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13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 22:13

LEMONDE | 13.12.11 | 12h34   •  Mis à jour le 13.12.11 | 18h22

 
 

Beine-Nauroy (Marne), envoyée spéciale - L'usine est posée à l'entrée du village de Beine-Nauroy, dans la Marne, juste avant d'atteindre les premiers pavillons. Le grand bâtiment jaune pâle de l'usine Bosal fait face au silo à betteraves. Devant, les salariés ont installé un cercueil noir frappé d'une croix rouge sang entouré de 93 croix de bois. C'est le nombre de suppressions d'emplois que Bosal, un groupe néerlandais du secteur automobile, a annoncé mi-novembre.

"C'est le travail qu'on délocalise. Notre canton est en train de devenir un désert de friches industrielles", note le maire (sans étiquette), Francis Floquet. La société veut "recentrer" ses activités dans ses autres sites en Allemagne et en Hongrie. Moins coûteux en transport et en main-d'œuvre. Dans l'usine marnaise ne subsisteront que 53 emplois sur 144.

Depuis plus de vingt-cinq ans, l'usine Bosal le Rapide fabrique des attelages de caravanes et des galeries pour le secteur automobile, essentiellement PSA. Avec ses 250 salariés il y a encore cinq ans, c'était devenu l'un des rares sites industriels dans cette plaine agricole. Il s'était même agrandi avec l'aide financière des collectivités locales : quelque 500 000 euros avaient été déboursés pour les aménagements de l'usine. C'est le seul employeur avec la petite déchetterie. "Bosal avait menacé de partir dans l'Aisne si on ne les aidait pas", se souvient Alphonse Schwein, conseiller général UMP du canton.

 

L’usine Bosal le Rapide, qui fabrique des attelages de caravanes et des galeries, va supprimer 93 emplois sur 144.

L’usine Bosal le Rapide, qui fabrique des attelages de caravanes et des galeries, va supprimer 93 emplois sur 144. VALENTINE VERMEIL POUR «LE MONDE»

DES CARNETS DE COMMANDES PLEINS

Aujourd'hui, Beine-Nauroy, ses 1 100 habitants, sa petite mairie coquette, sa boulangerie et son café sont comme en apnée. Ici, tout le monde attend le plan social détaillé. Pour connaître les critères et, derrière, les noms des licenciés. La direction l'a annoncé pour le 15 janvier. Le comité d'entreprise a du coup annulé le Noël des enfants à la mairie. Pas le cœur à la fête.

Personne n'avait vu le coup venir. L'entreprise est en bonne santé et voit ses carnets de commande toujours pleins. La direction avait même réclamé des heures supplémentaires aux ouvriers. Seul signe avant-coureur: l'arrivée d'un nouveau directeur, consultant en entreprise installé depuis début octobre avec un CDD de cinq mois, surnommé le "liquidateur" par le maire.

Les élus, encore sonnés, s'avouent démunis. D'autant que le canton a connu un plan social de 120 licenciements chez Reims Aerospace il y a six mois. La mairie a déjà anticipé le manque à gagner dans les impôts locaux et se prépare à abonder son budget social. "On veut dire aux salariés qu'on est là", explique Catherine Renard, élue municipale et ancienne infirmière du site, licenciée voici deux ans.

SANS ILLUSIONS

Chacun tente de s'activer pour sauver le site. Le conseiller général Alphonse Schwein, bombardé chargé de mission par le préfet, cherche à retrouver de l'activité pour le site. "On veut un engagement de Bosal à diversifier sa production et à créer des emplois", dit-il. Le groupe s'y refuse. "Ce sont les emplois de nos villages. A quoi cela sert de faire des plans locaux d'urbanisme si on n'a plus d'usines ? ", soupire-t-il.

Le président du conseil régional, Jean-Paul Bachy (divers gauche), est venu lui aussi soutenir les salariés. "Il y a du boulot, un site moderne, des carnets de commande pleins et ils délocalisent après avoir utilisé l'argent public. On ne peut pas accepter ce type d'opération ! ", s'indigne l'élu régional. Lui veut essayer de faire pression sur le groupe via les donneurs d'ordre de l'automobile.

Les salariés ne se font pourtant guère d'illusions: après ce premier train de licenciements, ils ne donnent pas cher des derniers ateliers. Les entreprises hongroise et allemande seraient déjà en train d'apprendre à fabriquer les galeries françaises.

IMPUISSANCE DES ÉLUS

"Notre but, c'est de repousser le moment où on devra partir. C'est tout ce qui nous reste", admet Laurent Gerardin, délégué (CGT) de l'intersyndicale. "Ici, tout le monde ne travaille pas dans le champagne et la casse industrielle se poursuit", remarque Sébastien Lienard, secrétaire général CFDT-Métaux de la Marne.

Empêcher le départ total de l'entreprise, tous les élus en rêvent mais ne savent comment. "On n'est pas assez lourd pour peser", admet Alphonse Schwein. "Nous n'avons pas les moyens de retenir l'entreprise", renchérit le maire. Faire ce qu'on peut et le montrer à ces administrés qui ne comprennent pas cette impuissance. Laurent Gerardin énumère les soutiens, mais sans espoir. Quelques rares "nationaux", comme le souverainiste Nicolas Dupont-Aignan ou Philippe Poutou (NPA), sont passés soutenir les salariés. Le secrétaire d'Etat chargé du logement, Benoist Apparu, dont la circonscription englobe désormais le canton, ne s'est pas montré. "Il suit ça de très près", assure le conseiller général UMP.

"Les politiques nous disent qu'ils nous soutiennent mais ne peuvent rien faire. A quoi servent-ils ? ", s'énerve le syndicaliste. "Pourquoi Sarkozy ne défend-il pas les emplois de son pays ? ", s'indigne Valérie Setera, magasinière, dans l'usine. A 44 ans, cette mère de famille a passé douze ans dans l'entreprise, son mari, conducteur de ligne, quinze. "Il pourrait s'y mettre au moins une fois en disant “cette usine, elle ne part pas”", insiste-t-elle.

Sylvia Zappi

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13 décembre 2011 2 13 /12 /décembre /2011 22:06
France : les dettes publiques locales, un enjeu citoyen essentiel

Nous allons aborder le sujet de la dette publique considérée au niveau local car, à côté des États, les collectivités (régions, départements, communes, structures intercommunales), les établissements publics (les hôpitaux notamment) et les associations ont eux aussi recours à l’emprunt pour financer leurs investissements.

Cet exposé s’adresse aux non-spécialistes des questions de finances locales |1|.

Après avoir présenté quelques données essentielles pour disposer d’une vue synthétique et claire du sujet, nous essaierons d’identifier les raisons de la crise que traversent de nombreuses collectivités ainsi que les établissements publics du fait des prêts toxiques en expliquant leur origine, leur mécanisme et le rôle joué par les différents acteurs concernés. Nous examinerons les conséquences de ces prêts et donnerons un aperçu des contentieux juridiques auxquels ils ont donné lieu. Enfin, et c’est le but de cet exposé, nous proposerons quelques pistes de nature à permettre aux collectifs citoyens de poser les premiers jalons d’un audit de leurs collectivités, en particulier celles qui se trouvent en difficulté du fait de prêts toxiques.

par Patrick Saurin

 

21 novembre 2011

Quelques chiffres pour commencer

À la fin de l’année 2010, l’encours de la dette des collectivités territoriales au sens large s’élevait à 163 milliards d’euros, soit environ 10 % du total de la dette publique française estimée à 1 646 milliards d’euros à la fin du 1er trimestre 2011.

L’encours de la dette des établissements publics de santé était de 24 milliards d’euros en 2010, alors qu’il n’était que de 10,1 milliards d’euros 7 ans plus tôt en 2004 |2|.

Quant au logement social, le total de ses dettes financières était estimé à 89,5 milliards d’euros à la fin de l’exercice 2008.
Selon les chiffres de Finance Active, en 2010, le financement du secteur public local était essentiellement assuré par 3 gros prêteurs : Dexia (32 %), BPCE (24 %) et le CRCA (16 %). La Société Générale (10 %) et la CDC (6 %) occupent une place de second plan.

Les données officielles sont loin d’être suffisantes pour nous éclairer puisque dans son rapport de juillet 2011, intitulé La gestion de la dette publique locale, la Cour des Comptes relève qu’ « il n’existe pas dans les statistiques publiques de données disponibles sur la structure de la dette locale. Il est ainsi impossible de savoir, au-delà des montants des encours publiés annuellement par le ministère du budget et l’INSEE, de quels types d’emprunts ces encours sont constitués ou d’en connaître la maturité moyenne ainsi que leur ventilation par type de taux d’intérêt. » |3|

Dans le rapport précité, la Cour estime que « l’encours de la dette locale (collectivités, établissement de coopération intercommunale et divers syndicats) intègre environ 30 à 35 milliards d’euros d’emprunts structurés dont 10 à 12 milliards d’euros présentent un risque potentiellement élevé. » |4| La situation est particulièrement dramatique pour certaines collectivités comme par exemple le Conseil général de Seine Saint-Denis dont la dette, selon un rapport de Michel Klopfer, était composée en septembre 2008 de 97 % de produits structurés avec 31 % des encours situés hors charte au niveau le plus dangereux.

