Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
31 mai 2016 2 31 /05 /mai /2016 20:17

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

Emmanuel Macron rattrapé par son ISF
31 mai 2016 | Par Mathilde Mathieu
 
 
 

Jusqu’ici, Emmanuel Macron estimait ne pas être redevable de l’ISF. Mais d'après nos informations, les vérifications fiscales déclenchées après sa nomination au gouvernement viennent de déboucher sur une réévaluation du patrimoine de son couple. À l’issue de plus d’un an et demi de discussions avec le fisc, ayant notamment porté sur la demeure de son épouse au Touquet, le ministre a dû admettre qu’il devait payer l’ISF et même déposer une déclaration rectificative pour 2013 et 2014.

Désormais, Emmanuel Macron va devoir payer l’ISF. Alors que le ministre de l’économie et son épouse estimaient ces dernières années ne pas être redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune, ils sont aujourd’hui rattrapés par l’administration fiscale.

D’après nos informations, les vérifications entreprises sur la situation d’Emmanuel Macron au lendemain de son entrée au gouvernement en août 2014 (comme sur tous les ministres depuis les lois « post-Cahuzac ») viennent de déboucher sur une réévaluation du patrimoine immobilier du couple, qui lui fait franchir le seuil de l’ISF fixé à 1,3 million d’euros (d’actifs nets taxables).

 

Emmanuel Macron, le 3 mai 2016 © Reuters Emmanuel Macron, le 3 mai 2016 © Reuters

 

À l’issue de plus d’un an et demi de discussions avec le fisc, ayant porté en particulier sur la valeur de la demeure de son épouse au Touquet, Emmanuel Macron a finalement admis qu’il devait payer l’ISF et déposé une déclaration rectificative pour les années 2013 et 2014.

Le barème de l’ISF étant faible sur les premières tranches du patrimoine (inférieur à 1 % jusqu’à 5 millions d’euros), le rattrapage pourrait toutefois rester inférieur à 10 000 euros, intérêts ou pénalités compris.

Sollicité par Mediapart, son cabinet n’a souhaité faire aucun commentaire, se retranchant derrière le « secret fiscal ». Aujourd’hui, « la situation fiscale de M. et Mme Macron est tout à fait régulière, toutes les déclarations auxquelles ils sont assujettis ont été effectuées », répond simplement son entourage. Et d’insister sur un point : « Ils n’ont fait l’objet d’aucune notification d’un redressement. »

D’autres (ex)-ministres de François Hollande, tels Laurent Fabius, Michèle Delaunay ou Marisol Touraine, n’ont jamais fait mystère du fait qu’ils payaient (ou avaient payé) l’ISF.

Emmanuel Macron, lui, s’est récemment autorisé à critiquer les fondements mêmes de l’impôt de solidarité sur la fortune, à l’occasion d’un entretien accordé à la revue Risques (destinée aux professionnels de l’assurance). « Si on a une préférence pour le risque face à la rente, ce qui est mon cas, il faut préférer la taxation sur la succession aux impôts de type ISF », théorisait le ministre en avril dernier. Cette sortie, à rebours du programme du PS, lui a d’ailleurs valu un recadrage immédiat de Manuel Valls : « Supprimer l’impôt sur la fortune, qu’on peut toujours améliorer, rendre plus efficace d’un point de vue économique, serait une faute », a répliqué le premier ministre.

À la banque Rothschild, Emmanuel Macron avait gagné 2,4 millions d'euros entre 2011 et mai-2012, si l’on en croit sa déclaration de patrimoine disponible sur le site de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Après l’élection de François Hollande, il avait ensuite intégré l’Élysée comme secrétaire général adjoint. Malgré la nature de ses activités passées, malgré sa promotion au cœur même du pouvoir, on croit aujourd’hui comprendre qu’il n’a fait l’objet d’aucune vérification fiscale approfondie pendant ses deux années à l’Élysée.

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
31 mai 2016 2 31 /05 /mai /2016 17:03

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

Violences policières: ouvrez les yeux !
31 mai 2016 | Par François Bonnet et La rédaction de Mediapart
 
 

Des dizaines de manifestants ont été blessés lors des manifestations contre la loi sur le travail. Le gouvernement a mis en place une stratégie de la tension, suite logique d’années de dérive. Il est temps qu’une commission d’enquête se saisisse de cette gestion incendiaire.

Un jeune homme de 28 ans est depuis le 26 mai maintenu dans un coma artificiel, œdème cérébral et boîte crânienne enfoncée, victime du tir d’une grenade dite de « décencerclement » (notre article ici). Un mois plus tôt, le 28 avril, un étudiant de 20 ans à l’université de Rennes perdait un œil à la suite d’un tir de lanceur de balles (LBD40), une arme plus puissante que les Flash-Ball. Depuis deux mois et demi, début des manifestations contre la loi sur la réforme du code du travail, plusieurs dizaines de manifestants ont été gravement blessés.

Un bilan exact est impossible à établir. Mais la multiplicité des témoignages que nous avons reçus, des photos et des vidéos documentées circulant sur les réseaux sociaux permettent bien d’évaluer à plusieurs dizaines le nombre de personnes victimes de blessures sérieuses. Un seul exemple : 49 personnes ont été blessées dont 10 gravement, le 28 avril à Rennes, selon une équipe de soignants déployée sur le cortège ce jour-là. Hématomes, nez cassés, fractures, mâchoires décrochées, traumatismes crâniens, suffocations, plaies ouvertes, évanouissements… Les opposants à la loi sur le travail le savent désormais : il est devenu risqué de manifester, dangereux de rester dans les cortèges jusqu’à leur dissolution, imprudent de « partir en manif’ » sans un minimum d’équipement de protection.

 

L'éducateur et syndicaliste Guillaume Floris quand les CRS l'évacuent, le 26 mai, à Paris. © Jérôme Chobeaux L'éducateur et syndicaliste Guillaume Floris quand les CRS l'évacuent, le 26 mai, à Paris. © Jérôme Chobeaux

 

Avec ces jeunes gens qui resteront traumatisés à vie, ces dizaines voire centaines de personnes blessées ou simplement violentées, ces milliers de manifestants défilant la peur au ventre – peur de tomber soudainement sous une charge de CRS –, ce basculement organisé dans la violence et la criminalisation d’un mouvement social devrait provoquer un vaste débat public. Il devrait susciter les interpellations sans relâche des membres du gouvernement. Il devrait provoquer – au nom du respect de nos libertés fondamentales – une mobilisation des députés et sénateurs. Il devrait conduire à l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur les stratégies de maintien de l’ordre, les fonctionnements des chaînes de commandement, les détails des instructions données.

C’est tout l’inverse qui se produit. Les signaux d’alerte se multiplient. Rien ne se passe, sauf une légitimation aveugle faite par ce pouvoir de la violence policière. Des accidents graves se produisent. Rien n’est dit, sauf un soutien inconditionnel aux actions des forces de l’ordre. Rien n’est répondu aux alertes qui proviennent de l’institution policière elle-même, de la part de syndicalistes qui s’inquiètent de l’extrême dégradation de la situation.

Que disent-ils, ces syndicalistes ? Que le gouvernement n’a rien appris de la mort de Rémi Fraisse, ce jeune manifestant pacifique tué par une grenade offensive le 25 octobre 2014 à Sivens. Depuis, la doctrine de maintien de l’ordre n’a pas changé, estime Alexandre Langlois, secrétaire général de la CGT-Police : « Ce qui a changé, c’est la gestion de la crise sociale par la répression. On favorise l’escalade de la violence. Tout est mis en place pour que cela se passe mal ! » Sur le terrain, ajoute-t-il, ses délégués chez les CRS lui font remonter qu’on les utilise « de manière très offensive. Il ne s’agit pas de contenir mais d’aller à l’affrontement ».

Philippe Capon, du syndicat Unsa-Police, lui-même ancien CRS, insiste sur « des groupuscules extrémistes très organisés, très mobiles, qui nous obligent à nous réorganiser, à aller au contact ». Mais il veut aussi mettre en avant l’argument du manque d'expérience des forces déployées : « La situation est terriblement tendue et avec l’état d’urgence, nous sommes débordés. On demande à des collègues de faire du maintien de l’ordre alors que ce n’est pas leur métier. Certains arrivent dans leur commissariat le matin et on leur dit : ‘’Tu mets un casque, tu prends une matraque et tu vas couvrir la manif !’’ Mais le maintien de l’ordre, ça s’apprend. C’est un métier à part. »

Niant ces préoccupations, le gouvernement s’en tient pour sa part à une version et une seule qui lui permet de justifier cette escalade de la violence : les « casseurs ». « Casseur », le mot est banalement utilisé par tous les pouvoirs depuis cinquante ans pour justifier ses propres turpitudes. Aussi Bernard Cazeneuve comme Manuel Valls assurent-ils avoir identifié une nouvelle génération de « casseurs ».

Ceux-là seraient « radicalisés », adeptes de l’« ultra-violence », « qui veulent tuer un policier », qui se battent « contre l'État et les valeurs de la République ». Une frange extrémiste d’un mouvement social qui, par ailleurs, « prend en otage » le pays par ses grèves et blocages… Dans une France vivant sous le régime d’exception de l’état d’urgence, déjà prolongé à deux reprises, ce vocabulaire ne peut être neutre : il ne manque que « terroriste » voire « djihadiste du social » pour compléter la panoplie sémantique d’un gouvernement jusqu’au-boutiste. Le pas vient d’ailleurs d’être franchi par le patron du Medef, Pierre Gattaz, qui appelle, dans Le Monde, à mater ces « minorités qui se comportent un peu comme des voyous, comme des terroristes ».

Médias à la mémoire courte

Le pouvoir peut d’autant plus aisément dérouler cet ahurissant mode de récit que les médias audiovisuels, télés d’info en continu en première ligne, n’aiment rien plus que les « casseurs » et ces images d’affrontements et de déprédations. L’« affaire » de la voiture de police incendiée a ainsi constitué un sommet dans la mise en spectacle de ces affrontements. Comme la chemise déchirée du cadre d’Air France, ces images ont provoqué un effet de souffle annihilant toute réflexion, ouvrant la voie aux déclarations martiales de Manuel Valls qui furent par la suite démenties par les faits. Trois des cinq personnes interpellées et placées en détention provisoire furent rapidement remises en liberté, les charges étant beaucoup moins lourdes qu'annoncé.

 

Valls et Cazeneuve sur le perron de l'Elysée, le 16 mars 2016. © Reuters Valls et Cazeneuve sur le perron de l'Elysée, le 16 mars 2016. © Reuters

 

Médias à la mémoire courte. Ils n’auront pas relevé que pour la première fois depuis des décennies, les pillages de magasins sont rarissimes, tout comme les violences collatérales (voitures brûlées, déprédations diverses) qui ont de tout temps accompagné les grandes manifestations. Ils ont oublié que c’est à l’occasion d’une manifestation de marins pêcheurs que le Parlement de Bretagne a brûlé à Rennes en 1994. Que les autonomes ont, tout au long des années 1980, dévasté les à-côtés des manifestations. Que ce sont des sidérurgistes qui, en 1979, avaient soumis le quartier de l’Opéra à un pillage en règle après avoir laminé les forces de l’ordre sous des pluies de boulons et de barres de fer et érigé des barricades sur les grands boulevards…

Il demeure cette réalité : quelques centaines, parfois milliers, de personnes sont toutes contentes de hurler « Tout le monde déteste la police » (mais en 1968, c’était « CRS-SS ! ») et prêtes à déclencher ou à assumer des affrontements avec les forces de l’ordre. Face à cela, tout pouvoir responsable n’a qu’un seul devoir : faire baisser la pression, organiser l’évitement, prendre bien en amont des mesures préventives, négocier avec les services d’ordre des organisations, maîtriser strictement l’usage des armes et des gaz par les forces de l’ordre, éviter les provocations.

C’est tout le contraire que Bernard Cazeneuve et Manuel Valls ont décidé de faire, assumant voire organisant une radicalisation dangereuse des manifestations. Ils l’ont assumé en écartant systématiquement toute interrogation pour mieux délivrer un feu vert inconditionnel aux forces de l’ordre. Manuel Valls a ainsi pu oser déclarer le 19 mai sur RTL : « Il n'y a aucune consigne de retenue, aucune consigne de ne pas interpeller, aucune consigne de ne pas aller jusqu'au bout pour ne pas appréhender les casseurs. »

« Aucune consigne de retenue » : le premier ministre (qui fut pourtant ministre de l’intérieur) a-t-il seulement conscience de l’irresponsabilité d’un tel propos quand sa fonction devrait justement l’obliger à dire l’inverse, c’est-à-dire à rappeler aux forces de l’ordre le devoir qu’elles ont de répondre de manière maîtrisée et proportionnée ? Au plus fort des affrontements de Mai 68, le préfet de police de Paris, Maurice Grimaud, écrivait une lettre à tous les policiers : « Je m’adresse aujourd’hui à toute la Maison (…) et je veux parler d’un sujet que nous n’avons pas le droit de passer sous silence : c’est celui des excès dans l’emploi de la force. » « Frapper un manifestant tombé à terre, c’est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière. Il est encore plus grave de frapper des manifestants après arrestation et lorsqu’ils sont conduits dans des locaux de police pour y être interrogés », écrivait-il (l’intégralité de la lettre est à lire ici). 

