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19 mars 2012 1 19 /03 /mars /2012 14:15

 

Rue89 - Témoignage 18/03/2012 à 18h40
Clarisse F. | Infirmière

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Nature morte médicinale (Sarah G/Flickr/CC)

 

Je suis infirmière dans un hôpital public depuis sept ans. Pour arrondir mes fins de mois, je me suis inscrite dans une agence d'intérim spécialisée dans le domaine de la santé. Les missions que l'on m'a proposées concernaient les cliniques.

Travailler en dehors de l'hôpital est interdit, mais beaucoup d'infirmiers le font, puisque nos heures supplémentaires ne sont pas payées.

J'ai été révoltée par ce que j'ai vu... Catapultée dans un service de médecine que je ne connaissais pas, dans un établissement que je ne connaissais pas, j'ai dû prendre en charge 25 patients.

Je me suis sentie totalement perdue

J'avais choisi un poste de nuit afin de ne croiser personne, étant donné que je n'avais pas le droit de travailler dans cette clinique. Une aide-soignante est venue me donner un coup de main une ou deux fois dans la nuit puisqu'elle avait en charge deux services, soit 50 patients.

L'infirmière d'après-midi qui m'a fait les transmissions m'a donné quelques indications sur ce qu'on attendait de moi pour ce poste de nuit. Quand elle est partie, je me suis sentie totalement perdue...

Je travaille à l'hôpital dans un service de réanimation, je sais prendre en charge les urgences, mais je ne sais pas travailler dans un service « conventionnel ». Pourtant, il fallait que je sois à la hauteur, j'avais 25 patients qui avaient besoin de moi, de mes compétences. J'ai fait de mon mieux mais, toute la nuit, j'avais une boule au ventre...

Les dossiers des patients ne sont pas comme ceux de mon service, les protocoles non plus. J'avais peur de louper une information, de commettre une erreur... Je savais quel médecin appeler en cas de problème, mais je savais aussi que je ne devais pas appeler pour n'importe quoi. Le médecin était chez lui, mais je savais aussi que les médecins des cliniques détestent être dérangés, que si j'appelais, je me ferais incendier.

Je devais préparer les traitements de la journée pour chaque patient en suivant son dossier, donner les traitements des patients pour la nuit, et répondre aux sonnettes. J'étais très souvent interrompue lors de la préparation des médicaments.

Finalement, la nuit est passée sans problème. J'ai fait mes transmissions aux infirmières du matin. Elles n'aiment pas les intérimaires, il y a toujours des oublis, elles doivent rattraper leurs erreurs.

Ensuite, on m'a proposé des nuits dans une autre clinique. Un service de soins intensifs de cardiologie. Je n'étais plus seule, je travaillais avec deux autres infirmières. Elles étaient désagréables, elles n'aiment pas non plus les intérimaires. Au sein d'un même hôpital, chaque service a ses habitudes, ses spécificités, sa façon de travailler.

Elles ne comprenaient pas que les intérimaires posent des questions « bêtes », et avancent moins vite. Effectivement, je posais des questions pour des choses qui leur paraissaient évidentes. Les médicaments utilisés ne sont pas les mêmes, les tubes pour les prises de sang sont différents, les dossiers sont informatisés, etc.

Un examen à 500 euros... pas bête

Dans ce service spécialisé, il y a eu plusieurs admissions durant la nuit. Je n'ai pas compris pourquoi ces patients étaient là... Ils ont bénéficié de nombreux examens, examens revenus négatifs pour la plupart puisqu'ils étaient inutiles !

Par exemple, un patient est venu pour des douleurs thoraciques. On lui a fait un électrocardiogramme (ECG). Si celui-ci est normal, le patient doit rentrer chez lui. Pas en clinique ! Le lendemain, il a bénéficié d'une coronarographie exploratrice...

Pas d'anomalie, il est rentré chez lui ! Une coro rapporte 500 euros... pas bête, dommage de s'en priver. Si le médecin avait trouvé une anomalie, le patient aurait bénéficié d'une nouvelle coro cette fois-ci pour poser un stent – encore 500 euros, alors qu'il aurait pu lui poser le stent lors de la première coro !

Le trou de la Sécu vient de là aussi

J'ai pu constater ce type de procédure plusieurs fois. J'en ai parlé aux infirmières de la clinique qui sont d'accord avec moi. Les médecins admettent n'importe qui, ils font des examens invasifs inutiles mais lucratifs, les patients pensent qu'ils sont bien pris en charge puisqu'on leur fait plein d'examens. Ce qu'ils ne savent pas, c'est que ces examens sont inutiles et qu'ils peuvent être dangereux, et source d'infection (introduction d'une sonde dans l'artère radiale ou fémorale).

Les patients sont des clients choisis en fonction de ce qu'ils peuvent rapporter à la clinique. C'est du business, pas une prise ne charge respectueuse du patient. Le trou de la Sécu vient de là aussi, et personne n'en parle, pourquoi ? Parce que les patrons des cliniques sont amis avec les gens au pouvoir ?

Un dernier exemple... Lorsqu'un patient ne va pas bien en clinique, les médecins font un maximums de gestes et d'examens chers (pose de cathéters et de sondes, scanners, coronarographies) et ensuite, lorsque le « client » ne leur rapporte plus rien, ils les transfèrent à l'hôpital.

 

 

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19 mars 2012 1 19 /03 /mars /2012 13:37

Le Monde.fr | 19.03.2012 à 09h51 • Mis à jour le 19.03.2012 à 10h03

 

Par Gérard Lafay, professeur émérite à l'université Panthéon-Assas, Jacques Sapir, directeur d'études à l'EHESS, Philippe Villin, ex-directeur du Figaro

 

A la fin de 2011, la crise de l'euro s'accentuait au point que certains prévoyaient qu'il ne passerait pas Noël. Pour éviter un éclatement désordonné, nous avons nous-mêmes préconisé, avec une douzaine d'autres économistes, de procéder à un démontage concerté. Or, depuis le début de l'année 2012, la crise aigüe de l'euro semble s'apaiser. Mais l'euro n'est pas pour autant sauvé.

 

LES FACTEURS DE STABILISATION

Deux éléments nouveaux sont intervenus. En premier lieu, l'avènement de Mario Draghi à la tête de la Banque centrale européenne (BCE), à la place de Jean-Claude Trichet, s'est traduit par un brusque changement de stratégie. Alors que les statuts de la BCE, découlant du traité de Maastricht, lui interdisaient le financement des dettes publiques des Etats de la zone euro, une voie latérale juridiquement et politiquement douteuse a été trouvée : les financer indirectement en passant par l'intermédiaire des banques commerciales. C'est un pas de plus vers le fédéralisme furtif, sans vote des citoyens. Les banques italiennes et espagnoles ont dû se prêter au jeu et avaler les émissions de dettes souveraines de leurs Etats respectifs. En principe, les autorités allemandes, gardiennes de l'orthodoxie, auraient dû s'y opposer. Or elles y ont consenti en échange du second facteur de stabilisation, celui du renforcement de l'austérité budgétaire qui va être scellé dans un nouveau traité.

Vu par la chancelière allemande, l'approfondissement de l'union politique n'aborde pas de front la question de l'Europe fédérale : il consiste seulement à créer une Europe sans autre perspective que la rigueur, une sorte d'Europe à la trique, où les pays qui ne seraient pas vertueux seraient mis sous tutelle. Angela Merkel prend ainsi le risque immense et insensé de ressusciter la germanophobie. On l'a vu à l'œuvre avec le cas de la Grèce, qui n'a pu éviter temporairement un défaut, assorti d'une probable sortie de l'euro, qu'en échange d'une rigueur drastique et d'un abandon de sa souveraineté. La haine de l'Allemand pourrait bien devenir une maladie contagieuse.

Pour les classes dirigeantes des autres pays, soumises à l'arrogance de la chancelière, pas question de sortir l'Europe de la stratégie de déflation due à un euro trop cher et à des politiques partout restrictives. Encore plus de Maastricht pour le seul profit à court terme des exportations et des retraités allemands ! C'est le prix que nous payons pour une monnaie unique sans mécanismes de transferts.

 

 UN RÉPIT TEMPORAIRE

Ces facteurs actuels de stabilisation ne sont pourtant susceptibles d'offrir à l'euro qu'un répit illusoire de quelques mois. En effet, la zone primaire de l'euro ne constituait pas ce que l'on appelle une "zone monétaire optimale". La richesse s'aimante aux régions les plus compétitives tandis que les régions faibles sont progressivement ruinées ; leurs habitants devront migrer vers ces régions riches, et en contrepartie il faudrait d'importants transferts pour la survie des autres régions. Maastricht a ruiné l'Europe du Sud et affaibli la France et l'Italie !

