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10 décembre 2012 1 10 /12 /décembre /2012 16:44

 

 

Rue89 - Lumbagos 10/12/2012 à 12h51
Rozenn Le Saint | Journaliste

 

Les vérificateurs, tel Rémy Garnier dans « l’affaire Cahuzac », n’examinent plus que de gros dossiers... avec moins de moyens. Et tant pis pour les milliards perdus.

 


Rémy Garnier dans Le Parisien (Capture d’&eacute ; cran du Parisien.fr)

 

L’homme au centre de l’affaire Cahuzac était surnommé « Columbo » par ses collègues, pour sa propension à jouer les fins limiers. C’est lui, Rémy Garnier, qui le premier a soupçonné l’actuel ministre du Budget d’avoir ouvert un compte en Suisse. Il avait rédigé une note sur le sujet pour alerter sa hiérarchie.

Rémy Garnier était alors un « vérificateur fiscal », rattaché à la brigade d’Agen (Lot-et-Garonne). Un métier malmené par les réductions de moyens et d’effectifs, et dont l’efficacité face à la fraude risque de s’émousser. Enquête.

« Les collègues n’ont plus le temps de nous préparer les dossiers »

Jean-Jacques Feitour est en quelque sorte le « Columbo » de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). Il est vérificateur au fisc, comme l’était Rémy Garnier.

Le délégué syndical Solidaires malouin regrette les 13 500 suppressions de postes en cinq ans à la Direction générale des finances publiques (DGFIP), née de la fusion des Impôts et du Trésor public. Car, par manque de personnel, les fonctionnaires des impôts n’ont plus le temps de contrôler les resquilleurs. Mais ce n’est pas tout :

« Les collègues nous préparaient des dossiers bien ficelés avant que nous partions sur le terrain vérifier la comptabilité des entreprises. Ils n’en ont plus le temps. »

Surtout, les agents administratifs, les plus touchés par les baisses d’effectifs, constituent le premier barrage contre la fraude fiscale (fausses déclarations, organisation d’insolvabilité, etc.), l’œil expert qui déclenche le processus de vérification.

Des contrôleurs... qui reçoivent le public

David Cocault contrôle les dossiers fiscaux à Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor). Pour ce représentant de Solidaires, syndicat majoritaire à la DGFI :

« La saisie des déclarations est laissée à des auxiliaires non formés, qui, eux, ne détectent pas les anomalies en les lisant. »

Quant aux contrôleurs, ils doivent maintenant recevoir le public. Pendant ce temps-là, ils ne sont « pas à 100% » à leur notre mission : le contrôle fiscal.

« Nous n’avons plus les moyens de vérifier les montants des frais réels professionnels déclarés, par exemple, alors que certains sont clairement douteux. »

« Le seul ministère qui rapporte de l’argent ! »

Depuis 2007 et le lancement par Nicolas Sarkozy de la Réforme générale des politiques publiques (RGPP), censée réaliser des économies, deux départs à la retraite sur trois ne sont pas remplacés aux Impôts et au Trésor public. Et l’ère Hollande n’annonce pas de changement.

Pour 2013, plus de 2 000 suppressions de postes sont annoncées. Sauf que ces coupes dans les effectifs ont une incidence directe sur les recettes de l’Etat, comme l’explique une employée de Pantin (Seine-Saint-Denis).

« Le ministère de l’Economie, dont on dépend, est le seul qui rapporte de l’argent !

Après on nous répète que la lutte contre la fraude fiscale est primordiale. C’est du pipeau, on ne nous donne pas les moyens de contrôler ! »

En 2013, le gouvernement se fixe même comme objectif de récolter un milliard d’euros supplémentaire sur les 3 à 5 milliards récupérés chaque année par la DGFIP dans sa croisade fiscale. Une goutte d’eau dans l’océan de fraudes : tous les ans, entre 40 et 50 milliards d’euros échappent aux filets de l’Etat. Le paradoxe est aussi souligné par Véronique Grataloup, de Solidaires, qui travaille à la fiscalité immobilière de Lyon :

« Supprimer les postes qui font rentrer de l’argent, c’est se tirer une balle dans le pied ! »

Peu de vérifications sur la redevance télé

La liste des fraudes faciles car non contrôlées s’allonge à mesure que les effectifs de la DGFIP s’affinent. Une employée administrative de Seine-Saint-Denis détaille :

« Il y a des petits malins qui savent où on en est ! Ils peuvent continuer à ne pas déclarer leur téléviseur pour ne pas payer la contribution à l’audiovisuel public puisque les agents censés les contrôler ne sont que trois dans le département. Ils ne visiteront pas l’ensemble des foyers fiscaux ! »

Cette fonctionnaire dénonce un autre filon :

« Certains savent exactement combien d’heures déclarer pour toucher une prime pour l’emploi importante. On devrait leur demander des justificatifs et la leur retirer, mais la vérification n’occupe plus que 5% de notre temps, c’est pourtant la tâche la plus intéressante, celle qui fait marcher le ciboulot !

Quand on détecte des éléments douteux, on les envoie à la cellule de contrôle. Mais ils étaient quatre et ils ne sont plus que deux. Eux aussi sont submergés… Beaucoup de cas passent à l’as ! »

« Ça va craquer dans tous les sens »

Davantage d’objectifs inatteignables et de dossiers à traiter à la chaîne, des files d’attente qui s’allongent à l’accueil, des coups de fils incessants de contribuables perdus dans leur télédéclaration ou qui demandent des délais de paiement… Et inévitablement, davantage de stress, comme en témoigne Dominique Scotto, de la DGFIP de Nantes (Loire-Atlantique) :

« De plus en plus de copines pleurent dans les couloirs. Les gens dépriment, on gère trop de choses, ça va craquer dans tous les sens. »

Du côté de la direction, on met en avant un taux d’absentéisme constant depuis cinq ans, autour de 6%, et surtout, un arsenal de mesures face aux risques psychosociaux :

  • un réseau de médecins du travail,
  • un guide de prévention,
  • la mise en place d’un tableau de bord de veille sociale,
  • un cursus de formation aux conditions de vie au travail.

Une petite maison sur une balance (Images_of_Money/Flickr/CC)

 

Martine Opportun, représente Solidaires au Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de la DGFIP de Pornic, est bien placée pour témoigner de la montée des risques psychosociaux et de la perte de sens du travail des agents, dont la moyenne d’âge atteint 47,5 ans.

« Quand on dit qu’on en a plein le dos, c’est au sens propre et figuré. Les collègues sont arrêtés pour des lumbagos ou des lombalgies de plus en plus longtemps, ils décompressent en même temps.

Par manque de personnel, le contrôle fiscal est axé sur les dossiers les plus rentables, dits “à fort enjeu fiscal” : ceux-là sont épluchés de A à Z. Tous les contribuables ne sont plus traités de manière égalitaire, on perd le cœur de notre métier ! »

C’est aussi le sens de l’interrogation d’un contrôleur du Maine-et-Loire :

« Notre hiérarchie nous dit de nous donner des priorités, or c’est un choix politique ! De quel droit, nous, fonctionnaires, déciderions-nous de qui peut s’en mettre plein les fouilles sur le dos de l’Etat et qui ne peut pas ? »

La direction elle, rappelle « l’impossible exhaustivité ».

 

 

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10 décembre 2012 1 10 /12 /décembre /2012 16:29

 

 

Le Monde.fr | 10.12.2012 à 10h05 Par Rafaële Rivais


 
Vous n'avez pas encore d'éthylotest dans votre voiture ? Pas de panique ! Le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, a reporté la verbalisation au 1er mars 2013.

Contralco, l'entreprise de l'Hérault devenue le leader mondial de l'éthylotest à usage unique, monte au créneau. L'entreprise, qui avait été la principale bénéficiaire de la décision prise par Nicolas Sarkozy le 30 novembre 2011 d'imposer un éthylotest dans les voitures, risque d'être la principale perdante d'un éventuel contrordre de Manuel Valls, le ministre de l'intérieur.

M. Valls a reporté la date d'entrée en vigueur de la verbalisation au 1er mars 2013, en raison des difficultés d'approvisionnement. Il a ensuite décidé de recueillir l'avis du Conseil national de la sécurité routière sur le sujet. Il y a fort à parier que les experts contesteront l'utilité de l'éthylotest dans la lutte contre l'alcoolisme et qu'ils rappelleront son manque de fiabilité.

 

Lire aussi : Ethylotests : rien ne presse, sur le blog de Rafaële Rivais"


Contralco, qui est basée dans l'Hérault, a décidé d'en appeler aux élus de ce département, dans une lettre ouverte que la presse régionale a publiée le 4 décembre : "Cette absence de continuité de l'Etat nous abasourdit... ", écrit-elle. Elle assure que "le retrait pur et simple de ce décret (...) mettrait de fait en danger notre société et des emplois vitaux pour bien des familles de notre territoire". Elle affirme que le programme d'investissement de 3,7 millions d'euros prévu pour 2013 est "remis en cause". Elle en appelle aux élus de l'Hérault : "Nous vous demandons aujourd'hui d'être à nos côtés pour défendre le made in France  en matière de prévention routière."

