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22 octobre 2011 6 22 /10 /octobre /2011 22:30

 

Mesure de la radioactivité.  
Mesure de la radioactivité.© DB

Journée la plus importante du voyage : celle à Fukushima. Marquée par 2 fils rouges : la crédibilité des mesures d'une part, l'obsession de la contamination de l'alimentation d'autre part.

 

Après 2 heures de voyage en train, arrivée à la gare de Fukushima. Déjà, pendant les dernières minutes du voyage, le compteur geiger commence à s'agiter. Nous nous répartissons les dosimètres qui nous permettront au retour, via l'IRSN, de mesurer l'exposition de chacun d'entre nous. La surprise est que cette ville de 300.000 habitants (l'équivalent d'une grosse ville moyenne en France) semble vivre totalement normalement: activités économiques, commerces, passants. La radioactivité semble sans impact... mais elle n'est qu'invisible. Sur le parvis même de la gare, on mesure selon les endroits une radioactivité de 10 à 20 fois supérieure à la normale, et même 40 fois supérieure dans un petit morceau de pelouse en pied d'arbre ! Le poison est bien là, partout présent, mais la vie semble vouloir suivre son cours tant bien que mal.

Première étape : la visite du CRMS, le centre indépendant de mesure, l'équivalent de la CRIIRAD, locale qui tente de faire pièce à l'omerta qui règne ici.

 

 

 

Deuxième étape : rencontre avec le sous-préfet de Fukushima, qui, sous un langage diplomatique, reconnaît que la situation n'est toujours pas maîtrisée. Mais il cherche aussi à faire passer le message que pour la survie économique de la région, il faut que ses produits puissent se vendre à l'extérieur, notamment ses produits alimentaires, pour peu que les tests de contamination se révèlent négatifs... du moins en deça de la norme très élevée de 500 becquerels / kilo.

Et c'est bien la question lancinante présente tout au long de ce voyage: que faire de la production agricole d'une région qui, il n'y a pas si longtemps, était encore l'un des greniers du Japon ? Dans la coopérative que nous visitons, on teste des échantillons des aliments vendus pour vérifier qu'ils ne sont «pas contaminés» et qu'ils sont bios par ailleurs. Et l'agriculteur bio que nous rencontrons ensuite nous explique ses efforts pour continuer de produire une alimentation la moins contaminée possible. Nous sommes à 50 km de la centrale, dans une région plutôt épargnée par le nuage radioactif du fait de la montagne, et pourtant la radioactivité y est nettement mesurable.

 

Une épicerie
Une épicerie© DB

Faut-il consommer ces produits malgré la radioactivité, et donc prendre des risques pour la santé des consommateurs? Ou faut-il les retirer de la consommation et vouer à la faillite les agriculteurs de la région et donc sa principale activité économique? Dilemme intenable! Après la catastrophe nucléaire, il n'y a plus que des mauvais choix!

C'est ce que nous confirme la poignante réunion avec l'association des mères (et un père) de Fukushima. Pendant près d'une heure trente, nous discutons. Et, surtout, nous écoutons les témoignages si tristes, et pourtant empreints de tant de dignité, de ces parents qui tentent tant bien que mal de sauver les enfants de Fukushima... Ils privilégient une alimentation qu'ils vont chercher à plusieurs dizaines de kilomètres, en dehors de la région (soulignant qu'ils ne font pas confiance aux aliments même certifiés non contaminés provenant de la région, tant la méfiance est maintenant la règle vis-à-vis des autorités). Plusieurs parents témoignent s'être même séparés de leurs propres enfants, envoyés au loin et pour une durée inconnue. Et malgré la dignité, toujours présente, on entend le déchirement vécu.

Pour les autres, qui les ont gardés auprès d'eux, l'inquiétude et la détresse sont omniprésentes. L'une notamment évoque la puberté de sa petite-fille au moment de la catastrophe, et les conséquences possibles pour son développement, et sa capacité future à pouvoir enfanter... Tous, en tous cas, racontent leurs efforts pour aider les autres enfants de la région: pour les éloigner du danger, au moins pendant quelques mois. Même si toute comparaison en la matière est difficile, je ne peux m'empêcher de penser aux «Justes» qui, pendant la dernière guerre mondiale, tentaient d'épargner le maximum d'enfants juifs en les éloignant de la zone occupée ou en les cachant... Eux aussi, à Fukushima, font preuve d'une force de caractère, d'un grand sens de solidarité et de courage, face à des pouvoirs publics qui entravent leurs efforts, tant ils tiennent à faire croire à un retour à la normale.

