie et patrimoine oral

Sans nécessairement dénoncer un régime politique, les créations de ces artistes portent en eux une nécessité vitale, une force de résistance. La voix habitée par l’émotion de Waed Bouhassoun fait vibrer les mots des mystiques et des poètes arabes et délivre avec douceur un message de tolérance. Dans sa bouche, la poésie ancienne devient « de ce jour », comme lors du concert d’ouverture du Festival de l’Imaginaire, en octobre dernier à Paris. « Je crois en la religion de l’amour, où que se dirigent ses caravanes », chante-t-elle faisant siens les vers d’Ibn Arabi, poète soufi du XIIIe siècle. Elle exprime sa souffrance de voir la ville de Damas meurtrie, en reprenant le « Fou (amoureux) de Layla », poème du VIIe siècle : « Dites-lui que je l’aime toujours / Aussi loin soit-elle, jamais je ne pourrai l’oublier / C’est elle qui m’a appris comment l’aimer ».

Par-delà sa langue, la musicienne nous touche, et nous fait apercevoir la richesse culturelle des traditions de Syrie, en particulier le patrimoine oral druze, comme les chants de mariage, de plus en plus délaissés au profit de cassettes de musique de variété arabe. « Pour combattre le mouvement djihadiste, l’activité culturelle est, pour moi, la meilleure arme, confie Waed Bouhassoun. L’art en général leur fait peur, parce que cela va ouvrir les mentalités des gens. »

Artistes, guerriers contre la léthargie, le laisser-aller, l’esprit en sommeil

Qu’il joue à Limoges ou à Brazzaville, Dieudonné Niangouna est traversé par une urgence palpable : dans son théâtre, la parole et le corps sont sous haute tension. « En tant qu’artistes, nous devons être des guerriers, s’écrie-t-il. La guerre, nous la menons contre la léthargie, le laisser-aller, l’esprit en sommeil, le fait de croire que tout se vaut. Nous pouvons arracher cela de la tête des gens. Grâce notamment à l’effet miroir que le théâtre produit pour les spectateurs. Et à la clairvoyance. C’est comme desserrer les étaux du projecteur, qui laisse passer plus de lumière. L’urgence est de repousser la mort de la vie. »

Lorsque la troupe afghane joue L’Avare, en langue dari, surtitré en français, à Kaboul mais aussi à Châteauroux ou à Oullins, ou sa création collective Ce jour-là, elle exprime les préoccupations d’une jeunesse qui a grandi sur un champ de bataille et qui aspire à s’ouvrir au monde. Dans La Ronde de nuit, les Afghans donnent la réplique à des comédiens français pour parler de ce que signifie migrer et s’intégrer en France. « Nous voulons montrer que le théâtre, ce n’est pas simplement s’amuser, souligne la jeune Wazhma Tota-Kil, du Théâtre Aftaab. On peut expliquer la réalité, le monde politique, faire comprendre un message. Le théâtre peut changer les idées de quelqu’un. Je l’ai vu, c’est pour cela que je continue. C’est cela qui me donne du courage. »

« Le monde, on le déplace centimètre par centimètre »

Car ces artistes résistants ou combattants enracinent leur admirable détermination dans la foi en leur art. Dieudonné Niangouna croit aux mots. Il cite l’écrivain haïtien Dany Laferrière : « Les mots sont “les plus beaux jouets du monde”. Ce sont des matériaux de réflexion. Ils sont plus savants, plus dangereux, plus subtils que les armes. » À la question de savoir si l’art peut réellement changer les choses, Dieudonné Niangouna répond : « Personne n’a de baguette magique. Le monde, on le déplace centimètre par centimètre. »

Ces deux festivals africains, qui font la part belle à la formation professionnelle « pour remédier au vide », ont déjà transformé le présent des artistes : ce sont des chaudrons où bouillonnent ensemble les énergies créatrices et où des rencontres peuvent se faire pour aider matériellement certains spectacles à voir le jour.