Le 21 septembre 2011, en publiant la liste des collectivités et des établissements hospitaliers victimes des prêts toxiques à partir d’un listing de Dexia, Libération a chiffré à 3,9 milliards d’euros le surcoût à payer pour les collectivités (par exemple 26,5 millions d’euros pour la ville de Nîmes, ce qui correspond à 30,88 % de son encours total de 85,8 millions d’euros) et à 500 millions d’euros le surcoût pour les hôpitaux (par exemple, 26,7 millions d’euros pour 10 établissements du Nord Pas de Calais, 49 millions pour 26 établissements en Ile-de-France et 2,5 millions d’euros pour le CHU de Nîmes). Les associations ne sont pas épargnées car la carte des emprunts toxiques publiée sur le site de Libération mentionne l’Association éducative Arc-en-ciel dans la Gard dont la dette de 4 838 000 euros présenterait un surcoût de 633 000 euros. Observons que dans le même temps, le projet de loi de financement de la sécurité sociale de 2012 prévoit une nouvelle diminution des crédits hospitaliers de 442 millions d’euros qui va contribuer à aggraver cette situation. Cette décision va se traduire par des fermetures d’unités et des suppressions de postes, c’est-à-dire par une dégradation de notre système de santé. Même si les chiffres du listing datent de fin 2009 et nécessitent une actualisation, selon Nicolas Cori, le journaliste de Libération, on peut considérer que l’estimation actuelle du coût du risque supporté par les collectivités reste aujourd’hui proche de la réalité. Les montants du surcoût des intérêts dû aux prêts toxiques avancés par Libération proviennent des calculs faits par Dexia qui a réalisé une simulation actualisant le montant des intérêts en fonction de l’évolution des taux projeté dans le temps et chiffrant le surcoût par rapport aux intérêts calculés au moment de la signature initiale. Ces surcoûts sont des estimations dans la mesure où les montants définitifs ne seront connus qu’au moment où les prêts auront été totalement remboursés. Dexia a dû réaliser ce travail d’estimation pour calculer son propre risque en fonction des produits qu’elle détient. Les autorités imposent aux établissements financiers le calcul quotidien d’une Value at Risk ou « Valeur sous risque » (c’est une notion utilisée pour estimer le risque couru) |5|. Mais Dexia l’a aussi fait parce qu’elle a mis en place un système de couverture auprès d’autres grandes banques. Cette valorisation quotidienne des produits de Dexia en fonction de l’évolution des cours, appelée « mark-to-market » (ou « juste valeur ») s’oppose à la valorisation au coût historique, qui prend en compte le prix d’un actif à la valeur d’achat.

Les prêts toxiques qu’es-aco ?

Jusqu’au début des années 2000, les collectivités et établissements publics souscrivaient pour l’essentiel des prêts à taux fixe ou à taux révisable. Le prêt à taux révisable voyait le montant des échéances évoluer, à la hausse ou à la baisse, en fonction de l’évolution d’un indice. Mais à chaque échéance, l’emprunteur disposait de la possibilité de sortir du taux révisable et de consolider son capital restant dû sur du taux fixe pour la durée résiduelle du prêt. Cette transformation pouvait se faire assez facilement et le fait que beaucoup de ces emprunts étaient souscrits avec des échéances trimestrielles limitaient sensiblement le risque pour l’emprunteur qui souhaitait sortir du taux révisable si la conjoncture se montrait défavorable.

À côté de ces prêts classiques, les collectivités ont eu la possibilité de souscrire des produits dérivés (essentiellement les options, les contrats à terme ou future et les contrats d’échange de taux appelé swap) supposés les garantir et optimiser leurs gains. Ces produits dérivés, commercialisés isolément au début, ont ensuite été directement intégrés dans les offres d’emprunt sous la forme de produits encore plus sophistiqués, appelés « emprunts structurés », grâce auxquels l’emprunteur bénéficie d’un taux d’intérêt minoré pendant les premières années d’amortissement de son emprunt, en contrepartie d’un risque reporté sur les annuités futures. Construits sur des montages complexes et peu lisibles associant dans un même contrat un emprunt bancaire et une clause sous-jacente construite à partir d’un ou plusieurs produits dérivés, ces emprunts présentent un risque important car les taux sont fonctions de l’évolution d’indices que ne maîtrisent pas les collectivités, en particulier ceux relatifs au cours des devises.

Ces prêts structurés offrent au départ des taux alléchants mais la plupart du temps cela ne dure pas, car leur taux sont indexés sur des évolutions de monnaies (le franc suisse, le yen, etc.) soumises à des mouvements spéculatifs incontrôlés et peu prévisibles. Certains dépassent aujourd’hui les 15 %, voire 25 % pour ceux dont le taux est établi sur le cours de change euro/franc suisse). Ce type de montage financier a été établi par les banques pour attirer les clients en mettant en avant des annuités attractives au début, mais en faisant supporter à ces clients la totalité du risque pour les autres annuités, et ainsi les garder captifs car les conditions de sortie sont difficiles du fait d’une indemnité de remboursement anticipé importante. On touche bien du doigt ici que c’est l’emprunteur qui supporte le risque de taux et non la banque. En clair, contrairement aux discours qui leur avaient été tenus par les banques au moment de la souscription de ces contrats, les prêts structurés avec leurs 3,9 milliards d’euros de surcoût représentent à l’heure actuelle un pari perdant pour les collectivités locales et à travers elles les contribuables.

L’intérêt du client semble bien peu préoccuper les banques. Ainsi, la direction des collectivités locales du Groupe des caisses d’épargne justifiait la mise en place du prêt Helvetix II en indiquant dans sa note de communication du 27 novembre 2006 : « l’objectif de ce produit est de « battre » les produits de change euro/franc suisse proposés par les concurrents ». D’abord, prime l’intérêt de la banque dans une concurrence qui se traduit par une fuite en avant dans le risque et la complexité. L’intérêt de la collectivité, on a bien du mal à le percevoir.

Nous utilisons ici l’appellation « prêt toxique » par commodité de langage, mais dans la mesure où elle met l’accent sur l’effet et non sur la cause, il est justifié de lui substituer une autre expression telle que « prêt extorquant » ou « prêt léonin ». Cela permet de souligner que le créancier exige de son débiteur le remboursement d’une dette illégitime.

Banques, élus, Etat, organes de contrôle : qui est responsable ?

Si l’on se garde de toute naïveté et de tout manichéisme, on doit reconnaître que les responsabilités sont partagées entre ces différents acteurs. Par ailleurs, chaque cas étant un cas d’espèce il importe à l’occasion de l’analyse d’une collectivité, d’un hôpital ou d’une autre structure en particulier d’évaluer les parts respectives de responsabilité à l’origine des difficultés financières de la structure considérée.

Un premier élément tient à la diminution des recettes des collectivités et des établissements eu égard à des missions toujours plus étendues et toujours plus coûteuses. Pour les collectivités locales, le transfert des recettes n’a pas suivi le transfert de compétences opéré par l’Etat lors du processus de décentralisation. D’où souvent la nécessité de recourir à l’emprunt de façon plus importante dans le financement des investissements.

L’Etat est aussi responsable de ne pas avoir réglementé le mode de financement des collectivités et des établissements publics et de n’avoir pas su adapter son rôle de contrôle à une nouvelle réalité qu’il ne pouvait que constater. Ce n’est que le surgissement de certaines situations aussi scandaleuses que dramatiques qui l’ont amené à intervenir, mais tardivement et superficiellement.

Les instances de contrôle de l’Etat (Préfets et Cour des comptes) sont également responsables à nos yeux du fait de leur manque de réaction, car il y a eu des alertes, des mises en garde qui n’ont hélas pas été suivies d’effets. Pourtant la Cour des comptes n’ignorait pas la réalité de la situation. Dans son rapport public particulier de novembre 1991, elle relevait que les collectivités avaient assez généralement entrepris de « diversifier leur encours de dette soit à l’occasion d’opérations de renégociation soit en concluant de nouveaux emprunts utilisant des formules parfois complexes », et elle ajoutait : « cette orientation ne semble pas avoir toujours été bien maîtrisée » |6|. Elle relevait déjà que « pour le recours aux emprunts en devises, les défaillances techniques s’ajoutent aux déconvenues liées au risque de change » |7|. Enfin, elle s’interrogeait sur le recours à des intermédiaires financiers plus soucieux de leurs commissions que de conseil |8|.

D’autres mises en garde sont venues ensuite rappeler les risques inhérents au manque d’encadrement des collectivités locales en matière d’emprunt. Ainsi, le rapport du 16 juillet 2008 de FitchRatings, intitulé La dette structurée des collectivités locales : gestion active ou spéculation ?, était on ne peut plus clair sur ses constats et ses préconisations. Les analystes faisaient le constat que « les produits structurés… s’avèrent extrêmement risqués pour leurs souscripteurs » |9| en relevant ce scandale : « Les prêteurs ont donc réussi à imposer une situation paradoxale où, au lieu d’être rémunérés pour prendre un risque (de crédit) supplémentaire, ils l’ont été pour faire prendre un risque (de taux) à leurs clients. » |10| Les analystes ont également pointé que les produits structurés étaient en contradiction avec deux des principes fondamentaux de la comptabilité publique : le principe de prudence et le principe de la spécialisation des exercices |11|. Quand il a été entendu en 2011 par la Cour des comptes, le président de FitchRatings a rappelé à celle-ci la mise en garde formulée par son agence en 2008 et lui a suggéré d’annexer à son rapport de juillet 2011 celui de son agence du 16 juillet 2008. La Cour n’a pas jugé utile de le faire, ce que nous interprétons comme le signe d’une volonté de passer sous silence les responsabilités qui sont les siennes pour ne pas avoir formulé en temps utile des propositions radicales visant à interdire certains produits et encadrer de façon draconienne le fonctionnement d’autres.

Les élus, du moins certains d’entre eux portent une part de responsabilité pour avoir succombé au miroir aux alouettes des prêts toxiques. Payer moins d’intérêts les 3 premières années du prêt leur permettait de limiter les charges financières au cours du mandat et faciliter leur réélection, ou en cas de problème reporter sur le successeur l’augmentation des charges. On ne peut qu’être stupéfait face à la crédulité, la légèreté pour ne pas dire l’incompétence de certains responsables qui ont fait souscrire à leur collectivité ou établissement des emprunts particulièrement risqués. Mais DEXIA n’hésitait pas à employer les grands moyens pour emporter leur décision, par exemple en organisant quelques voyages d’agrément ou séminaires sur la nouvelle comptabilité M14 au cours desquels la table d’hôte primait sur les tables de la comptabilité.