Rafaële Rivais

 

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10 décembre 2012 1 10 /12 /décembre /2012 15:43

 

Le Monde.fr avec AFP | 10.12.2012 à 15h06 • Mis à jour le 10.12.2012 à 15h13


 
Quarante-deux banques contribuent au calcul quotidien du taux interbancaire européen, déterminé comme le Libor sur une base déclarative.

La Commission européenne s'apprête à mettre en cause pour collusion des banques membres du panel de l'Euribor, le principal taux de référence du marché interbancaire en zone euro, sous le coup d'une enquête depuis plusieurs mois, rapporte lundi 10 décembre le Wall Street Journal. Quarante-deux banques contribuent au calcul quotidien de l'Euribor pour les échéances allant d'une semaine à un an, déterminé sur une base déclarative.

L'autre taux de référence du marché interbancaire, le Libor, est actuellement au centre d'un scandale de grande ampleur au Royaume-Uni, après la mise au jour de manipulations effectuées par la banque britannique Barclays de 2005 à 2009.

"Il s'agit de notre enquête qui concerne le secteur des produits financiers dérivés basés sur l'Euribor", a commenté le porte-parole de Joaquin Almunia, le vice-président de la Commission européenne et commissaire chargé de la concurrence. Il a refusé de confirmer les dires du quotidien américain, et s'est contenté de rappeler que des inspections ont été menées en octobre 2011.

 

 AMENDES DE PLUSIEURS MILLIONS D'EUROS

"C'est une enquête que nous considérons comme une de nos priorités. Pour autant, je ne peux pas en dire plus, si ce n'est que l'enquête se poursuit et notamment je ne peux pas donner le nom des banques qui sont concernées par cette enquête", a ajouté le porte-parole.

Selon la presse, la banque suisse UBS serait proche d'un accord avec les autorités britanniques et américaines pour éviter d'éventuelles poursuites. En juin, Barclays avait accepté de verser 453 millions de dollars dans le même but. Des enquêtes ont été ouvertes dans plusieurs pays, y compris en France où le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire après la plainte d'une actionnaire de la Société générale.

L'Euribor-EBF, émanation de la Fédération bancaire européenne (EBF) qui a la responsabilité de l'Euribor, a régulièrement fait valoir que la fiabilité supposée de ce taux était, entre autres, attribuable à la taille du panel des banques participantes, bien supérieur à celui du Libor (18).

 

Lire : Scandale de l'Euribor : la Société générale et le Crédit agricole à leur tour impliqués (lien abonnés)

Lire aussi :  Libor, Euribor : des archaïsmes à réformer d'urgence (lien abonnés)



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9 décembre 2012 7 09 /12 /décembre /2012 19:11

 

Rue89 - Bercy bûche 08/12/2012 à 16h19

 

On se souvient du tollé provoqué dans le milieu de la restauration par l’annonce du pacte de compétitivité prévoyant une hausse du taux intermédiaire de la TVA de 7% à 10%. Les restaurateurs n’étaient pas les seuls concernés, le bois, qui représente 50% des énergies renouvelables utilisées en France, est également visé par cette mesure.

Un contresens au regard de la transition écologique annoncée par François Hollande lors de la conférence environnementale – à laquelle la Fédération nationale du bois (FNB) n’a pas été conviée.

Une « taxe anti-bois-énergie »

La modification des taux de la TVA doit entrer en vigueur à partir du 1er janvier 2014. Un délai que comptent exploiter les acteurs de la filière du bois pour faire entendre leur voix et défendre leur compétitivité.

 

 

Laurent de Normandie, président de la FNB

Interview sur France 3

Nicolas Douzain-Didier, délégué général de la FNB, estime que « l’Etat augmente la TVA sur le bois de manière plus importante que sur les autres énergies ».

Une augmentation qui intervient alors même que le pacte de compétitivité met en avant « une baisse du taux réduit (de 5,5% à 5%), qui concerne essentiellement les produits de première nécessité (alimentation, énergie) ». La TVA appliquée à la partie abonnement des factures de gaz va ainsi baisser.

La décision est absurde pour Douzain-Didier :

« Le bois est produit en France [troisième pays européen pour sa surface forestière, ndlr] alors que le gaz est importé. Cela va contribuer à la dégradation de notre balance commerciale. »

Il ajoute que « le bois est une des énergies les plus accessibles (environ 60 euros le stère) et donc très utilisée par les catégories les plus populaires, ce qui en fait un produit de première nécessité ». Un communiqué de la FNB, relayé par plusieurs sites spécialisés, évoque une taxe « anti-bois-énergie ».

« L’Etat n’en verra pas la moitié »

5% des Français se chauffent au bois
  • La France fait partie des plus gros producteurs de bois rond de l’Union européenne : 54 millions de mètres cubes en 2011 (Eurostat).
  • Les entreprises de la transformation du bois emploient 300 000 personnes en France.
  • La France comptait, en 2010, 2 millions de ménages se chauffant principalement au bois, d’après une étude réalisée par le Ceren. Si l’on intègre les systèmes d’appoint fonctionnant au bois, on arrive à 7 millions, soit presque 5% de l’ensemble des foyers français.

Pour la FNB, même si le taux de TVA sur la consommation de gaz va enregistrer elle aussi une hausse (de 19,6% à 20%), celle-ci n’est pas comparable aux trois points d’augmentation que va devoir encaisser la TVA du bois-énergie.

Douzain-Didier rappelle au passage que le bois était déjà passé en 2012 du taux bas le plus bas au taux intermédiaire, passant de 5,5% à 7%.

Selon la FNB, le gouvernement devrait encaisser théoriquement 40 millions d’euros grâce à ce changement de taux. Mais Douzain-Didier estime que « l’Etat n’en verra pas la moitié », la faute au développement de la vente non-déclarée que provoquerait une telle hausse.

Un argument renversé par ceux qui soutiennent cette nouvelle TVA sur le bois. La vente au noir et l’autoconsommation, bien qu’impossibles à évaluer, sont largement répandus dans le domaine et rendent finalement la hausse moins douloureuse.

Paradoxalement, les crédits d’impôts sur les chaudières vont perdurer jusqu’en décembre 2015. Ces derniers ont favorisé l’installation de système de chauffage au bois collectif.

 

 

Reportage France3 : exemple de chaudière collective au bois

La date limite de dépôt des amendements portant sur la loi de finances rectificative ayant été atteinte, le travail parlementaire sur le sujet vient de débuter.

Le gouvernement a déjà déposé un amendement sur les changements de taux au 1er janvier 2014 :

  • « le taux réduit, celui qui porte sur les produits de première nécessité, en particulier l’alimentation, sera ramené de 5,5% aujourd’hui à 5%.
  • le taux intermédiaire sera porté de 7% aujourd’hui à 10%.
  • enfin, le taux normal sera porté de 19,6% à 20%.

Voir le document

(Fichier PDF)

Au total, près de 300 amendements ont été déposés et seront débattus au cours de la semaine prochaine.

Douzain-Didier affirme avoir reçu le soutien de députés de tous les bords politique pour un amendement (document ci-contre) redéfinissant le bois comme besoin de première nécessité, afin de ramener le taux à 7%. Le texte n’est pas encore disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

De son côté, le cabinet du ministre du Budget indique qu’aucune position de principe n’a encore été retenue, une mise au point entre les ministères concernés (l’Ecologie et l’Agriculture) devant avoir lieu lors des débats à l’Assemblée.

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9 décembre 2012 7 09 /12 /décembre /2012 19:02

 

Rue89 - Le Yéti
voyageur à domicile
Publié le 09/12/2012 à 12h29

 

Elles sont terribles, ces périodes de crises exacerbées qui ébranlent nos certitudes, pulvérisent les cadres sécurisants que nous nous imposions jusqu’alors. Le doute nous assaille. Notre assurance vacille. Tenez, notre sacro-sainte démocratie, par exemple. Et si c’était elle, le problème à résoudre ?

Chaloupes ballotées par la tempête

La démocratie, nous dit-on, c’est le consensus majoritaire. Mais que vaut un consensus quand il est verrouillé de toute part par les médias, les puissances d’argent, par les délégations pyramidales paralysantes (Conseil constitutionnel, Conseil d’Etat, Commission européenne...), à l’occasion secondées par des escadrons de gendarmes mobiles ?

Qu’est-ce qu’un consensus quand il consiste à se choisir non plus un équipage correct et son capitaine, mais une chaloupe de sauvetage un peu moins pire (en apparence) que la précédente (la chaloupe « socialiste » est déjà en passe de couler à peine mise à l’eau) ?

La démocratie est une jolie goélette pour mer calme. Mais un rafiot calamiteux par gros temps. Le consensus démocratique est la proie des vagues et des vents mauvais, prêt à chavirer dans les pires excès. L’esprit critique qui est la condition sine qua non de l’expression démocratique cède à la panique et au désarroi.