La dernière édition de Rendez-vous chez nous, en février 2015, fut une véritable réussite : le festival a touché 130 000 spectateurs ! L’édition 2016 se déroulera pour la première fois sous un gouvernement démocratiquement élu, celui de Roch Marc Christian Kaboré, élu le 29 novembre dernier. « Il nous faut aider les gens à comprendre qu’ils peuvent dire “nous ne sommes pas d’accord”, explique Boniface Kagambega. Et qu’ils résistent à ceux qui tenteront de les diviser sur des questions ethniques ou religieuses. Nous sommes plusieurs à redouter cela. » Les spectateurs pourront y découvrir un spectacle de cabaret qui interrogera : « que reste-t-il de l’intégrité ? »

Dieudonné Niangouna raconte une petite histoire édifiante. Alors que la guerre civile, durant il a failli laisser sa peau, vient de s’achever, il se rend au marché. Il est interpellé brutalement par une « mama » virulente qui lui demande urgemment de retourner faire du théâtre car elle veut le revoir sur scène, là maintenant, parce que la guerre vient de finir. « Elle a pu exprimer que, pour elle, le théâtre était devenu essentiel », résume-t-il. Preuve s’il en est que le public peut réclamer à cor et à cri cet art-là, substantiel, existentiel, plus encore que politique, et porteur d’une humanité vivante.

Naly Gérard

Photo : la comédie satirique burkinabée Démocratie I Love you.

 

Infos pratiques : des artistes à suivre

- Festival « Rendez-vous chez nous » : du 6 au 21 février 2016, à Ouagadougou, à Bobo Dioulasso, à Boromo, dans six villages de la commune rurale de Komsilga, et à l’orphelinat de Loumbila. Site : http://acmur-rdvcheznous.org.

- Association Acmur France :
Machin la Hernie, texte de Sony Labou-Tansi, mise en scène de Jean-Paul Delore, joué par Dieudonné Niangouna, du 13 au 16 avril 2016, au Tarmac, Paris. Site : http://www.letarmac.fr.

 

À écouter
- L’Âme du luth, de Waed Bouhassoun, CD, Buda/Universal, 2014.
- Orient-Occident II : Hommage à la Syrie, de Jordi Savall, ensemble Hespérion XXI, avec Waed Bouhassoun, CD, Alia Vox, 2013.

À voir
- Un Soleil à Kaboul, ou plutôt deux, film documentaire de Duccio Bellugi Vannuccini, Sergio Canto Sabido, Philippe Chevallier, 75 min, DVD, Bel-Air Média-Théâtre du Soleil, 2007.

À lire
- Acteur de l’écriture, de Dieudonné Niangouna, essai, éditions Solitaires intempestifs, 2013.

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8 décembre 2015 2 08 /12 /décembre /2015 23:04

 

Source : http://www.lemonde.fr

 

 

Des vétérans anglais jettent leurs médailles de guerre

Le Monde.fr |

 

 

 

 

En images

 

Pour protester contre les bombardements britanniques en Syrie récemment décidés, des anciens militaires britanniques se sont rendus, mardi 8 décembre au 10 Downing Street pour jeter leurs médailles. Membres de l’association Veterans for Peace (« Vétérans pour la paix », qui regroupe des membres ayant combattu pour l’Angleterre depuis la seconde guerre mondiale), ils se disent « dégoûtés » par l’attitude guerrière de leur pays et ne veulent plus dans ces conditions porter leurs récompenses.

 

Le Monde.fr

 

 

Source : http://www.lemonde.fr

 

 

 

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18 novembre 2015 3 18 /11 /novembre /2015 16:11

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Emancipation

En Syrie, une expérience de démocratie directe, égalitaire et multiconfessionnelle tient tête à l’Etat islamique

par

 

 

 

Les médias occidentaux relaient abondamment les décapitations, les appels au meurtre et les exactions perpétrés par Daech, le pseudo « Etat islamique ». Pourtant, face à cette barbarie, les populations kurdes, arabes ou yézidis de la région de Rojava, au nord de la Syrie, mettent en oeuvre un autre modèle de société, émancipateur, égalitaire, multiconfessionnel, et très démocratique. Une expérience qui pourrait même servir d’inspiration pour ramener la paix dans la région. En attendant, les Kurdes et leurs voisins combattent pour défendre cette utopie concrète, sans véritable soutien international. Entretien avec des chercheurs et activistes qui en reviennent.

Photo : © Michalis Karagiannis

 

Les raisons d’espérer sont rares en provenance de Syrie. Mais en janvier 2015, le monde découvre, ébahi, les images de femmes kurdes en treillis qui participent à la résistance puis à la libération de la ville syrienne de Kobané. Un mouvement démocratique et anti-patriarcal vient de défaire les forces ultra-réactionnaires de l’État islamique, victorieuses ailleurs. Deux modèles de société radicalement différents se font face. Car le Kurdistan syrien fait l’expérience depuis 2011 d’une révolution démocratique inédite.

