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13 mai 2013 1 13 /05 /mai /2013 16:21

 

 

Marianne -  - Lundi 13 Mai 2013 à 15:55

 

  Michel Santi*

 

 

 

Des salariés de Volkswagen protestent en 2004 contre le plan de restructuration de Peter Hartz alors à la tête des Ressources Humaines du constructeur automobile - CHRISTOF STACHE/AP/SIPA
Des salariés de Volkswagen protestent en 2004 contre le plan de restructuration de Peter Hartz alors à la tête des Ressources Humaines du constructeur automobile - CHRISTOF STACHE/AP/SIPA
Une confiscation en bonne et due forme de l’appareil économique a été entreprise depuis la fin des années 70 par une infime minorité qui a redistribué le produit du travail des autres largement en sa faveur. Ce ne sont effectivement pas tant nos usines, nos industries et nos entreprises qui ne sont pas productives. Cette productivité a en fait été monopolisée au bénéfice d’une élite qui a assisté, totalement indifférente, au creusement d’un fossé entre les salaires réels et la productivité.

L’Allemagne elle-même, qui s’érige en donneuse de leçon de productivité, n’a pu bénéficier d’une croissance au-dessus de la moyenne européenne qu’à la faveur de sacrifices constants exigés à sa population. Le moteur à l’exportation allemand ne rugit pas seulement par la grâce de la force productive de ses entreprises.

En réalité, c’est aux réformes dites « Hartz » entreprises entre 2003 et 2005 – et qui ont consisté à transférer des ressources et des richesses du citoyen vers les entreprises et vers le secteur financier – que l’Allemagne doit d’avoir dopé ses exportations. Ce sont effectivement les réductions salariales et les réformes drastiques de son marché du travail qui ont amélioré notablement sa productivité, en y comprimant à l’extrême le coût du travail.

 

Peter Hartz en 2007 - FABIAN BIMMER/AP/SIPA
Peter Hartz en 2007 - FABIAN BIMMER/AP/SIPA
Ces réformes sinistres ont été initiées le 16 août 2002 par un groupe d’experts dirigés par le directeur des ressources humaines de Volkswagen, Peter Hartz, qui a présenté au chancelier allemand Gerhard Schröder ses propositions relatives aux réformes du marché du travail.

Dix ans plus tard, la société allemande se retrouve profondément transformée par ces réformes.

En effet, une étude de l’OCDE, publiée à fin 2012, conclut à un accroissement spectaculaire de l’inégalité des revenus en Allemagne, bien plus que dans n’importe quel autre pays membre de cette organisation.

Ayant très finement manœuvré, la commission Hartz a réussi à créer dans son pays un marché du travail subsidiaire – ou parallèle – dominé par des salaires bas et non soumis aux droits sociaux.

De fait, ces réformes privent les chômeurs allemands de tous leurs droits aux allocations chômage. Ils sont dès lors réduits à l’état de mendiants sociaux !

Ainsi, ce n’est qu’après une année entière de chômage que le travailleur est en droit de demander une misérable allocation mensuelle de 347 euros par mois, à la seule condition toutefois d’avoir préalablement épuisé son épargne et à la condition expresse que son conjoint soit incapable de subvenir à ses besoins.

Pourquoi ne pas évoquer également l’obligation lui étant imposée d’accepter n’importe quel emploi, indépendamment de ses qualifications et de ses revenus antérieurs ?

Hartz est donc tout à la fois un piège et la meilleure voie pour la pauvreté, ou pour un état de précarité absolue inconcevable et intolérable dans un pays riche comme l’Allemagne. Une étude réalisée par l’Association à l’aide sociale paritaire allemande dévoile effectivement que les trois-quarts des personnes touchées par ces lois restent à jamais tributaires de Hartz.

Par ailleurs, la simple menace de tomber dans Hartz contraint les chômeurs à accepter des emplois à salaire bas, à temps partiel, dénués de toute sécurité, de droits à la retraite et autres allocations.

Le dogme allemand du travailleur « low cost » était donc né de ces réformes… Et, de fait, seuls 29 millions d’Allemands (sur près de 42 millions de travailleurs) disposent aujourd’hui d’emplois soumis au régime de la sécurité sociale, pendant que quelque 5,5 millions d’entre eux travaillent à temps partiel, et que plus de 4 millions gagnent moins de 7 euros de l’heure !

 

Un vieil homme vivant dans la précarité à Berlin - JANDKE/CARO FOTOS/SIPA
Un vieil homme vivant dans la précarité à Berlin - JANDKE/CARO FOTOS/SIPA

Le secteur allemand des bas salaires tire par le fond tous les salaires du secteur industriel en agissant comme une sorte de levier infernal. Le travailleur y subit des conditions similaires à celles encore en vigueur dans le Tiers-monde et dans les pays émergents.

La compétitivité elle-même – maintes fois invoquée – n’est-elle pas une notion floue désignant la capacité d’un pays et de ses entreprises à affronter la concurrence ? La compétitivité par le bas – en réalité dévaluation interne – consiste à baisser les prix à l’exportation en diminuant les coûts à la production. Le débat public se concentre donc sur le coût du travail tandis que le coût du capital n’est jamais évoqué, alors que les revenus nets distribués représentent aujourd’hui 10 % de la valeur ajoutée des sociétés non financières.

Ce niveau historiquement record depuis la Seconde Guerre mondiale, par rapport à 5,5% en 1999, permet de conclure que la part dévolue aux actionnaires a donc crû dans des proportions considérables ces douze dernières années.

Autrement dit, la complainte patronale faisant de la baisse du taux de marge la raison profonde des faibles investissements et du moindre effort en matière de recherche et développement ne tient pas la route. Elle passe en effet sous silence la part de plus en plus lourde que les entreprises choisissent de distribuer aux propriétaires de capital, quelle que soit l’intensité de la crise économique et financière.

Voilà pourquoi les droits des salariés subissent une attaque sans précédent. Voilà pourquoi les coûts doivent être comprimés si le but est bien de gagner des parts de marché à l’export. Tels sont à l’évidence les impératifs si le but est bien de toujours plus rémunérer l’actionnariat, les capitaux et en finalité les parieurs en bourses…

Cette logique débouche sur des contradictions inextricables, illustrées par le discours orwélien des industriels et des patrons d’entreprise expliquant que lutter contre les plans de licenciements revient à…lutter contre l’emploi !

Comprenons une fois pour toutes que compétitivité ni rime pas nécessairement avec chômage, avec précarité, ni avec explosion des inégalités, contrairement à ce que marchés et patrons imposent aux salariés et aux travailleurs depuis plus de vingt ans. Rebellons-nous contre les allégations de la Présidente du MEDEF, Laurence Parisot, qui se demandait en 2005 dans le Figaro : « La vie est précaire, l’amour est précaire, pourquoi le travail ne serait pas précaire ? »

De telles déclarations consacrent la défaite du politique. En effet, l’une de ses missions devrait être la détermination des règles du jeu économique et la mise sous tutelle du néo-libéralisme qui n’est qu’une manœuvre visant à mettre l’Europe en pilotage automatique d’une concurrence supposée régler toutes les problématiques.

Remplacer la culture de l’Etat par l’obsession du chiffre revient à fouler aux pieds l’essence même du travail, pourtant source de toute valeur économique.

* Par Michel Santi, économiste, auteur de Splendeurs et micères du libéralisme, (éd. l’Harmattan)

 

 

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12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 17:13

 

 

  Rue89 -   Enquête 11/05/2013 à 17h00

  Hélène Vidoni, journaliste

 

 

Mardi s’ouvre un procès qui devrait permettre d’éclaircir la façon dont l’émir du Qatar procède, de prête-noms en sociétés-écrans, pour investir en France.

 

 


L’ancien siège de HSBC sur les Champs-Elysées à Paris (APESTEGUY/SIPA)

 

Une drôle d’audience va se dérouler mardi 14 mai au tribunal de grande instance (TGI) de Paris. Elle met en scène des personnages qui, d’ordinaire, restent discrets. Contre toute attente, ils se présentent à visage découvert.

Leur objectif : réclamer de généreuses commissions – dont ils auraient été lésés – à la suite de la vente à l’émir du Qatar, le Sheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani, du siège parisien de la banque HSBC. Ils ont assigné la banque ou directement l’émir du Qatar et ses mandataires en France, à payer ce qu’on leur doit pour services supposés rendus. Une première.

L’affaire remonte à 2006. Cette année-là, l’émir du Qatar est informé de la vente possible du siège de la banque HSBC, qui avait été au début des années 1900 le prestigieux hôtel des Champs-Elysées. Il est très intéressé.