Aujourd’hui, la démocratie, celle qu’ils nomment ainsi, n’est plus que l’ultime paravent de bienséance utilisé par des puissants décatis pour conserver coûte que coûte leur pouvoir. Vous verrez qu’avec 70% d’abstention et 27% de suffrages exprimés (eh non, ils ne comptent toujours pas les votes blancs), ceux-là parleront encore de « démocratie représentative ».

Majorité des rues contre majorité des urnes

La « Grande mutation » en cours ne se fera pas sous les auspices des isoloirs. Pour deux raisons :

  • La première, que nous avons déjà vu dans un précédent épisode, vient de ce que les vieilles élites aux manettes ne le permettront pas. Trop d’intérêts privés à défendre. Trop de positions à conserver.
  • La seconde tient à ce que l’état de panique et les réflexes régressifs des majorités en désarroi ne s’apaisent en rien, bien au contraire, dans le secret des isoloirs. Faut-il rappeler l’exemple des révolutions arabes où les peuples tunisien, égyptien, majoritaires dans les rues et sur les places, ne le furent évidemment plus dans les urnes.

La « Grande mutation » se jouera probablement dans les rues, sous l’impulsion de minorités agissantes excédées. Le plus épineux sera pour elles de mettre hors d’état de nuire les vieilles élites finissantes. Tel président descendu de son trône élyséen. Tel présentateur vedette débarqué de son plateau télé.

Sous la pression des évènements, avec un peu de chance, vous verrez que les foules en colère finiront par admettre l’idée qu’il est vital de couper radicalement les ponts avec leurs oppresseurs. Allez, au point où on en est, osons dès à présent la comparaison : comme en 1789.

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9 décembre 2012 7 09 /12 /décembre /2012 18:05

 

Créé le 08-12-2012 à 14h47 - Mis à jour à 14h50

Plus de la moitié des entreprises condamnées pour accidents du travail ou maladies professionnelles ne paient pas les indemnités légales dues.

 

Illustration sur la Sécurité Sociale : relevé de remboursement. (GILE MICHEL/SIPA)

Illustration sur la Sécurité Sociale : relevé de remboursement. (GILE MICHEL/SIPA)

Plus de la moitié des entreprises condamnées pour accidents du travail ou maladies professionnelles ne paient pas les indemnités légales dues à la Sécurité sociale qui subit un manque à gagner de 20 millions d'euros, selon une estimation du gouvernement révélée samedi 8 décembre par "Le Parisien".

Lorsqu'un accident du travail ou une maladie professionnelle est imputable à une faute inexcusable de l'employeur, la victime a droit à l'indemnisation de ses préjudices. Les sommes lui sont alors versées par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) qui se retourne ensuite contre l'employeur.

Mais, selon des chiffres fournis par le gouvernement lors du débat sur le projet de loi 2013 de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) - adopté lundi par le Parlement-, "dans plus de la moitié des cas (56%), ces sommes ne peuvent être effectivement récupérées".

Comment les entreprises s'y prennent-elles pour ne pas payer ? Pour un quart d'entre elles, c'est en raison de la disparition ou de l'insolvabilité de l'employeur, était-il précisé dans le PLFSS.

Obstruction judiciaire

Pour les autres, c'est "tout simplement en faisant de l'obstruction judiciaire et en contestant le moindre vice de forme ou de procédure de la Sécurité sociale", écrit le Parisien.

En effet, "la reconnaissance de la faute inexcusable par le juge (...) n'empêche pas l'employeur de faire échec à la récupération des indemnités que la caisse a versées à la victime", selon le projet de budget, qui estime à "près de 20 millions d'euros", les sommes non recouvrées par an.

Le quotidien cite la société Eternit, fabricant de matériaux de construction, "condamnée à 320 reprises pour faute inexcusable sur son site de Vitry-en-Charollais (Saône-et-Loire)" et qui "n'a jamais versé les 14 millions d'euros dus à ses salariés victimes de l'amiante".

Pour remédier à la situation, les règles relatives à la faute inexcusable de l'employeur ont été modifiées dans l'article 66 du PLFSS 2013, qui permettra notamment "d'améliorer les moyens de recouvrement des indemnités arrêtées par le juge".

Le texte prévoit également que l'employeur ne pourra "s'éxonérer vis-à-vis de la caisse des sommes dont il est redevable" au motif que "la caisse n'a pas respecté le principe du contradictoire dans le cadre d'une procédure administrative indépendante".

 

 

                                                                            **************************************

 

 

Pour rappel :

 

http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2011/11/16/2639371_l-etat-premier-fraudeur-de-la-securite-sociale.html

 

L'etat premier fraudeur de la securité sociale

 

Publié par
Libérateurs

 

 


Le gouvernement met en avant le déficit «énorme» de la Sécurité sociale pour culpabiliser les assurés sociaux et leur faire accepter de payer toujours plus pour des prestations sans cesse réduites. Mais c'est ce même gouvernement et ses prédécesseurs qui sont responsables du déficit, pas les salariés ni les malades.

La présidente de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, la CNAV, dans une interview au Parisien du 19 juin, met par exemple en parallèle le déficit annoncé de plus de deux milliards d'euros de la caisse vieillesse, avec ce que l'État doit à cette caisse au titre de la solidarité vieillesse, dette qui se monte à... 4 milliards d'euros! Mais le gouvernement, au lieu de payer ce qu'il doit, veut nous convaincre qu'il faut accepter de diminuer encore les pensions et reculer l'âge du départ en retraite pour «sauver» le système!

Et cela n'est qu'une petite partie de la dette de l'État envers les organismes de la Sécurité sociale. Il doit par exemple à la caisse des non-salariés agricoles 4,6 milliards d'euros qu'il voudrait faire endosser au régime général!

Nous arrivons ainsi à un total de plus de 8 milliards d'euros.
 
Sécurité sociale : l'annonce d'un déficit... et de nouvelles coupes sombres


La Cour des comptes a publié le 8 septembre son rapport annuel sur la Sécurité sociale. Son déficit aurait été de 30 milliards en 2010. « Abyssal », « historique », « record » : on n'a pas épargné les adjectifs pour sensibiliser la population... aux sacrifices qu'on veut continuer à lui imposer dans ce domaine aussi. Car la discussion du budget 2012 de la Sécu est en cours.

En 2008, le déficit n'atteignait pas neuf milliards. Il a donc plus que triplé en deux ans, représentant maintenant 1,5 % du produit intérieur brut (PIB). La dette cumulée de la Sécurité sociale se monte à 136 milliards. Pourquoi cette augmentation importante ?

Selon la Cour des comptes, la moitié de ce déficit viendrait de la crise : baisse des cotisations due au chômage et aux suppressions d'emplois, exonérations de cotisations patronales, à quoi il faut ajouter le remboursement de la dette. Ce sont donc les banques qui bénéficient de ces déficits-là.

Mais on préfère nous parler de l'autre moitié du déficit, qui viendrait de ce que le système de protection sociale français serait beaucoup trop généreux vis-à-vis des assurés sociaux. En particulier il rembourserait trop les médicaments et toutes les dépenses de santé. Et la Cour des comptes et le gouvernement lui-même de réclamer qu'on mette fin à cet incroyable laxisme.

Car dénoncer les remboursements, surtout de médicaments, c'est orienter les mesures que le gouvernement envisage de prendre. Quand on parle du prix des médicaments, on confond volontairement le prix payé par l'assuré social, et qui lui est plus ou moins remboursé, et le prix imposé par les laboratoires, y compris pour des produits inutiles, voire dangereux comme le Mediator de Servier. La Cour des comptes évoque bien en passant « l'incohérence » des prix fixés en accord entre l'État et les laboratoires, mais c'est les remboursements qu'elle montre du doigt.

Pour « maîtriser les dépenses de santé », il faudrait selon elle revoir les remboursements des frais hospitaliers et de médicaments. Il faudrait en particulier supprimer ou réduire fortement la prise en charge à 100 % (qualifiée de façon abusive, mais orientée, de « niche sociale » !) dont bénéficient les malades atteints d'une affection de longue durée, les nouveau-nés, les femmes enceintes de plus de six mois.

Il faudrait aussi, préconise-t-elle, réduire les dépenses des hôpitaux, en les contraignant à être compétitifs, à se regrouper, en diminuant les dotations forfaitaires. Il faudrait économiser un milliard sur le personnel de la Sécurité sociale qui serait loin d'être assez mobile. Enfin il faudrait augmenter la CRDS, cet impôt de « contribution au remboursement de la dette sociale ».

Pour dénoncer cette dette, la Cour des comptes trouve des accents lyriques : « La dépendance à la dette est devenue le poison de la Sécurité sociale. La dette sociale est une drogue. » Elle est moins mordante quand il s'agit de la dette de l'État, pourtant trois fois plus élevée pour un budget de montant comparable. Et moins critique pour dénoncer les dépenses militaires et le coût du renflouement des banquiers.