Nous pensons qu'on ne peut faire fonctionner une zone monétaire unifiée sans la doter d'un pouvoir politique central, levant l'impôt et organisant les transferts importants qui sont indispensables entre régions riches et régions pauvres (et ce même si nous étions et demeurons hostiles à un tel projet fédéral).

Ce projet fédéral eut-il été mis en place, on aurait au moins pu organiser un rééquilibrage. Mais les dés étaient pipés dès le traité de Maastricht ! Les Allemands n'avaient accepté l'union monétaire qu'en interdisant l'union de transferts. Pire encore, ce traité fixait à la BCE un seul objectif : la stabilité monétaire, et non, comme pour la Réserve fédérale, un équilibre entre la recherche de la croissance et la lutte contre l'inflation. Vingt ans après, le résultat est un euro trop cher qui a rendu anémique la croissance économique dans l'ensemble de la zone ; les produits de l'Europe du Nord ont envahi celles du Sud et du Centre, et la crise budgétaire hors région Nord est largement la conséquence de la perte de compétitivité, qui a ruiné leurs économies.

Aujourd'hui, même si les eurolâtres reconnaissent enfin le non-fonctionnement de l'euro, ils refusent de voir la réalité, continuant à nier qu'il existe un énorme problème de compétitivité intra-européenne. L'Europe du Sud, en commençant par la Grèce, mais aussi le Portugal, l'Espagne, et même l'Italie et la France, a vu sa compétitivité se dégrader à l'intérieur de l'Europe. Le cas de l'industrie automobile française qui court à sa perte, faute de dévaluation, face à la compétitivité allemande est éloquent. Or, le seul ajustement proposé est la déflation, donc le chômage, qui dépasse désormais les 23 % en Espagne et 21 % en Grèce, alors que seules des dévaluations différentes pour chaque pays pourraient régler le problème par reprise de la croissance.

 

L'ACHARNEMENT THÉRAPEUTIQUE

La mort de l'euro était inscrite dans ses structures ; elle l'est désormais dans les politiques menées. Si la chancelière allemande voulait sérieusement sauver l'euro, il serait nécessaire qu'elle demande à son peuple son accord pour une Europe des transferts. Nous savons d'avance que la réponse à cette question serait négative, notamment en raison des centaines de milliards d'euros à transférer de manière récurrente... La politique de déflation que l'on nous propose va aggraver la crise et la rendre encore plus cruelle. Les terribles mesures de déflation que l'on impose provoquent partout - en Grèce, au Portugal, en Espagne mais aussi en Italie, en Belgique et bientôt en France - une forte contraction du PIB. Cette dernière va mécaniquement engendrer une contraction encore plus forte des recettes fiscales. Le déficit budgétaire que l'on avait cru résoudre en coupant les dépenses va réapparaître par la disparition des recettes.

Il n'y a donc pas moyen de sauver l'euro. Il faut par conséquent abréger "l'euragonie" en interrompant le processus actuel, soit par un démontage volontaire et décidé en commun, soit par un processus imprévisible de sorties individuelles. Telle est le choix qui nous est offert. Chacun doit reprendre sa monnaie avant qu'un effondrement de l'ensemble des économies n'emporte tout. C'est le seul moyen de retrouver la compétitivité et la croissance économique, et donc de rétablir l'équilibre budgétaire dans les différents pays de la zone euro.

Dans ce contexte, la France doit résister à la funeste tentation technocratique de nous faire rejoindre un "MarkEuro" encore plus cher que l' "EuroTrichet", ce qui aurait le double effet d'achever de nous ruiner très rapidement et de faire de nous la plus pauvre des provinces allemandes, ayant qui plus est perdu tout pouvoir de décision.

 


Philippe Villin est aussi président de PH. Villin Conseil.

 

 

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18 mars 2012 7 18 /03 /mars /2012 11:28

| Par Mathieu Magnaudeix

Sur la place de la République, la République, justement, s'est fait la malle. Le tribunal de commerce a fermé en 2009. Le tribunal d'instance a déserté l'année suivante. Le café du Palais, juste en face, a baissé le rideau depuis des années. A l'exception de la boulangerie, les autres boutiques de la place ont mis la clé sous la porte.

A part quelques pigeons, on n'entend pas un bruit cet après-midi-là dans la vieille ville de Joigny,  jolie cité de l'Yonne classée « Ville d'art et d'histoire », avec maisons à colombages, vieilles demeures aristocratiques et rues tortueuses à souhait. Et 10 000 habitants. Tout récemment, le tribunal d'instance et sa chapelle classée ont trouvé preneurs : 200 000 euros. Le nouveau propriétaire est un numismate dijonnais. « Franchement, je ne pensais pas que ça se vendrait. Je ne sais pas trop ce qu'il va en faire », grommelle l'ancien patron du café, qui vit toujours dans son établissement fermé.

 

Joigny, 10.000 habitants au bord de l'Yonne. 
Joigny, 10.000 habitants au bord de l'Yonne.

Joigny la paisible, chef-lieu d'un territoire rural acquis à la droite depuis des lustres, n'en revient toujours pas. En quelques années, l'Etat s'est massivement désengagé. La maternité et la chirurgie avaient déjà quitté l'hôpital en 2004, alors qu'un bloc opératoire tout neuf venait juste d'être inauguré. Puis est arrivée la Révision générale des politiques publiques (RGPP), vaste mouvement de restructuration des services publics lancé en 2008 par Nicolas Sarkozy. Les tribunaux sont partis. Et puis le coup de massue : le départ de l'armée, en 2010. Le 28e Groupement géographique imprimait ici les cartes militaires. Les 400 militaires, leur famille et leurs 650 000 euros de salaires mensuels faisaient vivre le commerce local.


 

Le 28e Groupement militaire, fermé en 2010. 
Le 28e Groupement militaire, fermé en 2010.

La communauté de communes s'est retrouvée propriétaire pour l'euro symbolique d'une immense friche de 10 hectares en pleine ville, et de milliers de mètres carrés de bâtiments, pour certains amiantés.

« Un cadeau empoisonné, grince Nicolas Soret, le jeune président (PS) de la communauté de communes, en charge du développement économique. Ici, on a tout pris sur la tête : la carte judiciaire, la carte scolaire, les réformes de l'hôpital... On se dit parfois qu'on aurait voulu faire mettre un genou à terre à la ville qu'on ne s'y serait pas pris autrement. » Au total, Nicolas Soret estime que la ville a perdu 500 emplois en seulement quelques années.

« Joigny est un peu la ville-martyre de la RGPP, l'exemple de ce qu'elle a pu produire de pire », explique Romain Derache, chargé de mission à l'Association des petites villes de France (APVF). C'est le résultat d'une application mécanique, sans aucune volonté de concertation avec les élus. »

Le gouvernement, aidé par des cabinets privés, a défini des seuils de rentabilité (taux d'utilisation, nombre d'actes rédigés...) pour définir la carte des tribunaux et des services publics supprimés. 84 % des maires interrogés par l'APVF estiment que la RGPP a eu un impact « négatif ou très négatif » sur le fonctionnement de leurs services publics.

Désert médical


 

L'ancienne imprimerie militaire 
L'ancienne imprimerie militaire

A Joigny, le départ de l'armée a plombé le commerce local de 2,5 millions d'euros de chiffre d'affaires par an, selon la préfecture de l'Yonne. « Il y avait plein de locations dans le Vieux-Joigny. Le soir quand les militaires avaient fini leur journée, ils dépensaient, faisaient un peu la fête, ils vivaient quoi ! Ça nous faisait travailler. Du jour au lendemain, juillet 2010, on a fait 15 % en moins », raconte Yannick Dussault, qui tient avec son mari une supérette dans la rue piétonne du centre-ville. Les affiches « à vendre » et les devantures badigeonnées de blanc y pullulent. En général, les nouveaux magasins (des solderies, des discounts alimentaires) ne tiennent pas longtemps.

