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11 septembre 2013 3 11 /09 /septembre /2013 16:01

 

 

lavoixdunord.fr

 

Publié le 11/09/2013

Par La Voix du Nord

 

 

A 7 heures ce mercredi matin, les forces policières étaient sur place, dans le camp de Roms de Lille-Sud. Trente caravanes ont été déplacées en dehors du terrain occupé illégalement.

A 7 heures ce mercredi matin, la police avait cerné le camp de Roms de Lille-Sud, rue de Carvin.

 

 

Les personnes encore présentes sur les lieux ne semblaient pas surprises de la venue des forces de police. L’information était déjà connue dès hier soir, et de nombreuses caravanes ont déjà quitté les lieux. Une cinquantaine de familles se sont d’ailleurs déjà réfugiées sur un terrain privé entre Croix et Wasquehal.

L’intervention policière se fait sans aucune velléité de résistance de la part des habitants. « L’opération s’est déroulée dans le calme », d’après le communiqué publié par la préfecture du Nord. Cette opération « fait suite à deux précédentes réductions, l’une survenue le 25 juillet dernier et l’autre le 6 septembre . »

Trente caravanes ont été déplacées hors du terrain, « conformément à l’ordonnance d’expulsion prise par le juge. »

L’opération « vise à permettre l'installation prochaine, en toute sécurité, de la base travaux devant servir au futur chantier Lillenium. »

Une évacuation pour octobre

Le camp de Lille-Sud devrait être totalement évacué pour le mois d’octobre, afin de « permettre l’installation d’une entreprise », selon la préfecture. Il a déjà été fortement réduit par rapport à sa taille d’origine : de huit hectares, il était passé à trois hectares cet été, et ne s’étendait plus que sur un hectare et demi vendredi dernier, après une énième opération de la police pour réduire l’espace. A l’issue de l’opération de ce mercredi matin, la surface occupée illicitement ne représentait plus qu’un dixième du terrain.

 


 

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10 septembre 2013 2 10 /09 /septembre /2013 19:25

 

marianne.net

 

Mardi 10 Septembre 2013 à 11:29

 

Philippe Murer

 

Après avoir profité du libre-échange en asphyxiant les pays développés, ce sont maintenant les pays développés qui tournent de moins en moins vite et asphyxient les pays émergents.

 

Illustration - Bebeto Matthews/AP/SIPA
Illustration - Bebeto Matthews/AP/SIPA
La crise de 2008 a changé la façon dont se développent les pays émergents. Avant 2008, le déficit commercial des pays occidentaux augmentait sans cesse avec les pays émergents. En effet miroir, de nombreux émergents dont la Chine accumulaient des excédents sans cesse plus grands. Une partie importante de l’industrie passait des pays développés aux pays émergents. Ce courant négatif permanent pesant sur les économies développées était compensé par de l’endettement public ou privé supplémentaire chaque année pour faire avancer la machine. (L’Allemagne est un cas à part, l’exception qui confirme la règle)

On remarquera que le journal Le Monde, après avoir nié l’évidence, a passé un éditorial stupéfiant sur les émergents où il reconnait « Ceux-là mêmes qui nous ont méthodiquement dépouillé de nos industries et de nos emplois depuis deux décennies. » Le développement de l’économie des émergents était facilité par ce courant positif permanent. Les investissements, la consommation intérieure, une bonne politique économique dans certains cas faisait le reste.

 

A quel stade de la mondialisation économique sommes-nous ?

 

Une autre catégorie d’émergents, peu exportateur de produits industrialisés comme le Brésil, la Russie, se développaient par un effet indirect : à l'instar de très grands pays comme la Chine ou l’Inde qui utilisaient la richesse créée pour s’équiper massivement en infrastructures, ils dévoraient de plus en plus de matières premières à des prix sans cesse plus élevés. Les pays exportant des quantités importantes de matières premières (Brésil, Russie…) s’enrichissaient avec ce courant positif permanent d’achat de matières premières.
 
Depuis la crise de 2008, les pays développés ne peuvent plus croître avec ce courant négatif constant du déficit commercial croissant car ils sont surendettés (dette privée et publique). Du coup, leur économie tourne avec un taux de croissance beaucoup plus bas, la crise de l’euro n’arrangeant rien. Leurs déficits commerciaux ont pris un tour inverse : ils se réduisent chaque année créant un flux positif de croissance pour eux mais négatif pour les émergents.

 

A quel stade de la mondialisation économique sommes-nous ?

 

Pour les Etats-Unis, cela est en partie dû au gaz et pétrole de schiste, en partie dû au fait que l’ouvrier américain devient si mal payé après 40 ans de baisse tendancielle des salaires, qu’il devient compétitif. Salaires et énergie à prix réduits permettent la résorption du déficit commercial américain.

Pour les pays d’Europe du Sud comme la France, l’Italie et l’Espagne, la baisse du déficit commercial se fait par des importations bridées par une croissance en baisse et des exportations qui continuent à augmenter. La baisse des importations et la hausse des exportations permet à l’Europe de prendre près de 1% de croissance à l’étranger, surtout dans les émergents. Après avoir profité du libre-échange en asphyxiant les pays développés, ce sont maintenant les pays développés qui tournent de moins en moins vite et asphyxient les pays émergents. Les « moins bien gérés » affichent maintenant des déficits commerciaux (de 4% du PIB pour l’Inde à 8% pour la Turquie) et ont des problèmes de croissance de plus en plus aigus. La Russie affiche 1% de croissance trimestriel, l’Inde 3 à 4%, le Brésil 2% et la Chine a un taux réel de croissance d’environ 3-4% depuis un an (tous les économistes même ceux de Goldman Sachs et d’UBS expliquent que les statistiques chinoises sont « incohérentes ». On ne peut qu’estimer la croissance chinoise en observant la croissance de ses besoins en pétrole, électricité, fret …).

On remarquera que la Chine n’arrive à croître assez faiblement qu’en faisant exploser son taux d’endettement de 30% du PIB chaque année : l’endettement public et privé de la Chine est aujourd’hui proche de 220% du PIB, proche donc des records d’endettement des USA (300% du PIB) de 2007 à 2013 et de 1929 ! A cet égard, le prochain cycle de récession de l’économie mondiale qui devrait arriver entre 2014 et 2015 (un cycle économique dure généralement 6 ans), pourrait voir la Chine et d‘autres émergents avoir des problèmes économiques considérables à résoudre  (les pays occidentaux aussi).

Le libre-échange après avoir cassé la croissance occidentale et alimenté une dette publique et privée explosive, est en train d’affaiblir par ricochet la croissance des émergents qui s’en tirent à peu près en alimentant une dette publique et privée conséquente. Les pays occidentaux arrivent tout juste à sortir la tête de l’eau pour certains, à garder la tête sous l’eau sans couler pour d’autres. Le système est à bout et crée des déséquilibres gigantesques. La croissance est en train de se réduire progressivement partout sur la planète. La dette monte en puissance partout. Le libre-échange devient destructeur pour tous. (sauf peut-être pour l’Allemagne dont la croissance est de 1% en moyenne chaque année depuis 2001, ce qui n’est pas formidable)

La prochaine récession mondiale sera probablement très dure. Les pays d’Europe du Sud, qui ont déjà la tête sous l’eau, seront alors dans une situation catastrophique. On l’oublie trop souvent en Europe : nous sommes parfois en récession dans un cycle de croissance mondiale ! Pour les émergents aussi, pour les USA et l’Allemagne, il faudra gérer une forte baisse du PIB.
Les dirigeants deviendront-ils rationnels et sauront-ils changer de cap ? Si le cap n’est pas modifié, la montée des tensions entre les pays risque d’être considérable : plutôt que de s’accuser d’avoir commis des erreurs en suivant les règles d’un système destructeur, les dirigeants ne préféreront-ils pas reporter la faute sur d’autres ? On risque malheureusement de voir alors les limites du « doux commerce ».

Philippe Murer est professeur de finance vacataire  à la Sorbonne et membre du www.forumdemocratique.fr
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10 septembre 2013 2 10 /09 /septembre /2013 18:46

 

Médiapart.fr

Arte met à nu l'absurdité et le scandale de l'évasion fiscale

|  Par Dan Israel

 

 

Un excellent documentaire diffusé ce mardi sur Arte dissèque les rouages de l'évasion fiscale. La pédagogie y laisse une large place à l'humour, grinçant. Le film éclaire comme jamais les absurdités du système. « On se moque de nous », résume le réalisateur, Xavier Harel. Vidéo exclusive dans l'article.

Sur fond de ciel gris et froid, dans la petite île anglo-normande de Jersey, un homme affable annonce poliment à ses interlocuteurs sidérés qu’il est à la recherche des plantations de bananes, dont ce petit bout de terre perdu dans la Manche est censé regorger. Une blague ? Si seulement… Officiellement, par la grâce d’un des artifices comptables dont les multinationales sont friandes pour éviter les impôts, Jersey est bien le plus grand exportateur mondial de bananes. Même si, bien sûr, pas un seul fruit tropical ne pousse sur ces terres peu hospitalières.