Assez vite débarrassé des forces du régime de Bachar el-Assad, le mouvement de libération kurde y a développé une organisation politique basée sur la démocratie directe, l’organisation en communes et la libération des femmes. Malgré la guerre, les attaques de l’État islamique (EI), l’embargo turc, sur fond d’indifférence de la communauté internationale, la région poursuit la mise en pratique de ce confédéralisme démocratique, un modèle de société multiconfessionnelle et multi-ethnique, sans État, pour l’émancipation de tous. Entretien avec Ercan Ayboğa et Michael Knapp, co-auteurs de Revolution in Rojava, ouvrage d’enquête militante sur cette révolution en cours au milieu du chaos syrien.

 

Basta ! : Ce qui se passe depuis 2011 dans la région syrienne de Rojava (au nord de la Syrie, à la frontière avec la Turquie), représente-t-il le contre-modèle absolu de la violence de l’État islamique ?

Ercan Ayboğa [1] : L’État islamique représente la ligne la plus réactionnaire qui existe aujourd’hui et en Syrie et au Moyen Orient, plus réactionnaire encore qu’Al-Qaïda, et le pôle le plus opposé au mouvement de Rojava. Il y a d’un côté le modèle de société de Rojava, une démarche démocratique et émancipatrice, et de l’autre, l’EI, extrêmement réactionnaire, hiérarchique, misogyne, absolument anti-démocratique, violent, et qui exploite les populations.

Michael Knapp : Rojava ressemble évidemment à une antithèse de l’EI. Mais c’est beaucoup plus profond. L’EI est aussi l’expression du jeu des forces présentes au Moyen Orient. Rétrospectivement, vu de l’Occident, on peut avoir l’impression que le mouvement de Rojava est né en opposition à l’EI. Mais en fait, c’est plutôt l’EI qui a été renforcé par des puissances comme la Turquie, entre autres pour détruire ce projet de Rojava.

 

Comment le projet démocratique du mouvement kurde s’est-il mis en place en Syrie, malgré la guerre civile ? Un compromis a-t-il dû être passé avec le régime de Bachar el-Assad ?

Michael Knapp : Quand la guerre civile a commencé en Syrie, le mouvement kurde n’a pas voulu s’allier à l’opposition. Il soutenait bien évidemment l’opposition démocratique, celle qui misait sur une sortie de crise politique et pas sur une escalade de la violence. Mais il voyait aussi que les forces d’opposition étaient soutenues par la Turquie, l’Arabie saoudite, le Qatar et les pays occidentaux. C’est pour ça que le mouvement kurde a décidé de prendre une troisième voie.

Du point de vue militaire, les forces combattantes d’autodéfense kurdes sont allées encercler les casernes du régime et leur ont dit : soit vous partez, soit on vous combat. Souvent, les soldats du régime se sont retirés relativement pacifiquement, pensant que les forces kurdes n’allaient pas combattre aux côtés de l’Armée syrienne libre. Le régime a donc préféré poster ses soldats ailleurs. Même s’il y a eu des combats autour des puits de pétrole. C’est dans ce vacuum que le modèle de Rojava a pu prendre naissance.

Les membres de la coalition nationale syrienne et de l’armée syrienne libre reprochent parfois aux structures d’auto-organisation de la région de collaborer avec le régime. Mais il faut comprendre que le mouvement kurde suit un principe d’autodéfense légitime et de primat de la politique civile. Cela veut dire qu’aussi longtemps qu’on n’est pas attaqué, il faut tout résoudre politiquement. C’est aussi la politique suivie par la guérilla du Nord-Kurdistan (Kurdistan turc).

 

Comment s’organise maintenant la vie politique dans la région ?

Michael Knapp : C’est complexe et dynamique à la fois. L’organisation s’adapte aux besoins. Les assemblées des conseils sont le moteur de tout. Il y a plusieurs niveaux de conseils : de rue, de quartier, de la ville… Chaque niveau envoie ensuite des représentants dans les structures du niveau supérieur : des conseils de rue aux conseils de quartiers, des conseils de quartiers aux conseils des villes, puis vers les conseils des cantons et jusqu’au conseil populaire de Rojava. Les communautés s’organisent aussi en commissions à ces différentes niveaux, pour la sécurité, l’économie, la justice…

Les commissions forment comme des ministères au niveau de la région. Les conseils sont toujours doubles, avec un conseil mixte et un conseil des femmes. Le conseil des femmes a droit de veto. Et dans tous les conseils mixtes, il y a une règle de parité, un quota de 40 % au moins pour chaque genre, et le principe d’une double direction, élue, avec une femme et un homme. Si dans une ville, il y a une communauté yézidie ou des communautés arabes, par exemple, ils ont aussi droit à une co-présidence dans les conseils. On a donc souvent une présidence de conseil triple voire quadruple.