Le gouffre sans fond de la « dette sociale »

Les milliards que rapporteront les trois mesures annoncées par le gouvernement sont destinés à alimenter les caisses de la Cades - Caisse d'amortissement de la dette sociale. Cet organisme a été créé en 1996, pour gérer la « dette sociale », autrement dit les déficits de la Sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse - c'est-à-dire pour rembourser leurs dettes. Au total, sur les 134,6 milliards d'euros de dette qui lui ont été transférés depuis sa création, 42,7 milliards seulement ont été remboursés. Reste donc presque 92 milliards, à quoi il faut ajouter les 85 milliards d'euros de dettes supplémentaires que le gouvernement prévoit de lui transférer au titre des années 2009 à 2011.

Les ressources de la Cades proviennent de la CRDS (Contribution au remboursement de la dette sociale) et de 0,2 point de CSG, ce qui a représenté en 2009 au total 8 milliards d'euros. C'est loin de faire le compte, même avec les nouvelles ressources décidées par le gouvernement. Pour rembourser les dettes qui viennent à échéance, et payer les intérêts dus, la Cades doit lancer des emprunts sur les marchés financiers, accroissant de ce fait encore le poids de la dette. Le gouvernement vient de décider de repousser de quatre ans, jusqu'en 2025, la durée de vie de la Cades. C'est la quatrième fois que cette date butoir est reculée : à l'origine, elle avait été fixée à 2009. Mais cela ne fait que repousser l'échéance, sans régler le problème du trou creusé dans les caisses de la Sécurité sociale par les bas salaires, le chômage et les cadeaux au patronat.

Vincent GELAS


http://www.lepost.fr/perso/liberateurs/

dette sociale , sarkozy , cour des comptes ,

 

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8 décembre 2012 6 08 /12 /décembre /2012 17:51

 

Eue89 - Le Grand Entretien 08/12/2012 à 12h21
Elsa Fayner | Journaliste Rue89

 

Pour l’entrepreneur français Henri de Bodinat, la Chine a profité de la mondialisation en dupant les pays occidentaux, qui doivent rétablir des frontières commerciales.

 


Dans une usine de textile en République tchèque (Petr David Josek/AP/SIPA)

« Une petite dose de protectionnisme, bien ciblée sur les produits de Florange, permettrait de protéger ces emplois. »

C’est ce que le député Nicolas Dupont-Aignan propose ; comme souvent, son idée prête à sourire. Et pourtant, si les socialistes ne s’aventurent pas sur ce terrain – Montebourg s’est dégonflé pour se contenter d’enfiler une marinière –, les think tank politiques, les médias et même les éditeurs osent depuis peu employer le terme.


Couverture des « Sept Plaies du capitalisme », d’Henri de Bodinat

Au moins quatre ouvrages grands publics s’y attaquent cette année, une première. Dans « Les Sept Plaies du capitalisme », paru en septembre, Henri de Bodinat réserve ainsi au protectionnisme une bonne place.

Enarque, ancien directeur général de l’agence de publicité Saatchi and Saatchi France, de Sony Music puis du Club Méditerranée, il préside aujourd’hui un fonds d’investissement spécialisé dans les télécoms et les médias, Time Equity Partners.

Et il a une idée pour la France, ou plutôt pour l’Union européenne : des quotas d’importation et des droits de douane sur certains produits bien choisis. Que le protectionnisme soit au moins un sujet de débat.

Quelles sont les causes de la crise selon vous ?

Si je devais en privilégier deux, ce serait d’une part, la mondialisation ; d’autre part, la financiarisation de l’économie. Concentrons-nous sur la première.

Nous avons totalement abaissé les barrières douanières entre les Etats, pensant que la mondialisation allait permettre à chaque pays de se spécialiser dans ce qu’il savait faire le plus efficacement, que chaque pays allait profiter de son avantage comparatif.


Henri de Bodinat (DR)

En fait, ce n’est pas du tout comme ça que ça s’est passé. Nous avons ouvert toutes nos frontières, mais la Chine, elle, les a gardées fermées. Elle a également délibérément sous-évalué le taux de change de sa monnaie, probablement de 50%.

Quand, pendant dix ans on exporte plus qu’on importe, et à hauteur de 300 milliards de dollars, ce n’est plus un avantage comparatif, c’est un avantage absolu.

En quoi est-ce un problème pour l’Europe ?

Quand vous avez 300 milliards d’excédent commercial avec le reste du monde, en face, certains pays ont un déficit commercial à votre égard. Ça veut dire qu’il y a des Européens qui dépensent par exemple 100 milliards de plus en Chine que les Chinois ne dépensent en Europe.

Ça veut dire 300 milliards de dollars d’emplois et de croissance de plus en Chine. Et 300 milliards d’emplois en moins, de croissance en moins, dans le reste du monde. La première conséquence de la mondialisation a été de désindustrialiser l’Europe.

Quelles sont les autres conséquences ?

Il y a un autre un impact extrêmement négatif de la mondialisation, qui est la baisse des salaires et du pouvoir d’achat dans les pays occidentaux.

Dans l’industrie automobile américaine, il y a une vingtaine d’années, un ouvrier était payé 28 dollars de l’heure. Aujourd’hui, un ouvrier qui y entre est payé 15 dollars de l’heure. L’entreprise lui demande d’accepter des salaires plus bas, sinon elle menace de partir en Chine.

La mondialisation a permis à de grandes entreprises de gagner de l’argent en fabricant localement, mais également de bloquer les salaires – et donc le pouvoir d’achat – dans les pays occidentaux. Elle est à l’origine de la stagnation du pouvoir d’achat des classes moyennes que nous constatons depuis une quinzaine d’années.

Pour moi, c’est l’échec fondamental du capitalisme aujourd’hui.

Que proposez-vous pour éviter les dégâts de la mondialisation ?

Il y a plusieurs choses à faire. L’Europe a un inconvénient supplémentaire par rapport aux autres zones, notamment aux Etats-Unis, c’est l’euro.

Les décideurs cherchent à tous prix à préserver l’euro, alors qu’ils reconnaissent qu’il y a des écarts de compétitivité énormes qui se sont creusés depuis 2000 entre les pays européens. Mais comme nous n’avons plus l’arme de la dévaluation pour rétablir la compétitivité, la seule qui nous reste c’est la dévaluation intérieure, qui consiste à diminuer les salaires, ce qui est très difficile.

Il faudrait trouver un système pour pouvoir sortir de l’euro et y entrer de nouveau, mais à un cours différent. Rétablir l’écart de compétitivité qui s’est creusé entre pays et qui fait que la Grèce, l’Espagne et le Portugal sont complètement asphyxiés par rapport à des pays comme l’Allemagne.

Il faudrait pouvoir dévaluer l’euro ?

Oui, la première chose à faire, c’est de dévaluer l’euro. Les Chinois nous ont bernés et désindustrialisés. Ils ont eu raison de le faire : on les a laissés agir ainsi. Mais peut-être qu’aujourd’hui, on peut changer d’attitude.

La Banque centrale européenne (BCE), au lieu de racheter de la dette souveraine et de prêter de l’argent à 0% aux banques qui le prêtent ensuite aux Etats, ferait mieux d’acheter massivement des devises étrangères pour faire baisser l’euro. Elle ferait mieux d’accumuler des réserves en devises, comme l’a fait la Chine.

Quand je vois des commentateurs se réjouir que l’euro monte, je me dis qu’ils sont malades. Quand l’euro monte, ça veut dire que nous dégradons notre compétitivité par rapport au reste du monde. Mais, pour beaucoup, la priorité est encore d’avoir une monnaie forte...

Faut-il rétablir des barrières douanières ?

Il est évident qu’il faut rétablir le protectionnisme aux frontières européennes. Quelles seraient les conséquences ? Des mesures de rétorsion ? Elles seront très difficiles à mettre en œuvre. Les Chinois importent des machines-outils, ils en ont besoin, ils ne vont pas arrêter de le faire.

De quel protectionnisme parlez-vous exactement ?

Je ne dis pas qu’il faut fermer complètement les frontières ; il faut que ce soit sélectif. Il faut des quotas, des droits de douane pour ralentir les flux aux frontières de l’Europe.

Prenons exemple sur le Brésil. Son industrie automobile commence à être menacée par la Chine et la Corée. Et bien le Brésil a instauré 35% de droits de douanes sur ces produits.

Il faut détricoter ce qu’a fait l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui a procédé à une libéralisation sauvage et asymétrique des droits de douanes, et le faire de façon intelligente. Il faut que, secteur par secteur, il y ait une réflexion.

Il faut également utiliser le protectionnisme comme un outil de politique industrielle, se demander comment l’utiliser pour réindustrialiser l’Europe, dans des secteurs dans lesquels il y a du dumping, mais des bases encore solides pour reconstruire.

Pouvez-vous donner un exemple de ce protectionnisme par secteur ?

Les équipementiers télécoms européens souffrent énormément de la concurrence chinoise, que ce soit Ericsson ou même Alcatel. On peut réfléchir à du protectionnisme, en se demandant quel pays viser. Est-ce qu’on ne vise que la Chine par exemple ?

