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30 mai 2015 6 30 /05 /mai /2015 16:53

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

 

De l’UMP aux Républicains : l’opération de blanchiment de Sarkozy

|  Par Ellen Salvi

 

 

Les militants ont tranché. À compter de ce samedi 30 mai, l'UMP est rebaptisée “Les Républicains”. Si le scrutin n'a rassemblé que 45,74 % de votants, son résultat offre à Nicolas Sarkozy le loisir d'enclencher la lessiveuse. Objectif de l'opération : faire peau neuve, écarter les adversaires et mettre les affaires sous le tapis.

C’est la dernière touche apportée à son projet. Celle qui vient conclure sept mois de stratégies et de petits arrangements internes tournés vers un seul et même but : réendosser le costume de Bonaparte. En organisant le congrès refondateur de sa famille politique, ce samedi 30 mai à Paris devant moins de 10 000 spectateurs (et non 20 000 comme annoncés), Nicolas Sarkozy s’offre l’occasion de montrer à ses adversaires qui est le véritable patron de l’UMP, désormais rebaptisée “Les Républicains”.

L’ancien chef de l’État a beau assurer, en parlant de lui à la troisième personne, qu’il ne s’agit pas du « parti de Sarkozy ou d’un autre », mais d’une « force qui prépare l’avenir », nul ne doute que le seul avenir qui l’intéresse est le sien. Alain Juppé, François Fillon, Bruno Le Maire et consorts s’entêtent à vouloir le concurrencer pour la primaire de 2016 ? Il leur impose une journée entièrement dédiée à sa gloire personnelle. Et s'octroie même un petit plaisir : voir Juppé et Fillon monter à la tribune sous les huées et les sifflements des fans sarkozystes réunis dans la salle du Paris Event Center.

 

Nicolas Sarkozy et quatre des élus UMP choisis pour animer le congrès refondateur du 30 mai.Nicolas Sarkozy et quatre des élus UMP choisis pour animer le congrès refondateur du 30 mai. © Twitter/@NicolasSarkozy
 

Un nombre incalculable d'élus se succèdent au pupitre pour dire combien ils sont fiers d'être “Républicains”. L'image d'unité martelée par le parti depuis de longs mois pâtit de cette mise en scène en accéléré. Chacun a voulu son petit moment sous les projecteurs. Et chacun l'a obtenu. Deux minutes, quatre pour les plus chanceux. Des discours miniatures dont il ne reste pas grand chose en fin de journée si ce n'est les hommages rendus à Éric Woerth, récemment relaxé dans l'affaire Bettencourt. « Un très honnête homme », affirme Nicolas Sarkozy.

Dans la salle, pas un “Républicain” ne manque à l'appel. Claude Guéant, Patrick Balkany, Jean-François Copé, Serge Dassault... et même Charles Pasqua. Ils sont tous venus applaudir les résultats du vote électronique organisé les jeudi 28 et vendredi 29. Pendant deux jours, les 213 030 militants revendiqués par le parti de la rue de Vaugirard étaient appelés à répondre aux trois questions suivantes :

  • Approuvez-vous “Les Républicains” comme dénomination de notre mouvement ?
  • Approuvez-vous les projets de statuts et de règlement intérieur issus des travaux de la commission de révision des statuts ?
  • Approuvez-vous la liste de candidats, adoptée en bureau politique le 19 mai 2015, en vue de la composition du premier bureau politique ?

Ils sont 97 440 à s’être prononcés, soit 45,74 %. Un score évidemment salué par les élus de droite encore présents sur Twitter vendredi soir, mais qui paraît pourtant bien faible au regard des résultats qu’obtenait le PS quand il était dans l’opposition (en 2008, le congrès de Reims avait par exemple réuni 130 000 votants). Sans surprise, une grande majorité des militants UMP ont répondu “oui” aux trois questions (voir le détail des résultats sous l’onglet “Prolonger”).

Pour les proches de Nicolas Sarkozy, ces résultats apparaissent comme un plébiscite de l’action menée par le patron de l’opposition depuis son retour en politique. Comme il l’avait calculé, l’ancien chef de l’État peut désormais se targuer d’être lui aussi un “père fondateur” de la droite. Il se rêve en de Gaulle et souhaiterait ardemment que chacun l’envisage ainsi. C’est pourquoi il cultive la ressemblance avec le général dans le moindre détail. Mais hormis son fidèle Hortefeux, personne n’y croit sérieusement.

 

Juste après sa diffusion, l'appel de Nicolas Sarkozy a circulé sur les réseaux sociaux, accolé à celui de De Gaulle.Juste après sa diffusion, l'appel de Nicolas Sarkozy a circulé sur les réseaux sociaux, accolé à celui de De Gaulle. © DR
 

Ainsi démarre la vaste opération de blanchiment imaginée par Nicolas Sarkozy. Tout doit passer à la lessiveuse, à commencer par sa propre image. En changeant le nom de l’UMP, comme il l’avait promis lors de la campagne pour la présidence du parti, l’ex-chef de l’État peut clamer sans rougir aux militants : « Quand je pense quelque chose, je le dis. Quand je dis quelque chose, je le fais. » S’il veut aller au bout de ses ambitions élyséennes, le patron de l’opposition doit convaincre tous les déçus de 2007 qu’il tiendra désormais ses promesses.

Ses adversaires en interne sont loin d’être dupes. « Il s’organise pour gagner », souffle l’un d’entre eux. Mais piégés dans le village Potemkine du « grand rassemblement », ils assistent, impuissants, à la nette progression de Nicolas Sarkozy dans la course à 2017. Aucun croche-pattes n’est possible. Le risque de se voir accuser de divisions est beaucoup trop grand. L’ex-chef de l’État a cédé sur la primaire. Il a fait quelques concessions pour arranger tout le monde sur les nouveaux statuts (qui n’engagent pas de modifications profondes) et sur la composition du bureau politique enrichi de 20 membres supplémentaires. C’est déjà bien suffisant à ses yeux. Du coup, il s’approprie la lumière.

En l’espace d’un semestre, le patron de l’opposition a déjà réussi à écarter deux de ses adversaires à la primaire : Xavier Bertrand, dont nul ne sait trop ce qu’il est devenu, et François Fillon, qu’il souhaite voir « à terre et sans oxygène » et qu’il fait passer, en attendant, pour le « pire des traîtres ». Comme le souligne Éric Ciotti, Sarkozy « avance tel une colonne de chars dans le désert ». Parmi les candidats sérieux au scrutin de 2016, c’est-à-dire s’étant préparés assez tôt pour espérer concourir, restent donc Alain Juppé et Bruno Le Maire. L'ex-chef de l'État a accordé à chacun d’entre eux un temps de parole de 10 minutes ce samedi. Lui s’est réservé trois quarts d’heure.

Remiser les affaires dans l’arrière-boutique

C’est son moment. Celui qu’il voudrait graver dans les mémoires comme le jour où fut lancé le « parti politique moderne digne du XXIe siècle ». Mais ses opposants ne l’entendent pas de cette oreille. « On change de nom, voilà. Ce congrès est surtout un moment coûteux pour pas grand-chose », minimise Gilles Boyer, le conseiller politique d’Alain Juppé. Pour parer ce type de critiques, le trésorier de l’UMP, Daniel Fasquelle, répète depuis un mois que l’événement est placé sous le signe de la « sobriété ». Il a tout de même dégagé plus de 500 000 euros pour l’organiser.

Pour un parti dont les caisses sont vides, la somme est coquette. Elle n’a cependant rien à voir avec les 5 millions d’euros déboursés en 2004 pour le grand show à l'américaine du Bourget, durant lequel Nicolas Sarkozy avait été sacré patron de l’UMP, avec 85,1 % des voix. À l’époque, la primaire n’existait pas. La droite n’en avait pas besoin. Elle avait déjà trouvé son homme providentiel. Fin novembre, après deux ans d’une existence moribonde sous la présidence d’Alain Juppé, le parti naissait pour de bon au son des promesses de son nouveau président.

 

Première élection de Nicolas Sarkozy à la tête de l'UMP, le 28 novembre 2004, au congrès du Bourget.Première élection de Nicolas Sarkozy à la tête de l'UMP, le 28 novembre 2004, au congrès du Bourget. © Reuters
 

« Je veux que chaque adhérent ait un rôle à jouer, que son avis soit sollicité, que par-dessus tout il se sente respecté », « Je veux que notre formation devienne un grand mouvement populaire », « Je veux rassembler »…, clamait-il alors. Dix ans et un quinquennat plus tard, rien n’a changé ou presque. Nicolas Sarkozy est redevenu patron de l’UMP, élu cette fois avec 64,5 % des suffrages exprimés. Et il “veut” toujours la même chose. « Un mouvement avec des adhérents qui participent, qui font des choix, qui sont des bâtisseurs », « créer le premier parti du XXIe siècle », « rassembler »… Des formules copiées-collées pour une seule et même ambition : conquérir l’Élysée.