 

Avec les mères de Fukushima  
Avec les mères de Fukushima© DB

 

Tous soulignent l'attitude insupportable des autorités, l'absence d'information au lendemain des explosions, voire même le refus de toute évacuation, alors même qu'une habitante avait mesuré une radioactivité supérieure à 100 microsieverts/heure dans sa propre maison, niée par les autorités, mais confirmée quelques semaines plus tard par la CRIIRAD qui lui conseillera d'évacuer immédiatement. D'autres soulignent les refus de reporter la rentrée des classes (en avril) pour éviter aux enfants de sortir et d'être exposés aux radiations. Idem pour la demande d'éviter les activités sportives en plein air. D'autres encore racontent les pastilles d'iode conservées dans les mairies, que la Préfecture a refusé de faire distribuer suite à la catastrophe... Ils attirent notre attention sur la propagande en cours sur la baisse de la radioactivité : elle est semble-t-il réelle à 1 mètre du sol. Mais ce n'est que parce que celle-ci est rabattue vers le sol : à 0,5 mètres, comme au niveau du sol, elle continue de croître... au niveau où vivent et jouent les enfants.

 

L'angoisse nous étreint tous. Et même si nous nous prêtons de bonne grâce à la photo de famille, c'est le cœur noué et avec le sentiment d'une profonde révolte, d'une responsabilité plus forte encore d'aller raconter partout ce qui se passe à Fukushima, et l'envie de crier à tous ceux qui, en France notamment, proposent avec légèreté de poursuivre dans la voie du nucléaire, qu'ils viennent ici, à Fukushima, voir quelles en sont les vraies conséquences, et ensuite seulement d'en parler avec sérieux et responsabilité.

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20 octobre 2011 4 20 /10 /octobre /2011 12:24
| Par Michel de Pracontal

Le désastre de Fukushima aurait pu être évité, selon Bernard Bigot, administrateur général du CEA (Commissariat à l'énergie atomique). «Il était nécessaire d'injecter de l'eau de mer dans un délai de 6 à 12 heures [après le séisme] et je pense qu'il était physiquement possible d'éviter l'accident», a notamment déclaré Bernard Bigot, cité par le journal japonais Mainichi. Toujours selon Bigot, c'est seulement aujourd'hui que l'on dispose de données suffisantes sur le déroulement de l'événement pour savoir que la catastrophe était évitable.

Le séisme a touché la centrale de Fukushima le 11 mars à 14 h 46, heure locale, provoquant l'arrêt des réacteurs alors en fonction. Le tsunami a inondé l'installation moins d'une heure après, entraînant la perte de toutes les alimentations électriques et l'arrêt des systèmes de refroidissement. Le cœur d'au moins un des réacteurs aurait commencé à fondre dans les heures suivantes. Le refroidissement par injection d'eau de mer n'a commencé que le lendemain, 12 mars, alors que le cœur du réacteur n°1 était déjà très abîmé et que ceux des réacteurs 2 et 3 avaient probablement partiellemment fondu.

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19 octobre 2011 3 19 /10 /octobre /2011 13:00

Reportage | LEMONDE | 19.10.11 | 13h53   •  Mis à jour le 19.10.11 | 13h54

 
 

D'Iitate à Hirono Envoyé spécial - Vallées où se succèdent rizières et vergers, les alentours de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima sont une région connue pour ses cultures biologiques et son écotourisme. Mais entre Iitate, au nord, et Hirono, au sud - soit une bonne centaine de kilomètres -, beaucoup de villages et de hameaux sont désertés. Maisons fermées, étables vides, serres à l'abandon. La végétation gagne l'asphalte des routes de campagne. Parfois, on croise un chien errant.

Ces agglomérations fantômes sont situées dans un arc de cercle d'un rayon de 10 km autour de la zone évacuée - et toujours interdite d'accès - de 20 km autour de la centrale. Dans cette zone, les habitants n'étaient pas contraints de partir, mais ils devaient se calfeutrer chez eux et être prêts à évacuer. La moitié de la population (58 500 personnes) a préféré s'en aller. Début octobre, le gouvernement a annoncé qu'il n'y avait plus de danger et a levé les mesures de préparation à une évacuation d'urgence. Mais personne n'est revenu.

La plupart des habitants partis d'eux-mêmes ne font plus confiance aux annonces officielles. "Entre les informations des journaux, des télévisions, des sites Internet et les annonces gouvernementales, nous sommes perdus. On ne croit plus personne", dit un pompiste sur la nationale 399, qui passe en contrebas de l'agglomération d'Iitate. Dans cette petite ville de 6 000 habitants, les maisons et les magasins aux étagères encore garnies sont fermés.