Je n’ai pas de solution miracle, mais il ne faut pas que ce soit un mot tabou. Le libre-échange sauvage n’est pas la panacée universelle. Posons-nous la question du taux de change et d’un certain protectionnisme, sous forme de quotas ou sous forme de droits de douane. Intelligent, sélectif, pour freiner, voire renverser la désindustrialisation. Recréons les conditions du déploiement d’écosystèmes technologiques, industriels, créatifs.

Faut-il interdire les délocalisations ?

Non, on ne peut pas le faire. Je pense que c’est même très dangereux. Il faut éviter qu’il y ait des gens qui trichent, qui soient dopés, c’est tout. Il faut que nous commercions tous à armes égales.

Le protectionnisme ne consiste pas empêcher l’autre de courir, mais à faire en sorte que les décisions de délocalisation soient prises dans des conditions équitables. Une fois qu’on a rétabli les équilibres, qu’il y ait des délocalisations, pourquoi pas.

Pouvez-vous donner un exemple ?

Peut-être qu’il faut instaurer des droits de douane sur les voitures qui viennent du Maroc, plutôt que d’interdire les délocalisations de centres d’appels au Maroc. Cela permettrait d’éviter qu’il y ait à la fois tous les centres d’appels et toute l’activité automobile qui partent au Maroc.

Cela ne vous gêne pas que des centres d’appels soient délocalisés ?

Le problème des centres d’appels délocalisés, c’est l’obsession pour les coûts et la croyance qu’un service comme un centre d’appels est une « commodité ». Alors que ce n’est pas ça pas du tout. Quand vous appelez quelqu’un qui visiblement ne comprend rien à votre problème et ne peut rien pour vous, la marque détériore son image.

Je l’ai vécu en tant que consultant. Je conseillais l’un des grands FAI [fournisseurs d’accès à internet, ndlr] et je leur ai dit que leur centre d’appels n’était pas un centre de coûts, mais faisait partie de leur produit. Dans ce cas-là, il faut améliorer la qualité du service en essayant de maintenir le coût.

Ça peut impliquer de localiser le centre d’appels en France, mais avec des gens bien formés, et en même temps très bien encadrés pour qu’ils puissent rapidement résoudre les problèmes de leurs interlocuteurs, et donc finalement être productifs.

Votre argument avait-il été entendu par votre client ?

Non, il avait refusé l’idée, et délocalisé.

Faut-il alors que la France se spécialise dans le luxe et la haute technologie par exemple ?

On se spécialise pas dans le luxe, ça va délocaliser. C’est la même chose avec la haute technologie. Les décideurs français pensaient qu’ils auraient toujours le TGV ; manque de pot, les Chinois fabriquent aujourd’hui des TGV. Les décideurs français pensaient qu’ils auraient toujours l’aviation, mais bientôt les Chinois vont fabriquer des avions.

Bien sûr qu’il faut continuer à se spécialiser dans ces secteurs de pointe. Mais une erreur colossale à été commise, celle d’avoir accepté un transfert de technologie vers la Chine. Siemens et Alstom ont vendu des trains à la Chine et ont transféré en même temps leur technologie. La Chine leur a acheté trois TGV et est devenue un concurrent. C’est un manque de vision stratégique absolument démentiel.

Lorsqu’Anne Lauvergeon a refusé de vendre une centrale nucléaire à la Chine, disant qu’elle refusait le transfert technologique, Nicolas Sarkozy l’a forcée à le faire. C« est quand même hallucinant. Pour pouvoir dire qu’il était un super VRP de la France, sans aucune vision industrielle à long terme. C’est consternant. Le problème des hommes politiques, c’est leur vision à très court terme.

Leur deuxième erreur, c’est le diagnostic qu’ils font. J’avais espoir en Montebourg, qui parlait de démondialisation. Mais il n’en parle plus. Il ne parle pas plus de protectionnisme d’ailleurs.

 

 

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8 décembre 2012 6 08 /12 /décembre /2012 17:35

 

LE MONDE | 08.12.2012 à 14h19 • Mis à jour le 08.12.2012 à 15h38

 

 


Le typhon Bopha a ravagé les Philippines.

La communauté internationale ne sort pas grandie de la conférence des Nations unies sur le climat de Doha. Les débats se prolongeaient samedi 8 décembre au Qatar, au-delà de l'heure de clôture, à la recherche désespérée d'un compromis sur un accord global pour contenir le réchauffement. Un accord semble de plus en plus inatteignable.

Engagements flous, refus de toute contrainte : une fois encore, le message paradoxal adressé à la planète est que la négociation sur le changement climatique n'est pas dictée par les évolutions du climat, mais par les fluctuations de l'économie.

Faute de volonté politique, le processus de négociation est imperméable à l'urgence. Ni la pression de la science, qui ne cesse de préciser l'ampleur des menaces, ni la multiplication des sécheresses, des canicules et des inondations, ni les appels pressants des pays les plus vulnérables n'auront suffi à sortir la conférence sur le climat de l'immobilisme qui est devenu sa marque de fabrique.

De l'ouragan Sandy en Amérique du Nord au cyclone Bopha aux Philippines, de la sécheresse historique aux Etats-Unis et en Europe à la fonte record de la banquise, les signaux d'alerte n'ont pas manqué ces derniers mois. Le cri du coeur du négociateur philippin, appelant ses confrères à "regarder la réalité en face", alors que son pays était dévasté par un typhon d'une violence exceptionnelle, n'a que brièvement ému les délégations.

Pour les pays industrialisés, responsables historiques du réchauffement, la "réalité", c'est d'abord que les caisses sont vides. Les pays en développement demandaient 60 milliards de dollars d'ici à 2015 pour les aider à faire face aux effets du réchauffement. A l'heure des coupes budgétaires, ils ne sont même pas sûrs d'obtenir des pays industrialisés la vague promesse d'une "trajectoire de financement".

La "réalité", c'est que les énergies renouvelables représentent encore un investissement coûteux, à l'heure du charbon et du gaz bon marché, même si ces énergies propres gagnent en rentabilité. La "réalité", c'est que le développement du solaire est l'occasion non d'une coopération mais d'une guerre commerciale entre l'Europe, les Etats-Unis et la Chine.

Aucun pays n'est prêt à mettre en péril la compétitivité de son économie en acceptant de négocier des objectifs plus ambitieux de réduction des gaz à effet de serre. Chacun sait pourtant que les engagements actuels mettent la planète sur la trajectoire d'un réchauffement de 4 degrés. Un bouleversement qui "déclencherait une cascade de changements cataclysmiques", a tenu à prévenir la Banque mondiale, le 18 novembre.

L'institution de Washington s'alarme, parce que ces effets seront aussi économiques. Comment croire qu'il sera longtemps rentable, même au nom de la compétitivité, de rester aveugle à l'enjeu climatique ? La facture de l'ouragan Sandy aux Etats-Unis dépasse les 80 milliards de dollars. La sécheresse a ruiné les céréaliers du Midwest et met une partie de l'économie américaine au ralenti en empêchant la navigation sur le Mississippi.

Au Qatar, les Etats-Unis ont pourtant, une nouvelle fois, bloqué les négociations. Barack Obama avait laissé entrevoir, après sa réélection, un changement d'attitude sur le front du climat. La conférence de Doha a adressé un cinglant démenti à cet espoir.

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7 décembre 2012 5 07 /12 /décembre /2012 20:43

 

 

bastamag - Innovation

Par Anthony Laurent (6 décembre 2012)

 

 

Les expériences de gratuité se multiplient dans les services publics locaux. Transports en commun totalement gratuits à Aubagne ou Châteauroux, premiers litres d’eau gratuits dans des communes de l’Essonne ou des Bouches-du Rhône... A qui profite cette gratuité ? Comment est-elle financée ? Implique-t-elle une baisse de la qualité du service ? Incarne-t-elle une alternative face au dogme de la « consommation marchande » ? Réponses par les faits.

 

 

 

Monter dans un bus sans composter un ticket, et sans risquer de passer pour fraudeur, tel est le quotidien des Aubagnais. Depuis trois ans, cette localité de 104 000 habitants, en périphérie de Marseille, a fait le choix de la gratuité totale dans les transports en commun. Cette gratuité était auparavant réservée aux demandeurs d’emplois, aux allocataires du RMI et aux personnes âgées et handicapées. S’inspirant de l’esprit du « droit au transport pour tous » énoncé par la loi d’orientation des transports intérieurs votés par la gauche en 1982, le maire communiste d’Aubagne, Daniel Fontaine, et son équipe proposent cette mesure à leurs administrés lors des élections municipales de 2008.

Réélue, la municipalité entame alors un bras de fer avec la société des Autobus Aubagnais, propriété du groupe Veolia, qui exploite le réseau depuis 2007 dans le cadre d’une délégation de service public. Pour que Veolia accepte de mettre en œuvre la gratuité, les élus demandent à l’entreprise de revoir les objectifs de fréquentation à la hausse. Et les objectifs sont largement dépassés : durant les six premiers mois de gratuité, la fréquentation fait un bon de 70%. Entre 2008 et fin 2011, le nombre d’usagers progresse de 146% ! Bien au-dessus des objectifs initiaux, fixés dans le cadre de la délégation de service public avec des transports payants (+2% par an). Une enquête réalisée en mars 2010 par l’agglomération aubagnaise [1] montre que la gratuité, en plus de créer de la mobilité, attire de nouveaux usagers, parmi lesquels les jeunes de moins de 18 ans et les personnes « non captives » disposant d’un véhicule motorisé (deux-roues ou voiture).