 

Rémi Fraisse, tué en octobre 2014 par une grenade offensive. © Reuters Rémi Fraisse, tué en octobre 2014 par une grenade offensive. © Reuters

 

« Aucune consigne de retenue » : voilà dans quels termes Manuel Valls fait écho au préfet Grimaud. Cette posture autoritaire, déjà présente dès le début du quinquennat quand Manuel Valls déclarait prioritaire la lutte contre « l'ennemi de l'intérieur » (lire ici), est la même que lors des événements de Sivens. Les semaines précédant la mort de Rémi Fraisse, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve a laissé des milices locales et des gendarmes mobiles s’en prendre violemment aux militants écologistes et zadistes opposés au projet de barrage. Le 7 octobre 2014, trois semaines avant la mort de Rémi Fraisse, une jeune femme de 25 ans a été grièvement blessée à la main par une grenade de désencerclement tirée dans sa caravane par un gendarme. La scène a été filmée. L’enquête judiciaire est toujours enlisée.

Les alertes lancées par des élus locaux comme par Cécile Duflot et Noël Mamère, qui se sont rendus à la préfecture du Tarn pour demander une gestion plus fine du maintien de l’ordre, ont été écartées. Les deux députés se sont heurtés à un mur, le préfet du Tarn et son directeur de cabinet préférant insister sur la présence d’éléments violents sur place. C’était cinq jours seulement avant la mort de Rémi Fraisse, tué à 21 ans par la grenade offensive d’un gendarme mobile. Après cette mort scandaleuse, le lieutenant-colonel responsable des opérations dira sur procès-verbal avoir reçu « des consignes d’extrême fermeté » de la préfecture (lire notre article ici).

Quant au gendarme mobile qui a lancé la grenade offensive, ni lui ni ses supérieurs n’ont été mis en examen à ce jour. Rien ne dit que cette affaire, dans laquelle l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) a estimé qu’aucune faute n’avait été commise, ne se terminera pas par un non-lieu. Seul changement intervenu depuis ce drame : Bernard Cazeneuve a interdit l’usage des grenades offensives.

Près de 1 600 interpellations !

Le drame de Sivens s’inscrit lui-même dans un temps plus long qui a vu se développer les violences policières dans une impunité quasi systématique. Généralement ignorées par les médias, elles n’ont d’abord concerné que certaines marges de la société. Après la mort d’un supporter du PSG tué par un policier en légitime défense en 2006, puis d'un autre à l'issue d'une bagarre interne en 2010, un fichage spécifique et contraire aux recommandations de la Cnil a été mis en œuvre (lire ici et ici), et des interdictions de se déplacer ont été signifiées aux ultras du foot, comme elles le sont aujourd’hui à des militants. Les ultras ont été aussi blessés ou éborgnés par des tirs de Flash-Ball, comme à Montpellier (lire ici) ou à Reims (lire ici).

Les quartiers populaires ont également eu leur lot de victimes. Ce sont déjà des techniques policières qui sont remises en cause, comme l’étouffement (dite “technique du pliage”) dans l’affaire Ali Ziri (lire ici) ou Wissam El-Yamni (lire ici). Et judiciairement, l’impunité policière est à chaque fois constatée, comme dans les procès Zyed Benna et Bouna Traoré (lire ici), ou Amine Bentounsi (lire ici). Faut-il rappeler que le candidat François Hollande posait, il y a quatre ans, avec les militants de Stop contrôle au faciès, laissant entrevoir l’espoir d’un embryon d’expérimentation du récépissé de contrôle d’identité, sage outil de contrôle citoyen des abus policiers ? Faut-il rappeler que cette stratégie du maintien de l’ordre avait été déjà mise en cause lors des manifestations de soutien à Gaza, durant l’été 2014 ? À l’époque, Bernard Cazeneuve entra dans l’histoire, en étant le seul ministre de l’intérieur au monde à interdire des manifestations de soutien au peuple palestinien.

 

François Hollande candidat en 2012, lorsqu'il rencontrait les responsables de l'association Stop contrôle au faciès. © Reuters François Hollande candidat en 2012, lorsqu'il rencontrait les responsables de l'association Stop contrôle au faciès. © Reuters
 

Assumer la violence voire l’organiser… Quatre éléments permettent de souligner que ce choix de l’escalade est délibéré. Le premier est l’usage massif d’armements nouveaux qui démultiplient les violences : grenades de désencerclement, lanceurs de balles, Flash-Ball, spray de lacrymogènes. Le deuxième est la mise en contact direct des forces de l’ordre et des manifestants sur une grande partie des cortèges. Le troisième est l’utilisation systématisée des grenades lacrymogènes, en particulier lors des dispersions de manifestations. Le quatrième est la course aux interpellations au sein même des cortèges : près de 1 600 personnes ont ainsi été interpellées, déclenchant chaque fois de mini-affrontements entre manifestants solidaires et policiers…

 

Cette politique du chiffre, génératrice de violences, est âprement revendiquée par le ministre de l'intérieur. « Il y a eu depuis le début de ces manifestations près de 1 600 interpellations qui ont donné lieu à 1 000 gardes à vue, il y a 72 personnes qui sont d’ores et déjà condamnées », dont « une grande partie » écrouées, indiquait Bernard Cazeneuve, le 20 mai sur TF1. Lors des audiences en comparution immédiate, défilent toutefois beaucoup de simples badauds restés sur les lieux pour voir de leurs propres yeux comment la violence s’exerçait. Parfois, ils reconnaissent avoir jeté un projectile en direction des policiers, leur avoir montré leurs fesses. Et dans ce cas, les condamnations sont lourdes, pouvant aller jusqu’à plusieurs mois ferme. Les dossiers vides n’empêchent par le parquet de requérir des sanctions. Et même de faire appel, quand les condamnations lui semblent trop légères en dépit d’un manque évident de preuves.

« Aucune consigne de retenue », dit Manuel Valls. « De toutes les manifestations du pouvoir, celle qui impressionne le plus les hommes, c’est la retenue. » C’est cette phrase de Thucydide – elle date d’environ 2500 ans… – qu’ont choisi de mettre en exergue de leur étude deux des meilleurs spécialistes du maintien de l’ordre, Olivier Fillieule et Fabien Jobard. Dans cet article titré « Un splendide isolement » (il est à lire intégralement ici), les deux chercheurs soulignent l’obsolescence et les impasses du maintien de l’ordre « à la française ».

Car pendant quelques années, ce maintien de l’ordre « à la française », d’abord préoccupé d’éviter le décès ou les blessures graves des protestataires, a pu faire figure de modèle avancé, et exportable. Un constat partagé au plus haut niveau politique et policier, au point que Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l’intérieur, avait pu proposer ses services à la Tunisie d’un Ben Ali contesté par les manifestants qui l’expulseront finalement du pouvoir, au motif que « le savoir-faire de nos forces de sécurité, reconnu dans le monde entier, permet de régler des situations sécuritaires de ce type ».

Pourtant, soulignent Fabien Jobard et Olivier Fillieule, « cela fut peut-être vrai par le passé, mais ce n’est plus le cas ». Au contraire, pour les deux auteurs, le maintien de l’ordre pratiqué en France est devenu « d’arrière-garde » et témoigne d’une « insularité » et d’un « retranchement doctrinal » inquiétants vis-à-vis de ce qui se pratique chez nos voisins européens. Les auteurs montrent notamment comment une « politique de désescalade » visant à éviter tout affrontement a été mise en place dans différents pays, à commencer par l’Allemagne, mais aussi dans plusieurs autres pays européens.

Comment expliquer ce qui est désormais un retard français. L’une des réponses tient à la faiblesse du politique : « Le retranchement doctrinal de la police française est redoublé de l’isolement dans lequel la laisse le politique : se laissant convaincre des arguments policiers sur la “violence extrême’’ des adversaires, les ministres de l’intérieur par cette seule posture s’empêchent tout examen au fond de l’action policière », écrivent les chercheurs.

« Quand on est responsable, on ne dit pas : allez-y, foncez »

 

Plaque à la mémoire de Malik Oussekine. © Reuters Plaque à la mémoire de Malik Oussekine. © Reuters
 

Plutôt que de camper dans le rôle de matamores de commissariat, Manuel Valls et Bernard Cazeneuve seraient mieux inspirés de se reporter aux débats parlementaires qui avaient suivi la mort du jeune étudiant Malik Oussekine, dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, à la suite d’une des manifestations contre la loi Devaquet. Dès le 6 décembre, Pierre Joxe, au nom du groupe socialiste, demandait « la création d’une commission d’enquête sur les instructions données par le ministre de l’intérieur aux forces de l’ordre », tandis que le RPR Philippe Séguin évoquait l’action de « petits groupes incontrôlés ».

 

Deux jours plus tard, le 8 décembre, le député socialiste Michel Sapin interpellait son adversaire RPR Jacques Toubon en demandant le retrait du projet de loi Devaquet pour contribuer « à l’apaisement nécessaire ». Et le 10 décembre, c’était au tour de Lionel Jospin de délivrer un réquisitoire contre l’action du gouvernement, réquisitoire qui sonne comme étrangement actuel aujourd’hui. S’en prenant à « un gouvernement sûr de soi, catégorique, imbu de ses références idéologiques, sourd à l’opinion des autres », il poursuivait en ces termes : « Vous avez ouvert la crise par un mauvais projet, vous tentez de la solder par un mauvais plaidoyer, mais surtout vous l’avez abordée avec une détestable méthode : refus de la discussion, sous-estimation du mouvement, utilisation de la violence et en même temps passivité devant elle ! »

 

Ces mêmes jours, Bernard Deleplace, au nom de la FASP, syndicat majoritaire à l’époque dans toute la police en tenue, membre du PS et proche de François Mitterrand, rappelait également au pouvoir politique ses devoirs et ses responsabilités par cette déclaration : « À ceux qui nous gouvernent, je dis que la responsabilité est aussi la leur et qu'elle est politique (...) Quand on est responsable, on ne dit pas : allez-y, foncez, je vous couvre, pour s'étonner ensuite des dégâts, s'étonner que certains collègues aient pris ces encouragements intempestifs au mot. Notre métier est suffisamment difficile, dangereux, pour que les hommes politiques n'y rajoutent pas leurs petites phrases démagogiques. On ne gouverne pas la police comme une campagne électorale. »

Trente ans plus tard, les rôles sont comme inversés. Michel Sapin est ministre d’un gouvernement qui veut criminaliser un mouvement social. Jacques Toubon est Défenseur des droits et vient d’ouvrir une enquête sur les conditions dans lesquelles a été très gravement blessé le jeune homme présent cours de Vincennes le 26 mai. Lionel Jospin est membre du conseil constitutionnel. Plaidera-t-il pour une censure de la loi sur le travail ?

Le 10 décembre 1986, Lionel Jospin interpellait en ces termes Charles Pasqua, alors ministre de l’intérieur : « Quelles instructions avez-vous données ? Quelles sanctions avez-vous prises à la suite de certaines opérations dont on connaît le prix en blessés, chez les policiers comme chez les jeunes ? » Charles Pasqua se gardait de répondre directement à la question. Il préféra alors cibler des « individus violents » armés de billes de verre, de manches de pioche et d’un couteau à cran d’arrêt… « La violence des manifestants ne peut pas être mise en doute », assurait-il. Avec la mort de Malik Oussekine, la droite perdait son honneur et, quelques mois plus tard, le pouvoir. Sauf à ce qu’ils consentent à s’expliquer dans le cadre d’un large débat, l’actuel premier ministre et son ministre de l’intérieur sont promis au même sort.

 

 

Un commentaire parmi d'autres...

 

Plus de "loi travail" donc plus de manifestations et donc plus de violences policières !  C'est pourtant pas compliqué à comprendre !

Les violences policières puissent ses source dans la "loi travail :

"L’Europe façon Wall Sreet exige la "Loi Travail" : corrosif rappel d’une historienne."