 

Christian Estrosi et Charles Pasqua au congrès du 30 mai, à Paris. © Twitter/@cestrosi
Christian Estrosi et Charles Pasqua au congrès du 30 mai, à Paris. © Twitter/@cestrosi © Twitter/@cestrosi
 

Au jeu des différences, Gilles Boyer note tout de même un point essentiel : « En 2004, nous avions une montagne d’argent, aujourd’hui, nous avons une montagne de dettes. » Au mois de mars, elle culminait encore à 69,3 millions d’euros. L'ardoise est aussi colossale que les excès de l'UMP le furent à partir de 2004. Rue de Vaugirard, la décennie qui vient de s’écouler ne garde pas seulement le goût du champagne, elle conserve également la saveur désagréable des affaires. La faire disparaître constitue le principal enjeu de l’opération de blanchiment du parti.

En reprenant la tête de l’opposition, Nicolas Sarkozy avait un but très précis : ripoliner la vitrine de l'UMP pour remiser les ennuis dans l’arrière-boutique. De la même façon qu’il est revenu en politique pour se protéger judiciairement, l’ex-chef de l’État a décidé de changer le nom du parti en raison du « calendrier judiciaire » qu’il se dit contraint de gérer depuis l’affaire Bygmalion. Il n’est pas le seul à avoir fait ce calcul. « Changer de nom était devenu nécessaire compte tenu des turbulences et des affaires qui ont terni le sigle de l’UMP depuis deux ou trois ans », reconnaît l’ancien président de l’Assemblée nationale, Bernard Accoyer.

Mais la manip’ est tellement grossière qu’elle risque de faire long feu. D’autant que derrière ce nouveau parti se cachent toujours les mêmes protagonistes : Jean-François Copé, Claude Guéant, Patrick Balkany, Guillaume Peltier… et bien sûr, Nicolas Sarkozy lui-même. Les ex-UMP qui ont maille à partir avec la justice pourront s’appeler “Les Républicains”, les enquêtes judiciaires les visant ne s’arrêteront pas pour autant. Telles sont les limites de la lessiveuse mise en place par le patron de l’opposition : elle ne blanchit pas les gens.

C’est certainement ce qui fait le plus défaut à l’ex-chef de l’État. L'entourage. Depuis 2004, il a perdu toutes les têtes pensantes qui figuraient parmi ses proches pour ne conserver que les amis embarrassants. Emmanuelle Mignon, le cerveau de la campagne victorieuse de 2007, a déserté les rangs depuis fort longtemps. Résultat : à deux ans de la présidentielle, pas la moindre idée nouvelle n'émerge de la rue de Vaugirard. En réunions publiques, Nicolas Sarkozy fait des blagues, mais ne semble guère pressé de parler propositions. La question du projet politique a été renvoyée à juin 2016. En attendant, l’ex-chef de l’État continuera d’alimenter sa lessiveuse en vapeur médiatique.

 

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

 

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9 avril 2015 4 09 /04 /avril /2015 18:15

 

 

 
 
Les Possibles
Revue éditée
à l’initiative du Conseil
scientifique d’Attac
 
 

No. 06 Printemps 2015

 
 
 
 
 
Dette et monnaie font société
par Jean-Marie Harribey, Jean Tosti

S’il est une question qui reste un peu mystérieuse au royaume de l’économie, c’est bien celle de la monnaie. Les mauvaises langues diraient que c’est parce que les économistes s’en mêlent, et elles n’auraient pas tout à fait tort. La monnaie est en effet un objet mal identifié si on la considère uniquement sous l’angle des fonctions économiques qu’elle remplit, a fortiori celles qu’elle remplit dans l’économie capitaliste. Cet angle est un angle mort : on croit que l’humanité est passée du troc à la monnaie comme elle est passée de l’âge de pierre à l’âge de fer, et que la dette est une tache qu’il faudrait effacer à jamais parce qu’elle serait une faute, la marque d’un déshonneur.

 
 
 

Dossier : Monnaie et finance

Qu’est-ce que la monnaie ? Petit préalable à sa reconquête
par Guillaume Pastureau

La monnaie est une institution sociale présente dans toutes les sociétés comme outil d’intégration et de cohésion sociale, elle ne peut pas être considérée par ses simples fonctions économiques. La monnaie n’est pas spécifique aux sociétés capitalistes, ni même aux échanges marchands. Cependant, la dynamique du capitalisme transforme son essence même en l’intégrant dans le processus de marchandisation. Il convient donc pour le mouvement social, dans une optique de transformation sociale et économique vers la transition écologique, de se battre pour sa réappropriation collective, pour cela il est nécessaire de bien appréhender les enjeux en commençant par comprendre le fait monétaire par l’usage et les pratiques de la monnaie.

 
« La monnaie est un rapport social » Entretien avec Michel Aglietta
Réalisé par Jean-Marie Harribey et Dominique Plihon
par Michel Aglietta

Dans le contexte de crise globale, de crise de l’Union européenne, de crise de l’euro, de crise de la dette, il est légitime de se reposer la question de la nature de la monnaie. Comment la définiriez-vous ?

La monnaie est un rapport d’appartenance des membres d’une collectivité à cette collectivité dans son ensemble. Un mode d’appartenance qui s’exprime sous la forme d’une dette. Toute monnaie est une dette, quelle qu’elle soit, ce qui donne une certaine unité au phénomène monétaire.

 
Grèce : une économie dépendante et rentière
par Michel Husson

La Grèce est une économie dépendante et rentière. Dépendante, parce qu’elle doit importer une bonne partie de son énergie et toute une série de marchandises qu’elle ne produit pas. Rentière, parce que sa classe dominante est plus compétente pour capter la richesse produite, directement ou par l’intermédiaire de son État, que pour investir et innover. La dette n’est au fond que le reflet de ces caractéristiques, et l’alternative passe aussi par « la destruction des fondements du système oligarchique » (pour reprendre une expression de Yanis Varoufakis).

 
Pourquoi un audit de la dette de la Grèce
par Eric Toussaint

La présidente du parlement grec Zoé Konstantopoulou, qui a décidé de créer une commission d’audit de la dette grecque, m’a demandé d’y collaborer activement. La correspondante du Monde à Athènes a écrit récemment : « La présidente a surtout promis la création dans les prochaines semaines d’un comité d’audit de la dette grecque. L’objectif est de déterminer l’éventuel caractère odieux, illégal ou illégitime des dettes publiques contractées par le gouvernement grec », précise-t-elle, faisant allusion à plusieurs affaires de corruption et à l’opacité qui entoure l’achat d’armes par son pays.

 
La perspective locale inédite d’une sortie de la zone euro : la Grèce et ses avantages comparatifs
par Thierry Pouch

L’accession de Syriza au pouvoir en Grèce n’a pas seulement replacé l’économie grecque au centre de l’actualité européenne, elle a également donné un souffle nouveau aux controverses sur les stratégies possibles de sortie de la crise que peut ou pourrait déployer l’équipe gouvernementale d’Alexis Tsipras. Manifestement, un bras de fer s’est engagé entre le gouvernement grec fraîchement élu, et les autorités européennes, avec notamment le diptyque Eurogroupe et Banque centrale, et internationales, avec le Fonds monétaire international. La suite montre que les pressions exercées par les pays membres de la zone euro ont été suffisamment fortes pour que le pouvoir actuellement en place à Athènes soit amené à revenir sur certains aspects de son programme électoral.

 
Dette illégitime : un concept dangereux !
par Edwin Le Heron

Je considère que le concept de « dette illégitime » est un concept dangereux, parce qu’il est fondamentalement un concept libéral, antidémocratique, moraliste et contradictoire. Il est donc selon moi un concept qui fragilise les idées progressistes que nous essayons de défendre, au lieu de les servir. Mon point de vue critique sur ce concept ne remet absolument pas en cause l’utilité du rapport d’Attac, et plus généralement d’une analyse par tous les citoyens de la dette d’un État, de son origine, de ses contreparties, de son financement et in fine de son utilité pour la société. Toute information en ce domaine est la bienvenue.

 
À quoi sert une banque centrale ? Que fait la BCE ? Que devrait-elle faire ?
par Esther Jeffers

Injections de liquidité, baisse des taux, sauvetage des banques, politiques non conventionnelles, etc., les banques centrales sont, depuis l’éclatement de la crise en 2007, en première ligne. Normal, diront certains, puisque la banque centrale est la « banque des banques » et que les banques sont, depuis le début, au cœur même de la crise. Si on peut définir aujourd’hui, de façon très générale, la banque centrale comme une institution chargée de définir la politique monétaire et d’assurer sa mise en œuvre, on peut se demander si elle a toujours connu le même statut et joué le même rôle que de nos jours. À quoi sert une banque centrale ? Que faut-il penser des interventions de la Banque centrale européenne (BCE) ? Pourrait-elle et aurait-elle dû agir autrement ?