« Ça manque vraiment de dynamisme, ça descend, on est devenu une ville-dortoir », déplore Marie-Claude Ecosse, une ancienne aide-soignante de 69 ans. « Tout ferme peu à peu », se désole Irène, 66 ans. Elle habite Annecy, mais vient une fois par mois pour faire les courses avec sa mère, Renée, 90 ans. « On ne peut même pas acheter de jolies fringues. »

Le marché immobilier, déjà très bas, a été plombé plusieurs mois par l'afflux de biens. Et les assistantes maternelles qui gardaient les bébés des militaires ont dû se reconvertir.


 

A l'entrée de l'ancienne base militaire. 
A l'entrée de l'ancienne base militaire.

La liste des services publics qui ont supprimé des effectifs depuis quelques années est impressionnante. Pour son audition devant une mission d'information du Sénat sur les conséquences territoriales de la RGPP (on peut lire le rapport de juin 2011 ici), Nicolas Soret a fait son enquête. D'après ses calculs, EDF et GDF ont supprimé trente emplois (et le bâtiment près de la gare reste inoccupé), de même que l'assurance-maladie (huit agents en cinq ans), la trésorerie (dix agents en six ans), ou Pôle emploi.

Une vingtaine de postes ont été perdus au collège et au lycée, et les parents se mobilisent actuellement contre la fermeture d'une classe de primaire au Clos-Muscadet alors même que le quartier gagne des habitants. Selon la Ville, la gendarmerie a perdu treize temps-plein. La restructuration des services départementaux de l'équipement, autre conséquence de la RGPP, a aussi touché les communes rurales environnantes, selon Nicolas Soret : « Les DDE aidaient les collectivités à établir leurs plans locaux d'urbanisme (PLU). C'est fini. Résultat : la communauté de communes du Béon a dû récemment payer un cabinet privé pour établir le sien ! »

« On est en voie de désertification. Mieux vaut ne pas avoir de gros problèmes de santé », déplore Philippe Baron, le libraire de la rue piétonne. Le dernier pédiatre a pris sa retraite il y a plusieurs années : en cas d'urgence pour les enfants, il faut désormais se rendre à l'hôpital de Sens. Le seul ophtalmo de la ville n'est plus très loin de raccrocher. Certains habitants qui en ont les moyens ont même pris l'habitude de se rendre à Paris pour se soigner, raconte un médecin. Les autres encombrent les urgences de l'hôpital. « 80 % de l'activité des urgences, c'est de la bobologie », explique Viviane Mutti, la directrice des soins.

Avec 15 000 passages par an, les urgences tournent à plein (ce qui assure d'ailleurs l'équilibre financier de l'hôpital), un niveau d'activité enviable qui est aussi la conséquence de l'absence cruelle de spécialistes en ville. Les généralistes, débordés, sont de plus en plus nombreux à ne pas se déplacer après 20 heures, alors qu'ils doivent en théorie assurer les gardes.

La directrice des soins de l'hôpital assure que son établissement n'est pas menacé. « Nous nous sommes transformés et adaptés à la population locale, qui vieillit. La maternité ne faisait pas assez d'accouchements pour garantir la qualité maximum. Nous avons ouvert un service de réadaptation cardiaque et respiratoire reconnu, nous allons ouvrir un nouveau service de gériatrie. » Les élus croisent les doigts : l'hôpital avec ses 400 salariés est désormais le plus gros employeur de la ville. Réduction des coûts oblige, il embauche moins qu'auparavant. Qu'il disparaisse, et Joigny vivrait un nouveau drame.

« Mécanisme rouillé »

 

La rue piétonne de Joigny.La rue piétonne de Joigny.
Elue d'opposition de droite au conseil municipal, Isabelle Bourassin-Lange ne nie pas les difficultés induites par la RGPP. Mais elle les minimise. « Le départ de l'armée a été un moment dur. Ça a un peu déstabilisé le tissu économique et social. Mais plus on en parle, plus ça alimente la complainte. C'est comme la crise, si on en parlait moins on aurait un peu plus le moral ! »

Elle conteste tout de même le bien-fondé de certaines décisions. « L'idée de la RGPP est bonne mais certaines mesures ont été prises sans qu'on nous demande notre avis ! C'est très facile avec son papier et son crayon de faire des choses à Paris, mais les élus votent des lois dont ils ne mesurent pas toujours les conséquences. Les énarques oublient trop souvent que la proximité, ça coûte en réalité moins cher pour les finances publiques. La fermeture des tribunaux, par exemple, a obéi à la volonté de l'Etat de regrouper les pôles administratifs. Ça partait d'un bon sentiment, mais désormais il faut se rendre au tribunal d'instance à Sens pour les formalités », à une trentaine de kilomètres.

La crise économique et sociale a encore ajouté aux difficultés. En Bourgogne, le bassin d'emploi de Joigny, où vit une population d'ouvriers et d'employés en mal de qualification, a particulièrement souffert ­– le chômage avait augmenté d'un tiers au plus fort de la crise, record régional. Les stylos à plume Sypen (groupe Bic) ont été délocalisés à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais). Strulik, un fabricant de conduits de ventilation qui a repris ses locaux, est en grande difficulté. Le tôlier Ertop, 115 postes début 2009, a supprimé depuis un tiers de son effectif par vagues successives. Mais l'essentiel des départs s'est fait au fil de l'eau dans la kyrielle de petites entreprises qui constituent le tissu économique local. L'industrie et la construction ont particulièrement souffert, touchant particulièrement les hommes. Joigny compte environ 850 chômeurs selon l'Insee. Les Restos du Cœur suivent en permanence 260 familles à Joigny et les communes alentour.


 

 

« Gauche ou droite, ils ne peuvent rien faire, c'est un mécanisme qui est rouillé », dit une habitante. Ce n'est pas l'avis de Nicolas Soret, le président de la communauté de communes (photo). Soret, 30 ans à peine, est aussi le maire-adjoint de Joigny : en 2008, ce fief de la droite longtemps dirigée par un cacique du RPR, Philippe Auberger, est passé à gauche, grâce à la division de la droite. Proche de Martine Aubry, Nicolas Soret espère bien ravir le siège de députée à l'élue sortante, l'UMP Marie-Louise Fort, aux prochaines législatives. Selon lui, la gauche va faire une percée aux législatives dans le département.

« Il y a un risque » que la circonscription passe à gauche, s'inquiète Isabelle Bourassin-Lange. Ce serait un séisme politique local. L'élue s'inquiète du score du FN, qui a fait une percée dans l'Yonne aux dernières cantonales : « Ce sera bordure pour Nicolas Sarkozy, dit-elle. Il y a une mode pour Marine Le Pen dans l'électorat ces derniers mois. Je mets en garde les électeurs contre cette attitude qui risque de provoquer un second tour entre Marine Le Pen et François Hollande, c'est évident. » L'élue défend mordicus son président, même si elle a quitté l'UMP à cause des divisions de la droite locale : « On parle souvent de la soirée au Fouquet's mais au Fouquet's on mange aussi des pizzas ! »

De son côté, Nicolas Soret mène campagne en insistant sur le sort réservé par l'Etat à la ville. Il estime que Joigny n'a pas eu assez de temps pour se retourner. « Entre l'annonce et le départ de l'armée, il s'est passé deux ans, le double n'aurait pas été un luxe », dit-il.

L'Etat, l'Union européenne et les collectivités territoriales se sont engagés à recréer en trois ans les emplois perdus en injectant 17 millions d'euros. Reste désormais à attirer des entreprises dans la nouvelle zone d'activités. La mairie veut faire de Joigny une capitale départementale de la formation. Dans l'ancien bâtiment de l'état-major de la base militaire, un centre de formation d'ambulanciers et d'aides-soignantes a ouvert. L'UIMM, le patronat de la métallurgie, va bientôt construire un pôle régional dédié à l'industrie. Un village d'artistes pourrait même s'installer dans les hangars où étaient stockées les cartes militaires.

Plus que jamais, Joigny parie sur sa proximité avec la région parisienne (1 h 10, avec un train par heure) pour se développer. Depuis quelques années, des banlieusards lassés des longs trajets quotidiens en RER louent ou achètent à Joigny, profitant d'un marché immobilier encore bas. Selon l'agence immobilière près du PMU, il s'agit plutôt de ménages modestes, gagnant un peu plus que le Smic. D'après la municipalité, leur arrivée a un peu compensé l'hémorragie due à la restructuration des services publics. Le matin, les trains régionaux à destination de Paris sont pleins. « Joigny est en train de devenir la grande banlieue de Paris », explique Aude Besson, une secrétaire médicale à la retraite. 

Il sera pourtant difficile de les attirer en masse si la présence des services publics continue de reculer.