En conclusion, même si chacun des acteurs a sa part de responsabilité dans cette affaire, on peut s’accorder sur le fait que les banques sont les principales fautives. En effet, ce sont elles qui ont construit les produits toxiques dans le but principal de garder captives des collectivités et des établissements publics en leur laissant supporter entièrement un risque que ces emprunteurs étaient incapables d’appréhender et de maîtriser. Qui plus est, lors de la commercialisation de ces prêts elles n’ont pas souvent joué leur rôle de conseil.

Mais que fait le législateur ?

Nous avons vu que dès 1991, la Cour des comptes signalait dans ses rapports un certain nombre de risques et de dysfonctionnements.

Selon la circulaire du 15 septembre 1992 relative aux contrats de couverture de taux d’intérêt offerts aux collectivités et aux établissements publics locaux, le contrôle de légalité doit permettre de s’assurer que les actes pris concourent à l’intérêt général. L’engagement des finances des collectivités locales dans des opérations de nature spéculative, par définition contraires à l’intérêt général, ne relève donc pas des compétences qui leur sont reconnues par la loi. Les actes ayant un tel objet doivent être déférés par le représentant de l’Etat au juge administratif, sur la base notamment de l’incompétence et du détournement de pouvoir.

Compte tenu des risques supplémentaires ainsi pris, les produits dérivés ne sont alors plus souscrits par la collectivité à des fins seulement de couverture mais plutôt d’optimisation financière et peuvent alors, dans certains cas, être considérés comme des produits spéculatifs.

Destinée à consigner les meilleures pratiques des banques et des collectivités territoriales en vue d’assurer un financement adapté, une « charte de bonne conduite entre les établissements bancaires et les collectivités locales » (dite charte Gissler) a été signée le 7 décembre 2009. Elle prévoit 6 engagements, notamment le fait pour les banques de renoncer à proposer aux collectivités des produits exposant à des risques sur le capital et des produits reposant sur certains indices à risques élevés, ou l’obligation de présenter leurs produits selon une classification normalisée faisant ressortir leur degré de complexité et leur niveau de risque. De leur côté, les collectivités s’engagent à faire un effort de transparence et d’information sur leur politique de recours à l’emprunt.

La diffusion de cette charte a été suivie de la publication d’une circulaire du 25 juin 2010 (reprise dans une instruction du 3 août 2010) qui fait le point sur les différentes règles applicables à l’emprunt et aux produits de couverture et attire l’attention sur les risques relatifs à la gestion active de la dette.

Les recours juridiques

La réglementation n’ayant pas prémuni à temps les collectivités crédules ou irresponsables contre les risques des prêts structurés, les élus dont les collectivités ont été gravement affectées (infectées) par les prêts toxiques n’ont eu d’autre voie que le recours en justice.

Comme toute victime d’actes délictueux, une commune peut intenter une action civile en indemnité devant les juridictions judiciaires, en vue de la réparation de dommages qu’elle a subis. Cette action s’inscrit dans le cadre de l’article L.2122-21 8° du code général des collectivités territoriales qui édicte que le maire est chargé « de représenter la commune soit en demandant, soit en défendant ».

A ce jour, on observe une multiplication des actions en justice par des collectivités qui agissent à la fois au pénal et au civil. Ces actions sont autorisées par l’article L. 2122-22-16° du code général des collectivités territoriales qui dispose que le maire peut par délégation du conseil municipal être chargé « d’intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal ».

Il faut préciser que la justice n’a pas donné raison au plaignant dans plusieurs cas.

Ainsi, dans le cadre d’une opération de renégociation, la commune de Servian (dans l’Hérault) a été déboutée début juin 2011 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Nanterre de sa plainte contre Dexia auprès de laquelle elle sollicitait l’autorisation de procéder au remboursement anticipé du capital restant dû de six prêts « classiques » (c’est-à-dire « non-toxiques »). Le juge a considéré que Servian, en sa qualité de commune, "ne peut être considérée comme un consommateur", et donc n’avait pas la possibilité de procéder à tout moment au remboursement de ses prêts.

La commune de Rosny-sur-Seine dans les Yvelines, a déposé une plainte avec constitution de partie civile contre Dexia Crédit local devant le tribunal de grande instance de Versailles. La plainte de la mairie de Rosny-sur-Seine vise des faits d’"escroquerie en bande organisée" et "tromperie". Une précédente plainte avait été déposée en 2010 par la commune, qui avait donné lieu à l’ouverture d’une enquête préliminaire. Pourtant Dexia avance que cette commune n’a aucun encours structuré chez elle et précise que les crédits contractés auprès d’elle sont tous à taux fixe et ces taux sont bas (selon Latribune.fr, ces taux fixes seraient de 3,9%). Sur le listing de Dexia publié sur le site de Libération |12|, cette commune ne figure pas dans la liste des collectivités impactées par des emprunts toxiques. Le juge n’a pas rendu sa décision à ce jour.

En février 2011, asphyxié par les prêts toxiques (représentant 97 % de son encours dont 31 % avec le risque le plus élevé), le Conseil général de Seine-Saint-Denis a assigné trois banques (l’irlando-allemande Depfa, Dexia ainsi que Calyon, la banque d’affaires du Crédit agricole). Le Conseil général fonde son recours juridique sur deux motifs en faisant observer que deux principes président à la conclusion de tout contrat :
1- les personnes qui le concluent doivent avoir la compétence pour le faire ;
2- le consentement des personnes ne doit pas reposer sur une erreur sur la nature ou l’objet du contrat.

Pour le Conseil général, ces deux principes n’ont pas été respectés au moment de la signature des contrats portant sur les emprunts structurés. Il considère que ces principes ont été bafoués et estime fondée son assignation en justice en vue d’obtenir l’annulation des contrats relatifs aux emprunts toxiques.

Le premier argument met en avant la capacité du département à signer de tels contrats. En effet, les collectivités locales ne peuvent spéculer, comme l’indique la circulaire du 15 septembre 1992 selon laquelle « les collectivités locales ne peuvent légalement agir que pour des motifs d’intérêt général, ce qui exclut la finalité purement spéculative ». Or, dans les prêts structurés, le taux variable est indexé sur des données clairement spéculatives, car il conduit une collectivité française à jouer sa dette au gré des fluctuations des taux de change, extrêmement volatiles, surtout en période de crise économique. Les contrats sont donc nuls sur le fondement de l’article 1108 du code civil qui impose la capacité du contractant à signer le contrat.

Le second argument invoque le défaut de conseil de la part de l’emprunteur car les collectivités n’avaient pas toute l’information requise pour signer ces contrats. Les banques se sont bien gardées de détailler les risques encourus. Pire, elles ont volontairement donné des informations exagérément optimistes, voire erronées, en garantissant une quasi-absence de risque. Elles n’ont pas répondu à leur obligation d’information et encore moins de mise en garde dans le domaine des opérations spéculatives. Elles savaient que les collectivités n’étaient pas équipées pour apprécier les risques encourus. Le propos de Claude Bartolone, le président du Conseil général de Seine Saint-Denis, ne donne lieu à aucune ambigüité : « Ce sont carrément des traders que nous aurions dû avoir dans nos directions financières, pour comprendre et suivre l’évolution des emprunts toxiques ».

En l’absence d’information claire et détaillée sur le contenu des contrats portant sur des emprunts toxiques, on peut considérer que le consentement des collectivités n’a pas été valablement donné. En conséquence, les contrats de prêts doivent être considérés comme nuls.

Le département invoque ici les articles 1108, 1109 et 1116 du code civil.

Article 1108 : Quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention :
- le consentement de la partie qui s’oblige ;
- sa capacité de contracter ;
- un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;
- une cause licite dans l’obligation.

Article 1109 : Il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

Article 1116 : Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.
Il ne se présume pas et doit être prouvé.

Dans leur bras de fer contre les banques, certains emprunteurs ont gagné. Ainsi, dans un jugement de mars 2008 relatif à une affaire où la Société Patrimoine SA – languedocienne d’HLM avait résilié un swap (un échange de taux), le Tribunal de Commerce de Toulouse a relevé un défaut d’information pour condamner la caisse d’épargne de Midi-Pyrénées et ordonner l’annulation de deux contrats (portant sur des swaps ou « échanges de taux »), jugeant que l’écureuil n’avait pas cru bon de préciser que ses emprunts étaient « spéculatifs ». La banque a été condamnée à payer la somme de 600 000 euros en attendant qu’une expertise évalue le dommage complet causé par ces fameux « swaps ». La Caisse d’épargne qui avait fait appel de cette décision a préféré finalement s’arranger à l’amiable pour éviter un nouveau procès. Un litige du même type est intervenu entre la même Caisse d’épargne et l’Office Public d’Habitat des Hautes Pyrénées et a été dénoué de la même façon.

Il est intéressant de relever que les collectivités n’ont invoqué jusqu’à ce jour que des arguments reposant sur le fait qu’il n’est pas de la compétence des collectivités de spéculer et sur le fait que le consentement n’a pas été valablement exprimé. Il nous semble judicieux d’ajouter un 3ème argument, celui de la dette illégitime qui pourrait être porté par les collectifs citoyens. La dette illégitime des collectivités, à l’instar de celle de l’Etat, trouve son origine dans des cadeaux fiscaux octroyés aux hauts revenus et à une évasion fiscale relativement tolérée, autant de pertes de ressources qui ont pour conséquence un recours à l’emprunt excessif avec souvent des conditions exorbitantesSur la question des dettes illégitimes, se reporter aux ouvrages suivants : Attac, Le piège de la dette publique. Comment s’en sortir, Paris, Les liens qui libèrent, 2011 ; François Chesnais, Les dettes illégitimes. Quand les banques font main basse sur les politiques publiques, Raison d’agir, 2011 ; Damien Millet et Éric Toussaint éds., La dette ou la vie, Aden, 2011.. Or la circulaire du 15 septembre 1992 est venue rappeler que « les collectivités locale ne peuvent légalement agir que pour des motifs d’intérêt général présentant un caractère local. »

Pour partager leurs expériences et favoriser leur action, les élus ont créé un certain nombre de structures spécialement dédiées à cette question des prêts toxiques.

Créée le 8 mars 2011, l’association « Acteur public contre les emprunts toxiques », présidée par Claude Bartolone, rassemble une dizaine de collectivités. Sur son site, elle met à disposition un certain nombre d’informations et de documents.