Parallèlement aux conseils, il existe un parlement, parce qu’il y a encore des gens qui sont membres de partis et qui doivent aussi pouvoir s’organiser et être représentés. Dans ce parlement, il y a les partis, mais une partie des sièges sont réservés à des organisations de la société civile, associations de défense des droits de l’homme, de la communauté yézidie… Malheureusement, il n’a pas encore été possible de tenir des élections au niveau de toute la région pour désigner par le vote les membres de ce Parlement, à cause de la guerre.

 

D’où vient ce modèle de l’auto-organisation et de confédération démocratique ?

Ercan Ayboğa : Des structures d’auto-organisation communalistes sont nées au Nord-Kurdistan, en Turquie, en 2007-2008. Ces expériences se sont ensuite transmises à Rojava à partir de 2011. Le projet de confédération lui-même vient du KCK (Union des communautés du Kurdistan), une branche du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) créée en 2005. L’idée était de démocratiser le mouvement de libération kurde, de s’éloigner d’une structure de parti pour aller vers un mouvement porté par la société toute entière. Le mouvement a profité des héritages historiques comme la Commune de Paris (1871), mais surtout du mouvement zapatiste au Mexique. Avant, le PKK avait une démarche marxiste-léniniste. Le parti a lancé des discussions sur le « confédéralisme » démocratique au début des années 2000.

 

L’écologie joue-t-elle un rôle dans ce mouvement ?

Michael Knapp : L’écologie en est un point central. Pour développer le projet du confédéralisme démocratique, Öcalan (le leader du PKK, emprisonné en Turquie depuis 1999) s’est saisi du principe de l’écologie sociale du militant américain Murray Bookchin. Avec l’idée que le capitalisme est un système qui conduit à la destruction de la planète, et qu’il faut donc construire une économie basée sur une production régionale, écologique et décentralisée.

 

Quelles sont les structures d’émancipation des femmes à Rojava, à côté des conseils de femmes et des brigades féminines des forces d’auto-défense ?

Ercan Ayboğa : Dans chaque ville, il y a une maison des femmes. C’est un centre politique, mais aussi un centre de conseil, avec des séminaires, des cours, du soutien. Il y a aussi de nombreuses coopératives de femmes, des boulangeries, des coopératives textiles, de produits laitiers…

Michael Knapp : Le mouvement de libération des femmes profite aussi aux autres communautés, par exemple aux communautés suryoyes (chrétiens) et arabes. Sur la zone près de la frontière irakienne, il y avait des groupes arabes très conservateurs mais qui sont entrés en conflit avec l’EI et ont demandé aux unités kurdes des les aider à s’en libérer. Du coup, beaucoup se sont joints au mouvement. J’ai vu des unités de formations de ces hommes. Il ne s’agissait pas seulement de savoir-faire militaire, mais aussi de discussions sur les droits des femmes et sur la démocratie directe.

Nous avons aussi rencontré des jeunes femmes des communautés arabes qui ont rallié les forces combattantes d’autodéfense [2]. Elles nous ont dit qu’il y a deux ans, elles ne sortaient pas de leur maison, et maintenant, elles protègent la frontière les armes à la main. Ce modèle de confédéralisme démocratique n’est pas identitaire. C’est pour ça qu’on peut espérer qu’à plus grande échelle, il puisse aussi représenter un modèle de résolution des conflits ailleurs au Moyen Orient.

 

Comment s’organise l’économie ?

Michael Knapp : C’est très difficile notamment à cause de l’embargo imposé par la Turquie. Dans le canton de Jazirah par exemple [La région de Rojava a été découpée en trois cantons : Kobané, Jazirah et Afrin, ndlr] il y a, comme ressources, du pétrole et des céréales. Mais il n’y a pas de raffinerie et presque pas de moulins. Nous avons vu des silos assez pleins pour nourrir toute la Syrie pendant dix ans. Mais les céréales ne peuvent pas être transformés sur place. Une économie collectivisée se développe pourtant, avec des coopératives, qui raffinent, comme elles peuvent, le pétrole, des coopératives agricoles…

Ercan Ayboğa : Les coopératives jouent un rôle toujours plus important à Rojava. Elles sont soutenues par les conseils. Mais l’économie privée est aussi possible, ce n’est pas interdit.

 

Le mouvement reçoit-il des soutiens de l’étranger, du Kurdistan turc, irakien, ou de la communauté internationale ?