 

Evasion fiscale - Le Hold up du siècle 
Evasion fiscale - Le Hold up du siècle© Arte

L’homme poli et bien mis se nomme Xavier Harel, le journaliste qui a réalisé (avec Remy Burkel) le documentaire diffusé ce mardi à 20 h 50 sur Arte, Évasion fiscale, le hold-up du siècle. Dans un autre passage de son film, toujours aussi pince-sans-rire il se met en scène à la recherche du « plus grand immeuble du monde » aux îles Caïmans. Dans ce petit et prospère paradis fiscal, un banal immeuble de bureaux abrite plus de mille entreprises. Sans avoir besoin de pousser les murs, puisqu’il ne s’agit en fait que d’une collection de boîtes aux lettres virtuelles, qui servent simplement à exempter d’impôt sur le revenu les entreprises censées y être domiciliées, mais en fait bien actives à la City, à New York ou un peu partout dans le monde.

Ainsi va le documentaire de Xavier Harel, journaliste pendant quinze ans à La Tribune et spécialiste des paradis fiscaux. Mediapart l’avait d’ailleurs invité pour un “live” sur le sujet (revoyez ce débat dans l’onglet Prolonger). Son travail est plein d’humour, mais d’un humour grinçant et pédago, nourri par une parfaite connaissance du sujet et de ses enjeux : l’homme a travaillé 18 mois sur le film, mais il avait déjà trimé deux ans pour écrire un excellent livre sur la question.

 

Evasion fiscale - Le Hold up du siècle 
Evasion fiscale - Le Hold up du siècle© Arte

 

« Dans le film, je me mets régulièrement en scène pour prendre le téléspectateur à témoin, parce que si les enjeux sont colossaux, en fait, le principe est simple : on se moque de nous », explique le journaliste. À coup d’exemples absurdes, de passages historiques bien menés sous formes de petits films d’animation, et d’entretiens passionnants des défenseurs et des adversaires des paradis fiscaux (où on retrouve bon nombre des experts interrogés sur notre site), le documentaire parvient à rendre limpides les manipulations opaques menées au service des grandes entreprises qui cherchent à éviter l’impôt par tous les moyens.

« Faire croire qu’il se passe quelque chose dans ses paradis fiscaux, alors qu’il ne s’y passe rien. C’est ça, le secret du monde de l’offshore », décrypte Harel. Qui s’est donc employé à dévoiler ces tours de passe-passe montés années après années, sous couvert d’« optimisation fiscale » respectable. Pourquoi Colgate, qui possède toujours un de ses principales usines européennes à Compiègne, ne paie plus d’impôt en France ? Comment Amazon se débrouille pour faire évaporer ses bénéfices européens ? Mais aussi quel prix payent les États et les contribuables face à ces dérives ?

Les International tax awards récompensent les meilleurs intermédiaires

C’est un des mérites de ce film que de rappeler à quoi servent les impôts, et combien coûtent les services publics et autres biens communs (routes, crèches, hôpitaux) que nous employons en les croyant gratuits ou presque. 20 à 30 000 milliards de dollars sont dissimulés dans les paradis fiscaux, selon le film. En mettant tout en œuvre pour réduire leur facture fiscale, les multinationales « intaxables » et les riches évadés fiscaux mettent en péril le principe même de l’État, comme le prouve l’exemple douloureux de la Grèce, « le pays qui a fait de l’évasion fiscale une discipline olympique », où chaque année 15 à 20 % du PIB disparaît dans la nature, et où l’Église et les armateurs, première puissance financière du pays, sont exemptés d’impôts...

« Une des grandes difficultés du sujet, c’est qu’il est très abstrait, qu’il n’y a souvent rien à montrer », témoigne le réalisateur. Il contourne pourtant l’obstacle avec aisance, en multipliant les visites aux quatre coins de la planète. Au Delaware, tranquille paradis fiscal niché au sein des États-Unis, il rappelle que la moitié des sociétés cotées à Wall Street y ont installé leur siège social.

 

 

En Suisse, il rencontre l’éternelle mauvaise conscience nationale, Jean Ziegler (voir en fin d’article la version longue de l’entretien, en exclusivité sur Mediapart), mais aussi Rudolf Elmer, un lanceur d’alerte qui a fait six mois de prison préventive pour avoir dénoncé les malversations aux îles Caïmans de la banque helvète Julius Bär, qu’il dirigeait sur place.

Harel se risque aussi, caméra cachée, aux International tax awards, rencontre annuelle de tous les grands cabinets de conseils, où KPMG, Deloitte et autres Price Water House Cooper s’auto-congratulent sur les astucieux montages fiscaux qu’ils ont élaborés pour enrichir leurs clients. Moments étonnants, et jamais vus à la télé, où les experts de l’évasion cachent mal leur fierté à être reconnus dans leur art délicat.

*Extrait du documentaire ici

« S’attaquer aux grandes failles de la législation internationale, comme le G20 vient de s’engager à le faire, c’est bien, mais pas suffisant, prévient Xavier Harel. La prochaine étape, indispensable, c’est de s’occuper de tous ces intermédiaires, cabinets de conseil, banques, fiscalistes, qui permettent au système d’exister et de prospérer. » Pour l’heure, on se félicitera déjà de voir leurs pratiques si clairement exposées.

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Le documentaire relaye durant quelques minutes le discours du Suisse Jean Ziegler, professeur de sociologie, député socialiste de Genève pendant près de trente ans, rapporteur spécial des Nations unies à l’ONU sur le droit à l’alimentation de 2000 à 2008, puis vice-président du comité consultatif du Conseil des droits de l'homme de l'ONU. Auteur du livre Destruction massive (Le Seuil), Ziegler joue depuis des années le rôle de poil à gratter de la Confédération helvétique. Il raconte la place incontournable de la Suisse dans le système mondial d’évasion fiscale, et comment selon lui, elle fonde sa richesse sur l’exploitation des ressources de ses voisins et des pays du Sud. Il n’accorde aucune circonstance atténuante au « gouvernement de laquais » de son pays, qui serait à la merci des entreprises nationales.

  • En accord avec Arte et Maha productions, Mediapart propose une version longue de cet entretien, remontée par nos soins à partir des rushes de tournage :

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10 septembre 2013 2 10 /09 /septembre /2013 18:26

 

 

marianne.net

 

Ce soir sur Arte « Le hold-up du siècle »

Qui croire ? Arte ou le Monde ?
Mardi 10 Septembre 2013 à 11:18

 

Bertrand Rothé

 

Arte diffuse ce soir un documentaire sur l'évasion fiscale: comment les familles aisées échappent à l'impôt ou les multinationales fuient les taxes. Xavier Harel vous dit tout sur "le hold up du siècle".

 

Lorsque Marianne titre sur « Cette France qui se tiers-mondise », le Monde du 7 septembre préfère : «  Impôts : pourquoi les familles aisées vont payer » ? C’est un choix. C’est le choix du Monde de nous faire croire que les familles aisées payent beaucoup d’impôts. Sauf que ce soir Arte dans un documentaire, nous explique l’inverse. Comment les « familles aisées » et les grandes entreprises échappent à l’impôt. C’est vrai les impôts augmentent, mais ils s’accroissent surtout pour les classes moyennes et les PME, PMI.


Les chiffres énoncés dans le doc par Arte donnent froid dans le dos. Les « familles aisées » comme les grandes entreprises échappent à l’impôt, n’en déplaise au Monde. Dans ce doc, très pédagogique et parfois amusant, Xavier Harel nous montre comment les riches, et pas seulement Jérôme Cahuzac, fuient la charge commune. L’essentiel des techniques y sont décrites. Ce soir en vous endormant vous saurez que Jersey est le principal importateur de bananes en Europe pour permettre aux multinationales du négoce de ne pas payer d’impôts au Honduras. Vous comprendrez que Colgate est une des sociétés les plus rentables du Dow Jones parce que la multinationale ne paye pas de taxes dans les pays à taux d’imposition élevé, comme la France. Vous saurez pourquoi les Trust sont à la mode. Vous verrez aussi le patron de BNP Paribas en mauvaise posture… Un vrai moment de plaisir.


Vous découvrirez que le sport national de nos élites et de nos grosses entreprises n’est plus le tennis, dépassé, ni le golf en cours de démocratisation mais l’optimisation fiscale. Ce « Hold-up du siècle » explique « pourquoi les familles »  moyennes « vont payer » , pour rembourser de l’argent que leur ont prêté les ménages aisés.


Petit détail mais pas des moindres, on apprend aussi que le ver est dans l’Europe. Jersey, la City londonienne et le Luxembourg ouvrent les bras à nos « familles aisées ». Certaines banques suisses les invitent même à des concerts, pour terminer par une proposition idoine de délocalisation fiscale. Deux plaisirs en un seul.


Qui nous dirait qu’un jour Arte nous informerait mieux que le Monde ? 


