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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 16:53

 

Source : http://www.marianne.net

 

 

En France, les entreprises corrompues "ne sont pas du tout poursuivies"

 
 
Invité de la matinale de France Inter ce mardi 12 juillet, Pascal Saint-Amans, le directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l’OCDE, a rappelé l'urgence à lutter contre la corruption et l'évasion fiscale. Le projet de loi Sapin 2 "pour la transparence de la vie économique", adopté par le Sénat vendredi dernier, s'apprête justement à être examiné en commission mixte paritaire.
 
Pour Pascal Saint Amans, en matière de corruption la France fait partie des mauvais élèves. - DURAND FLORENCE/SIPA
 

Alors que le projet de loi Sapin 2 "pour la transparence de la vie économique" a été adopté par le Sénat ce vendredi 8 juillet et qu’il s’apprête à être soumis à une commission mixte paritaire chargée d’en établir une version finale, Pascal Saint-Amans, le directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l’OCDE, a rappelé ce mardi 12 juillet sur France Inter l’urgence à agir en la matière. 

Car en ce qui concerne la corruption, et notamment la corruption d’agents publics à l’étranger - qui permet aux entreprises d’obtenir des contrats à l’international en échange du versement de commissions occultes -, il y a encore beaucoup à faire, en particulier en France. L’Hexagone "est dénoncé régulièrement par l’OCDE pour n’être vraiment pas bon dans ce secteur", a en effet expliqué le monsieur fiscalité de l’OCDE. Et de poursuivre : "Il y a très peu de poursuites, il y a même pas du tout de poursuites d’entreprises françaises, et je doute que les entreprises françaises ne fassent pas un peu de corruption à l’étranger pour avoir des marchés". 

 

 

Très peu de poursuites, c’est le cas de le dire. De fait, en quinze ans, aucune entreprise tricolore n’a été condamnée en France bien que certaines aient fait l’objet de procédures judiciaires et de condamnations ailleurs dans le monde. Aux Etats-Unis par exemple, où ont été épinglées Total en 2013 pour ses pratiques en Iran, Alcatel en 2010 pour des affaires conclues notamment en Amérique latine ou, plus récemment, Alstom en raison d’un juteux marché signé dans le domaine de l’énergie en Indonésie.

Des nouvelles armes contre l'évasion fiscale

Si Pascal Saint-Amans n’avance pas de mesures concrètes pour y remédier, il revient en revanche longuement sur la lutte contre l’évasion fiscale, et plus exactement sur la question des lanceurs d’alerte, mise en lumière une nouvelle fois en avril dernier par l’ouverture du procès LuxLeaks, au Luxembourg. Un procès, rappelons-le, qui a abouti des deux employés à l’origine de l’affaire.

Il est "important de protéger" à l’avenir les lanceurs d’alerte, insiste Pascal Saint-Amans. "Je crois que la loi Sapin 2 (qui prévoit pour la première fois un statut pour ces derniers, ndlr) va dans cette direction", ajoute-t-il. Quant à l’évasion fiscale en tant que telle, il se réjouit que l’ensemble des pays du G20 aient adopté, en novembre 2015, une série de mesures dont le reporting pays par pays, qui va "obliger les multinationales à déclarer aux administrations fiscales où est leur chiffre d’affaire, où sont localisés leurs profits" ou encore, "où sont leurs employés".

A l’heure actuelle, on estime à 11% du PIB mondial le montant des sommes cachées dans les paradis fiscaux, soit "un enjeu fiscal pour les états de l’ordre de 250 milliards d’euros par an", souligne Pascal Saint-Amans. Or, "qui en supporte la charge fiscale ?" Le contribuable, qui va "payer de la TVA, payer de l’impôt sur le revenu, alors que ce qu’on appelle les facteurs mobiles de production, les multinationales, ne paient pas leur quote-part…"

 

 

 

 

Source : http://www.marianne.net

 

 

 

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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 16:33

 

Source : https://blogs.mediapart.fr/la-cimade/blog

 

 

L’enfermement des enfants en rétention doit cesser
 
 
 
Aujourd’hui, la France a été lourdement condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme. Celle-ci déclare à l’unanimité qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » pour l'enfermement des enfants en centre de rétention. Le gouvernement va-t-il enfin réagir ?
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Le 12 juillet 2016, la France a été lourdement condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Les cinq affaires concernent des familles enfermées avec des enfants mineurs entre 2011 et 2014 dans les centres de rétention de Toulouse, pour quatre d’entre elles, et de Metz. La Cour déclare à l’unanimité qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. » Dans certaines affaires, la France est également condamnée pour violation de l’article 5 (droit à la liberté et la sureté) et de l’article 8 (droit au respect de la vie familiale).

 

 

Ces décisions confirment et précisent la précédente condamnation de la France sur le même motif en 2012 avec l’arrêt Popov. À l’époque, le candidat François Hollande affirmait dans un courrier adressé à La Cimade qu’il s’engagerait « à interdire les placements en rétention des familles avec enfants dès mai 2012, au nom de l’intérêt supérieur des enfants qui doit primer ». Quatre ans après, il n’en est rien. Cette série d’arrêts de la CEDH fait résonner cette promesse non tenue avec amertume à l’heure où pour 2016, déjà 67 enfants ont été privés de liberté derrière les barbelés des centres de rétention de métropole (ils sont des milliers à Mayotte chaque année). Ils étaient 45 enfants en 2014, puis 105 en 2015.

La Cimade rappelle que l’enfermement des mineurs est une mesure extrêmement grave. En France, elle est exclusivement réservée aux personnes étrangères. Les centres de rétention sont des lieux particulièrement anxiogènes et traumatisants. Les enfants sont particulièrement vulnérables à ces violences dans un univers carcéral : barbelés, cellules, verrous, vidéosurveillance et forte présence policière.

 

La circulaire du 6 juillet 2012 était censée encadrer et limiter la pratique. Elle s’est en réalité contentée de la cautionner. Quant à la loi du 7 mars 2016, elle ne fait que légitimer l’enfermement des enfants en rétention.

 

La Cimade appelle le gouvernement français à tirer toutes les conséquences des arrêts de la CEDH. La loi doit changer pour mettre fin à l’enfermement en rétention des enfants, y compris à Mayotte.

 

 

 

 

> Lire le communiqué de presse de la CEDH

 

 

 

 

 

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Source : https://blogs.mediapart.fr/la-cimade/blog

 

 

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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 16:23

 

Source : https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart

 

 

 

Le mouvement contre la loi travail: une embellie sociale

 

 

 

Laurent Degousée, co-délégué de la fédération SUD Commerce, dresse un bilan de tous les mouvements sociaux qui ont été engendrés par la loi travail. Avant de conclure : «Comme aucune des deux parties en présence ne voulait aller à Canossa, on arrive forcément à un résultat tranché qui se soldera sur le plan politique, y compris avant 2017 et la primaire socialiste». 

La « loi travail », c'est au départ une réforme dictée par la Commission européenne qui juge notre droit du travail par trop protecteur, « Le minimum de ce qu'il faut faire » selon Jean-Claude Juncker, son président. C'est ensuite l'ultime transgression, après le débat avorté sur la déchéance de la nationalité, d'un Président de la République dont on peut affirmer, au vu de son quinquennat, que son ennemi, c’est le Code du travail. C’est enfin un Premier ministre, dont la brutalité fait partie de l’identité politique, qui foule du pied les libertés publiques comme jamais vu depuis… la guerre d’Algérie !

C'est surtout une formidable mobilisation, dont le déclenchement en plein état d'urgence était loin d'être assuré, qui remet spectaculairement en avant la question sociale au mépris de la question identitaire, le plus long mouvement social depuis 1968, de surcroit sous un gouvernement dit de gauche. Un mouvement ? Non, des mouvements qui se succèdent à un rythme soutenu.

 

Le péril jeune

Une pétition en ligne au succès viral, puis un petit film réalisé par de célèbres youtubeurs vont rapidement contraindre le gouvernement à reculer sur les aspects les plus contestables de son projet de loi. Lycéens et étudiants, bien décidés à ne pas devoir vivre plus mal que leurs parents, s’engouffrent dans la brèche et bousculent leurs ainés, initiant les premières manifestations dès le 9 mars.

Au bout du compte, le gouvernement, en maniant à la fois la carotte avec la satisfaction de revendications propres aux organisations de jeunesse, et le bâton avec une répression ciblée, réussit à juguler la mobilisation étudiante, les congés d’avril et l’approche des examens faisant le reste.

 

Ils ne sont debout que parce que nous sommes à genoux

La genèse puis l'installation de Nuit Debout à République, c'est le résultat d'une rencontre improbable entre des jeunes déclassés, des activistes syndicaux ou politiques et des intellectuels engagés. A l’issue de la manifestation géante du 31 mars, le campement et l’occupation de la place prennent forme, suscitant une répression féroce puis les suées du gouvernement, avant de s'éteindre tout doucement au cœur de l'été.

Après avoir décrété sa propre temporalité et en multipliant les formes d'actions et d'expressions qui font rapidement école dans tout le pays, on voit mal comment l'expérience, tant en terme d'auto-organisation que de pratiques alternatives, accumulée par des milliers de nuitdeboutistes, qui s'est depuis cristallisée dans le travail des commissions, n'irriguerait pas dans les années qui viennent le champ politique et social.

 

Vers la grève générale

Alors que les observateurs avisés disaient le syndicalisme moribond et peu représentatif, quel cruel démenti que les quatre mois que nous venons de vivre ! On peut dire qu’il a de beaux restes, en particulier la CGT qui compose l'essentiel des mobilisations. Transports, énergies, nettoiement etc. : jamais autant de secteurs essentiels à l’économie n'étaient rentrés dans l’action aussi près les uns après les autres, mais malheureusement non les uns avec les autres, ce qui explique que la thrombose du pays a été in fine évitée. De même, le trou entre les manifestations rapprochées de fin mai et celle nationale du 14 juin dernier, la plus grande mobilisation du secteur privé de ces dernières années, a incontestablement freiné la généralisation du mouvement.

Aussi, (re)construire un syndicalisme interprofessionnel et de lutte là où la « loi travail » veut le circonscrire, avec le soutien de la CFDT qui ne sortira pas indemne de cette séquence, à l’entreprise et à la seule négociation, c’est acquérir une capacité de mobilisation indexée sur son implantation, gage de victoires futures.

 

Tout le monde déteste la police

On voit difficilement le pouvoir, quelque soit sa couleur politique, aller plus loin que ce qui a été instigué en terme de répression à une échelle de masse, si ce n'est des mesures d'ordre extrajudiciaire dont le prolongement de l'état urgence permet de fleureter :

- la quasi-interdiction des dernières manifestations avec des fouilles systématiques et l'encagement des parcours,

- celle de manifester avec la délivrance de centaines d'interdictions de paraître,

- la remise en cause du droit de réunion avec la nasse mise en place devant la Bourse du travail de Paris le 28 juin dernier,

- celle à la liberté d'expression avec l'affiche de la CGT et la fresque grenobloise consacrées aux violences policières,

- les entraves au travail des journalistes,

- l’effraction policière du local de la CNT à Lille le 20 avril dernier.