Ercan Ayboğa : Il y a quelques médicaments et des outils qui arrivent du Nord-Kurdistan, en Turquie. Mais la Turquie ne laisse passer que peu de choses. Le soutien du Nord-Kurdistan reste néanmoins très important. Les administrations auto-organisées du Nord-Kurdistan soutiennent vraiment Rojava. La ville de Diyarbakir a par exemple envoyé à Kobané des machines de construction, des ingénieurs, un soutien technique. Mais pas officiellement. Sinon, de l’aide arrive d’ailleurs, d’ONG, mais c’est très peu. La communauté internationale dit qu’elle a besoin de l’autorisation du gouvernement syrien pour envoyer de l’aide vers Rojava. Mais les gens à Rojava attendent évidemment plus de soutien international parce qu’ils considèrent qu’ils combattent pour l’ensemble du monde démocratique.

Michael Knapp : Rojava n’a presque pas de moyens financiers, et ne reçoit pas d’aide humanitaire. La communauté internationale dit que le problème, c’est que ce n’est pas un État. Manifestement, aux yeux de la communauté internationale, le système d’auto-organisation de Rojava n’a pas à être soutenu.

 

Pourtant, les forces combattantes kurdes d’autodéfense ont à leur actifs plusieurs succès militaires contre le pseudo État islamique...

Michael Knapp : Dans ces forces d’autodéfense, les gens combattent pour survivre, pour des convictions, et pour un projet de société. Certains ont longtemps combattu au Nord-Kurdistan auparavant. Ils ont déjà beaucoup d’expérience militaire. Mais leur armement est vraiment modeste, en comparaison à celui de l’EI par exemple.

Recueilli par Rachel Knaebel

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3 juin 2014 2 03 /06 /juin /2014 17:05

 


Le coin des tyrans 03/06/2014 à 16h40
Réussir son simulacre d’élection en six leçons, par Bachar el-Assad
Pascal Riché | Cofondateur Rue89

 

 

Pour la première fois de l’histoire, une élection présentée comme « pluraliste » par le régime de Bachar el-Assad était organisée ce mardi en Syrie. Effectivement, le bulletin de vote comporte trois noms, ce qui n’est pas habituel. Bachar et son père Hafez el-Assad se contentaient jusque-là de plébiscites organisés tous les sept ans (en 2007, Bachar el-Assad a officiellement recueilli près de 98% de « oui », un point de mieux qu’en 2000).

Avec la guerre civile en cours, le président syrien a sophistiqué la formule du simulacre démocratique. Son nom figure donc sur les bulletins de vote aux côtés de deux concurrents, parfaits inconnus et parfaits faire-valoir  :

  • Maher Al-Hajjar, parlementaire d’Alep, membre du Parti communiste ;
  • Hassan Al-Nouri, ancien ministre producteur de cirage et brosses à reluire.

Un Syrien s’apprête à cocher son bulletin (avec les photos des trois candidats), à Damas le 3 juin 2014 (Dusan Vranic/AP/SIPA)

Les électeurs sont invités à cocher le nom du candidat de leur choix. Mais plutôt « Bachar el-Assad », le responsable de la mort de 200 000 Syriens.

1 Limiter le nombre de vos adversaires

 

  • Pour être candidat, il fallait l’aval de 35 membres du Parlement (pro-Assad) et il fallait avoir vécu en Syrie les dix dernières années, ce qui exclut les opposants en exil.
  • Vingt-quatre candidats se sont présentés, Assad étant le septième de la liste. Vingt-et-un ont été rejetés pour des « raisons obscures » par la Cour constitutionnelle. Parmi les trois validés : Bachar el-Assad, bien sûr.

2 ’afficher franchement

 

  • Couvrir les murs de portraits de Bachar el-Assad.

3 Exclure les électeurs réfugiés à l’étranger

 

  • Empêcher les trois millions de réfugiés de voter : les électeurs, à l’étranger, devront présenter leur passeport « avec le tampon attestant qu’ils sont sortis de leur pays de façon régulière ».

4 Forcer les fonctionnaires et les étudiants à voter

 

Damas annonce qu’il y aura 15 millions d’électeurs dans le pays. Ce qui, selon le calcul du Monde, est arithmétiquement impossible : La population était estimée à 23 millions avant 2011. On compte 3 millions de réfugiés, 6 millions de personnes déplacées... « Le nombre réel d’électeurs potentiels ne devrait pas dépasser les 5 ou 6 millions. »

 


Bachar el-Assad et son épouse Asma, en train de voter, à Damas le 3 juin 2014 (Agence officielle syrienne Sana/AP/SIPA)

Pour que le taux de participation soit crédible, il faut pousser le plus de monde possible à voter. Et il y a plusieurs méthodes.