Jacques-Marie BOURGET

L'historienne Annie Lacroix-Riz consacre toute sa carrière à mettre au jour les actions de ce que l'on n'appelle plus "le grand capital"... Dommage car il demeure tout puissant. Voulue telle qu'elle est aujourd'hui par les Etats-Unis ( un marché qui obéit et une puissance supplétive au plan militaire), l'Europe, dopée par Washington à partir de 1945, vit maintenant son apothéose ultra libérale. Son dernier avatar : écrire puis imposer la "Loi Travail".

C’est sûrement faire injure au lecteur que d’étaler sous ses yeux une vérité trop première. Si le terrible virus social qu’est la « Loi Travail » nous tombe dessus, ce n’est pas pour, comme le bégaie Valls, « réformer la France en la modernisant ». Bien sûr que non. Ou alors expliquez-nous par quel miracle un gouvernement de droite en Belgique et un supposé de gauche en France, promulguent en même temps des règles identiques qui étranglent au mieux les travailleurs ? C’est tout simple, la consigne unique et mortifère vient de la Commission européenne, un machin livré à tous les lobbies. A Bruxelles, 40 000 personnes sont employées par ces officines « d’influence » qui soumettent au Parlement européen la version des lois qui convient le mieux à Wall Sreet. Ainsi soulagés d’une assommante besogne, avant de foncer à la buvette, les députés européens n’ont plus qu’à dire oui à ces lobbies qui s’activent à notre bonheur. Pendant ce temps, alors qu’ils devraient faire du tapage, peu de ceux dont le métier est de penser et de dire viennent nous mettre sous le nez l’extrait de naissance d’une Europe naguère fécondée par les Etats-Unis.

Pourtant, alors que les bataillons intellectuels sont aux arrêts de rigueur, Annie Lacroix-Riz, inoxydable sentinelle du temps, s’en vient par un livre, Les élites françaises entre 1940 et 1944, jeter boules puantes et verre pilé dans le lit de l’Europe. Cette chercheuse pour laquelle les archives ne sont pas des continents oubliés, nous rappelle, en plein blocages et fumées de lacrymos, l’origine de notre mal, pourquoi nous toussons. Ce catarrhe vient de ce que les « élites » du capitalisme français (banquiers ou élus) et nombre de leurs compères d’états voisins, ont la nécessité d’appuyer leur politique sur un pays qui joue pour eux le rôle de modèle. A partir de 1934 ce fut l’Allemagne nazie, projection d’un mode d’exploitation idéal. Plus tard, Hitler ayant hélas échoué dans la construction de sa nouvelle Europe, les trusts et les banques ont tourné leur veste pour courir au plus vite derrière le nouvel ami étasunien. Ouf. Depuis, le fleuve continue de couler tranquille, Juncker et autres perroquets de Goldman Sachs peuvent lancer leur fatwa de l’ultra libéralisme sur les travailleurs : « il n’y a pas d’alternative ». Voilà pourquoi une Loi Travail nous est tombée dessus, réclamée par ces fonds de pension étatsuniens qui sont à la justice sociale ce que Dracula est à la transfusion sanguine.

Lacroix-Riz, qui laboure le champ de ses connaissances avec une totale obstination, nous a déjà régalés d’un petit livre, Aux origines du carcan européen chez Delga. Belle Europe que cette construction confiée à deux « pères », Robert Schuman (ministre de Pétain) et Jean Monnet (agent de Washington). Cette fois l’historienne nous décrit les douloureux balancements, pour les maîtres de l’économie, entre le prodigieux Adolf Hitler et les plis de la bannière étoilée à mesure que, Staline broyant SS et Wehrmacht dans l’hiver soviétique, les « boys » pouvaient avancer vers La Manche. On plaint presque ces pauvres industriels et banquiers et leurs poulains politique d’avoir à affronter tant d’incertitude, faisant pivoter, comme les spectateurs du tennis, leurs têtes entre Washington et Berlin.

Dans L’Etrange défaite Marc Bloch qui analyse à chaud la déroute française de 40, classe les responsables de cette tragédie en cinq catégories : armée, politiques, presse, affaires et hommes de main. Annie Lacroix-Riz, spécialiste de la Cagoule, ne revient pas sur ces « hommes de main » qu’elle connait trop et qui ne sont que des exécutants (c’est le cas de le dire). Mais elle ajoute le clergé catholique accusé d’avoir été un truchement, un liant entre Vichy ou l’occupant et de trop nombreux français. D’emblée elle piétine le postulat de ces historiens bien-pensants qui écrivent que la collaboration a été essentiellement une affaire de petites gens dévoyés. Pas du tout, au-dessus de la pyramide brune, Lacroix-Riz distingue sans contestation les « élites » et autres puissants, les donneurs d’ordres.

Egale à elle-même, à ce qu’est son livre « culte » Le Choix de la défaite, la chercheuse avec son nouvel ouvrage en béton, nous démontre que plus qu’une affaire de miliciens en manteaux de cuir ou de diatribes de journalistes crapules, la collaboration fut massivement le choix des industriels et banquiers qui préféraient Hitler au Front populaire. Le verdict de l’historienne est tranchant : toute collaboration est létale, ce qui emporte le mythe des « résistants » de Vichy dont Mitterrand est la tête de gondole. Collaborer, même de façon « éloignée », c’est plonger les mains dans le sang nous montre Lacroix-Riz.

« Les élites françaises de 1940 à 1944 » porte un sous-titre qui dit tout « De la collaboration avec l’Allemagne à l’alliance américaine » et, dans cette mutation qui porte d’un amour l’autre, certaines « élites » seront plus perspicaces que d’autres. Ce n’est pas par haine du nazisme ou par désespoir de vivre dans un pays occupé que certains dirigeants ont très vite pris le parti des Etats-Unis. Ni patriotes ni démocrates, ces pragmatiques se sont appuyés sur le rapport du général Doyen en date du 16 juillet 1941, un officier qui a participé à la Commission d’armistice, ou sur de semblables analyses. Pour Doyen, étant donné son degré de culture, sa puissance économique, sa population importante, son obligation de défendre la Grande Bretagne, les Etats-Unis étaient à long terme certains de gagner la guerre. Jouant cette carte, ces « élites » qui collaboraient avec l’Allemagne depuis le Plan Dawes en 1924, et encore mieux à partir de 1933, ont donc sauvé leur réputation à défaut de leur honneur. Et les américains peu regardants n’ont pas hésité à discuter et échanger avec Vichy : il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier et garder une matraque fasciste capable, le moment venu, de lutter contre le communisme. D’autres « élites » moins avisées, ont poursuivi un peu plus leur chemin commun avec les nazis. Pas très grave puisqu’après 1944 les tribunaux d’épuration ont eu pour mot d’ordre de ne pas casser l’outil industriel restant debout, ni le reste d’une économie asthénique. Quelques malchanceux, comme Renault qui ne l’avait pas volé, ont payé pour le compte de tous, histoire de faire symbole.

Il est passionnant de suivre, au travers de ses envoyés spéciaux, de ses « pions », l’action des amis de l’Amérique choisis par Washington dans l’entourage de Pétain. Alger va devenir un roman de Le Carré où les intrigues pour imposer les hommes de demain sont parfois mortelles.

Au-dessus de tout cela il y a un homme détesté des yankees et peu aimé par Churchill, il s’appelle De Gaulle. Il va surfer, jouer sa carte avec pugnacité et l’aide de quelques héros.

En fin de compte Wall Sreet et nos « élites » ne pouvant se mettre en travers, vont laisser le grand général gouverner la France. Mais l’idée de construire cette Europe américaine, un marché aux ordres, demeure. Petit à petit, lui-même entouré de quelques « Atlantistes », De Gaulle va lâcher sa position de « non aligné ». Il ne reste plus qu’à être patient, Bruxelles va être le relais qui commande aux anciennes nations. Par exemple de promulguer des lois « modernes » comme cette monstruosité française sur le droit du travail.

Jacques-Marie BOURGET

PS. Sur Internet un entretien donné par Annie Lacroix-Riz est un élément très convainquant, il permet de saisir parfaitement les recherches de l’historienne.

source : http://www.legrandsoir.info/l-europe-facon-wall-sreet-exige-la-loi-travail-corrosif-rappel-d-une-historienne.html

 

 

 

 

 

Boîte noire : Ont participé à cet article Michel Deléan, Jade Lindgaard, Michael Hajdenberg, Matthieu Suc, Stéphane Alliès, Sophie Dufau, Fabrice Arfi, Christophe Gueugneau, Karl Laske, Donatien Huet.

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

 

Partager cet article
Repost0
31 mai 2016 2 31 /05 /mai /2016 16:18

 

Source : http://www.marianne.net

 

 

Routiers, cheminots, intermittents... Le gouvernement caresse pour déminer la grogne

 
 
Derrière sa fermeté affichée sur le projet de loi de Myriam El Khomri, l'exécutif cherche à désamorcer les contestations secteur par secteur. Et mise sur l'essoufflement du mouvement anti-loi Travail.
 
François Hollande et Manuel Valls tentent d'éteindre un par un les foyers de contestation. - CHAMUSSY/SIPA

Officiellement, le gouvernement ne lâche rien. Pas question de revenir en arrière la loi Travail qui cristallise la grogne sociale depuis quatre mois. "Le projet de loi ne sera pas retiré. La philosophie et les principes de l'article 2 seront maintenus", martèle François Hollande dans un entretien à ce mardi 31 mai, en faisant référence à la disposition du texte qui fâche le plus, celle en matière de temps de travail. Manuel Valls, lui, a répété ce week-end qu'il irait "jusqu'au bout". Mais derrière cette fermeté affichée, le gouvernement se met en quatre pour satisfaire des revendications sectorielles qui risqueraient d'alimenter le climat de fronde et les blocages, alors que l'Euro de football commence dans dix jours. Une stratégie du salami, consistant à découper les unes après les autres les différentes contestations pour mieux les avaler.

Ce sont les chauffeurs routiers qui ont reçu la première caresse. Alors qu'ils protestaient contre la possibilité laissée par le projet de loi d'abaisser la majoration de leurs heures supplémentaires, le secrétaire d'Etat aux Transports Alain Vidalies leur a assuré le 21 mai qu'ils conserveraient leur régime dérogatoire : leurs heures sup' ne pourront pas être majorées de moins de 25%. C'est toujours ça de pris pour tenter d'enrayer les blocages sur les routes.

Lâcher du lest

Le gouvernement s'est aussi attaqué à d'autres revendications qui sont sans rapport avec la loi El Khomri, mais ajoutent de la grogne à la grogne. Il a ainsi pris en main les rudes négociations sur le temps de travail à la SNCF, dont l'Etat est l'actionnaire. Samedi dernier, Alain Vidalies a négocié lui-même avec les syndicats, court-circuitant le patron Guillaume Pépy. Et le secrétaire d'Etat a visiblement fait des concessions que refusait la direction de la SNCF, puisque la CFDT a levé son préavis de grève, comme le rapporte .

Le gouvernement a court-circuité le patron de la SNCF

 

Lâcher du lest, le mot d'ordre est à peu près le même pour les intermittents du spectacle. Les partenaires sociaux du secteur avaient conclu fin avril un accord sur leur régime spécifique d'indemnisation. Mais ils réclamaient à l'Etat une garantie financière pour assurer sa mise en œuvre, alors que les négociateurs de l'assurance-chômage ont échoué à se mettre d'accord lundi sur le montant des économies à réaliser. Qu'à cela ne tienne : alors que la CGT menaçait déjà de bloquer les festivals estivaux, Manuel Valls a assuré dans un communiqué que le gouvernement était "prêt à prendre en charge (…) certaines des mesures de l'accord". Autrement dit, à mettre la main au portefeuille pour sortir provisoirement de l'impasse.

Près de deux mois à tenir

L'exécutif ne se contente pas de signer des chèques pour éteindre les incendies en cours. Il surveille aussi les foyers qui pourraient s'étendre. Lundi, François Hollande a renoncé aux annulations de crédit de 134 millions d'euros qui menaçaient le budget de la recherche. Jeudi, il tentera de rassurer les maires réunis en congrès à Paris et inquiets de la baisse des dotations de l'Etat aux communes : le chef de l'Etat pourrait leur réserver une bonne nouvelle, selon … Pendant ce temps, la ministre de l'Education nationale chouchoute des enseignants toujours agacés : Najat Vallaud-Belkacem un milliard d'euros de hausses de salaires d'ici 2020.