Toute ces mesures liberticides ont débouché sur des milliers de garde à vue, des centaines d'arrestations et des dizaines de procès pour nous signifier une seule chose : le droit de s'organiser politiquement ou syndicalement est assimilable à une activité délictueuse, voire terroriste ! Sur le plan social, ils veulent nous renvoyer tout droit au XIXème siècle ? Le mouvement ouvrier doit relever le défi en renouant avec l'illégalisme de ses origines en assumant, par exemple, de ne pas déclarer les défilés et en systématisant des pratiques collectives comme celle de départ groupé aux manifestations.

 

La vraie démocratie, elle est ici !

Comme aucune des deux parties en présence ne voulait aller à Canossa, on arrive forcément à un résultat tranché qui se soldera sur le plan politique, y compris avant 2017 et la primaire socialiste. La politique reprend le dessus ; le FN, mis entre parenthèses ses derniers mois, risque rapidement de se satisfaire du repli qui nait du reflux et le courant insurrectionniste, qui s'est ancré dans le phénomène du cortège de tête, ne manquera pas de faire parler à nouveau de lui, à la faveur des universités décentralisées du PS et en cas d'évacuation de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.

Pour Nietzsche, « Tout ce qui est décisif ne naît que malgré. C'est aussi vrai dans le monde de la pensée que dans le monde de l'action. Toute vérité nouvelle naît malgré l'évidence, toute expérience nouvelle naît malgrél'expérience immédiate. » Forts de ce malgré, continuons à nous mobiliser contre le monde de la « loi travail » !

 

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Source : https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart

 

 

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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 16:00

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

 

Le ministère du travail autorise le licenciement d’un délégué CGT
12 juillet 2016 | Par Rachida El Azzouzi

 

 

 

Alors que l’inspection du travail avait contesté le licenciement d’un ancien délégué CFDT passé à la CGT de Sodexo, le ministère est revenu sur cette décision. L’avocat du syndicaliste dénonce une « décision politique ».

 

C’était en décembre dernier, quelques jours avant la trêve de Noël. Sodexo, géant mondial coté en bourse des « services de qualité de vie » aux entreprises (la restauration collective, les tickets restaurant, l’entretien, etc.), licenciait 18 salariés de la cuisine centrale des cantines marseillaises pour faute lourde, sans préavis, ni indemnités. Le groupe, premier employeur privé français au monde et fleuron « made in Marseille » aux mains de la famille Bellon, l’une des plus grosses fortunes de l’Hexagone, leur reprochait « un abandon de poste », en fait, d’avoir fait grève le 25 novembre. Oui, grève. Trois heures de grève très exactement. Ce droit individuel instauré en 1864, inscrit dans la Constitution en 1946.

La plupart étaient chauffeurs-livreurs à la cuisine centrale où, depuis la mi-novembre, une grève à leur initiative avait gagné l’ensemble des services, bloquant la livraison des cantines scolaires. Un banal conflit social, comme il en survient tous les jours dans le monde du travail – pour dénoncer les conditions de travail (les CDI intermittents, la surcharge des camions), obtenir des embauches, des augmentations, des miettes du gâteau alors que Sodexo affiche une insolente bonne santé (avec en 2015 des résultats meilleurs que ceux attendus – 760 millions de bénéfices net). Tandis que leurs collègues reprenaient le travail, après la signature d’un protocole de fin de conflit par plusieurs délégués syndicaux, la vingtaine de chauffeurs-livreurs s’y refusait, estimant que les augmentations n’étaient pas à la hauteur de leurs revendications et décidait de poursuivre la grève, emmenée par le délégué CFDT Yvon Caprice, qui avait déserté les négociations pour marquer son désaccord. Et c’est cette poursuite de la grève qui vaudra aux chauffeurs-livreurs d’être licenciés pour faute lourde.

Après deux mois de combat et un accord entre la CGT et le groupe (relire ici notre article), onze d'entre eux étaient finalement réintégrés. Sept autres décidaient de couper avec l’entreprise après ces événements et d’aller au bout des procédures en justice ou de négocier avec leur avocat un chèque avec la direction. Et puis, il y a le sort d’un 19e salarié, Yvon Caprice, le délégué syndical CFDT passé à la CGT après avoir été lâché par sa centrale et ses pairs de la CFDT pour avoir osé continuer la grève. Salarié protégé, sa réintégration était entre les mains de l’inspection du travail. Cette dernière l’exigera, estimant qu’il ne faisait qu’exercer son droit de grève, et s’opposera à son licenciement. Mais Sodexo a formé un recours et saisi – c’est son droit – le ministère du travail qui a décidé, le 27 juin, de casser la décision extrêmement bien motivée de l’inspection du travail et d’autoriser le licenciement du délégué syndical. En deux pages très sommaires, le ministère du travail estime que le licenciement est fondé, que le délégué syndical a joué un rôle d’incitation sur ses collègues grévistes, qu'il aurait dû les inciter à cesser la grève qu'il juge ici, « illicite », contrairement à l'inspection du travail.

 

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« C’est une décision politique, estime l’avocat d’Yvon Caprice, Steeve Doudet. La ministre du travail donne raison à Sodexo qui n’est pas la SARL du coin mais le premier employeur privé de France et elle sanctionne ainsi la CGT à la pointe de la lutte contre la loi sur le travail avec laquelle elle est en délicatesse. » Il s’apprête à déposer un recours en annulation devant le tribunal administratif de Marseille et a « bon espoir » d’une réintégration tant le dossier est « creux ». « La décision du ministère est truffée d’erreurs factuelles et juridiques. Mon client est licencié parce qu’il n’a pas incité les salariés à cesser la grève mais le droit de grève est individuel. Il n’appartient pas aux syndicats ! » Contactés, ni le ministère du travail ni la direction de Sodexo n’ont répondu à nos sollicitations. Yvon Caprice, vingt-deux ans d’ancienneté, accuse le coup à la veille des congés d’été. Père de famille, enfant de La Castellane, il a grandi dans la misère et dit « ne plus la craindre », à 45 ans. Il attend son rendez-vous avec un conseiller de Pôle emploi et s’inquiète du temps que peut prendre la justice à statuer sur son cas : « L'avocat me dit que cela peut prendre six mois comme deux ans. Mais j'ai besoin de travailler, je ne peux pas être au chômage ». 

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

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11 juillet 2016 1 11 /07 /juillet /2016 21:04

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

Emmanuel Macron, le candidat de l’oligarchie
11 juillet 2016 | Par Laurent Mauduit
 
 
 

Emmanuel Macron a finalement décidé de lancer, mardi soir à la Mutualité, sa campagne pour la présidentielle mais sans quitter le gouvernement. Alors que l'oligarchie de Bercy a imprimé sa marque sur les politiques de gauche et de droite, au point qu'elles sont devenues identiques, elle franchit un pas de plus et propulse l'un des siens comme candidat.

Depuis qu’Emmanuel Macron a lancé son mouvement « En Marche ! », le 6 avril dernier, c’est la question qui taraude les hiérarques socialistes : pour qui roule-t-il ? Sa candidature à l’élection présidentielle a-t-elle été concertée secrètement avec François Hollande, pour offrir à ce dernier une petite réserve de voix, dans la perspective (de plus en plus hypothétique) de sa présence au second tour de l’élection présidentielle de 2017 ? Ou l’ancien secrétaire général adjoint de l’Élysée, promu ministre de l’économie, s’est-il émancipé et ne roule-t-il maintenant que pour lui-même ? La vérité, c’est sans doute que l’irruption d’Emmanuel Macron dans l’arène présidentielle révèle quelque chose de beaucoup plus profond : alors que, durant des lustres, l’oligarchie de l’Inspection des finances a essayé de peser sur les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, pour qu’ils mettent en œuvre perpétuellement les mêmes politiques néolibérales, la voici qui décide de sortir des coulisses du pouvoir, pour pousser en avant l’un des siens.

 

Hollande et Macron © Reuters Hollande et Macron © Reuters
 

Entre les deux hypothèses, que soupèsent les hiérarques socialistes, il n’y a, de fait, pas de raison de trancher. D'abord, Emmanuel Macron cache lui-même son jeu et entretient le flou sur ses intentions : alors qu'il avait initialement décidé de déclarer sa candidature et de quitter le gouvernement avant l'été, pour avoir les coudées franches et mener sa campagne, il y a finalement renoncé. Il va donc tenir son premier meeting de campagne, ce mardi 12 juillet, dans la salle parisienne de la Mutualité, mais sans avoir démissionné. Dans le naufrage que connaît le pouvoir socialiste, cela ne choque visiblement personne que l'on puisse être tout à la fois ministre et candidat, les deux sans doute à mi-temps.

 

Et puis, il y a des indices qui plaident pour l’une des hypothèses, comme des indices qui plaident pour l’autre. Selon de très bonnes sources, François Hollande a ainsi été mis très tôt dans la confidence d’une possible candidature d’Emmanuel Macron – à moins qu’il ne l’ait téléguidée lui-même. Et le chef de l’État a prodigué des recommandations à celui qui a longtemps été son conseiller, dans les coulisses du pouvoir. Il lui a en particulier suggéré de prendre attache avec le plus de centristes possible, à commencer par Jean-Louis Borloo qui, en sa qualité de président de la Fondation énergies pour l’Afrique, a ses quartiers à l’Élysée. À la fin du mois de mai, l’ancien président de l’UDI a donc rencontré le ministre de l’économie – sans en éprouver, d’après la rumeur, une joie débordante car il a toujours pensé que s’il a été évincé par Nicolas Sarkozy en juin 2007 du ministère des finances, c’est en grande partie sous la pression de l’Inspection des finances. Dans la foulée, sous la surveillance étroite de l’Élysée, le même Emmanuel Macron a aussi invité à dîner au restaurant « La Marée », à deux pas du palais du Luxembourg, quelques sénateurs centristes, flanqués du maire de Lyon, le très droitier sénateur (PS) Gérard Collomb.

Mais quand il navigue en d’autres cercles, Emmanuel Macron – qui est capable d’une très grande duplicité – affiche un mépris souverain à l’encontre de François Hollande, auquel il doit pourtant sa carrière, et jure ses grands dieux qu’il ne roule pas pour le chef de l'État. Lors d’un déplacement à Londres, le 14 avril dernier, on se souvient que le ministre de l’économie en avait profité pour déjeuner avec quelques patrons en vue de solliciter leur soutien financier. Et Le Point avait, à l’époque, donné le verbatim de certains échanges (lire Présidentielle: Macron prêt à déclarer sa candidature). L’un des invités avait ainsi demandé au ministre de l’économie de « lever l'ambiguïté sur [ses] ambitions », et s'il avait l'intention d'« aller au bout » en se présentant à une présidentielle, ponctuant son propos de cet avertissement : « On veut bien vous financer, mais c'est pas pour aller faire la campagne de Hollande ensuite. » Réponse d’Emmanuel Macron : « À droite comme à gauche, les partis créent des candidats qui ne sont que la synthèse de gens qui pensent différemment entre eux. Moi, si j'ai lancé “En Marche !”, c'est pour y aller, et y aller maintenant. »

Aux milieux financiers, dont l’ex-associé gérant de la banque Rothschild est issu, le ministre a envoyé le même message : s’il se présente, ce n’est pas pour participer à une manœuvre passablement fumeuse de François Hollande. Non ! C’est pour en découdre aussi avec lui. Selon nos informations, Emmanuel Macron s’est ainsi ouvert de ses projets avec certains grands patrons, et notamment celui d’Axa, Henri de Castries, qui lui aussi est issu de l’Inspection des finances et lui a promis dès le début un soutien total. Et comme par hasard, quelques mois plus tard, comme l’a révélé Mediapart (lire Le patronat héberge discrètement Emmanuel Macron), le ministre de l’économie a commis la bévue d’installer le siège de son mouvement « En Marche ! » au domicile privé de Laurent Bigorgne, le directeur de l’Institut Montaigne, un influent club patronal qui a été créé par… Axa !