A qui profite la gratuité ?

Dans l’agglomération de Châteauroux (76 000 habitants), les transports collectifs sont gratuits depuis une décennie. A la différence d’Aubagne, ce sont des considérations d’ordre économique qui ont conduit le maire UMP Jean-François Mayet à faire de la gratuité un thème de campagne pour les élections municipales. Son intention ? Dynamiser l’économie locale – notamment les commerces du centre-ville – sans remettre en cause l’usage de la voiture.

Dix ans après l’instauration de la gratuité, la fréquentation sur le réseau géré par Keolis, filiale de la SNCF, a progressé de 208% ! Selon une étude menée par la Communauté d’agglomération castelroussine [2], la gratuité profite surtout aux bénéficiaires de la Couverture maladie universelle (CMU) et de l’Aide médicale d’État [3]. Plus de la moitié des usagers dispose de revenus mensuels inférieurs à 1 100 euros. Près d’un nouveau voyageur sur dix n’utilisait pas auparavant les transports en commun en raison du prix des tickets.

Qui finance les transports gratuits ?

En plus d’Aubagne et de Châteauroux, 23 réseaux de transports urbains, sur 290, ont fait le choix de la gratuité totale pour les usagers (dont sept communes de plus de 40 000 habitants [4]). Et donc de se passer des recettes de billetterie. Les ventes de ticket couvrent en moyenne 20% des besoins de financement d’un réseau de transport urbain, rappelle le Groupement des autorités responsables de transport (GART), derrière les impôts locaux (30%), et les contributions des entreprises et des administrations (48%). Le GART, qui rassemble les villes et collectivités disposant d’un réseau de transport public, « n’encourage pas cette pratique » : la gratuité ne serait pertinente que pour les petits réseaux.

Pour remplacer les recettes de billetterie, Aubagne et Châteauroux ont décidé d’augmenter la contribution « versement transport » (VT). Celle-ci est payée par les entreprises privées ou publiques situées sur le territoire et employant plus de neuf salariés. Dans les deux villes, cette contribution a été portée respectivement à 1,8 et 0,6% de la masse salariale de l’entreprise [5]. S’y ajoute une ponction limitée au budget général de la collevctivité. Alors que la billetterie rapportait 710 000 euros, la hausse de la contribution des entreprises aux infrastructures de transports rapporte 5 millions d’euros supplémentaires. La Communauté d’agglomération du pays d’Aubagne et de l’Étoile projette même de construire un tramway totalement gratuit d’ici cinq ans. La gratuité totale n’interdit pas non plus les investissements futurs.

La gratuité, une « fausse bonne idée » ?

Malgré ces expériences, les méfiances à l’égard de la gratuité des transports collectifs demeurent fortes. Sans surprise, l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP), qui regroupe les grandes entreprises du secteur – SNCF, RATP, Veolia-Transdev, Keolis (filiale privée de la SNCF)… –, considère la gratuité comme un « épiphénomène ». Et affiche son hostilité. Trop onéreuse, ne facilitant pas le report de la voiture vers les transports collectifs, menaçant la qualité de service, « la gratuité pour tous ne répond pas aux objectifs de développement d’un réseau de transport », juge l’UTP dans un rapport.

La Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut) partage également ces critiques. La gratuité est une « fausse bonne idée » qui « induit des déplacements inutiles, encourage l’étalement urbain et prive de ressources le système de transport au moment où la clientèle augmente et où les recettes fiscales des collectivités diminuent », estime l’association d’usagers. Elle lui préfère le système de tarification sociale pour les jeunes, les sans emplois ou les familles nombreuses. [6].

La gratuité entraîne-t-elle une baisse de la qualité ?

A Châteauroux, la mise en place de la gratuité a pour conséquence « une très légère baisse de la qualité » du service, constate Bruno Cordier, directeur du bureau d’études Adetec. Une qualité moindre qui se manifeste surtout, selon les usagers, par une dégradation de la propreté des bus, le fait qu’ils sont plus souvent bondés et moins ponctuels. C’est l’un des arguments contre la gratuité : elle favoriserait l’irrespect vis-à-vis des infrastructures, voire le vandalisme, suivant l’a priori « ce qui est gratuit n’a pas de valeur » (selon l’UTP). « La hausse du vandalisme observé à Châteauroux ne peut être imputée uniquement à la gratuité en tant que telle. Elle correspond malheureusement à une évolution de la société. Par ailleurs, il est logique que le vandalisme augmente quand la fréquentation augmente », tempère Bruno Cordier.

L’expert nuance également les critiques estimant que la gratuité ne favoriserait pas vraiment le report de la voiture vers les transports en commun. Pour être efficace, la gratuité « doit s’accompagner de contrainte sur l’automobile (circulation et stationnement) et d’un urbanisme cohérent [...]. Rendre les transports publics financièrement plus attractifs passe également par une information sur les coûts réels de la voiture et par une hausse de ces coûts (carburant, stationnement, péage urbain...) », explique-t-il [7]. Précisons que les transports – voitures comprises – restent le deuxième poste de dépense des ménages (14%), derrière le logement (25%) et devant l’alimentation (13%). Selon l’étude réalisée à Aubagne, l’instauration de la gratuité a permis de réduire de 63% les déplacements polluants, que ce soit pour se rendre à son travail, ou pour les loisirs.

Trois litres d’eau potable gratuits par jour et par personne

L’expérience de la gratuité se retrouve également dans le secteur de l’eau potable. Depuis décembre 2011, la ville de Roquevaire (8 700 habitants), située, elle aussi, dans la communauté d’agglomération du pays d’Aubagne et de l’Étoile, applique la « quasi-gratuité » de l’eau vitale : les 30 premiers mètres cubes sont facturés 1 euro HT – soit 0,03 euro le mètre cube –, les prix variant ensuite en fonction de la consommation [8]. Désireuse de s’affranchir des groupes privés, Roquevaire a opté pour une gestion en régie publique. Ce choix lui permet de réaliser ses propres forages à grande profondeur, de mobiliser son propre personnel et de financer elle-même les équipements nécessaires.

En Île-de-France, la Communauté d’agglomération des Lacs de l’Essonne (CALE), qui regroupe les villes de Grigny et Viry-Châtillon (60 000 habitants), est allée plus loin en instaurant la gratuité pour les premiers mètres cubes d’eau consommés, indispensables à la vie, soit trois litres par jour et par personne. Cette décision a été prise par son président, Gabriel Amard (Parti de Gauche), suite à la tenue d’une votation citoyenne en juin 2010 au cours de laquelle 95% des 4 949 votants se sont exprimés en faveur du passage en régie publique autonome. Cette dernière a été créée, après délibération, et en rompant le contrat alors en vigueur avec Veolia, le 1er juillet suivant.

Guerre de l’eau contre Suez et Veolia

Ce n’est pas tout. Gabriel Amard projette désormais de se passer des services de Eau du Sud Parisien, branche régionale de la Lyonnaise des Eaux (groupe Suez Environnement), pour l’approvisionnement en eau et de se tourner vers la régie publique Eau de Paris. Une décision qui n’est pas du goût de l’entreprise, qui a fait appel, en 2011, au cabinet de conseil en stratégie de communication et gestion de crise Vae Solis Corporate pour « limiter et réduire, en la discréditant sur le fond, la communication », jugée « agressive » et « outrancière » du président de la communauté d’agglomération (lire notre article). Soutenu par Eau de Paris, l’élu a porté plainte en juillet dernier contre Eau du Sud Parisien et le cabinet pour « trafic d’influence actif ». La Lyonnaise des Eaux, qui a condamné officiellement les pratiques de sa filiale Eau du Sud Parisien, a demandé le lancement d’une enquête interne… Tout en déclarant à son tour vouloir porter plainte contre Gabriel Amard pour « dénonciation calomnieuse ». L’affaire suit son cours.

« Pour nous, la gratuité permet de redistribuer l’impôt en cohérence avec notre planification écologique, affirme Nathanaël Uhl, le directeur de la communication de la CALE. Nous désirons aussi montrer par là que l’eau est un bien commun et qu’il est de notre responsabilité collective d’en prendre soin. » Et d’ajouter : « Nous avons pris le parti de rompre avec une certaine idée qui prévaut parmi les élus de gauche disant que la seule façon de responsabiliser les gens est de les faire payer... » Pour la CALE, la distribution de l’eau potable a été la première expérience de la gratuité. Aujourd’hui, la communauté d’agglomération de l’Essonne loue des vélos et fournit des composteurs gratuitement à ses administrés. « Nous voulons être un exemple car nous proposons des alternatives politiques concrètes. Ce ne sont pas uniquement des mots, ce sont des actes ! », insiste Nathanaël Uhl.