Mais s'il compte appliquer son déminage catégoriel à toutes les contestations, le gouvernement a encore fort à faire. Entre la RATP, Air France, les aiguilleurs du ciel ou encore , un conflit chasse l'autre. Sans compter que la tactique de l'exécutif n'est pas forcément payante : son intervention directe dans les négociations à la SNCF n'a pas empêché la grève illimitée qui commence ce mardi soir. Et dire qu'il reste près de deux mois avant que le Parlement ne se prononce définitivement sur la loi Travail…

 

 

Source : http://www.marianne.net

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 20:42

 

Source : http://mus21.hautetfort.com

 

 

 

 

La vrai vidéo de la confrontation de Macron avec des militants de Nuit Debout Nîmes

Ce n'était pas des militants de la CGT comme les grands média l'on dit.

L’anecdote du tee-shirt est à la fin vers la 7mn si vous ne voulez pas voir la vidéo dans son ensemble.

 

https://youtu.be/dEjEfsyywO0#t=7m00s

 

 

 

Source : http://mus21.hautetfort.com

 

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 18:52

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Solidarités

Conjuguer accueil des migrants, écologie et émancipation sociale : l’étonnant exemple de Grande-Synthe

par

 

 

Grande-Synthe, dans le Nord, est l’une des rares villes qui accueillent des centaines de migrants dignement. Malgré 30% de sa population active au chômage et un tiers de foyers vivant en dessous du seuil de pauvreté, c’est aussi là que se mènent des politiques écologiques et sociales ambitieuses. Le maire Damien Carême et son équipe y soutiennent une université populaire au service des habitants, y ont créé le premier stade à énergie positive de France et bâtissent un éco-quartier accessible aux populations pauvres. Un volontarisme politique auquel s’ajoute la solidarité à l’égard des réfugiés de passage vers l’Angleterre, bien loin du sort réservé aux migrants des bidonvilles glauques de Calais. Reportage.

Jusqu’il y a peu, le nom de Damien Carême était bien moins connu que celui de Natacha Bouchart, son homologue calaisienne de la droite dure, proche de Nicolas Sarkozy. Comme elle pourtant, le maire écologiste de Grande-Synthe a dû gérer sur sa commune, et dans des proportions comparables, l’arrivée depuis près d’un an d’un nombre conséquent de migrants qui souhaitent se rendre en Angleterre. Ce sont pour l’essentiel des Kurdes d’Irak. Ils ont représenté jusqu’à dix pour cent de la population locale – 21 000 habitants – en décembre dernier. La réponse humaniste et déterminée de Damien Carême et de son équipe, face à une crise humanitaire sans précédent depuis la Seconde guerre mondiale, fait que toute comparaison s’arrête là. La ville de Grande-Synthe a créé le premier camp français aux normes du HCR, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés. Cet épisode très médiatisé a révélé par ailleurs une ville pionnière dans l’aménagement du territoire, qui s’efforce de conjuguer écologie et lutte contre les inégalités sociales.

 

La ville qui inventa le « revenu social garanti »

La maison communale de Grande-Synthe est à l’image de la ville : un bâtiment de briques rouges, inauguré en 1978. Elle jouxte une cité HLM et son immense jardin partagé. On ne vient pas à Grande-Synthe, troisième localité de la communauté urbaine de « Dunkerque grand littoral », pour les richesses d’un patrimoine historique entièrement disparu. Malmené en 1940, le secteur a été détruit par l’armée allemande en septembre 1944. Après l’installation de l’usine sidérurgique d’Usinor en 1958, le modeste village de maraîchers a connu une explosion urbaine. C’est aujourd’hui une ville en grande difficulté, avec 28% de la population active au chômage, soit un taux près de trois fois supérieur à la moyenne nationale, un faible niveau de qualification et un tiers de foyers vivant en-dessous du seuil de pauvreté.

En 1971, une première équipe municipale, portée par René Carême, père du maire actuel, mène une politique volontariste pour doter la ville d’équipements sociaux et culturels. Électricien syndicaliste formé à la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), membre du Parti socialiste, l’édile a pour devise « partage de l’avoir, du savoir et du pouvoir ». Il double la taxe professionnelle – elle représente aujourd’hui 90% des revenus de la ville – et ouvre ainsi la voie à une politique publique ambitieuse, notamment la création d’un « revenu social garanti », qui annonce le RMI mis en place en 1988 par Michel Rocard. René Carême quitte la mairie au cours de son quatrième mandat en 1992. Son fils Damien reprend le flambeau en 2001, trois ans avant que son père ne s’éteigne comme il a vécu, dans un modeste HLM.

Énergies renouvelables et transport gratuit le week-end

Socialiste passé à Europe Écologie - les Verts en 2014, Damien Carême multiplie les exploits environnementaux en milieu hostile, influencé par le « mouvement de transition » qui émerge de l’autre côté de la Manche [1]. Entourée de 14 sites classés Seveso, à quelques kilomètres de la plus grosse centrale nucléaire d’Europe de l’Ouest, Grande-Synthe est devenue la capitale mondiale de la biodiversité en 2010. Plus de la moitié de l’énergie consommée par la ville est renouvelable : panneaux solaires, éoliennes, « gaz vert » issu pour l’essentiel de la méthanisation des déchets ménagers. Les espaces verts représentent 127 mètres carrés par habitant – quatre fois plus que la moyenne nationale. Les transports en commun sont gratuits le week-end sur l’ensemble de la communauté urbaine, dont Damien Carême est le délégué à la transformation écologique et sociale, à l’environnement, à l’énergie et aux transports. En 2014, il est aussi devenu le président de l’association des maires ville et banlieue de France (AMVBF).

L’un des fleurons de cette politique novatrice est le « stadium du littoral », qui s’étend sur douze hectares avec trois terrains de rugby, deux de football, un pas de tir à l’arc, une piste de jogging et un anneau cycliste. Inauguré en 2011, il est aujourd’hui, grâce à l’acquisition d’une éolienne en 2013, le premier stade à énergie positive de France. L’autre exemple que l’élu aime citer, c’est l’écoquartier de Basroch, lancé en 2013, qui comptera une densité moyenne de 50 logements par hectare, 40% de logements locatifs sociaux et un îlot d’habitat participatif. Basroch est par ailleurs le siège de l’atelier université populaire et accueillait jusqu’en mars une population de migrants dont le nombre a littéralement explosé en 2015, amenant le maire à créer un nouveau camp.

Une université populaire au service des habitants

Le maire de Grande-Synthe a également soutenu la création d’une université populaire, financée par la mairie. Objectif : renouer avec l’éducation populaire et sa pédagogie de l’émancipation, délaissée par la gauche depuis trente ans. Ici comme ailleurs, le maire privilégie l’implication des futurs acteurs du lieu. « Je me fiche des diplômes, ce que je veux, ce sont des militants », explique-t-il sans détour. « La sociologie mène à tout », sourit Julian Mierzejewski, fonctionnaire municipal et animateur de l’université populaire, alors qu’il trie des graines sur la table de la « maison écologique », un prototype d’habitat à très haute performance énergétique perçu à la fois comme outil pédagogique et vitrine de l’architecture durable.

 

 

Julian Mierzejewski, militant dans l’âme, reste au fond toujours un peu étonné de pouvoir vivre pleinement son engagement comme fonctionnaire municipal. C’est lui qui anime l’Atelier université populaire. © Olivier Favier

Ce grand chalet de deux étages héberge une large part des activités de l’« Atelier », du nom de l’université populaire locale. C’est ici que, trois fois par semaine, des écrivains publics bénévoles aident des habitants à remplir un dossier, rédiger un courrier administratif, compléter un formulaire. « L’idée, confie Julian, c’est aussi que les classes moyennes s’allient avec les classes populaires. » À l’Atelier, les jardiniers viennent chercher conseils et semences. Derrière la baie vitrée, s’étend un jardin-pilote destiné entre autres à alimenter en graines les cinq jardins populaires de la ville, plantés en pied d’immeuble. Les parcelles sont accordées gratuitement à qui en fait la demande, en fonction des disponibilités. Si les clôtures qui ferment les jardins sont aisément franchissables, les dégradations constatées sont minimes.

L’atelier accueille aussi des actions autour de la « fabrique de l’autonomie » : on y apprend à concevoir ses produits ménagers, économiques et écologiques, ou encore à lire sa facture d’eau – en détectant, par exemple, les doubles facturations. Alliant savoir et savoir-faire, l’Atelier organise des projections et des conférences-débats bimensuelles destinées à apporter une information alternative à celle des médias traditionnels, mais aussi des cafés-citoyens basés sur l’échange des savoirs et des idées. Jusqu’à 400 personnes y participent. Enfin, pour donner accès à tous à des produits de qualité, un groupement d’achats a été constitué pour l’acquisition en gros, directement aux producteurs, de pain, de fruits et de légumes de qualité, bio si possible, et locaux.

 

Que faire face à l’arrivée de 3000 réfugiés ?

« Ces dix dernières années, explique Damien Carême, il n’y avait sur le territoire de Grande-Synthe qu’un groupe de trente à quatre-vingt-dix migrants. Ils ne restaient que quelques jours, le temps d’embarquer dans les camions en halte à la station-service sur l’autoroute qui mène à l’Angleterre. » Durant l’hiver 2008, où la température est descendue à -15°, l’installation de cabanes en bois a été testée pour la première fois à Basroch, dans la zone où se projette aujourd’hui le nouvel écoquartier. Mais après le blocage complet de la frontière à Calais, à l’été 2015, la situation devient préoccupante [2]. Fin septembre, on dénombre plus de 500 personnes, plus du triple fin novembre, puis 2800 fin décembre, dont 300 enfants. Les conditions sanitaires sont alors pires qu’à Calais, les maladies se répandent : rougeole, varicelle, gale ou tuberculose.

La nécessité d’un camp apparaît comme la seule solution envisageable, d’autant que Médecins sans frontières (MSF) s’engage à prendre en charge une très large partie des frais de création : 2,5 millions d’euros. La ville avancera les 700 000 euros restant, comptant sur un remboursement de l’Union européenne pour ne pas peser sur le budget des habitants. Le préfet ne s’y oppose pas mais émet un avis défavorable, prétextant des raisons de sécurité. L’expertise de MSF et la détermination du maire ont raison de ces atermoiements. Le camp est créé en mars à la Linière, une zone à l’écart de la ville, entre la gare de marchandises et l’autoroute, alors que la population de réfugiés est désormais de 1300 personnes. Une pétition lancée en opposition à la création du nouveau camp ne recueille que quelques dizaines de signatures. « Je crois que les gens sont plutôt fiers de l’image de leur ville », pense Damien Carême.

 

« Mon salaire ici, ce sont les sourires des enfants qui font du vélo »

Pour que le camp puisse fonctionner, il faut compter sur la présence simultanée de 120 personnes, dont une écrasante majorité de bénévoles. Ceux-ci sont dans un premier temps coordonnés par Utopia 56, une association de Lorient créée par Yann Manzi, gestionnaire de campings dans les festivals de musique – notamment Les Vieilles Charrues. « Je ne veux pas être payé, je gagne bien ma vie par ailleurs, répète cet intermittent du spectacle qui alterne des cycles de travail intense et des périodes de relâche, mon salaire ici, ce sont les sourires des enfants qui font du vélo. » Sa proposition de créer une équipe professionnalisée est refusée et une association locale entre en lice fin avril : l’Afeji, qui lutte contre l’exclusion. Elle a signé, ce 30 mai, un accord tripartite avec la ville de Grande-Synthe et l’État. Ce dernier prendra en charge « le nettoyage des sanitaires, le gardiennage 24 h sur 24, la médiation sociale et la sécurité ». Vêtements et nourriture seront toujours assurés par les bénévoles.

 

 

Les cabanons sont prévus pour accueillir 5 personnes. Lorsque les migrants rejoignent l’Angleterre, il n’est pas rare que le passeur conserve les clés du cadenas et cherche à louer l’accès du logement aux nouveaux venus. © Olivier Favier

Au cœur du camp, Fulgence s’est chargé de monter une école avec l’association Edlumino, qui réunit des enseignants français et britanniques venant en aide aux enfants dans les camps de réfugiés. Un bâtiment est destiné à accueillir les enfants de 3 à 7 ans, un second ceux de 7 à 17 ans. Parallèlement à l’enseignement de l’anglais, celui du français, encore sous-représenté, apparaît essentiel. Désormais 20% des migrants présents sur le camp font une demande d’asile en France. Le 12 mai, le préfet de région a annoncé son désir de scolariser les enfants « dans les écoles de la République », une préoccupation pour le moins surprenante quand on connaît le peu d’attention porté par les institutions aux mineurs de Calais, dont beaucoup sont sans famille.