Le 8 juin 2011, à l’Assemblée nationale, a été créée une Commission d’enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux. Cette commission a publié un certain nombre de rapport que l’on peut consulter sur le site de l’Assemblée nationale. Claude Bartolone en est le président. Cette commission entend régulièrement les élus et représentants des banques et il est édifiant de lire ses comptes rendus.

Le mercredi 21 septembre 2011, Monsieur Maurice Vincent (Maire de Saint-Etienne) expliquait que sa collectivité avait fait un recours contre un emprunt de la Deutsche Bank en invoquant le défaut de conseil de la banque et le dol.

Le même jour, Monsieur Jacques Leroy, premier adjoint au maire de Saint-Maur-des-Fossés, chargé des finances avouait : « Ces emprunts ont permis de bénéficier d’une manne financière sans avoir à augmenter les impôts. C’était une véritable drogue. »

Monsieur Jean-Louis Gagnaire (membre de la commission, député de la Loire) faisait le constat suivant : « Nous n’avons pas une vision globale de toutes les collectivités ou établissements publics qui ont été contaminés, mais leur point commun me semble être leur vulnérabilité, quelle qu’en soit la cause. »

Le 5 octobre 2011, M. Christophe Faverjon, maire d’Unieux (Loire), rapportait qu’un ancien salarié de Dexia lui avait révélé, sous couvert de l’anonymat, que la banque avait donné instruction de proposer aux collectivités de renégocier les emprunts, le but étant de rendre la clientèle captive au moyen d’un allongement des durées d’amortissement, tout en minimisant les risques et en insistant sur le bénéfice double de la période bonifiée et des marges de manœuvre que l’opération procurait.

Enfin, le 2 novembre dernier, entendu par la commission, Olivier Klein, membre du directoire de BPCE, a tenté de justifier la commercialisation de prêts structurés par sa banque en invoquant l’effet de la concurrence et le souci de ne pas perdre des parts de marché.

Auditer la dette de sa collectivité

Un audit se mène à partir des 3 documents principaux qui consignent les informations essentielles :
- les comptes administratifs qui retracent les comptes des exercices écoulés ;
- le budget primitif qui est la prévision des dépenses et recettes prévues sur l’exercice à venir |13| ;
- enfin, l’état de la dette qui est un document capital car il présente dans le détail l’ensemble des emprunts souscrits par la collectivité. Les collectivités sont également tenues de présenter conformément à la charte Gissler un état de leurs prêts classés selon leur niveau de risque.

Dans l’état de la dette, nous avons le détail des prêts, leur nature (fixe, révisable, structuré ou dérivé) avec leur montant initial, celui de l’échéance, le capital restant dû et le taux. La nature du prêt et le taux vont être des indicateurs précieux pour savoir si la collectivité ou l’établissement est victime d’un prêt toxique.

La durée des emprunts est également un indicateur de la qualité de la gestion. La durée des emprunts doit être adossée à l’amortissement des investissements financés.

Un autre élément dans ce document doit attirer notre attention : les renégociations. Cela vaut à la fois pour les collectivités et les hôpitaux. Derrière ce qui apparaît au premier abord comme un acte technique consistant à réaménager un ou plusieurs prêts sur une nouvelle durée et selon de nouvelles conditions de taux, parfois plus favorables au premier abord, se dissimule souvent le deuxième effet du produit toxique. Le premier effet du prêt toxique se traduit par une asphyxie financière de l’emprunteur qui ne dispose plus de ressources suffisantes pour faire face aux intérêts de prêts qui augmentent brutalement du fait de l’application des index. Le prêteur arrive alors avec la solution : le réaménagement des emprunts ou, dans le langage branché des banquiers la G2D, la gestion de dette. La recette est simple : l’emprunteur rééchelonne sur une durée plus longue le remboursement du capital restant dû. La charge d’intérêts annuelle baisse, les élus sont contents… mais pour les administrés cela va générer une augmentation de la charge des impôts locaux puisque, au final, le rallongement de la durée des prêts va se traduire par un surcoût au niveau des intérêts. Pour la collectivité, cela provoquera une dégradation de ses marges de manœuvre et un recours à l’emprunt moins facile à l’avenir, puisqu’à la charge de remboursement des nouveaux emprunts va s’ajouter la charge des emprunts dont la durée aura été rallongée. Car prêts toxiques et réaménagement fonctionnent sur ce même principe de procrastination financière : repousser dans le futur ce qui pose problème aujourd’hui ou dit autrement garder le pire pour la fin…

On peut citer à ce propos l’exemple de la commune de Saint-Maur-des-Fossés qui a accepté au cours de divers réaménagements de sa dette d’en rallonger la durée résiduelle de 16,2 ans à 24,4 ans entre 2002 et 2008 |14|. Comme le relève Nicolas Cori, le journaliste de Libération, « l’orientation prise en termes d’allongement de la durée de la dette a constitué le terreau du développement des produits structurés ».

Afin d’étudier les documents que nous avons mentionnés, il importe que les collectifs se rapprochent des élus ainsi que des responsables des services financiers des collectivités pour avec eux :

- examiner l’état de la dette et voir si elle comporte des prêts toxiques ou des opérations de gestion de dette susceptibles d’avoir réaménagé un ou plusieurs prêts toxiques ;

- si la collectivité a souscrit des prêts toxiques, voir si elle a engagé des démarches amiables auprès de la banque prêteuse pour obtenir une remise du surcoût et un réaménagement de son emprunt à des conditions correctes ou si elle a envisagé d’engager une action en justice. Si ce n’est pas le cas, les collectifs pourraient envisager d’étudier avec les élus les différentes démarches amiables ou judiciaires susceptibles d’être engagées.

Il est préférable que ce soit les élus qui engagent l’action mais, si ses élus s’y refusent, les administrés ont la possibilité d’agir car la loi du 5 avril 1884 (codifiée à l’article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales), reconnaît, sous certaines conditions, à tout contribuable inscrit au rôle d’une des contributions directes de la commune, un droit de substitution pour exercer une action en justice qu’il croit appartenir à une commune qui, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d’exercer. Mais il est précisé que cette action qui peut être intentée en demande ou en défense, l’est toujours aux frais et risques du contribuable. En outre, elle doit être également autorisée par le tribunal administratif qui vérifie, en application d’une jurisprudence constante, la satisfaction simultanée de deux conditions : l’action doit présenter des chances sérieuses de succès et l’action doit offrir un intérêt pour la commune.

À l’occasion de ces démarches et actions destinées à faire pression sur les établissements financiers, les collectifs ont un rôle essentiel à jouer pour porter à la connaissance de la population les pratiques des banques et leurs conséquences sur la population (se traduisant notamment par la hausse des impôts locaux et/ou la dégradation des services municipaux). Les banques ont horreur d’être montrées du doigt et seront ainsi incitées à consentir des efforts à l’occasion de renégociations amiables… qu’il conviendra toutefois de suivre de près.

Par ailleurs, aussi bien pour les collectivités territoriales que pour les établissements publics hospitaliers, les collectifs peuvent se rapprocher des Chambres régionales des comptes qui assurent tout à la fois un contrôle juridictionnel, budgétaire et l’examen de la gestion des collectivités et des hôpitaux publics.

Pour ce qui est des hôpitaux (il y en a environ un millier en France), il appartient aux représentants des salariés siégeant dans les comités techniques d’établissement et les comités d’entreprise de demander un état complet et détaillé de la situation de leur établissement en matière d’emprunt et de partenariat public-privé si de telles opérations ont été mises en place, le cas échéant en sollicitant le concours de cabinets d’expertise. Ils pourront également s’adresser, en plus du directeur de leur hôpital et de ses services financiers, à l’agence régionale de santé dont relève leur établissement (en saisissant à la fois son directeur général, son conseil de surveillance et ses services financiers et son agence comptable).

En ce qui concerne les organismes d’HLM (qui gèrent 4,5 millions de logements), la quasi-totalité de leurs 90 milliards d’euros d’encours (environ 90 %) sont souscrits auprès de la Caisse des dépôts (CDC). Une dizaine d’offices publics et une dizaine d’entreprises Sociales pour l’habitat (ESH, ex-sociétés anonymes d’HLM) ont eut recours à des produits financiers, devenus "toxiques" car basés sur des taux variables ou des indices "exotiques". Ils représentent environ 20 % à 30 % de leurs dettes. Le montant total des sommes en jeu n’est pas connu. La renégociation avec les banques - notamment Dexia et les Caisses d’Epargne qui avaient proposé ces produits financiers complexes ont débuté et nous avons cité précédemment le cas de 2 organismes qui ont gagné un procès en première instance contre une Caisse d’épargne et Natixis pour "mauvais conseil".
Voilà quelques pistes pour lancer un audit citoyen. Il appartient désormais aux collectifs locaux pour un audit citoyen de la dette publique de venir jouer leur rôle citoyen, plus que jamais nécessaire dans la période actuelle.

En guise de conclusion provisoire

La crise des dettes publiques n’est pas un phénomène surgi spontanément, cette crise trouve son origine dans une suite de choix politiques partagés et décidés par les gouvernements libéraux et socio-libéraux qui se sont succédé au pouvoir. Ainsi, en 1973, quand il a été interdit à la Banque de France de prêter à l’État, celui-ci a dû se financer sur les marchés et se soumettre par la même à la loi de ces derniers et de leurs agences de notation. De même, quand ils ont construit « leur » Europe, ces mêmes politiciens se sont empressés d’interdire à la Banque Centrale Européenne (BCE) de prêter directement aux États. La crise actuelle nous permet de prendre la mesure des conséquences désastreuses de tels choix.