Seul bémol, Xavier Harel appelle à une réforme progressive et ferme. On a beaucoup mal à croire comment elle viendrait. A la fin du documentaire on se demande comment forcer les élites qui nous gouvernent à rendre gorge.


Sur son site Arte propose un atlas interactif de l'évasion fiscale.

 

 

 

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9 septembre 2013 1 09 /09 /septembre /2013 16:41

 

marianne.net

 

Compétitivité: ce sale rapport qui ne dit pas tout.

 

Rédigé par Juan S. le Lundi 9 Septembre 2013 à 11:00

 

C'est l'un de ces classements dont les médias raffolent. C'est surtout l'occasion d'intoxiquer subrepticement toutes les analyses économiques du moment d'une formule chic: "la France perd en compétitivité".



C'est même une saloperie morale, sociale et économique.


Ainsi, en Suisse, les organisateurs du Forum de Davos ont-ils publié leur " Global Competitiveness Report 2013–2014" début septembre. L'exercice est annuel. Il y a même des petites videos, dans toutes les langues ou presque, pour nous délivrer les messages clés au cas où nous aurions la flemme de lire le volumineux rapport.
 
Reconnaissons que cette publication était aussi attendue à cause de la Grande Crise. Cette dernière bouscule les positions établies. La zone euro est en panne de croissance même si cette dernière revient timidement, les pays dits émergents s'affaiblissent à leur tour, les Etats-Unis repartent.
 
Un expert du groupe livre, en Français, avec un léger accent suisse, les conclusions du rapport: "la France perd encore deux places. Elle est toujours handicapée par ses comptes publics, son marché du travail rigide et une faible capacité à innover." La messe serait dite. Sur BFMTV, Nicolas Doze exhulte. Le Figaro peut s'emballer. Le Monde, après une funeste une, la veille, sur le matraquage fiscal, en remet une couche ("Compétitivité, l'Allemagne distance encore la France "). Les titres s'enchaînent donc pour fustiger notre vieux pays, tel celui de l'hebdomadaire Challenges : "Compétitivité : la France perd encore du terrain"
 
Observons le classement, analysons sa méthode, comprenons ses objectifs. 
 
La compétitivité est une chose relative. Elle désigne l'ensemble des facteurs économiques, sociaux, institutionnels et politiques qui permettent à un pays de produire moins cher que les autres. Les auteurs ne s'en cachent pas. Il s'agit de mesurer "la compétitivité des nations" les unes contre les autres. Ce rapport est l'une des illustrations les plus documentées de cette vision du monde. 
Pour assoir leurs comparaisons internationales, les auteurs ne sont pas économes en "leçons" et conceptualisation. Il faut prouver que la méthode est scientifique. Ils recensent donc les 12 facteurs de compétitivité: une meilleure formation, un environnement macro-économique favorable, l'éducation primaire et la santé, l' "efficience" des marchés des biens, des services, et du travail, l'innovation et la technologie, la taille du marché intérieur, la "sophistication" du business.
 
Arrêtons nous sur l'évaluation de l'emploi: pour mesurer la compétitivité, il s'agit, pour les auteurs, d'évaluer si "les travailleurs sont alloués au mieux de leur utilité dans l'économie" ("workers are allocated to their most effective use in the economy").
 
Les auteurs expliquent en long, en large et de travers pourquoi la compétitivité est si essentielle. Ils insistent sur les bénéfices qu'on retire du commerce mondial. Et le libre-échange nécessaire impose un certain niveau de compétitivité. En jargon "libre-échangiste", cela donne: "Qu'un pays puisse participer aux chaînes de valeur transfrontalière dépend d'un nombre de facteurs qui inclue sa  productivité". Des travers, ces exactions humanitaires telles que le travail des enfants, l'absence de minima sociaux, les suicides et accidents professionnels, il n'y a rien, pas une ligne, pas un mot.
 
148 pays sont comparés.
 
La variété des situations donne le vertige. On distingue les pays par "étapes de développement", au nombre de trois. La France est évidemment parmi les 37 plus "évolués", les "innovation-driven".
 
 On compare tout et n'importe quoi. Quelle est la signification profonde d'une analyse qui parvient à placer des micro-Etats (Singapour) sur le même plan que les pays les plus peuplés de la planète (les Etats-Unis, la Chine, l'Inde) ? On est surpris par cette "résilience" méthodologique: les arguments de précaution sur de telles comparaisons internationales existent.
 
Comment mesurent-ils leurs indices ? Par sondages chez des "business leaders", et, heureusement, avec quelques "vraies" données (emploi, dettes, déficits, espérances de vie, etc.).
Le classement des 30 "meilleurs" pays est édifiant:
 

 
La Suisse, donc, s'affiche au premier rang. Un paradis fiscal en tête du classement... quel enseignement !
 
Arrêtons-nous sur une comparaison: la France, que l'on aime comparer à l'Allemagne, est dans ce classement ramenée sous l'Arabie Saoudite dans ce fichu classement. Cela pourrait être drôle si ce n'était sérieux et trop commenté. Cette pétro-monarchie où l'on coupe des mains pour un vol, des têtes pour un meurtre, est donc plus "compétitive" dans ce grand combat mondial ...
 
La France, 65 millions d'habitants et quelque 2.600 milliards de PIB, aurait donc de sacrées difficultés à résoudre: une régulation du travail encore trop "restrictive" (d'après plus de 20% des sondés), une fiscalité trop lourde, et un accès trop difficile au financement. Sur les différents critères de compétitivité mesurés dans le rapport, nos pires scores sont atteints sur la "facilité à licencier" (144ème sur 148), la dette publique (135ème rang), l'incitation fiscale pour investir (137ème rang), l'impôt sur les sociétés (134ème rang)...
 
Et l'Arabie Saoudite, ce merveilleux pays ? Jugez plutôt... 28 millions d'habitants, 727 milliards d'euros de PIB. Le pays fait donc rêver nos auteurs de Davos. Le travail y est "trop régulé", pire qu'en France, mais il est sacrément moins "chargé" en "réglementation publique" (37ème rang contre 130ème pour la France). La "coopération" entre employeurs et salariés est aussi largement mieux notée en Arabie Saoudite (53ème rang sur 148) qu'en France (135ème). La facilité pour embaucher et licencier ("Hiring and firing pratices") est incroyablement mieux notée en Arabie Saoudite (36ème rang) qu'en France (144ème). Gorgée d'excédent pétroliers, l'Arabie Saoudite "score" facilement très haut en matière d'équilibre des finances publiques. Certes, le pays affiche de piètres performances en matière de santé - notamment contre la malaria ou le paludisme -  d'espérance de vie, d'éducation (sur tous les items, la France s'en sort mieux), mais qu'importe, le pays est un paradis fiscal à tous points de vue: il est classé cinquième sur 148 en matière d'impositions sur les bénéfices (contre 134 pour la France). Quelle angoisse !
 
Bref, la dictature islamiste, il n'y a rien de mieux !
 
Cet appauvrissement de la pensée a quelque chose de terrifiant. Les plus grandes écoles de commerce - HEC en France, la London Business School of Economics  - ont collaboré à l'ouvrage. 
 
 
 
 
Lire le rapport. 
 
 
NDR: ce rapport est l'une des plus belles intoxications quotidiennes dont nous sommes régulièrement victimes. Il n'est pas question ici de contester que l'ordinateur avec lequel ces lignes sont écrites a été conçu dans la banlieue de San Francisco, fabriqué par une main d'oeuvre bon marché en Chine quelque part chez [Foxconn, et vendue sans doute sans TVA par l'entrepôt d'une multinationale fiscalement apatride. Mais il reste terrifiant de constater que des éditocrates et responsables prétendument patriotes considèrent cela comme "normal" ou inévitable.]

 

 

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9 septembre 2013 1 09 /09 /septembre /2013 15:28

 

Rue89

 

Grandes oreilles 09/09/2013 à 11h31
Zineb Dryef | Journaliste Rue89

 

 

Piotr Smolar et Gérard Davet, journalistes au Monde, ont suivi l’affaire Ilan Halimi pour Le Monde. Le 21 mars 2006, ils publient dans le quotidien un long article intitulé « Meurtre d’Ilan Halimi : le récit des geôliers », lequel s’appuyait sur l’audition de Youssouf Fofana et de ses complices – condamnés pour avoir torturé et tué le jeune homme – devant les policiers de la brigade criminelle.

L’un des gardés à vue, Samir Aït Abdelmalek (condamné depuis à dix-huit ans de prison) a porté plainte avec constitution de partie civile le 10 avril 2006, en estimant qu’« eu égard à la précision des propos rapportés par les journalistes, ceux-ci avaient nécessairement eu communication en violation du secret de l’enquête et de l’instruction de procès-verbaux issus de l’enquête ».

« 490 conversations »

Selon Le Monde, trois ans plus tard (trois !), la juge Michèle Ganascia convoque Me Jean Balan, avocat d’Audrey L., l’une des prévenues dans l’affaire, soupçonnant sans doute que la fuite vient de lui. Me Balan reconnaît connaître Gérard Davet mais affirme avoir toujours refusé de lui transmettre les documents.