 
Pour les salariés de la BCE, comment cela se passe-t-il ?
par Carlos Bowles, Emmanuel Larue

Les salariés de la BCE travaillant en Allemagne, on pourrait s’attendre à ce que leurs contrats de travail soient régis par le droit allemand. En réalité, il n’en est rien. Du fait de l’indépendance conférée par les traités à la BCE, le droit du travail allemand n’est pas applicable à l’intérieur de l’enceinte de la BCE.

 
Notes sur la finance, une perspective marxiste.
par Suzanne de Brunhoff

Que nous apporte la référence à Marx dans une étude de la finance contemporaine ? Non seulement il y a un décalage historique, mais de plus Marx n’a traité la question que dans des manuscrits, y compris celui du Livre 3 du Capital publié en 1894 par Engels. Je voudrais reprendre cette question en examinant le rapport de Marx avec l’école classique, principalement Ricardo, et l’apport original de Marx sur le lien entre « capital réel » productif et « capital-argent ».

 
Docteur Freud and Mister Keynes
Extrait de Keynes ou l’économiste citoyen, Les Presses de Sciences Po, 1999, 2007
par Bernard Maris

Avant d’arriver à l’économie et à la philosophie de Keynes (nous avons déjà une petite idée de sa Weltanschaung), il nous faut prendre un second sentier détourné. Le premier passait par Virginia Woolf et ses amis, le second passe par le docteur Freud.

Ignorer Freud en économie – et particulièrement dans l’oeuvre de Keynes, grand lecteur et admirateur de Freud – est à peu près équivalent à ignorer Einstein en physique. C’est peut-être difficile à croire, mais l’économie orthodoxe voulut créer une science ignorant l’argent. Ainsi la théorie quantitative de la monnaie, pilier de l’économie orthodoxe, est une théorie de la « neutralité » de la monnaie. La monnaie n’a pas d’incidence sur l’économie. L’économie orthodoxe postule également la rationalité des individus : ce sont de simples considérations de coût-avantages qui en guident les décisions.

 
 
 

Débats

Bulles financières et profits
par Michel Husson

La finance n’est pas autonome par rapport à l’économie réelle. Autrement dit, les crises financières ne se déclenchent pas par hasard, mais quand l’envol des cours boursiers est devenu totalement déconnecté de l’évolution des profits. On peut illustrer cette proposition sur l’exemple des États-Unis, à partir d’une comparaison entre deux indicateurs : la Bourse et les profits.

 
La baudruche du capital fictif, lecture du Capital fictif de Cédric Durand
par Jean-Marie Harribey

L’économiste Cédric Durand vient de publier Le capital fictif, Comment la finance s’approprie notre avenir (Paris, Les Prairies ordinaires, 2014). Cet ouvrage fait partie des quelques-uns, très peu nombreux hélas, qui proposent une vision de la crise à partir des concepts théoriques fondamentaux permettant de comprendre et de critiquer le capitalisme aujourd’hui dominé par la finance mondialisée.

 
Sur le capital fictif, Réponse à Jean-Marie Harribey
par Cédric Durand

Je voudrais d’abord remercier Jean-Marie Harribey pour sa lecture attentive de mon livre et pour ses commentaires bienveillants. Dans ce qui suit, je vais brièvement tenter de clarifier ce qui semble faire obstacle à une convergence plus grande de nos points de vue. Le problème central tient à la définition même du capital fictif. Un concept que Jean-Marie Harribey refuse de saisir dans sa globalité, écartant les créances bancaires et les dettes publiques, pour ne retenir qu’une délimitation rétrécie du capital fictif « au sens strict », incluant la valeur de marché des actions et des produits dérivés. Cette tentative de réduction empêche, à mon sens, de mobiliser la puissance du concept de capital fictif pour saisir la spécificité du capitalisme financiarisé et, ainsi, mieux le combattre.

 
Capital fictif, dictature des actionnaires et des créanciers : enjeux du moment présent
par François Chesnais

Je suis largement d’accord avec plusieurs des critiques faites par Jean-Marie Harribey du livre intéressant de Cédric Durand, notamment quant au statut très flou de la théorie de la valeur à laquelle la théorie du capital fictif exige pourtant d’être adossée. Mais je ne vois pas comment il peut émettre l’hypothèse que le capitalisme financiarisé correspond à « une phase de son histoire où s’approche le moment où les perspectives de croissance de la productivité du travail et, partant, de croissance économique s’amenuisent, voire s’épuisent » et qualifier en même temps le capital fictif de « baudruche ». Aussi grave qu’ait été le krach financier de 2008, le capital fictif n’a pas été touché à la racine et a pu faire supporter la crise aux travailleurs.

 
Le Livre noir des banques
par Laurence Scialom

La lecture de cet ouvrage co-écrit par des membres d’Attac et de Basta ! est une charge sans concession sur les dérives multiples des banques que la crise n’a pas éradiquées. On a même le sentiment que certaines pathologies se sont exacerbées, comme le caractère systémique des établissements ou leurs connexions avec le shadow banking. Volontairement polémiste, militant, parfois provocant, cet ouvrage repose pourtant sur des données et analyses très sérieuses, tant académiques qu’issues de grandes institutions internationales, type FMI ou BRI, ou d’ONG comme Finance Watch, Oxfam ou Tax Justice Network. Les angles d’attaque – au plein sens du terme – sont nombreux : coûts du sauvetage des banques, pression des lobbies, dangerosité de certaines innovations financières, emprunts toxiques, trading à haute fréquence, évasion fiscale, hypertrophie et danger des marchés dérivés, conflits d’intérêt, etc.

 
Faire un homme augmenté ou rester humain ?
par Jean-Marie Harribey

En publiant Osons rester humain, Les impasses de la toute-puissance (Les Liens qui libèrent, 2015), Geneviève Azam avance sur un chemin original. Elle nous avait déjà offert Le temps du monde fini en 2010, où elle avait disséqué les limites écologiques de la planète. Elle fait aujourd’hui le lien entre ces limites et les tentatives technicistes pour les transgresser.

 
 
 

La revue des revues

Revue des revues n° 6
par Jacques Cossart

La revue des revues comporte deux volets, répartis en cinq parties. Au programme des rapports internationaux, figure la lancinante question du réchauffement climatique, toujours plus préoccupante, dont les conséquences vont, entre autres, de la montée des températures à la modification des précipitations et des écosystèmes marins, à la baisse des rendements agricoles et à l’aggravation de la vulnérabilité sociale. La responsabilité du système bancaire et financier est grandement engagée dans les dégradations actuelles et à venir. Les phénomènes de corruption avérés ne sont sans doute que la partie émergée d’un système délétère.

Le second volet propose un panorama international, non exhaustif, donc forcément subjectif, des réactions dans le monde soulevées par les assassinats de janvier 2015 à Paris. De la difficulté des religions à ne pas voir leur histoire associée aux pires barbaries, telle pourrait être l’une des questions angoissantes qui est revenu après ces attentats. De la difficulté à approfondir laïcité, liberté et conditions du vivre ensemble, telle est la question corollaire de la précédente. L’enjeu est crucial : éviter l’engrenage du « choc des civilisations ».