Henri de Castries n’est d’ailleurs pas le seul à chouchouter Emmanuel Macron. En vérité, c’est une bonne partie du Medef qui le regarde se jeter en politique avec délectation, à commencer par le président du Medef, Pierre Gattaz, qui lors de la création du mouvement « En Marche ! » avait applaudi l’initiative, la jugeant « rafraîchissante ».

Il y a donc bel et bien deux hypothèses. Soit Emmanuel Macron est de mèche avec François Hollande ; soit il ne l’est pas. Soit il est en passe de voler de ses propres ailes ; soit il rentrera plus tard dans la basse-cour socialiste. Mais sait-il lui-même ce que sera son chemin ? Ou bien les aléas de la vie politique décideront-ils pour lui ?

En fait, toutes ces spéculations n’ont guère d’intérêt car, dans tous les cas de figure, la candidature d’Emmanuel Macron revêt une importance qui dépasse ces péripéties : c’est la première fois en effet, en France, que l’oligarchie de Bercy, celle de l’Inspection des finances ou de la direction du Trésor, pousse en avant l’un des siens à entrer en politique pour son propre compte.

Depuis trente ans, cette oligarchie de l’Inspection des finances a certes déjà joué un rôle majeur dans la vie politique et économique française. Contrôlant toutes les grandes directions, les plus influentes, du ministère des finances, dirigeant la plupart des grandes entreprises publiques, dirigeant aussi de très nombreuses entreprises privées grâce à trois décennies de privatisations, cette oligarchie pèse d’un poids majeur sur toutes les politiques publiques. Sur ce que Jacques Chirac avait baptisé la « pensée unique ».

En clair, si la gauche et la droite ont conduit depuis plus de trente ans des politiques économiques et sociales de plus en plus voisines, sinon même strictement identiques, bafouant périodiquement l’aspiration à une alternance des citoyens, ruinant la conception même de la démocratie, c’est en grande partie à cause de cette oligarchie, qui a toujours survécu à toutes les alternances, et préconise perpétuellement la mise en œuvre des mêmes réformes dites « structurelles » – traduction : néolibérales !

« Pendant plusieurs mandats, quelles que soient les majorités »

Veut-on connaître la philosophie qui guide depuis si longtemps l’action de cette oligarchie ? Il suffit de se replonger dans le rapport de la commission Attali – dont Emmanuel Macron était le rapporteur – remis à Nicolas Sarkozy en janvier 2008. Brûlot néolibéral, ce document proposait 316 réformes visant à démanteler le code du travail et à déréguler l’économie – autant de réformes qui sont depuis des lustres dans les cartons des grandes directions de Bercy. Et en introduction de ce document, Jacques Attali et Emmanuel Macron avaient consigné cette préconisation : « [La réforme] ne peut aboutir que si le président de la République et le premier ministre approuvent pleinement les conclusions de ce rapport, le soutiennent publiquement, dès maintenant, personnellement et durablement, en fixant à chaque ministre des missions précises. Pour l’essentiel, ces réformes devront être engagées, selon le calendrier proposé à la fin de ce rapport, entre avril 2008 et juin 2009. Elles devront ensuite être poursuivies avec ténacité, pendant plusieurs mandats, quelles que soient les majorités. »

« Pendant plusieurs mandats, quelles que soient les majorités »… Nous y voilà ! Toute la « pensée unique » est dans cette formule. Voilà ce que sécrète le système de l’oligarchie française, dont Jacques Attali et Emmanuel Macron sont des représentants : elle sécrète une idéologie qui tient la démocratie pour méprisable ou quantité négligeable. Peu importent les alternances démocratiques, peu importe le suffrage universel : il faut que « pendant plusieurs mandats, quelles que soient les majorités », la même politique économique se poursuive. Perpétuellement la même. L’enrichissement pour les uns, la punition sociale pour les autres.

Sans que l’on n’ait pu le deviner dès cette époque, il y avait d’ailleurs un aspect prémonitoire dans cette recommandation. Car effectivement, c’est sous le quinquennat de Hollande qu’une bonne partie des dispositions réactionnaires contenues dans ce rapport commandé par Sarkozy ont finalement été mises en œuvre, instillées dans les deux lois défendues par le même… Emmanuel Macron (lire Aux origines de la loi Macron: un projet néolibéral concocté sous Sarkozy).

Et comme tant d’autres oligarques, Emmanuel Macron a lui-même joué les essuie-glaces : il a commencé à faire carrière sous Sarkozy ; et a continué sous Hollande, en défendant exactement les mêmes idées, ce qui lui a permis de prendre son envol. Voici ce qu’incarne Emmanuel Macron : d’une certaine manière, c’est la fin de la politique ; c’est l’oligarchie qui survit à toutes les alternances. C’est la mise en œuvre du si terrible précepte que Tancredi souffle à l’oreille de son oncle, le prince de Salina, dans Le Guépard de Lampedusa : « Il faut que tout change pour que rien ne change. » Car c’est cela même, le ressort d’un système oligarchique : ceux qui y participent sont insubmersibles.

Avec Macron, il y a pourtant une nouveauté radicale. Jamais, jusqu’à présent, les membres de sa caste n’étaient entrés en politique directement. Il y a certes des inspecteurs des finances qui ont fait ce choix, tel Alain Juppé, mais toujours en respectant les codes traditionnels de la vie politique : en se mettant au service d’un parti, en l’occurrence le RPR (l’ancêtre de l’UMP puis du mouvement Les Républicains), jamais en défiant les partis politiques installés. Mais dans la plupart des cas, les oligarques français de l’Inspection des finances se sont toujours tenus dans les coulisses du pouvoir, préférant jouer les conseillers de l’ombre, plutôt que de prendre en main eux-mêmes les commandes publiques. C’est le cas d’un Alain Minc – le modèle et ami de Macron – ou encore de Jacques Attali – un autre ami – qui, pour n’être pas inspecteur des finances, est aussi très illustratif de l’oligarchie française.

Conseiller dans les coulisses du pouvoir, Macron l’a donc longtemps été, comme ses influents protecteurs. Mais lui fait aujourd’hui un pas de plus, que n’ont pas fait ses mentors : il entre en politique pour son compte propre. Ou pour le compte de la caste dont il est issue. C’est en cela que son parcours est inédit. C’est en quelque sorte l’aboutissement d’une histoire longue : jusqu’à présent, l’oligarchie était parvenue à anémier la vie politique en imposant progressivement le célèbre diktat « Tina » – pour « There is no alternative » ; avec Macron, c’est l’ultime étape : la tentative de prise de pouvoir par l’oligarchie elle-même.

Dans le passé, Minc et Attali ont envisagé de passer en politique : le premier a intrigué en 1988 pour que Rocard le coopte dans son gouvernement, tandis que le second a rêvé que Sarkozy le fasse entrer dans le gouvernement Fillon. Mais après beaucoup d’hésitations – ou de désillusions –, ils sont tous deux restés dans l’ombre, comme conseillers des princes. Un autre, comme Trichet, a très fortement pesé sur la « pensée unique », mais est resté respectueux du fonctionnement républicain, c’est-à-dire dans un rôle d’exécutant. Il a lourdement pesé sur les politiques de Bérégovoy puis de Balladur (avant de passer à la Banque de France puis à la BCE), mais il se montrait toujours très respectueux des politiques. Ce qui n’est pas le cas de Macron, lequel affiche sa détestation (très révélatrice, très… oligarchique !) des politiques, comme il l'a récemment montré dans un récent entretien avec Sud-Ouest où il affichait son mépris pour la « caste politique » en précisant qu’il n’en faisait pas partie.

Il y a donc un effet de miroir dans le pas que franchit Macron : c’est un autre révélateur de la gravité de la crise politique que nous vivons. C’est un peu comme si, à la veille de 1789, les fermiers généraux, qui étaient les principaux soutiens de la monarchie, étaient tellement affolés de l’incurie de cette même monarchie, qu’ils décidaient eux-mêmes de prendre les choses en main.

Dans l’audace de Macron, c’est ce qui ressort. Il a décidé de franchir le pas, parce qu’il a derrière lui le clan de Bercy. Et s’il a ces appuis, c’est qu’il y a de l’exaspération dans les hautes sphères de la finance qui n’ont plus confiance en Sarkozy, qui n’ont plus confiance en Hollande ; bref, qui ont envie de diriger eux-mêmes, ou qui approuvent que l’un des leurs se lance dans cette aventure.

La candidature de Macron dit donc beaucoup de l’exaspération qui chemine dans le pays. Pas l’exaspération de « gauche » ou de gauche radicale. Une autre forme d’exaspération, dans d’autres couches de la société. L’exaspération des cercles de l’oligarchie.

Des faux pas en cascade et un mensonge grave

Mais il y a, pourtant, quelque chose de pathétique dans cette irruption en politique de l’un des représentants de l’oligarchie de Bercy. Car si Macron a beaucoup d’appuis dans les milieux de la haute finance qui le poussent à s’émanciper, c’est qu’il règne un climat de panique dans ces milieux d’affaires. En effet, celui que ces mêmes milieux d’affaires adoubent pour les représenter n’est pas le plus brillant de la caste. Comparé aux hauts fonctionnaires des décennies antérieures – comme Jean-Claude Trichet, Jacques de Larosière ou Michel Camdessus –, Macron apparaît même bien terne et maladroit, sans charisme ni autorité. Sans véritable légitimité…

Si l’on s’en tient aux derniers mois, on peut même recenser une cascade de faux pas et de maladresses qui révèlent l’amateurisme du jeune ministre voulant se mettre en marche…

Il y a d’abord eu son faux pas concernant l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). À la fin du mois de mai, le ministre de l’économie suggère qu’il est partisan de la suppression de l’impôt fétiche de la gauche, qui hérisse depuis si longtemps les grandes fortunes. Il le laisse entendre dans la revue Risques, qui est la propriété de la Fédération française des sociétés d’assurance, un lobby patronal dont Emmanuel Macron est décidément très proche. « Si on a une préférence pour le risque face à la rente, ce qui est mon cas, il faut préférer la taxation sur la succession aux impôts de type ISF », lâche-t-il. Après les révélations de Mediapart, on découvre à peine quelques jours plus tard que le propos n’est pas totalement désintéressé puisque le contribuable Macron, à l’issue de plus d’un an et demi de discussions avec le fisc, ayant notamment porté sur la demeure de son épouse au Touquet, a dû admettre qu’il devait payer l’ISF et même déposer une déclaration rectificative pour 2013 et 2014 (lire Macron rattrapé par son ISF).