  • Forcer les agents publics (soit la moitié des travailleurs syriens) à voter. Parlant sous couvert d’anonymat, plusieurs ont témoigné du fait qu’ils n’avaient pas trop le choix, ayant reçu « des ordres stricts d’aller aux urnes, sous peine d’être soumis à l’interrogatoire des services de sécurité ».
  • Colorer à l’encre rouge les index des personnes qui ont voté, officiellement pour éviter la fraude. Très utile pour contrôler qu’elles ont fait leur « devoir patriotique ». Menacer celles dont l’index n’a pas changé de couleur.
  • Fixer les examens universitaires le jour de l’élection, pour mieux contrôler le vote des étudiants. Une technique racontée au New York Times par un étudiant d’Hama contacté par Skype. Libération rapporte le témoigage d’une étudiante de la faculté des beaux-arts d’Alep, qui considère cette élection comme une comédie, mais qui est prise dans un dilemme : « Les membres de l’Union des étudiants du Baas, qui travaillent en étroite collaboration avec les services de sécurité, ne se priveront pas de me dénoncer. Ils peuvent m’interdire l’accès à la salle d’examen, voire me faire renvoyer de la faculté si je ne montre pas mon index rouge. »

5 Bien choisir ses observateurs

 

6 Préférer un résultat flatteur

 

  • Le résultat est à votre guise. Les dictateurs aiment généralement les situer aux alentours de 95% des voix. C’est le score atteint par le général Sissi en Egypte. Bachar el-Assad peut faire beaucoup mieux.

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

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3 juin 2014 2 03 /06 /juin /2014 16:47

 

Source : www.mediapart.fr

 

Le régime syrien s'acharne sur les opposants pacifistes

|  Par Marie Kostrz

 

 


En se faisant réélire président, Bachar al-Assad fait valoir qu'il est le meilleur rempart à la menace djihadiste dans le pays. Mais ces derniers mois, le régime a férocement réprimé tous les groupes d'activistes pacifistes pouvant représenter une alternative démocratique, misant sur la radicalisation du conflit.

Beyrouth, correspondance.   Le procès à Damas de Mazen Darwish, avocat et président du Centre syrien pour les médias et la liberté d'expression (SMC), prend depuis quelques semaines un tour ubuesque. Le 24 mars, la cour antiterroriste de Damas avait déclaré que Darwish, ainsi que quatre autres membres de l'organisation, seraient désormais poursuivis pour « avoir fait la promotion d'actes terroristes ». Arrêtés en février 2012 lors de la mise à sac des locaux du SMC par les services de renseignements de l'armée de l'air, ces cinq activistes documentaient les exactions commises contre les journalistes durant le soulèvement populaire qui a éclaté en 2011.

 

Mazen Darwish, arrêté et emprisonné en février 2012. 
Mazen Darwish, arrêté et emprisonné en février 2012. © (dr)

Leur dossier a ensuite été transféré devant la cour antiterroriste de Damas. Depuis, cette juridiction créée le 25 juillet 2013 attendait que des preuves de leurs présumées activités terroristes lui soit transférées pour débuter le procès. Le 18 juin prochain, il aura finalement lieu sans qu'aucune pièce n'ait besoin d'être présentée : le procureur général a décidé de s'en passer. A cour exceptionnelle, règles exceptionnelles...

Cette pratique ne cesse d'être dénoncée par les organisations de défense des droits de l'homme : « La nouvelle cour anti-terroriste fournit une couverture judiciaire pour la persécution des activistes pacifiques par les branches de sécurité syriennes, estime Nadim Houry, responsable de la section Proche-Orient de Human rights watch (HRW). Le gouvernement peut avoir une loi anti-terroriste mais il n'y a rien de légal dans le fait de poursuivre des activistes pacifiques sans garantie d'un procès équitable pour des actes qui ne devraient jamais être considérés comme des crimes ».

L'accusation de terrorisme dont Mazen Darwish et ses quatre collègues font l'objet est en effet difficile à justifier par les autorités syriennes. Depuis 2004, cet avocat répertoriait les violations des droits de l'homme en s'attachant à la situation des médias et des journalistes. Les accusés encourent aujourd'hui jusqu'à quinze ans de prison.