 


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17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 18:26
Vendredi 16 Mars 2012 à 18:00

Anaïs Toro-Engel - Marianne

 

A l’occasion du sixième Forum international de l’eau, qui se tient à Marseille du 12 au 16 mars 2012, nous revenons sur des projets novateurs et de nouvelles solutions pour éradiquer les grandes problématiques autour de l'eau et son usage. Bien sûr, la route est encore longue avant de parvenir à l'instauration d'un véritable droit à l’eau pour tous.

 

(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)
(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)
« Le temps des solutions ­­­­­­» : l’ambition du Forum de l'eau est claire, apporter des réponses concrètes aux problèmes liés à l'eau. Nous le savons tous, même si l’eau abonde sur notre planète, tout le monde n’est pas égal en ce qui concerne son accès et sa consommation.
Le Conseil Mondial de l'Eau, organisation internationale fondée en 1996 et qui regroupe des Etats, ONG et organisations internationales autour du problème de l'eau dans le monde, organise ce grand rassemblement tous les trois ans. Et pour sa sixième édition, le Forum mondial de l’eau a mis l'accent sur l’innovation, et la participation citoyenne avec l’implication d’acteurs « organisés » de la société civile, notamment des ONG.

Guy Fradin, vice-président du Comité international du 6e Forum de l’Eau  : « Nous avons choisi de cibler les travaux du forum sur les solutions, car souvent l’on reproche à ce type de rencontre un aspect trop théorique et pas assez concret, se bornant à des analyses stratégiques, des généralités. Et derrière ce ciblage, il y a une incitation des partenaires à s’engager, donc à tout faire pour mettre en œuvre les projets présentés. »
 
Pour justement mieux faire connaître de nouveaux projets autour des grandes problématiques liées à l’eau (accès, potabilité, gouvernance), le site Des solutions pour l’eau a été mis en place il y a quelques mois en vue du forum. Au total, plus de 1 400 projets innovants ont été mis en ligne par différents acteurs, qui présentent ainsi leur travaux dont la plupart on déjà une application concrète. Cette plate-forme numérique perdurera au-delà de la rencontre et sera gérée par le Conseil international de l’eau.
Pour mieux faire connaître tous ces projets, un espace leur est dédié au Forum toute la semaine durant : le Village des solutions.

Des projets innovants

« C’est une nouveauté de scénarisation du Forum, poursuit Guy Fradin. Le village présente les innovations les plus frappantes, celles qui ont le plus retenu l’attention. Par exemple, ce kit présenté sous forme d’une valise et qui, fonctionnant à l’énergie solaire, peut transformer une eau de mauvaise qualité en eau potable avec un débit de trente litres par heure. Ou une autre solution, un peu plus intellectuelle : le projet de Wikiwater présenté par le Secours populaire, qui consiste en un réseau en ligne type Wikipédia mais entièrement consacré à l’eau. »
 
D’autres projets ont également retenu notre attention. Dans certains pays en voie de développement, le transport de l’eau est problématique : c’est une corvée difficile, souvent réservée aux femmes ou aux enfants. Le Keggo peut justement y remédier  : il s’agit d’un baril cylindrique de quarante litres avec une courroie métallique qui passe au milieu pour pouvoir ainsi faire rouler le bidon sans trop d'efforts et sur de longues distances.

Un projet d'apparence simpliste, mais dont l’efficacité a été prouvée dans certains quartiers autour de Cape Town (Afrique du Sud), également parce qu'il permet de maintenir l'hygiène de l'eau et d'éviter ainsi toute contamination .
 
Dans le même ordre d’idée, citons le projet des toilettes sèches, qui sont une bonne alternative au problème d’accès aux sanitaires. Le système d'évacuation classique des excréments est remplacé par une fosse remplie de sciure de bois située en dessous des sanitaires : le tout peut ensuite être réutilisé comme compost. Ce type de système est déjà utilisé notamment lors de certains festivals de musique, et a prouvé son efficacité. Une invention prometteuse d'autant plus qu'à l'heure actuelle, 2,5 milliards de personnes ne disposent pas de toilettes privatives.
 
L’eau n’est bien sûr pas dissociable de l’alimentation, et par conséquent de l’agriculture. Dans des pays arides, le manque d’eau peut justement être un fléau pour les agriculteurs ne disposant pas des moyens pour faire face à des périodes de sécheresse. Une invention testée dans des champs agricoles en Tunisie devrait leur faciliter la tâche : un diffuseur enterré combiné à de la micro irrigation.
L’irrigation des plantations est souterraine et se fait goutte à goutte, pour éviter le gaspillage. « Cette technologie utilise deux fois moins d’eau pour arriver au même rendement (…) et présente d’autres avantages, tel la baisse du recours aux herbicides, la réutilisation des eaux de pluie directement dans le diffuseur … »

De nouveaux concepts autour de l’eau

« Le forum est le temps fort d’une action qui se déroule sur le long terme, précise Guy Fradin. Trois domaines d’actions sont prioritaires : l’économie, pour éviter le gaspillage et la dégradation de l’eau, la mobilisation des ressources, par exemple en réutilisant les eaux usées, et le partage, avec une bonne gouvernance, une politique globale de conciliation pour éviter les conflits autour de la ressource. »
 
Même si de nombreux projets peuvent être mis en place, sans bonne gestion rien ne va.
La Commission Racine et Citoyenneté a ainsi organisé des groupes de travail autour « d’objectifs cibles », et notamment l’un d’entre eux nous a semblé particulièrement novateur : Eau et spiritualité.
Alain Cabras, maître de conférence à l’université Aix-Marseille et à Sciencespo Aix, y participe.

« Pour changer la vision matérialiste et technicienne de l’eau, en soi un peu limitée, nous cherchons à établir une vision plus respectueuse de l’eau comme élément fondamental à la vie et symbole dans certaines cultures et religions. La spiritualité ou l'éthique, consiste à rappeler en quoi l’eau est fondamentale pour toute civilisation, et ainsi développer une vision différente par rapport à l’eau et son usage. »
 
Le principe est donc d’établir un lien entre des héritages des différents cultures et religions pour déterminer des comportements globaux par rapport à l’eau, le but étant d’améliorer la vie de chacun en instaurant un « respect de l'eau ». Mais comment le concrétiser ? Alain Cabras poursuit :
 
« Nous allons faire une demande à l’ONU d’adoption d’une Charte universelle du droit à l’eau (pour l’accès universel) et du droit de l’eau, donc de la protection de l’eau comme élément fondamental par le biais d'une sorte de personnification de l’eau. »
 
Il est vrai qu’aujourd’hui, l’on a beaucoup tendance à parler d’or bleu, où l’eau est considérée comme une richesse économique plus que spirituelle, alors que le contraire serait préférable.
 
« Dans certaines cultures d’Amazonie, on ne doit rien jeter dans l’eau pour ne pas la blesser. L’enjeu que nous visons est ainsi de réintroduire une dose de sacré pour considérer l’eau comme un élément respectable. », note Cabras.
 
Pour espérer une prise de conscience autour de l’eau, il faut bien sûr que la mobilisation soit générale, et soutenue. De même que la plate-forme des solutions, les réflexions qui émergent de ces groupes de travail visent plus loin qu’un simple effet d’annonce, mais un réel changement des mentalités. Alain Cabras conclue :
 
« Notre projet porte l’espoir d’être un électrochoc pour la prise de conscience dans toutes les politiques à venir. Surtout qu’aujourd’hui, 50 % des eaux utilisées par les entreprises ou les collectivités sont gaspillées, ou ne sont pas réutilisées… L’eau n’est pas un bien comme un autre, et toutes les spiritualités se retrouvent sur ce point. »

Le grand écart

La prise de conscience mondiale autour de l’eau est en marche, et a d’ores et déjà eu des répercussions concrètes positives. En 2000, l’adoption des Objectifs millénaires pour le développement (OMD) avait parmi ses objectifs pour 2015 faire en sort que 88 % de la population mondiale ait accès « à des sources améliorées d’eau potable ».  L’objectif a déjà été atteint fin 2010, mais cela ne suffit pas : des millions de personnes demeurent à l’écart du développement, et sont exposés à toutes sortes de maladie dues à une eau contaminée, en particulier les enfants.
D’après un rapport de l’UNESCO de 2009 repris par Jean-Patrice Poirier dans son ouvrage L’eau, objectif du Millénaire ? :
« Près de 5 000 enfants meurent ainsi chaque jour. Oui, deux millions d’enfants meurent chaque année pour s’être désaltérés avec de l’eau polluée. »
 
Axel Ducourneau est anthropologue au CNRS, plus particulièrement à l’OHM (Observatoire homme-milieu), créé en juin 2009 à Téssékéré, au Sénégal. Il participe ainsi au projet de la Grande muraille verte, qui vise à lutter contre la désertification dans le Sahel, notamment avec le concours des populations locales dont l’une des préoccupations majeures est l’accès à l’eau au quotidien.