Comment le Qatar acquiert de l’immobilier français

La vente aura finalement lieu le 25 février 2010 pour un montant de 400 millions d’euros. C’est officiellement l’agence CB Richard Ellis qui était chargée de trouver le potentiel acquéreur et négocier pour le compte de HSBC. Mais plusieurs intermédiaires estiment avoir joué un rôle déterminant. Ceux-là même qui réclament aujourd’hui réparation.

En les réunissant, mardi, le tribunal devrait permettre de lever un coin du voile sur la façon dont l’émir du Qatar procède, de prête-noms en sociétés-écrans, pour acquérir des biens immobiliers en France. Et sur ce système de commissions, souvent promises, souvent réclamées, mais pas toujours perçues.

Voici les principaux protagonistes de ce procès.

                                                                                                                                                                                                                               1 Chadia Clot

Alias Sanbar Jihan

 

De son vrai nom Sanbar Jihan, née en Palestine en 1947, Chadia Clot est peut-être le personnage le plus intéressant de cette affaire. Proche de l’émir, elle serait le pivot de ses investissements immobiliers en France et en Europe.

Au cours de l’audience, devraient être évoquées les nombreuses sociétés françaises immobilières que Chadia Clot dirige (SCI Concorde, SCI Galaxie Vendôme, SCI Eldom Opéra – dont Rue89 s’est procuré les Kbis) et qui sont détenues par la société néerlandaise Mayapan BV, un des fonds d’investissement en Hollande de l’émir du Qatar (600 millions d’euros d’actifs), dont un certain Victor Agha serait le président.

Dans cette nébuleuse de sociétés françaises, luxembourgeoises, suisses, hollandaises, Rue89 a pu vérifier que c’est la société française Lys Holding Champs-Elysées 1 SAS qui a acquis l’immeuble HSBC. Cette société, domiciliée au 23 rue François Ier (Paris VIIIe) comme toutes les autres SCI précédemment citées, est notamment détenue par une société luxembourgeoise, Lys Holding 1.

Comme pour les autres sociétés, la présidence de la société Lys Holding Champs-Elysées 1 SAS est assurée par la société French Properties Management, elle-même détenue entièrement par la société néerlandaise Mayapan BV. Et French Properties Management est gérée par Chadia Clot.

                                                                                                                                                                                                                             2 Paul Mouchel

L’intermédiaire au passé trouble

 

Cet intermédiaire occulte prétend avoir mis directement en contact les représentants de l’émir du Qatar avec les responsables d’HSBC. Il aurait signé un contrat avec HSBC le mandatant pour faciliter la vente du siège. Toutefois, n’ayant pas de carte d’agent immobilier, il aurait fait appel à la société JFB Immo, dirigée par Laurence Baratte, pour « légaliser » son intervention...

Paul Mouchel serait une sorte de « conseil » immobilier des représentants de l’émir du Qatar en France. Ce que conteste Chadia Clot. Durant de nombreuses années, Paul Mouchel aurait réalisé avec Chadia Clot, main dans la main, des opérations d’acquisitions (il s’agirait du Crédit Foncier pour 250 millions d’euros, l’hôtel de Coislin, place de la Concorde, et plusieurs immeubles pour le compte du Qatar).

Chacun aurait perçu de juteuses commissions pour ces belles affaires. Ce protagoniste, qui « n’a pas », selon certains, « les allures d’un homme d’affaires », aurait un passé un peu trouble…

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                        3 La société JFB Immo

Une obscure entité lyonnaise

 

Il s’agit d’une petite société immobilière lyonnaise qui revendique une commission de plus de 10 millions d’euros à la HSBC pour non-respect de ses engagements et réclame des dommages et intérêts, soit 12 millions d’euros, correspondant à 3% du prix de la vente réalisée.

                                                                                                                                                                                                                             4 Creezy Courtoy

La dame aux parfums

 

Femme du monde, résidant en Belgique, présidente d’une société de parfums en Belgique, Creezy Courtoy prétend avoir contacté un des responsables de la HSBC, un de ses amis de longue date, Pierre Jammes, ancien président d’une filiale de HSBC France afin d’organiser une réunion au plus haut niveau du groupe HSBC avec les représentants de l’émir du Qatar. Elle a assigné Chadia Clot et l’émir du Qatar. Elle réclame 4 millions d’euros.

Quelles sont les véritables relations entre tous ces intermédiaires qui gravitent autour de l’émir du Qatar ?

Quels sont les véritables liens entre Sanbar Jihan, dit Clot, et l’émir du Qatar ?

Quels rôles ont pu jouer la présidente d’une fondation belge spécialisée dans les parfums dans la vente du siège social de HSBC et cette société immobilière située à Lyon, très loin du désert du Qatar ?

Et enfin, quels avantages juridiques et fiscaux tirent l’émir du Qatar et ses intermédiaires en passant par ces montages complexes ?

La réponse à ces questions, peut-être, mardi prochain.

 

 

 

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12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 16:40

 

 

 

Rue89 -  Témoignage 12/05/2013 à 16h38
Sylvie 13 | Technicienne conseil à la CAF

 

 

 


A la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) de Lille, en 2012 (M.LIBERT/20 MINUTES/SIPA)

 

Derrière mon guichet, je vois une population désespérée et en colère. Des gens démunis qui se sentent abandonnés de tous. Ils crient, pleurent, s’énervent. A la Caisse d’allocations familiales des Bouches-du-Rhône où je travaille, les hurlements sont devenus quotidiens.

Un jour, une femme enceinte à littéralement pété les plombs. Elle hurlait, disait qu’elle allait bientôt accoucher et qu’elle n’avait rien pour son bébé. Le gardien ne pouvait rien faire, il ne savait pas comment réagir pour la calmer.

Making of

Sylvie (qui témoigne sous pseudo) travaille à la Caisse d’allocations familiales des Bouches-du-Rhône. Elle est l’une des 350 techniciens conseil, chargée de l’accueil et du traitement des dossiers. La CAF 13 emploi en tout 1 160 salariés. En mars 2013, chose rare, cette antenne de la CAF a fermé quinze jours pour tenter de rattraper son retard dans le traitement des dossiers, qui s’accumulent depuis juin 2012. Daisy Lorenzi

Je me souviens d’un étudiant venu me voir parce qu’il ne touchait plus son aide au logement. Il me disait :

« Je fais comment ? Mes parents ne peuvent pas m’aider. Je vais devoir aller vivre chez des amis. »

Il avait un petit boulot mais ça ne suffisait pas. Il était gagné par la honte.

Je me souviens aussi de cette maman, venue avec ses trois enfants. On lisait le désespoir sur son visage. Elle m’a expliqué ne rien pouvoir acheter à ses enfants, pas même une bouteille de lait. Elle a fondu en larmes devant moi et tout ce que je pouvais faire c’est dire : « Oui, je comprends. » J’écoute, mais je ne peux rien faire.

Une heure d’attente pour trois minutes

Quand les agios et les loyers impayés s’accumulent, les gens me disent : « Faites quelque chose, je vais être à la rue, on va entamer une procédure d’expulsion. » Mais je ne peux rien faire.

Nous recevons souvent une population en colère, désespérée, parfois malade. Et nous n’arrivons pas à la satisfaire : nous sommes de moins en moins nombreux, les allocataires de plus en plus nombreux.

CAF des Bouches-du-Rhône

La CAF des Bouches-du-Rhône compte plus de 400 000 allocataires. Dans un département où 9,7% de la population vit sous le seul de pauvreté, beaucoup de gens dépendent des minima sociaux (92 000 bénéficiaires du RSA).

D’après la direction, 91 000 dossiers sont toujours en attente de traitement. Il y en aurait même 96 000 selon Lionel Zaouati, délégué CGT de la CAF 13, interrogé par Rue89 : « Depuis trois ans, nous sommes victimes de réductions d’effectifs, du non remplacement d’un départ sur deux à la retraite, de fermetures d’accueils. Alors que notre charge de travail a augmenté avec la crise. » D.L.

Avant, quand un allocataire venait, on lui donnait un délai de trois semaines avant que son dossier soit traité [lire encadré ci-contre, ndlr]. Aujourd’hui la réponse est toujours la même :

« On ne peut pas vous donner de délais. »

Les personnes reviennent deux fois, trois fois, parfois quatre en quinze jours, et à chaque fois on leur donne la même réponse. Elles ne comprennent pas et le ton monte progressivement.

L’ambiance de la salle d’accueil est devenue électrique et difficile à gérer, malgré la présence d’un agent de sécurité. Quand les portes s’ouvrent, ce sont quarante personnes qui veulent rentrer d’un coup et qui se disputent les tickets. Certaines en sont venues aux mains. On est obligé de filtrer les entrées depuis l’extérieur et de ne laisser rentrer que par petits groupes de dix.