Cinq familles sont restées, dont un couple d'octogénaires. "Nous sommes âgés. Alors il vaut mieux quitter ce monde dans un lieu que nous connaissons", dit l'homme, Yoshiaki Shoji. Les autres habitants sont la centaine de vieillards de la maison de retraite et le personnel qui s'en occupe. Dans les rues désertes, les feux continuent de régler une circulation inexistante, excepté de sporadiques patrouilles de voitures de police, gyrophare allumé.

Iitate est l'un des tristes exemples des errements de la délimitation des zones contaminées en cercles concentriques, sans tenir compte du relief et des microclimats. L'agglomération se trouve à l'extérieur du périmètre des 30 km, à une quarantaine de kilomètres au nord-est de la centrale. Mais, bien que des experts aient détecté un taux élevé de radiations au lendemain de l'explosion du 15 mars dans le bâtiment d'un réacteur, l'évacuation n'a été décidée qu'un mois plus tard, le 22 avril. Le ministère de l'éducation et des sciences vient de confirmer la présence de plutonium dans le sol.

Pour l'instant, le taux de radioactivité à Iitate s'élève à 0,93 microsieverts par heure (µSv/h), mais dans des localités voisines, comme Namie et Shimo Tsushima (situées dans le périmètre des 20 km), il atteint 7,1 µSv/h. A l'intérieur comme à l'extérieur des zones déclarées dangereuses, les niveaux de radioactivité varient considérablement.

Plus au sud, à Kawauchi, difficile d'accès par des routes serpentant à travers de petites montagnes boisées, à peine 10 % des 2 700 habitants sont restés. Dans la lugubre tombée du jour, seuls le poste de police et une maison sont éclairés.

Un jeune couple charge des affaires dans une voiture. Hideo Suzuki et sa femme sont revenus pour quelques heures. Ils vivent dans un logement provisoire dans la ville de Koriyama. Salarié d'une entreprise de construction, M. Suzuki est au chômage. "Revenir ? Rien n'a été fait pour décontaminer. Et on ne sait pas ce qu'on fera des enfants. Ici, l'avenir est bouché", dit-il.

Près de la salle des congrès Big Palette, à la périphérie de Koriyama, un millier d'évacués de Kawauchi logent dans des maisonnettes alignées. L'espace est réduit, mais elles sont bien aménagées, et certaines sont égayées de jardinières de fleurs.

Les habitants sont pessimistes : "On est fatigués d'attendre, explique un trentenaire, électricien dans une entreprise qui a fermé. Le gouvernement ne dit rien sur l'avenir. On est là. On attend. Le travail ? Pour chercher un emploi stable, il faut savoir ce que l'on fera dans six mois, dans un an." En raison du stress, le taux de mortalité parmi les personnes âgées de Kawauchi a doublé, dit un employé de la mairie.

Au sud de J-Village, complexe de détente des employés de Tokyo Electric Power (Tepco), exploitant de la centrale de Fukushima, Hirano (5 500 habitants) est aussi une ville fantôme. La population est partie dans la précipitation à la suite de l'explosion. Pendant des jours, les habitants ont dormi dans leur voiture dans les grandes villes voisines. Seules 200 personnes travaillant à la centrale sont restées.

"A la suite de l'annonce du gouvernement, on s'attendait à des retours. Mais personne n'est revenu", raconte Hirofuni Nakatsu, responsable de la planification à la mairie. Avec un collègue, il est le seul fonctionnaire à être resté dans le grand bâtiment vide de la mairie. "Pour que les habitants reviennent, poursuit-il, il faut donner des garanties que les risques sont écartés. Ils ont trop subi, le séisme, le tsunami puis la crise nucléaire. Ils seront difficiles à convaincre. Les jeunes, eux, ne reviendront pas."

A proximité de la centrale, Hirano pourrait devenir le point d'appui des entreprises de décontamination. "Mais il faudra des années avant que la ville renaisse. Si c'est possible", conclut l'employé de mairie.

A 5 km au nord, la nationale 6 est coupée par des barrages de police. C'est l'entrée dans la zone interdite des 20 km. En minibus, équipés de combinaisons de protection et de masques, les habitants peuvent y pénétrer par groupes pour quelques heures. Ils ramènent des images de désolation de ces villes abandonnées ; de leur maison envahie de toiles d'araignée et d'herbes folles ; çà et là, des cadavres d'animaux qui n'ont pas été déblayés. "Je ne veux plus y retourner, dit une vieille dame visiblement émue. Là-bas, la vie a été effacée."