En 2009, celui-ci est placé sur écoute. Le Monde écrit :

« Le policier a écouté et enregistré toutes les conversations du journaliste pendant un mois.

Il a tout entendu de ses contacts, alors que le reporter travaillait sur d’autres affaires sensibles, il n’a rien ignoré de ses coups de fil à sa femme, avocate, et dont le statut est également protégé, à ses enfants, à son plombier, à son journal.

Au total, 490 conversations, de quoi remplir quatre CD-Rom, et dont la simple liste fait 43 feuillets. »

Depuis ces écoutes, Gérard Davet, entendu le 4 août 2009 par l’IGS, « a reconnu avoir “eu accès” à la procédure, sans en avoir copie, et s’est logiquement retranché derrière le secret des sources ». Michèle Ganascia a prononcé un non-lieu le 16 juillet 2010, mais la cour d’appel a ordonné la poursuite de l’information, confiée à une nouvelle juge, Saïda Kelati.

Les avocats de Gérard Davet et du Monde, Mes Marie Burguburu et François Saint-Pierre, doivent déposer devant la cour d’appel une demande de nullité de la procédure, avant de pouvoir porter plainte.

Déjà, Philippe Courroye...

Ce n’est pas la première fois qu’une affaire d’écoutes agite le quotidien du soir. La dernière date de 2011 : Philippe Courroye, pour identifier la source d’un article concernant une perquisition ordonnée par la juge Isabelle Prévost-Desprez chez Liliane Betancourt en 2010, avait pris l’initiative de mettre sur écoute des téléphones de plusieurs journalistes du Monde, dont Gérard Davet.

La Cour de cassation avait alors reconnu le viol de la loi sur le secret des sources et ainsi confirmé l’annulation de la procédure ouverte par Philippe Courroye, le procureur de Nanterre.

 


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8 septembre 2013 7 08 /09 /septembre /2013 21:21

 

 

Médiapart

|  Par La rédaction de Mediapart

 

 

Les Jeux Olympiques marquèrent l'éveil du Japon en 1964. Ils ont été offerts de nouveau à Tokyo pour magnifier le réveil nippon, en 2020. Le CIO s'est montré rassuré par des garanties financières, sans s'inquiéter des suites de la catastrophe de Fukushima...

Samedi 7 septembre à Buenos Aires, les membres du CIO ont désigné Tokyo comme organisateur des Jeux olympiques de 2020, par 60 voix contre 36 à Istanbul (et une abstention). Madrid – qui présentait un projet fondé sur l'austérité – fut éliminé pour la troisième fois consécutive, dès le premier tour.

Pendant deux années de lobbying intense auprès du CIO, l'équipe japonaise a choisi pour stratégie de déployer sa solidité financière et sa capacité à tenir ses promesses, parvenant à reléguer au second plan les inquiétudes liées à la situation de la centrale nucléaire de Fukushima. Selon un membre de l'entourage olympique, c'est la candidature « la moins horrible » qui l'a emporté. Rien n'est moins sûr et l'avenir dira si, sur la question de la catastrophe nucléaire, l'aveuglement volontaire nippon ne s'est pas doublé d'une cécité mondiale...

Le Japon a su dissimuler ses faiblesses mieux que l'Espagne, qui misait sur le faible coût de ses Jeux et sur des infrastructures déjà existantes. Quant à la Turquie, qui rêvait de devenir le premier pays majoritairement musulman à accueillir ce grand rendez-vous planétaire, elle insista sur sa position de pont voire de tremplin, à cheval sur deux continents. Mais loin d'enthousiasmer les notables du sport et des affaires, la situation géographique et  géopolitique d'Istanbul, après les manifestations anti-gouvernementales du printemps dernier, a inquiété le normatif et prudent CIO.

Le Comité s'est montré plus sensible à la sécurité de Tokyo, dont les rues sont les moins dangereuses au monde, y compris dans le Kabukicho (le quartier "chaud" de la capitale). Le Comité a surtout biché face au fonds spécial bloqué en banque pour couvrir le financement des Jeux. Selon Tokyo, 4,5 milliards de dollars (environ 3,4 milliards d'euros) attendaient déjà sur un compte la décision portègne (adjectif désignant ce qui a trait à Buenos-Aires). Difficile de résister à un tel argument financier quand la crise menace de balayer la planète...

 

 

 

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7 septembre 2013 6 07 /09 /septembre /2013 16:14

 

 


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Retraites : l'alternative cachée

A quelques jours de la grève et des manifestations du 10 septembre 2013 (organisées par les syndicats CGT, FO, FSU et Solidaires), Attac et la Fondation Copernic, initiatrices du collectif Retraites 2013, publient une note pour défendre les retraites contre les attaques annoncées par le gouvernement.

 

 

Cela pourrait prêter à sourire si ce n’était aussi grave. Trois ans après une quatrième réforme des retraites qui se voulait décisive et définitive, menée par un gouvernement de droite dure qui n’avait rien entendu du refus de millions de personnes dans la rue, le gouvernement dit de gauche prépare une autre réforme sans doute aussi calamiteuse pour les travailleurs et pour les retraités actuels et futurs.

Aussi sourd que son prédécesseur, le président François Hollande reprend à son compte le leitmotiv néolibéral selon lequel il faut travailler toujours plus, tandis qu’il s’engage par ailleurs à réduire massivement les dépenses publiques et sociales, adoptant ainsi les thèses de la Commission européenne et du patronat.

Nous faisons donc à nouveau le pari, avec ce petit livre, que les travailleurs, les retraités, et au-delà, les citoyens, hommes et femmes, sont capables de mettre au jour les idées reçues qui sont toujours des idées fausses, et de comprendre les enjeux véritables du débat sur les retraites.

 

Idées reçues, idées fausses, contre-vérités

 

Au chapitre des idées reçues qui sont autant d’erreurs et de mensonges, la liste est longue[1].Elles partent toutes d’un argument usé jusqu’à la corde repris par le président Hollande : « Dès lors que l’on vit plus longtemps, on devra travailler aussi un peu plus longtemps. » Elles sont toutes entachées d’erreurs de raisonnement, le plus souvent commises sciemment pour empêcher un débat politique serein et démocratique.

Première erreur, de diagnostic : les déficits annoncés des caisses de retraite (autour de 14 milliards en 2012, plus de 20 en 2020) n’ont rien à voir avec la démographie, ils sont dus, pour des montants équivalents, à la crise qui bloque l’activité, l’emploi et les cotisations sociales. C’est reconnu, tant par les rapports du Conseil d’orientation des retraites (COR) que par le rapport Moreau[2]. Autrement dit, vouloir diminuer les déficits publics par l’austérité ne peut qu’accroître ces derniers.

Deuxième erreur, de raisonnement : parler du ratio de dépendance des personnes de plus de 65 ans par rapport à celles de 15 à 65 ans (29 % aujourd’hui, 52 % en 2060) n’a aucun sens si on ne le compare pas avec l’évolution de la production et avec celle de la répartition des revenus.

Troisième erreur, historique : allonger la durée de cotisation et retarder l’âge de la retraite équivalent à augmenter le temps de travail, alors que sévit un chômage de masse croissant et que les prévisions du COR sur la hausse de la productivité sont irréalistes. Déjà les réformes précédentes ont augmenté le taux d’emploi des seniors, tout en accroissant leur taux de chômage ainsi que celui des jeunes.

Quatrième erreur, mensongère : sur les trois paramètres pour ramener à l’équilibre le système de retraites, l’augmentation de la durée de cotisation est censée éviter la baisse des pensions, mais comme peu de salariés pourront y satisfaire, leur pension baissera, surtout si elle a été désindexée de l’inflation, comme le propose le rapport Moreau. Selon le COR, à l'horizon 2060, la baisse des pensions relativement aux salaires serait de 15 à 25 % en fonction des scénarios économiques. Quant à la hausse du taux de cotisation patronale, elle est présumée alourdir encore le « coût du travail », donc exclue.

Cinquième erreur, de perspective : la crise du capitalisme et les difficultés de l’économie française ne sont pas dues au coût du travail mais au coût exorbitant que fait subir le capital à la société. En trente ans de néolibéralisme, la part dévolue aux actionnaires aux dépens des salaires et de la protection sociale a augmenté de 5 points de pourcentage[3] de la valeur ajoutée des entreprises. Et le comble est que, malgré une baisse du taux de marge des entreprises en cette période de crise, les dividendes continuent d’augmenter. En 2012, les entreprises ont distribué 230 milliards de profits, ce qui représente un surcoût du capital de 100 milliards par rapport aux normes des années 1970-80. Au détriment de l’investissement, de la recherche et de l’emploi : 80 % des bénéfices nets vont aux actionnaires aujourd’hui contre 30 % dans les années 1980[4].