Ce procès est emblématique d'un phénomène relégué au second plan par les exactions des groupes radicaux qui prolifèrent aujourd'hui en Syrie. Trois ans après le début de la révolution, les opposants à Bachar al-Assad qui ont fait le choix de ne pas prendre les armes sont toujours les cibles premières du régime. « La prison est un moyen de les empêcher de travailler, regrette une proche de Mazen Darwish également arrêtée en février 2012. C'est pour cela que les autorités se permettent d'attendre un an pour obtenir des preuves alors qu'ils savent depuis le départ qu'ils n'en trouveraient aucune ».

Les méthodes du régime pour empêcher les activistes de poursuivre leur lutte s'avèrent souvent encore plus radicales. En novembre 2012, Ayham Ghazoul, membre du SMC, est mort sous la torture après avoir été arrêté à l'université. Et bien d'autres groupes d'activistes ayant fait le choix de la non-violence subissent la même répression. « Le régime nous a visés depuis le départ car nous avons des projets sérieux, on peut représenter une alternative au pouvoir en place », explique Majd Chourbaji, membre de l'organisation des Femmes libre de Daraya, ville de la banlieue de Damas assiégée depuis un an et demi par le régime (lire ici un précédent article sur les massacres survenus dans cette ville). « Nous savons ce que nous voulons pour le futur, c'est-à-dire un état démocratique non sectaire qui respecte toutes les religions », ajoute-t-elle. Un discours très éloigné de la manière dont le régime syrien dépeint ses opposants, qualifiés indistinctement de terroristes.

Majd Chourbaji, qui a aussi participé au lancement d'Ineb Baladi, un journal libre créé au début de la révolution à Daraya, souligne que la plupart de ces activistes croupissent aujourd'hui dans les prisons du régime. Rien que parmi les rangs d'Inab Baladi, trois membres ont été tués et quatre autres sont toujours emprisonnés. Daraya a particulièrement fait les frais de cette stratégie : cette ville est célèbre pour le mouvement non-violent qui a perduré pendant les premiers mois de la révolution. Dès mars 2011, des activistes sont arrêtés et meurent sous la torture pour avoir distribué de l'eau et des roses aux soldats qui tiraient sur les manifestants.

Ces arrestations ont sans nul doute affaibli la dynamique qui prévalait durant les premiers mois du soulèvement. « En arrêtant les opposants qui défendaient une ligne pacifique, le régime a permis à la révolte armée de prendre le dessus », poursuit Majd Chourbaji, qui est restée sept mois en prison. «Pendant ma détention je voyais des femmes qui avaient aidé les rebelles être relâchées au bout d'un mois ou deux, alors qu'on m'a libérée au bout de sept mois et dans le cadre d'un échange d'otages : je n'aurais même pas dû sortir !», témoigne-t-elle.

Imad (son nom a été changé pour des raisons de sécurité) observe chaque jour les retombées d'une telle stratégie. Cet activiste est membre du conseil local qui administre Daraya depuis octobre 2012. Joint par Skype, il explique que la révolte armée a donné un coup d'arrêt aux activités pacifiques. « Une fois que la bataille de Daraya a commencé en novembre 2012, le bureau militaire du conseil local est devenu très important alors que les bureaux qui s'occupent d'animer la société civile sont devenus minimes », regrette-t-il.

Un chaos bénéfique au régime de Damas

Avec l'arrivée des armes, les activistes pacifiques ont en effet perdu leur influence sur le terrain. Wesam Sabaaneh est coordinateur pour l'organisation Jafra, qui aide les habitants des camps palestiniens syriens. Originaire de celui de Yarmouk, au sud de Damas, il explique les difficultés rencontrées par les activistes restés dans cette ville assiégée par le régime depuis presque deux ans. « Contrairement aux rebelles, ils n'ont pas d'argent, ils ne sont pas armés , résume-t-il. C'est la guerre, le chaos, c'est très dangereux : de plus en plus d'activistes se sont donc affiliés à des milices car ils n'ont pas d'autre choix pour avoir une protection. A partir de là, beaucoup ont perdu leur indépendance ».

L'homme note aussi que le paysage des activistes a évolué : « Beaucoup ont fui avant le siège, ceux qui sont actifs à l'intérieur sont jeunes, ils étaient encore adolescents quand la révolution a commencé ; ils sont courageux et essayent de faire de leur mieux mais c'est difficile car ils n'ont pas d'expérience ».