Au nord de la zone où le gouvernement a mis fin à l'état de préparation à une évacuation rapide, la municipalité de Minamisoma, lasse d'attendre que Tokyo décide de commencer la décontamination, procède par elle-même.

Sur les 70 000 habitants, près de la moitié ont quitté la cité et pourraient ne jamais revenir. Cet exode se fait sentir dans les cinq hôpitaux de la ville : le personnel médical y est moitié moins nombreux, alors que nombre des patients a augmenté de près de 8 % depuis la catastrophe. Sans un sursaut local, Minamisoma risque de demeurer une ville blessée à jamais.

Philippe Pons

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9 octobre 2011 7 09 /10 /octobre /2011 12:51

LEMONDE.FR avec AFP | 09.10.11 | 12h54   •  Mis à jour le 09.10.11 | 13h06

 
 

 

Le réacteur n° 3 de la centrale de Fukushima, le 24 septembre.

Le réacteur n° 3 de la centrale de Fukushima, le 24 septembre.REUTERS/HO

La préfecture japonaise de Fukushima, où s'est déroulé en mars le plus grave accident nucléaire depuis Tchernobyl, a démarré dimanche 9 octobre des examens médicaux auprès de 360 000 enfants pour vérifier si les radiations ont entraîné des problèmes de thyroïde. Beaucoup de parents avaient réclamé ce type d'examens, s'appuyant sur l'exemple de Tchernobly en 1986.

Une étude non officielle, conduite par des docteurs dans la région de Fukushima, a raporté que dix de 130 enfants examinés avaient des problèmes hormonaux et souffraient de dysfonctionnement de la glande thyroide. Les médecins ont précisé qu'à ce stade, ils ne pouvaient pas établir de lien formel entre les problèmes de santé de ces dix enfants et l'accident de Fukushima. Ces enfants examinés devraient être régulièrement suivis tout au long de leur vie.

Le 11 mars, un séisme de magnitude 9 dans l'océan Pacifique a déclenché un tsunami géant qui a dévasté les côtes du nord-est du Japon, faisant quelque 20.000 morts et disparus, et provoquant un grave accident nucléaire à Fukushima Daiichi.

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2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 15:02

A 47 ans, il veut « aller le plus loin possible » de la centrale nucléaire de Tepco, près de laquelle il a vécu dix ans. Rencontre.

Simon, à la rédaction de Rue89 (Audrey Cerdan/Rue89).

Info signalée par un internauteUne riveraine de Rue89, Yasha, photographe japonaise installée à Paris, débarque à la rédaction pour nous présenter un « irradié » de passage à Paris et désireux de raconter la « vérité » sur Fukuhima. Au début, on se méfie forcément.

« Il a trois bras ? »

« Il va te contaminer ? »

Voici les réactions autour de moi quand j'annonce que je vais rencontrer un « rescapé » de cette catastrophe loin d'être terminée.

« Quand il y a eu l'explosion d'hydrogène, j'ai commencé à douter »

Simon ne parle pas français, un peu l'anglais, mais il sait utiliser le langage des images : comédien professionnel, il a tourné quelques vidéos, notamment cette rencontre qui avait dégénéré le 19 juillet entre les autorités et les citoyens.


Simon habite depuis dix ans à Fukushima City, située à 60 km de la centrale, bien au-delà du rayon d'exclusion – de 20 à 30 km. Il se souvient des suites du séisme du 11 mars :

« Le gouvernement a parlé de dégâts sur la centrale, mais pas de problèmes de radioactivité. Quand il y a eu l'explosion d'hydrogène le 14 mars, je me suis dit que c'était loin, mais je commençais à douter des autorités qui ne cessaient de dire que tout était sous contrôle. »

La prise de conscience de Simon, avec d'autres citoyens japonais, met plusieurs semaines à se formaliser. Début mai, il rejoint l'association Kodomo Fukushima, dont le but est de protéger les enfants des radiations. Seulement une centaine de membres seraient actifs, estime Simon – « C'est peu. »

« Des citoyens qui se sont formés à la radioactivité »

A 47 ans, Simon veut tourner la page Fukushima. Il laisse derrière lui son appartement, son travail, ses amis, et restera en France les trois mois que lui autorise son visa touriste. Puis, peut-être l'Angleterre, ou l'île d'Okinawa, « un peu les Antilles du Japon, le plus loin possible de Fukushima. »

Son idée ? Faire analyser la dose de radioactivité qu'il a reçue. Il a entendu parler du « Whole Body Counter » (ou anthroporadiamétrie), une machine qui détecte les radionucléides contenus dans l'organisme. La seule machine disponible près de chez lui est inaccessible : elle est près de Tokyo, « mais cela coûte près de 1000 euros » pour y avoir accès. Il raconte cette anecdote :

« A Fukushima City, seulement cinq personnes ont pu l'utiliser : ils tournaient une émission télé, et c'est la chaîne qui a payé.