L’action des collectifs pour l’audit des dettes publiques trouve dans cette situation toute sa pertinence et sa nécessité. Tout d’abord, cet audit va permettre de lever le voile sur la réalité des financements publics et en particulier sur les dettes illégitimes qui doivent être annulées. Ensuite, l’audit sera l’occasion de poser des questions plus que jamais d’actualité telle que le partage des richesses, la justice fiscale et la question de la socialisation des banques. Il réactualisera également des pratiques citoyennes un peu oubliées, telles que la participation et le contrôle citoyens. Enfin, en élargissant notre réflexion au-delà de la seule question des dettes publiques, l’audit doit nous inviter à réfléchir à un nouveau projet de société plus solidaire et démocratique qui soit une vraie réponse à la crise financière, économique, sociale, politique et surtout écologique.

notes articles:

|1| Je remercie Éric Toussaint, Président du CADTM (Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers Monde) Belgique d’avoir pris le soin de relire ce texte et d’avoir contribué à l’améliorer par ses suggestions et ses remarques pertinentes.

|2| Rapport de juillet 2011 de la Cour des Comptes, p. 11.

|3| Idem.

|4| Ibid., p. 65.

|5| Elle représente la perte potentielle maximale d’un investisseur sur la valeur d’un actif ou d’un portefeuille d’actifs financiers compte tenu d’un horizon de détention et d’un intervalle de confiance. Elle se calcule à partir d’un échantillon de données historiques ou se déduit des lois statistiques habituelles. (source : Vernimmen.net)

|6| Rapport public particulier de la Cour des comptes, novembre 1991, p. 58.

|7| Ibid., p. 60.

|8| Ibid., p. 61.

|9| FitchRatings, La dette structurée des collectivités locales : gestion active ou spéculation ?, p. 1.

|10| Ibid., p. 2.

|11| Ibid., p. 6. Cela signifie que ces prêts comportent un risque incontestable car leur taux n’est garanti que sur la période initiale, très courte, et que la réduction des intérêts obtenus au cours de cette période est reportée sur les années suivantes.

|12| http://labs.liberation.fr/maps/carte-emprunts-toxiques/

|13| Tant les comptes administratifs que les budgets primitifs ventilent les recettes et les dépenses entre d’un côté le fonctionnement (dans le poste dépenses nous retrouverons notamment les intérêts à payer au titre de la dette) et de l’autre l’investissement (ici, dans le poste dépenses nous retrouverons le capital à rembourser au titre de la dette et dans le poste recettes le montant des emprunts reçus dans l’exercice pour financer les investissements). La loi précise que le remboursement du capital de l’annuité doit être réalisé à partir de l’autofinancement de la collectivité (son épargne brute provenant de sa section de fonctionnement).

|14| Pour information, la Cour des comptes indiquait dans son rapport de juillet 2011 que les communes s’endettaient plutôt à long terme en 2010, en moyenne sur 17,7 années (p. 18).

 

infos article
URL: http://www.cadtm.org/

 

Patrick Saurin est membre de l’exécutif national de Sud Banques Populaires Caisses d’Epargne et du Collectif pour un audit citoyen de la dette publique.

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12 décembre 2011 1 12 /12 /décembre /2011 13:57

Marianne - La Plume d'Aliocha - Blogueuse associée | Lundi 12 Décembre 2011 à 05:01

 

Les agences de notation nous fouettent tous les matins, les spécialistes courbent l’échine et obéissent, emmenant avec eux les politiques qui ne sont pas dupes mais cèdent par nécessité. Finalement, si on ne remboursait pas, que se passerait-il ? La blogueuse Aliocha se demande si les économistes eux-même y comprennent quelques chose !



(Standard & Poor's à New-York - wikimedia - cc)
(Standard & Poor's à New-York - wikimedia - cc)
Décidément, on n’en finit plus de se trainer aux pieds des agences de notation ! Voici qu’elles ont décidé de tout dégrader. Voyez-vous cela ! Et les économistes affichant des mines embarrassées de me confier en off, que bon, hein, on ne pouvait pas vivre au-dessus de nos moyens ad vitam aeternam non plus, qu’on peut bien contester à juste titre le poids des agences de notation sur nos Etats et même nos vies, elles n’ont quand même pas tort de nous obliger à regarder la réalité en face. Hélas, trois fois hélas, si, elles ont tort. Et je vais vous dire pourquoi. Parce que comme tout le monde dans la finance, elles font semblant de maîtriser des outils techniques et donc objectifs. Fumisterie. Superbe mensonge à double levier. Un, elle ne maitrisent rien, sinon elles n’auraient pas encensé Enron jusqu’à la faillite du courtier américain en énergie il y a dix ans. Deux, je ne connais rien de plus contestable que les chiffres, sauf peut-être les prévisions économiques. Comme le fait dire Audiard à Gabin dans Le Président :

« Le langage des chiffres à ceci de commun avec celui des fleurs, on leur fait dire ce qu’on veut. Les chiffres parlent mais ne crient jamais. Permettez-moi de préférer le langage des hommes, je le comprends mieux ».

Vous ne me croyez pas ? Alors prenons un exemple tiré de l’actualité brûlante. Vous avez vu la vidéo du Sofitel diffusée par BFM TV sur DSK ? Vous avez lu les commentaires des uns et des autres ? Vous vous sentez plus avancé ? Bien sûr que non. Pourtant, l’affaire est simple, accessible à tout le monde. Il n’est pas question ici de dette souveraine, moins encore de spread, mais de fellation. Tout le monde sait ce qu’est une fellation, pas d’angoisse technique particulière sur le sujet. A toutes fins, je traduis tout de même le terme technique, nous parlons d’une pipe. En plus, nous avons désormais une vidéo, donc une information a priori objective. Comme si on y était. Sauf que chacun y va ensuite de son avis sur les éléments factuels, sur le viol, avec arme ou pas, sur la procédure judiciaire américaine, sur l’appréciation d’un comportement sexuel libertin ou pathologique. Là-dessus, les défenses des amis de DSK brouillent tout et les avocats achèvent de nous faire douter, mais il est vrai que c’est leur rôle.

Alors transposez cela maintenant à la finance. Et imaginez qu’au lieu de parler de ce que tout le monde comprend, on se penche sur des produits et des systèmes concoctés par des matheux, imbriqués les uns dans les autres, déments de complexité, vertigineux d’enjeux. Oubliez que le sujet vous dépasse mais que c’est normal puisque ce n’est pas votre métier et envisagez une seconde de déraison l’inimaginable : et si les experts ne comprenaient pas mieux que vous ? Et si leurs avis n’étaient au fond que de simples avis, forgés par leurs études, mais aussi leurs convictions, leur volonté de dire ce qu’ils savent en dissimulant ce qu’ils ignorent, leur intention de se faire remarquer, de s’inscrire sans le dire en contradiction avec un rival, de faire les malins, de livrer une phrase choc aux journalistes pour leur plaire et faire tous les plateaux télé. La vérité, l’effroyable vérité, c’est celle-là : les experts ne comprennent rien à la crise. Selon les cas, il cautionnent une idéologie qui les nourrit ou, à l’inverse, critiquent un système qui les a rejetés. Certains même s’accommodent de leur ignorance en pensant que d’autres savent.

J’exagère, songerez-vous. Hélas… ce billet est né d’un déjeuner tout à fait anodin auquel j’ai participé avant-hier. J’y rencontrais des comptables libéraux, rien que des comptables. Mais des chics quand même, la crème de la crème, ceux qui auditent les sociétés cotées et donc qui pataugent malgré eux dans les dédales incompréhensibles de la finance. Quand l’un d’entre eux m’a balancé comme ça, tout à trac : les normes comptables internationales, je n’y comprends rien ! Son confrère a blêmi. Et durant tout le déjeuner il a répété comme un mantra : je n’y comprends rien. Pour information, les normes comptables internationales, ce sont celles qui sont utilisées depuis 2005 par toutes les sociétés cotées européennes et donc notamment par notre ami le CAC 40. Et, accessoirement, ce sont elles qu’on a accusé d’avoir eu un effet procyclique lors de la crise de 2008, c’est-à-dire aggravateur de la crise. « En fait, a tenté de corriger son confrère qui se souvenait que j’étais journaliste et tentait de sauver l’honneur, les produits financiers sont devenus incompréhensibles, il est normal que les normes comptables elles-mêmes se complexifient ». Nous y sommes. Donc, la finance devenue dingue, contamine tout le reste. Et plutôt que de hurler, les comptables encaissent sans broncher l’idée que sur 26 000 professionnels, à peine 20 savent de quoi on parle quand on évoque leur nouvel outil de travail. Ils acceptent de ne pas comprendre. Ils trouvent cela désagréable mais inéluctable. Et ils comptent sur les copains. Tous. Sauf que les copains ne comprennent rien non plus, mais ils se taisent. En clair, cela signifie que les comptes des sociétés du CAC 40 ne sont peut-être pas forcément fiables. Il y a un moment où il faut appeler un chat un chat.

Voilà où nous en sommes arrivés. Plus personne ne comprend rien, mais tout le monde ou presque fait semblant que si, juste pour donner le change. Parce qu’on n’a pas le choix, il faut bien manger. Je demandais il y a quelques jours à un haut fonctionnaire de Bercy pourquoi il était à peu près le seul à tirer la sonnette d’alarme, à essayer d’endiguer cette folie. « Parce que les gens cautionnent le système qui les nourrit », m’a-t-il simplement répondu.