Il y a ensuite son hypocrisie sur le dossier de la fonction publique. Car Emmanuel Macron a pris dans ce domaine – ce qui est naturellement son droit – une position très tranchée : il est partisan de dynamiter ce statut, radicalité que, même à droite, beaucoup de ténors n’osent pas défendre publiquement. Il l’a fait comprendre notamment le 18 septembre 2015, lors d’un débat organisé par le club « En temps réel » dont il est membre. En réponse à une question sur le sujet d’une journaliste de Challenges, le ministre a fait valoir qu’à ses yeux ce statut n’était « plus adapté au monde tel qu’il va » et « surtout […] plus justifiable compte tenu des missions », avant d’ajouter : « Je ne vois pas ce qui justifie que certains cadres de mon ministère bénéficient d’un emploi garanti à vie, et pas le responsable de la cybersécurité d’une entreprise… » (lire La morgue de Macron contre la fonction publique).

Seulement voilà ! Le ministre a parlé pour les autres, pas pour… lui-même ! Quelques rares hommes politiques, qui défendent des positions identiques, ont eu le courage de mettre en pratique pour eux-mêmes les positions qu’ils défendaient dans le débat public. C’est le cas par exemple de Bruno Le Maire, qui a démissionné du corps des conseillers des affaires étrangères – on peut consulter ici le décret de François Hollande en date du 22 octobre 2012, entérinant sa radiation. Mais bien que le même Bruno Le Maire l’ait exhorté à suivre son exemple, Emmanuel Macron ne s’y est pour l’instant pas (ou pas encore ?) résolu.

Opposé à un système d’emploi à vie pour les petits fonctionnaires, Emmanuel Macron profite, pour lui-même, du statut le plus protecteur de la fonction publique, celui des inspecteur généraux des finances : un emploi à vie parmi les plus mieux rémunérés. Cessant d’être ministre, il va donc pouvoir continuer à percevoir durant encore six mois la rémunération qu’il percevait à ce titre, mais au-delà, s’il ne démissionne pas, il percevra de nouveau la rémunération des inspecteurs des finances : de l’ordre de 100 000 euros brut par an.

Il y a encore eu le très gros mensonge d’Emmanuel Macron dans le cas de la privatisation de la société de gestion de l’aéroport de Toulouse – un mensonge qui, en d’autres démocraties, aurait marqué la fin de la carrière politique de son auteur.  Le ministre avait annoncé publiquement, lors de la cession de 49,9 % du capital de la société à un investisseur chinois, que les actionnaires publics (État, Région, département, ville, CCI) garderaient le contrôle majoritaire de l’aéroport. Mais Mediapart a révélé qu’il s’agissait d’une duperie, l’État ayant passé secrètement un pacte d’actionnaires avec l’investisseur chinois, lui concédant les pleins pouvoirs (lire Aéroport de Toulouse: Macron rattrapé par son mensonge).

Et puis, il y a le comportement hautain d’Emmanuel Macron, qui colle désormais à son personnage, et qui a contribué à faire de lui l’une des têtes de Turc de toutes les manifestations du printemps, depuis sa désormais célèbre saillie adressée à deux grévistes : « La meilleure façon de se payer un costard, c'est de travailler » !

Emmanuel Macron va donc se jeter tout seul dans le grand bain de la politique. Mais il franchit le Rubicon, alors que des doutes de plus en plus marqués commencent à se faire jour sur sa capacité de mener sa barque tout seul. À preuve, cette sortie, la plus vacharde que l’on puisse concevoir, de Jacques Attali, celui-là même qui a aidé le jeune haut fonctionnaire à faire ses premiers pas : « Macron n’incarne que le vide ! » a-t-il lancé le 13 mai…

« Macron n’incarne que le vide ! » Comme Jacques Attali est l’un de ceux qui connaissent le mieux Emmanuel Macron, sans doute faut-il prendre la formule au sérieux, même si elle n’est sûrement pas dénuée d'une féroce jalousie. Mais cela ne gomme pas l’essentiel. Envers et contre tout, avec Macron, c’est un pas symbolique qui est franchi : le conseiller efface celui qu’il conseille ; le haut fonctionnaire supplante le politique qu’il a longtemps épaulé mais qu’en vérité il méprisait, parce qu’il était obligé de prendre en compte des préoccupations électorales (ou électoralistes). C’est cela, l’oligarchie : c’est le mépris du politique. En définitive, c'est le mépris de la démocratie…

La morale de notre histoire, c’est celle que tire le grand républicain Marc Bloch dans L’Étrange Défaite, dans les semaines qui suivent la débâcle de juin 1940 : « Quelle que soit la nature du gouvernement, le pays souffre si les instruments du pouvoir sont hostiles à l’esprit même des institutions publiques. À une monarchie, il faut un personnel monarchiste. Une démocratie tombe en faiblesse, pour le plus grand mal des intérêts communs, si ses hauts fonctionnaires, formés à la mépriser et, par nécessité de fortune, issus des classes mêmes dont elle a prétendu abolir l’empire, ne la servent qu’à contrecœur. »

D’une débâcle à l’autre, l’histoire bégaie…

 

 

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

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11 juillet 2016 1 11 /07 /juillet /2016 20:53

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Surveillance

Bruxelles et industriels rêvent de « frontières intelligentes » capables de contrôler automatiquement les individus

par , Morgane Remy

 

 

 

Ce ne sont plus seulement des murs et des grillages qu’on édifie aux frontières de l’Europe. La Commission européenne et les industriels de la sécurité rêvent de « frontières intelligentes » – les Smart borders : une multitude de fichiers et d’appareils de contrôles automatisés et interconnectés, capables de suivre chaque individu. L’objectif ? La lutte anti-terroriste et le refoulement des migrants. Mais ces dispositifs dont l’efficacité reste à prouver risquent de gréver les finances publiques, tout en menaçant les libertés et la vie privée si, demain, certains Etats décident de passer du contrôle de chacun à la surveillance de tous. Enquête.

En matière de politique sécuritaire, le moins qu’on puisse dire est que l’Union européenne et ses États membres ne manquent pas d’idées. Les frontières de l’UE sont régies par pléthore de dispositifs et autant d’obscures acronymes. Le SIS, système d’information Schengen, réunit les données des individus recherchés ou disparus. Le VIS, système d’information sur les demandes de visa, ou encore, Eurodac, pour la gestion administrative des demandes d’asile...

Le 14 avril 2016, le Parlement européen a décidé d’allonger cette liste, en adoptant le Passenger name record, ou PNR. Son but ? collecter auprès des compagnies aériennes 19 types d’informations différentes sur les voyageurs, du prix du billet au numéro du siège. La Commission européenne n’est pas en reste : elle a de son côté sorti du chapeau une nouvelle version des Smart borders (« frontières intelligentes »), un projet qui lui tient à cœur depuis 2013, mais qui avait été laissé sur la touche par le Parlement. Le dispositif permettra d’enregistrer les entrées et sorties des ressortissants de pays tiers admis pour un séjour de courte durée dans l’espace Schengen — 90 jours maximum sur une période de 180 jours — et sera doublé d’une automatisation des frontières pour lutter contre la fraude à l’identité.

 

« Projets mégalomaniaques »

Une fois interconnectés, ces systèmes d’information constitueront autant de mailles d’un même filet de contrôle et de surveillance des individus. Un filet, en lieu et place de murs, qui cherche pourtant à remplir la même fonction : remédier aux difficultés européennes face à deux crises majeures : la menace terroriste et la crise migratoire. « Le partage des informations relie les deux. Nos garde-frontières, autorités douanières, policiers et autorités judiciaires doivent avoir accès aux informations nécessaires », a ainsi précisé Dimitris Avramopoulos, commissaire européen pour la migration, les affaires intérieures et la citoyenneté, lorsqu’il a dévoilé le texte sur les Smart borders en avril dernier.

La Commission ne cesse de promouvoir cette idée de « frontières intelligentes », malgré la réticence de certains parlementaires. « Nous avons déjà voté non une première fois contre le PNR et les Smart Borders car nous étions sceptiques face à des projets mégalomaniaques tant sur le plan budgétaire que sur celui d’une collecte massive des données, réagit Sophie In’t Veld, la vice-présidente néerlandaise de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe. Pourtant, ces textes reviennent sur la table, avec une pression de certains États membres pour les faire voter. »

 

Les industriels dans les starting-blocks

La France n’est pas la dernière à jouer des coudes pour faire aboutir ce dossier. En témoigne la venue de Manuel Valls à Strasbourg lors du vote sur le PNR. Non seulement l’État français a lui-même été victime du terrorisme, mais il soutient aussi ses fleurons industriels, Safran notamment, en première ligne pour remporter les appels d’offres et mettre en place les fichiers de passagers aériens en Europe. Morpho, sa filiale sécurité, gère déjà deux marchés : la France et l’Estonie. Des PNR nationaux existent en effet dans 14 pays. Pour financer ces dispositifs, avant même que le PNR européen ne soit voté, la Commission a déjà investi 50 millions d’euros.

Derrière les Smart borders, les sommes en jeu et les intérêts des industriels sont encore plus discutés, car ces nouvelles frontières nécessiteraient la mise en place de kiosques spéciaux dotés d’outils biométriques, les e-gates, dont tous les États inclus dans l’espace de libre circulation devront s’équiper. En France, 133 points de frontière Schengen pourront être concernés, soit 86 aéroports, 37 ports, et 10 gares. Sachant que le coût d’une porte est estimé dans une fourchette comprise entre 40 000 et 150 000 euros, l’investissement n’est pas négligeable !

 

Collusions public-privé

La première proposition de Smart Borders chiffrait le projet à 1,1 milliard d’euros. Elle avait provoqué un tollé au sein du Parlement européen en 2013. Depuis, pour apaiser cette ire, la Commission a réalisé un tour de passe-passe : selon son nouveau calcul, le coût pourrait finalement être ramené 480 millions d’euros… Sauf que dans le même temps, la Commission a provisionné 791 millions d’euros dans son budget cadre 2014-2020, avant même que la directive ne soit votée ! « En réalité, pour savoir combien cela va nous coûter, il faudra attendre les réponses des industriels aux appels d’offres et surtout conclure les contrats », note Krum Garkov, le directeur de l’agence Eu-Lisa créée pour mettre en place les Smart borders.

Si ce système n’est pourtant qu’à l’état de projet, l’appel aux géants de la défense est lui déjà lancé. « Pour améliorer la sécurité européenne, nous avons besoin de stimuler nos industriels ! », clame Armand Nachef, du point de contact national du programme européen de recherche Horizon 2020, le 17 novembre au Bourget. Ce représentant du service public s’adresse alors aux entrepreneurs présents au salon de la sécurité intérieure Milipol, où armes, drones, caméras, équipements de maintien de l’ordre et autres gilets pare-balles sont exposés.

 

Au menu : reconnaissance par l’iris, faciale ou digitale

A l’autre bout du salon, ces mots ne tombent pas dans l’oreille d’un sourd. Un employé de Morpho propose fièrement de faire visiter l’installation type d’une frontière hyper sécurisée : « Là, c’est une machine de reconnaissance par l’iris. Pour le moment, nous en avons surtout vendu en Asie, mais ça va venir ici ». Il présente la porte « intelligente », un sas de verre capable de vérifier votre identité en moins de 20 secondes. Soit deux à trois fois plus vite qu’aujourd’hui, lorsque vous avez affaire à un douanier derrière son guichet. C’est la société Morpho qui a fourni portes automatiques, outils de reconnaissance faciale ou d’empreintes digitales au port de Cherbourg, à la gare du Nord et à l’aéroport international de Roissy.