Officiellement, les résultats sont normaux, mais une contre-expertise est en cours par des citoyens qui se sont formés à la radioactivité. »

Avec son Geiger acheté sur Internet, il fait ses propres mesures

Les analyses d'urine, bien moins chères, ont été réservées aux enfants. Pendant la semaine qui a suivi l'accident, Simon est sorti en combinaison de ski, masque et lunettes, « de la science fiction », se souvient-il. Puis, il n'a eu qu'à croire les propos toujours rassurants du gouvernement :

« La limite d'exposition a été élevée de 1 à 20 millisieverts (mSv) par an [20 mSv/an est la dose prévue pour les travailleurs du nucléaire en France, ndlr], sinon il aurait fallu évacuer. On se bat pour la faire redescendre.

J'ai acheté un compteur Geiger sur Internet, je fais des mesures moi-même et je le prête. Souvent, je détecte une radiation largement supérieure à 20 mSv. »

« C'est une panique silencieuse. Les gens ne veulent pas savoir »

Un jour d'avril, vêtu comme un travailleur du nucléaire, il a entrepris un road trip avec un ami. Sans compteur Geiger, avec la peur au ventre. Il s'est approché jusqu'à 7 km de la centrale, sans sortir de la voiture. Les territoires, magnifiques, sont aussi déserts qu'inquiétants. Sur les images qu'il nous a montrées (et qu'il garde pour un documentaire), on voit des animaux errants, chiens, vaches, cochons, des feux rouges arrêtés et quelques policiers aux check points. Comme le décrypte Simon, la radioactivité est un « piège » :

« Elle ne se voit pas, c'est comme s'il ne s'était rien passé, le tsunami a touché les côtes, mais à l'intérieur, c'est une panique silencieuse. Les gens ne veulent pas savoir.

Moi-même, je ne ressens rien dans mon corps, mais j'aurais peut-être un cancer dans dix ans. »

Avant de partir, il essayait de faire attention à la nourriture :

« Au supermarché, il y avait beaucoup moins de choix qu'avant, les produits frais venaient d'autres préfectures. Mais je sais que la récolte de riz, en ce moment, mélange le riz venu de partout. C'est scandaleux mais c'est vrai. »

Comme beaucoup de Japonais, il a trouvé indécente la campagne du ministère de l'Agriculture, des forêts et de la pêche qui clamait :

« Mangeons la nourriture des zones sinistrées afin de les soutenir et d'aider à la reconstruction. »

Une campagne à l'image de toute la propagande véhiculée par le lobby nucléaire.

Evacuer ? « Sans doute ce qu'il faudrait faire »

« Les gens veulent de l'information et de l'argent », résume-t-il. Pour l'instant, seules les personnes habitant à 10 km de la centrale ont été indemnisées par Tepco, opérateur de Fukushima Daiichi, pour la perte définitive de leurs biens, explique Simon.

Alain Rannou, expert à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) concède que :

« S'il n'y avait pas de difficulté à évacuer beaucoup de monde, c'est sans doute ce qu'il faudrait faire. »

Pour lui, la limite de 20 mSv fixée par le gouvernement « augmente le risque de cancer de 0,1% », ce qui « n'est pas considérable ». L'expert reconnaît toutefois qu'« il n'est pas normal que les gens n'aient pas d'information sur leur exposition à la radioactivité, qu'ils puissent décider de partir en toute connaissance de cause ».

Photo : Simon, à la rédaction de Rue89 (Audrey Cerdan/Rue89).

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30 septembre 2011 5 30 /09 /septembre /2011 16:06

LEMONDE.FR avec AFP | 30.09.11 | 17h40

 
 

 

Après Fukushima, l'Agence internationale de l'énergie atomique veut renforcer son rôle auprès des Etats. Ici, une photo rendue publique par Tepco le 21 mars 2011.

Après Fukushima, l'Agence internationale de l'énergie atomique veut renforcer son rôle auprès des Etats. Ici, une photo rendue publique par Tepco le 21 mars 2011.AFP/-

Pour la première fois depuis l'accident du complexe nucléaire de Fukushima, une petite quantité de plutonium a été détectée en plusieurs lieux du nord-est du Japon, largement en dehors de l'enceinte de la centrale, a annoncé vendredi 30 septembre le gouvernement nippon, précisant que les teneurs relevées n'avaient rien d'alarmant.