Hier matin, j’étais à une séance de sanction du gendarme boursier (AMF), avec une poignée de confrères spécialisés de La Tribune et des Echos. L’AMF devait juger une obscure violation des règles de marché par quelques grandes banques de la place en 2008, lors de l’augmentation de capital de Natixis. Une affaire qui avait quand même failli faire capoter l’opération et mettre le système financier déjà fragilisé par la faillite de Lehman Brothers dans une belle panade. Dans cette pièce où se tenait une cinquantaine de gens importants en costards sombres, j’ai vite compris qu’il n’y en avait tout au plus qu’une dizaine qui comprenaient. Et encore, ils comprenaient la technique, mais aucun n’avait la capacité intellectuelle, ni surtout l’envie, de mettre tout cela en perspective et moins encore d’en tirer une quelconque conclusion. A midi, j’ai appelé un ami, une figure de la place financière de Paris et je lui ai demandé ce qu’il pensait de tout cela. « Personne ne comprend rien, m’a-t-il avoué, mais on n’ose pas le dire ». Vertige…

Alors voyez-vous, j’ai une proposition toute simple pour se sortir de là : avouer qu’on ne comprend plus rien, reconnaître qu’on ne maîtrise plus rien. Ni les experts, ni les politiques, ni les juges, et encore moins les agences de notation. Quant aux journalistes spécialisés comme moi, ils en savent tout juste assez pour prendre la mesure de leur ignorance, qui est abyssale. Sauf que nous n’avons aucun système à cautionner. Il n’y a donc plus que nous qui puissions dire : stop ! A partir de là, et à partir de là seulement, on pourra commencer à essayer de s’en sortir. Non pas en faisant appel aux experts, ils sont largués. Tous ces docteurs Frankenstein refusent d’admettre que leur créature monstrueuse leur a échappé depuis longtemps. Mais en se tournant vers des gens comme Emmanuel Todd qui a été l’un des premiers à poser une bonne question : et si on ne remboursait pas, que se passerait-il ? Les agences de notations nous fouettent tous les matins, les spécialistes courbent l’échine et obéissent, emmenant avec eux les politiques qui ne sont pas dupes mais cèdent par nécessité. En réalité, nous n’avons pas besoin d’expertise financière ici, mais de simple raison. Car c’est précisément ce qui nous fait le plus défaut.
Sur ce sujet là, je nous classe D, autrement dit : situation de faillite.

 

On peut faire dire n'importe quoi aux chiffres
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11 décembre 2011 7 11 /12 /décembre /2011 16:59
Libération - Économie Aujourd'hui à 9h17
Un brûleur à gaz. (© AFP Philippe Huguen)

 

Le ministre de l'Economie François Baroin a confirmé samedi soir une augmentation du prix du gaz comprise "entre 4 et 5%" au 1er janvier, dans le journal de 20 heures de France 2.

"Comme le Premier ministre l'a dit", la hausse sera "en dessous de 5%, nous travaillons sur cette base-là", a-t-il déclaré avant de préciser qu'elle serait "entre 4 et 5%".

Le gouvernement, a-t-il poursuivi, entend "protéger le pouvoir d'achat" des Français avec une hausse pas "trop importante même si elle est inéluctable", compte tenu du renchérissement des matières premières.

La majoration à venir fait suite à l'invalidation fin novembre par le Conseil d'Etat du gel des tarifs du gaz naturel pour les particuliers, décidée en octobre par Bercy.

Le gouvernement s'est fait recaler par le Conseil pour n'avoir pas tenu compte d'une règle de calcul officielle, qui aurait dû conduire à une augmentation de 8,8% à 10% des tarifs pour les particuliers, afin de refléter l'évolution des coûts d'approvisionnement de GDF Suez. Une nouvelle formule de calcul devrait cependant amortir le choc de la hausse des cours du gaz.

(AFP)

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11 décembre 2011 7 11 /12 /décembre /2011 16:47
Marianne - Laurent Pinsolle - Blogueur associé | Dimanche 11 Décembre 2011 à 16:01

Le blogueur Laurent Pinsolle, proche de Nicolas Dupont-Aignan, revient sur le fameux terme (avec la rigueur) qu'il ne faut surtout pas prononcer. L'austérité, utilisée comme arme anti-socialiste par l'UMP, n'était-elle pas aussi le moyen de rattraper les bourdes - ou l'inaction - de Nicolas Sarkozy depuis le début de son mandat ?



(Nicolas Sarkozy - wikimedia - cc)
(Nicolas Sarkozy - wikimedia - cc)
Après y avoir renoncé piteusement à la rentrée, Nicolas Sarkozy essaie par tous les moyens d’utiliser l’austérité comme une arme politique contre le PS, [comme le rapporte Emmanuel Lévy]url:../../Le-piege-sarkozyste-de-la-regle-d-or-en-passe-de-se-refermer-sur-Hollande_a213325.html . Une manœuvre qui serait plus crédible si ses initiateurs l’étaient davantage.
 

La nouvelle story élyséenne
Nicolas Sarkozy a décidé de jouer sa réélection sur sa crédibilité économique. Il serait un président responsable, qui nous protégerait de la crise et dont l’activisme aurait permis d’échapper plusieurs fois à des crises encore plus graves. En face, le Parti Socialiste serait un repère d’irresponsables prêts à ouvrir le robinet à dépenses, entre le retour de la retraite à soixante ans ou l’embauche de soixante mille professeurs supplémentaires. Bref, la responsabilité contre l’irresponsabilité.
 
Il faut dire que Nicolas Sarkozy a intérêt à ce qu’on ne regarde pas trop ses promesses de campagne de 2007 s’il veut pouvoir être réélu en 2012. Le pouvoir d’achat n’a jamais été autant en berne, le chômage est au plus haut depuis dix ans, les violences aux personnes ne cessent de progresser. Bref, il vaut mieux déplacer le débat sur un autre sujet où il pourrait mettre en difficulté François Hollande, la dette, via notamment le psycho drame de la camisole budgétaire.

Un piège réellement habile ?
Les stratèges de l’Elysée espèrent piéger les socialistes en les appelant à l’union nationale sur cette question pour les faire passer sous les fourches caudines du gouvernement. Mais pour l’instant, François Hollande semble résister, même s’il est probable qu’il acceptera une telle règle s’il est élu. En effet, accepter de voter le projet du président reviendrait à lui donner une victoire politique d’importance à quelques mois des élections présidentielles.
 
Du coup, [l’idée peut sembler habile]url:../../Le-piege-sarkozyste-de-la-regle-d-or-en-passe-de-se-refermer-sur-Hollande_a213325.html . Le PS signe, le président gagne car il lui aura fait voter son texte. Le PS ne signe pas et il prêtera le flanc à une critique de son irresponsabilité budgétaire. Au passage, il est probable que le gouvernement pourra même lui coller la responsabilité de la perte prochaine du AAA si cela arrive avant les élections en expliquant que les agences de notation sanctionne le fait que la France n’ait pas passé cette règle de plomb.

Impostures communicantes
Mais même si en surface, cette opération de communication semble habile, elle comporte des failles. Tout d’abord, il est un peu facile de faire voter un texte fin 2011 pour un président dont le mandat se termine dans quelques mois. Si le texte avait été présenté plus tôt, il aurait semblé plus sincère. Là, il ne s’appliquerait que sur un éventuel second mandat. Il est aussi risible d’entendre le premier ministre dire à la fois qu’il fera tout pour garder le AAA tout en excluant un 3ème plan de rigueur.
 
Ensuite, le bilan financier du président est très contestable. Un rapport de la Cour des Comptes de début 2010 avait ainsi attribué la moitié de l’augmentation des déficits à l’action du gouvernement et la moitié seulement à la crise. En clair, si Nicolas Sarkozy est plus rigoureux en fin de mandat, il ne l’a vraiment pas été en début, multipliant les coûteuses exonérations fiscales et baisses d’impôt. Bref, avec la règle de plomb, il faudrait faire ce qu’il dit, et pas ce qu’il a fait.
 
Nicolas Sarkozy essaie de prendre une posture d’homme d’Etat avec sa camisole budgétaire. Mais en réalité, [derrière la posture de ses communicants]url:../../Le-piege-sarkozyste-de-la-regle-d-or-en-passe-de-se-refermer-sur-Hollande_a213325.html , transparaît comme trop souvent les calculs politiciens de bas étages et un bilan calamiteux. Deux bonnes raisons de lui offrir un congé définitif en 2012.


De l’exploitation politicienne de l’austérité
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10 décembre 2011 6 10 /12 /décembre /2011 19:03

Samedi 10  Décembre 2011

 

Quand Pôle Emploi désinscrit un chômeur sur deux.  

L'an dernier, quelque 5,6 millions de personnes sont sorties des listes de Pôle emploi (catégories A, B, C) en France métropolitaine. Moins de 5% d'entre elles avaient repris un emploi.
La DARES vient de publier une intéressante étude sur l'évolution des sorties d'inscriptions à Pôle Emploi entre 2007 et 2010. Comme elle le précise, les inscrits à Pôle Emploi ne sont qu'une part des demandeurs d'emploi.

En 2010, chaque mois, 10% des inscrits ont quitté les listes de Pôle Emploi, contre 12,5% en 2007.
Quand Pôle Emploi désinscrit un chômeur sur deux.

 
Désinscrits avec emploi...
Contrairement au story-telling sarkozyen, la DARES confirme que la crise de l'emploi a commencé AVANT la crise boursière puis financière de septembre 2008: elle a commencé dès mars 2008. « La baisse a été plus particulièrement marquée entre mars 2008 et mars 2009, en lien avec la dégradation de la conjoncture économique ».
 
La DARES confirme également que la reprise de l'emploi n'a jamais eu lieu: le taux de sortie pour reprise d'emploi n'a jamais progressé depuis l'élection de Sarkozy. Au contraire, moins de la moitié des sorties mensuelles le sont pour reprise d'emploi (4,6% en 2010), contre 6,5% en 2007. En décembre 2010, ce taux de sortie pour reprise d'emploi était même de 4,2%, l'un « des taux les plus bas observés depuis le début de la disponibilité des données, en juin 2002 ».
 
Un peu moins d'un tiers de ces sorties concernaient des CDI. L'intérim s'est effondré dès mars. Et les contrats aidés, s'ils ont augmenté, représentent une part marginale de ces reprises d'emploi :  après un pic à 12% de ces sorties en 2009, ils sont retombés à 9% l'année suivante. C'est l'effet direct de la baisse des crédits consacrés à l'emploi.
 
Pôle Emploi n'a assuré que 14% des recrutements des sortants en 2010, contre 29% pour ... les relations professionnelles et personnelles et 23% via des petites annonces hors Pôle Emploi.
 
Enfin, un tiers des désinscrits ayant retrouvé un emploi ... cherchent encore un emploi. Et pourquoi ? A cause « d’une insatisfaction relative au contrat de travail (23 %), à la durée de contrat (23 %), au salaire (12 %) ou au temps de travail (10 %) ».  
... ou sans travail
Plus d'un chômeur sur deux est sorti des listes de Pôle Emploi sans avoir recouvré un travail.
 