Quand la gratuité pulvérise « le dogme du libéralisme »

« Chaque fois que l’on prend une initiative dans le domaine de la gratuité, on fait revenir les gens à la politique, y compris lorsque c’est un échec », observe Paul Ariès (lire aussi notre entretien). Pour le politologue et objecteur de croissance, l’un des enjeux de la gratuité est de « sortir de l’économisme ». « De même qu’il n’y a pas de société marchande sans culture du marché, il ne peut advenir de société de la gratuité, sans culture de la gratuité », souligne-t-il.

« Saisir le capitalisme par la queue », non pas en s’en prenant directement à la propriété du capital, mais « en subvertissant le principe de consommation marchande » sur lequel elle se fonde. Voilà à quoi nous invite la gratuité selon Magali Giovannangeli, présidente de la communauté d’agglomération du pays d’Aubagne et de l’Étoile, et le philosophe Jean-Louis Sagot-Duvauroux, auteur de Voyageurs sans ticket [9] Avec l’instauration de la gratuité – cette « forme supérieure de dérégulation » qui n’établit aucune distinction entre les riches et les pauvres –, « le dogme du libéralisme, qui a pris une telle assise dans nos têtes, est pulvérisé par l’expérience », estiment-ils.

La gratuité contre la croissance ?

La gratuité de l’eau vitale, des transports en commun urbains, de la restauration scolaire, des services funéraires comme des services culturels, permet, selon Paul Ariès, de mettre en place des « modes de vie radicalement différents », de « repenser un projet global », devant être « au cœur de nos rêves, de nos réflexions et de nos actions ». Dans cette optique, Paul Ariès suggère, par exemple, la création d’une Agence nationale de la gratuité qui mutualiserait les expériences existantes. « Le système rend invisibles un certain nombre d’alternatives ; la gratuité en fait partie. Or, il nous faut rendre visible l’invisible », suggère-t-il.

Projet d’émancipation, la gratuité fait cependant débat au sein de la gauche, notamment entre partisans et opposants au revenu inconditionnel. « Pourtant, le combat de la gratuité permet de dépasser ce conflit, dans le sens où ce revenu social peut être donné à la fois en monnaie nationale, en monnaie régionale – à inventer – mais aussi sous forme de droit d’accès démonétarisé aux services publics et aux biens communs », indique Paul Ariès. « La gratuité doit notamment permettre de faire passer le discours de l’objection de croissance dans toute une culture de gauche. » Sa refondation est à ce prix.

Anthony Laurent

Notes

[1] Télécharger l’enquête.

[2] L’étude ici.

[3] L’article 123 de la loi relative à la Solidarité et au renouvellement urbains (SRU) impose aux Autorités organisatrices de transport urbain (AOTU) d’accorder une réduction d’au moins 50% aux personnes bénéficiant de la CMU complémentaire et de l’Aide médicale d’État.

[4] Aubagne, Castres, Châteauroux, Compiègne, Muret, Vitré, Gap.

[5] Le VT est plafonné à 0,6% de la masse salariale pour les agglomérations de moins de 100 000 habitants ; à 1,05% jusqu’à 400 000 habitants ; à 1,8% au-delà, et à 2,6% pour Paris et les Hauts-de-Seine. Les collectivités disposant en outre de transports collectifs en site propre (tramway, métro, tram-train, etc.) peuvent appliquer un taux de 1,8%.

[6] Lire ici.

[7] Dans un rapport remis à l’Ademe.

[8] De 0,75 à 1,15 euro HT le mètre cube de 31 à 120 m3 consommés (« eau utile ») et de 1,4 à 3 euros HT le mètre cube de 121 à 10 000 m3 consommés (« eau de confort »). Un abonnement spécial à 0,25 euro HT le mètre cube est prévu pour une consommation d’eau excédant les 10 000 m3.

[9] Magali Giovannangeli et Jean-Louis Sagot-Duvauroux, Voyageurs sans ticket, Liberté, Égalité, Gratuité, une expérience sociale à Aubagne, Au diable vauvert, août 2012, 240 p., 15 euros.

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7 décembre 2012 5 07 /12 /décembre /2012 19:53

La thématique de la fraude aux prestations sociales a marqué le quinquennat de Nicolas Sarkozy et la dernière campagne présidentielle. Au prétexte de protéger la protection sociale des assistés et des tricheurs, les envolées droitières autour de « l'assistanat, cancer de la société », popularisées par l'ancien ministre UMP Laurent Wauquiez, ont répandu l'idée que les droits économiques et sociaux se méritent. Pour contrer ce discours, treize chercheurs de l'observatoire des non-recours aux droits et services, Odénore, laboratoire rattaché au CNRS basé à Grenoble (Isère), publient L'Envers de la fraude sociale, le scandale du non-recours aux droits sociaux, aux éditions La Découverte.


 

Leur enquête, résultat de dix ans de travaux sur le sujet, montre faits et chiffres à l'appui que plus de 7 milliards d'euros de prestations ne sont pas versés chaque année à ceux qui pourraient obtenir ces aides (RSA/ allocations chômage, aides au logement, CMU, transports). C'est deux fois plus que la fraude sociale estimée, si souvent dénoncée par la droite et l'extrême droite, qui coulerait la Sécu. « C'est surtout le signe de l'appauvrissement de nombre de ménages et la destruction de futures recettes pour la collectivité, car ce qui n'est pas dépensé n'est en rien une économie », préviennent les auteurs.

Ils se réjouissent de voir la problématique enfin prise en compte par un gouvernement. Elle sera abordée lors de la grande conférence sur la pauvreté la semaine prochaine, les 10 et 11 décembre. C'est une première. Entretien croisé avec trois chercheurs, Philippe Warin, directeur de recherche, spécialiste de l'évaluation des politiques publiques, Pierre Mazet et Yves Saillard, ingénieurs d'études au laboratoire Pacte.

Vous dénoncez les discours sur « l'assistanat, cancer de la société » qui ont marqué les années Sarkozy. C'est le but de votre ouvrage ?

Philippe Warin. Si ce livre n'arrive pas à faire bouger un peu les lignes sur cette représentation de l'assistanat, c'est que nous aurons raté notre cible. Nous travaillons depuis dix ans exclusivement sur le non-recours, aux aides sociales en particulier. À force d'accumuler les études sur le sujet et d'assister en même temps à la montée des discours politiciens sur la fraude sociale, il nous est apparu nécessaire de poser la question de cet envers de la fraude sociale. Cet ouvrage n'est pas une réaction épidermique mais le moyen de resituer la fraude sociale plus globalement. Les aides sociales sont loin d’atteindre tous leurs destinataires. Notre livre ne se veut pas polémique même si le ton est assez direct. Il s'agit d'aller contre les idées reçues.

Pierre Mazet. Il y a un discours qui ne date pas de Sarkozy sur une forme de méritocratie de l'aide sociale. C'est l’idée que l’aide sociale ça se mérite, avec en plus une culpabilisation de ses bénéficiaires. De nombreuses personnes se sentent stigmatisées lorsqu'elles demandent leurs droits. Sous le précédent gouvernement, elles étaient considérées comme des parias et des profiteurs de manière assez systématique. Alors qu'elles demandent des droits inscrits dans des textes de loi, elles doivent faire la preuve de leur bonne conduite en permanence, prouver qu'elles ne sont pas des fraudeurs. Il faudrait être un « bon pauvre » méritant, responsable de sa situation mais qui, en même temps, cherche à s'en sortir. Ce type de discours des acteurs politiques a un impact réel et direct sur le non-recours.

Quelle est l'ampleur du non-recours aux aides sociales en France ?

Philippe Warin. Nous sommes dans l'incapacité de produire des données exhaustives. Mais ce phénomène n'est pas négligeable. Tous droits confondus, nous observons un seuil de non-recours autour de 10 %. Parfois, il est bien supérieur comme nous le démontrons dans le livre. Ce seuil corrobore les données recueillies dans d'autres pays européens ainsi qu'un travail de l'OCDE datant de 2004 qui fixe un taux moyen de non-recours entre 20 et 40 %. Sur certaines prestations, il peut atteindre des sommets : c'est le cas de l'aide à la complémentaire santé (ACS) liée à la couverture maladie universelle (CMU) où il est de l'ordre de 75 % comme l'indique dans l'ouvrage Héléna Revil, l'une des co-auteurs. Le rapport du comité national d'évaluation du revenu de solidarité active (RSA) a mis en évidence l'ampleur du phénomène : 50 % en moyenne de non-recours sur les trois types de RSA et 68 % pour le seul RSA activité.

Pourquoi est-il impossible d'avoir des statistiques précises ?

Pierre Mazet. Le non-recours à ces aides concerne une grande diversité d'offres publiques, avec des problèmes de calcul pour chacune. Il est impossible, en l'état actuel au moins du système des prestations sociales en France, d'avoir un taux synthétique. Sans compter que pour de nombreuses aides, extra légales ou facultatives, la population potentiellement bénéficiaire est difficile à établir parce que les conditions d’éligibilité sont mouvantes : ce sont des offres contingentées, c'est-à-dire avec un budget clos. Une fois le budget consommé, il n’y a plus d’aide. Donc on peut avoir droit à une aide en février, mais plus en novembre, sans pour autant avoir changé de situation. Et ça, ça rend le calcul du non-recours très compliqué.