 

Le plutonium est vraisemblablement issu des réacteurs du complexe nucléaire de Fukushima, qui a subi le pire accident depuis celui de Tchernobyl (Ukraine) en 1986. Trois des six réacteurs nucléaires de cette centrale située au bord de l'océan Pacifique ont été fortement endommagés. Leur combustible a fondu et est tombé au fond de la cuve, après la perte de leur système de refroidissement, dont l'alimentation électrique a été noyée par le tsunami qui a ravagé la région le 11 mars.

Du plutonium a été repéré dans le sol à six endroits où des prélèvements ont été effectués en juin, dans une zone de 80 kilomètres autour du site de Fukushima Daiichi, a précisé le ministère de la science.

Du plutonium avait déjà été décelé sur le site même de la centrale. Dans le cas présent, la plus forte densité de plutonium 239 et 240 (4,0 becquerels par mètre carré) a été enregistrée dans une ville située à quelque 30 kilomètres de celle-ci, a précisé le ministère. Dans un autre village, à 45 km, la teneur était de 0,82 becquerel par mètre carré. "La teneur en plutonium détectée cette fois est considérée comme très faible", a souligné le ministère.

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29 septembre 2011 4 29 /09 /septembre /2011 12:36

LEMONDE | 28.09.11 | 14h48   •  Mis à jour le 29.09.11 | 10h41

 
 

 

La centrale de Fukushima au Japon, le 25 août 2011.

La centrale de Fukushima au Japon, le 25 août 2011.REUTERS/HO

Fukushima Envoyé spécial - "Rabu-chan est là !" A la maison de retraite Suisyoen, l'arrivée de Rabu et de Pisu (prononciation japonaise des mots "love" et "peace") suscite le ravissement. Mme Yatsuzaka enlace Rabu et lui parle : "Tu es mignon, tu sais."

La scène ferait presque oublier que Rabu est un robot à l'apparence d'un bébé phoque, un exemplaire du modèle Paro mis au point au début des années 2000 par l'Institut japonais des sciences et technologies industrielles avancées (AIST), destiné à l'assistance médicale et qui permet à Mme Yatsuzaka de se sentir rassurée.

Comme les 84 autres pensionnaires, elle en a besoin. Suisyoen se situe à Iwaki, dans la préfecture de Fukushima, à 26 km au sud de la centrale nucléaire endommagée et au bord du Pacifique. Le centre a subi de plein fouet la catastrophe du 11 mars.

Evacués deux jours plus tard, les pensionnaires sont revenus en mai, mais le drame a laissé des traces. "La situation redevient peu à peu normale, explique Taku Katoono, le dirigeant du centre, mais il y a encore des comportements un peu bizarres. La présence de Rabu et de Pisu est utile." L'idée de faire appel à ces robots est venue du géant immobilier Daiwa House, qui en a prêté deux à la maison de retraite. "Ils permettent d'oublier la peur", note M. Katoono.

"Plus de volonté"

L'impact psychologique du tsunami et de l'accident nucléaire est considérable. "Les personnes âgées croient ainsi qu'elles sont de trop. Plus généralement, beaucoup de gens s'inquiètent pour l'avenir", analyse Suimei Morikawa, psychiatre engagé depuis fin mars aux côtés de Médecins du monde dans le soutien aux victimes dans la préfecture d'Iwate, une tâche particulièrement complexe.

"Au moment du séisme de Kobe de 1995, précise-t-il, des gens sont morts et ont été blessés. Beaucoup ont souffert du syndrome de stress post-traumatique. Cette fois, les souffrances sont plus complexes. Au séisme s'ajoutent le tsunami et l'accident nucléaire."

Il y a en outre le problème de l'absence de centre de soins psychologiques dans la région. "Traditionnellement, les gens du Tohoku n'expriment guère leurs sentiments, même à leurs proches. Ils peinent à évoquer leurs problèmes." Et puis, avec la perte de milliers d'emplois, la dislocation des communautés et le manque de perspectives pour une population au niveau de vie plutôt bas, l'inactivité pèse. "Beaucoup de gens n'ont plus de volonté, notamment celle de travailler", constate Genyu Sokyu, un prêtre bouddhiste de la préfecture de Fukushima, membre de la commission de reconstruction.

"La fréquentation des pachinko (salles de jeux) a augmenté de 30 %, et la consommation d'alcool a bondi", ajoute le docteur Morikawa, qui s'inquiète du sentiment d'abandon éprouvé dans la région. Une détresse qui devrait s'aggraver, nécessitera un long suivi et a déjà fait grimper le taux de suicide, alors qu'il était déjà parmi les plus élevés du Japon.