Ces désinscrits sans emploi se décomposent comme suit.
 
47% ont été sortis « involontairement » des listes de Pôle Emploi. La DARES précise les cas:

  • 31% pour défaut d’actualisation suivi d’une réinscription
  • 12% suite au « non renouvellement accidentel » de leur demande (problème de carte de séjour, de téléactualisation...)
  • 4% suite à une radiation administrative

38% de ces sans-emplois sont sortis « volontairement » des listes de Pôle Emploi:

  • 19% sont partis en formation
  • 15% ont interrompu leur inscription pour cause de maladie, de vacances, ou de congés maternité ou parentaux.
  • 3% sont partis à la retraite, ou en en dispense de recherche d’emploi.

Enfin, la DARES précise que 6% supplémentaires « n’ont simplement pas souhaité renouveler leur inscription sur les listes de Pôle emploi, (par exemple parce qu'ils n'étaient plus indemnisés) » et que 9% se sont désinscrits pour un « autre motif » tels un déménagement ou un emprisonnement (sic!).
 
La France précaire
Cette étude fournit également quelques éléments d'analyse sur la France précaire.
 
Les plus de 50 ans: leur taux de sortie pour reprise d'emploi, déjà très faible avant la crise (3,5%), s'est affaissé à 2,4% en 4 ans. Cette évolution est à rapprocher des grands discours sur l'inévitable amélioration de l'emploi des séniors. 
 
Les régions industrielles: Limousin, Nord-Pas-de-Calais, Picardie et Haute-Normandie affichent les taux mensuels de sortie pour reprise d’emploi les plus faibles, inférieurs à 4,0 % en moyenne.
 
Les professions non qualifiées: le taux de sortie pour reprise d'emploi a été dégradés de 30% en 4 ans, pour tomber à 3,9% (manoeuvres) ou 4,7% (ouvriers); quand celui des cadres restait au-dessus des 5%. « La baisse des taux de sortie conjuguée à l’afflux de nouveaux inscrits sur les listes de Pôle emploi explique la forte hausse du nombre de deman- deurs d’emploi ouvriers: +24,9 % entre 2007 et 2010 contre +5,9 % sur la même période pour les cadres. »

 
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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 13:47
Marianne - Laurent Pinsolle - Blogueur associé | Jeudi 8 Décembre 2011 à 18:01 |

 

Contrairement à ce qu’affirme la doxa néolibérale, les agences de notation ne sont pas que des thermomètres. Une baisse de la note d’un pays, rappelle Laurent Pinsolle, proche de Nicolas Dupont-Aignan, peut se traduire par des baisses de salaires ou des coupes dans les budgets sociaux dont les conséquences sociales peuvent être dramatiques. Une responsabilité grave. « Ce sont nos dirigeants qui se sont livrés pieds et poings liés aux marchés tout puissants et qui doivent donc suivre leur agenda à la lettre », appuie notre blogueur associé.



Il était un temps où le président de la République pouvait dire que « la politique de la France ne se fait pas à la corbeille  ». Aujourd’hui, comme le démontre cet interminable feuilleton qui va nous mener à la perte de notre AAA, c’est bien la corbeille qui dirige notre pays.

Des agences inhumaines, stupides et auto réalisatrices
Il est franchement désolant de voir un premier ministre qui se dit gaulliste se prosterner devant les agences de notation et promettre de « faire tout pour garder son AAA ». Car ces agences sont inhumaines. Leur jugement a des conséquences bien concrètes pour la vie des peuples. Une baisse de la note d’un pays peut se traduire par des baisses de salaires ou des coupes dans les budgets sociaux dont les conséquences sociales peuvent être dramatiques. Une responsabilité grave.
 
 
Mais non seulement ces agences ont une influence importante, mais comme l’a bien démontré la crise de 2008 analysée par Frédéric Lordon, leur jugement est hautement questionnable. Non seulement elles avaient accordé le fameux AAA à des obligations pourries, notamment sur le marché immobilier étasunien, mais ce sont aussi elles qui ont permis à certains Etats de s’endetter dans de trop bonnes conditions. En outre, en quoi la situation des pays change aussi vite que leur note ?
 
C’est que le problème de ces agences, c’est qu’elles ne sont pas qu’un thermomètre, contrairement à ce qu’affirme la doxa néolibérale. Elles sont un thermomètre qui donne la fièvre. L’abaissement d’une note a tendance à dégrader la situation des pays visés, renchérissant leur dette et donc imposant plus d’austérité et cassant la croissance, justifiant a posteriori le premier abaissement et potentiellement en en préparant un second. C’est le miracle auto réalisateur du marché !

Que faut-il faire ?
AAA, ou quand la politique se fait à la corbeille
Ce constat sévère contre les agences de notation pourrait pousser à demander leur interdiction. Mais s’il faut mieux veiller au conflit d’intérêt et encadrer cette profession, il ne faut pas forcément opter pour des solutions trop radicales. En effet, malgré tout, ce ne sont pas les agences qui sont au cœur du problème. A la racine de tout cela vient, comme le répète des personnes comme André-Jacques Holbecq, l’interdiction du financement de l’Etat par la banque centrale.
 
En effet, les Etats-Unis n’en ont rien eu à faire de voir leur note dégradée. La Fed peut racheter autant de bons du trésor qu’elle le souhaite (et dans le climat actuel, ce n’est même pas inflationniste). Idem, la Grande-Bretagne et le Japon bénéficient de taux extrêmement faibles, malgré une situation financière pas meilleure que dans la zone euro… En effet, ce sont les Etats européens qui se sont rendus complètement dépendants du jugement des marchés et des agences.
 
Ce sont nos dirigeants qui se sont livrés pieds et poings liés aux marchés tout puissants et qui doivent donc suivre leur agenda à la lettre. Le Général de Gaulle pouvait envoyer promener les spéculateurs car la création monétaire était encore du ressort de l’Etat et pouvait être mise au service de la collectivité, contre les marchés. Aujourd’hui, les Etats de la zone euro se battent à mains nues. Pas étonnant qu’ils soient devenus des pantins des marchés, cherchant à tout faire pour leur plaire.
 
Les Etats européens pourraient du jour au lendemain briser les chaines qui les lient au marché financier, réquisitionner leurs banques centrales, pour reprendre le mot de Sapir, et monétiser. Ainsi, ils pourraient, comme le Général de Gaulle, traiter avec dédain le clapotis des marchés.

Retrouvez Laurent Pinsolle sur son blog.
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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 13:33

 

Nuit bruxelloise 09/12/2011 à 07h46
Mathieu Deslandes Journaliste Rue89
 

Il n'y aura pas de réforme des traités à 27. Lors des négociations qui se sont déroulées cette nuit à Bruxelles, les dirigeants de l'UE n'ont pas pu se mettre d'accord.

Nicolas Sarkozy a pointé la responsabilité des Britanniques et des « no » à répétition de leur Premier ministre :

« Pour accepter une réforme des traités à 27, David Cameron a demandé, ce que nous avons considéré tous comme inacceptable, un protocole dans le traité permettant d'exonérer le Royaume-Uni d'un certain nombre de règlementations sur les services financiers. »

Les leaders européens ont donc décidé d'acter l'existence d'une Europe à deux vitesses.

L'accord pour renforcer la discipline budgétaire, voulu par l'Allemagne et la France, ne sera adopté que par les 17 membres de la zone euro plus « des pays volontaires ». Sept d'entre eux ont signé l'accord.

Ces pays-là ont accepté :

  • le principe de sanctions quasi-automatiques en cas de déviance budgétaire ;
  • l'adoption, par les pays, d'une « règle d'or » imposant le retour à un l'équilibre budgétaire ;
  • un droit d'intrusion européen accru dans la préparation des budgets nationaux. Les pays qui bénéficient d'une aide extérieure pourront même être placés sous tutelle européenne ;
  • que la Banque centrale européenne (BCE) soit chargée de gérer l'actuel Fonds de secours de la zone euro (FESF) et le futur Mécanisme européen de stabilité (MES) qui doit lui succéder en 2012 ;
  • de renoncer, en cas d'urgence, à la règle de l'unanimité, pour prendre les décisions qui concernent ce MES. Une « majorité surqualifiée » de 85% suffira (et les pays en désaccord devront se soumettre).

Toute l'idée était d'afficher un équilibre :

  • d'un côté une discipline budgétaire accrue (exigence allemande) ;
  • de l'autre l'intervention facilitée de la Banque centrale dans le financement des dettes.

Mais le président de la BCE, Mario Draghi, a tenu des propos extrêment rigides sur le rôle de son institution, fermant la porte à tout assouplissement.

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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 12:35

Récit | LEMONDE | 09.12.11 | 13h03   •  Mis à jour le 09.12.11 | 13h11

 
 

 

Ethiques, écologiques ou sociales, les motivations sont diverses, mais, depuis un an, les consommateurs plébiscitent le "Made in France".

Ethiques, écologiques ou sociales, les motivations sont diverses, mais, depuis un an, les consommateurs plébiscitent le "Made in France".D.R.

Alexandre Lopepe est un Européen convaincu mais, depuis six mois, il ne veut acheter que des produits français. "J'ai eu le déclic après une série de reportages sur les ravages de la production de coton sur l'environnement en Chine", explique ce Toulousain de 28 ans, informaticien dans le secteur spatial. "Je n'ai jamais été militant mais, là, je le deviens en agissant. " Claire Nahoun, elle, a eu une "révélation l'hiver dernier", se souvient-elle. "Un soir, mon fils, qui travaille en alternance dans un magasin de jouets, m'a dit que 80 % de ce que je possédais était fabriqué en Chine. Cela m'a piquée au vif", explique cette quinqua, assistante dans un cabinet d'avocats parisiens. "Depuis j'épluche les étiquettes et j'ai des surprises, comme de grandes marques de vêtements made in China. Je suis pour la mondialisation mais désormais, j'oriente mes achats."