 

L’État va-t-il fermer le seul camp de réfugiés à peu près digne

Les bénévoles qui sont sur le camp de Grande-Synthe viennent d’Angleterre, de Belgique, d’Allemagne, de toute la France. Ils y demeurent le week-end ou plusieurs semaines, parfois quelques mois. Tous ou presque sont logés pour cinq euros la nuit dans les bungalows d’un camping environnant. L’intérêt des tâches évolue bien sûr avec la durée du séjour. Les migrants vient sur le camp en moyenne plusieurs mois. Avant que l’État n’annonce son projet de reprise en main du camp, l’idée était d’évoluer vers une gestion mixte, de plus en plus autonome. L’organisation quotidienne n’est pas seulement logistique. De jour et surtout de nuit, il faut lutter contre l’influence des passeurs, souvent armés. De nombreux réseaux ont été récemment démantelés.

 

 

« Je laisse la police et la justice faire leur travail », répète Damien Carême, qui tient cependant à ce que la présence des forces de l’ordre aux abords du camp soit réduite et discrète. La sécurisation des abords, notamment les entrées et sorties des véhicules, est pour l’instant gérée par les bénévoles. Jusqu’à ce jour, il n’était pas question de contrôler les allers et venues des habitants, comme cela se fait à Calais dans le camp de containers. Ici, la priorité est d’apporter un minimum de confort et à faire, autant que possible, de ce lieu de passage un espace convivial et accueillant. La prochaine étape est l’érection d’un mur anti-bruit, pour protéger les migrants des nuisances sonores de l’autoroute et empêcher les incursions dangereuses sur la chaussée.

La gestion annuelle du camp a été estimée initialement à 4 millions d’euros. Très loin du budget de 18 millions d’euros du centre d’accueil Jules Ferry à Calais pour un nombre équivalent de migrants ! Ou des 54 millions d’euros dépensés pour la mobilisation de 18 unités de forces mobiles affectées à la surveillance du bidonville et de la zone portuaire. À la mi-mai, l’État semble faire de sa reprise en main du projet de Grande-Synthe la condition sine qua non pour le financement de son entretien. Parallèlement, les départs ont donné lieu au démontage des cabanons et non à l’accueil de nouveaux venus. La population du camp est désormais de 700 habitants. On peut craindre que n’ayant pu interdire sa construction, les autorités cherchent désormais à réduire le camp de la Linière au plus vite. Quelle que soit la pérennité du projet, il aura montré qu’un accueil digne est possible. Y renoncer par peur d’un « appel d’air » est non seulement indigne, mais parfaitement infondé.

Olivier Favier

Photo de une : Fulgence, les bénévoles et les enfants à l’entrée de l’école des petits. © Olivier Favier.

Notes

[1Ce mouvement entend d’une part inciter les citoyens d’un territoire (bourg, quartier, village…), à prendre conscience des profondes conséquences que vont avoir sur nos vies la convergence du pic du pétrole et du changement du climat et, d’autre part, de la nécessité de s’y préparer concrètement.

[2En juillet 2015, un « corridor sécurisé » est installé pour « protéger » le port de l’arrivée des migrants. D’autres stratégies se sont développées autour du site d’Eurotunnel, lesquelles ont été à l’origine de plusieurs décès. Cette année, 300 mètres de grillage seront ajoutés d’ici l’été. Des centaines d’hectares de végétation ont été rasés, des terres ont été inondées, des dunes aplanies. Les factures successives réglées par la Grande-Bretagne s’élèvent désormais à plusieurs dizaines de millions d’euros.

 

Cet article vous a intéressé ? Basta ! a besoin de ses lecteurs pour poursuivre son travail, faites un don.

 

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 18:08

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

Blessé grave à Nation: la grenade de trop pour Bernard Cazeneuve
30 mai 2016 | Par Karl Laske
 
 

Mediapart s’est procuré plusieurs vidéos qui précisent dans quelles circonstances les policiers ont lancé une grenade de désencerclement dans la foule, cours de Vincennes, à Paris, blessant grièvement un jeune de 28 ans à la tête. Il n’y avait aucun danger imminent pour les fonctionnaires, qui ont lancé, dans les minutes qui ont suivi, une grenade lacrymogène en direction du blessé.

Comme à Sivens, en octobre 2014, une grenade lancée sans précaution a touché un jeune, jeudi 26 mai, près du cours de Vincennes, à Paris. Comme en octobre 2014, après Sivens, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve a fait savoir qu’il fallait « établir les circonstances » de l’incident, tout en saluant « la mobilisation des forces de l’ordre », « engagées pour sécuriser » la manifestation.

Jeudi, Romain D., 28 ans, a été atteint à la tête par l’éclat d’une grenade de désencerclement lancée dans la foule à l’issue de la manifestation contre la loi sur le travail. Victime d’une « fracture temporale avec enfoncement de la boîte crânienne », il s’est écroulé, puis a repris connaissance peu avant d’être emporté par les pompiers. Il a été plongé dans le coma, samedi, après avoir été opéré à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Photographe indépendant, il portait une caméra Go-Pro et filmait les événements de l’après-midi.

 

Les policiers rejoignent leurs collègues, en avant le gradé tient déjà la grenade à la main droite. © Capture d'écran de la vidéo réalisée par LDC. Les policiers rejoignent leurs collègues, en avant le gradé tient déjà la grenade à la main droite. © Capture d'écran de la vidéo réalisée par LDC.

 

En dépit de l’existence de deux vidéos (que l'on peut retrouver ici et ) qui montrent sans ambiguïté un policier lancer une grenade de désencerclement dans la foule, Bernard Cazeneuve ne s’est pas exprimé sur les faits, dans l’attente des résultats de l’enquête. Il a souhaité, par communiqué, un prompt rétablissement au « jeune homme » blessé par la police. Le ministre de l’intérieur a aussi reçu sa famille samedi matin, en compagnie du préfet de police Michel Cadot.

Deux enquêtes sont ouvertes, toutes deux entre les mains de l’IGPN, la police des polices : l’une à la demande du ministre, qui vise examiner les conditions déontologiques de l’usage de cette arme et le respect des consignes de sécurité, l’autre a été ouverte, dès jeudi soir, par le parquet de Paris pour « violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique », pour déterminer les circonstances dans lesquelles la victime a été blessée, et l'origine de ses blessures.

Selon le ministère de l’intérieur, le policier a lancé cette grenade « de manière conventionnelle » – vers le sol et non pas en l’air –, mais « le contexte » dans lequel il l’a fait reste plus incertain, reconnaît-on. L’autre point d’interrogation, plus technique, mis en avant par le ministère – « sans vouloir minorer les faits » – vise à déterminer comment la grenade – ou un éclat de celle-ci – a pu atteindre la tête de la victime.

L’incident, qui pourrait laisser d’importantes séquelles à Romain D., pose la question plus générale de l’arsenal utilisé ces dernières semaines par les forces de l’ordre pour contenir les manifestations contre la loi sur le travail à Paris et en province. De nombreuses personnes ont été touchées par des tirs de Flash-Ball, ou de grenades de désencerclement, dans des conditions non réglementaires – tirs tendus de Flash-Ball ou de grenades par exemple. L’usage de cet armement – « moyens de force intermédiaire » – répond de fait aux directives du ministre de l’intérieur.

« Des consignes politiques, signées du ministre, ont été données par l'intermédiaire des préfets de faire preuve de la plus grande fermeté face aux troubles, explique Luc Larcher, secrétaire général adjoint de l’UNSA officiers. Ce sont des moyens de fermeté, dans le respect des règles républicaines. » Le ministre « ne valide pas les dispositifs » de maintien de l’ordre parisien, précise-t-on cependant au ministère. Place de la Nation, lieu d’arrivée de la manifestation, le préfet avait disposé plusieurs unités de CRS, Gendarmes mobiles, Compagnie d’intervention (CI) et Compagnies de sécurisation et d’intervention (CSI, les anciennes « BAC secteurs ») afin de procéder à des « saute-dessus » au fur et à mesure de l’arrivée du cortège syndical sur la place. Cette course à l’interpellation s’est poursuivie jusqu’à la porte de Vincennes, où la grenade a été employée.

 

La ligne de policiers qui progresse cours de Vincennes en direction d'un groupe de manifestants © Video Claire Ernzen La ligne de policiers qui progresse cours de Vincennes en direction d'un groupe de manifestants © Video Claire Ernzen

 

De nouvelles vidéos obtenues par Mediapart montrent qu’en fait de « sécurisation », les policiers qui sont intervenus cours de Vincennes, membres d’une Compagnie d’intervention (CI) de la préfecture, ont utilisé cette grenade sans être confrontés à aucun danger imminent, au milieu d’une foule composée pour beaucoup de curieux et de journalistes. Ils rejoignaient trois collègues postés dans une cour d’immeuble avec un interpellé. Une habitante de l’immeuble au pied duquel s’étaient retranchés les policiers filmait la foule et le face-à-face, lorsque survient l’explosion. « Quand ils ont tiré cette bombe, je filmais, mais j’ai eu un mouvement de recul, j’ai eu peur, raconte-t-elle à Mediapart. Et puis, j’ai vu la personne au sol. Ça aurait pu être un enfant du quartier. Il y a plein d’enfants à cette heure-ci dehors ! »

 

© Mediapart

 

Dans les minutes qui suivent l’explosion de la grenade, plusieurs personnes portent Romain D. quelques mètres plus loin. À l’abri, pensent-ils. En réalité, les policiers lancent encore deux grenades lacrymogènes en direction de la foule, l’une d’elles atterrit à un mètre à peine du blessé.

 

© Mediapart

 

La puissance de l’explosion surprend l’immeuble. Introduite en 2004, la grenade à main de désencerclement (GMD) émet 160 décibels, et propulse des projectiles en caoutchouc – 18, au total – alentour, mais aussi les débris parfois coupants et plus moins gros de son emballage. Fabriquée notamment par la société SAPL, sous la dénomination commerciale DBD 95 (pour  « Dispositif balistique de dispersion », on l’appelle aussi « Dispositif manuel de protection », DPM), elle a été conservée dans l’arsenal des forces de l’ordre malgré des incidents mentionnés en novembre 2014 dans le rapport d’inspection sur « l’emploi des munitions en opérations de maintien de l’ordre ».

 

« Je suis extrêmement choquée »

À la suite de la mort de Rémi Fraisse, Bernard Cazeneuve avait choisi d’interdire la grenade offensive « OF F1», remettant en service la GLI-F4 (une autre grenade offensive à effet lacrymogène) dans les forces de gendarmerie, et conservant la grenade de désencerclement en dotation de toutes les forces de sécurité. Selon ce rapport, les gendarmes avaient utilisé 590 GMD entre 2010 et 2014, contre 571 pour les CRS entre 2009 et 2014. Des GMD ont été utilisées, boulevard Diderot à Paris, le 1er mai, à Paris, faisant plusieurs blessés parmi les photographes.

 

© DOC du réel

 

Les consignes d’utilisation de la grenade de désencerclement, du Taser et du lanceur de balles de défense, ont été rappelées par une circulaire des directeurs de la PJ et de la gendarmerie, le 2 septembre 2014 – avant Sivens. « La GMD est susceptible d’être utilisée lorsque les forces de l’ordre se trouvent en situation d’encerclement prises à partie par des groupes violents ou armés », avertit la circulaire, que l’on peut télécharger ici. Son usage « constitue un emploi de la force », « qui n’est autorisé que lorsque sont réunies les conditions de nécessité et de proportionnalité requises par la loi ». Le recours à la force « doit être proportionné, et il n’est possible que si les circonstances le rendent absolument nécessaire ».

Pour invoquer la légitime défense, les moyens de défense doivent être proportionnés à la gravité de l’attaque. « On ne peut pas prévenir une violence en lançant une grenade, explicite Anthony Caillé, du SGAP-CGT Police. Si elle a été lancée, c’est que les fonctionnaires se sont sentis en danger, mais on ne peut pas utiliser une arme en prévention d’un acte qui n’a pas eu lieu. La légitime défense, c’est compliqué mais c’est simple de ce point de vue-là. »

Dans le cas présent, les vidéos en notre possession montrent que les policiers, membres d’une Compagnie d’intervention (CI) de la préfecture de police, sont arrivés à pied, mais sans courir, sur le cours de Vincennes, poursuivant des manifestants qui refluaient vers la porte de Vincennes. Un groupe d’une centaine de personnes environ, des « grappes de jeunes », selon un témoin. Ces policiers portent des casques noirs avec un liseré bleu, ce qui les distingue des CRS (liseré jaune) et des gendarmes (casque bleu).

Arrivés à hauteur du métro Porte de Vincennes, et de la station de tramway, ils interpellent un jeune, en tenue de sport claire et vont se mettre à l’écart avec lui dans la petite cour de l’immeuble qui fait l’angle du cours de Vincennes et de la rue du Général-Niessel. C’est alors qu’un attroupement se forme devant l’immeuble. De nombreux journalistes filment et Romain D. s’approche.

