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1 décembre 2013 7 01 /12 /décembre /2013 19:01

 

 

Source : mediapart.fr

La complémentaire santé aiguise l’appétit des assureurs privés

|  Par Caroline Coq-Chodorge

 


Un marché de 25 milliards d’euros, plus de 4 millions de contrats en jeu : les assureurs privés manœuvrent pour conquérir le marché de la complémentaire santé en entreprise. Les petits employeurs et leurs salariés ont beaucoup à perdre.

Des assureurs privés à bonnets jaunes, au nom de la libre concurrence ; des mutualistes en ordre dispersé, contre les inégalités d’accès aux soins, tous tirant à boulets rouges contre les syndicats : c’est l’automne des frondes hétéroclites, et le débat sur la généralisation de la complémentaire santé en entreprise n’échappe pas à la tendance. Issue de l’article 1er de la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin dernier, cette généralisation sera effective le 1er janvier 2016 : toutes les entreprises devront alors proposer des contrats santé à leurs salariés.

C’est le début d’une valse des contrats : 4,4 millions de salariés n’ont pas de contrats d’entreprise. 400 000 n’ont aucune couverture santé et les 4 millions d'autres vont abandonner leurs contrats individuels*. Tous ces salariés seront gagnants, car l’entreprise doit prendre en charge une partie, variable, de la cotisation. Avantage supplémentaire : les contrats collectifs d’entreprise sont en moyenne moins coûteux et plus généreux que les contrats individuels. Ces contrats sont d’autant plus avantageux que le nombre d’assurés est grand : c’est le principe de la mutualisation, défendu par les syndicats et le gouvernement.

Mais l’intérêt des salariés n’est pas forcément celui des assureurs. La bataille économique qui s’engage est féroce. Le marché de la complémentaire santé est colossal et dynamique : 25 milliards d’euros de chiffres d’affaires, en croissance de 6,6 % par an sur dix ans. Et l’environnement est très concurrentiel. Il existe plus de 1 000 organismes de complémentaire santé, répartis en trois grandes familles d’acteurs :

1- les mutuelles, organismes non lucratifs évoluant dans le champ de l’économie sociale et solidaire ;

2- les institutions de prévoyance, eux aussi non lucratifs et gérés à parité par les syndicats et le patronat ;

3- les assurances privées.

Ces dernières se portent bien : elles détiennent 27 % du marché, en progression de 8 % en dix ans, au détriment des mutuelles (56 % des parts de marché) et des institutions de prévoyance (17 %).

Les assureurs privés se plaignent pourtant beaucoup. Et bruyamment. Ils ont organisé un lobbying agressif auprès des pouvoirs publics et jusque dans la rue. Le 12 novembre, le mouvement « Sauvez les abeilles », qui regroupe des assureurs privés et des courtiers en assurances, et s’est opportunément rebaptisé « les bonnets jaunes », a mobilisé un millier de personnes devant le Sénat pour protester contre le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. En pleine crise, ces entreprises prospères ont trouvé un argument de poids : elles agitent la menace de la disparition de 40 000 emplois dans le secteur. Rien que ça.

 

 

L'objet de leur courroux est l’article 12 ter du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, qui introduit des « clauses de recommandation ». Les réintroduit en réalité, puisque préexistaient de semblables « clauses de désignation », censurées en juin dernier par le Conseil constitutionnel, qui estime « disproportionnée » l’atteinte à la liberté d’entreprendre. Le message des assureurs a été parfaitement reçu. En 1999 pourtant, la cour de justice de la Communauté européenne estimait au contraire que l’objectif final de solidarité des clauses de désignation justifie les entraves à la concurrence.

Très techniques, ces clauses de désignation ou de recommandation sont pourtant très concrètes pour des centaines de milliers de salariés.

Depuis une vingtaine d’années, elles se multiplient, preuve de leur intérêt pour les syndicats, comme pour le patronat. 67 branches professionnelles (qui regroupent les entreprises d’un même secteur d’activité, par exemple la branche de l’industrie pharmaceutique, de la boulangerie, de l’hôtellerie-restauration, etc.) ont signé un accord de branche sur la santé. Après une mise en concurrence, ces branches ont désigné un ou plusieurs organismes complémentaires qui assurent l’ensemble des entreprises de la branche pour une durée limitée à cinq ans. « Quand on négocie un contrat pour les 100 000 salariés de l’industrie pharmaceutique, il est forcément plus compétitif », explique Jean-François Chavance, délégué fédéral de la CFDT chimie énergie.