La Commission européenne investit depuis plusieurs années dans des programmes de recherche. Entre 2007 et 2013, à travers le volet Sécurité du programme FP7 – prédécesseur d’Horizon 2020 – plus de 51 millions ont été versés à des consortiums, souvent dirigés par des entreprises auxquelles se sont associés des laboratoires et des acteurs publics pour réfléchir à la gestion de ces nouvelles frontières. Dans le programme en cours Horizon 2020, « Sociétés sûres », l’instance européenne a déjà investi plus de 21 millions d’euros. Des sommes non comprises dans le budget Smart borders.

Une petite PME française a ainsi profité de cette manne pour se lancer. « Nous avons touché exactement 328 251 euros, témoigne Raphaël Rocher, gérant de Sécalliance sécurités informatiques. Grâce à cela nous avons pu nous lancer. » L’entreprise est créée en 2009, en même temps que débute un projet de recherche sur cinq ans, Effisec. La PME développe, avec d’autres partenaires, des kiosques permettant l’enregistrement du passager, la vérification de son passeport ainsi qu’un contrôle biométrique par comparaison d’une photo prise par la borne avec celle enregistrée sur la puce du passeport. Une fois cette étape validée, le kiosque s’ouvre pour un autre contrôle par caméra millimétrique.

Mais le premier bénéficiaire de la subvention versée dans le cadre d’Effisec est encore Morpho, la filiale de Safran, qui a touché 1,8 millions euros [1]. L’entreprise a déjà coordonné la moitié des projets de sécurité aux frontières aéroportuaires dans le cadre du programme FP7 et a reçu quatre millions d’euros à ce titre.

 

Des multinationales à la fois juges et parties

Certains chercheurs et ONG pointent du doigt le rôle plus discret joué par certaines entreprises consultées par la Commission. Dans le groupe de conseils du programme de recherche FP7, on comptait des représentants des grandes entreprises de la sécurité, dont Morpho et Thalès. « Trop souvent, on se rend compte que les projets sélectionnés sont coordonnées par des entreprises qui sont également dans les groupes de conseil censés donner leurs avis sur les projets reçus, ou sur les orientations à donner aux politiques de sécurité ! En mettant les sommes bout à bout, ces entreprises touchent des milliards de la Commission », regrette Stéphanie Demblon, membre d’Agir pour la paix, qui pose la question des conflits d’intérêts.

Stéphanie Demblon propose des lobby-tours à Bruxelles, et montre ainsi aux citoyens curieux les bureaux que les grandes entreprises de la défense et de la sécurité ont installé dans le quartier des institutions européennes. « La Commission justifie ce recours aux entreprises en disant qu’elle n’a pas les experts nécessaires et que les représentants de ces groupes en sont. Donc pourquoi s’en priver ? », ajoute-t-elle avec dépit.

 

Une utilité remise en question

Ces investissements dessinent-ils les contours d’une Europe plus sûre ? Beaucoup en doutent. « On nous a présenté le PNR comme la solution miracle, mais il n’en est rien, assure Emmanuel Maurel, député européen membre du groupe Sociaux-démocrates. Comme tout le monde est inquiet, on se raccroche à de tels dispositifs à l’efficacité discutable. Alors que les assassins circulent en voiture, on crée une base de données sur le transport aérien. Savoir ce qu’un passager mange, avec qui il voyage, ça ne sert à rien. Il vaudrait mieux investir sur le renseignement humain, que dans un système aussi démesuré. »

Concernant les Smart borders, la députée et vice-présidente du groupe des Verts-Alliance libre européenne, Ska Keller, est encore plus tranchante : « J’attends de savoir à quel problème cette idée de frontières intelligentes apporte une réponse. La Commission européenne est incapable de nous le dire. En plus, nous ne pouvons pas suspecter tous les citoyens européens d’être des terroristes, mais on se permettrait de le faire avec les autres ? Ce n’est pas normal. Par ailleurs, le fait de rester plus longtemps sur un territoire ne se justifie pas forcément par des motifs criminels. »

Pour la Cimade, association française spécialisée dans les droit des étrangers, le système des Smart borders risque, de surcroît, de créer une discrimination entre les différentes catégories d’étrangers. « L’Europe facilitera le passage des voyageurs à faible "risque migratoire", c’est-à-dire ceux venant de pays riches », analyse Gipsy Beley, porte-parole de la Cimade.

 

« Il faudrait plutôt voir ce qui peut être réalisé à court terme »

Pour certains, le choix de l’automatisation dans le cadre des Smart borders n’est peut-être pas non plus le meilleur. « Les portes font moins d’erreur que les humains, témoigne le professeur Luuk Spreeuwers, qui a étudié le système déjà installé à l’aéroport d’Amsterdam Schiphol. Cependant, d’autres difficultés apparaissent, comme des photos de passeports qui ne sont pas de qualité suffisante pour la reconnaissance faciale. » Là encore, la culture du secret l’emporte. Si le test de la phase pilote est encourageant, avec un taux d’authentification de 98%, celui des premières années de pratique demeure confidentiel. Impossible de savoir si, confrontés à un plus grande nombre de voyageurs, ils sont encore performants.

Avant de s’engager dans de nouveaux projets, souvent poussés par le marché, peut-être faudrait-il commencer par tirer les leçons du passé ? « Il faudrait plutôt voir ce qui ce qui peut être réalisé à court terme. Il ne faut pas oublier que le SIS est en place depuis les années 90, et vingt-cinq ans après, nous sommes toujours en train de l’améliorer. De SIS 1, on est passé à SIS 1+, puis à SIS 2. Le dispositif arrive seulement à maturité. Il n’est donc pas certain que le prochain projet soit bénéfique avant une vingtaine d’années. Que fait-on entre-temps ? », s’interroge Giovanni Buttarelli, le Superviseur européen de la protection des données.

 

Protéger les données personnelles

Autre inquiétude : le respect des nombreuses données ainsi collectées sur les citoyens. Comment seront-elles utilisées ? Où vont-elles être stockées ? Pour combien de temps ? En s’opposant une première fois au Passenger name record (PNR) et aux Smart borders, le Parlement a bien fait comprendre à la Commission qu’il ne voterait pas ces textes tant que des réponses précises à ces questions ne seraient pas apportées.

Concernant le PNR, deux strictes conditions étaient posées : qu’il soit voté en parallèle d’un ensemble de textes favorables à la protection des données, et qu’il soit équilibré entre lutte contre le terrorisme et protection de la vie privée. La Commission est ainsi revenue avec un « Paquet protection des données », que le Parlement a ensuite validé. Au lendemain du vote, le groupe Sociaux-démocrates s’est réjoui dans un communiqué d’avoir « veillé à renforcer les droits des internautes (...) Droit à l’effacement, voies de recours, informations sur la façon dont les données sont traitées, encadrement des transferts de données des Européens vers les pays tiers, possibilités de profilage strictement limitées, sanctions en cas de non-respect des règles. » Néanmoins, comme le concède le député Emmanuel Maurel, si le texte est censé apporter des améliorations, « il faudra retravailler sur cette thématique, car la protection de la vie privée est aujourd’hui un véritable casse-tête ».

 

Vers un « système pan-européen de surveillance » ?

L’intention des Smart borders pose encore plus de problèmes. La gestion des données personnelles, dans ce cas, reste en effet pour le moins floue. Les informations seraient gardées six mois, mais il n’est guère spécifié comment ni ce qu’elles deviendront. Ce qui mène le Superviseur européen de la protection des données à penser que les objectifs de la Commission sont contradictoires. « Elle dit vouloir faciliter le déplacement en gardant les frontières sûres, veiller à ce que les voyageurs soient libres, respecter les droits fondamentaux, mais mener ce projet à bas coût. Cela fait trop en même temps pour être réaliste. »

Surtout, une interrogation plus large demeure : les « frontières intelligentes » ne sont-elles pas une étape vers un « système pan-européen de surveillance », comme le craint Chris Jones, membre de l’ONG Statewatch ? La base d’information sur les voyageurs sera énorme, allant de leurs déplacements dans l’espace Schengen à leurs données biométriques, le tout pouvant être – en fonction du vote des députés – être accessible par les polices nationales, Europol et Frontex ! Au risque de mettre en place une « société qui ne fait pas très envie », avertit le député socialiste Emmanuel Maurel. Lors du vote du texte sur les Smart borders d’ici la fin de l’année, le Parlement européen résistera-t-il à nouveau ?

Aline Fontaine et Morgane Rémy

Illustration : CC Ophelia Noor / Owni

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11 juillet 2016 1 11 /07 /juillet /2016 20:19

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

Fermetures à la chaîne dans les supérettes Casino
10 juillet 2016 | Par Dan Israel
 
 
 

Certains gérants de magasins Petit Casino, Spar ou Leader Price Express, qui dépendent d'un statut à mi-chemin entre salariés et commerçants, reçoivent depuis quelques mois des courriers du groupe leur demandant d'étendre leurs horaires d'ouverture. En cas de refus, ils sont remerciés. D'autres sont poussés à passer à la franchise. Plusieurs gérants accusent le groupe de mener « un plan social déguisé ». Casino dément fermement.

Depuis quelques semaines, une pluie de lettres recommandées s’abat dans les boîtes aux lettres des gérants non salariés du groupe Casino. Ces travailleurs au statut hybride, pas vraiment salariés mais pas non plus totalement commerçants, sont payés à la commission sur les ventes qu’effectuent leurs magasins. Ils sont environ 3 400 en France et pilotent des Petit Casino, des Spar et des Leader Price Express, partout sur le territoire.

À l’automne dernier, Mediapart a consacré une longue enquête à leurs conditions de travail et aux étranges déficits qui se creusent dans les comptes de dizaines de magasins. Nous avions raconté comment Casino, deuxième groupe de distribution en France, se sert de ces trous comptables pour rompre les contrats le liant à ces gérants, qui travaillent bien souvent en couple, régulièrement plus de 60 heures par semaine, gagnent de toutes petites sommes, et n’ont pas d’autre logement que celui qui leur est fourni par leur employeur. Ces pratiques ont toujours cours et donnent encore lieu à des procès à répétition.