Sixième erreur, signe que des intérêts sont en jeu : si la hausse du taux de cotisation n’est pas envisagée, ce n’est pas parce que les salariés bénéficient d’une mansuétude nouvelle, c’est pour éviter que l’on pose la question du mode de calcul des cotisations. Or, il suffirait que l’ensemble des revenus financiers distribués soient soumis à cotisation, c’est-à-dire en un sens d’élargir l’assiette des cotisations, pour changer la donne de l’équilibre des retraites. Le COR en fournit indirectement une estimation : 2 points de prélèvement supplémentaire en 2020 sur les revenus d’activité ; dans la mesure où la masse salariale dans les sociétés financières et non financières est en moyenne trois ou quatre fois plus élevée que les revenus du capital distribués, les 2 points sur les salaires évalués par le COR correspondraient à 6 à 8 points prélevés sur les revenus du capital distribués. Danger pour la compétitivité ? Pas du tout, puisqu’on prélèverait des revenus déjà distribués, donc déjà inclus dans les prix. Danger pour le lien entre le travail et les cotisations sociales ? Non, puisque toute la valeur ajoutée dans l’économie provient du travail.

Septième erreur, philosophique : travailler toujours plus. Au lieu de repenser la place du travail dans la société et les finalités de la production à l’ère de la crise sociale et écologique ; au lieu de réduire les inégalités entre groupes sociaux et entre hommes et femmes. Un choc de répartition signifierait tourner le dos à la logique du capital.

 

 

Les enjeux véritables des retraites


Le COR lui-même tient à rappeler que : « La condition de pérennité financière est au coeur du pacte intergénérationnel, sur lequel repose le principe de répartition »[5] On ne pourrait qu’approuver une telle évidence si elle ne contenait pas implicitement un biais très dommageable pour la clarté du débat public. En effet, ce qui est dit d’un système de retraite par répartition est vrai de tout système : l’illusion est de croire qu’un système par capitalisation pourrait s’affranchir de cette règle immuable qui veut que tout transfert part des actifs pour aller vers les inactifs.

 

1) L’économie, l’emploi et les retraites

Une première question, basique en quelque sorte, vient au sujet de la mise en cohérence, d’un côté, des hypothèses d’évolution de l’économie et de l’emploi, et, de l’autre de la possibilité de verser des pensions de retraite de façon pérenne. Vouloir résorber le chômage à long terme en augmentant la durée du travail dans un contexte de faible croissance de l’économie relève de la quadrature du cercle. Faire comme si cette croissance pouvait être élevée dans un monde contraint par la crise écologique relève de l’aveuglement. Se rabattre sur la seule modification de la répartition interne à une masse salariale inchangée globalement pour pensionner des retraités plus nombreux ou bien sur une baisse directe des pensions relève d’un choix politique en faveur du patronat et des privilégiés qui ne dit pas son nom.

 

2) La question du mode de financement des retraites et de la protection sociale en général est d’ordre politique

La plupart des rapports du COR, et les deux derniers ne font pas exception, n’examinent jamais l’hypothèse d’une modification, ne serait-ce que sensible, de la répartition des revenus entre travail et capital, c’est-à-dire entre masse salariale et profits, les deux composantes de la valeur ajoutée. Certes, le COR, notamment dans ses abaques, montre que l’arbitrage se fait toujours entre les variations du taux de cotisation, du taux de remplacement et du ratio de dépendance entre retraités et cotisants, ce dernier ratio pouvant lui-même être modifié par la structure démographique, la durée de cotisation, le taux d’activité et le taux d’emploi de la population en âge de travailler et l’immigration. Mais, à aucun moment, il n’est donné de détails sur le levier du taux de cotisation ou de l’assiette des cotisations. Comme si, implicitement, il était admis qu’il ne pouvait s’agir que de la variation du taux de cotisation dit salarial, et jamais du taux dit patronal.

De son côté, le mouvement social reste partagé. Si beaucoup de syndicats refusent en général de voir la durée du travail s’allonger par le biais de la durée de cotisation ou par celui de l’âge de la retraite, et bien entendu de voir les pensions baisser, il n’existe encore aucun consensus sur les cotisations. Nous examinerons cette question dans le chapitre 4.

 

3) Contre les projets du Medef légitimés par la Cour des comptes et Bercy, et de plus en plus portés par le gouvernement socialiste

La « fatalité » du déséquilibre financier sur le long terme vient de l’hypothèse de blocage des financements des régimes de retraite à leur niveau actuel (13,2 % du PIB en 2011, 13 % en 2060), alors que la proportion de la population âgée s’accroît. Cette hypothèse politique forte est le non-dit des projections du COR : elle signifie la baisse des droits à la retraite. Les réformes précédentes ont absorbé l’essentiel de l’impact démographique : à l’horizon 2060, les besoins de financement sont limités (en général, en dessous de 1 % de PIB, mais cela dépend de la variable économique choisie). Ce qui permet au COR de dire l’essentiel : « le retour à l’équilibre financier, voire à des excédents, à l’horizon 2060 sous les hypothèses économiques les plus favorables se feraient donc au prix d’écarts de niveau de vie accentués entre les retraités et les actifs »[6].

Dès lors, les voix du Medef et du gouvernement se joignent pour annoncer une nouvelle réforme qui, cette fois-ci ne prendra plus de gants pour annoncer la couleur : faire payer les retraités actuels et futurs tout en aggravant les conditions d’accès à la retraite. Le patronat a déjà marqué des points au sujet des retraites complémentaires et a posé ses jalons pour la suite, c’est-à-dire le régime général.

En ce qui concerne les salariés actuellement actifs, le Medef préconise un recul de l’âge de la retraite complémentaire d’un trimestre par an à partir de 2019, pour éviter une hausse des cotisations, avec pour conséquence un recul des droits : « Nous proposons au niveau du MEDEF de passer de quarante-et-un à quarante-trois à l’horizon 2020 – c’est important d’exprimer les horizons – et aussi de passer l’âge légal de départ à la retraite de soixante-deux à soixante-trois à l’horizon 2020, puis à soixante-cinq ans à l’horizon 2040. Je rappelle que l’ensemble des pays européens – Allemagne, Angleterre, Espagne, Pays-Bas – sont déjà à soixante-cinq et parfois soixante-sept ans »[7].

On voit donc qu’il s’agit encore de modifier la répartition des revenus en défaveur du travail. Les marchés financiers seront « rassurés », le gouvernement aussi sans doute, de même que Didier Migaud, dont il faut rappeler sa grande compréhension du problème des retraites, lui qui proposait au moment où éclatait la crise financière : « utiliser les marchés financiers pour financer une partie des retraites » parce que le Fonds de réserve des retraites aurait une « rentabilité supérieure »[8]. Et il préside aujourd’hui la Cour des comptes !

 

4) Derrière les retraites, le choix de société

Le choix de société se définit à travers le mode de développement de l’économie adopté. Nous allons le vérifier en examinant les hypothèses de croissance économique du COR. Ce mode de développement se définit aussi par l’acceptation ou le refus des politiques d’austérité qui font payer la crise capitaliste aux travailleurs et aux retraités. Il se définit enfin par le type de solidarité qui est promu dans la société, notamment par le modèle d’égalité entre femmes et hommes. Dans ce temps où crier haro sur la dette est devenu le refrain néolibéral ou socio-libéral, il faut réaffirmer la légitimité de la transmission d’une sorte de « dette sociale », au bon sens du terme, entre les générations qui nouent un pacte de solidarité. Celui-ci n’a pas vocation à s’éteindre, parce que, à travers lui, c’est la qualité et la continuité du lien social qui se jouent.

 

Notes :

[1] Nous les avions déjà inventoriées dans le livre d’Attac et de la Fondation Copernic, Retraites : l’heure de vérité, Paris, Syllepse, 2010, « Dix contre-vérités », p. 20-24. De façon générale, la problématique de ce livre de 2010 reste entièrement valable. En particulier, on se reportera à la méthodologie exposée dans les quatre chapitres de la troisième partie qui montrent la possibilité de construire un système de retraite solidaire au sein d’une société soutenable écologiquement.

[2] COR, « Retraites : perspectives 2020, 2040 et 2060 », Onzième rapport, 19 décembre 2012, COR, « Retraites : un état des lieux du système français », Douzième rapport, janvier 2013, Yannick Moreau, « Nos retraites demain : équilibre financier et justice », 14 juin 2013.

[3] On parle en point de pourcentage quand on compare deux pourcentages entre eux.

[4] Voir le livre d’Attac-Copernic, En finir avec la compétitivité, Syllepse, 2012 (disponible en pdf) ; le rapport du CLERSE, « Le coût du capital et son surcoût », 2013 ; le dossier d’Alternatives économiques, juin 2013.

[5] COR, Douzième rapport, op. cit., p. 69.

[6] COR, Onzième rapport, op. cit., p. 42.

[7] P. Gattaz, « La situation du pays nécessite des mesures fortes », RMC et BFMTV, 10 juillet 2013.