C’est riche de son expérience de terrain qu’il témoigne :
« Ce sont souvent les solutions les plus simples qui sont les plus efficaces, comme le projet de toilettes sèches ou de bidon mobile pour transporter l'eau. Mais le problème majeur reste la diffusion des solutions.»
Il a pris ces photos il y a quelques jours à Widou Thiengoli, dans le Ferlo (nord du Sénégal), ce qui nous donne un aperçu de la difficulté pour les populations locales de trouver de l'eau.
(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)
(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)

 

(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)
(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)

 

(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)
(Widou Thiengoli, nord du Sénégal - © Axel Ducourneau)
Pour Axel Ducourneau, venir au Forum pour la semaine c’est proprement passer d’un lieu où les gens souffrent au quotidien de la désertification et du manque d’eau, à un autre où l'on en parle sans connaître réellement ni la soif ni la peur de trouver un puit asséché.
 
« Je suis arrivé directement depuis le Sahel au Forum de Marseille, et j’avoue que la transition est un peu rude : passer de ces endroits où les gens ont besoin de l’eau pour leur vie, à celui-ci où les gens qui en parlent sont tous en costume. Mais le pouvoir et l’argent ne sont que d’un seul côté...»

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16 mars 2012 5 16 /03 /mars /2012 14:29

Le Monde.fr | 16.03.12 | 14h51   •  Mis à jour le 16.03.12 | 15h04

 
 

 

La compagnie Thalys exploite les trains entre Paris, la Belgique, l'Allemagne et les Pays-Bas.

La compagnie Thalys exploite les trains entre Paris, la Belgique, l'Allemagne et les Pays-Bas.AFP/DIRK WAEM


Bruxelles, correspondant - La compagnie Thalys, qui exploite les trains entre Paris, la Belgique, l'Allemagne et les Pays-Bas "lance le système des castes à l'européenne". C'est du moins l'avis de Marc Tarabella, un eurodéputé socialiste belge qui a vu rouge en découvrant le projet de la société – dont la SNCF et la SNCB sont les actionnaires – de regrouper désormais les catégories d'usagers en fonction du prix acquitté pour le billet pour "améliorer l'expérience de bord".

En clair, ceux qui achètent des billets à prix réduit, moyen ou élevé se verraient rassemblés en fonction du seul critère du prix de leur billet. Lequel serait donc l'indicateur de leurs ressources financières présumées, et donc de leur statut social.

Gageons, au passage, que cela pourrait réserver quelques surprises : le riche radin et le pauvre gaspilleur appartiennent au genre humain et donc sans doute aussi à la catégorie des usagers du chemin de fer. D'où, peut-être des cohabitations inattendues…

Thalys n'a, en tout cas, pas prévu plus de lumières tamisées, de sièges tout cuir ou de boissons fortes pour les uns plutôt que pour les autres : chaque usager se retrouvera, il faut le préciser, dans un wagon parfaitement semblable, quel que soit son statut.

 

SOIGNER LA "CLIENTÈLE BUSINESS"

Mais il convenait, semble-t-il, de soigner la "clientèle business". Car c'est la crise qui serait la cause de cette réforme assortie, il faut le noter, d'une augmentation des tarifs les plus avantageux : depuis le 12 mars ils sont, par exemple, passés de 25 à 29 euros pour un Paris-Bruxelles en 2e classe.

Selon Thalys, une enquête menée à bord des rames au cours des derniers mois a en effet prouvé que les cadres sont de plus en plus victimes de la rigueur et contraints de voyager en seconde classe plutôt qu'en première. La société Thalys devait dès lors céder à l'appel au "regroupement privilégié" (sic) formulé par ceux "qui apprécient d'être ensemble, parce qu'ils veulent travailler, utiliser Internet et être un peu au calme", comme le résume une porte-parole.

On offrira donc désormais à ces pauvres voyageurs riches un accès gratuit au Web et on les éloignera des sièges proches du bar… Selon les juristes il n'y aurait pas de discrimination, puisque Thalys n'interdit à personne de monter dans ses trains.

Juste "une stratégie commerciale qui surfe sur le snobisme", commente Edouard Delruelle, le président-adjoint du Centre belge pour l'égalité des chances. Stigmatisation des groupes, distinction sociale, séparation physique des gens "bien" et des autres : le train des différences roule à grande vitesse.

Jean-Pierre Stroobants


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16 mars 2012 5 16 /03 /mars /2012 14:26

Le Monde.fr avec AFP | 16.03.12 | 15h38   •  Mis à jour le 16.03.12 | 16h09

 
 

 

Les ouvrières de Lejaby, le 20 janvier 2010 à Issingeaux.

Les ouvrières de Lejaby, le 20 janvier 2010 à Issingeaux.AFP/THIERRY ZOCCOLAN


Le nombre de plans sociaux enregistrés par l'administration en 2011 s'est élevé à 953, soit le même niveau qu'en 2007 et moitié moins que lors de l'année noire de 2009, selon des données du service statistique du ministère du travail (Dares).

En 2009, le nombre de plans sociaux, techniquement appelés plans de sauvegarde de l'emploi (PSE), avait atteint 2 260. Avant ce pic, le nombre déclaré était de 1 300 en 2006, 957 en 2007, et 1 030 en 2008, et 1 180 en 2010. En janvier 2012, le nombre de plans sociaux a été de 63, un chiffre en retrait par rapport à janvier 2011 (85) et janvier 2010 (99).

Toute entreprise d'au moins 50 salariés qui procède au licenciement pour motif économique d'au moins 10 salariés sur une durée de 30 jours est tenue d'élaborer un plan de sauvegarde l'emploi et de le notifier à l'administration. Un PSE doit comprendre des mesures pour favoriser le reclassement des salariés, en interne si possible mais également en externe.

LES ENTREPRISES PRIVILÉGIENT D'AUTRES OPTIONS

Le nombre de PSE est un indicateur de tendance mais il ne reflète pas l'ensemble des emplois supprimés car il ne s'impose pas aux entreprises de moins de 50 salariés et le nombre de personnes concernées pour chacun n'a pas été précisé.

Les postes supprimés sans licenciement ne sont pas non plus comptabilisés. Or, ces dernières années, pour réduire leurs effectifs, les entreprises optent de plus en plus pour des dispositifs parallèles tels que les plans de départs volontaires, les ruptures conventionnelles ou la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) qui vise à prévoir les besoins de main d'oeuvre à terme.

Malgré le recul du nombre de plans sociaux en 2011, le chômage a d'aileurs atteint l'an dernier son plus haut niveau depuis douze ans avec 2,87 millions de demandeurs d'emploi sans activité comptabilisés fin décembre 2011. L'Unédic, organisme d'assurance chômage, envisage pour 2012 quelque 214 200 demandeurs d'emplois supplémentaires sur l'année.

 

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16 mars 2012 5 16 /03 /mars /2012 12:09

Le Monde.fr avec AFP | 16.03.12 | 13h04

 
 

Un cadre de l'entreprise de transport logistique Gefco, filiale de PSA, s'est pendu le 5 mars dans un local de la société, à Bordeaux, après avoir laissé un courrier demandant à ce que son geste soit qualifié d'accident du travail, a annoncé vendredi 16 mars le syndicat FO.

Hervé Marsollier, 46 ans, chef de l'agence Gefco de Bordeaux, et père de deux enfants, a laissé un courrier détaillant les causes de son "geste désespéré", transmis à l'AFP par la section FO de l'entreprise. Il y évoque des "objectifs intenables avec la perte de clients importants", "l'animosité et les réflexions acerbes" de l'un de ses responsables hiérarchiques et "l'insuffisance des moyens commerciaux" pour maintenir le chiffre d'affaires. Les "pressions" et "l'angoisse" l'ont conduit mi-février à consulter un médecin mais, en dépit des médicaments prescrits, son anxiété n'a pas faibli, raconte-t-il dans cette lettre écrite sur ordinateur, adressée aux représentants de FO, au bas de laquelle il a ajouté à la main "je vous remercie de bien vouloir défendre les intérêts de mon épouse".