Mais depuis le printemps, les gérants non salariés doivent faire face à un nouveau souci. Selon nos informations, le groupe, présidé par Jean-Charles Naouri, envoie très largement des lettres leur demandant d’étendre les horaires d’ouverture de leurs magasins, bien que le groupe ne puisse pas officiellement leur imposer ce choix. Et ce courrier est bien souvent le prélude à une rupture du contrat de travail. « Nous tenons à attirer votre attention sur vos horaires : vous êtes libres de les déterminer, ceci étant, vous devez respecter les termes de votre contrat de cogérance qui prévoit que vous devez tenir compte des coutumes locales des commerçants, indiquent ces courriers types. Ainsi, par la présente, nous devons attirer votre attention sur l’impact de ne pas ajuster vos horaires d’ouverture. En effet, vos horaires actuels ne proposent pas de plages d’ouverture suffisantes de notre magasin. »

 

Jean-Charles Naouri, PDG de Casino, en février 2013. © Reuters - Philippe Wojazer Jean-Charles Naouri, PDG de Casino, en février 2013. © Reuters - Philippe Wojazer

 

La demande de Casino s’appuie sur l’article 1 du « contrat de cogérance » signé par les gérants, qui précise qu’ils doivent « assurer la gestion du magasin de vente au détail, dont ils fixent les plages d’ouverture en tenant compte des coutumes locales des commerçants détaillant d’alimentation générale et/ou des besoins de la clientèle ». Les courriers envoyés détaillent donc les horaires d’ouverture du magasin ciblé et les comparent à ceux de ses voisins. « Vos choix d’ouverture, qui ne répondent pas aux modes de consommation de nos clients et ne correspondent pas à notre image et politique commerciale, mettent en péril l’activité de notre magasin », insiste le courrier. Avant de se faire menaçant : « Sans nous immiscer dans votre organisation de l’exercice personnel de votre activité, nous vous demandons de revoir votre choix d’horaires et jours d’ouverture de notre commerce et ce afin de respecter vos obligations contractuelles. »

Ce courrier est précédé ou accompagné de visites des responsables commerciaux, qui transmettent le même message. En cas de refus, les gérants reçoivent promptement une deuxième lettre les convoquant à un entretien préalable à la rupture de leur contrat, puis sont remerciés. C’est ce qui est arrivé à Sandrine Dargès et à son mari. Ils travaillaient depuis août 2006 au sein du groupe Casino et s’occupaient d’un magasin à Nîmes depuis six ans, d’abord sous enseigne Petit Casino puis, à partir de janvier 2015, sous enseigne Leader Price Express. Malgré un chiffre d’affaires important de 820 000 euros par mois, une ouverture du magasin étendue avec le passage en Leader Price (8 h-13 h ; 15 h-19 h 30 du lundi au samedi) et plus de 75 heures de travail hebdomadaire pour chacun, selon leurs décomptes, les époux Dargès ont reçu le 22 avril un courrier de Casino leur demandant d’élargir les heures d’ouverture.

Devant leur refus, leur contrat a été rompu fin juin, et ils doivent quitter leur logement mi-août. « Nous avions 500 clients par jour, les deux caisses tournaient quasiment en continu, nos deux heures de pause à midi nous servaient surtout à remettre de la marchandise en rayon ! » explique Sandrine Dargès. Pour ouvrir plus, elle a demandé au groupe de salarier un vigile et un employé, ainsi que du matériel de vidéosurveillance. Refusé. « En dix ans, nous n’avions jamais eu aucun souci, la direction nous faisait confiance. Lors de l’entretien préalable à la rupture de notre contrat, 25 minutes en tout et pour tout, on nous a seulement reproché de ne pas accepter d’ouvrir plus. Ils ont sans doute trouvé d’autres candidats qui ont accepté ces conditions… »
 

Les conflits autour des horaires se multiplient

Interrogé par Mediapart, le groupe Casino indique qu’il peut effectivement être amené « à conseiller les gérants mandataires non salariés sur l’évolution de leurs plages d’ouverture ». Mais il assure qu’« il est faux de prétendre que le non-respect des coutumes locales déboucherait automatiquement sur une résiliation du contrat ». Cette situation n’est sans doute pas automatique. Mais elle est très fréquente. Mediapart a eu connaissance de plusieurs cas similaires, dont les protagonistes désirent rester anonymes. « Depuis un peu plus d’un mois, nous avons recensé des dizaines de cas similaires », indique Didier Houacine, responsable CGT des gérants non salariés, dont le syndicat est le seul à dénoncer ces situations. « Des gérants reçoivent des courriers impliquant qu’ils travaillent 90 heures par semaine, alors qu’un couple seul tient le magasin ! » s’indigne-t-il.

Casino dément toujours, assurant que ces informations « n’expriment pas la réalité mais une polémique entretenue depuis plusieurs années par une seule organisation syndicale ». Pourtant, d’autres confirment. Comme Adrien Renaud, avocat grenoblois, qui accompagne de nombreux gérants dans des procédures aux prud’hommes ou au tribunal de commerce. « En un mois, j’ai été contacté par quinze couples de gérants confrontés à des problématiques de rupture de contrat, essentiellement pour des problèmes d’horaires d’ouverture des magasins, dit-il. Les premiers courriers sont arrivés il y a quatre ou cinq mois. C’est nouveau : jusqu’à présent, Casino ne demandait jamais cela par courrier. »

Un autre bon connaisseur du système voit lui aussi les conflits autour des horaires se multiplier. Il s’agit de Thierry Gautier, syndiqué CFDT (il fut délégué central pour le syndicat, lorsqu’il était encore représentatif chez les gérants Casino). L’homme est sans doute le seul à gérer deux magasins Casino sous deux statuts différents : il est gérant non salarié à Roubaix, mais franchisé, donc indépendant, à Villeneuve-d’Ascq. Une position qui lui permet de constater « une différence de statut flagrante » entre les deux catégories de personnel Casino, en défaveur des gérants non salariés.

Depuis de longs mois, Thierry Gautier accumule les exemples et les éléments de preuve allant dans le même sens que l’enquête précédente de Mediapart : anomalies de gestion, déficits non expliqués, contrôle à distance du système informatique des gérants… Accompagné des responsables de trois autres magasins, il a attaqué le groupe au pénal pour escroquerie et a réuni une quarantaine de gérants pour demander devant les prud’hommes une requalification de leur contrat en contrat de travail “salariés classiques” (lire par exemple ces articles de La Voix du Nord ici et ici).

« Des gérants à qui l’on demande de travailler plus m’appellent, catastrophés, et beaucoup n’avaient jamais eu aucun problème auparavant, témoigne celui qui fait de plus en plus figure de dernier recours pour ses collègues. De ce que je constate personnellement, cela concerne au moins une cinquantaine de magasins depuis le mois de mai. »

Loin du nord de la France, Fabien Brenon est l’un de ceux qui sont ciblés. Et ce gérant, installé depuis 2008 à Maclas, un petit village de la Loire, le vit extrêmement mal. « Ma femme et moi sommes sous antidépresseurs, on est au bout du rouleau », avoue-t-il. Il dit « adorer son boulot et son magasin », mais a « perdu le goût de tout, et 8 kilos, dans l’enfer que nous vivons », depuis que la directrice commerciale qui supervise son magasin le pousse à ouvrir plus longtemps. Par des visites récurrentes et des menaces à peine voilées, assure-t-il. Le 9 juin, il a porté plainte pour « harcèlement ». La pétition qu’il a lancée pour protester a recueilli 600 signatures de clients qui, assure Fabien Brenon, le soutiennent totalement.

« Plan social déguisé » ?

Sans aller jusqu’à ces extrémités, les procédures régulièrement suivies par Casino peuvent en effet paraître étonnantes. Ainsi, les horaires d’ouverture parfois donnés en référence aux gérants à qui il est demandé de travailler davantage sont ceux de magasins bien plus grands que les enseignes de proximité Casino. Thierry Gautier évoque par exemple un cas en Normandie où un magasin au chiffre d’affaires de 200 000 euros est comparé à un Carrefour Market dont le chiffre d’affaires avoisine 15 millions d’euros et qui, bien sûr, compte de nombreux salariés.

« Comment un couple de cogérants, seul dans son magasin et qui n’a pas les moyens d’embaucher, peut-il s’aligner ? Est-ce qu’un Super U, qui compte 10 salariés aux 35 heures, est comparable à un Petit Casino de 50 m2 tenu par un couple ? Bien sûr que non, s’agace Me Renaud. Comment peut-on demander à des salariés de faire des semaines de 70 heures, pour moins que le Smic chacun, et sans respecter les règles de repos hebdomadaire ? » L’avocat prépare sur cette base de nouveaux dossiers pour les prud’hommes.

D’autres fois, des gérants acceptent d’ouvrir plus longtemps, mais des procédures de rupture sont tout de même engagées, ou bien on les informe que leur magasin va en fait fermer ! Thierry Gautier cite deux cas, Didier Houacine au moins un autre et Mediapart a connaissance d’un couple dans cette situation : « On ne comprend pas, on est dans le groupe depuis de nombreuses années et on a fait tout ce qu’on nous demandait, témoigne la gérante d’un commerce de plus de 250 m2 en région parisienne. Comme demandé, on a élargi les horaires de notre magasin, notre but n’est pas de nous retrouver à la rue avec un enfant à charge. Mais on a quand même reçu une lettre de convocation à l’entretien de rupture quelques semaines plus tard… »

« Ces lettres concernant les horaires sont des leurres », juge Thierry Gautier. « C’est un faux prétexte, Casino essaie de trouver des motifs de rupture », approuve Didier Houacine, pour qui « le groupe mène un plan de licenciements économiques déguisé, un dégraissage de la masse salariale, sans respecter les règles en vigueur ». Rappelons qu’un plan social (plan de sauvegarde de l’emploi, PSE) est obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés qui se séparent d’au moins 10 personnes sur une période de 30 jours. Le dégraissage concernerait tout particulièrement les Leader Price Express, le nouveau concept déployé progressivement il y a moins de deux ans : prix moins élevés, et donc plus de clients, mais aussi plus de travail et de manutention pour les gérants. Ces petits Leader Price sont très largement ciblés par les procédures en cours, parfois moins de 18 mois après avoir été lancés.

Là encore, le groupe oppose un démenti vigoureux à ces soupçons : « Des fermetures de magasins peuvent avoir lieu, la société faisant évoluer son parc de magasins au fur et à mesure qu’elle décline sa politique commerciale, indique son service de communication. Elles ont toujours existé et sont compensées par des ouvertures. » À cet égard, l’entreprise rappelle « qu’en 2015, 162 couples de gérants ont rejoint la branche proximité, ce qui porte leur nombre total à 3 341. Ce qui rend tout à fait fantaisiste cette prétendue existence d’un “PSE déguisé” ». Le groupe ne donne pas de chiffres pour l’année 2016, où les ruptures semblent s’accélérer.


Incitation à passer en franchise ?

Les interrogations sont aussi alimentées par d’autres cas où les gérants de magasins apparemment peu rentables se voient proposer de reprendre la boutique en franchise ou en location-gérance. Ce qui signifie qu’ils doivent racheter le fonds de commerce à Casino et que les bénéfices et les pertes sont ensuite à leur charge, alors qu’aujourd’hui, une rémunération minimum de 2 380 euros brut par couple est garantie aux gérants. Passer ses boutiques en franchise est une stratégie classique d’un groupe cherchant à ouvrir rapidement beaucoup de magasins ou à minimiser les pertes que ses enseignes lui font subir (puisque ce sont les propriétaires des magasins franchisés qui portent ces pertes). C’est notamment le choix qu’a fait le groupe de supermarchés discount Dia à partir de 2011 (avant de vendre ses magasins français à Carrefour, en 2014). Parmi ses dirigeants en France, on trouvait à l’époque Emmanuel de Courrèges. L’homme est aujourd’hui directeur d’enseigne chez Casino et s’occupe justement du passage en franchise des magasins de proximité…

Si les gérants à qui l’on propose la franchise ou la location-gérance la refusent, le magasin est fermé. « Nous avons pris la décision de cesser l’exploitation du magasin », a ainsi lu en fin d’année dernière une gérante d’Île-de-France dans une lettre recommandée, après avoir décliné le passage en gérance. Dans ce cas, Casino s’engage à proposer trois offres de reclassement dans d’autres magasins. « Mais les trois propositions qu’ils m’ont faites concernaient des magasins où les conditions de travail étaient très dures, avec des horaires à rallonge, ou bien situés dans des secteurs très “chauds” de la banlieue parisienne », indique la gérante francilienne. « Je dois quitter mon logement en août, et je ne suis pas de la région, comment je vais faire ? » s’interroge-t-elle, pointant elle aussi « un licenciement économique déguisé ».