 
 
 

Les Possibles, Printemps 2015

 
 
Adresse

Attac, 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris

Directeur de la publication

Jean-Marie Harribey

Secrétariat de la rédaction

Isabelle Bourboulon, Jacques Cossart, Nicolas Haeringer, Jean-Marie Harribey, Esther Jeffers, Frédéric Lemaire, Christiane Marty, Pascal Paquin, Jeanne Planche, Dominique Plihon, Jean Tosti, Aurélie Trouvé

Responsables techniques

Edgard Deffaud, Serge Gardien, Sophie Lambert-Evans, Éric Le Gall, Wilfried Maurin, Pascal Paquin, Tom Roberts, Rémi Sergé, Olivier Tétard

Comité éditorial

Sylvie Agard, Christophe Aguiton, Verveine Angeli, Paul Ariès, Geneviève Azam, Daniel Bachet, Jacques Berthelot, Catherine Bloch-London, Martine Boudet, Isabelle Bourboulon, Thierry Brugvin, Thierry Brun, Alain Caillé, Claude Calame, Christian Celdran, François Chesnais, Francoise Clement, Pierre Concialdi, Philippe Corcuff, Jacques Cossart, Thomas Coutrot, Christian Delarue, Vincent Drezet, Cédric Durand, Guillaume Duval, Mireille Fanon-Mendès-France, Daniel Faugeron, David Flacher, Fabrice Flipo, Pascal Franchet, Bernard Friot, Jean Gadrey, Susan George, Jérôme Gleizes, Gérard Gourguechon, André Grimaldi, Janette Habel, Nicolas Haeringer, Jean-Marie Harribey, Michel Husson, Esther Jeffers, Isaac Johsua, Pierre Khalfa, Serge Le Quéau, Frédéric Lemaire, Christiane Marty, Gus Massiah, Antoine Math, Dominique Méda, Georges Menahem, Denise Mendez, Pascal Paquin, René Passet, Évelyne Perrin, Dominique Plihon, Thierry Pouch, Daniel Rallet, Juan Roy de Menditte, Jean-Claude Salomon, Catherine Samary, Denis Sieffert, Vicky Skoumbi, Jean-Louis Sounes, Daniel Tanuro, Bruno Tinel, Michel Thomas, Jean Tosti, Éric Toussaint, Stéphanie Treillet, Aurélie Trouvé, Patrick Viveret

Contact avec la revue et soumission d’articles

Les propositions d’articles nouveaux ainsi que les contributions répondant à des textes publiés dans les numéros précédents de la revue doivent être adressées au secrétariat de la revue : revue-cs-secretariat@list.attac.org

La revue a noué un partenariat avec Mediapart à travers une « édition » créée sur ce site : http://blogs.mediapart.fr/edition/la-revue-du-conseil-scientifique-dattac. À chaque parution trimestrielle de la revue, un des articles sera mis en ligne sur Mediapart.

 
 
 

Attac France — 2015
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4 avril 2015 6 04 /04 /avril /2015 21:46

 

Source : http://www.voussaveztout.com

 

ven. 03-04
11:42
Ouverture du Gazette Café : Le couteau suisse du café littéraire !

 

 

Le Gazette Café a ouvert ses portes ce mercredi à 11 h 00 - 1er avril 2015 © P. Serre

 

 
 
 
 

La Gazette a inauguré ce mercredi le Gazette Café : un nouveau lieu culturel à cent mètres à peine de la gare St Roch. Ce café littéraire-brasserie propose sur plus de 600 mètres carrés différents espaces : une brasserie où l’on peut manger de midi à minuit, un bar à vin bio, un salon de thé 100% bio, une salle de concert, de lecture, des expositions photos, peintures... des espaces de conférence, de débats, de rencontres littéraires, et de théâtre avec 100 places assises.

Dans une ambiance calme, vous pourrez consulter la presse, des livres et BD, (et certains à la vente : une vingtaine d’ouvrages représentant la sélection du mois, en liaison avec les librairies Sauramps), jouer à des jeux de société, regardez des documentaires, courts métrages... sur un grand écran, Le Gazette Café, un véritable lieu pour créer des liens, est situé au 6, rue Levat, plein centre, entre gare SNCF et Comédie, il est ouvert du mardi au samedi de 11h à 1h.

Pour tout savoir sur le Gazette Café et ses animations, cliquez :http://www.gazettecafe.fr/

 

 

Source : http://www.voussaveztout.com

 

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2 février 2015 1 02 /02 /février /2015 17:21

 

Source : www.reporterre.net


 

Cinq questions, cinq réponses, pour comprendre les zones humides

Julie Lallouët-Geffroy (Reporterre)

lundi 2 février 2015

 

 

 

Le 2 février est la journée mondiale des zones humide. Mais qu’est-ce au juste qu’une zone humide ? Pourquoi défendre une zone marécageuse pleine de moustiques ? Cinq réponses pour comprendre.


- A quoi une zone humide ressemble-t-elle ?

Il s’agit d’un endroit boueux, marécageux où l’eau est reine et stagnante. Elle est la caractéristique principale du lieu. La faune et la flore y sont particulièrement développées et variées. Difficile d’être plus précis car il n’existe pas de définition claire.

Certaines zones sont facilement identifiables, comme les marais, l’eau stagnante est visible, la présence de roseaux ou de joncs est un bon indicateur. Mais parfois, c’est plus subtil, moins évident ; en fonction des saisons par exemple. La carte des zones humides, commandée par le ministère de l’Écologie, montre bien ce flou, elle parle de « milieux potentiellement humides ».

En 1971, la convention Ramsar tente de poser une définition large pour faire consensus : « Etendues de marais, de fagne, de tourbières ou d’eaux naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, où l’eau est stagnante ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d’eau marine dont la profondeur à marée basse n’excède pas six mètres. »

168 pays ont ratifié cette convention, répertoriant plus de 2 000 sites d’importance internationale. La France en compte 43, répartis sur 1,8 hectares soit 3 % du territoire.

La Journée mondiale des zones humides a lieu le 2 février, date anniversaire de la signature de cette convention.

Une zone humide peut prendre des formes multiples, d’autant plus que sa définition est floue, on pense aux marais en Camargue, les landes en Gascogne et bien sûr les prairies et forêts humides de Notre-Dame-des-Landes.


- Zone humide de Saint-Pierre D’Irube, près de Bayonne -

- À quoi les zones humides servent-elles ?

Elles ont un rôle d’éponge. Les zones humides ont la capacité de retenir l’eau, de la stocker et ainsi de limiter les crues et inondations. Les plantes qui la composent ont la capacité de filtrer l’eau ce qui se traduit par l’absorption d’une part de la pollution.

La biodiversité est par ailleurs une caractéristique de ces espaces où des écosystèmes complexes se développent. Ces zones sont souvent des espaces de frayères, soit de reproduction pour les poissons, au même titre que les îles protégées au large de la Bretagne pour la reproduction des oiseaux.

En revanche, du point de vue du développement des sociétés humaines, les zones humides sont difficiles à exploiter car chargées d’eau. Néanmoins, lorsque la technologie s’est suffisamment perfectionnée, l’homme a été en capacité de les convertir en champs de maïs, gourmand en eau ; ou de les assécher pour mettre en place de nouvelles infrastructures comme des routes, des parkings.

- Pourquoi y a-t-il de moins en moins de zones humides ?

Jean-Marc Michel, directeur général de l’aménagement au sein du ministère du développement durable écrit dans un rapport que « près de 67 % des zones humides métropolitaines ont disparu depuis le début du XXe siècle dont la moitié entre 1960 et 1990. » Il explique que les années 1960 marquent l’époque des grands plans d’aménagements : drainage des marais, modification des cours d’eau, création de lagunes pour en faire des stations balnéaires en Laugedoc-Roussillon.


- Défense de la zone humide du Testet -

C’est aussi l’époque de la révolution agricole avec « Il faut nourrir la France » comme mot d’ordre : mécanisation, arrivée des produits phytosanitaires, modification des paysages avec l’abattage des haies. Le paysage français change, mais les nouvelles technologies ne compensent pas le rôle de la nature.

- Quel sont les conséquences de la disparition des zones humides ?

Dans un rapport de 2009, l’agence de l’eau Loire-Bretagne explique les conséquences de la disparition des zones humides : baisse de la capacité de rétention d’eau lors des crues, « l’augmentation de la fréquence des inondations semble, dans une certaine mesure, en corrélation avec la disparition des zones humides », « la perte de la fonction de filtre accentue les pollutions » ; mais aussi l’impact sur la faune et la flore qui n’a plus d’abris, de nourriture et d’espaces de reproduction...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : www.reporterre.net

 

 

 

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2 février 2015 1 02 /02 /février /2015 16:38

 

Reçu par mail

 

 

Pour information :

 

 

* "Repenser la question du fascisme dans les conditions actuelles après Charlie", entretien avec l'Université Populaire de Toulouse, 28 janvier 2015, http://universitepopulairetoulouse.fr/spip.php?article352

A l'occasion d'une conférence-débat avec Jean-Christophe Sellin (membre du Bureau national du Parti de Gauche et tête de liste aux élections municipales de 2014 à Toulouse pour la liste Place au Peuple) autour du livre Les années 30 reviennent et la gauche est dans le brouillard, organisée par l’Université Populaire de Toulouse le 29 janvier 2015

 

* "Critiquer les religions, combattre l'islamophobie", texte initialement publié dans le n° spécial Charlie du Monde Libertaire, repris sur Mediapart, 2 février 2015, http://blogs.mediapart.fr/blog/philippe-corcuff/020215/critiquer-les-religions-combattre-l-islamophobie

L'ensemble du n° spécial Charlie du Monde libertaire (avec des dessins de Cabu, Charb, Luz, Reiser et un inédit de Tardi) est téléchargeable librement à partir de ce texte dans Mediapart

 

* . Entretien  avec Laure Adler sur France Culture, émission Hors-champs, 20 janvier 2015, à écouter sur :  http://www.franceculture.fr/emission-hors-champs-philippe-corcuff-2015-01-20  (Charlie Hebdo et après Charlie...l'avenir d'une pensée critique et émancipatrice : Maurice Merleau-Ponty, Hannah Arendt, Emmanuel Levinas, Pierre Bourdieu...de la mélancolie joyeuse...)