Même satisfaction côté patronat, en particulier lorsque les branches comptent de toutes petites entreprises, comme la boulangerie et l’hôtellerie-restauration. « Nos entreprises n’ont pas la force de négociation d’Alstom ou de Sanofi, ni le temps de démarcher les assureurs. Pour nous, le meilleur niveau de négociation est celui de la branche. Même la fédération des sociétés d'assurances reconnaît que les contrats de branche permettent de faire baisser les coûts des contrats de 20 à 30 % », explique Pierre Burban, le secrétaire général de l’organisation patronale UPA (Union professionnelle artisanale).

Lobbying

Mais la puissante Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) croit dans « les vertus de la concurrence, du libre choix par les chefs d’entreprise de la meilleure couverture santé pour leurs salariés, dans le respect du dialogue social », explique Stéphane Dedeyan, directeur général de l’assureur Generali et membre de la FFSA. Pierre Burban balaie l’argument d’un revers de main : « Les assureurs veulent imposer leurs propres règles du jeu, contre des règles collectives. Pour nous, c’est inacceptable. »

Les assureurs privés mettent aussi en cause les liens entre les partenaires sociaux et les institutions de prévoyance, qui sont gérées à parité par les syndicats et le patronat. Plus de 90 % des contrats de branche sont remportés par des institutions de prévoyance, dont c’est le marché historique. Le directeur général de Generali parle « d’ambiguïtés, de conflits d’intérêts ». Pour la plupart des observateurs, le jeu est bien plus ouvert que ce que prétend la FFSA. « Les assureurs ont toujours négligé le marché des contrats collectifs. À eux de se mettre en ordre de marche », estime Pierre Burban, de l’UPA. « Les mutuelles ont toute leur place : en santé, elles ont l’antériorité et le savoir-faire », explique de son côté Marie-Annick Nicolas, conseillère confédérale CGT.

Le lobbying agressif de la FFSA est en réalité cousu de fil blanc. Depuis la signature de l’accord national interprofessionnel, la fédération patronale cherche par tous les moyens à entraver les clauses de désignation ou de recommandation pour qu’un maximum d’entreprises se retrouvent seules pour négocier. Ce seront en majorité de petites entreprises, peu armées pour faire jouer la concurrence. Et les assurances ont un avantage de taille : elles sont déjà présentes dans ces entreprises, dont elles assurent les locaux ou le matériel.

Philippe Pihet, secrétaire confédéral FO, est pessimiste : « L’affaire est mal engagée. L’insécurité juridique est telle que de nombreuses branches ont suspendu les négociations, qui doivent pourtant aboutir avant le 1er juillet 2014. Les petites entreprises vont être livrées au marché. Au bout du compte, ce sont les salariés qui vont en payer le prix. »

Dès l’adoption du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, prévue le 2 décembre, les parlementaires de l’opposition ont d’ores et déjà promis de saisir à nouveau le Conseil constitutionnel sur les clauses de recommandation. Leurs partisans croisent donc les doigts pour que le gouvernement, qui a consulté le Conseil d’État avant de rédiger l’article 12 ter, ait pris des assurances juridiques suffisantes.

 

Manifestation de la Fédération des mutuelles de France. 
Manifestation de la Fédération des mutuelles de France. © Caroline Coq-Chodorge

L’autre front des opposants aux clauses de recommandation est du côté des mutuelles. Le président de la Mutualité française, Étienne Caniard, économe de ses paroles sur le sujet, a lui aussi pointé, dans une déclaration à l’AFP le 18 novembre, le « vrai problème de conflit d'intérêts pour les partenaires sociaux ».

En réalité, la Mutualité est divisée sur le sujet. Les plus grosses mutuelles, comme Harmonie, sont prêtes à se positionner sur les contrats de branche. Les plus petites craignent, elles, de se retrouver avec, dans leurs portefeuilles d’assurés, un trop grand nombre de chômeurs, de jeunes et de retraités, des inactifs aux revenus faibles ou en mauvaise santé. Les risques vont augmenter, et les cotisations avec.