A l’intérieur, une dizaine de bancs pour 60 à 80 personnes qui attendent là, entassées, souvent debout. Dès que quelqu’un s’énerve, la tension monte entre les allocataires. L’attente dure souvent plus d’une heure. Pour trois minutes derrière notre guichet : nous n’avons pas de temps à leur accorder.

« Si je te croise dans la rue, je te fais la peau »

Je sais que la tension peut exploser à tout moment. La personne calme en face de moi peut soudainement se mettre à crier, m’insulter. Souvent, je suis derrière mon ordinateur, je vois que le dossier n’a pas été traité et je redoute de devoir l’annoncer. Je sais que ça va crier.

« Pourquoi moi ? Vous ne comprenez pas ma situation. Vous êtes une menteuse, des bons à rien... »

C’est toute la douleur et la frustration de leur situation qu’ils déversent sur nous. Le sentiment d’impuissance est omniprésent.

Les incidents arrivent de plus en plus régulièrement : des agressions verbales quotidiennes et parfois des agressions physiques. Elles sont plus rares, mais elles existent : un collègue a reçu une chaussure, une autre s’est fait gifler, les gens s’en prennent aux ordinateurs. Le plus choquant, ce sont les menaces :

« Si je te croise dans la rue, je te fais la peau. »

Je me sens tellement démunie

Un jour, une personne a menacé de s’immoler devant nous. Elle tenait une bouteille et criait : « Il faut vraiment que vous le fassiez maintenant. » Un stress qui ne cesse de s’accentuer et qui rend notre mission très compliquée. Je me sens tellement démunie.

Je pars parfois travailler avec la boule au ventre. Vais-je tenir toute une journée ? Arriverai-je à atteindre les objectifs statistiques imposés par la direction ? Aurai-je le malheur de rencontrer une personne plus énervée qu’une autre ? Aurai-je à gérer des cris, des pleurs ?

J’ai régulièrement des migraines et des douleurs dans le dos. Plusieurs collègues sont en dépression, enchaînent les arrêts maladie car il ne peuvent combattre ce stress incessant. Chacun essaie de résister à sa façon.

Dans mon département, les accueils ont été fermés pendant quinze jours. Nous étions tous affectés à des tâches de liquidation, c’est-à-dire de traitement des dossiers afin de déclencher le paiement des prestations au plus vite et endiguer notre retard.

Malgré toute notre bonne volonté, ceci n’a pas été possible, le retard était trop grand.

 

 

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12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 16:28

 

 

 

Rue89 -  Le grand entretien 12/05/2013 à 10h59
Pascal Riché | Cofondateur Rue89

 

Coupes budgétaires, marché du travail plus flexible : pour le journaliste Guillaume Duval, les raisons du redressement économique de l’Allemagne sont ailleurs.

Pourquoi la France a-t-elle décroché par rapport à l’Allemagne, en termes de compétitivité, de croissance et d’emploi ?

 


« Made in Germany » de Guillaume Duval

 

On attribue généralement le succès allemand aux réformes engagées en 2000 par le chancelier SPD Gerhard Schröder, dans son « agenda 2010 » : flexibilisation du marché du travail et coupes claires dans les dépenses publiques. C’est cet effort, auquel se refuseraient les Français, qui serait payé de retour aujourd’hui.

Le journaliste d’Alternatives Economiques Guillaume Duval vient de signer chez Seuil un livre très éclairant sur l’Allemagne, « Made in Germany », dans lequel il remet frontalement en question ce diagnostic.

Rue89 : Tu as la conviction que le succès allemand n’a rien n’a voir avec les réformes engagées par Schröder. Explique-nous.

Guillaume Duval : Avec Schröder, c’est la première fois que la gauche arrive vraiment au pouvoir en 140 ans. Il engage des réformes importantes, notamment sur le marché du travail, et il exerce une pression importante sur les dépenses publiques.

Mais le succès actuel des Allemands n’a rien à voir avec ces efforts qu’ils se sont imposés. De telles réformes, importantes, ont même plutôt à mes yeux fragilisé les points forts traditionnels de l’économie allemande.

 


Guillaume Duval (Alternatives Economiques)

 

Sur le coup d’abord, la politique de Schröder s’est traduite par un recul très significatif du pouvoir d’achat des salariés, qui commencent tout juste à s’en remettre, et par un recul de l’emploi : quand Schröder quitte le pouvoir en 2005, il y a 5 millions de chômeurs. Par ailleurs, alors qu’il y avait autrefois moins d’inégalités et de pauvreté qu’en France, il y en a plus aujourd’hui.

Certains considèrent que ces inégalités et cette pauvreté ont été le prix à payer pour le redressement allemand. Je ne pense pas que ce dernier ait quoi que ce soit à voir avec les réformes Schröder. Selon moi, il est dû à trois facteurs qui préexistaient avant la crise, et à trois autres qui ont joué un rôle pendant la crise.

  1. Trois atouts : la démographie, l’Europe de l’Est, les biens d’équipement
  2. La flexibilité à la Schröder n’a pas été utilisée
  3. Pourquoi les dépenses publiques allemandes sont moins élevées
  4. Ce qu’il faudrait importer du système allemand en France

 

Commençons par les trois facteurs hors-crise.

L’Allemagne d’abord, a paradoxalement bénéficié de son déclin démographique. Les Français considèrent que c’est très bien d’avoir plein de gamins, plein de jeunes, que c’est une richesse pour l’avenir du pays. C’est sans doute vrai, mais dans l’immédiat, cela coûte très cher. Quand on a des enfants, il faut les loger, les nourrir, les éduquer, leur payer des téléphones portables...

Autant de dépenses privées et publiques en plus que les Allemands n’ont pas eu à dépenser. C’est une des raisons pour lesquelles les dépenses publiques ont été plus faibles et c’est une des raisons qui ont facilité la modération salariale : quand on n’a pas de gamins, on peut tolérer plus facilement une austérité salariale prolongée.

La démographie a surtout favorisé le maintien de prix immobiliers très modérés. Ils n’ont pas bougé depuis quinze ans, et commencent juste à le faire depuis deux ou trois ans. En France, les prix ont été multipliés par 2,5 dans le même temps. Cela se comprend : la France a gagné 5 millions d’habitants depuis le début des années 2000, quand l’Allemagne en a perdu 500 000.

Résultat : alors que l’immobilier neuf valait en France 3 800 euros du m2 en France en 2011, il valait en Allemagne seulement 1 300 euros du m2 la même année. On est dans un rapport de un à trois. Cela explique pourquoi les Allemands ont pu accepter une austérité salariale prolongée.

 


La démographie en France et en Allemagne (Olivier Berruryer/LesCrises.fr)

 

Deuxième point, les conséquences de la chute du Mur. Les Allemands ont l’habitude de se plaindre du coût que la réunification a représenté. Mais l’Allemagne a été au bout du compte la grande gagnante de la chute du mur, car elle a réintégré très rapidement et très fortement les pays d’Europe centrale et orientale à son système productif.

Avant, le pays à bas coût qui fournissait l’industrie allemande, c’était plutôt la France. Maintenant, ce sont la Tchéquie, la Slovaquie, la Hongrie, la Pologne... La différence, c’est que le coût du travail dans ces pays est cinq fois moindre qu’en France. L’Allemagne, en réorientant sa sous-traitance vers ces pays, a obtenu un gain de compétitivité-coût phénoménal pour son industrie.

La France n’aurait-elle pas pu faire de même ?

Délocaliser sans perdre sa base productive nationale n’est pas si simple. Ce qui est intéressant, dans le cas allemand, c’est de comprendre pourquoi cela s’est bien passé. La réponse à cette question est liée à la codétermination, un des trucs auxquels Schröder n’a heureusement pas touché. Il a fallu négocier tout ce processus avec les syndicats allemands, qui ont, dans les grandes entreprises, beaucoup plus de pouvoir que les syndicats français. Les comités d’entreprise ont un droit de veto sur toutes les grandes décisions et il y a, dans les conseils d’administration, une moitié de représentants des salariés. Ils ont donc négocié étroitement ces délocalisations et n’ont pas dit, comme Tchuruk [ex-patron d’Alcatel, ndlr], « on va faire des entreprises sans usines ».

La France l’a fait un tout petit peu, avec Dacia-Renault, en Roumanie. Mais on n’a pas su le faire à grande échelle. On en discute maintenant avec le Maroc : Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur, parle de « colocalisation ». Mais on n’en est pas du tout au même stade que les Allemands, et c’est un inconvénient majeur pour l’industrie française.