 

 

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29 janvier 2015 4 29 /01 /janvier /2015 21:35

 

Source : blogs.mediapart.fr/edition/eurojournaliste

 

 

Le mouvement xénophobe «Pegida» implose
Kathrin Oertel - un regard qui fait froid dans le dos.Kathrin Oertel - un regard qui fait froid dans le dos.

La politique est un métier difficile qui ne peut pas se limiter à des slogans xénophobes. La «Pegida» vient de s’en rendre compe. En implosant.

(KL) – Ils étaient partis pour sauver l’Occident de l’Islam. Pour ce faire, ils avaient choisi un Bundesland où il est franchement difficile de rencontrer des musulmans, car il y en a pas. En Saxe où la communauté musulmane compte pour environ 0,1% de la population, la «Pegida» avait choisi le thème de l'Islam uniquement pour mieux cacher ses objectifs xénophobes et en partie, néonazis. Mais si la «Pegida» avait réussi à mobiliser quelques milliers d’imbéciles pour ses manifestations, elle a surtout réussi à réveiller le mouvement antifasciste. Face au vent, les fondateurs de la «Pegida» ont jeté l’éponge. Tant mieux.

Le premier à raccrocher, était Lutz Bachmann, personnage étrange, qui avait évité une peine de prison en se réfugiant en Afrique du Sud. Mais au lieu d’y apprendre que le statut de réfugié mérite d’être protégé, il y a développé une sorte de xénophobie des plus abjectes. De retour en Allemagne, il avait trouvé des gens qui partagaient ses idées – un mélange explosif d’anciens fonctionnaires de groupes et de groupuscules néonazis qui, face à la critique publique, niait en bloc leur passé néofaciste. Sans pour autant réussir à tromper les Allemands.

Après la publication d’un «selfie» montrant Bachmann déguisé en Hitler, le fondateur de la «Pegida» était obligé d'abdiquer. Pendant quelques jours, c’est un autre personnage qui s’est présenté en première ligne de la «Pegida» – Kathrin Oertel, qui faisait penser à tout ce que l’Allemagne a offert de moche au monde pendant le siècle dernier. Mais elle aussi était visiblement dépassé par la «Pegida» et le rejet massif que ce «mouvement» a recolté partout en Allemagne, sauf à Dresde, fief des ultranationalistes allemands. Chic – elle aussi a jeté l’éponge, en entrainant dans son sillage, trois autres membres fondateurs de la «Pegida» qui du coup, se trouve sans direction. A croire que le néofacisme ne fait pas recette en Allemagne.

La tentative de Lutz Bachmann de revenir au premier plan, en expliquant que sa collègue Oertel avait démissionné parce qu’elle aurait reçu des menaces de mort émanant du mouvement antifasciste, n’est qu’une faible tentative d’auto-stigmatisation. Qui intéresse les Allemands autant que l’annonce d’Oertel de vouloir créer un «mouvement pour la démocratie directe en Europe». Mouais. Ils pourront appeler leurs clubs comme ils le voudront, les Allemands ne sont pas dupes. Les Bachmann, Oertel & Cie. ont montré que les ultranationalistes en Allemagne ne sont pas assez forts pour déclencher un mouvement comme dans les années 30 en Allemagne.

Les Allemands, eux, ont apporté la preuve qu’ils ne risquent pas de retomber dans les travers de l’histoire. 70 ans après la fin de la IIe Guerre Mondiale, ils ont montré au monde entier que le fascisme allemand n'a plus aucune chance de menacer la paix en Europe. Les Pegida auront été un élément fédérateur des antifascistes allemands qui eux, s’en trouvent confirmés et renforcés. Quelle bonne nouvelle pour finir la semaine !

Crédit photo : www.blu-news.org / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 2.0

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/edition/eurojournaliste

 

 


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27 janvier 2015 2 27 /01 /janvier /2015 16:49

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

Arrêt sur images 27/01/2015 à 10h36
Abdallah d’Arabie, al-Sissi, et autres amis Charlie
Arretsurimages.net"
Daniel Schneidermann | Fondateur d'@rrêt sur images
 

François Hollande et le nouveau roi Salmane, à Riyad le 24 janvier 2015 (YOAN VALAT/POOL/AFP)

Avec cette affaire grecque, je m’aperçois que j’ai perdu de vue, quelques heures, mes amis Charlie. Ils vont bien, je vous rassure. Quelques-uns étaient rassemblés, le week-end dernier, à Riyad, charmante localité d’Arabie saoudite, pour présenter leurs condoléances après la mort d’un vrai pote Charlie, le roi Abdallah.

Comme tous les défunts, il était évidemment pourri de qualités, dont une éminente : c’était un discret soutien de la cause des femmes, comme l’a affirmé une connaisseuse, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde.

Le roi Abdallah, 91 ans, était-il vraiment Charlie ? Il n’avait envoyé à la manif parisienne du 11 janvier que le numéro deux du ministère des Affaires étrangères saoudien. C’est mieux que rien. Mais on peut accepter ses excuses, pour cause de problème de santé.

Vraiment rigolos, ces Saoudiens

A Riyad, réunis dans l’affliction, il y avait les vrais amis. Il y avait Obama. Il y avait aussi François Hollande, qui ne sait plus où donner de la tête. Il n’a cessé d’être Charlie que pour devenir Syriza. Bref, tout va si vite qu’il n’est pas sûr qu’il ait eu le temps, à Riyad, avec ses amis, d’évoquer le cas d’un autre ami Charlie.

C’est un blogueur. Il s’appelle Raif Badawi. Oui, il y a des blogueurs, en Arabie saoudite. Sans doute pas énormément. Car c’est une activité à risque. Badawi vient d’être condamné à une peine de 1 000 coups de fouet, pour différentes raisons, dont une blague assez salée : il a remercié les autorités religieuses du pays d’interdire la célébration de la Saint-Valentin, permettant ainsi à tous les Saoudiens d’accéder au paradis. Pas très responsable, cette blague. Surtout qu’il subsiste, dans les tribunaux saoudiens, quelques non-Charlie.

Ils l’ont condamné, donc, à 1 000 coups de fouet. Mais pour plus d’efficacité, par paquets de cinquante. Après chaque paquet, on attend que le dos du condamné ait cicatrisé, et puis on reprend. Le dos du blogueur cicatrisant plus lentement que prévu, la peine est pour l’instant suspendue. Ils sont vraiment rigolos, ces Saoudiens. On comprend que Hollande, qui apprécie l’humour, se soit précipité là-bas.

Pas en reste, les Egyptiens !

A Riyad, Hollande a aussi croisé un autre ami : le chef de l’Etat égyptien, le maréchal al-Sissi. Ils se sont entretenus trois quarts d’heure. Souvenirs souvenirs : quatre ans déjà, depuis le Printemps arabe, qui a fait passer l’Egypte de l’ombre de la dictature, à la lumière de la démocratie, un pays où il fait bon vivre, où on respire mieux. Ce qui n’interdit pas de respecter les convenances.


François Hollande et Abdel Fattah al-Sissi, à Riyad le 24 janvier 2015 (YOAN VALAT/POOL/AFP)

Dans sa grande sagesse, et pour observer le deuil de circonstance après la mort du roi Abdallah, le maréchal al-Sissi a fait interdire en Egypte toutes les manifestations commémorant la révolution. Les Egyptiens ont bien compris. Sauf quelques-uns, qui se sont obstinés à vouloir manifester dimanche. Bilan : douze morts. Presque tous des Frères musulmans.

Je dis presque tous, car il y a aussi le cas de Salma el-Sabbagh, dirigeante d’un petit parti de gauche laïc, qui avait décidé de manifester la veille, justement pour ne pas défiler avec les Frères. L’idée était d’aller fleurir la place Tahrir.

Publié initialement sur
Arretsurimages.net

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16 janvier 2015 5 16 /01 /janvier /2015 16:56

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

Tribune 16/01/2015 à 11h55
Peut-on représenter le prophète Mahomet ?

Erick Cakpo, historien des religions

 
Tribune

Après l’attentat perpétré le 7 janvier, dans sa une du 14 janvier, le magazine satirique Charlie Hebdo publie un dessin du prophète Mahomet qui heurte la sensibilité religieuse de certains musulmans.