Là non plus, rien à signaler, selon Casino, qui ne voit « pas de changement de la stratégie de la branche proximité ». Le groupe indique que « le passage de certains magasins en franchise existe depuis de nombreuses années », dans le cadre d’un dispositif spécial auquel, depuis 2010, ont adhéré 350 gérants non salariés. Pas de quoi convaincre la CGT, qui a organisé une grève le 26 mai dernier. Selon ses chiffres, plus de 400 magasins ont baissé le rideau et environ 200 gérants s’étaient rassemblés devant le siège du groupe, à Saint-Étienne, pour protester contre les « fermetures en cascade » et ce qu’ils voient comme une liquidation annoncée de leurs emplois. Un mois et demi plus tard, leur inquiétude n’a pas baissé d’un iota.

 

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

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9 juillet 2016 6 09 /07 /juillet /2016 20:45

 

Source : http://www.politis.fr

 

 

La réalisatrice Mariana Otero arrêtée pour avoir filmé la « chose publique »

 

Publié le 8 juillet 2016

par

Photo : PHILIPPE LOPEZ / AFP

 

 

http://static.politis.fr/medias/articles/2016/07/la-realisatrice-mariana-otero-arretee-pour-avoir-filme-la-chose-publique-35087/thumbnail_hero-35087.jpg

 

Le 5 juillet, la réalisatrice Mariana Otero a été arrêtée avec son équipe par des CRS en plein tournage de son dernier film, portant sur le mouvement Nuit debout. Elle dénonce l’interdiction qui lui a été faite de filmer la « chose publique », un « droit pour tous les citoyens ».

Je suis réalisatrice (Histoire d’un secret, Entre nos mains, A ciel ouvert etc…). Depuis trois mois avec l’aide d’un collectif « Les yeux de Marianne », je filme quotidiennement un groupe de jeune gens engagés dans le mouvement Nuit debout à République. Leurs réflexions et leurs actions.

Nous avons mis quelques vidéos sur YouTube surtout au début du mouvement : https://www.youtube.com/channel/UCP_YojMRZJ97TR17ubsD1rg

Lors des manifestations, comme tant d’autres journalistes et réalisateurs, nous avons été empêchés de filmer par des violences policières qui s’exerçaient à la fois sur les manifestants et tous ceux qui filmaient, photographiaient, périscopaient… Certains ont été touchés dans leur corps. Parfois gravement.

Mardi 5 juillet, dans un contexte pourtant calme, moi et mon équipe avons été froidement interpellées et arrêtées face à l’Assemblée nationale, dix minutes après notre arrivée pour le simple fait que nous filmions. Voici le récit des faits que vous pourrez constater aussi sur la vidéo périscope filmée par « La Taupe enragée » :

 

 

Moi et mon équipe, Sophie Tesson à la perche et Pascal Deux en renfort son, sommes arrivés vers 17h sur le pont de la Concorde. Il y avait plus de CRS que de manifestants, ces derniers étant encore peu nombreux et extrêmement pacifiques. Comme à l’habitude dorénavant, les manifestants ont très vite été nassés. Et les passants, triés : ceux qui semblaient vouloir manifester étaient fouillés puis poussés fermement dans la nasse, les autres, les touristes, pouvaient traverser le pont. Je filmais ces fouilles depuis quelques minutes quand les CRS, entre autres leur commandant, m’ont demandé ma carte de presse. J’ai expliqué que je n’étais pas journaliste mais cinéaste et que je n’avais pas à avoir de carte de presse pour avoir l’autorisation de filmer, que filmer la chose publique est un droit pour tous les citoyens. Mais les CRS ont continué de me demander d’arrêter de filmer arguant que ce jour-là, un arrêté préfectoral exceptionnel avait été émis interdisant les tournages devant l’Assemblée. Nous avons demandé à voir cet arrêté qui ne nous a jamais été fourni. J’ai continué de filmer.

Quelques minutes plus tard, les CRS se sont approchés de moi, décidés cette fois-ci à m’empêcher de filmer par la contrainte. Ils ont essayé de se saisir de la caméra. J’ai résisté en la serrant contre moi et en continuant d’affirmer mon droit haut et fort. Alors un jeune homme a essayé de s’interposer et de me défendre. Dans le même temps, Pascal Deux, par ailleurs réalisateur de fiction à Radio France a tendu sa carte de radio, espérant ainsi pouvoir me permettre de continuer à filmer. Un des CRS s’est saisi de la carte pour aller l’apporter à ses supérieurs hiérarchiques. Nous l’avons suivi. La situation était devenue très confuse, des manifestants nous soutenaient en protestant, les CRS hurlaient et s’agglutinaient. Pendant ce temps - je ne l’avais pas vu dans la confusion -, le jeune homme qui avait tenté de nous défendre, avait été mis à terre par trois CRS. Quand nous avons pris conscience de cette arrestation, Sophie Tesson et moi-même avons fait demi tour pour la filmer en espérant que le fait de filmer empêche et limite la violence policière qui sans regard extérieur peut se déchaîner.

A ce moment-là, alors que je filmais, j’ai été saisie fermement par le bras par un CRS et emmenée avec Sophie Tesson au bout du pont où la carte de Pascal Deux était vérifiée par d’autres CRS. Nous avons reçu alors l’interdiction absolue de filmer. Nous avons rappelé aux CRS la directive 2008-8433, qui dit qu’en aucun cas ils ne peuvent interdire de filmer ni même d’être filmés dans l’exercice de leur fonction. Mais ils en ont eu cure, nous avons été encerclés et isolés. Le commandant nous a alors accusé d’avoir été agressifs : je les aurais frappés de mon coude, bousculés avec la caméra, Sophie Tesson les aurait frappés avec la perche. Ils ont voulu vérifier nos papiers mais je n’avais que mon pass navigo et Sophie Tesson n’en avait pas. Puis ils ont confisqué le matériel caméra ainsi que le matériel son de Pascal Deux. Ils ont affirmé alors qu’en plus des soi-disant violences que nous leur aurions faites, nous aurions aussi arraché l’insigne d’un des CRS et ils nous ont montré la veste d’un des leurs où un insigne manquait. Les quelques CRS qui nous encerclaient, ont affirmé chacun sans la moindre vergogne avoir été témoin de cette scène qui n’avait pourtant jamais eu lieu.

Trois quarts d’heure plus tard, ils nous ont mis dans un fourgon et emmené au commissariat du 15ème. Là, nous avons été reçus rapidement par le Capitaine qui très vite nous a relâchés. Il a reconnu que nous avions été victimes d’une privation de liberté abusive de la part de cette brigade et que les CRS étaient « hors la loi » en nous empêchant de filmer. Il n’a pas pris en considération et n’a pas cru les soi-disant violences que nous aurions exercées contre les CRS.

Par contre, le jeune homme qui s’est interposé entre les CRS et moi - et dont, pour l’instant, sans son autorisation, je préfère taire le nom - ce jeune homme, donc, est quant à lui toujours en garde à vue dans le commissariat du 14ème. Alors qu’en l’occurrence, il est intervenu pour faire respecter la loi.


Mariana Otero
par
publié le 8 juillet 2016

 

 

 

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9 juillet 2016 6 09 /07 /juillet /2016 14:27

 

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José Manuel Barroso cède à son tour aux sirènes de Goldman Sachs
8 juillet 2016 | Par Ludovic Lamant
 
 
 

Le géant de Wall Street a annoncé vendredi qu’il embauchait José Manuel Barroso. Moins de deux ans après son départ de Bruxelles, l’ancien président de la commission va conseiller la banque sur l’après-Brexit. Un signal ravageur pour la crédibilité de l’UE.

De notre envoyé spécial à Bruxelles.- Deux semaines à peine après la décision des Britanniques de quitter l’Union européenne (UE), l’annonce risque de malmener un peu plus la crédibilité chancelante de la commission de Bruxelles. Son ancien président, José Manuel Barroso (2004-1014), vient d’être embauché par le géant de la finance américaine Goldman Sachs. Le Portugais prend la présidence non exécutive du conseil d’administration de Goldman Sachs International (GSI) et devient également conseiller auprès de la banque d’investissement de Wall Street, lit-on dans un communiqué publié vendredi par la banque.

D’après les déclarations qu’il a faites au Financial Times dans la foulée de l’annonce officielle, l’ex-premier ministre portugais tentera d’« atténuer les effets du Brexit » pour le compte du mastodonte américain. « Évidemment, je connais bien l’UE, et je connais aussi plutôt bien l’environnement britannique […]. Si mes conseils peuvent être utiles dans les circonstances actuelles, je suis prêt, bien sûr, à aider », a expliqué Barroso. Il récupère un poste prestigieux, occupé jusqu’à mai 2015 par l’Irlandais Peter Sutherland, ex-président du GATT, puis de l’OMC, et ancien commissaire européen à la concurrence.

 

José Manuel Barroso le jour de son départ de la commission européenne, le 30 octobre 2014. © Reuters / François Lenoir. José Manuel Barroso le jour de son départ de la commission européenne, le 30 octobre 2014. © Reuters / François Lenoir.

 

« On ne pourrait pas l’inventer. Tu voudrais ridiculiser la commission pour l’éternité, tu ne t’y prendrais pas autrement. C’est sans doute le pire qu’il pouvait faire », réagit Martin Pigeon, de Corporate Europe Observatory (CEO), une ONG qui plaide pour davantage de transparence dans la bulle bruxelloise. D’après le décompte réalisé par CEO, l’ex-patron de l’exécutif européen n’en est pas à son coup d’essai en matière de pantouflage : au cours de la première année suivant son départ de Bruxelles, il a accepté pas moins de 22 postes (certains ne sont pas rémunérés), tout à la fois président d’honneur d’universités et autres fondations, mais aussi membre du groupe de pilotage des conférences Bilderberg, ou encore président d’honneur du European Business Summit, une conférence annuelle organisée par le lobby européen des grandes entreprises.

Mais son débauchage par Goldman Sachs est, de loin, le plus spectaculaire. Avec son carnet d’adresses, Barroso pourrait jouer un rôle clé dans les négociations qui s’ouvriront, sans doute d’ici à la fin de l’année, pour définir le nouveau statut du Royaume-Uni par rapport à l’UE, et redéfinir les règles de l’accès aux marchés financiers européens pour les banques britanniques. « Ce que je peux vous dire, c’est que la piste la plus sage et intelligente, c’est que les deux parties acceptent de mener des négociations équitables : personne ne sortira gagnant d’une confrontation », prévient l’ex-président de la commission, qui a prévu d’emménager à Londres pour l’occasion.