Passons au troisième facteur hors-crise

Le troisième facteur est bien connu, mais il a joué à fond pendant les années 2000 : c’est la spécialisation de l’Allemagne dans les biens d’équipement – les machines. Celle spécialisation a correspondu à l’explosion de la nouvelle demande des pays émergents. L’Allemagne, c’est 18% des emplois européens, mais 33% des emplois dans les biens d’équipement européens.

 


Source : « Made in Germany »

 

Mais la France est aussi championne dans certains secteurs, je pense aux biens de luxe, qui rencontrent aussi une forte demande dans les pays émergents, avec l’apparition d’une classe bourgeoise...

C’est vrai. Mais les volumes concernés n’ont rien à voir. Quand la Chine devient l’usine du monde, ce sont des machines allemandes qui sont implantées partout. Idem au Brésil et en Inde... Quand Renault construit une usine à Tanger, ce sont aussi des machines allemandes qui l’équipent. Les nouveaux riches achètent des sacs Vuitton, c’est vrai, mais ils achètent aussi surtout des grosses voitures, et des Mercedes ou des BMW, pas des Peugeot ou des Renault.

Donc, on voit bien que ces trois facteurs puissants – démographie, sous-traitance en Europe centrale et spécialisation – n’ont rien à voir avec les réformes Schröder.

MERCI RIVERAINS ! Pierrestrato
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12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 16:08

 

 

LE MONDE | 11.05.2013 à 10h47 • Mis à jour le 11.05.2013 à 17h56

Par Marc Roche

 
 
A Londres, un homme, portant le masque du ministre britannique des finances, George Osborne, réclame davantage de régulation bancaire, jeudi 25 avril.

 

Londres, correspondant. Alors que l'évasion fiscale est à l'ordre du jour du G7 sous présidence britannique qui se tient à Hartwell House, près d'Oxford, les 10 et 11 mai, la City est dans tous ses états après l'annonce d'une enquête officielle sur le recours par les particuliers et les entreprises à des sociétés offshore en vue de frauder le fisc. Les complices des évadés fiscaux que sont les cabinets d'avocats ou de comptables et tous les intermédiaires sont dans le collimateur des autorités britanniques.

Singapour, îles Vierges, Caïmans et Cook... Ces quatre paradis fiscaux anglophones sont dans l'oeil du cyclone pour avoir immatriculé des montages fiscaux offshore très complexes dont ont profité au moins une centaine de contribuables du Royaume-Uni, a annoncé le ministre britannique des finances, George Osborne.

L'enquête fait suite à la transmission de 400 gigabits de données aux autorités britanniques mais aussi américaines et australiennes. A en croire, Her Majesty's Revenue & Customs (HMRC) – le fisc britannique – un premier lot de documents provenant d'un "donneur d'alerte" a été reçu dès 2009. L'ensemble des documents sont arrivés à la fin 2010.

 

LACUNES DE L'OUTIL INFORMATIQUE

Comment expliquer ce délai entre la réception et l'annonce de l'enquête ? A l'époque, le fisc britannique était désarmé face à l'évasion fiscale à grande échelle. Le gouvernement tory-libéral-démocrate aux affaires depuis mai 2010 avait mis l'administration des impôts à la diète.

La tâche de recouper le cadastre, la liste des électeurs et le registre des sociétés, pour affiner le profil des fraudeurs, s'était heurtée aux lacunes de l'outil informatique. Démoralisés, mal payés, les meilleurs éléments du HMRC partaient pour le privé du côté de ceux qu'ils avaient traqués.

Par ailleurs, la législation interdit de rendre public le nom des suspects avant de leur avoir donné l'opportunité de négocier les taxes impayées et l'amende. Philip Beresford, auteur du classement du Sunday Times des plus grosses fortunes britanniques, affirme que la liste dont dispose le ministère devrait surtout être composée d'associés de hedge funds (fonds spéculatifs) ou d'entreprises de capital-investissement.

 

"COQUILLES VIDES"

"Comme ce fut le cas au cours de la crise financière de 2008, l'opinion va nous clouer au pilori sans distinguer le bon grain de l'ivraie, les financiers qui paient leur dû et les fraudeurs", souligne un opérateur de hedge fund dûment régulé comme ses pairs par l'autorité de tutelle britannique. "Réduire en toute légalité ses impôts n'est pas seulement un droit mais un devoir envers nos clients", tel est le leitmotiv après l'annonce, le 9 mai, de l'ouverture de l'enquête.

Installé à George Town, chef-lieu des Caïmans, M. Bergstrom, associé du cabinet Ogier, insiste sur le côté légal des montages, des "coquilles vides" créées pour éviter la double taxation.

Le cercle magique de "l'économie de l'ombre" (shadow banking) est d'autant plus inquiet que le champ de l'investigation a été élargi à 200 bureaux d'avocats, cabinets comptables, consultants et autres conseillers fiscaux accusés de complicité.

Spécialistes du repérage des lacunes de la législation, ces experts passent à la loupe le maquis des réglementations fiscales les plus complexes pour trouver la faille et se précipitent dans les brèches. Grâce à leur savoir-faire payé très cher quand il s'agit d'opérations complexes touchant plusieurs pays, ces croisés de la dissimulation font payer le moins d'impôts possible à leurs riches clients.

 

LES CONTRE-POUVOIRS ONT LONGTEMPS LAISSÉ FAIRE

Face à ces spécialistes, dont les opérations sont entourées du plus grand secret, les contre-pouvoirs que sont l'administration fiscale et le gouvernement ont longtemps laissé faire. "C'est la volonté politique qui manquait en raison de la trop grande proximité entre les gouvernants et la City", comme l'indique John Christensen, directeur du réseau de transparence fiscale Tax Justice Network, les contributions des milieux financiers aux caisses des trois grands partis, conservateur, travailliste, libéral-démocrate, ont amené Londres à fermer les yeux.

De plus, dès qu'il levait le petit doigt dans sa zone d'influence qui sentait l'argent noir à plein nez, le Foreign Office était accusé par les autorités locales de néocolonialisme. La crise économique a changé la donne. En ces temps de vaches maigres qui réduisent les rentrées fiscales, le Trésor britannique doit augmenter les recettes de l'impôt pour ne pas creuser le déficit budgétaire déjà abyssal.

Selon le ministère des finances, au cours de l'exercice 2010-2011, le manque à gagner dû à l'évasion fiscale est estimé à 14 milliards de livres (environ 17 milliards d'euros). Pour tenter d'en récupérer une partie, les effectifs du fisc ont été renforcés. Londres vient de contraindre huit zones off shore placées sous souveraineté britannique de fournir automatiquement des informations sur les comptes bancaires aux cinq plus grands pays de l'Union européenne.

 Marc Roche
journaliste au Monde.fr

 


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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 17:06

 

leprogres.fr

Publiée le 09/05/2013 à 23:47




Les distributeurs d’essence ont enregistré des marges record en mars selon la Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie qui appelle les pouvoirs publics à un contrôle strict.

 

 

En mars, les distributeurs ont réalisé une marge de 15,6 centimes par litre de SP 95. Un record. Photo Jean Francois Souchet

En mars, les distributeurs ont réalisé une marge de 15,6 centimes par litre de SP 95. Un record. Photo Jean Francois Souchet

 

 

Faire le plein cet été devrait coûter très cher. « Généralement, avant les vacances, avec la consommation mondiale qui augmente, le cours du baril augmente. Il faudra être alors vigilant aux marges des distributeurs », indique François Carlier, directeur général de la Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie (CLCV). Pour l’association de consommateurs, les distributeurs « dérapent déjà » aujourd’hui. Au détriment du pouvoir d’achat des Français. « Une marge raisonnable se situe autour de 8/9 centimes. Il faut que les distributeurs fassent des efforts », demande François Carlier.

Vigilance relâchée

Au mois de mars, les marges ont atteint 15,6 centimes pour l’essence SP 95 et 10,4 pour le diesel. Un record historique. En avril, une légère baisse a toutefois été enregistrée selon la CLCV pour atteindre 12,8 centimes pour l’essence et 10,3 pour le diesel. « Mais cela reste très élevé », note François Carlier. Depuis le début de l’année, l’association de consommateurs a remarqué que les distributeurs « rattrapaient le temps perdu » après les mesures prises par le gouvernement pour stopper l’inflation du prix à la pompe d’août à décembre 2012. À cette époque, le gouvernement avait baissé de trois centimes par litre les taxes sur les carburants et négocié avec les industriels un coup de pouce supplémentaire d’un à trois centimes. La plupart des enseignes de grande distribution et les pétroliers s’étaient engagés à rogner sur leurs marges. « Et les marges avaient été plutôt raisonnables, de l’ordre de 6/9 centimes. Mais depuis que le gouvernement a relâché sa vigilance, on est reparti la hausse ».