La Fédération des mutuelles de France, qui regroupe 81 mutuelles et compte plus d’un million d’assurés, a elle aussi manifesté, mardi 26 novembre, sans bonnets. Son président Jean-Paul Benoît ne décolère pas : « La généralisation de la complémentaire santé en entreprise casse la solidarité entre les actifs et les inactifs. Il y a 4 millions de personnes qui n’ont pas de couverture santé, dont seulement 400 000 salariés. Pour les couvrir, l’État va dépenser 2,5 milliards d’euros d’aides fiscales supplémentaires au profit des contrats d’entreprise. Ces milliards devraient profiter au plus grand nombre. » À la différence des contrats individuels, les contrats collectifs bénéficient en effet d’aides fiscales et sociales à hauteur de 3 milliards d’euros.

Pour la députée socialiste Fanélie Carrey-Conte, « ce qui est en train de se jouer, c’est une réorganisation profonde de la protection sociale. L’entreprise devient la porte d’entrée de la complémentaire santé ». Cette ancienne responsable mutualiste ne nie pas les difficultés : « Si nous avions mis en place cette généralisation, nous n’aurions pas commencé par là. Nous soutenons cette démarche des partenaires sociaux, car cela reste une avancée. Mais il ne faut absolument pas s’arrêter là, ce n’est qu’une première étape vers la généralisation de la complémentaire santé pour tous. » Jeunes, retraités et chômeurs compris.

 

 

 

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1 décembre 2013 7 01 /12 /décembre /2013 17:41

 

Source : mediapart.fr

 

Merkel 3 ressemblera beaucoup à Merkel 2

|  Par Martine Orange

 

 

Angela Merkel et Sigmar Gabriel ont trouvé un accord pour un programme de gouvernement. Hormis sur le Smic, la continuité avec la politique menée par la CDU seule ces dernières années est patente, en particulier sur l'Europe. Les membres du SPD, qui doivent approuver par vote l’accord, ont plus que le sort de leur parti dans les mains.

 

Ils ont signé un accord de gouvernement. Mais qu’ont-ils signé au juste ? Au lendemain de l’annonce de l’accord gouvernemental conclu
entre la CDU d’Angela Merkel et le SPD dirigé par Sigmar Gabriel, les membres du SPD commencent à s’interroger. Ce projet de coalition gouvernementale est-il le bon ? Ou ne risque-t-il pas d’être mortifère pour leur parti, comme le fut la grande coalition de 2005 ?

 

Signature de l'accord mercredi 
Signature de l'accord mercredi © Reuters

L’examen des propositions avancées dans le projet de gouvernement risque de devenir enfiévré dans les jours qui viennent. Car ce sont les 470 000 militants du SPD qui ont la clé de la coalition gouvernementale. L’accord est soumis à leur vote. Le résultat du scrutin interne sera connu le 14 décembre.

 « Cet accord est pour les petites gens », a expliqué le chef du SPD pour tenter de rallier tout de suite les suffrages. Mais de nombreux militants du parti commencent à faire part de leur hésitation, voire de leur refus d’approuver le texte. Des hésitations bien compréhensibles.

Car à la première lecture, cet accord (voir toutes les mesures ici) est loin de reprendre des idées défendues pendant la campagne. La grande tendance du projet, c’est plutôt la poursuite de la politique en place depuis 2005, le SPD n’ayant réussi qu’à peser à la marge sur les orientations futures du gouvernement. Selon toute vraisemblance, le gouvernement Merkel 3 va furieusement ressembler à Merkel 2.

Un sujet était censé avoir valeur de test : le salaire minimum. Pendant la campagne, Angela Merkel avait dit tout le mal qu’elle pensait de cette proposition défendue par le SPD. Pour la chancelière, cela ne pouvait que nuire à la compétitivité des entreprises allemandes et à la bonne santé de l’économie et de l’emploi. En annonçant dans l’accord qu’un salaire minimum de 8,50 euros de l’heure sera instauré en Allemagne, Angela Merkel semble donc faire une concession immense.

Mais il y a un sous-texte. Si salaire minimum il y a, il ne sera instauré définitivement qu’au 1er janvier 2017. En attendant, la nouvelle coalition entend favoriser le dialogue entre patronat et syndicats afin d’aboutir à des accords sur le salaire minimum par branche. Il est déjà prévu aussi que certains emplois, comme ceux des saisonniers ou dans l’agroalimentaire par exemple, restent inférieurs de toute façon au salaire minimum.