 

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Dans son entretien au FT, Barroso regrette également « la perte de confiance » envers le projet européen : « Les stocks de confiance sont à des niveaux très bas aujourd’hui, c’est sans doute la plus précieuse de nos matières premières », remarque-t-il, filant la métaphore économique. Mais le Portugais semble refuser à faire le lien entre cette désaffection brutale des citoyens envers l’Europe, confirmée par le Brexit, et l’attitude de certains dirigeants, à commencer par la sienne, s’empressant de rejoindre le privé pour y faire du lobbying, direct ou indirect… « Ce qui est frappant, c’est l’absence totale de considération de Barroso pour les dégâts qu’il inflige à la commission européenne. Cela fait maintenant assez longtemps que je travaille à Bruxelles, mais quelque chose continue de me surprendre : le degré de profonde inconscience politique de ce personnel. Ils se considèrent comme des opérateurs techniques, pas comme des hommes politiques. Ils se sentent au-dessus de la politique », commente, de son côté, l’activiste Martin Pigeon.

Jointe par Mediapart, une porte-parole de Jean-Claude Juncker, le successeur de Barroso, se refusait vendredi soir à tout commentaire. Sur le fond, l’exécutif européen est impuissant. Il a bien mis en place, depuis 2010, un « code de conduite » des commissaires un peu plus contraignant qu’auparavant, pour surveiller au cas par cas les « pantouflages » de ses anciens commissaires. Mais ces règles sont mal appliquées. Surtout, elles ne valent que pour les 18 premiers mois suivant le départ des commissaires. Or, Barroso a quitté depuis 20 mois (fin octobre 2014) la présidence de l’institution bruxelloise : il fait donc désormais ce qu’il veut. Au sein de la commission, certains continuaient, sous le sceau de l'anonymat, à défendre le choix de l’ex-président : « C’est légitime que des personnes avec une forte expérience, et d’importantes qualifications, puissent continuer à occuper des rôles de premier plan, dans les secteurs public ou privé. »

 

L’« effet de loupe » Goldman Sachs

À Bruxelles, les cas de « revolving doors », ces portes tournantes entre le public et le privé, sont aussi vieux que l’Union européenne. Les polémiques sont régulières, et leurs effets sont dévastateurs auprès de l’opinion. À l’été 2014, l’eurodéputée Sharon Bowles, qui présidait jusque-là la commission des affaires économiques et financières, un poste clé pendant la crise financière, a rejoint… la City. Plus récemment, la Néerlandaise Neelie Kroes (ex-commissaire à la concurrence, puis au marché numérique, durant les mandats de Barroso) est devenue conseillère spéciale pour l’Europe d’un autre fleuron de la finance américaine, Bank of America Merrill Lynch. Pas plus tard qu’en mai 2016, c’est Uber, le très controversé service de réservation de voiture avec chauffeur, qui l’a débauchée.

De son côté, le Belge Karel de Gucht, ex-commissaire au commerce qui a lancé le chantier du traité transatlantique (TAFTA, ou TTIP) en 2013, est aujourd’hui payé par le groupe de télécoms Belgacom. Quant à l’eurodéputée luxembourgeoise Viviane Reding, ex-commissaire elle aussi, elle occupe un siège au conseil d’administration du groupe de technologie numérique Agfa-Gevaert. En tout, ils étaient neuf ex-membres de l’équipe Barroso à avoir rejoint le privé moins d’un an après leur départ de l’exécutif européen.

Pourtant, des règles existent pour encadrer les 18 premiers mois suivant la fin de l’exercice de leurs fonctions – ce qu’on appelle la « cooling-off period » dans le jargon bruxellois. Le collège des 28 commissaires, qui se réunit chaque mercredi à Bruxelles, doit valider, au cas par cas, les embauches de leurs prédécesseurs. Et lorsqu’ils estiment qu’un conflit d’intérêts est possible, ils renvoient le dossier devant un « comité d’éthique » ad hoc, qui doit se prononcer. En tout, sur la centaine de postes concernés au cours de la première année de l’après-Barroso, 37 % ont été renvoyées au comité éthique… qui n’a rejeté aucune demande.

 

C’est pourquoi des ONG spécialisées sur ces questions, dont CEO, réclament l’extension de la période où les règles s’appliquent, de 18 mois à trois ans après le départ de la commission. Et surtout, elles exigent l’interdiction de tout type de lobbying, direct ou indirect, durant ces trois ans, puisque l’analyse au cas par cas par le comité d’éthique (dont Mediapart a déjà décrit ici certains travers) ne fonctionne pas. « Le revirement rapide de Barroso nuit fortement à la réputation de la commission européenne : nous devons de toute urgence rallonger la période de “cooling-off”, à trois ans », a réagi l’eurodéputé allemand Sven Giegold, du groupe des Verts.

« Ce nouveau pantouflage, qui ressemble fort à un conflit d’intérêts, est scandaleux, a estimé de son côté la délégation des socialistes français au Parlement européen. Nous exigeons une révision des règles pour empêcher de tels recrutements d’anciens commissaires européens. Après le cas Nelly Kroes, qui roule désormais pour Uber, la commission européenne doit agir de toute urgence. »

José Manuel Barroso ne rejoint pas n’importe quelle banque du secteur privé, mais bien Goldman Sachs, qui s’est fait une spécialité dans le débauchage des dirigeants politiques les plus haut placés. Comme Mediapart l’a déjà raconté en longueur ici, la liste est vertigineuse : la plupart des hommes qui ont géré la crise de la zone euro sont passés, ou ont été recrutés par la suite par le géant américain. Il y eut par exemple Mario Monti, conseiller international de Goldman Sachs de 2005 à 2011, avant de prendre la tête du gouvernement italien en pleine crise politique dans la péninsule. Monti avait lui aussi été commissaire européen à la concurrence par le passé (1999-2004). Et comme Barroso aujourd’hui, son travail à l’époque consistait à « ouvrir les portes » de l’Europe pour Goldman Sachs.

Un autre Italien, Mario Draghi, est également concerné : l’actuel président de la Banque centrale européenne (BCE) fut vice-président de Goldman Sachs International pour l’Europe entre 2002 et 2005. Quant à Lucas Papademos, ex-gouverneur de la banque centrale grecque et ex-premier ministre de la Grèce, il est soupçonné d’avoir joué un rôle de premier plan dans le maquillage des comptes publics de la Grèce, avec la complicité de Goldman Sachs. José Manuel Barroso, ex-maoïste et cinéphile, vient donc ajouter son nom à cette liste. Le choix de Goldman Sachs risque toutefois d’en surprendre plus d’un, tant le bilan de Barroso – surtout son premier mandat, de 2004 à 2009 – est maigre. Ses compétences pour le « job » sont loin d'être évidentes.

Pour Martin Pigeon, de CEO, il faudrait toutefois se méfier des effets de loupe sur Goldman Sachs, qui pourraient faire oublier la vision d'ensemble : « Goldman Sachs dans la finance, c’est comme Monsanto dans les semences et les pesticides. Ce sont les plus connus, et donc les plus visibles, qui débauchent les opérateurs politiques plus influents. Cela crée un effet de loupe, qui ne doit pas tromper : c’est une logique systémique de capture de la décision publique à laquelle nous sommes confrontés, et il faut l’endiguer par des réformes et de nouvelles législations qui protègent l'intégrité de la décision publique et lui permettent d'avoir accès à une expertise indépendante », plaide-t-il.

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

 

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9 juillet 2016 6 09 /07 /juillet /2016 13:50

 

Source : https://blogs.mediapart.fr/mika-hatik/blog

 

 

Les Français ont gagné! (?)

 

 

J'entends dans la rue les klaxons des supporters de l'équipe de France de football. Victoire en demi-finale de l'EURO 2016 contre l'Allemagne. Mais pourquoi n'ais-je pas envie de participer à cette "fête" ? Loin d'être joyeux, pourquoi suis-je en colère ? Pourquoi cette impression d'être seul dans ce moment d'unité nationale ?

« Les français ont gagné !!! »

Ma collègue rentre dans mon bureau tout sourire, mais je ne comprends pas.
Il me semblait que les Français avaient perdu, au contraire.
Le match de mardi, contre la loi travail, nous avait été volé.
On avait décrété le score : 49-3.

Je comprends vite qu'elle me parle de l'EURO de foot.
Un sentiment bizarre vient s'installer dans ma poitrine.
Colère ou dégoût ? Je repense à tous les supporters qui sont allés remplir les stades, plus nombreux qu'à la manif' de mardi. Je me souviens qu'une journée de grève, « ils ne pouvaient pas se le permettre ». Le ticket pour le match des bleus leur a coûté bien plus.
Cet argent, ils le donnent à l'UEFA de leur plein gré.
De plein gré également, le gouvernement lui fera cadeau de toute forme d'imposition.
Au final, cette fête de l'EURO, on ne leur a pas dit, aux français, mais elle leur coûtera bien plus cher. Et on leur impose pourtant d'être économes. Il paraît qu'il n'y a plus assez d'argent dans les caisses publiques pour conserver des lits d'hôpitaux. Rassurez-vous, les recettes des partenaires privés, elles, seront bien juteuses.

L'EURO 2016 :
Le bouclier derrière lequel s'est retranché le gouvernement pour faire accepter l'état d'urgence pourtant décrié par la Ligue des Droits de l'Homme ? 
Le bouclier derrière lequel le préfet de Calais a interdit un convoi humanitaire à l'attention des réfugiés livrés à eux-mêmes. 
Le bouclier derrière lequel s'est caché le stade de France pour interdire les messages politiques, au même titre que les messages religieux.

Du pain et des jeux ! Etait-ce le programme de François Hollande en 2012 ?
Abrutir les citoyens de spectacles de gladiateurs et de malbouffe en fanzone ?
Le gouvernement a-t-il vraiment crû qu'il pourrait déposséder le peuple de tout esprit de démocratie en lui « offrant » cette fête insensée ?
Non bien sûr, c'eût été trop aléatoire de miser aussi gros sur la victoire d'une équipe de France, qui ne joue plus de finales depuis 2006. A moins bien sûr que la corruption ne soit à l'oeuvre, qu'il soit possible d'acheter des matchs, que le football soit vendu aux intérêts de la Finance ? Au fond, la France a-t-elle vraiment gagné la coupe du monde de 1998 ? Même Emmanuel Petit est venu à en douter.

Non, je n'ai pas soutenu l'Equipe de France.
Oui, à chaque match, j'ai souhaité sa défaite, afin que les médias s'emparent à nouveau du débat politique plutôt que des querelles de ballons ronds.
Non, je n'ai pas soutenu l'Equipe de France.
Car le chauvinisme est la porte d'entrée du nationalisme, par lequel on favorise la xénophobie et le repli sur soi.
Non, je ne suis pas fier d'être Français.
Je le serai lorsque l'on fera réellement respecter les valeurs de la France : Liberté, Egalité, Fraternité.
Non, je ne saluerai pas le drapeau en chantant avec ces sportifs millionaires qui ignorent sans doute quelles horreurs ont été commises en son nom ! 

Je me sens seul au milieu des klaxons et je m'en inquiète.
J'ai essayé d'expliquer pourquoi et on m'a dit « intégriste », « extrémiste », « rabat-joie ».
Qui sommes-nous devenus pour hurler ainsi avec les loups ?
Juste des moutons.

 

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Source : https://blogs.mediapart.fr/mika-hatik/blog

 

 

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        Nous nous réunissons

                 tous les soirs

      devant la maison carrée

 

       A partir du 16 Juillet 2014

            et pendant l'été

                     RV

       chaque mercredi à 18h

                et samedi à 13h

    sur le terrain de Caveirac

                Rejoignez-nous  

et venez partager ce lieu avec nous !



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