 

Romain D. s'approche de l'entrée de la cour, où les policiers se sont retranchés © Vidéo Claire Ernzen Romain D. s'approche de l'entrée de la cour, où les policiers se sont retranchés © Vidéo Claire Ernzen

 

Un groupe de cinq policiers de la CI s’engage dans la rue Général-Niessel, pour rejoindre leurs collègues. L’un d’eux, un gradé – reconnaissable à la bande blanche sur l’uniforme –, tient une grenade à la main droite. Comme le rappelle la circulaire de septembre 2014, les forces de l’ordre doivent procéder à des sommations avant de lancer une grenade de désencerclement en direction d’un attroupement, et si elles ne le font pas, ce ne peut être qu’« en cas de violences et de voies de fait exercées contre les forces de l’ordre qui ne peuvent défendre autrement le terrain qu’elles occupent ».

 

Le policier lance la grenade, sous les yeux de Romain D., derrière la jeune femme qui filme la scène. © Capture d'écran de la vidéo réalisée par LDC. Le policier lance la grenade, sous les yeux de Romain D., derrière la jeune femme qui filme la scène. © Capture d'écran de la vidéo réalisée par LDC.*
 

« En cas d’usage de cette arme, l’utilisateur doit, dans la mesure du possible, prendre en compte dans son analyse les particularités environnementales afin de prévenir tous dommages collatéraux, tels que les risques pour les personnes se trouvant à proximité. » Il est recommandé au policier d’être protégé ou abrité, au moment du lancer. Les deux vidéos prises par les journalistes sur place permettent de voir ce mouvement de protection du tireur opéré par deux policiers avant d’entrer dans la cour d’immeuble. On aperçoit aussi Romain D. suivre la progression des policiers.

 

Romain D. s’est affaissé. La grenade a été lancée dans la foule, sans sommation, et alors que les policiers ne subissaient aucune violence, si ce n’est de l’hostilité verbale et des sifflets. Ils n’étaient pas « encerclés » contrairement à ce que plusieurs médias ont indiqué, notamment France 3. Comme on le voit sur notre vidéo, le jeune photographe n’a pas non plus heurté les plots qui bornent le passage piéton, autre thèse ayant circulé afin d’exonérer la grenade. « Après usage d’un GMD et en cas d’interpellation, il convient de s’assurer aussitôt de l’état de santé de la personne et de la garder sous surveillance permanente. Au besoin, un examen médical doit être effectué dans les meilleurs délais », stipule l’instruction officielle.

Confrontés aux cris et aux protestations de la foule, les hommes de la CI décident de lancer deux nouvelles grenades lacrymogènes pour éloigner les manifestants en colère. L’une d’elles atterrit près du blessé. « Ils ont continué à lancer des grenades à proximité du jeune homme, et des gens qui s'occupaient de lui, s'indigne une autre habitante de l'immeuble, la documentariste Claire Ernzen. Je suis terriblement choquée. »

 

Les policiers lancent deux nouvelles grenades pour éloigner la foule, l'une d'elles à proximité du blessé © Video Claire Ernzen Les policiers lancent deux nouvelles grenades pour éloigner la foule, l'une d'elles à proximité du blessé © Video Claire Ernzen

 

Des gendarmes mobiles et d’autres forces de police font par la suite leur apparition afin de sécuriser le périmètre où se trouve le blessé. L’interpellé est finalement extrait de la cour d’immeuble par un groupe de policiers qui se faufile entre les gendarmes. La compagnie d’intervention se met en rang par deux pour quitter les lieux. Elle traverse la foule, et subit encore quelques sifflets avant de rejoindre les camions blancs de son unité.

L’enquête devrait dire jusqu’à quel niveau la chaîne de commandement est impliquée dans ce lancer de grenade. « Dans les unités de CRS, une GMD ne peut être lancée que sur ordre du commandant de la compagnie, le chef d’escadron, explique Luc Larcher de l’UNSA. La GMD, c’est le dernier moyen. Est-ce qu’il était acculé ? Tous les cas sont particuliers mais il n’y a que la hiérarchie qui peut décider. La grenade se lance en dessous et en principe, ça pète dans les jambes. Elle se lance au roulé, parce qu’il y a une charge à l’intérieur. Et si ça vient à toucher le corps, ça blesse gravement. »

Lundi, Jacques Toubon, le Défenseur des droits, souvent saisi sur les questions de respect de la déontologie des forces de sécurité, a annoncé qu'il ouvrait une enquête sur l'usage d'une grenade de désencerclement ayant blessé Romain D. À la lecture des deux vidéos, un responsable d’Alternative Police CFDT a estimé sur France 3 qu’il n’y avait « pas d’erreur d’utilisation ». Et ce syndicat s'est prononcé formellement en défense des fonctionnaires, jugeant qu'il n'y a « aucun doute » : « Les conditions d'utilisation de la grenade ont bien été respectées. »

« Toute déclaration intempestive de pseudo-violences policières n'a pas lieu d'être », prévient même la CFDT. « Les images, je les ai vues, mais comme à chaque fois, on voit la fin de l'intervention des policiers, commente de son côté Philippe Capon, secrétaire général de l’UNSA. Je suis méfiant sur ce type d’images qui ne nous disent pas ce qui s’est passé avant. » Avant justement, il ne s’est pas passé grand-chose.

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 17:03

 

Source : http://www.marianne.net

 

 

Loi Travail : le référendum syndical, faux ami des salariés
Pierre Gattaz et ses amis patrons de la Fnac ou des Galeries Lafayette n'en peuvent plus de voir les syndicats de salariés majoritaires bloquer les accords négociés avec les syndicats minoritaires, notamment ceux qui étendent le travail du dimanche. Alors Manuel Valls et Myriam El Khomri leur ont concocté une réforme sur mesure, intégrée dans la loi Travail, au nom qui fleure pourtant bon la démocratie : le référendum d'entreprise…
 
Le référendum d'entreprise est une mesure poussée par la droite et le patronat. - Sipa
 

Les syndicats, soit ils signent, soit on les évite. Dernier exemple en date de ce type de bras de fer direction-syndicats, le conflit au sein des Galeries Lafayette sur le travail du dimanche est en passe de finir devant la justice. La direction du groupe y conteste en effet la représentativité des syndicats majoritaires (CGT, FO et SCID) qui ont exercé leur droit d'opposition contre un accord proposé au sein de l'entreprise pour étendre le travail du dimanche. Mais si la loi Travail passait, elle offrirait à la direction une solution toute simple sur un plateau…

Résumé de la situation aux Galeries Lafayette : profitant des possibilités ouvertes par la loi Macron de 2015, la direction souhaite ouvrir tous les dimanches son magasin phare, boulevard Haussmann à Paris. A la suite de l'échec des négociations de branche, elle propose en mai un accord d'entreprise aux syndicats de salariés, rejeté à l'unanimité. Le 20 mai, elle parvient finalement à signer un compromis avec la CFE-CGC et la CFTC. Les deux syndicats sont habilités à le faire, puisqu'ils représentent à eux deux 37,94% des voix aux élections professionnelles, au-delà donc du seuil de 30% nécessaire à la validation de l'accord, prévu par la loi sur la représentativité syndicale de 2008. Mais cette même loi accorde aussi un droit d'opposition aux syndicats qui ne sont pas d'accord, à condition qu'eux représentent plus de 50% du personnel. C'est ce qu'il s'est passé vendredi : la CGT, FO et SCID, qui représentent 60,87% des salariés des Galeries, ont rejeté un "cadeau à la direction", dénonçant une signature "à la hâte" et "sous pression". Ce veto étant indépassable dans l'état actuel de la législation, l'accord est de facto rejeté.

 

"Le référendum d'entreprise, je n'y crois pas"

Pour tenter de faire valider son accord malgré tout, la direction des Galeries Lafayette conteste donc en justice la représentativité d'un des trois syndicats qui lui pose problème, le SCID (14,19%). La décision de la justice est attendue le 9 juin. Mais grâce à la loi El Khomri, adoptée en première lecture à l'Assemblée, les patrons pourront bientôt s'épargner ces imbroglios judiciaires. Et ce, grâce à une disposition intégrée au texte in extremis, annoncée à la surprise générale par Myriam El Khomri le 26 janvier dernier : le référendum d'entreprise à initiative syndicale. L'idée est lumineuse : quand un accord sera rejeté par les syndicats majoritaires, comme aux Galeries, ceux qui ont signé l'accord - à condition toujours qu'ils représentent au moins 30% du personnel - pourront lancer une consultation des salariés, laquelle aura le dernier mot.

Smart ou le chantage par référendum

A priori, quoi de plus démocratique que de faire voter les salariés ? Mais l'annonce de Myriam El Khomri a d'autant plus créé la surprise que le 20 octobre dernier, la ministre du Travail avait elle-même déclaré : "Le référendum d'entreprise, je n'y crois pas". A l'époque, elle réagissait au cas de l'usine Smart de Moselle, où les syndicats avaient rejeté un accord proposé par la direction pour relever de 37 à 39 heures le forfait d'heures payées 35. Menaçant de devoir recourir à des suppressions, la direction avait arraché l'accord de 56% des salariés lors d'un référendum. Le vote n'avait qu'une valeur consultative mais il a mis en valeur une chose : même quand leurs représentants syndicaux sont unanimes à rejeter un accord en leur défaveur, les salariés peuvent céder face au chantage à l'emploi. C'est pourquoi le gouvernement l'avait désavoué, Myriam El Khomri ajoutant : "Je n'y suis pas favorable, je crois aux syndicats dans notre pays. Pour moi les corps intermédiaires sont importants, ils représentent les salariés, ils ont été élus pour."

"On supprime le droit d'opposition"

Mais cela, c'était avant le cas Fnac, trois mois plus tard. Comme aux Galeries Lafayette, un accord sur le travail dominical est rejeté par les syndicats majoritaires alors qu'il avait été signé par trois syndicats représentant plus de 30% du personnel. Nous sommes le 20 janvier. Six jours plus tard, donc, coup de théâtre : le gouvernement intègre un référendum d'initiative syndicale dans son projet de loi Travail. Un nouvel "amendement Fnac", en somme, après le rejet de celui proposé dans la loi Macron l'an dernier, qui devait justement accorder de nouvelles possibilités d’ouverture aux distributeurs culturels. Et Myriam El Khomri a un argument tout trouvé pour expliquer que cela n'a rien à voir avec le chantage mené chez Smart, et que donc elle ne se contredit pas par rapport à ce qu'elle disait le 20 octobre :  il ne s'agit "pas d'un référendum à la main des entreprises mais d'un référendum à la main des organisations syndicales".

"Le referendum, c'est la mort du fait syndical !"
Sauf que comme l'a montré le cas Smart, les salariés ne sont pas toujours les mieux placés pour peser face à la direction… "Dans une période de chômage de masse, on est structurellement dans une forte situation de déséquilibre des rapports de force. Le chantage à l'emploi, individuel et collectif, d’un employeur envers ses salariés, ça existe, il y a eu des exemples", souligne pour Marianne Jérôme Pélisse, professeur de sociologie à Sciences Po et spécialiste des relations professionnelles. Lequel confirme un fait souligné par Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO, au moment de l'annonce du référendum : "On supprime le droit d'opposition". "Cela revient à dire qu'aucun poids n'est donné aux élections professionnelles alors même que nous tirons notre légitimité de celles-ci", abondait Carole Couvert, présidente de la CFE-CGC. Résonnant avec les propos de Myriam El Khomri en octobre dernier, mais aussi avec cette maxime : "Le referendum, c'est la mort du fait syndical !". Celle-ci est de Jean Auroux, ministre du Travail de François Mitterrand, père de la "citoyenneté dans l'entreprise".


Source : http://www.marianne.net

 

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 16:47

 

Source : http://www.marianne.net

 

 

Le nombre de travailleurs détachés en France a bondi de 25% en 2015

Alors que se tient ce lundi 30 mai à Matignon un conseil national de la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement, on apprend que le nombre de travailleurs détachés enregistrés en France a crû de 25% en 2015, ce qui les porte à plus de 286.000 personnes.
 
Plus de trois quarts des contrôles anti-fraude au détachement ont été menés dans le BTP en 2015. - Sipa/Illustration
 

Au programme à Matignon ce lundi 30 mai : l'épineux sujet des travailleurs détachés, source de dumping social et de fraudes. Et le chantier est immense : le nombre de travailleurs détachés enregistrés en France n'a jamais été aussi élevé. Selon des données provisoires transmises à la Commission nationale de lutte contre le travail illégal (CNLTI) et publiées samedi 28 mai par l'AFP, ils sont 286.025 à avoir été déclarés à l'administration française en 2015, soit une progression de 25% par rapport à l'année précédente.