Ces deux derniers mois, c’est une légère baisse du prix du baril grâce à un euro fort qui a permis aux distributeurs d’augmenter leurs marges. « Le coup classique. Cela ne se voit pas trop », dénonce François Carlier. Pour mieux réguler le prix de l’essence, CLCV demande la mise en place d’un Observatoire des prix et des marges comme il en existe pour l’alimentaire.

Patrice Barrère

 

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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 17:04

 

 

Agoravox

  par fsald jeudi 9 mai 2013  

 

Le but de ce papier est de déconstruire le discours idéologiques autour de l'Entreprise et des Entrepreneurs. Discours qui est véhiculé par les médias, le MEDEF et les partis politiques à longueur de débats, L’entrepreneur serait en France "bridé" dans ses élans en priorité par un déficit public "structurel"qui entrainerait de lourds prélèvements sur l'entreprise et de ce fait, la rendrait moins compétitive que ses "voisins" Il y aurait donc urgence à réformer cela sinon ce pays ne retrouverait pas la croissance et par conséquent l'emploi, voire même que nos Entreprises et nos Entrepreneurs à force de "courber l'échine" pourraient partir ailleurs, rechercher l'eldorado.

Pour essayer de comprendre, il est nécessaire de mieux appréhender la réalité du tissus productif en France, on en parle souvent mais on entre jamais assez dans le détail. C'est tellement plus simple de mettre toutes les entreprises dans le même sac.

Cependant avant d'aller plus loin, il est bon de préciser pour commencer quelques définitions.

Selon l'Insee :

Les microentreprises sont des entreprises qui, d'une part occupent moins de 10 personnes, d'autre part ont un chiffre d'affaires annuel ou un total de bilan n'excédant pas 2 millions d'euros

Les petites et moyennes entreprises (PME) sont des entreprises qui, d'une part occupent moins de 250 personnes, d'autre part ont un chiffre d'affaires annuel n'excédant pas 50 millions d'euros ou un total debilan n'excédant pas 43 millions d'euros.

Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) sont des entreprises qui n'appartiennent pas à la catégorie des PME et qui d'une part occupent moins de 5 000 personnes, d'autre part ont un chiffre d'affaires annuel n'excédant pas 1 500 millions d'euros ou un total de bilan n'excédant pas 2 000 millions d'euros.

Les grandes entreprises sont des entreprises qui ne sont pas classées dans les catégories précédentes.

Toujours selon l'Insee, il y avait en 2010 La france comptait 26 259 500 emplois, 23 792 000 emplois salariés (dont 7 609 500 dans la fonction publique, première remarque, l’État est de loin le plus gros employeurs de salariés dans ce pays avec 32% des emplois salariés) et 2 467 500 emplois non salariés.

Ces emplois étaient répartis dans 3 081 792 entreprises au sens de l'Insee. Dans le tableau en fichiers attachés, ci dessous on peut rentrer dans le détail par catégorie d'Entreprise.

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La lecture attentive de ce tableau permet de mettre en évidence quelques vérités et aussi, on le verra plus tard, de démythifier le rôle de "l'Entrepreneur" le seul créateur des richesses et des emplois, véritable demiurge de l'économie moderne. Mais avant d'aller plus loin .

 Ce tableau nous montre que :

Les microentreprises  : Les plus nombreuses, elles représentent 95,5 % des entreprises en France, elles comptent en moyenne un peu moins d'un salarié par unité ( parmis elles beaucoup sont des autoentepreneurs) Elles n'occupent cependant que 10,7% des emplois salariés de ce pay !

Les PME elles sont au nombre de 135 823 entreprises ( les Pme : plus de 10 salariés et moins de 250) occupent un peu plus de 3 500 000 salariés soit 15 % des emplois salariés totaux. Près de 20 % d'entre elles sont organisées en Groupe !

Les Entreprise de Tailles Intermédiaires ( ETI ) sont au nombre de 4623 soit 0,15% de l'ensemble, elles comptent 12,2% des emplois salariés français. La structure de Groupe domine clairement, seules 10% d'entre elles sont constituées d'une seule unité juridique !

A l'autre extrémité 229 Grandes Entreprises( 0,007% de l'ensemble) occupent un peu plus de 4 000 000 de salariés soit 17,1% des effectifs salariés français. Elles sont toutes organisés en « Groupe » Les 2/3 sont françaises et emploient 82% des salariés que comptent cette catégorie les 18% de salariés restant le sont par les groupes d'origines étrangeres.

 A retenir : 4622 ETI + 229 GE, soit 4852 entreprises représentant 0,16% de l'ensemble des entreprises en France, emploient 29,3% du total des emplois salariés du pays ou encore 53% des emplois privés !

A ce stade récapitulons :

l'Etat comptabilise 32 % des emplois salariés....1er employeurs de France !

les GE, ETI et PME qui représentent moins de 4,5 % des entreprises en France couvrent 44,3% des emplois salariés ou encore 81% des emplois privés. Ce sont principalement vers elles que vont ce concentrer les 20 milliards de cadeaux fiscaux du pacte de compétitivité de F. Hollande ( 6 % de la masse salariale ! )

Elles réalisent près de 75% de la Valeur ajoutée ( hors agriculture, secteurs public et financiers) et plus de 80% des exportations

 Les microentreprises on le rappelle avec 1 emploi en moyenne, sont les plus nombreuses, elles représentent  95,5% des entreprises on l'a vue. Et elles ne couvrent cependant que 10,7 % des emplois salariés. Ce serait là, si l'on en croit la légende, le vivier des emplois et de la croissance de demain ?

Au regard de ces résultats dire que le secteur productif de ce pays est fortement concentré est un euphémisme !

Cette concentration est tout aussi visible dans le secteur industriel, fer de lance de toute économie c'est bien connu.

Pour ce qui concerne l'Industrie un peu moins de 212 900 entreprises ( 7% de l'ensemble) emploient un peu plus de 3 300 000 salariés ! Soit 13,9% des emplois salariés du pays.

  • 71 Groupes classées comme Grande Entreprise emploient 1 127 990 salariés, soit 34% des emplois industriels. 100% de ces entreprises, exportent. Ils réalisent un peu plus de 33% de leur CA à l'exportation.

  • 1551 Groupes classés en Entreprise de Taille Intermédiaire emploient 1 062 500 soit 32% des emplois industriels. Fortement exportatrices elles aussi. Près de 94% d'entre elles exportent 30% de leur CA !

  • 25 823 Pme emploient 828 690 salariés, soit 25% des salariés de l'industrie, majoritairement exportatrice, près de 57% d'entre elles exportent environ 24,5% de leur CA.

L'Industrie dans sa totalité réalise 65% des exportations françaises en valeurs. Les GE et les ETI 1622 groupes ( 0,8% du secteur) réalisent à elles seules près de 60% des exportations françaises !

Ces 1622 groupes, emploient 66% des salariés de l'ensemble du secteur " Industrie" !

Comme on le voit le secteur industriel est lui aussi fortement concentré. On peut légitimement affirmerque la totalité de ces 1622 entreprises sont cotées sur un des marchés boursiers français et on peut donc légitimement penser à partir de quelle logique financière elles fonctionnent !

Cette concentration relativise déjà le matraquage sur la compétitivité des entreprises que l'on balance à longueur de débat sur le sujet. Si il faut chercher des responsables d'une quelconque faiblesse compétitive de nos entreprises, on sait où les trouver !

Nous sommes donc bien loin du mythe de l'entrepreneur qui crée les richesses et les emplois !

Bien sur que l'Entrepreneur au sens schumpétérien du terme est nécessaire mais il n'est pas suffisant. Il y en a toujours eu et il y en aura toujours.

