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Le refus des autorités espagnoles d'ouvrir une commission d'enquête sur Bankia, qui doit recevoir 23,5 milliards d'euros de fonds publics, suscite l'indignation et l'incompréhension des Espagnols.
La vignette du caricaturiste Ricardo dans « El Mundo » d'hier ne pouvait être plus explicite. On y voit trois personnes avec des sacs remplis d'euros sur les épaules tels les Dalton venant de braquer une banque. Au premier plan, le président du gouvernement, Mariano Rajoy, dit au chef de l'opposition socialiste, Alfredo Rubalcaba : « Je ne crois pas que nous devrions ouvrir une commission d'enquête. Certains de ceux-ci pourraient être des nôtres. » Il suffit de rappeler que l'ex-président de Bankia, Rodrigo Rato, qui a démissionné le 7 mai dernier, est l'ancien directeur général du Fonds monétaire international et une figure du Parti populaire actuellement au pouvoir.
La réticence des autorités espagnoles à ouvrir une enquête parlementaire sur Bankia, qui doit recevoir 23,5 milliards d'euros de fonds publics et dont les ex-dirigeants toucheront des retraites millionnaires, a beaucoup de mal à passer auprès des citoyens espagnols. « Les gens vivent des moments très difficiles, beaucoup sont au chômage, certains ont perdu leur maison, s'indigne Maria Jésus, cliente de Bankia. Le minimum, d'un point de vue éthique comme économique, serait de donner des explications sur ce qui s'est passé. » Cette professeure de soixante et un ans comprend la nécessité de sauver Bankia mais critique durement le « manque de transparence » : « Il est évident que l'entité a été très mal gérée, qu'il y a eu des manigances politiques avec la Communauté de Madrid pour payer les projets immobiliers de la région... »
Confiance trahie
Les clients de la banque ont la sensation d'avoir été trahis. « C'est une véritable tromperie », s'emporte Francisco Reyes Lopez, un fonctionnaire de cinquante et un ans dont le compte courant est domicilié chez Bankia. Sa mère a été victime des actions préférentielles de Caja Madrid (l'une des caisses formant Bankia), un produit financier complexe qui s'apparente à une dette perpétuelle et a été vendu comme des dépôts à vue. « Jusqu'à présent, elle a perdu 1.700 euros, détaille Francisco. C'est une personne âgée qui avait toute confiance en sa banque. »
Beaucoup de clients ont également été victimes de la vente forcenée des actions dans les agences juste avant la sortie en Bourse, le 20 juillet 2011. « Les employés m'ont dit qu'ils allaient eux-mêmes en acheter beaucoup, que le prix allait monter », rapporte Julio, cinquante-trois ans, qui travaille pour la loterie publique espagnole. La dégringolade du titre Bankia depuis dix mois lui a fait perdre 5.000 euros. Pense-t-il à vendre ? « Non, soupire-t-il, il faut tenir en espérant que ça remonte. »
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