On comprend la prudence de certains élus du SPD qui demandent dès aujourd’hui des éclaircissements, notamment sur les nominations. « Cela n’a pas la même signification, si c’est la CDU ou nous qui avons le ministère du travail », remarque Michael Roth, secrétaire général du SPD du Land du Hessen. Compte tenu des termes retenus dans l’accord sur le salaire minimum, la proposition peut être entièrement détournée, vidée de son contenu ou au contraire renforcée, en fonction de la personnalité qui occupe le poste.

Pour l’instant, les deux partis se sont refusés à donner les moindres indications sur la distribution des postes. Il semble juste acquis que la CDU et le SPD auront chacun sept ministères et la CSU (droite bavaroise) trois. Angela Merkel sera forcément chancelière. Sigmar Gabriel devrait avoir la vice-présidence. Et Wolfgang Schäuble, homme incontournable pour la chancelière, est considéré comme inamovible : il devrait retrouver ses fonctions au ministère des finances.

L’autre grand sujet social était les retraites. La CSU tenait beaucoup à avoir une augmentation des retraites pour les femmes ayant quitté leur emploi afin d'élever leurs enfants, ou ayant été le plus exposées au travail précaire. De son côté, le SPD voulait obtenir que les salariés ayant cotisé 45 ans puissent partir à 63 au lieu de 67 ans, sans être sanctionnés par une décote. Satisfaction a été donnée aux deux partis. Enfin, alors que les grandes villes allemandes découvrent la spéculation immobilière, la coalition s’est engagée à poursuivre sa politique d’encadrement des loyers et à plafonner les augmentations à 15 % sur quatre ans.

« Mettre l’accent sur les retraités plutôt que sur l’éducation, soutenir les mères à la retraite plutôt que d’aider les jeunes mères, contrôler les loyers plutôt que développer le logement social – en un mot cibler une politique directement en direction de la majorité de personnes âgées – est significatif. L’Allemagne peut paraître l’homme fort de l’Europe mais ses faiblesses sont évidentes. L’Allemagne vieillit et rétrécit », commente brutalement un journaliste du Guardian

La seule grande innovation politique est l’engagement de la coalition à autoriser les enfants de parents immigrés, nés en Allemagne mais qui n’ont pas la nationalité d’un pays de l’Union, à avoir la double nationalité. Aujourd’hui, ils sont tenus de choisir entre les deux nationalités à 23 ans. Mais il est vrai que certains milieux patronaux soutenaient cette mesure proposée par le SPD.

L'Europe, la grande absente

Déjà, les milieux patronaux comme de nombreux experts s’inquiètent de ces folles dépenses et du dérapage à venir des finances publiques. « L’Allemagne ne va plus être un modèle pour l’Europe », avertissent-ils. « Le plus grand problème est l’association de règles plus strictes sur le marché du travail, le coulage de l’âge de la retraite et l’instauration de nouveaux bénéfices pour les retraités », soutient Clemens Fuest, directeur du Centre européen pour la recherche économique (ZEW). « Cela va conduire à une hausse des charges de la sécurité sociale et réduire l’emploi à un moment où nous avons besoin de plus d’emplois » dit-il, définitif.

Les cris d’alarme sur la mise en pièces du modèle allemand sont, cependant, à relativiser au vu des chiffres avancés. Les deux partis ont chiffré les nouvelles dépenses publiques concernant à la fois le social, les infrastructures et l’énergie, et la relance de l’investissement et de la recherche, à 23 milliards d’euros supplémentaires. Cela représente 0,6 % du PIB allemand.

 

 
© Reuters

Les efforts de relance de l’Allemagne que le FMI et les États-Unis appelaient de leurs vœux pour entraîner toute la zone euro risquent de ne pas être au rendez-vous. D’autant qu’Angela Merkel et Sigmar Gabriel ont confirmé leur intention de ne pas porter le moindre coup à la « vertu » budgétaire allemande. Les deux partis se sont engagés à ne faire aucune augmentation d’impôt, à réaliser un équilibre budgétaire dès 2014 et un excédent par la suite, et enfin à n’avoir recours à aucun endettement supplémentaire, et même à le diminuer dès que possible. 

Mais la permanence la plus frappante concerne l’Europe. La preuve ? Il en est à peine question dans l’accord CDU-SPD. Plusieurs journalistes se sont d’ailleurs inquiétés de l’absence de référence à l’Europe, comme si la crise européenne n’existait pas, comme si de nouveaux dangers n’émergeaient pas. Cela n’est pas un hasard, les deux partis sont à peu près d’accord sur tout : la règle allemande doit s’imposer à tous. 