Les Entreprises qui concentrent les emplois et la richesse aujourd'hui en France sont estimés à environ 4250 Groupes ( les 1622 GE et ETI qu'on vient de citer auxquels il faut rajouter les quelques Pme organisées en Groupe, soit 20% d'entre elles)

 Les « pigeons » au début du quinquennat, le Rapport Gallois, le MEDEF à longueur de communiqué et F.Hollande récemment aux assises de l'entrepreneuriat, nous rabâchent que 3 millions d'entreprises et autant d'entrepreneurs sont à "choyer" "bichonner" afin qu'ils ne perdent pas confiance, ne baissent pas les bras et qu'ils puissent contribuer à donner de la « croissance » à notre beau pays. Tous dans le même panier ! Belle fable, pour avoir travaillé sur le sujet ( je l'ai fait une grande partie de ma vie active !) seulement un peu moins de 5% des créations d'entreprises ont la potentialité de devenir une PME et 0,05% une ETI ! Ça c'est la réalité, aujourd'hui on pourrait bien sur améliorer ce constat par exemple en proposant au créateur d'entreprise le financement à 80% de ces investissements matériels et immatériels ainsi que du besoin en fonds de roulement, par des prêts à faible taux. Pour le reste les outils pour financer à hauteur les ambitions d'un bon " plan de développement" existent, je confirme par une longue pratique. Mais cela prend du temps et ne se fait pas du jour au lendemain il faut quelques années et cela ne répond pas à l'urgence actuelle celle de créer des emplois et de résorber les déficits des comptes sociaux résultant du nombre de destruction d'emplois pour convenance "boursière"

On compare souvent la France à L'Allemagne surtout en matière économique, souvent pour souligner les performances allemandes en matière de chômage, c'est occulter un peu vite le comportement différents des entreprises allemandes qui ont privilégié les emplois, et donc peu licencié quand en 2008-2009 leur PIB chutait de plus de 4% alors que nos entreprises licenciaient à tour de bras quand sur la même période notre PIB chutait de 1,5%. Il est vrai que les salariés allemands ont autant de représentant dans les conseils d'administration que les actionnaires, cela a peut être compté ?
 Récemment sur le plateau de « Mots croisés » sur France2, M.Geoffroy Roux de Bézieux, PDG du groupe Omer Télécom ( Virgin mobile) candidat à la Présidence du MEDEF, mais aussi entre autre co-fondateur du FCPR. ISAI, s'employait à convaincre M. Ph.Poutou, leader du NPA en martelant que le problème en France c'était que : "2,7 millions d'Entreprises « crevaient » la bouche ouverte" alors que les 40 entreprises du cac 40, elles, ne représentaient rien !" Même M.Calvi en bon chien de garde, en rajoutait une couche dans l'émission en affirmant que « la 1ère Entreprise de France ce sont les Pme !

En fait tout ces discours sur ces millions de petites entreprises qui souffrent et croulent sous le poids des prélèvement obligatoires d'un État trop dispendieux est en réalité un discours idéologique pour masquer la vraie raison de ce lobbying intensif de la part de quelques milliers d'entreprises constituées en Groupe, obéissant à une logique boursière, pour moitié français et pour l'autre moitié étrangers afin d'optimaliser le rendement de leurs actions à court terme au détriment du développement sur le long terme et donc de l'emploi. Le discours dominant consiste à se plaindre que ces entreprises ne dégagent pas assez de marges suffisantes parce qu'elles croulent sous le poids des charges des prélèvements obligatoires qui pèsent sur elles, en ces temps difficiles, pour investir ou mieux créer des emplois.

Diantre, on en pleurerait ! Mais alors comment interpréter le graphisme ci dessous qui montre qu'elles dégagent suffisament de marges pour distribuer toujours plus des dividendes (cf-graphique_bdm_dividendes ci dessous)

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Alors que parallèlement on annonce le déclin (cf- rapport Gallois) de la compétitivité des entreprises françaises, depuis le début des années 2000 on s’aperçoit également que pendant cette période les dividendes ont augmenté de 300%  !

Alors que ces entreprises délocalisent fortement (leurs filiales à l'étranger réalisent près de 3 fois plus de CA que leur CA à l'export !) et qui, pour l'essentiel, payent un impôts sur le bénéfice disons anecdotique grâce à l'optimisation fiscale et aux paradis fiscaux, car ici aussi contrairement à la Constitution l'impôt est régressif, plus on est gros moins on en paye ! Les dirigeants de ces quelques milliers d'entreprises, soyons pas regardant, disons les 10 meilleurs salaires, représentent, comme par hasard une quarantaine de mille de personnes au sommet de l'échelle des revenus, c'est à dire le1/1000 décile supérieur, ceux là même qui ont bénéficié sous Sarkozy du Bouclier fiscal et qui ont vu leur revenu croitre depuis 10 ans à une vitesse vertigineuse et qui bénéficient des niches fiscales et qui "planquent" aujourd'hui dans les paradis fiscaux leurs magots dont ils placent une grande partie en obligations en dettes souveraines, dont des obligations françaises, pour faire fructifier leurs "avoirs" sans risques en ces temps de crise ! On comprend alors leur satisfactions à l'annonce du maintien de l'exonération sur les plus values de cessions immobilières !

Est-il normal donc que ces entreprises et leurs dirigeant ne prennent pas leur Responsabilité en ne se comportant pas comme des entreprises citoyennes en favorisant l'Emploi, et en particulier l'emploi des jeunes dans leurs accès à un premier job par exemple ou encore en s’acquittant d'impôts qui n'est que le juste prix à payer par ces entreprises pour l'usage des infrastructures dont elles "usent" et abusent dans ce pays. Une Entreprises n'est pas un OVNI en suspension sur un territoire, mais un agent économique bien ancré sur ce territoire et qui par conséquent doit s'acquiter d'impôts. C'est bien connu les nouvelles méthodes de gestion de la production, depuis plus de 20 ans ont fait que les stocks de ces entreprises ne sont plus ans l'entreprise mais sur les routes, que payent et qu'entretiennent les contribuables !

Non les "pigeons " ne sont pas ceux qui s'en réclament, mais tous les contribuables qui payent pour eux...

 

 

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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 16:59

 

Médiapart

 

 

 

Lire aussi

C’est par un communiqué, diffusé ce vendredi 10 mai dans l’après-midi, que la nouvelle est tombée. Le procureur de la République de Bordeaux, Claude Laplaud, requiert un non-lieu en faveur de Patrice de Maistre et d’Eric Woerth dans un des volets de l’affaire Bettencourt.

« Dans la procédure suivie aux cabinets de Monsieur Jean-Michel GENTIL, Mesdames Cécile RAMONATXO et Valérie NOEL, pour financements illicites de campagne électorale et de parti politique, complicité et recel de ces délits, trafics d’influence, à raison de laquelle MM. Patrice de MAISTRE et Eric WOERTH ont été mis en examen pour trafics d’influence actif et passif, le parquet a remis, ce jour, son réquisitoire définitif afin que les susnommés soient admis au bénéfice de non-lieux », expose le communiqué du parquet.

« Les délits de financements illicites de campagne électorale et de parti politique – pour lesquels MM. WOERTH et de MAISTRE n’ont d’ailleurs pas été mis en examen – ne ressortent, en effet, nullement caractérisés et, à supposer le contraire, circonscrits au 1er trimestre 2007, ils auraient, en tout état de cause, été couverts par la prescription de l’action publique », précise le procureur, sans trop d'égards pour le travail effectué dans ce dossier par les juges d'instruction.

 

Le procureur Claude Laplaud 
Le procureur Claude Laplaud© ©Reuters

Par ailleurs, « s’agissant des présomptions de trafic d’influence, à raison de la mise à disposition par l’État de la « Parcelle de l’An IV », sise 11 quai de Conti à PARIS 6°, à l’Institut de France, pour qu’il y soit réalisé un auditorium financé par Mme Liliane BETTENCOURT, opéré par arrêté ministériel du 29 janvier 2009, signé par M. Eric WOERTH alors Ministre du Budget, il a pu être établi que cette décision était intervenue en application et pour la mise en œuvre des dispositions entérinées par le Parlement, notamment de l’amendement n° 374 adopté le 9 décembre 2008 par l’Assemblée Nationale dans le cadre du projet de loi de finance rectificative pour 2008 (article 36 III de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 rectifié) et que, par conséquent, l’action conduite par M. Eric WOERTH n’encourt aucun reproche », assène le procureur.

Pour finir, « Concernant enfin les présomptions de trafic d’influence relatives aux conditions d’embauche de Mme Florence WOERTH au sein de la société CLYMENE (société gestionnaire du patrimoine de Mme Liliane BETTENCOURT, dirigée par M. Patrice de MAISTRE) et de la nomination de M. Patrice de MAISTRE dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur, le parquet estime que le lien de corrélation entre les deux faits – condition nécessaire à la caractérisation du délit – n’est pas formellement démontré ». Fermez le ban.

Certes, le procureur de Bordeaux a toujours été d'une prudence extrême, proche de la componction, dans cette affaire d'Etat qu'est le dossier Bettencourt. Sa gestion médiatique de la mise en examen d'Eric Woerth par les juges d'instruction avait déja suscité de sérieuses critiques (lire notre article ici).

Mais l'analyse juridique faite aujourd'hui par le procureur Laplaud, pleine de compréhension et de mansuétude pour Eric Woerth et Patrice de Maistre, au point qu'elle épouse parfaitement leur défense, tranche très singulièrement avec celle qui a été faite depuis deux ans par les trois juges d’instruction chargés du dossier. Le 12 juin 2012, ceux-ci avaient mis en examen l'ex-gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, pour « trafic d'influence actif » dans l'affaire de la Légion d'honneur que lui avait remise l'ex-ministre Eric Woerth en janvier 2008.