[8] D. Migaud, « Abonder le fonds de réserve des retraites », Le Monde, 2 avril 2008.

 


 

Ce texte constitue l'introduction de la note que nous venons de publier.

 

Les auteur-e-s :

Jean-Marie Harribey, économiste, membre d’Attac, de la Fondation Copernic et des Économistes atterrés (coordinateur)

Pierre Khalfa, co-président de la Fondation Copernic, membre du Conseil économique, social et environnemental

Marc Mangenot, économiste, membre de la Fondation Copernic

Christiane Marty, ingénieure, membre du conseil scientifique d’Attac et de la Fondation Copernic (coordinatrice)

Rozenn Perrot, membre du conseil scientifique d’Attac

Daniel Rallet, économiste, membre du conseil scientifique d’Attac

Bernard Teper, co-animateur du Réseau éducation populaire (REP)

 

Retraites : l'alternative cachée, Syllepse, 84 pages, septembre 2013.

 

 

Pour prolonger :

 

- le site du collectif Retraites 2013 (où l'appel « Ensemble, défendons nos retraites » peut toujours être signé et où un document d'information de 4 pages est disponible en pdf)

 

- le site des éditions Syllepse

 

- le Petit guide d'autodéfense en temps de réforme des retraites d'Attac

 

- la page de notre site consacrée aux retraites et la note en version pdf

 

- « La gauche radicale tente de mobiliser contre la réforme des retraites » (Lemonde.fr, 4 septembre 2013)

 

 

 

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7 septembre 2013 6 07 /09 /septembre /2013 15:22

 

 

marianne.net

Mourir de ne pas enseigner
Samedi 7 Septembre 2013 à 05:00

 

Eric Conan

 

Voilà pourquoi il faut lire la dernière lettre de Pierre Jacque, enseignant de 55 ans au lycée Artaud de Marseille, qui vient de se suicider.

 

Salle de classe du lycée professionnel Marcel Deprez, illustration - DURAND FLORENCE/SIPA
Salle de classe du lycée professionnel Marcel Deprez, illustration - DURAND FLORENCE/SIPA
Cette semaine de rentrée des classes a été marquée par le suicide d’un enseignant de 55 ans, mais, curieusement, la presse, qui est toujours à la recherche de sujets et d’angles pour traiter de cette actualité scolaire aussi prévisible que répétitive s’est peu penchée sur ce geste tragique.

On se dit que c’est peut être un sage réflexe, car on le sait, on le répète, un « suicide-reste-toujours-un-mystère-humain-aux-facteurs-multiples-difficile-à-interpréter ». En l’occurrence ce n’est pas le cas, puisque certains médias nous ont précisé de façon macabre que l’intéressé avait évoqué l’idée de s’immoler devant son établissement ou indiqué qu’il avait laissé une lettre expliquant qu’il ne supportait plus les conditions de son métier, mais sans nous en dire beaucoup plus.  

C’est bien dommage. Car Pierre Jacque (c’est le nom de ce professeur de technologie et d’électronique en STI2G au Lycée Artaud de Marseille) a clairement décidé de son dernier acte et laissé un texte mûrement réfléchi qui constitue un véritable document sur le calvaire de professeurs motivés et conscients de l’état de délabrement de l’institution éducative.

La lecture intégrale de ce long texte kafkaïen vaut beaucoup d’enquêtes et de reportages sur le quotidien des enseignants. En effet, tout y est  du naufrage d’une institution : réformes absurdes, improvisées, contradictoires et inapplicables ; ravages de l’idéologie des pédagogistes fous, qui ne sévissent pas qu’en Français ou en Maths mais en Electronique également ; niveau de plus en plus faible d’élèves de moins en moins maitrisables ; conditions de travail concrètes (salles, matériels) impossibles ; programmes technologiques inadaptés au monde économique et à la fameuse « compétitivité », cynisme de la hiérarchie et des inspections qui savent tout mais font tout pour ne pas voir et ne pas faire savoir ; trucages des examens pour cacher le désastre ; etc… 

Dans son bilan, Pierre Jacque n’épargne pas les syndicats dont il dénonce l’inutilité et les complicités et il faut donc rendre hommage à la section du SNES-Aix-Marseille qui a quand même décidé de mettre en ligne sur son site cette lettre adressée à tous ses collègues enseignants. 

Pierre Jacque ayant fait l’effort de réfléchir à cette lettre et à la rédiger pour « tous ceux que (son) témoignage intéressera », avec peut-être avec un dernier espoir d’être encore un peu utile, la moindre des choses est de la faire lire au maximum.

 

  A ma famille, à mes proches et à tous ceux que mon témoignage intéressera. 
 
Objet : Evolution du métier d'enseignant. 
 
    Je vous fais part de ma décision de ne pas faire la rentrée scolaire 2013. En effet le métier tel qu'il est devenu au moins dans ma spécialité ne m'est plus acceptable en conscience. Pour éclairer ma décision je vous décris succinctement mon parcours personnel. Je suis devenu ingénieur en électronique en 1982 à l'âge de 24 ans. Ma formation initiale et surtout mon parcours professionnel m'ont amené à exercer dans la double compétence "hard" et "soft". Le métier prenant et difficile m'a toujours convenu tant que j'avais le sentiment de faire œuvre utile et d'être légitime dans mon travail. Passé la quarantaine la sollicitation de plus en plus pressente d'évoluer vers des tâches d'encadrement et le sort réservé à mes ainés dans mon entreprise m'ont incité à changer d'activité. En 1999 j'ai passé le concours du Capet externe de Génie électrique et j'ai enseigné en section SSI et STI électronique. Le choc pour moi fut brutal de constater la baisse de niveau des sections techniques en 18 ans passé dans l'industrie notamment pour la spécialité agent technique (niveau BTS ou DUT suivant les cas). Même si le niveau enseigné était bien bas de mon point de vue, ma compétence était au service des élèves et je me sentais à ma place. Une difficulté était quand même le référentiel applicable (le programme) datant des années 80, ambitieux pour l'époque et en total décalage avec le niveau réel des élèves des années 2000. Une réforme semblait souhaitable pour officialiser des objectifs réalistes et orientés en fonction des besoins du marché du travail.  

    Puis vint la réforme de 2010 mise en place par Luc Chatel et applicable à la rentrée 2011. Pour le coup, le terme réforme est faible pour décrire tous les changements mis en place dans une précipitation totale. L'enseignement des métiers est réduit à peu de choses dans le référentiel de 4 spécialités seulement qui constitue des "teintures" sur un tronc commun généraliste d'une section unique appelée STI2D qui rentre bizarrement en concurrence avec la section SSI. L'électronique disparait purement et simplement. En lieu et place il apparait la spécialité "Systèmes Informatiques et Numériques" (SIN). Cela ne me pose pas de problème personnel, je maitrise bien le domaine et je l'enseigne même plus volontiers que les classiques problèmes de courant de diode ou de montages amplificateurs.  

      Je me pose quand même la question de la compétitivité de notre pays dans le domaine industriel avec un pareil abandon de compétence. La mise en place de la réforme est faite à la hussarde dans un état d'affolement que l'inspection a du mal à dissimuler. Entre temps le gouvernement a changé sans que les objectifs soient infléchis le moins du monde ou qu'un moratoire soit décidé, ne serait-ce qu'à cause du coût astronomique de cette réforme. En effet il aura fallu réorganiser l'implantation de tous les ateliers de tous les lycées techniques de France, abattre des cloisons, en remonter d'autres à coté, refaire tous les faux plafonds, les peintures et renouveler les mobiliers. Ceci est fait à l'échelle du pays sans que la réforme ait été testée préalablement dans une académie pilote.  

    Début 2011, l'inspection nous convoque en séminaire pour nous expliquer le sens et les modalités de la réforme ; il apparait la volonté de supprimer toute activité de type cours ce qui est la radicalisation d'une tendance déjà bien marquée. On nous assène en insistant bien que l'élève est acteur de son propre savoir, qu'il en est le moteur. Pour les spécialités, donc la mienne SIN entre autre, cela signifie qu'une partie conséquente de l'activité sera de type projet. A l'époque les chiffres restent vagues, il est question de 50% du temps au moins. La nature des projets, la façon de les conduire, la façon de les évaluer ne sont pas évoquées et les questions que posent les enseignants à ce sujet restent sans réponses, nous serons mis au courant après la rentrée de septembre.  

    En attendant l'inspection nous fait entièrement confiance pour continuer comme d'habitude. Je fais remarquer qu'il ne faudra pas tarder car nous préparons les élèves au bac en deux ans et que la connaissance des modalités d'examens est incontournable rapidement après la rentrée pour un travail efficace, c'est-à-dire sans perte de temps. Lors de la réunion suivante, après la rentrée 2011, l'inspecteur répond un peu agacé à la même question « que notre travail c'est d'enseigner et que l'évaluation verra après » (sic). En attendant le travail devant élève est commencé et moi et mes collègues travaillons à l'estime. Le manque de matériel se fait cruellement sentir dans mon lycée, les travaux nécessaires ne seront faits qu'à l'été 2012. Lors d'une réunion aux alentours de février il nous est demandé pour la prochaine réunion d'exposer l'état d'avancement de la réforme et si possible les projets envisagés ou mieux déjà mis en œuvre.  