Quant à Thierry Lehoux, gérant d'un bureau d'études à Nantes, sa prise de conscience date d'il y a un peu moins de deux ans, au coeur de la crise mondiale. "Nous avons défendu le libre-échange avec naïveté, commente-t-il. La pollution et les bas salaires sont en Asie et nous avons progressivement perdu nos industries, nos départements de recherche et même nos sièges sociaux. Je privilégie les circuits courts pour faire revenir la production en France."

Atypiques, ces consommateurs ? Bien au contraire. Selon un sondage réalisé par l'IFOP auprès de 1 004 personnes et publié lundi 21 novembre, 66 % des Français annoncent être prêts à payer un peu plus cher (5 ou 10 %) si le produit est fabriqué en France. Des déclarations d'intention, certes, mais qui se retrouvent désormais dans les faits.

Sur le Net, prompt à révéler les tendances, le site Alittlemarket double de taille tous les six mois. Il expose les productions hexagonales de 20 000 artisans - textile, bagagerie, décoration, bijoux : 400 000 visites par mois, 15 millions de pages vues. Huit clients sur dix, sondés en octobre, déclarent acheter sur le site pour faire travailler l'économie locale. "Cent nouveaux créateurs par jour demandent à être exposés sur le site", explique, encore étonné, le cofondateur Nicolas Cohen.

Cet engouement n'a pas échappé à Hervé Gibet et Fabienne Butin. Ces deux pionniers ont, parallèlement à leur travail - lui est journaliste à Paris, elle professeure de peinture à Cassis -, créé en 2008 les sites La Fabrique hexagonale et Madine-France pour aider les consommateurs à débusquer des entreprises fabriquant sur le territoire. "Au début, certains me prenaient pour un pétainiste", explique Hervé Gibet. "Moi, pour une militante d'extrême droite", ajoute Fabienne Butin. "C'est fin 2010 que la tendance s'est inversée : acheter français est devenu un geste citoyen", reconnaissent les deux protagonistes.

Signe des temps, l'entreprise bicentenaire Pleyel, connue dans le monde entier pour ses pianos, a appelé cet été Hervé Gibet pour être référencée en ligne. Désormais, les sites de vente bleu-blanc-rouge se multiplient : 100 % Made in France, France-Avenue, Acheter français n'est pas un luxe, etc. Même les sites destinés aux petites bourses s'y mettent. Ainsi 30eurosmaxi.com estampille les produits hexagonaux d'une petite cocarde. "Nos ventes augmentent de 30 % par an. J'ai été surprise de la diversité des objets français accessibles aux petits budgets", explique sa fondatrice, Hanane El Riz. "L'engouement date d'il y a un peu plus d'un an, ajoute Alexiane Pesenti, responsable marketing de Vilac, dont les poupées Petitcollin sont vendues sur ce site. C'est une conséquence positive de la crise. Le pouvoir d'achat diminue, les Français achètent moins, mais mieux. "

Résultat, certains industriels, à la peine ces dernières années, redressent la tête. "J'ai agrandi cette année le logo "made in France" sur l'emballage de nos jouets, c'est devenu un argument commercial", affirme Jacques Ecoiffier, patron de l'entreprise de jouets homonyme. La gamme Klorofil de l'entreprise Vulli, arborant un drapeau tricolore, se retrouve ce Noël en tête de gondole des magasins de jouets.

La french touch a également le vent en poupe hors des frontières. "Quand dix parcs new-yorkais s'équipent de nos chaises (celles du jardin parisien du Luxembourg), c'est un peu du Quartier latin et de la Sorbonne qu'ils achètent", reconnaît Bernard Reybier, PDG de Fermob, qui réalise près de la moitié de son chiffre d'affaires à l'étranger. Jean-Yves Hepp n'est quant à lui pas peu fier d'aller présenter sa tablette tactile Qooq, 100 % frenchy, dans le temple mondial de la high-tech, le Consumer Electronics Show à Las Vegas, en janvier prochain. "Je vais la vendre aux Américains alors que sa production vient de passer de Shenzhen (Chine) à Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire) sans que cela me coûte plus cher", explique-t-il.

Point d'angélisme cependant. Le consommateur aura tout de même bien du mal à trouver des produits industriels hexagonaux - hormis l'agroalimentaire, bien sûr - dans les linéaires des super et des hypermarchés. "Certains distributeurs ne jouent pas le jeu et vendent des jouets made in China plus cher que les nôtres", estime Jacques Ecoiffier. Pour une petite société française, il n'est pas évident de séduire la grande distribution, habituée à multiplier par quatre ou cinq les prix chinois et réaliser ainsi des marges substantielles.

Pour se débrouiller autrement, une nouvelle génération d'entrepreneurs se tourne vers des modèles de distribution alternatifs. Le fabriquant de meubles L'Edito, créé en 2008, propose sur son site un modèle séduisant : l'internaute peut certes acheter des meubles 100 % fabriqués à Evry. Mais il peut aussi financer pour partie le développement d'un prototype proposé en ligne. Il pourra alors acheter l'objet au rabais (- 20 %) mais aussi percevoir, en tant que "coéditeur", des "royalties" à chaque vente (environ 1 euro par meuble vendu pour 100 euros investis au départ). L'entreprise n'a pas de stock, n'avance aucun frais de développement et n'a qu'un show-room-bureau à Paris.

Le modèle visiblement séduit : 100 000 euros, soit 10 % du chiffre d'affaires, sera reversé cette année aux internautes, estime son directeur général, Francis Lelong, créateur il y a quelques années du site de chaussures Sarenza. "Nous ne sommes pas des écolos mais avons des valeurs fortes, explique-t-il. Nous pouvons faire aussi bien en produisant français et en étant un peu plus imaginatifs."

Les initiatives se multiplient. Le site Archiduchesse propose depuis 2009 une gamme de 48 couleurs de chaussettes fabriquées à Limoges. 50 000 paires ont déjà été vendues. Jacques & Déméter, marque de chaussures chic à moins de 250 euros, vient de se lancer, en novembre, sur le Net. Aux commandes, un jeune duo de créateurs qui va multiplier, d'ici Noël, sa présence dans les "pop-up", ces lieux de ventes éphémères qui apparaissent un peu partout en France. "C'est un bon moyen d'aller à la rencontre des clients", explique le cofondateur Maxime Van Rothem.

Pour le consommateur, malgré tout, pas si simple de s'y retrouver. "La provenance des produits est bien moins visible qu'il y a vingt ans, témoigne Thierry Lehoux. J'ai voulu acheter récemment une batterie de voiture. J'ai demandé au vendeur d'où provenaient les trois modèles proposés... Il a été incapable de me répondre et m'a seulement dit que tous trois fonctionnaient correctement !" Pour clarifier la situation, un label Origine France Garantie a été lancé en mai. Certifié par un organisme privé, bureau Veritas, il stipule que "50 % de la valeur du produit a été acquise sur le territoire national et que les lieux où il a pris ses caractéristiques essentielles sont situés en France". Une définition plutôt vague... et onéreuse à mettre en pratique.

"J'ai voulu me faire certifier, j'ai reçu un devis avoisinant les 3 000 euros", explique le jeune créateur textile Philippe Gaber, qui s'est résolu à créer son propre logo pour afficher sa "franchitude". L'opticien Atol a, lui, fait certifier sa dernière collection de lunettes Nu.

Quant aux entreprises trop promptes à surfer sur la tendance qui affichent une cocarde... les 60 000 visiteurs mensuels de La Fabrique hexagonale veillent désormais. "Ils sont autant d'envoyés spéciaux bénévoles qui font remonter les informations comme de discrets déménagements de lieux de production", note Hervé Gibet. Le Web 2.0 au service d'un nouveau contrôle citoyen.

Laure Belot

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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 12:28

LEMONDE.FR avec AFP | 09.12.11 | 12h49

 
 

 

La banque centrale grecque, à Athènes.

La banque centrale grecque, à Athènes.AFP/ARIS MESSINIS

Le produit intérieur brut (PIB) grec s'est contracté de 5 % au troisième trimestre 2011, sur un an, selon des données révisées de l'autorité des statistiques grecques. En revanche, cette réévaluation ne modifie pas la contraction aux trimestres précédents, de 7,4 % pour le deuxième et de 8,3 % pour le premier.

Les dépenses totales de consommation, privée et publique, ont reculé de 5,1 %, à 42,2 milliards d'euros par rapport au troisième trimestre 2010, ce qui a contribué à réduire de 71,4 % le déficit du commerce extérieur, a précisé l'ESA. Sur la même comparaison, les exportations, à 13,8 milliards d'euros, ont progressé de 3,2 %, tandis que les importations ont reculé de 4,3%, à 14,2 milliards d'euros.

Selon le budget 2012, le PIB doit se contracter de 5,5 % pour 2011, et la récession en Grèce, surendettée et soumise depuis 2010 à une cure d'austérité dictée par l'Union européenne et le Fonds monétaire international, doit se poursuivre en 2012 pour la cinquième année consécutive, avec un recul de 2,8 % du PIB.

FORTE BAISSE DE LA DEMANDE INTÉRIEURE

Le PIB du Portugal s'est quant à lui replié de 0,6 % au troisième trimestre et de 1,7 % en glissement annuel, selon des données définitives publiées par l'Institut national des statistiques (INE).

En glissement annuel, le recul du PIB "est dû à la forte baisse de la demande intérieure", qui a chuté de 4,6 % de juillet à septembre (de 5,1% au 2e trimestre), a expliqué l'INE dans un communiqué.

L'investissement est tombé de 13,7 %, tandis que la consommation des ménages a reculé de 3,3% en raison notamment d'une baisse de 16,5 % en ce qui concerne les biens durables. Le gouvernement portugais table sur une récession de 1,6 % du PIB cette année, qui devrait s'approfondir à - 3 % en 2012 dans un contexte de forte austérité budgétaire.

En échange d'une aide de 78 milliards d'euros de l'Union européenne et du Fonds monétaire international, le Portugal s'est engagé à réduire ses déficits et à mettre en œuvre d'importantes réformes structurelles.

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