 

Placé pendant près de trois mois en détention provisoire, avant d'êre remis en liberté contre le paiement d'une caution de 2 millions d'euros, en juin 2012, Patrice de Maistre avait, auparavant, été mis en examen (les 15 décembre 2011 et 22 mars 2012)  pour « abus de faiblesse » à l'encontre de l'héritière de l'empire L'Oréal.

 

Patrice de Maistre 
Patrice de Maistre

Eric Woerth avait pour sa part été mis en examen le 8 février pour « trafic d'influence passif » dans l'affaire de cette Légion d'honneur. Une décoration qu'il aurait fait obtenir à Patrice de Maistre en échange d'un emploi pour sa femme Florence, embauchée à l'été 2007 par la société Clymène, dirigée par de Maistre et chargée de gérer l'argent reversé par L'Oréal à Liliane Bettencourt.

Patrice de Maistre a, par ailleurs, fait l'objet de plusieurs autres mises en examen, notamment pour « abus de biens sociaux ». Il est au cœur des nombreuses interrogations quant à l’utilisation des 4 millions d'euros appartenant à Liliane Bettencourt, qui ont été rapatriés discrètement de la Suisse vers la France de 2007 à 2009, et dont une partie aurait servi à financer de façon illégale la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, selon l’instruction.

L'ancien gestionnaire de fortune a reconnu avoir rapatrié de Suisse des fonds gérés par des avocats locaux sur des comptes cachés, ce à la demande des époux Bettencourt, mais il s’est toujours refusé – en revanche – à confirmer la moindre remise d’espèces à des politiques.

 

Eric Woerth  
Eric Woerth

A noter: Nicolas Sarkozy n'est, pour sa part, pas mis en examen dans cette partie du dossier, mais dans le volet « abus de faiblesse ». Là aussi, certaines informations de presse ont laissé penser que le procureur entendait requérir prochainement un non-lieu en faveur de l'ex-président de la République (lire notre article ici). Une demande d'annulation de la mise en examen de Nicolas Sarkozy et d'autres personnalités poursuivies est actuellement pendante devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux.

Quoiqu'il en soit, les juges d'instruction ne sont pas tenus par les réquisitions du parquet, qui sont indicatives. S'ils ne se déjugent pas, ils devraient renvoyer Eric Woerth et Patrice de Maistre devant le tribunal correctionnel.

 

 

 

 

 

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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 16:48

 

Médiapart

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Le premier transformateur de viande français vient de proposer aux syndicats un accord de mobilité, reprenant l'esprit de l'Accord national interprofessionnel, signé en janvier dernier. À Ailly-sur-Somme en Picardie, les syndicats redoublent d'inquiétude pour l'avenir de leur usine vieillissante.

 

Et si la loi sur la sécurisation de l'emploi avait l'effet inverse de celui escompté.

À Ailly-sur-Somme, les salariés de l'usine Bigard de découpe et transformation de viande de bœuf n'ont pas de quoi se sentir en sécurité, depuis que les syndicats du groupe ont reçu, la semaine dernière, une proposition d'accord de groupe reprenant les recommandations de la fameuse loi votée le 10 avril dernier à l'Assemblée nationale.

Dans son contenu, le texte proposé par le géant français de la viande de bœuf reprend l'Accord national interprofessionnel (Ani), signé le 9 janvier dernier par la CFDT, la CFTC, et CFE-CGC, et dont le contenu a été repris et amendé dans la loi dite de «sécurisation de l'emploi».

L'un des articles de la loi, portant sur la mobilité interne des salariés, a été repris par Bigard et inquiète particulièrement les syndicats, car il place les salariés dans une situation d'incertitude constante sur leur avenir.

 

Un accord de mobilité tous les trois ans dans les entreprises

Pour inciter les entreprises à muter plus souvent les salariés, la loi votée par l'Assemblée nationale propose de négocier des accords de mobilité interne tous les trois ans, et fixe un cadre juridique spécifique.

Sous réserve de la signature de l'accord par des syndicats représentant au moins 30% des salariés, une entreprise, qui ne prévoit pas de baisse d'effectif durant la validité de l'accord, pourra demander à n'importe quel ouvrier de changer d'usine. Seuls garde-fous à ces demandes: que la mutation se fasse «dans le respect de la vie personnelle et familiale du salarié», et qu'elle n'entraîne pas de baisse de salaire.

 


Ailly-sur-Somme, aux environs de l'usine Bigard


L'objectif ? Pour le gouvernement, il s'agissait d'inciter les entreprises à utiliser plus souvent les outils de mobilité, en sécurisant le cadre juridique, dans l'espoir de limiter les plans de licenciements. Selon le gouvernement, la mobilité interne – les propositions de reclassement au sein d'une même entreprise – est sous-utilisée en France.

Elles interviendraient trop souvent au dernier moment – juste avant les procédures de licenciement collectif – et sous la contrainte, au cours d'un PSE (Plan de sauvegarde de l'emploi) pendant lequel une entreprise a l'obligation de proposer des «mesures de mobilité interne au sein de l'entreprise ou du groupe».

L'exemple le plus récent de cette mobilité interne d'urgence, c'est Peugeot-Citroën. Pour supprimer 1400 postes dans son usines de Rennes (5500 postes), le groupe PSA a proposé, la semaine dernière, 400 mutations volontaires vers les autres sites du groupe. Après le 31 décembre 2013, PSA fera une offre aux salariés qui n'ont accepté aucune offre de replacement, et les licenciera s'il ne se satisfont pas de ces mesures de «mobilité».

 

Salariés priés d'être mobiles

Ordinairement, les salariés ne sont pas contraints par leur contrat de travail d'accepter une mutation, sauf si elles se limite à leur «secteur géographique». Une notion floue qui s'apprécie au cas par cas, en cas de litige. Certains salariés, le plus souvent les cadres, sont soumis à une mobilité géographique plus importante si leur contrat inclut des clauses de mobilité.

Désormais, les salariés ordinaires, qui refuseront de se soumettre à une mobilité imposée par un accord de groupe, pourront être licenciés pour motif économique individuel. Ce qui veut dire qu'il n'y aura pas de déclenchement d'un PSE – coûteux pour l'entreprise – si le licenciement concerne plus de dix personnes. En revanche, chaque salarié licencié bénéficiera d'une indemnité spécifique négociée dans l'accord.

Mais cette éventualité pourrait être entourée d'une incertitude juridique. Pour Pascal Lokiec, professeur de droit social à l’Université de Paris Ouest – Nanterre, l'accord national interprofessionnel irait sur ce point à l'encontre de «l’inopposabilité de l’accord collectif, lorsque celui-ci comporte des obligations de mobilité et que les salariés n’ont pas été informés de l’existence de cet accord, ni mis en mesure d’en prendre connaissance puisqu’ils ont été embauchés avant sa conclusion (Cass. soc., 27 juin 2002, n° 00-42.646)», dans La Semaine Sociale Lamy, n°1569, revue d'actualité juridique. En somme, l'accord de mobilité pourrait ne pas pouvoir s'imposer aux salariés embauchés avant sa signature.

 

L'usine d'Ailly-sur-Somme sur la sellette

Le projet de loi gouvernemental prévoyait d'obliger les entreprises à négocier des plans de mobilité interne tous les trois ans. Finalement, l'obligation a été retirée après son passage à l'Assemblée nationale.

Mais le groupe Bigard a entendu le gouvernement et saisi la balle au bond. À peine un mois après le vote de la loi, le groupe veut aujourd'hui imposer la mobilité à tous ses salariés. Comme le recommande le gouvernement, la direction a envoyé aux syndicats une proposition d'accord de groupe sur la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences), intégrant un accord sur la mobilité.

 
L'usine d'Ailly-sur-Somme


Dans son article 5.2 ce document explique que tous les salariés pourraient être sollicités pour travailler dans une autre usine du groupe, dans le cadre de «mesures collectives d’organisation, ne comportant pas de réduction d’effectifs et se traduisant notamment par des changements d’emplois et/ou de lieux de travail». Seule limite évoquée dans le texte: 100 kilomètres de distance entre l'ancien et le nouveau lieu de travail.

 

Baisse d'activité, baisse d'effectifs

Cette nouvelle inquiète les deux syndicats FO et CGT de l'usine Bigard d'Ailly-sur-Somme, anciennement propriété de la coopérative Défial. Dans une filière prise dans un perpétuel mouvement de concentration des moyens de production, où les fermetures de sites s’enchaînent, leur usine, vieillissante et isolée serait menacée. «L'année dernière, nous avons reçu un petit mot du directeur des ressources humaines qui nous disait que trois sites étaient sur la sellette dans le groupe, dont le nôtre», explique le délégué syndical CGT, Stéphane Dormeval, désosseur-pareur et agent de distribution chez Bigard.