   A ce moment je viens juste de recevoir un premier lot de matériel et je ne dispose du logiciel correspondant que depuis novembre. La pression amicale mais réelle pour commencer les projets va aller augmentant. J'ai un groupe de 16 élèves et un autre de 15 dans une salle qui est déjà trop étroite pour recevoir proprement 14 élèves en travaux pratiques et avec un matériel réduit qui ne me permet qu'un choix très restreint de sujets. La phase passée en projet sera cauchemardesque pour l'enseignant et la fraction d'élèves sérieux. Le dernier mois de cette année de première sera passé en activités plus classiques. A la rentrée 2012 les élèves sont maintenant en terminale, j'ai les tables de travail prévues dans une salle provisoire de 80 m2 au lieu des 140 m2 prévus. Il est difficile de bouger, le travail en travaux pratiques reste possible et je couvre ainsi la partie communication réseau de référentiel au moyen d'un logiciel de simulation. Je ne dispose pas du matériel support. On me bricole une salle de 150 m2 à partir de deux salles de cours séparées par un couloir et j'attaque les projets dans ces conditions. Le couloir sera abattu aux vacances de février. 

     Pendant ce temps nous avons appris que la note du bac porterait uniquement sur le projet final est que la note serait constituée de deux parties égales, une attribuée par un jury en fin d'année suite à une soutenance orale avec support informatique, l'autre attribuée par l'enseignant de l'année au vu du travail fourni par les élèves. Les critères d'évaluation portent principalement sur la gestion de projet et la démarche de développement durable. Il est explicitement exclu de juger les élèves sur les performances et la réussite du projet. Ceci appelle deux remarques. La première est que les critères sont inadaptés, les élèves sont incapables de concevoir et même de gérer un projet par eux-mêmes. De plus la démarche de développement durable est une plaisanterie en spécialité SIN où l'obsolescence programmée est la règle.

Comment note-t-on alors les élèves ? A l'estime, en fonction de critères autres, l'inspection le sait mais ne veut surtout pas que la chose soit dite. Du coup cette note relève "du grand n'importe quoi" et ne respecte aucune règle d'équité. Elle est attribuée par un enseignant seul qui connait ses élèves depuis au moins un an et compte coefficient 6 ce qui écrase les autres matières. Cela viole l'esprit du baccalauréat dans les grandes largeurs. Je considère que ceci est une infamie et je me refuse à recommencer. L'ensemble du corps inspectoral est criminel ou lâche ou les deux d'avoir laissé faire une chose pareille. Cette mécanique est conçue dans une idée de concurrence entre les enseignants mais aussi entre les établissements pour créer une dynamique de très bonnes notes à l'examen y compris et surtout si elles n'ont aucun sens. Vous avez l'explication des excellents résultats du millésime 2013 du baccalauréat au moins pour la filière technologique. Cela fait plus d'un an que je me plains à mon syndicat de cet état de fait. Pas un seul compte-rendu ni localement sur Marseille ni à un plus haut niveau n'en fait mention. Je suis tout seul à avoir des problèmes de conscience. Ou alors le syndicat est activement complice de l'état de fait, le responsable local me dis : « Mais non Pierre tu n'es pas tout seul ». En attendant je ne vois aucune réaction et ce chez aucun syndicat. 
 


    Que penser ? Soit nous sommes muselés, soit je suis le dernier idiot dans son coin. De toute façon je n'accepte pas cette situation. Je pense au niveau toujours plus problématique des élèves, autrefois on savait parler et écrire un français très convenable après 5 ans d'étude primaire. Aujourd'hui les élèves bacheliers maitrisent mal la langue ne savent plus estimer des chiffres après 12 ans d'études. Cherchez l'erreur. La réponse de l'institution est : « Oui mais les élèves savent faire d'autres choses ». Je suis bien placé dans ma spécialité pour savoir que cela n'est pas vrai ! Les élèves ne maitrisent rien ou presque des techniques numériques d'aujourd'hui. Tout ce qu'ils savent faire est jouer et surfer sur internet. Cela ne fait pas une compétence professionnelle.  

   Les médias nous rabattent les oreilles sur la perte de compétitivité du pays en laissant entendre que le coût du travail est trop élevé. Cette présentation pèche par une omission grave. La réalité est que le travail en France est trop cher pour ce que les travailleurs sont capables de faire véritablement. Et là la responsabilité de l'Education nationale est écrasante. Qui osera le dire ? J'essaye mais je me sens bien petit. J'essaye de créer un maximum d'émoi sur la question.  

   J'aurais pu m'immoler par le feu au milieu de la cour le jour de la rentrée des élèves, cela aurait eu plus d'allure mais je ne suis pas assez vertueux pour cela. Quand vous lirez ce texte je serai déjà mort. 
 
Pierre Jacque  
Enseignant du lycée Antonin Artaud à Marseille

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6 septembre 2013 5 06 /09 /septembre /2013 16:51

 

Médiapart

Comment truquer un marché public

|  Par Louise Fessard

 

 

L’affaire Guérini, toujours en cours d’instruction, a l’intérêt de présenter un catalogue des failles du code des marchés publics. Ou comment fausser un appel d’offres en respectant – en apparence du moins – les procédures de passation de marchés. Enquête en partenariat avec le Ravi.

Comment des entreprises de maçonnerie (ABT) ou de sécurité privée (Alba sécurité) dirigées par des proches d’Alexandre Guérini et liées au grand banditisme régional ont-elles pu prospérer grâce aux marchés publics dans les Bouches-du-Rhône ? Pas forcément besoin de corruption pure et dure : le tout est de savoir placer ses pions, en se créant au fil des années un réseau d’affidés à des postes stratégiques. Selon les enquêteurs, entre 2005 et 2008, « la quasi-intégralité » des 20 millions d’euros de chiffre d’affaires de la société ABT était « constituée de travaux réalisés dans le cadre de marchés publics obtenus avec des collectivités territoriales des Bouches-du-Rhône ». Et 70 % du chiffre d’affaires d’Alba sécurité entre 2007 et 2009, une société dirigée par la compagne de Bernard Barresi, alors recherché pour l’attaque d’un fourgon blindé (voir note 1 dans notre boîte noire).

Il faut d’abord savoir qu’une collectivité territoriale ne peut écarter une entreprise d’une consultation uniquement au motif que celle-ci serait dirigée par des personnes proches du grand banditisme. « Il faut que l’entreprise ou l’entrepreneur soit condamné pénalement et exclu des marchés publics par décision de justice », explique Florian Linditch, professeur de droit à l’université d’Aix-Marseille et auteur du Droit des marchés publics (mai 2009, Dalloz). De même sans interdiction prononcée par le juge pénal, il est impossible selon lui d’écarter a priori une entreprise qui aurait triché lors d’un précédent appel d’offres. Il est également très difficile d’écarter une entreprise qui se serait révélée totalement incompétente, la jurisprudence acceptant que ladite entreprise démontre qu’elle a mis en place de nouvelles méthodes de travail. En cas de soupçon d’infraction, les fonctionnaires ont bien sûr obligation d’alerter le procureur de la République. Mais la loi ne prévoit aucune sanction pour les têtes en l’air qui manqueraient à cette obligation. « Face à des entreprises pas nettes, les acheteurs publics sont un peu démunis, reconnaît l’avocat. Ils sont censés choisir l’offre économiquement la plus avantageuse et faire abstraction de tout le reste. »  

La nouvelle directive européenne sur les marchés publics, qui doit être définitivement adoptée par le parlement européen d’ici fin 2013, prévoit l’exclusion de toute entreprise condamnée pour corruption, fraude, criminalité organisée ou encore blanchiment de capitaux. La France devra encore transposer ce texte en droit interne. « Il y a un équilibre à trouver entre éliminer les moutons noirs et la nécessité d’optimiser la concurrence ainsi que le droit à l’oubli », souligne Thierry Beaugé, l’un des fondateurs de la section française de Transparency international.

Évidemment il y a toujours moyen de se débrouiller. Lorsque Bernard Barresi fut  arrêté sur un yacht, à Juan-les-Pins, en juin 2010, Alba sécurité, l’entreprise de sa compagne qui raflait depuis 2004 la majorité des marchés de sécurité du département, chute brusquement dans les dernières places du classement. Explication officielle d’un employé du conseil général en garde à vue en octobre 2012 : sa  prestation n'était « pas à la hauteur des qualités attendues ». Le département aura mis six ans à s’en apercevoir !