 

 

 


Une de Charlie Hebdo le 14 janvier 2015 

L’Iran qualifie l’acte d’« insultant », estimant que ce dessin « porte atteinte aux sentiments des musulmans ». Al-Azhar, principale autorité de l’islam sunnite basée en Egypte, a pour sa part estimé que cette publication est de nature à « attiser la haine » et appelle les musulmans à « ignorer » le numéro.

Des représentations du prophète dans le monde musulman

Making of

On finit par ne plus savoir : l’islam interdit-il vraiment les représentations du prophète ? D’où provient cette sensibilité si forte à ces images ? Nous avons reçu ce texte d’Erick Cakpo, qui enseigne l’histoire des religions à l’université de Lorraine. Une mise au point que nous publions volontiers.

Xavier de La Porte

Et pourtant, les musulmans eux-mêmes ont souvent représenté le prophète. On constate par exemple en Iran de nombreuses représentations en vente libre dans les souks. Il s’agit des portraits sur papier montrant Mahomet jeune coiffé d’un turban. C’est surtout chez les chiites, la seconde branche la plus importante de l’islam, que les images du prophète sont les plus répandues. Dans la plupart de ces représentations, Muhammad est généralement figuré avec des traits visibles ou bien avec un ovale vide ou encore une plage blanche en lieu et place du visage (procédé d’évitement de la figure qui se retrouve dans l’art juif).


Muhammad au visage voilé ; l’ange Gabriel se tient derrière lui. Miniature extraite de la version illustrée de la chronique Zubdet el-tevarikh réalisée au XVIe siècle pour le sultan ottoman Murad III (détail) (Istanbul, Musée des arts turcs et islamiques)

S’il existe des représentations du prophète même dans les milieux musulmans, pourquoi les dessins de Charlie Hebdo continuent-ils de choquer ?

Une interdiction non inscrite dans le Coran

L’islam se réclame d’une religion sans images. Mais contrairement à ce qu’on laisse croire, le Coran ne contient aucune condamnation formelle des représentations. C’est certainement pour cette raison que les chiites n’ont aucun scrupule à le faire.

L’interdiction générale de représenter les vivants est imposée après la mort de Mahomet, certainement dans le but de lutter contre l’idolâtrie. Il ne faut pas oublier que l’islam est né dans un contexte païen et que le retour vers le polythéisme constitue une hantise dans les premiers siècles de son développement.

De ce fait, les hadith, qui sont des textes rapportant les actes ou propos du prophète, vont servir de base pour instaurer la règle de la non-représentation du vivant. Par exemple, un passage du hadith avertit qu’au dernier jour, celui de la Résurrection et du Jugement dernier, celui qui se sera risqué à représenter des êtres vivants sera sommé par Dieu d’insuffler la vie à ces formes ; et comme il se mon­trera bien sûr incapable de relever le défi, il sera, pour l’éternité sans doute, la risée universelle.

Ainsi, très vite, la fabrication d’images fut considérée comme l’une des fautes les plus graves qui soit. Vers 695, sur les monnaies en usage dans le monde arabe, les portraits des souverains sont remplacés par des inscriptions à tendance abstraite. De même, en 721, le calife Yazid II (720-724) donne l’ordre d’enlever des bâtiments publics toute représentation d’être vivant, y compris à l’intérieur des églises. Mais au fil des siècles, et selon les espaces, l’interdit est de moins en moins respecté si bien qu’on assiste à des images de Mahomet dans les miniatures persanes et même sur des tapis.


Une miniature célèbre représentant Muhammad et les traits de son visage, extraite de l’ouvrage d’al-Bîrûnî, al-Âthâr al-bâqiya, Iran, XVIe siècle (Paris, BNF, manuscrits orientaux, Arabe 1489, fol. 5v)

De son vivant, le prophète a parfois montré l’exemple de la tolérance à exercer envers certaines images. On en veut pour preuve ce passage rapporté par l’éminent théologien, islamologue et universitaire qatari d’origine égyptienne Yûsuf Al-Qaradâwî :

« Dans la plus ancienne des chroniques consacrées à l’histoire de La Mecque qui nous soit parvenue, l’auteur [...] rapporte un fait d’une importance historique considérable [...]. Après l’entrée triomphale des troupes musulmanes dans La Mecque, le Prophète pénétra dans l’édifice cubique de la Kaaba, que lui et ses compagnons trou­vèrent couverte de peintures. Le Prophète donna l’ordre de les effacer à l’exception de l’une d’elles, exécutée sur un pilier, qui représentait Marie et Jésus. Un tel geste s’explique fort naturellement par le respect qui entoure Marie dans l’islam. Une sourate entière, qui porte son nom (sour. XIX) lui est consacrée dans le Coran. Jésus, l’avant-dernier prophète avant Muhammad, est lui-même l’objet d’une véritable vénération [...]. Mais le geste du Prophète démontre aussi que la présence d’une image figurative, fût-ce d’une icône de la “Vierge à l’Enfant”, n’avait rien de scandaleux à ses yeux5 . »

Une confusion de base

Alors pourquoi autant de tensions depuis l’affaire des caricatures de Mahomet (septembre 2005) à laquelle a pris part Charlie Hebdo ?

Il y a une confusion qu’il faut relever. Pour beaucoup de musulmans, surtout les sunnites (la branche la plus importante), chez qui la règle de non-représentation des êtres est plus respectée, c’est la simple représentation du prophète qui pose problème. « On n’a pas le droit de représenter le prophète », a t-on souvent entendu. Ce qui veut dire que les représentations non satiriques mêmes posent problème et sont considérées par certaines personnes de confession musulmane comme un blasphème.

Aux yeux des musulmans, le prophète bénéficie d’un caractère sacré si bien qu’une atteinte à son image est jugée irrévérencieuse. Dans ce cas, protester de manière légale contre les représentations du prophète à caractère outrageux est légitime au nom de la liberté de conscience. Mais dans les cas de représentations non caustiques de Mahomet comme cela semble le cas avec la dernière une de Charlie Hebdo, pourquoi autant de remous ? Dans quelle mesure les préceptes de l’islam s’appliquent-ils à d’autres qui ne se réclament pas de cette confession ?

Dans les milieux musulmans français, beaucoup de voix se lèvent actuellement pour appeler à la distinction de ce qui relève des règles religieuses qui ne concernent que les adeptes et ce qui appartient au droit français. Dans l’affaire des caricatures du prophète, il est légitime de se demander jusqu’où peut aller la liberté d’expression. Sauf en Alsace et Moselle, le droit français ne reconnaît pas le blasphème, mais il condamne l’incitation à la haine ou à la violence en raison de la religion (art. 24), ou la diffamation contre un groupe religieux (art. 32). Où est la limite ?

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 


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13 janvier 2015 2 13 /01 /janvier /2015 16:45

 

Source : www.leparisien.fr

 

 

Charlie Hebdo : l'étonnante reconversion de l'«émir» des frères Kouachi
 
 

Farid Benyettou, l'ex-«émir» de la «filière des Buttes-Chaumont» qui a formé les frères Kouachi à l'idéologie radicale, occupe depuis le mois de décembre un poste d'infirmier stagiaire dans le service des urgences de l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière.

 

Adrien Cadorel | 11 Janv. 2015, 06h57 | MAJ : 12 Janv. 2015, 10h04
 
 
 
    
Info le Parisien  
Farid Benyettou a été condamné à six ans de prison en 2008 dans le cadre du démantèlement de la « filière des Buttes-Chaumont ». Sorti en 2011, il est aujourd’hui infirmier stagiaire à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, depuis le mois de décembre. Farid Benyettou a été condamné à six ans de prison en 2008 dans le cadre du démantèlement de la « filière des Buttes-Chaumont ». Sorti en 2011, il est aujourd’hui infirmier stagiaire à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, depuis le mois de décembre.
DR.)

Dans un contexte d'immense émotion, l'information semble improbable. Farid Benyettou, l'ex-« émir » de la « filière des Buttes-Chaumont » qui a formé les frères Kouachi à l'idéologie radicale, occupe depuis le mois de décembre un poste d'infirmier stagiaire dans le service des urgences de l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière, l'un des principaux centres hospitaliers ayant accueilli les victimes de la fusillade de « Charlie Hebdo ».



Né le 10 mai 1981, Farid Benyettou était une figure du XIXe arrondissement et de la mosquée Adda'wa, où il n'hésitait pas à prêcher des paroles radicales aux fidèles.

Suivi par les renseignements généraux dès le début des années 2000, qui notent sa proximité avec le Groupe salafiste pour la prédication du combat (GSPC), il rencontre les frères Kouachi, à qui il inculque sa vision radicale de la religion, et en fait ses premiers élèves, qu'il souhaite envoyer mener le jihad en Irak.