 

La France en première ligne

La forte hausse du nombre de travailleurs détachés enregistrés en France, qui a décuplé en dix ans (ils étaient 26.466 en 2005), est rendue publique alors que le gouvernement tente de modifier la législation européenne. Le conseil national contre le travail illégal qui se réunit ce lundi 30 mai à Matignon devrait réitérer à la Commission européenne. La ministre du Travail avait alors demandé l'inscription dans une directive du principe : "à travail égal, salaire égal sur un même lieu de travail". Un mois plus tard, par la commissaire européenne à l'Emploi Marianne Thyssen.

Actuellement, un employeur doit rémunérer un travailleur détaché au moins au salaire minimum imposé par le pays d'accueil, mais n'est pas contraint par les règles européennes de tenir compte des autres avantages salariaux dont bénéficient ses collègues, comme les primes, indemnités ou tickets-restaurant. Avec l'application de ce principe, les travailleurs détachés seraient couverts par les lois et les conventions collectives des pays d'accueil.

Pas d'évolution sur les cotisations

46.816 travailleurs polonais en FranceLa Commission européenne a répondu favorablement en mars à l'appel de Paris, en retenant d'autres propositions françaises comme la limitation à deux ans de la durée du détachement, contre 30 mois aujourd'hui, ou l'arrêt du recours en cascade de détachements des salariés intérimaires. Mais Bruxelles ne compte pas pour autant revenir sur l'épineuse question des cotisations sociales. L'employeur continuera à payer les cotisations du salarié détaché selon la législation de son pays d'origine, et non celle du pays d'accueil. De cette façon, un travailleur venu par exemple d'un pays de l'Est coûte bien moins cher à un employeur français. La Pologne est le principal pays d'origine des salariés détachés en France avec 46.816 travailleurs.

Les règles concernant le paiement des cotisations sociales n'étant pas prêtes d'évoluer, le ministère du Travail renforce son arsenal répressif contre la fraude au détachement. Depuis l'été 2015, l'inspection du travail a intensifié ses contrôles, passant de 600 interventions en juin 2015 à 1.504 en mars 2016. Plus de trois quarts ont été effectuées dans le BTP (76%). Des contrôles de plus en plus nombreux qui "montrent une augmentation du nombre de fraudes", précise le gouvernement. Et d'expliquer que la forte hausse du nombre de travailleurs détachés en 2015 est "probablement"  due aux "contrôles de plus en plus fréquents" et aux "sanctions nouvelles" qui ont poussé certains employeurs à déclarer des "détachements précédemment non déclarés"… En somme, les 286.000 travailleurs détachés enregistrés en 2015 auraient été déjà présents les années précédentes… mais tous n'auraient pas été déclarés.

 

 

Source : http://www.marianne.net

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 16:33


Source : http://www.lesechos.fr

 

 

Rémunération : le rappel à l'ordre du patronat français à Carlos Ghosn
Maxime Amiot Le 26/05 à 19:06

Le double PDG conseil d’administration Renault pression Le double PDG et le conseil d’administration de Renault sont sous pression - Christophe Ena/AP/SIPA

 

+DOCUMENT – Dans une lettre confidentielle obtenue par « Les Echos », l’Afep-Medef pointe la double rémunération du PDG de Renault-Nissan et appelle le patron à la « mesure ».

Les relations se tendent entre le patronat français et Carlos Ghosn. Dans une lettre envoyée au PDG de Renault et de Nissan le 19 mai 2016, et dont « Les Echos » ont obtenu une copie (lire ci-dessous), le haut comité de gouvernement d'entreprise (HCGE) de l'Afep-Medef, met directement en cause le montant de la rémunération globale du double PDG.

Ce document de deux pages livre le point de vue du patronat sur le rejet par les actionnaires de Renault (à 54 %) de la rémunération attribuée à Carlos Ghosn au titre de 2015. Une « première en France » rappelle le HCGE, qui a depuis fait couler beaucoup d'encre et conduit cette semaine les députés à voter un texte sur le sujet avec l'aval de Manuel Valls et Emmanuel Macron.

La « mesure » érigée en principe

Le HCGE n'avait publié qu'un bref communiqué le 19 mai. Sa lettre détaillée donne certes en préambule un « satisfecit » sur la structure même de la rémunération en question (fixe, variable, action de performance), qui reflète à la fois des résultats en hausse, et qui affiche dans le document de référence des « indications suffisantes » (objectifs, différents avantages...). Mais le ton se durcit ensuite.

La rémunération des dirigeants doit tenir compte des réactions des autres parties prenantes de l'entreprise, et de l'opinion en général.

Le Haut comité regrette la trop grande « rapidité » avec laquelle le conseil d'administration de Renault a décidé de maintenir la rémunération contre l'avis des actionnaires. Surtout, il pointe sans fard le « montant global », source selon lui de l'opposition des actionnaires. Soit les 7,2 millions d'euros attribués à Carlos Ghosn côté Renault, mais aussi les 8 millions d'euros perçus chez Nissan. Le HCGE souligne que le code Afep-Medef érige la « mesure », comme un principe, et doit « tenir compte des autres parties prenantes de l'entreprise, et de l'opinion en général ».

L'ambiguïté du double statut

Le comité rappelle que les 7,2 millions constituent « l'un des montants les plus élevés attribués aux dirigeants des sociétés du CAC 40 ». Mais plus profondément, il milite pour une vision plus « exhaustive » du package de Carlos Ghosn, en intégrant celui de Nissan, soit 15 millions d'euros en tout. Selon lui, la polémique en cours provient de l'« ambiguïté » créée par le statut très particulier du dirigeant, à la fois aux manettes de Renault et de Nissan. De deux choses l'une, indique le HCGE. Ou bien Renault et Nissan sont deux sociétés « autonomes », et dans ce cas, il faudrait, selon le HCGE, justifier « soigneusement » comment, en terme de disponibilité, la direction « peut être exercée par une seule personne », afin de répondre aux critiques qui jugent que la rémunération de Renault équivaut à un mi-temps.

 

Ou bien, au vu des relations financières étroites entre Renault et Nissan, la performance du patron du groupe français est « indissociable » de celle du président de Nissan. Et dans ce cas, le conseil français doit raisonner sur « l'ensemble des deux fonctions », et donner des indications détaillées sur le package attribué chez Nissan, qui n'est pour l'heure pas détaillé en France. Un exercice nécessaire, insiste le HCGE, d'autant que la valeur des actions de performance attribuées à Carlos Ghosn chez Renault (4,2 millions) dépend étroitement de la contribution de Nissan aux résultats de Renault.

Demande de « mesures significatives »

Le HCGE s'invite ainsi sur un terrain miné : la gouvernance de l'alliance Renault-Nissan. C'est-à-dire le statut atypique d'une alliance dotée d'un même PDG rendu incontournable, au risque de brouiller les frontières entre ses fonctions chez Renault et Nissan. C'est sur ce terrain qu' Emmanuel Macron avait croisé le fer l'année dernière avec Carlos Ghosn .

Nul doute que ce front commun ne sera pas du goût du double PDG, qui n'a jamais apprécié que ses actionnaires français, et en particulier l'Etat, s'immiscent dans ses affaires japonaises. Le HCGE demande que le conseil de Renault se réunisse « d'ici quelques semaines au plus tard » et « annonce des mesures significatives ». Le comité rappelle que la position de Renault aura des conséquences importantes pour « préserver le régime de régulation professionnelle » du patronat...

La lettre envoyée par le HCGE à Carlos Ghosn

 

Salaire des patrons, une polémique sans frontières

La question de la paie des PDG n'est pas une question franco-française. Elle se pose dans tous les pays occidentaux, rappellait cette semaine l'éditorialiste des « Echos » Jean-Marc Vittori dans sa chronique : Bob Dudley, chez le pétrolier britannique BP, Lloyd Blankfein chez la banque d'affaires américaine Goldman Sachs ou encore les dirigeants de l'allemande Deutsche Bank ont subi la semaine dernière l'opposition de leurs actionnaires. Et d'autres assemblées générales risquent d'être houleuses dans les prochaines semaines. Plusieurs grands fonds d'investissement, à l'image du fonds souverain norvégien, commencent à d'ailleurs à prendre position sur la question.

 

Source : http://www.lesechos.fr

        

                                                                                 ****************************

 

Source : http://www.lesechos.fr

 

 

Salaire des PDG : une polémique sans frontières
Jean-Marc Vittori
 
 

image:

Salaire PDG : polémique frontières Salaire des PDG : une polémique sans frontières

Les patrons sont-ils trop payés ? Le débat touche tous les pays occidentaux. Il faudra trouver des moyens pour que leur rémunération renforce la solidarité dans l'entreprise, comme le stipule… le code Afep-Medef.

En pleine tempête sur le salaire des patrons, ce sondage aurait dû attirer l'attention. Les trois quarts des sondés trouvent que les PDG touchent trop par rapport au salarié moyen. Près de deux sur trois estiment qu'il faudrait plafonner leur salaire - même les électeurs de droite sont majoritaires à le penser. Et ce plafond ne devrait pas être fixé à cent fois le salaire minimum, comme l'ont proposé récemment quarante personnalités généreuses dans le quotidien « Libération », mais à six fois le salaire moyen de l'entreprise. Petite précision utile pour éviter l'apoplexie des lecteurs dirigeants : ce sondage n'a pas été réalisé en France, ni dans une Europe de l'Est nostalgique du communisme, ni en Corée du Nord... mais aux Etats-Unis. Pour le compte de la première « business school » du pays, celle de Stanford.

La paie des PDG n'est pas une question franco-française. Elle se pose dans tous les pays occidentaux. Carlos Ghosn, PDG de Renault, n'est pas le seul chef d'entreprise à la rémunération remise en cause par les actionnaires. C'est aussi le cas de Bob Dudley, patron de la major pétrolière britannique BP. Ou de l'équipe dirigeante de la grande banque allemande Deutsche Bank. Même Lloyd Blankfein, le boss de la célèbre banque d'affaires américaine Goldman Sachs, a senti passer le vent du boulet la semaine dernière avec un tiers des actionnaires opposés à sa rémunération, pourtant en baisse de 1,4 million de dollars.

Et ce n'est sans doute pas fini. D'autres assemblées générales risquent d'être houleuses dans les prochaines semaines. Les investisseurs s'impatientent. Yngve Slyngstad, qui pilote le fonds souverain norvégien (750 milliards d'euros d'actifs), déclare que «  nous devons examiner de près ce qu'est un niveau adéquat de salaire pour un dirigeant ». Chez le gestionnaire d'actifs Aberdeen (près de 400 milliards d'euros sous gestion), on évoque une «  perte de confiance » envers certains comités de rémunération, qui élaborent le système de paie des dirigeants au sein des conseils d'administration. Les actionnaires du leader mondial du secteur, l'américain BlackRock (plus de 4.500 milliards de dollars sous gestion), vont se prononcer cette semaine sur une motion qui demande aux gérants du fonds d'intervenir davantage sur le sujet. La question est bien sûr aussi politique. Aux Etats-Unis, le président Barack Obama espère faire passer une loi renforçant l'encadrement de la rémunération des banquiers avant la fin de son mandat. Les candidats qui aspirent à lui succéder promettent de taper sur le salaire des PDG. Bernie Sanders bien sûr, mais également Hillary Clinton et même Donald Trump.

Cette levée de boucliers n'est pas très étonnante. Les salaires des dirigeants se sont envolés depuis trois décennies. La transparence des rémunérations, devenue la norme, a déclenché un alignement par le haut. Les inégalités de revenu et de patrimoine ont beaucoup augmenté dans la foulée, en particulier dans les pays anglo-saxons. Le livre de Thomas Piketty, « Le Capital au XXIe siècle », en est à la fois le révélateur (avec son contenu) et l'indice (par son succès planétaire). Le lien entre la rémunération du dirigeant et l'efficacité de l'entreprise est souvent ténu. Parfois, il semble se faire à l'envers. Une étude récente de la petite banque d'investissement Keefe, Bruyette & Woods montre par exemple en deux graphiques frappants que la rémunération des patrons américains de banque dépend de la taille de leur banque et non de sa performance.

Face à ces mutations, le code Afep-Medef, rédigé en 2013, indique la bonne direction. Il stipule que «  la rémunération des dirigeants mandataires sociaux de l'entreprise doit être mesurée, équilibrée, équitable et renforcer la solidarité et la motivation à l'intérieur de l'entreprise. Le souci d'explication et d'équilibre doit également prévaloir à l'égard des actionnaires. Elle doit aussi tenir compte, dans la mesure du possible, des réactions des autres parties prenantes de l' entreprise, et de l'opinion en général ». Mais force est de constater, au vu des réactions de ces dernières semaines qui vont bien au-delà de la France, que ces principes ne sont pas devenus une règle générale. L'action n'est pas une option, c'est une nécessité.