 

«800 fraudeurs à la CMU mais des centaines de milliers de précaires, privés de CMU»

 

Vous démontrez que le non-recours aux aides sociales est bien largement supérieur à la fraude sociale. Combien représente cette non-dépense au regard des 4 milliards d'euros de fraude à la Sécu si souvent dénoncés par Nicolas Sarkozy ?

Philippe Warin. Chaque année, pour ne citer que quelques exemples, 5,3 milliards d'euros du revenu de solidarité active (RSA), 700 millions d'euros de couverture maladie universelle complémentaire, 378 millions d'euros d'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé, 2 milliards d'indemnités de chômage, ne sont pas versés à des populations pourtant éligibles. Ces chiffres sont partiels car il faudrait examiner d'autres prestations pour avoir une vue encore plus complète. Ce qui est certain, c'est que ces sommes, ajoutées les unes aux autres, sont largement supérieures aux 4 milliards de fraude sociale, estimés dans le rapport Tian.

 

Frauder, c'est une atteinte à la solidarité nationale. Le non-recours aux aides sociales aussi. 
Frauder, c'est une atteinte à la solidarité nationale. Le non-recours aux aides sociales aussi.

 

Quelles sont les répercussions de cette considérable non-dépense publique sur l'économie française ?

Philippe Warin. Ce sont autant de dépenses privées qui ne se font pas, autant de rentrées fiscales et autres qui n'ont pas lieu dans les caisses publiques. Mais ce sont aussi autant d'effets multiplicateurs qui ne se feront pas. L'État perd des recettes énormes en ne dépensant pas l'argent alloué aux aides sociales. Cette question est sans doute plus délicate en période de compression budgétaire. En tout cas, elle mérite d'être posée pour le RSA, car il y a une réelle non-dépense de budget initialement prévu. Il faut sortir de la logique de la dépense sociale comme un coût. Laisser loin des dispositifs de soins et de leurs droits des populations modestes coûte encore plus cher lorsqu'elles reviennent dans le circuit médical. Les politiques sociales doivent être considérées comme un investissement social mais aussi pour les richesses qu'elles produisent.

Yves Saillard. Notre logique est bien de démontrer les effets pervers du non-recours sur l'économie et son coût social. Si on sort d'une démarche strictement comptable – comparer les niveaux de dépense – et que l'on s'interroge sur l'efficacité des systèmes sociaux à plus long terme, ces non-dépenses représentent l'inverse des effets multiplicateurs. Cela représente une perte de richesses pour la société, le signe d'un appauvrissement des publics potentiels, des ménages souvent modestes.

Le livre démonte de nombreux clichés comme celui persistant sur les étrangers qui profiteraient de l'État-providence français...

Pierre Mazet. Les données sur le RSA révèlent que les étrangers hors Union européenne sont bien peu nombreux à en bénéficier. Les taux de non-recours y sont les plus élevés. Héléna Revil, l'une des co-auteurs, rappelle des chiffres clés dans son chapitre. En 2010, 780 cas de fraude à la CMU complémentaire ont été constatés dans la France entière. Ce sont des cas d'escroquerie, de délinquance, de détournement de carte vitale, etc. Mais rapporté au nombre de non-bénéficiaires de la CMU C qui se chiffre en centaines de milliers, ce chiffre est pour le moins à relativiser. Nous avons 800 fraudeurs d'un côté et des centaines de milliers de précaires, privés de CMU, de l'autre !

La fraude sociale est une construction politique. La fraude aux cotisations sociales et la fraude fiscale sont bien supérieures. Il y a une visée très clairement politique de polarisation de la société sur la fraude sociale. Sous le précédent gouvernement et durant les campagnes présidentielles et législatives, ce discours a permis à la droite d'aller sur le terrain de l'extrême droite. Cela dit, même sous les gouvernements de gauche, on a pu entendre un discours sur la nécessité de lutter contre cette fraude, afin de faire passer les augmentations d’impôt auprès des classes moyennes.

«La stigmatisation des populations joue assez fortement dans la non-demande»

Pourquoi tant d'usagers ne réclament pas leurs droits ?

Philippe Warin. Les raisons sont multiples. Les plus récurrentes renvoient à l'information insuffisante face à une offre très fournie, et en même temps, complexe. La question de l'information se pose aussi pour les agents prestataires. Dans de très nombreux cas, on s'aperçoit que les services eux-mêmes sont en panne d'information voire de compréhension. Il y a aussi une forme de non-recours qui renvoie à l'ensemble des situations de demandes engagées mais satisfaites à moitié ou qui tardent à l'être. Nous ne sommes pas ici dans le cas de personnes qui ignorent l'offre car elles ont déposé un dossier ; mais pour des raisons qui relèvent d'elles ou des organismes, elles ne touchent par leurs droits alors qu'elles remplissent les conditions.

Par ailleurs, il y a aussi des raisons de non intérêt – « toutes ces démarches pour quelques euros » –, ou de lassitude face aux conditions imposées, aux contrôles, voire pour des raisons de perte de l'idée d'avoir des droits, notamment chez les jeunes.

Pierre Mazet. La stigmatisation des populations joue assez fortement dans ces non-demandes. L'image associée à une aide sociale est perçue plus ou moins positivement par les personnes qui en sont potentiellement bénéficiaires. Cela joue assez fort sur le RSA. Pour nombre de personnes éligibles, qui travaillent, même peu, pour s'en sortir, le RSA est associé au RMI, donc aux gens qui ne travaillent pas. Elles ne veulent surtout pas être associées à un public de RMIstes d'autant que les discours politiques ont allègrement mis en scène ces derniers paressant des journées entières dans leur canapé.

L'inflation réglementaire fait aussi que les intermédiaires sociaux ne connaissent parfois pas l'offre elle-même. On l'a observé à Grenoble. Les tarifs sociaux énergie étaient très mal connus des travailleurs sociaux. Autre exemple, il est difficile d’envoyer une famille avec enfants dans un centre d’hébergement recevant des hommes seuls, souvent alcoolisés, parfois avec des problèmes de violence, etc. On a aussi constaté que le droit au logement opposable (DALO) n'est pas proposé aux personnes à la rue, car les travailleurs sociaux estiment souvent qu’elles sont inaptes à accéder à un logement.

 

 

Comment lutter contre ce non-recours et favoriser l'accès aux droits ?

Philippe Warin. Il faut une volonté politique, poser la question de l'automaticité des droits, savoir détecter les droits potentiels. Pour cela, il faut que les données circulent. On tourne autour du pot en France en se réfugiant derrière des problèmes techniques alors que dans d'autres pays où les questions de protection de l'individu par rapport aux données sont tout aussi fortes, on a tranché. On n'embête plus ou beaucoup moins les bénéficiaires d'aides sociales. Ils n'ont plus à refaire les demandes ; en Belgique et aux Pays-Bas, on a ainsi fait de grandes économies en matière de formulaires. Mais ce n'est là qu'une des pistes à explorer.

Pierre Mazet. Le débat sur l'automaticité des droits n'a jamais eu lieu en France. À l'inverse, la question de la circulation des données entre administrations ne pose pas de problème éthique lorsqu'il s'agit de faire du contrôle. La caisse d'allocations familiales échange avec les impôts, par exemple pour le contrôle des ressources de ses allocataires. Récemment, une procédure d'automatisation des tarifs sociaux de l'énergie a cependant été décrétée. Elle devrait permettre de doubler le nombre de bénéficiaires effectifs de ces tarifs, et, selon les estimations de la commission de régulation de l’énergie, de diviser par trois les coûts de gestion.

Le nouveau gouvernement a-t-il conscience de l'ampleur du phénomène ?

Philippe Warin. En Grande-Bretagne, quand la question du non-recours aux droits sociaux a été reprise dans les années 1970, cela s'est traduit par des coupes budgétaires. Le gouvernement a estimé que ces droits ne correspondaient à aucun besoin puisqu'ils n'étaient pas utilisés. En France, nous n'en sommes pas là.

Le thème progresse, paradoxalement dans un contexte difficile budgétairement. Le nouveau gouvernement en a pris la mesure. Le non-recours sera un des thèmes abordés lors de la grande conférence sur la pauvreté la semaine prochaine, les 10 et 11 décembre. Dès juillet, les ministres concernées (ndlr - Marisol Touraine aux affaires sociales et Marie-Arlette Carlotti pour la lutte contre l'exclusion) ont signalé l'accès aux droits sociaux comme chantiers prioritaires, frappées par l'ampleur du non-recours au RSA. On le voit aussi localement avec des collectivités territoriales et des organismes sociaux qui s'en saisissent. Les collectivités sont de plus en plus soucieuses car le non-recours fait que les populations modestes qui échappent au système de protection nationale se retrouvent dans les dispositifs de l'aide sociale locale.

 

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