 "ACCULÉ ET ABANDONNÉ"

"Je me sens acculé et abandonné par Gefco, les premiers éléments de résultat de février sont mauvais et c'est pour ces raisons que j'ai décidé aujourd'hui de mettre fin à mes jours", a-t-il encore écrit. Le cadre s'inquiète aussi des projets de la direction visant à supprimer l'activité de messagerie de Gefco, une société de 9 400 salariés transportant notamment des automobiles, présente dans 29 pays et filiale à 100 % de PSA, qui a annoncé mi-février son intention de s'en désengager du moins en partie.

La direction de Gefco a pour sa part indiqué à l'AFP qu'elle "s'associait pleinement à la tristesse de la famille", notant la "carrière exemplaire" de M. Marsollier au sein du groupe depuis 1995. Elle a précisé que la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail devrait déterminer si son suicide relève de l'accident du travail et qu'une enquête de police était également en cours. "L'ensemble du personnel est particulièrement affecté et nous mettons tout en œuvre pour accompagner les salariés de Bordeaux", a encore précisé une porte-parole, qui a indiqué n'avoir pas connaissance d'événements similaires récemment chez Gefco.

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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 17:13

 

| Par La rédaction de Mediapart
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Environ 200 métallurgistes de l'aciérie ArcelorMittal de Florange (Moselle) se sont heurtés à des forces de l'ordre remontées ce jeudi vers midi à proximité du QG de campagne de Nicolas Sarkozy. La gendarmerie mobile les a aspergés de gaz lacrymogène afin de les repousser vers le pont Mirabeau. Nicolas Sarkozy avait quitté son QG vers 11 h 30, non sans avoir souligné devant la presse que les métallos censés arriver quelques minutes plus tard n'étaient pas «représentatifs». Le responsable de la CFDT, Edouard Martin, qui a reçu plusieurs jets de gaz lacrymogène, se trouvaient pourtant parmi les 200 salariés.

 

 

 


 

 

Choqués par les échauffourées, la CFDT et la CGT ont fait savoir en début d'après-midi qu'elles ne se rendraient pas à l'invitation du chef de l'Etat. «On n'a jamais dérapé, on est reçu avec des gaz lacrymogènes. On n'ira pas à l'Elysée lundi», a expliqué à l'AFP Edouard Martin, responsable CFDT, la CGT confirmant de son côté une décision similaire. 

Les salariés se sont par la suite rendus au pied de la tour Eiffel, dont l'acier provient de Moselle. N'ayant pas obtenu l'autorisation de déployer une banderole sur l'édifice, ils l'ont posée à même le sol.

Venue «apporter le soutien du PS» aux salariés d'ArcelorMittal, la députée PS de Moselle Aurélie Filippetti a déclaré à l'AFP que «les heurts de la rue de la Convention étaient des violences inacceptables et scandaleuses». «On ne peut pas gazer les sidérurgistes le jeudi et les inviter à l'Elysée le lundi suivant», a-t-elle dit, dénonçant «un double langage»

Sarkozy était donc dans la Marne pendant ces événements. Interrogé par un journaliste, le chef de l'Etat a visiblement dérapé. Voici la vidéo, l'échange est repris en texte au dessous.

 

 

Le journaliste : Les gaz lacrymogènes vous vous en seriez bien passé non ? L'image est quand même assez...

Nicolas Sarkozy : Qu'est-ce que vous voulez que j'ai à foutre de ce que vous me dites ?

Le journaliste : J'en sais rien.

Nicolas Sarkozy : Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? Et vous, vous vous seriez pas bien passé, au lieu d'être sur le câble, sur le numérique ? Hé couillon va. Pardon... non parce qu'il est sympa, il est jeune.

 

 

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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 17:05

 

Marianne - Rédigé par Gérard Filoche le Jeudi 15 Mars 2012 à 12:38

 

La réalité est très loin des images d’Epinal qui nous présentent le « plan de sauvetage de la Grèce » comme un exercice d’équilibre entre les sacrifices « consentis » par le peuple grec et les « sacrifices » des banques. Les sacrifices ne sont nullement « consentis » par le peuple grec qui multiplie grèves et manifestations. Les « sacrifices » des banques ne sont en rien des sacrifices. La Grèce est loin d’être sortie d’affaire, au contraire. Quant à la crise de la dette publique européenne elle resurgit maintenant sous d’autres formes, tout aussi dangereuses.

Le « sacrifice » des banques

(Merkel et Sarkozy - Remy de la Mauviniere/AP/SIPA)
(Merkel et Sarkozy - Remy de la Mauviniere/AP/SIPA)
Les créanciers privés et les banques qui sont les principales créancières privées de la Grèce se sont-ils « sacrifiés », comme le proclament à grands renforts de violons plaintifs la quasi-totalité des médias, en « effaçant » 53,5 % de leurs créances, c’est-à-dire 107 milliards d’euros ?

Il suffit pour répondre à cette question d’imaginer ce qui serait advenu en cas d’impossibilité pour la Grèce de rembourser ses créanciers. La Grèce n’aurait pas obtenu les 130 milliards d’euros versés par le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et le FMI. Elle n’aurait donc pas pu faire face au remboursement de ses obligations arrivées à échéance (14,5 milliards d’euros à la fin du mois de mars). La panique aurait gagné les marchés financiers et se serait immédiatement étendue aux titres des dettes publiques italiennes et espagnoles qui représentent un total de près de 3 000 euros en grande partie détenus par les banques et les assurances de l’Union européenne.

C’est donc pour sauver leurs créances de près de 3 000 milliards d’euros et leur propre peau (une crise bancaire aurait immédiatement suivi ce défaut grec), que les banques et les assurances européennes ont accepté de « perdre » 106 milliards d’euros.

Ensuite, sur les 130 milliards soi-disant versés par le FESF et le FMI pour « aider la Grèce », 25 milliards d’euros seront aussitôt utilisés à recapitaliser les banques grecques et retourneront donc aux banques.  

Ensuite, la valeur des obligations grecques n’avaient plus rien à voir avec leur valeur d’émission. Une obligation de 100 euros lors de son émission (sa valeur faciale) ne valait plus sur le marché secondaire (la bourse) que 10 euros dans le meilleur des cas. Les nouvelles obligations reçues par les banques et les assurances en contrepartie de leurs anciennes obligations auront une valeur de 46,5 % de la valeur faciale des anciennes obligations. Soit une valeur de 46,5 euros pour une obligation de 100 euros qui ne valait plus que 10 euros sur le marché boursier. Un cadeau, donc, de 36,5 euros par obligation de 100 euros pour les banques !

Ensuite, les banques pourront faire jouer les assurances, les fameux CDS (Credit Default Swap) qu’elles avaient prises sur la dette publique grecque. Certes, d’autres banques devront cracher au bassinet les 3,2 milliards d’euros concernés mais se sont essentiellement des banques anglo-saxonnes, Morgan Stanley notamment.

Les banques et les assurances européennes s’étaient de toute façon déjà défaussées d’une bonne partie des titres de la dette publique grecque qu’elles avaient acquises aux dépens de la Banque centrale européenne (BCE) et du FESF. Un nouveau transfert, d’une rare discrétion, des dettes privées vers les dettes publiques, après celui de 2008-2009.

Les banques européennes avaient investi en titre de la dette publique grecque une partie des centaines de milliards d’euros que la Réserve fédérale américaine et la BCE leur avait fourni à taux zéro lors de la crise bancaire de 2008. Grâce à ce plan de sauvetage, elles auront sauvé l’essentiel de leurs fonds malgré l’échec de leur spéculation. Ce sera aux peuples européens de payer la facture puisque les dettes de la BCE et du FESF sont garanties par les Etats de l’Union européenne.

Les Grecs ne bénéficieront pas de l’ « aide » de l’UE et du FMI

L’argent sera versé sur un compte bloqué comme l’avait exigé Merkozy. Les sommes ne seront débloquées que pour recapitaliser les banques ou payer les créanciers de la dette grecque au fur et à mesure de leur arrivée à échéance.

Les Grecs ne verront donc pas la couleur d’un seul euro des 130 milliards d’euros de l’UE et du FMI, comme cela avait déjà été le cas pour le précédent prêt de 110 milliards. Ce plan de sauvetage n’est pas un plan de sauvetage de la Grèce, bien au contraire puisqu’il l’enfonce encore plus dans la récession et la misère sociale. C’est uniquement un plan de sauvetage des banques.