En dépit des propos de tribune de plusieurs dirigeants du SPD, ceux qui ont négocié avec Angela Merkel partagent son analyse sur l’organisation de l’Europe. Pas question de mutualiser les dettes des pays ou de créer des eurobonds, chaque pays doit rester responsable de ses engagements passés. Pour harmoniser la zone euro, chaque pays doit poursuivre ses réformes structurelles. Pas question non plus d’aider un pays sans un plan d’austérité et de mesures chiffrées. Même si le FMI se retire du processus des sauvetages européens, les méthodes de la Troïka doivent continuer à s’appliquer.

Enfin, l’union bancaire, pour les deux partis, ne peut se faire que selon le schéma déjà arrêté par l’Allemagne : chaque pays doit superviser ses banques et assumer leur renflouement éventuel. En cas de faillite bancaire, le processus expérimenté à Chypre doit s’appliquer : les actionnaires, les détenteurs d’obligations et aussi les déposants doivent être sollicités avant toute aide publique.

Le dépit créé par ce programme risque de déborder largement la base du SPD. C’est tout ce qui reste de la social-démocratie européenne qui voit ses espoirs s’effondrer. Si la grande coalition souhaitée par Angela Merkel est formée, les projets de réunir les forces social-démocrates pour proposer une politique autre lors des élections européennes seront ruinés. Comment dit-on déjà ? There is no alternative. N’est-ce pas la démonstration que veut faire Angela Merkel ?

 

 

 

 

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1 décembre 2013 7 01 /12 /décembre /2013 17:23

 

Source : lemonde.fr

 

Les Français envisagent une explosion sociale

Le Monde.fr | 30.11.2013 à 12h21

 

 

Manifestation d'agriculteurs et d'horticulteurs à Toulon, le 29 novembre 2013.

 

Selon un sondage IFOP à paraître dans Dimanche Ouest-France, les Français seraient 76 % à juger certaine ou probable une explosion sociale dans les prochains mois. Dans un climat social tendu où les mouvements de protestation de multiplient, « jamais cette anticipation n'avait été aussi importante, puisque nous atteignions 64 % en janvier 1998, 66 % en avril 2009 et 70 % en avril dernier », selon ce sondage.

Par rapport à avril, le pourcentage de ceux qui pensent « que nous assisterons certainement à une explosion sociale dans les prochains mois progresse de 8 points, pour s'établir à 27 %, et ceci constitue un signe supplémentaire que la situation sociale est très tendue dans le pays », commente l'institut de sondage.

La certitude de la survenue d'une « déflagration sociale » est le plus répandue parmi les 35-49 ans, qui sont 32 % à en être certains et 48 % à l'estimer probable. La tranche d'âge à y croire le moins est celle des 18-24 ans, qui sont quand même 70 % à estimer cette explosion sociale certaine ou probable. « On n'observe pas dans cette enquête de spécificités régionales, comme si c'était la majeure partie de la société qui s'attendait désormais à un mouvement social d'ampleur », note l'institut.

Si le risque d'explosion sociale est nettement plus ressenti aux extrêmes – avec 84 % de réponses positives chez les sympathisants de Lutte ouvrière ou du Nouveau Parti anticapitaliste, et 89 % parmi les proches du Front national (dont 51 % sont certains que ce scénario va se produire) –, il l'est aussi dans l'électorat de droite, avec 85 % de réponse positive à l'Union pour un mouvement populaire et 89 % à l'Union des démocrates et indépendants. Ils sont 56 % de sympathisants socialistes à juger probable ou certaine une telle issue. Ce chiffre est en évolution de cinq points par rapport à avril, alors que dans le reste de la gauche il a beaucoup plus progressé, de 14 points au Front de gauche (78 % croient aujourd'hui à une explosion sociale dans les prochains mois) et de 19 points chez Europe Ecologie-Les Verts (68 % désormais à y croire).

 

 

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1 décembre 2013 7 01 /12 /décembre /2013 17:12

 

 

Source : reporterre.net

 

Les députés favorisent la création des golfs dévoreurs de terres agricoles

Camille Martin (Reporterre)

samedi 30 novembre 2013

 

 

Artificialisation des terres, on ne progresse pas : si l’article 18 de la Loi de finances a pu être retoqué, des députés "de gauche" ont fait passer une mesure encourageant la création des golfs.