Philippe Mesmer

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25 septembre 2011 7 25 /09 /septembre /2011 11:47

Publié le 24-09-11 à 12:50    Modifié à 12:47   

TOKYO (AP) — Le gouvernement japonais a annoncé samedi avoir ordonné des analyses complémentaires après avoir relevé des niveaux importants de césium radioactif dans un échantillon de riz de la région de Fukushima (nord-est)

Des taux atteignant le seuil légal de 500 becquerels ont été mesurés dans un échantillon prélevé dans une rizière à Nihonmatsu, à 55km à l'ouest de la centrale nucléaire de Fukushima, accidentée après le tsunami du 11 mars.

Des analyses ont déjà été réalisées en 400 endroits de la préfecture de Fukushima. Les niveaux les plus élevés mesurés jusqu'à présent étaient de 136 becquerels par kilo, selon un responsable de la préfecture. AP

ll/v0154

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12 septembre 2011 1 12 /09 /septembre /2011 15:09
LEMONDE.FR avec AFP | 09.09.11 | 15h45   •  Mis à jour le 09.09.11 | 17h06
 
 

 

Image de la centrale de Fukushima frappée par le tsunami du 11 mars 2011.

Image de la centrale de Fukushima frappée par le tsunami du 11 mars 2011.AFP/TEPCO

Le cumul des substances radioactives rejetées en mer par la centrale nucléaire de Fukushima serait environ trois fois plus important que ne le pensait l'opérateur du site, a affirmé, vendredi 9 septembre, la presse nippone. Des chercheurs japonais évaluent à présent à 15 000 térabecquerels la quantité d'éléments radioactifs dispersés dans l'océan Pacifique entre mars et avril, à la suite des explosions d'hydrogène et autres avaries survenues à Fukushima Dai-Ichi, complexe atomique endommagé par le séisme et le tsunami du 11 mars dans le nord-est de l'archipel.

L'opérateur de la centrale, Tokyo Electric Power (Tepco), avait estimé auparavant à 4 700 térabecquerels le total d'iode et césium radioactifs rejetés dans la mer, en fonction de prélèvements effectués début avril. Mais une équipe de chercheurs, dirigée par Takuya Kobayashi, de l'Agence de l'énergie atomique japonaise, a fondé ses estimations sur d'autres données, provenant notamment d'échantillons d'eau de mer pris entre le 21 mars et le 30 avril, selon plusieurs quotidiens japonais.

Selon les chercheurs, les particules radioactives sont arrivées en mer par divers canaux et d'autres, rejetées dans l'atmosphère, sont retombées dans l'eau de l'océan. Les bâtiments des réacteurs, qui ont été arrosés massivement pour être refroidis, ont laissé échapper des quantités d'eaux contaminées par les voies souterraines, tandis que des émissions radioactives ont accompagné les explosions d'hydrogène qui se sont produites dans plusieurs bâtiments de réacteurs durant les premiers jours suivant le désastre.

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12 septembre 2011 1 12 /09 /septembre /2011 15:07

LEMONDE | 12.09.11 | 11h33   •  Mis à jour le 12.09.11 | 16h06

 
 

 

Six mois après la catastrophe, des manifestants ont formé une chaine humaine devant le ministère de l'économie à Tokyo, pour protester contre la gestion gouvernementale de la crise nucléaire.

Six mois après la catastrophe, des manifestants ont formé une chaine humaine devant le ministère de l'économie à Tokyo, pour protester contre la gestion gouvernementale de la crise nucléaire.REUTERS/ISSEI KATO

Tokyo (Japon), Correspondance - Kasumigaseki, le dimanche, n'attire guère les promeneurs. Mais, depuis la catastrophe du 11 mars et la crise nucléaire qui a suivi, l'austère quartier des ministères du cœur de Tokyo s'anime presque chaque semaine avec des manifestations appelant à l'abandon de cette énergie.


Pour les six mois du début de la crise, le 11 septembre, 1 500 personnes ont bravé, avec des banderoles affirmant notamment qu'un "autre Fukushima peut arriver", un fort dispositif policier pour littéralement encercler le ministère de l'économie, chargé de la promotion du nucléaire. Puis quatre jeunes ont débuté une grève de la faim devant cette administration, dont le dirigeant, Yoshio Hachiro, a dû démissionner samedi, huit jours seulement après sa nomination.

En cause, ses propos qualifiant de "villes fantômes" certaines zones de la préfecture de Fukushima, à l'issue de son déplacement dans la région, et ses blagues avec des journalistes sur l'irradiation dont il était désormais victime. Il a été remplacé, lundi, par Yukio Edano, porte-parole du gouvernement précédent de Naoto Kan.