La dette publique grecque ne diminuera pas

La dette grecque s’élève à 365 milliards d’euro, c’est-à-dire à 160 % d’un PIB de 328 milliards d’euros fin 2011.

Merkozy et la finance annoncent qu’avec les « sacrifices » des banques et le prêt de 130 milliard d’euros, la dette grecque ne devrait plus s’élever qu’à 120 % du PIB de la Grèce en 2020. Pourquoi en 2020 ? Tout simplement parce que le prêt de 130 milliards du FESF et du FMI viendra s’ajouter à la dette publique actuelle de la Grèce. 106 milliards en moins et 130 milliards en plus, cela signifie à court terme une dette accrue de 24 milliards d’euros !

La Troïka (BCE, UE, FMI) prévoit pour arriver à une dette grecque de 120 % du PIB en 2020 une croissance de 1,1 % en 2012 et de 4 % par an ensuite. Ce scénario illustre parfaitement l’incroyable aveuglement de la Troïka. En 2011, le PIB de la Grèce a diminué de 6 %. Cela devrait être encore pire en 2012 et on ne voit pas comment la situation pourrait s’améliorer entre 2013 et 2020. Ce que la Troïka est incapable de comprendre c’est que les plans de destruction sociale imposée à la Grèce ont massacré sa consommation intérieure et que la généralisation de l’ « austérité » à l’ensemble de l’Europe détruisent ses débouchés extérieurs.

Il faudra bien, tôt ou tard, se rendre à l’évidence, la Grèce est insolvable, elle ne pourra jamais rembourser sa dette. La seule solution pour elle est d’annuler sa dette publique et d’éjecter de son sol les hommes en noir de la Troïka avec leurs plans de destruction sociale.

La démocratie grecque pulvérisée

La formule employée par le ministre de l’économie grec, Evángelos Venizélos, illustre parfaitement ce qu’il en est, aujourd’hui, de la démocratie grecque. Ce triste personnage s’est félicité d’une participation « massive » des créanciers grecs qui constitue « un vote de confiance » de ces créanciers. Voilà le seul « vote » qui compte pour le gouvernement grec actuel. Il faut dire que Venizélos, venus dans les bagages de Papademos doit son poste actuel de ministre aux marchés financiers qui avaient imposé ce nouveau gouvernement dit d’ « union nationale » après que Papandréou ait osé (pas longtemps, hélas) s’opposer à Merkozy en annonçant un référendum.  

Les sommes versées par le FESF et le FMI le seront sur un compte bloqué, contrôlé par la Troïka. Les nouvelles obligations émises par la Grèce seront soumises au droit anglais pour rendre plus difficile une restructuration ou une annulation de la dette grecque.

La Troïka siège en permanence à Athènes et se substitue de plus en plus au gouvernement et à l’Etat grec. Cela ne suffit pas à Merkel qui veut, de nouveau, imposer à la Grèce la présence d’un commissaire européen chargé d’administrer la Grèce.

La Troïka a exigé, avant les élections législatives, que les dirigeants des « partis de gouvernement » signe un document les obligeant à ne rien changer aux engagements pris par le gouvernement de Papadémos. Une façon évidente d’annoncer que ses élections ne serviront à rien, que le suffrage universel n’a plus aucune valeur.

Les élections législatives sont sans cesse repoussées. Elles devaient avoir lieu en février, le gouvernement parle maintenant de mai ou de juin. Il faut dire que les sondages donnent 40 % des suffrages aux partis de gauche qui refusent les plans de destruction sociale. Le PASOK, déjà affaibli par le refus courageux de 22 de ses députés de voter la dernier plan de destruction sociale, n’obtiendrait plus que 10 % des voix alors qu’il avait recueilli 44 % des suffrages en 2009.

La politique des oligarques européens est une quadruple catastrophe

Une catastrophe démocratique comme nous  venons de le voir. Une catastrophe sociale avec les plans de destruction sociale à répétition imposés au peuple grec. Une catastrophe économique puisque ces plans plongent la Grèce dans une récession de plus en plus profonde.

Une catastrophe financière, enfin, puisque le déficit public de la Grèce s’accroît chaque année de 6 ou 7 %, contrairement aux objectifs des oligarques européens. Selon le dernier rapport de la Troïka, la Grèce pourrait revenir sur les marchés financiers en 2015. C’est complètement farfelu. Il faudrait pour cela que les marchés financiers exigent de la Grèce des taux de l’ordre de 5 % pour acquérir les obligations qu’elle émettrait afin de rembourser les titres de sa dette publique arrivés à échéance. Cela n’a aucun rapport avec la réalité : le taux de rendement des obligations grecques exigé par la finance est aujourd’hui supérieur à  34 % sur le marché secondaire (la bourse). L’hebdomadaire allemand « Der Spiegel » du 4 mars affirmait que la Troïka, dans une première version de son rapport, avait écrit que ce retour de la Grèce sur les marchés financiers était loin d’être évident et que les besoins en financement de ce pays pourraient alors atteindre 50 milliards d’euros entre 2013 et 2020. Ce passage, selon « Der Spiegel », avait été retiré à la demande du gouvernement allemand.

La crise de la dette publique européenne est, hélas, loin d’être terminée

Sarkozy, à l’issue du sommet européen de Bruxelles, le vendredi 2 mars proclamait : « nous ne sommes pas sortis de la crise économique mais nous sommes en train de tourner la page de la crise financière ». Il n’avait toujours pas compris qu’il y avait un rapport étroit entre crise financière et crise économique. Sous prétexte de répondre à la crise financière en réduisant les déficits à marche forcée, les « plans de rigueur » imposés aux pays européens plongent leurs économies dans la récession. La récession, à son tour, empêche toute réduction des déficits publics et accroît la crise financière.

Pour sortir de ce cercle vicieux, les oligarques européens veulent imposer des « réformes de structure ». Ainsi, en Espagne, au nom de la lutte contre le chômage, le chef du gouvernement, Mariano Rajoy entend-il imposer une réforme du marché du travail qui passe par une suppression de toute entrave aux licenciements, une durée de stage avant titularisation passant de six mois à un an. La meilleure recette pour encore augmenter le chômage et accentuer la récession de l’avis des syndicats espagnols (UGT et CCOO) qui appellent à une nouvelle grève générale le 29 mars prochain. En attendant, la Commission européenne « attend des explication » et envoie ses « inspecteurs » à Madrid.

Sarkozy veut nous faire croire que le répit relatif que connaissent aujourd’hui les taux d’intérêts de l’Espagne et de l’Italie (5 à 6 % au lieu de 6 à 7 %) serait dû au pacte Merkozy. C’est entièrement faux, ce pacte aboutit exactement à l’effet inverse en enfonçant encore plus l’Europe dans la récession.

Le répit donné à ces deux pays a une seule origine, les 1 018 milliards d’euros prêtés aux banques européennes par la BCE au taux de 1 % : 489 milliards en décembre 2011et 539 milliards en mars 2012. Les banques (en particulier italiennes et espagnoles) utilisent les fonds qu’elles ont obtenus aux guichets de la BCE pour acheter des titres des dettes publiques espagnoles et grecques et faire baisser leurs taux de rendement. Mais la BCE aura du mal à renouveler ce type de crédit car les marchés financiers commencent (à juste titre) à s’inquiéter de l’addiction des banques à ce type de crédit. Et peut-être aussi les peuples espagnols et italiens commenceront-ils à se poser la question de savoir pourquoi les banques prêtent à l’Espagne et à l’Italie à des taux supérieurs à 5 % alors qu’elles obtiennent cet argent au taux de 1 % auprès de la BCE ?

A peine signé, le traité Merkozy ne peut déjà plus s’appliquer

A peine le pacte budgétaire était-il signé (et non ratifié), le 2 mars, par 25 pays européens,  que les Pays-Bas et l’Espagne annonçaient qu’ils ne pourraient pas l’appliquer.

Le pays le plus acharné à imposer la « règle d’or » du pacte budgétaire de Merkozy, les Pays-Bas, annonçait que son déficit public atteindrait 4,5 % du PIB en 2012 et 4,1 % en 2013. Très loin des 3 % auxquels le gouvernement des Pays-Bas s’était engagé.