Mais comment agir ? Réglons d'abord la question du «  say on pay ». A partir du moment où les actionnaires votent contre la politique de rémunération des dirigeants, il est inéluctable que ce rejet s'impose au conseil d'administration. Cela relève du «  bon sens », pour reprendre l'expression employée par le patron de Total, Patrick Pouyanné. Le bras d'honneur qu'a fait récemment le conseil de Renault en maintenant la rémunération de Ghosn juste après un vote de refus doit rester une faute isolée. Il ne faut cependant pas être naïf. Les contrats doivent être respectés. Il faudra donc agir en amont, comme le font les actionnaires britanniques en votant la politique de rémunération des trois années à venir.

Au-delà, c'est plus compliqué, en particulier pour le législateur. Dans un monde ouvert, un plafonnement sous une forme ou une autre dans un seul pays serait destructeur pour ce pays - sauf peut-être s'il s'agit des Etats-Unis. Mais il est possible de fixer trois grands axes. D'abord, faire la distinction entre l'entrepreneur bâtisseur d'empire et l'innovateur d'un côté, le gestionnaire et le rentier de l'autre. Les premiers sont rares et peuvent légitimement gagner des montagnes d'argent, pas les seconds. Ensuite, renforcer le conseil d'administration, en particulier pour qu'il ne puisse plus être « capturé » par le chef d'entreprise. Enfin, repousser encore dans le temps les bonus liés à la performance de l'entreprise, pour encourager les stratégies de long terme. L'attribution d'actions devrait être un moyen privilégié. Et pour mieux en faire la pédagogie, pour les faire accepter, il faudra aussi en attribuer aux salariés. Le débat ne fait que commencer.

 

Jean-Marc Vittori

@jmvittori

 

 

Source : http://www.lesechos.fr

 

 

Partager cet article
Repost0
30 mai 2016 1 30 /05 /mai /2016 16:13

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

El Khomri
Cisco va former 200 000 personnes. Bordel, à quoi sert la fac ?

 

L’allégresse avec laquelle la ministre du Travail annonce la délégation au privé d’une mission qui devrait revenir au service public, dont les moyens sont constamment essorés, est d’un cynisme inédit.

 

C’est un tweet de Myriam El Khomri vendredi 27 mai. Du genre de ceux qui ont le don de me plonger dans des abimes de perplexité auxquels succèdent des tréfonds de dépit qui à leur tour se muent immédiatement en furieuse envie d’éparpiller tout ça façon puzzle.

Donc Myriam El Khomri a tweeté :

« Notre objectif commun avec @CiscoFrance est de former en 3 ans 200 000 personnes aux métiers des réseaux numériques »

C’est chouette. Pour une fois y a un collègue qui a été plus prompt de moi au niveau de la réaction épidermique en tweetant à son tour :

« Ah ah ah, dans vos gueules les formations universitaires réseau/télécom. #pitoyable »

Voilà. On en est là. Franchement si vous n’aimez pas les grossièretés vous pouvez directement arrêter de lire ce billet.

Making of
Ce billet a d'abord été publié sur l'excellent blog Affordance.info, tenu par le maître de conférences en sciences de l'information et de la communication Olivier Ertzscheid. Il nous a aimablement autorisé à le reproduire sur Rue89 (les intertitres sont de la rédaction). Mathieu Deslandes

Vous êtes toujours là ? OK. Donc franchement ça me fout le cul en larmes. Bah oui. Parce que dans mon petit IUT je les croise tous les jours les collègues du département réseau et télécom. Pas plus tard que l’autre jour justement on discutait du fait qu’ils avaient trop d’offre d’emploi et de contrats pro par rapport aux candidatures qu’ils reçoivent.

Plus globalement ils sont comme tous les universitaires en charge de formations : on se démène pour créer des formations « à budget constant » (« budget constant » étant le petit nom administratif d’un volume horaire et de dotations en baisse mais passons ...), à « budget constant » donc, on se tape une paperasserie dans laquelle tous les patrons qui se lamentent sur la lourdeur administrative du code du travail seraient ravis de venir se vautrer tant elle leur paraîtrait légère, souple et quasiment éthérée, on est évalué en permanence par des organismes à l’utilité aussi discutable que l’acronyme les désignant est sexy, et nos institutions, nos autorités de tutelle, elles tweetent que grâce à Cisco France on va former 200 000 personnes en trois ans.

Avaler notre chapeau, encore et encore

Mais bordel. Bordel. What. The. Fuck. Mais bordel à quoi on sert ? Mais sans déconner nous à l’université on fait quoi ? On forme à quoi ?

Des formations « professionnalisantes » voire « professionnelles » on en a déjà plein. On a encore le gosier encombré et le transit bouché du nombre de fois où il a fallu avaler notre chapeau en sacrifiant la pédagogie à la rentabilité supposée ou au côté « bankable » de tel ou tel métier momentanément porteur ou déficitaire sur tel ou tel bassin d’emploi, mais faut croire que c’est pas assez. On est arrivé à des situations totalement aberrantes dans lesquelles on nous oblige à recruter de mauvais étudiants disposant d’un contrat quelconque (professionnel, apprentissage) plutôt que de bons étudiants qui ne rapporteront pas une thune à l’université qui les forme.

Tous ces chapeaux là, je les avais avalés, on les avait collectivement avalés. On se battait encore mais à la marge, en embuscade, en loucedé, davantage pour préserver notre capacité à encore se regarder dans la glace que pour combattre un système dont on savait qu’il avait déjà broyé la plupart des idéaux qui nous avaient, il y a longtemps, convaincus de pouvoir se rendre utile en y entrant pour transmettre un savoir et quelques compétences techniques et méthodologiques à des étudiants. Bref des trucs que Cisco semble être capable de faire mieux que nous.

A côté de ce qui est en train de se passer à l’heure actuelle, la LRU de Valérie Pécresse c’était Oui-Oui au pays des fées. Naturellement c’est la même chose. Je veux dire que la LRU, avec « l’autonomie » des universités (dont plus de la moitié d’entre elle est en faillite autonome ou sous-tutelle autonome ou a dû, en toute autonomie, fermer un nombre hallucinant de formations), la LRU était juste là pour préparer le terrain.

Cisco, Microsoft, Amazon et Elsevier

Parce que cet accord avec Cisco est loin, très loin d’être le premier.

Souvenez-vous de l’accord que la ministre de l’Education nationale a passé avec Microsoft, juste avant d’en passer un autre avec Amazon.

 

La ministre du Travail Myriam El Khomri à l'agence Pôle Emploi de Saint-Ouen (93), le 24 février 2016

La ministre du Travail Myriam El Khomri à l’agence Pôle Emploi de Saint-Ouen (93), le 24 février 2016 - MARS JEROME/SIPA
 

Souvenez-vous qu’en même temps que l’on sucre plus de 250 millions d’euros aux grands organismes de recherche français (voir le récent Appel des Nobels) on file chaque année la même somme d’argent public à Elsevier et quelques autres grands éditeurs pour racheter des travaux financés sur fonds publics par des chercheurs payés sur fonds publics.

Et là, toute guillerette le matin, Myriam El Khomri nous tweete le partenariat sur fonds publics avec Cisco pour former 200 000 personnes aux métiers des réseaux numériques (lequel partenariat date d’ailleurs d’il y a plus de six mois mais bon ...).

Moi je suis juste au-delà de l’au-delà du ras-le-bol. Des impôts j’en paie comme tout le monde. Et franchement je m’en félicite tous les jours. Mais bordel de merde je ne paie pas des impôts pour financer Microsoft, Amazon, Cisco, Elsevier ou je ne sais quel autre grand groupe privé, a fortiori dans un contexte où les universités n’ont plus une thune, et où ces acteurs privés se vautrent déjà allègrement dans le détournement organisé du crédit impôt recherche (on parle quand même de plus de 5,5 milliards d’euros...).

Et je n’aborde même pas les questions de remise en cause des modèles du logiciel libre que l’on essaie de défendre en balançant des cailloux sur des chars d’assaut.

Flinguer le droit à un service public de la formation

Au moins me direz-vous y’a un truc qui est désormais limpide et qui ne m’a bizarrement sauté aux yeux que ce matin à la lecture du tweet de la guillerette Myriam El Kohmri.

L’objectif de tout ça est de faire avec l’enseignement public, l’enseignement supérieur et la recherche et le droit à la formation la même chose qu’avec le droit du travail : inverser la hiérarchie des normes.

Quand Cisco fera le boulot des départements réseaux et télécom avec la thune, les moyens et l’accompagnement qui auraient dû leur revenir de droit, quand Elsevier fera le boulot des bibliothèques avec la thune, les moyens et l’accompagnement qui auraient dû leur revenir de droit, quand Microsoft fera le boulot des formateurs au numérique avec la thune, les moyens et l’accompagnement qui auraient dû leur revenir de droit, quand Amazon fera le boulot des éditeurs de manuels scolaires avec la thune, les moyens et l’accompagnement qui auraient dû leur revenir de droit, on se retournera, on regardera les dernières fumerolles s’échappant de ce qui fut un temps l’enseignement public de la maternelle à l’université et on organisera des colloques pour pleurer avec les familles des défunts ou aller pisser sur la tombe de Jean Zay.

Et Myriam, Najat, Valérie, Manuel, François, Nicolas et leurs copains ils rigoleront tranquillou en touchant les dividendes de leur impéritie pondérés à l’aune de leur soumission. On aura achevé de flinguer le droit à un service public de la formation mais on aura en contrepartie largement financé (sur fonds publics) Cisco, Amazon, Microsoft et Elsevier qui, c’est vrai, en avaient grandement besoin.

Le grand projet

Inverser la hiérarchie des normes dans le code du travail, dans le droit à la formation, dans l’enseignement supérieur et la recherche. Le voilà le grand projet. La voilà la seule doctrine. Tout aura été fait en ce sens. Plus j’y pense et plus c’est clair.

Ils nous ont fait le coup d’abord « à l’ancienne » : sabrer dans les crédits et les postes. Et puis ils nous l’ont refait mais en mode filou : rendre les universités « autonomes » (et en profiter pour sabrer dans les crédits et les postes). Et pour parachever le tout ils nous le refont encore une fois en mode « ça ose tout » : passer des contrats léonins avec des acteurs privés en expliquant qu’on n’a plus les moyens les crédits et les postes pour faire faire le boulot par les acteurs publics. Jusque là personne n’avait encore osé songé à s’en vanter sur Twitter avec le hashtag #guilleret. Myriam El Khomri et Najat Vallaud-Belkacem, si.

Vous savez quoi ? Ça me fout le cul en larmes. La destruction de l’université française bien sûr. Mais surtout l’abrutissement organisé comme projet social, l’autoritarisme comme principal mode de gouvernance, et le cynisme comme principal mode de négociation.

D’ailleurs Myriam El Kohmri le disait aussi sur Twitter, quelques heures après son autre tweet :

 

 permet aux étudiants bénéficiant des formations de rencontrer des entreprises qui recrutent

 

Pour les autres étudiants en revanche, ceux qui devront juste subir l’infâmie de bénéficier des formations universitaires réseau et télécom non estampillées #Cisco, ceux-là sont les bienvenus à la #Fuckingconnection qui leur permettra de rencontrer des agences pour l’emploi qui n’inversent pas la courbe du chômage.

L’abrutissement organisé comme projet social, l’autoritarisme comme principal mode de gouvernance, et le cynisme comme principal mode de négociation. Merde.

 

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Démocratie Réelle Maintenant des Indignés de Nîmes
  • : Le blog des Indignés de Nimes et de la Démocratie Réelle Maintenant à Nimes
  • Contact

Texte Libre

INFO IMPORTANTE

 

DEPUIS DEBUT AOÛT 2014

OVERBLOG NOUS IMPOSE ET PLACE DES PUBS

SUR NOTRE BLOG

CELA VA A L'ENCONTRE DE NOTRE ETHIQUE ET DE NOS CHOIX


NE CLIQUEZ PAS SUR CES PUBS !

Recherche

Texte Libre

ter 

Nouvelle-image.JPG

Badge

 

          Depuis le 26 Mai 2011,

        Nous nous réunissons

                 tous les soirs

      devant la maison carrée

 

       A partir du 16 Juillet 2014

            et pendant l'été

                     RV

       chaque mercredi à 18h

                et samedi à 13h

    sur le terrain de Caveirac

                Rejoignez-nous  

et venez partager ce lieu avec nous !



  Th-o indign-(1)

55

9b22