En novembre dernier, une soixantaine de salariés d'Ailly-sur-Somme s'étaient déplacés en Bretagne, à Quimperlé, au siège de l'entreprise Bigard pour manifester leur mécontentement. Là-bas, la CGT et FO poursuivent le groupe au tribunal de Quimper proche du siège de Bigard à Quimperlé pour exiger un rapatriement de l’activité sur le site d'Ailly sur Somme.

 

En effet, l'activité de l'usine décroît depuis son rachat par Bigard en 2008. À l'intérieur du groupe, le site d'Ailly-sur-Somme, qui fait de la deuxième et troisième transformation, est mis en concurrence avec les usines de Feignies dans le Nord et Formerie dans l'Oise. Et force est de constater qu'il a perdu la bataille. Aujourd'hui ses clients sont partis. L'usine de Feignies, près de Valenciennes, est plus récente et dotée d'un abattoir qui fait cruellement défaut à Ailly-sur-Somme et dans tout le département. C'est cette usine, qui approvisionne, par exemple, le magasin Auchan d'Amiens-Dury.

 

Menace de fermeture

Pour la CGT, le groupe Bigard condamne lentement le site d'Ailly sur Somme, aujourd'hui trop éloigné des abattoirs du groupe, en diminuant ses carnets de commande et en arrêtant d'investir. «Depuis qu'ils ont racheté l'usine, il n'y a pas eu d'investissement». Au 1er janvier 2015, l'usine devrait se mettre aux normes ses installations de réfrigération. «Aujourd'hui rien n'est fait. Rien n'est prévu. Pourtant ce ne sont pas des petits travaux.»

«Entre Ailly sur Somme et Formerie, ils vont devoir choisir», analyse Francis Declerck, professeur de finance à l'Essec, spécialisé dans l'agroalimentaire. L'industrie de la viande est soumise à une concurrence redoutable. Bigard est composé d'entreprises qui n'ont pas su se débrouiller seules, comme Socopa. Le problème, ce sont les marges. Les industriels n'arrivent pas à augmenter les prix car leur produit n'est pas assez markété. L'industrie ne parvient pas à faire valoir sa marque face aux distributeurs. Si vous allez dans un supermarché, la viande qui n'a pas de marque porte le logo du distributeur. Il y a Charal [marque du groupe Bigard, ndlr], mais c'est insuffisant. Alors aujourd'hui les industriels se battent pour préserver leurs marges. Il y a une forte concentration. Les groupes essaient de faire des économies d'échelle en construisant des abattoirs plus gros, situés dans les bassins de production.»

Depuis 2008, le site d'Ailly-sur-Somme est soumis à des diminutions d'effectif. Selon les deux syndicats majoritaires, ils seraient passés de 251 salariés à 179 aujourd'hui, suite au non remplacement de salariés licenciés ou partis. «Ils nous ont dit en CCE qu'ils avaient la place pour muter 145 personnes à Formerie ou à Feignies», explique Stéphane Dormeval.

 

Un accord de mobilité qui renforce les inquiétudes

La proposition d'accord sur la mobilité vient donc renforcer le climat d'inquiétude dans cette usine où la moyenne d'âge se situe autour de 40-45 ans. Les contrats des derniers embauchés seraient déjà en clause de mobilité, pense savoir la CGT, mais pas ceux des plus anciens.

Si les syndicats acceptent de signer l'accord, chaque salarié d'Ailly-sur-Somme pourrait être sollicité pour travailler à Formerie dans l'Oise ou à Feignies dans le Nord. S'ils refusait d'être mutés, ce serait le licenciement individuel pour motif économique. «En cas d’adaptation insuffisante d’un salarié à la nouvelle fonction, une concertation est menée pour obtenir le meilleur compromis d’une réorientation professionnelle», explique l'accord.

Et si plus de dix des 179 salariés refusaient cette mutation, l'entreprise n'aurait pas l'obligation de mettre en place un PSE, ce qu'elle aurait dû faire pour un licenciement collectif ordinaire. Elle devra verser les indemnités négociées dans le cadre de l'accord.

«Ils ont mis le paquet sur les aides», reconnaît le syndicaliste. Pour les mutations de plus de 75 kilomètres, l'entreprise offre «45 euros par jour calendaire pendant neuf mois», environ 12 000 euros. Auxquelles s'ajoutent des aides à la recherche de logement, des aides de recherche d'emploi pour le conjoint ne travaillant pas chez Bigard.

 

Pour autant, Stéphane Dormeval ne souhaite pas que les syndicats du groupe signent cet accord, qui pour lui place les salariés dans une constante incertitude sur leur avenir. «S'ils me proposent de partir, je n'accepterai pas», nous explique-t-il dans sa maison à quelques kilomètres d'Amiens. Je ne leur fait pas confiance. Admettons que j'aille à Formerie. Qu'est-ce qui me dit qu'ils ne vont pas décider de m'envoyer ailleurs ensuite? Il va bientôt falloir que je m'achète une caravane».

 

 

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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 16:31

 

 

 

Le Monde.fr | 10.05.2013 à 11h11 • Mis à jour le 10.05.2013 à 14h20

Par Jean-Baptiste Jacquin



La RDC aurait perdu 1,36 milliard de dollars (1,04 milliard d'euros) à l'occasion de cinq transactions entre 2010 et 2012.

"Cachez ce sein que je ne saurais voir." La célèbre réplique de Tartuffe date de 1664, mais ridiculiser ainsi l'hypocrisie grossière n'a pas empêché de la voir prospérer. L'histoire d'Eurasian Natural Resources Corporation (ENRC) aurait sans aucun doute inspiré Molière, version marchés financiers et matières premières.

La "une" du Financial Times claque, vendredi 10 mai, d'un gros titre : "Le rapport Annan accuse ENRC d'avoir coûté 725 millions de dollars au Congo." De fait, l'Africa Progress Panel (APP), organisation présidée par l'ex-secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, devait rendre public, ce vendredi au Cap devant le World Economic Forum, un rapport détaillé sur la façon dont certains pays africains sont lésés dans la gestion de leurs ressources naturelles.

La République démocratique du Congo (RDC) aurait ainsi perdu 1,36 milliard de dollars (1,04 milliard d'euros) à l'occasion de cinq transactions entre 2010 et 2012, selon ce rapport. Des ventes de concessions minières qui, d'après les calculs de l'APP, ont été réalisées en moyenne au sixième de leur véritable valeur. Or, trois de ces cinq opérations ficelées par Dan Gertler, riche homme d'affaires israélien, avaient pour heureux acquéreur ENRC, société de droit britannique cotée à l'honorable Bourse de Londres depuis 2007.

 

 PILLAGE AU CONGO

On découvrirait donc en 2013 que les ressources minières de la RDC sont pillées par des groupes étrangers ! Et qu'ENRC, dont 54 % du capital est détenu par ses trois cofondateurs, des oligarques kazakhs, aurait accumulé ses actifs dans des conditions peu claires ! Il se trouve que Le Monde a conté, en octobre 2010, comment ENRC avait mis la main sur le plus grand gisement de cuivre et de cobalt de RDC, grâce à l'intercession du fameux Dan Gertler, après une rocambolesque expropriation du précédent actionnaire par Kinshasa.

 

Lire dans nos archives : La City s'écharpe sur Kolwezi


Le mérite du travail de Kofi Annan, après celui de l'ONG anticorruption Global Witness, est de chiffrer pour la première fois l'impact de ce pillage. Quant à ENRC, cela fait plusieurs semaines que l'étau se resserre. Après des années de soupçon de corruption, le bureau britannique de lutte contre la délinquance financière a annoncé, le 25 avril, l'ouverture d'une enquête sur le groupe minier. D'après le quotidien de la City, des limiers s'apprêtent à s'envoler pour la RDC.

Pour ENRC, après la démission en avril d'un président nommé il y a un an pour améliorer la gouvernance et la transparence du groupe, ses principaux actionnaires, aidés par le gouvernement du Kazakhstan, ont fait savoir qu'ils songeaient à racheter les minoritaires pour sortir la société de la Bourse.

L'histoire ne dit pas s'ils veulent se mettre à l'abri des regards indiscrets en prenant au pied de la lettre Tartuffe : "Le scandale du monde est ce qui fait l'offense, et ce n'est pas pécher que pécher en silence."

 jacquin@lemonde.fr

Jean-Baptiste Jacquin

 

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