Le chef du gouvernement conservateur de l’Espagne annonçait, lui aussi, qu’il ne pourrait tenir les objectifs fixés par le traité Merkozy. Le  déficit public s’élevait à 8,51 % du PIB espagnol en 2001 et Mariano Rajoy ne voyait pas comment il pourrait atteindre les objectifs de 4,4 % en 2012 et de 3 % en 2013.

Les malheurs des oligarques européens ne s’arrêtent pas là. Les marchés financiers semblent maintenant comprendre (à la différence de Sarkozy) que, sans croissance économique, la détention des titres de la dette publique portugaise sera de plus en plus risquée. Et comme les prévisions de croissance négative au Portugal dépassent les 5 % en 2012, le taux de rendement des obligations portugaises à 10 ans atteignent maintenant 12,45 %. Ce qui rend illusoire la possibilité d’un retour du Portugal sur les marchés financiers en 2014. Il ne restera plus alors au Portugal que deux solutions : faire défaut de sa dette ou demander un nouveau prêt à la Troïka. Le Portugal apparaît donc maintenant comme le nouveau maillon faible de l’Union européenne.

Pire que tout, pour les oligarques européens, la démocratie qu’ils veulent à tout prix mettre au pas leur fait obstacle dans trois pays européens.

L’Irlande où l’annonce d’un référendum sur le traité Merkzoy leur à fait l’effet d’une douche glacée.

 La France où l’élection présidentielle pose un gros problème à Merkozy dans la mesure où l’élection de François Hollande signifierait la disparition de la moitié de ce duo de droite et la volonté du nouveau gouvernement français de renégocier le traité.

L’Allemagne elle-même, enfin, puisque sa constitution exige une majorité des 2/3 pour ratifier le traité européen alors qu’une partie de la coalition de droite refuse le traité (pour ne pas « aider » ces horribles Grecs) et que le SPD et les Verts posent leurs conditions à ce vote : l’adjonction d’un volet destiné à assurer la croissance économique.  

Gérard Filoche
Jean-Jacques Chavigné

Le plan de Merkozy et de la finance

Ce plan comprend trois volets :

Premier volet : un prêt de 130 milliards d’euros à la Grèce financé par le FESF (112 milliards d’euros) et le FMI (18 milliards d’euros). L’octroi de ce prêt est conditionné à la réalisation des deux autres volets.

Deuxième volet : un abandon de créances de 107 milliards d’euros par les créanciers privés de la Grèce (banques, assurances, fonds spéculatifs…)
Les créanciers privés de la dette publique grecque détiennent des titres de cette dette pour un montant de 206 milliards.

Les créanciers privés qui détiennent 83, 5 % du montant total de ces titres (172 milliards d’euros) ont « volontairement » accepté de diminuer leurs créances de 53,5 %. Un titre qui valait 100 euros lors de son émission (sa valeur faciale) ne vaudra plus que 46,5 euros.

Le parlement grec a ensuite décidé d’actionner la « clause d’action collective » et tous les créanciers privés des obligations grecques régies par le droit grec verront la valeur faciale des obligations de l’Etat grec qu’ils détiennent diminuée de 53,5 %. Cela concerne au total 95,7 % des 206 milliards d’euros, soit 107 milliards d’euros.

En contrepartie de leurs anciennes obligations, les créanciers privés recevront des obligations émises par le FESF pour 15 % de la valeur initiale de leurs obligations et de nouvelles obligations grecques pour 31,5 %. Les 53,5 % restant seront « perdus ».

Troisième volet : un nouveau plan de destruction sociale infligé au peuple Grec. Ce plan (voir D&S de janvier 2012), la pire agression qu’un peuple européen ait eu à subir en temps de paix depuis des siècles, a été voté, en février 2012, par un Parlement grec assiégé par le peuple grec.
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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 16:51

 

Rue89 - Tribune 15/03/2012 à 17h06
Jean-François Corty | Médecins du monde
Olivier_Bernard | Médecins du monde
Peut-on encore qualifier le système de santé français de meilleur au monde alors qu'il répond de moins en moins aux besoins des personnes précaires ? Médecins du monde (MDM) pose la question aux candidats aux élections présidentielles et législatives.

Si l'accès aux soins est un droit reconnu à tous, il n'est pas effectif pour tout le monde, même en France où le plateau technique médical est l'un des plus perfectionnés.

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Désormais, bénéficier de soins curatifs et préventifs semble relever de plus en plus du parcours du combattant dès lors que l'on a des moyens financiers limités, que l'on soit Français ou pas.

Les centres de MDM ne désemplissent pas. Les équipes mobiles multiplient les interventions auprès des publics qui ne se rendent pas dans les lieux de soins et dont les besoins vitaux les plus élémentaires – avoir un toit, à manger et un accès à l'eau potable – ne sont pas satisfaits.

Ces personnes accèdent de plus en plus difficilement au système de soins. Ou elles n'arrivent pas à faire valoir leurs droits à la couverture maladie sans une aide préalable – alors que les dispositifs de lutte contre les exclusions sont censée les protéger. Conséquence : près d'un quart de nos patients ont consulté de façon tardive, phénomène en nette hausse par rapport aux années précédentes.

Rougeole et tuberculose font leur retour

Les enfants, dont la fréquentation dans ces centres reste importante (12%) n'ont toujours pas accès, pour bon nombre d'entre eux, à la vaccination. Ni même à une simple couverture maladie alors que des épidémies à potentiel létal (rougeole, tuberculose) font leur retour en métropole et en Europe.

Il est certain que la crise économique mondiale contribue à l'aggravation des inégalités sociales de santé – avec la recrudescence du chômage, des emplois précaires et du surendettement. Mais c'est surtout la remise en cause de notre système de santé solidaire ainsi que les effets collatéraux de politiques sécuritaires sur les enjeux de santé publique qui concourent à la dégradation de l'accès aux soins des personnes précaires.

Les filets de protection sociale s'amenuisent au rythme des réformes restrictives de la Sécurité sociale. Elles mettent à mal, au nom d'une idéologie néolibérale affirmée, le principe de solidarité qui fondait pourtant le projet issu du Conseil national de la Résistance.

De fait, on assiste à une baisse des remboursements de l'assurance maladie, une augmentation des franchises, du forfait hospitalier et donc du reste à charge.

Des réponses publiques sécuritaires

Par ailleurs, 6% des assurés – soit quatre millions de personnes – n'ont pas de complémentaire santé. Parmi eux, certains ont des situations paradoxales : en raison d'un effet seuil, une partie se retrouve « trop pauvre » pour payer une mutuelle mais « trop riche » pour bénéficier de la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C). C'est le cas des personnes allocataires de certains minima sociaux comme l'allocation aux adultes handicapés ou le minimum vieillesse.

Ces éléments permettent de comprendre entre autre qu'en 2011, 30% des Français ont déclaré retarder ou renoncer aux soins faute de moyen.

Dans ce contexte s'ajoutent des réponses publiques souvent plus sécuritaires que sociales, notamment envers des populations à la marge que sont les personnes se prostituant, les usagers de drogue, les personnes à la rue et les migrants, qu'ils soient citoyens européens ou pas.

En effet, le délit de racolage passif (réintroduit dans la loi pour la sécurité intérieure en 2003) a eu pour effet de relayer les personnes se prostituant vers de lieux plus isolés, plus exposés aux violences et aux pratiques à risque. Dans ces conditions, les programmes de prévention contre le VIH sont moins efficaces.

Autre exemple : l'épidémie d'hépatite C qui frappe près de 60% des usagers de drogue par voie intraveineuse, sans réponse adaptée du droit commun alors que l'Inserm recommande la mise en place de dispositifs innovants tels les salles de consommation supervisées qui ont fait leurs preuves à l'étranger.

Lutter contre l'instrumentalisation de la médecine

Par ailleurs, la fréquence accrue des expulsions des lieux de vie sans proposition de relogement, la remise en question de dispositif tels que l'aide médicale d'état (AME) et le droit au séjour pour les étrangers gravement malades (DASEM), empire les conditions de vie et d'accès aux soins des patients d'origine étrangère – une logique de nuisance délibérée pour les dissuader de rester sur le territoire français.

Cette mise en danger physique à court et moyen termes traduit donc une tension entre des enjeux sécuritaires et de santé publique, le plus souvent au dépend de ces derniers.

On l'aura compris, défendre un système de santé solidaire équitable et lutter contre l'instrumentalisation de la médecine dans des stratégies sécuritaires, c'est contribuer à un accès aux soins de meilleure qualité à moindre coût pour tous.

 

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