 

 
© le Ravi

 

Première étape en matière de travaux publics : imposer à la collectivité un maître d'œuvre conciliant. Le poste est stratégique. Le maître d'œuvre, souvent un architecte ou un bureau d’études, est chargé de rédiger le cahier des clauses techniques et de classer les réponses des entreprises à l'appel d'offres. « Pour intervenir en faveur d'ABT, il fallait préalablement que j'obtienne le contrat de maîtrise d'œuvre », explique ainsi, début septembre 2011, un architecte marseillais mis en examen dans un des dossiers Guérini. L’architecte indique avoir été incité par Jean-Marc Nabitz le patron de Treize développement, une société d’économie mixte dépendant du conseil général, à postuler pour un marché public de rénovation d'une maison de retraite à Marseille. « Nabitz m'a dit que le montant des honoraires était de 90 000 euros. Il m'a dit de postuler et je l'ai obtenu. » ABT, dirigée par un proche de Bernard Barresi, alors en cavale, réalisera ensuite le gros œuvre de la maison de retraite. En échange, notre architecte marseillais a reconnu avoir été pistonné sur trois chantiers publics en Haute-Corse, où le clan Barresi possède ses contacts.

Facile, mais cela ne marche pas à tous les coups. Le patron d’ABT « était venu me voir pour l'opération de la gendarmerie d'Orgon (un chantier lancé par Treize développement en 2006, ndlr) très en amont pour me demander de faire désigner l'architecte, en m'expliquant que la désignation de l'architecte par anticipation permettait de travailler avec cet architecte en amont du lancement de l'appel d'offres », relate en novembre 2011, Jean-Marc Nabitz, qui dit avoir refusé. Ce qui n'a pas empêché ABT de remporter le marché. « J'en ai conclu qu'il avait soit travaillé en amont avec l'architecte désigné à l'époque pour l'opération, mais plus probablement qu'il s'était entendu avec les autres petites entreprises. »


Deuxième étape : l'entreprise amie doit être la moins disante, quitte à lui accorder ensuite des avenants gonflant les prix. À Berre-L'Étang, ville dirigée par le sénateur PS, Serge Andréoni, la société ABT a remporté deux gros marchés de construction. Là aussi grâce aux bons services du même architecte marseillais, briefé par le directeur des services techniques de Berre, devenu depuis adjoint au maire délégué aux travaux. « Raymond Bartolini m'a demandé de favoriser les offres présentées par la société ABT, a reconnu l’architecte face au juge début septembre 2011. À chaque fois le prix proposé par ABT était le moins disant, car Boudemaghe (le patron de l’entreprise ABT, ndlr) était informé très certainement par Raymond Bartolini. »

Imparable pour couper le sifflet aux journalistes un peu trop curieux. Très bon technicien des marchés publics, Raymond Bartolini, rencontré en mai 2011, s’était fait fort de nous démontrer documents à l’appui que tout était en règle. « ABT était la moins disante et la mieux disante, avec un énorme dossier technique. Elle avait de très bonnes références, elle avait fait de très gros chantiers : ils avaient travaillé pour l'Opac (office HLM du département, ndlr), fait une gendarmerie… » Quatre mois plus tard, en septembre 2011, l’adjoint PS sera mis en examen pour « blanchiment d'argent en bande organisée, favoritisme et corruption passive ».

Même cas de figure pour le gros œuvre d’un collège marseillais où en 2007 ABT sera déclarée « mieux disante » grâce à des prix extrêmement bas. Tellement bas qu’ils « ne correspondent pas à la réalité du marché du prix du m2 de béton et du kilo d’acier », s’étonnera un des maîtres d’œuvre… L’entreprise se révélera incapable de mener à bien le chantier, résilié au printemps 2009, en dépit des interventions d’Alexandre Guérini. Là encore, le marché, passé dans le respect formel des procédures, semblait à première vue irréprochable. « Au conseil général, ABT a travaillé tout à fait normalement, sans aucun avenant, nous avait d’ailleurs assuré en juin 2012 Gérard Lafont, l’ex-directeur général adjoint du Conseil. On a été très clairs. Je n’ai jamais eu d’intervention d’Alexandre Guérini. Il y a tellement d’intermédiaires ici qu’on ne peut pas se permettre ce genre de choses, ça serait repéré tout de suite. » C’était avant qu’il ne reconnaisse, lors de sa garde à vue d’octobre 2012, avoir participé à un déjeuner avec Bernard Barresi et Raymond Bartolini, organisé trois ans plus tôt par Alexandre Guérini…

 

Il faut également que le maître d'ouvrage ne se montre pas trop tatillon sur le sérieux de l’offre remise par l’entreprise amie. C'est ainsi qu'ABT a remporté en 2007 le gros œuvre du centre administratif de Berre-L'Étang pour un montant initial de 5,5 millions d'euros. « J'aurais dû creuser le dossier technique de l'entreprise ABT, ce que je n'ai pas fait, a expliqué aux gendarmes notre architecte marseillais. Je me suis contenté de noter ce qu'il y avait écrit dans leur offre sans vérifier. » Cette fois encore, ABT avait vu trop grand. La ville de Berre, pourtant très conciliante, devra résilier le marché en juillet 2009, après qu’un huissier eut constaté « la ruine de l'ouvrage déstabilisé par des travaux qui n'avancent pas ».

 

Si, malgré tout, un candidat malvenu s’incruste et semble sur le point de remporter la mise, reste un joker : commander une étude juridique à un cabinet d’avocats ami. Il fournira des arguments plus ou moins convaincants pour écarter la candidature du fâcheux. En 2007, lors du renouvellement de la délégation de service public du port de Cassis, Jean-Noël Guérini avait ainsi recouru à un cabinet de juristes pour éliminer l'offre de la ville de Cassis, pourtant la mieux classée par ses propres services. Même technique à La Ciotat, où pour faire revenir dans le jeu un promoteur immobilier proche de Bernard Barresi et d’Alexandre Guérini, le patron du département suggérera de faire réaliser une étude par un avocat parisien lié à son frère. « Je me suis aperçue que la plupart des dossiers sur lesquels le président souhaitait que l'on mette en place une procédure singulière telle que la commande d'une étude juridique (...) cachaient en réalité des objectifs différents servant les intérêts de son frère », a confié aux enquêteurs la conseillère de Jean-Noël Guérini en janvier 2013. « Je n’interviens jamais dans une DSP ou un marché », a démenti Jean-Noël Guérini dans Libération.


En dernière extrémité, il reste possible de susciter une grève afin de faire annuler un marché qui ne s’est pas déroulé comme prévu. En octobre 2009, des salariés du groupe Bronzo (rattaché au groupe Veolia) qui venait de perdre la collecte des déchets dans le 14e arrondissement de Marseille, se sont ainsi mis en grève, encouragés, selon des écoutes téléphoniques, par Alexandre Guérini. Montagnes de poubelles et efficacité maximum : dès le 4 novembre, sous la pression des frères Guérini, Eugène Caselli, le président PS de la communauté urbaine, avait déclaré le marché sans suite.

Mais le vrai trou noir du droit des marchés publics, dans les Bouches-du-Rhône comme ailleurs, reste le contrôle de l’exécution. « Le code des marchés publics est consacré à 90 % à la passation des marchés et seules 10 % de ses dispositions concernent l’exécution, remarque Florian Linditch. Et les collectivités, contraintes par leurs budgets, ont énormément de mal à recruter des techniciens, il leur manque des contrôleurs de travaux. » D’autant, souligne cet avocat, que les collectivités, acheteurs généralistes, sont souvent désarmées face à des vendeurs, spécialistes de leurs créneaux. « Le favoritisme se fait surtout lors de l’exécution, confirme un employé du département, sous couvert d’anonymat. Si on retient une entreprise qui propose des prix très bas, derrière, si on ne contrôle pas, elle va se rattraper sur les quantités et la qualité. » Or le conseil général des Bouches-du-Rhône compte un nombre étonnamment faible de techniciens pour contrôler les travaux (deux fois moins par collège que son voisin du Var par exemple).

Une fois le marché obtenu à vil prix, l’entreprise peut également se refaire grâce aux avenants. Seule limite légale : ces rallonges budgétaires ne doivent pas dépasser 20 % du prix du marché pour ne pas en bouleverser l’économie. « Mais on a déjà vu une affaire en Corse, où un avenant de 5 % a été considéré comme un délit de favoritisme », précise Florian Linditch. À l’Europôle de l’Arbois, près d’Aix-en-Provence, ABT a ainsi obtenu trois avenants d'un montant de 80 000 euros pour compenser… son propre retard sur les chantiers. C’est-à-dire qu’au lieu de pénaliser l’entreprise, le technopôle de l’Arbois, un satellite du département dont le patron PS a été mis en examen en juin 2013, a choisi de lui accorder des rallonges. 

Contacté, Jean-Noël Guérini a fait suivre la réponse suivante : « À ce jour il est démontré qu’à la suite des contrôles effectués, la gestion des marchés publics est conforme à la loi. J’attire votre attention sur le fait que les “affaires en cours” sont comme vous le dites “en cours” et que chacun doit bénéficier de la présomption d’innocence. Je ne fais pas exception à la règle. »

 

 


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