 
 


En 2005, il est mis en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste », avant d'être condamné -- en compagnie de Chérif Kouachi -- à six ans de prison en 2008 par le tribunal de Paris. Entendu par les enquêteurs dès 2005 sur sa relation avec Farid Benyettou, Chérif Kouachi déclarait devant les enquêteurs à propos des cours coraniques dispensés par son mentor : « J'avais vraiment l'impression que la vérité était là, devant moi, quand il parlait. »

Sorti de prison en 2011, Farid Benyettou s'inscrit l'année suivante à une formation au sein de l'Institut de formation des soins infirmiers (Ifsi), avant d'intégrer au début du mois dernier le service des urgences de la Pitié-Salpêtrière. Selon plusieurs témoignages recueillis auprès du corps médical qui décrivent « un élève studieux et discret », les événements tragiques de ces derniers jours ont crispé le climat dans l'hôpital. A tel point que l'encadrement a pris soin de retirer mercredi soir le planning du service où apparaissait l'emploi du temps du jeune homme, avant de le réafficher en ayant préalablement rayé au crayon ses journées de travail.

Selon ce document, Farid Benyettou ne travaillait pas mercredi et jeudi, mais devait être présent la nuit de vendredi à samedi ainsi que les deux suivantes. « On ne peut pas imaginer que cet homme -- que tout le monde présente comme l'un des principaux mentors des frères Kouachi -- aurait pu accueillir les victimes de ses anciens protégés », s'émeut un médecin de l'hôpital. « Et je ne peux imaginer que la direction de l'AP-HP et celle de l'hôpital n'étaient pas au courant de son passé », ajoute-t-il.

Mais, parmi ses collègues, la stupéfaction est immense, eux qui mettent en avant le règlement lié à l'emploi d'infirmier. « Selon les règles du ministère de la Santé, on ne peut pas prétendre à un poste d'infirmier avec un casier judiciaire chargé. On nous demande d'en produire un vierge dès la première année », s'insurge un collègue d'un service voisin. Selon nos informations, Benyettou ne l'aurait pas produit. Si le ministère de la Santé, qui émet pourtant les diplômes, s'est dessaisi de nos questions en nous dirigeant vers l'AP-HP, la direction des hôpitaux de Paris se justifie. « La situation de cet élève infirmier est régulière et elle est connue, depuis le début de sa scolarité, tant par la direction de l'école où il est scolarisé que des services de police », précise l'AP-HP.

« Les événements dramatiques de cette semaine nous ont conduits à prendre l'initiative, en liaison avec les autorités de police, de ne pas le maintenir dans le planning du service où il terminait son dernier stage. Une condamnation portée sur le casier judiciaire interdit d'être recruté sur un emploi public, mais sans interdire de passer le diplôme, qui peut être valorisé dans d'autres lieux d'exercice que les établissements publics. »

  
Farid Benyettou a été condamné à six ans de prison en 2008 dans le cadre du démantèlement de la « filière des Buttes-Chaumont ». Sorti en 2011, il est aujourd’hui infirmier stagiaire à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, depuis le mois de décembre.
DR.)

VIDEO. Cherif Kouachi décrit comme «une personne discrète»

 

 

VIDEO. Charlie Hebdo : la famille d'Ahmed Merabet scandalisée par la Une du Point

 

 

Source : www.leparisien.fr

 

 

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8 janvier 2015 4 08 /01 /janvier /2015 18:08

 

 

Source : www.huffingtonpost.fr

 

 Témoignage de Laurent Lége, survivant de l'attentat contre Charlie Hebdo, dans l'émission "Envoyé spécial" sur France 2:

 

 

 

 

Source : www.lemonde.fr

 

 

Attentat à « Charlie Hebdo » : « Vous allez payer car vous avez insulté le Prophète »

LE MONDE | 08.01.2015 à 12h59 • Mis à jour le 08.01.2015 à 18h53 | Par Soren Seelow

 
 
Les bureaux de «  Charlie Hebdo  », après la tuerie, le 7 janvier.

Ils étaient tous là, ou presque. Comme tous les mercredis. Réunis entre chouquettes et croissants autour de la grande table ovale qui occupe toute la pièce pour la conférence de rédaction. Un rituel immuable depuis la création de Charlie Hebdo. A gauche, comme toujours, Charb, le directeur de la publication. Ce mercredi 7 janvier avaient pris place à ses côtés les dessinateurs Cabu, Wolinski, Tignous, Honoré et Riss, les rédacteurs Laurent Léger, Fabrice Nicolino et Philippe Lançon, l’économiste Bernard Maris ou encore les chroniqueuses Sigolène Vinson et Elsa Cayat.

La conférence de rédaction débute généralement à 10 h 30 et s’anime rapidement à la faveur de quelques blagues grivoises. Un seul sujet tabou : la machine à café, parce qu’elle ne marche jamais. Aux murs sont épinglées quelques « unes » mythiques du journal satirique : celle de « Charia Hebdo », qui avait motivé l’incendie criminel ayant ravagé les anciens locaux de l’hebdomadaire, en novembre 2011, une autre sur Marine Le Pen illustrée par une « merde » sur le drapeau français, une caricature du pape dénonçant la pédophilie dans l’Eglise, un Sarkozy grimaçant…

La réunion se finit quand elle finit, c’est-à-dire quand il est l’heure d’aller casser la croûte aux Petites Canailles, un bistrot de la rue Amelot, dans le 11e arrondissement de Paris.

L’un des agresseurs a dit : « Charb ? » Il a tiré sur Charb. Puis ils ont égrené tous les noms, et ont fait feu en rafales

Ce mercredi 7 janvier, personne n’est allé déjeuner aux Petites Canailles. La réunion avait commencé depuis une heure quand deux hommes cagoulés ont fait irruption au milieu des crayons, faisant taire le joyeux brouhaha. Ils étaient armés de fusils d’assaut. L’un des agresseurs a dit : « Charb ? ». Il a tiré sur Charb. Puis ils ont égrené les noms des membres de la rédaction, et ont fait feu en rafales. Selon les propos des rescapés, ils ont crié « Allahou akbar » et « Vous allez payer, car vous avez insulté le Prophète ». A Sigolène Vinson, ils ont dit, un canon sur la tempe : « Toi on te tuera pas, car on ne tue pas les femmes, mais tu liras le Coran. »

Lire les portraits des victimes : Charb, Cabu, Wolinski et les autres, assassinés dans leur rédaction

Voeux prémonitoires

Sept rédacteurs et dessinateurs sont morts en quelques secondes : Cabu, Charb, Tignous, Wolinski, Bernard Maris, Honoré et Elsa Cayat, une femme pourtant, psychanalyste et chroniqueuse. Mustapha Ourrad, le correcteur kabyle qui avait obtenu la nationalité française un mois plus tôt, a lui aussi été assassiné. Franck Brinsolaro, un des deux policiers qui assure la sécurité de Charb en permanence depuis l’attentat de novembre 2011, a également perdu la vie, tout comme Michel Renaud, ancien directeur de cabinet du maire de Clermont-Ferrand, invité par la rédaction.

A 11 h 28, quelques minutes avant la tuerie, l’hebdomadaire avait publié des vœux prémonitoires sur Twitter : un dessin d’Honoré représentant Al-Baghdadi, le leader de Daesh, assorti de ce commentaire « Et surtout la santé ! ». 

Voir l'image sur Twitter

Meilleurs vœux, au fait.

Le dessinateur est mort peu après avec ses amis sur la grande table ovale, là même où les caricaturistes grattent leurs derniers dessins les jours de bouclage, où se font les derniers choix de « une » dans une effusion de bons mots et de blagues de mauvais goût. « Ils ont tiré sur Wolinski, Cabu… ça a duré cinq minutes… Je m’étais réfugiée sous un bureau… », raconte à L’Humanité une survivante, la dessinatrice Corinne Rey, dite « Coco ».

Dans leur folie meurtrière, les agresseurs avaient abattu quelques minutes plus tôt un des agents d’entretien de l’immeuble au rez-de-chaussée, Frédéric Boisseau, 42 ans. Un deuxième policier blessé, Ahmed Merabet, sera achevé d’une balle dans la tête en tentant d’arrêter la fuite des tueurs, un peu plus tard, boulevard Richard-Lenoir.

« Carnage indescriptible »

Douze morts en tout, onze blessés, dont quatre grièvement. Philippe Lançon est grièvement touché au visage, Riss à l’épaule, Fabrice Nicolino à la jambe. Simon Fieschi, le jeune webmaster chargé de gérer le « shit storm », le tombereau d’insultes adressées à la rédaction depuis des années sur les réseaux sociaux et par téléphone, est le plus gravement atteint. Un « carnage indescriptible », selon un témoin ayant pu pénétrer dans la rédaction après la tuerie.