LE SITE DE FUKUSHIMA, PAS À L'ABRI DE NOUVEAUX SÉISMES

Ce rassemblement – à l'instar de celui de Shinjuku, toujours à Tokyo, où des heurts ont eu lieu avec des militants d'extrême droite venus défendre le nucléaire, ou encore celui de Kobé (ouest) où 3 000 personnes ont pu écouter l'un des rares parlementaires critiques du nucléaire, Taro Kono – reflète le malaise d'une population qui hésite entre colère, face au manque d'informations sur l'accident de Fukushima, et résignation.

Officiellement, à la centrale, la situation s'améliore. Les réacteurs 1 à 3 sont maintenus autour de 100 °C grâce à un refroidissement assuré en circuit fermé au moyen d'un dispositif de traitement de l'eau contaminée. La piscine du réacteur 4 bénéficie aussi de ce dispositif. Cela faisait partie des objectifs de la première étape du plan de reprise de contrôle, finalisé le 17 avril, et atteinte en juillet. La seconde devrait l'être en janvier 2012. Il s'agit maintenant de réduire la contamination de l'eau de mer et celle des sous-sols.

Or, la réalité semble plus complexe. Le gouvernement et Tepco (Tokyo Electric Power Company) ont reconnu que le combustible des réacteurs 1 à 3 avait fondu, que les cuves étaient percées et que l'écoulement du corium menaçait de polluer les sous-sols.

La décontamination de l'eau soulève le problème de l'accumulation des résidus hautement radioactifs qui s'ajoutent aux débris des explosions de mars et s'accumulent à la centrale, où des points contaminés à plusieurs sieverts ont été découverts.

De plus, les bricolages réalisés ne mettent pas le site à l'abri de nouveaux séismes. Depuis le 11 mars, le Japon a subi 559 répliques de magnitude 5 ou plus, dont 6 de magnitude supérieure à 7.

La santé des quelque 1 500 travailleurs du site inquiète aussi, l'un d'eux étant décédé fin août d'une leucémie aiguë. L'information, donnée par Tepco, était accompagnée d'une précision : sa mort n'aurait rien à voir avec son travail à la centrale. Beaucoup en doutent.

YOSHIHIKO NODA, AMBIGU SUR L'AVENIR DU NUCLÉAIRE

L'attitude de la compagnie continue donc de soulever des interrogations, comme l'information donnée par le gouvernement, jugée tardive et parcellaire. Une carte de la contamination radioactive dans un rayon de 100 km autour de la centrale n'a été rendue publique que début septembre, alors que les mesures avaient été effectuées en juin et en juillet.

Et puis, selon la presse japonaise qui reprenait, le 9 septembre, des conclusions de chercheurs, le chiffre du cumul des substances radioactives déversées dans le Pacifique serait trois fois plus important que celui avancé par Tepco : 15 000 terabecquerels (TBq), contre 4 700 TBq. A cela s'ajoutent les polémiques sur la contamination des aliments, contrôlés de manière erratique et opaque.

Enfin, contrairement à son prédécesseur Naoto Kan, le nouveau premier ministre, Yoshihiko Noda, en place depuis le 2 septembre et soutenu par le patronat japonais (Keidanren), est ambigu sur l'avenir du nucléaire et souhaite relancer rapidement les réacteurs à l'arrêt.

Six mois après le drame, la polémique sur le nucléaire ne saurait faire oublier la reconstruction des zones dévastées par le séisme et le tsunami, dont le bilan officiel atteint 19 868 morts et disparus.

Le coût de ces catastrophes est estimé à 16 900 milliards de yens (160 milliards d'euros). Les infrastructures de transport ont vite été remises en état. Mais de nombreux sites ne sont toujours pas nettoyés. Fin août, 49 000 logements temporaires (94 % du total) étaient achevés. Le dernier centre d'hébergement de la préfecture d'Iwate a été fermé. Ceux des préfectures de Fukushima et de Miyagi devraient l'être début octobre, au plus tôt.

Mais seules cinq des quarante municipalités touchées ont dressé des plans pour la reconstruction, dont le financement reste à définir. Il devrait l'être dans le troisième budget supplémentaire, dont le montant pourrait atteindre 10 000 milliards de yens.

Découvrez aussi les témoignages de Japonais dans l'édition Abonnés du site et dans Le Monde daté du 13 septembre, disponible dans les kiosques ce lundi 12 septembre à partir de 14 heures.

Philippe Mesmer

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