Un amendement à la loi de finances avait un effet incitatif à l’artificialisation des sols, comme l’expliquait récemment Reporterre : cet article 18 a été supprimé au Sénat le 25 novembre contre l’avis du gouvernement.

Moins bonne nouvelle pour l’environnement, les nombreux amendements déposés par EELV (Europe Ecologie Les Verts), notamment sur le gazole, les cartes grises, le régime Censi- Bouvard (qui facilite la spéculation immobilière), et celui déposé par le sénateur Marini sur les déchets sont tous rejettes.

Quant à l’Assemblée, elle a de son côté adopté début novembre un amendement facilitant la création de golfs : il spécifie qu’il sera possible d’"exonérer les terrains de golf de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre de 2014 pour la part qui leur revient", perte de recettes qui sera compensée par l’Etat, notamment "par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts". Faut-il rappeler (oui, hélas, il le faut) que les golfs s’installent sur des terres agricoles, et engendrent des consommations d’eau et d’herbicides très importantes ? Voir ici la propagande chez les élus en faveur des golfs et l’enquête de nos amis de Basta ! sur ces golfs qui dévorent les terres.

L’amendement était proposé par MM. Emmanuelli (PS, Landes), Juanico (PS, Loire), et Launay (PS, Lot). "Adopté !"

Notons aussi que le comité de pilotage de la grande réforme fiscale annoncée par le premier ministre réunit les ministres du Budget, de l’Economie et des finances, du Travail, des Affaires sociales - mais pas celui de l’Ecologie...


Source : Camille Martin pour Reporterre.

Photo : Wikipedia.

Lire aussi : Les mesures gouvernementales sur le logement vont accélérer l’artificialisation des terres.


 

Pour une information libre sur l’écologie, soutenez Reporterre :

 

 

 

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30 novembre 2013 6 30 /11 /novembre /2013 19:24

 

Source : lemonde.fr

 

L'Islande va annuler jusqu'à 24 000 euros de dettes par ménage

Le Monde.fr avec AFP | 30.11.2013 à 19h14

 

 

Reykjavik.

 

Le gouvernement islandais a annoncé samedi 30 novembre un plan pour alléger les dettes des ménages qui ont contracté un emprunt immobilier, à concurrence d'un peu plus de 24 000 euros chacun.

Ce plan était la principale promesse du Parti du progrès (centriste) du premier ministre Sigmundur David Gunnlaugsson, victorieux aux élections législatives d'avril avec son allié conservateur, le Parti de l'indépendance.

Après de longs mois de tractations, le gouvernement de coalition a présenté des mesures d'un coût évalué à 150 milliards de couronnes (plus de 900 millions d'euros) sur quatre ans.

La mesure-phare est la réduction du principal de la dette pour les ménages ayant contracté un emprunt immobilier indexé sur l'inflation (ce qui est le cas dans la grande majorité des cas), sans conditions de revenus. Cet allégement de dettes, qui dépend du montant emprunté, est plafonné à quatre millions de couronnes (24 400 euros).

 

AUCUN DÉTAIL SUR LE FINANCEMENT

Les banques en Islande ne proposaient pratiquement que des emprunts indexés avant l'effondrement du système financier en 2008. Or, la profonde crise financière traversée par ce pays a fait chuter la couronne islandaise, alimentant une inflation qui a fait grimper la dette des ménages.
 

« Actuellement, la dette des ménages équivaut à 108% du PIB, ce qui est élevé au plan international. (...) La mesure va doper le revenu disponible des ménages et encourager l'épargne », a affirmé le gouvernement dans un communiqué.

Ce dernier n'a fourni aucun détail sur son financement.Depuis qu'il a pris ses fonctions, le premier ministre a assuré que le plan ne devrait pas augmenter la dette publique. Il a d'abord promis une ponction sur les créanciers étrangers des banques islandaises, que de nombreux économistes ont jugée impraticable, puis a laissé planer le doute sur l'origine des fonds nécessaires. Les allégements de dettes doivent commencer « vers la mi-2014 », a précisé le gouvernement.

 

 

 

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30 novembre 2013 6 30 /11 /novembre /2013 19:16

 

 

Source : marianne.net

 

Appel à une révolution fiscale rouge et verte
Samedi 30 Novembre 2013 à 12:00

 

Corinne Morel Darleux et Pierre Lucot*

 

Le gouvernement Ayrault joue avec un cocktail explosif, celui de la double politique de l'offre et de l'austérité : plus d'argent pour produire n'importe quoi n'importe comment et au mépris de l'environnement, moins d'argent pour la justice sociale et les services publics nécessaires à une société du bien vivre. Le tout sous prétexte de réduction des déficits publics et sous les injonctions de la Commission européenne.