Même s'ils sont aujourd'hui affaiblis, ces activistes continuent d'être pourchassés par le régime. A Yarmouk, ils sont systématiquement exclus des trêves conclues pour évacuer le quartier. Si des combattants ont été autorisés à quitter Yarmouk en janvier dernier, les activistes pacifistes n'ont pas fait partie de l'accord. Depuis la trêve, trois ont été arrêtés en essayant de sortir du camp. « Ahmad Qudaymi est détenu car il travaillait dans le seul hôpital de Yarmouk », dénonce un activiste originaire du camp. Lui-même a fui le pays après que toute sa famille a été arrêtée en septembre dernier, lorsque son père a transmis de l'argent à un commerçant censé fournir de la nourriture pour les habitants assiégés du camp.

 

Ruines dans la ville de Yarmouk à l'été 2013. 
Ruines dans la ville de Yarmouk à l'été 2013. © (dr)

Les activistes pacifistes en sont persuadés : le régime fait tout pour les pousser à l'exil afin d'affaiblir leur lutte. « Une fois qu'on est dehors, on est loin, plus confronté aux difficultés des Syriens de l'intérieur », admet un ancien membre du bureau des médias du comité local de coordination de Zabadani, installé en Turquie car il ne lui était plus possible de travailler sous les bombes. « Pour cette raison, je n'ai mené que des projets personnels depuis que je suis sorti du pays », dit-il.

Cet exil désole d'autant plus les opposants qu'il laisse le champs libre aux éléments les plus radicaux du conflit. Le régime n'est maintenant plus le seul à opprimer les activistes pacifiques. « Depuis plusieurs mois, les attaques et surtout les enlèvements de militants des droits humains et journalistes en particulier, se sont multipliés de la part d'acteurs non-étatiques armés », constate Marie Camberlin de la FIDH, organisation membre de Free Syria's Silenced Voice. Cette campagne lancée en mai répertorie les arrestations et disparitions d'activistes afin de « redonner une voix à ceux qui militent pacifiquement pour les droits des Syriens ».

Le plus emblématique de ces enlèvements est celui de Razan Zaitouneh. Cette avocate a fondé les Comités locaux de coordination qui organisent et couvrent les activités civiles opposées au régime, ainsi que le centre de documentation des violations (VDC). Avec trois autres activistes, elle a été kidnappée en décembre 2013 par un groupe armé à Douma, en banlieue de Damas. En avril 2014, ses proches ont publié une déclaration interpellant Ziad Alloush, leader du groupe rebelle L'Armée de l'Islam, responsable de la zone dans laquelle elle a disparu.

Ce chaos, qui dégrade l'image de l'opposition, est bénéfique au régime. « Il se montre comme la seule solution pour protéger les minorités et rétablir le calme, analyse une proche de Mazen Darwish. Mais il ne doit pas oublier qu'il a maintenant la responsabilité de protéger tout Syrien contre les éléments extrêmes et djihadistes ».

 

Lire aussi

 

 

 

Source : www.mediapart.fr

 


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3 mai 2014 6 03 /05 /mai /2014 20:24

 

Source : blogs.mediapart.fr/edition/paroles-syriennes

 

 

Vidéo : Reportage de SMART sur un projet de boulangerie bénévole à Deir Ez-Zor

Fidèles à notre ligne, consistant à faire la lumière sur les efforts des Syriens pour survivre, nous vous présentons ce court reportage sur la mise en route d’un four à pain à Deir Ez-Zor. Elle a été traduite par notre équipe.

Le contenu mis à part, ce qui est également intéressant est que cette vidéo a été produite par SMART, qui a été créé en 2011 comme un groupe de média Syrien amateur. De nombreux groupes médias se sont en effet constitués depuis 2011.

Les médias officiel syrien se sont tout de suite décrédibilisés en couvrant la crise syrienne de manière inique et totalement biaisée. Pour ceux qui en doutaient, ils sont pleinement apparus comme les outils de propagande du régime en place. Puisque les journalistes internationaux ont rapidement été menacés par le régime, et puis ensuite par l’émergence de groupes extrémistes, ce sont les Syriens ordinaires qui ont dû pallier à l’absence de couverture internationale en devenant journalistes amateurs. Depuis lors long chemin a été parcouru par ces journalistes et groupes médias.

Cette vidéo est un exemple parmi tant d’autre, montrant la progressive professionnalisation de ces groupes. La qualité s’améliore et l’on voit désormais émerger un véritable paysage médiatique, qui concurrence pleinement les médias “traditionnels” syriens, tous subordonnés au régime.

 

 

 

 


Source : blogs.mediapart.fr/edition/paroles-syriennes

 

 


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