Arrivés sur place peu après la tuerie, les urgentistes ont décrit « des blessures de guerre ». « Je n’ai jamais vu ça de ma carrière », témoigne l’un d’eux : « On est rodé (…) mais pas pour le vivre dans la réalité. » « Le jour le plus noir de l’histoire de la presse française », a résumé à chaud, au pied de l’immeuble, Christophe Deloire, directeur de Reporters sans frontières. Il s’agit également de l’attentat le plus sanglant ayant frappé la France depuis un demi-siècle.

La brume était tenace et froide ce mercredi matin quand deux hommes vêtus de noir et de gilets pare-balles se sont présentés, visiblement mal renseignés, devant le numéro 6 de la rue Nicolas-Appert, à deux portes des locaux de Charlie Hebdo. Ils ont profité de l’arrivée de la postière, qui passait remettre un pli recommandé, pour s’engouffrer dans la porte, raconte l’employée d’une entreprise audiovisuelle, l’Atelier des archives, installée dans l’immeuble. Ils ont fait asseoir la postière et un employé qui venait récupérer le pli.

Lire notre reportage : Devant « Charlie Hebdo » : « On a cru entendre des pétards, c'était des rafales »

Innombrables menaces de mort

Puis ils ont demandé : « C’est où, Charlie Hebdo ? ». Ils ont tiré une balle, qui a traversé la porte vitrée d’un bureau. L’employée qui s’y trouvait est sortie dans le couloir et a échangé un bref regard avec les deux hommes.

Prenant conscience qu’ils s’étaient trompés d’immeuble, les assaillants sont ressortis et se sont présentés devant le numéro 10, l’adresse où a trouvé refuge le journal satirique depuis le 1er juillet 2014. Parfaitement au fait du jour et de l’heure de la conférence de rédaction de « Charlie », les agresseurs sont en revanche moins renseignés sur la localisation exacte de leurs bureaux.

Selon le parquet de Paris, ils croisent dans le hall de l’immeuble deux agents d’entretien, leur demandent où se trouve Charlie Hebdo, avant d’en abattre un. Ils prennent ensuite en otage Coco, qui se trouve dans l’escalier. La dessinatrice tente de les égarer en les emmenant au troisième étage, alors que la rédaction se trouve au deuxième.

Depuis l’attentat de 2011 et les innombrables menaces de mort reçues par sa rédaction, Charlie Hebdo a rendu ses locaux indétectables. La fière affiche qui ornait l’entrée de ses anciens locaux incendiés dans le 20e arrondissement, désormais couverte de suie, a été rapatriée à l’intérieur de la rédaction. Sur la porte du palier qui donne accès au journal, nulle mention du titre de la publication. « Les Éditions rotatives », est-il écrit. Les voisins, eux, ont été priés de ne pas ébruiter la présence du sulfureux périodique dans l’immeuble.

« On a tué “Charlie Hebdo” ! »

Selon un employé de Premières lignes, une société de production installée en face de la rédaction de « Charlie », au deuxième étage, les deux assaillants égarés au troisième auraient menacé de leur arme un locataire croisé dans le couloir. Avec toujours cette même question, obsédante : « Où est Charlie ? ». Ils finiront par trouver la bonne porte. C’est la dessinatrice Coco qui, sous la menace d’une arme, devra accepter de taper le code de la porte blindée qui donne accès à la rédaction.

Après la tuerie, les deux agresseurs s’engouffrent dans une Citroën C3 noire garée en bas du journal. Un témoin a affirmé aux enquêteurs avoir aperçu un complice, arrivé sur la scène de crime à bord de la C3 mais reparti à scooter. Les deux tireurs, eux, s’enfuient par l’Allée verte, une ruelle. Ils y rencontrent une première patrouille de police à VTT. Des coups de feu sont échangés, qui ne feront aucun blessé.

Une vidéo tournée par des employés de Premières lignes, réfugiés sur le toit de l’immeuble après les premiers coups de feu, a enregistré la fusillade. On croit entendre « Allahou akbar » entre deux rafales. Les assaillants croisent ensuite la route d’un véhicule de police rue Pelée. S’ensuit une deuxième salve de tirs. Une autre vidéo amateur permet d’entendre distinctement les cris : « On a vengé le prophète Mohamed, on a tué Charlie Hebdo ! »

C’est boulevard Richard-Lenoir que leur furieuse échappée fera sa dernière victime. La scène a été capturée par une troisième vidéo amateur. On y voit deux hommes équipés de gilets pare-balles et armés de fusils d’assaut sortir d’une Citroën noire et courir en direction d’un policier tombé au sol, sans doute touché par un tir. « Tu veux nous tuer ? demande l’un des tireurs. – Nan, c’est bon chef », répond le policier à terre. L’homme cagoulé passe devant lui et l’abat d’une balle dans la tête, au fusil d’assaut, sans même freiner sa course. La victime, Ahmed Merabet, 42 ans, était gardien de la paix au commissariat du 11e arrondissement.

Les deux tueurs retournent ensuite à leur véhicule, calmement, sans aucun signe de panique, comme des hommes entraînés au combat. La scène ressemble à un entraînement pour commando. L’un s’assoit au volant, l’autre prend le temps de ramasser une basket tombée de la portière et prend place sur le siège passager.

Lire l’enquête : La traque d’une fratrie de djihadistes

« J’ai cru à des pétards »

Lorenzo (qui a souhaité garder l’anonymat) habite boulevard Richard-Lenoir. Sa fenêtre donne sur la scène où le policier a été abattu. Il raconte au Monde : « Vers 11 h 30, j’ai entendu des coups de feu. J’ai cru à des pétards, je me suis approché de la fenêtre. Il y avait plein de policiers rassemblés au milieu du boulevard, mais aussi des gens à vélo qui passaient. C’était un matin normal », se remémore le jeune homme.

Il poursuit : « Sur la droite, j’ai vu une voiture de couleur sombre arrêtée en plein milieu de la rue. Deux hommes vêtus de noir en sont sortis, avec des cagoules, armés de fusils noirs. Un policier a tiré dans leur direction. Les deux hommes tiraient aussi. Le policier a été touché et est tombé en poussant un cri. Il a tenté de s’enfuir mais est tombé face contre terre. Les agresseurs ont couru vers lui. L’un est arrivé à sa hauteur et lui a tiré une balle dans la tête. Puis ils sont remontés dans la voiture ».

Le dessinateur Willem a pris connaissance de la tragédie dans un train. Son allergie aux conférences de rédaction lui a sauvé la vie

La Citroën fonce alors vers le nord de Paris. Place du Colonel-Fabien, elle percute violemment la conductrice d’un Touran Volkswagen. Ses deux occupants finiront par abandonner précipitamment leur véhicule après s’être encastrés dans des poteaux au niveau de la rue de Meaux, dans le 19e arrondissement, oubliant à bord une pièce d’identité qui mènera à leur identification ainsi qu’un chargeur vide de kalachnikov et d’autres effets personnels. Ils braquent alors le conducteur d’une Clio, s’emparent de la voiture et reprennent leur fuite. Les policiers perdront leur trace porte de Pantin.

Mais trois suspects de la tuerie, Saïd Kouachi, 34 ans, son frère Chérif Kouachi, 32 ans, et Mourad Hamyd, 18 ans, sont rapidement identifiés. Des opérations du Raid et du GIPN étaient en cours à Reims et à Charleville-Mézières dans la nuit de mercredi 7 à jeudi 8 janvier. Un appel à témoin avec la photo des deux frères a été diffusé par la police. Le plus jeune des suspects, Mourad Hamyd, s’est présenté volontairement dans la nuit au commissariat de police de Charleville-Mézières, « pour s’expliquer », selon le parquet de Paris.

Ils étaient tous là ou presque, mercredi 7 janvier à la conférence de rédaction de Charlie Hebdo. Les rares absents portent aujourd’hui le deuil. Le dessinateur Willem a pris connaissance de la tragédie dans un train entre Lorient et Paris. Son allergie aux conférences de rédaction lui a sauvé la vie. La journaliste Zineb était, elle, en vacances au Maroc, son pays d’origine. « Les rescapés comme moi ne le sont que par un concours de circonstances, raconte-t-elle par téléphone au Monde. Je n’arrive pas encore à réaliser que nous ne verrons plus jamais Charb, Cabu, Tignous et les autres… Presque tous les dessinateurs sont morts. Comment allons-nous faire ? »

Suivre les dernières informations en direct sur LeMonde.fr : Après l'attentat contre « Charlie Hebdo », la France à l'heure du recueillement

Une manifestation en hommage aux victimes à Paris.
Source : www.lemonde.fr

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