Appel à une révolution fiscale rouge et verte

Le modèle de croissance économique par dégradation du gouvernement.


Le gouvernement Ayrault joue avec un cocktail explosif, celui de la double politique de l'offre et de l'austérité : plus d'argent pour produire n'importe quoi n'importe comment et au mépris de l'environnement, moins d'argent pour la justice sociale et les services publics nécessaires à une société du bien vivre. Le tout sous prétexte de réduction des déficits publics et sous les injonctions de la Commission européenne.


Pourtant à y regarder de plus près, l'austérité est à géométrie variable. Le gouvernement n'hésite pas à investir des millions dans une politique catastrophique pour l'environnement : le projet insensé d'aéroport à Notre Dame des Landes, c'est 150 millions pour l’État ; la douteuse ligne à grande vitesse Lyon-Turin, tout comme l'EPR de Flamanville : 8,5 milliards ; le site d'enfouissement de déchets nucléaires à Bure : 35 milliards ; et selon l'IRSN un accident nucléaire coûterait à la France de 760 à 5800 milliards d’euros, soit trois années de PIB ! Cette logique productiviste, dépassée et à contre-sens des enjeux, notamment climatiques, nous coûte bien cher aujourd’hui… et nous coûtera de plus en plus cher demain !


Côté social, ce n'est pas plus brillant. Après avoir refusé de sauver Florange comme il s'y était engagé et avoir fait passer en force l'Accord National Interprofessionnel (ANI), le résultat sur le front du chômage et des licenciements est désastreux : 43 981 entreprises ont été liquidées en un an, 62 431 sont en procédure de sauvegarde. Avec 17.000 emplois supprimés en France au troisième trimestre 2013, le taux de chômage, qui était de 9,8% en 2012, devrait passer selon l'OCDE à 10,6 % en 2013 et à 10,8% en 2014. 


Réhabiliter l'impôt citoyen 


Loin d'en tirer les enseignements en matière de budget, de réorientation des investissements publics ou de réduction du temps de travail, le gouvernement Ayrault s'enferre dans une logique mortifère. On savait déjà qu'il avait abandonné toute volonté de bifurcation écologique, voilà qu'il se prépare à réitérer sur la fiscalité en annonçant notamment une hausse de la TVA ou en faisant des déclarations d'intention qui ne suffiront sans doute pas à calmer le mouvement de colère provoqué par la bien mal nommée « écotaxe » et sur lequel surfent à plaisir la droite et le patronat.


Les citoyens ne comprennent plus à quoi sert l'impôt. Le « ras le bol fiscal » ne vient pas du fait que les français auraient abandonné l'idée de répartition solidaire « de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins », celle-ci reste une utopie vivace. Il vient du fait que l'impôt ne joue plus sa fonction de justice sociale. Entre les mains de Nicolas Sarkozy puis de François Hollande il est devenu un moyen de mieux financer le Medef et le Cac40. Comment s'y plier de bonne grâce quand cette hausse de la TVA, l'impôt le plus injuste qui soit, va aller directement financer le « crédit impôt compétitivité » de 20 milliards offert par le gouvernement au patronat, sans aucune contrepartie sociale ni environnementale ? Comment accepter de verser au pot commun, quand on voit chaque jour les services publics disparaître des zones rurales car sabrés par l'austérité? Comment donner une part de ses revenus sans sourciller lorsque s'étalent en Une des magazines les yachts et jets privés d'une oligarchie dorée principale arme du lobbying qui supervise les forces destructrices de la planète ?


Les richesses existent et les riches polluent.


En tête des entreprises les plus inégalitaires, on retrouve la publicité et le luxe : le PDG de Publicis a gagné 1091 années de Smic en 2012. Chez LVMH, ce sont 9,5 millions d’euros que Bernard Arnault a perçu en 2012. La publicité a pour seul objectif de créer des besoins artificiels pour permettre au marché d'écouler sa surproduction au-delà des besoins réels des citoyens. Elle agit comme une véritable matraque visuelle dans l'espace public pour jouer sur la pulsion d'achat, et comme un redoutable pousse-au-crime vers le crédit à la consommation et le surendettement. L'illusion du bonheur par la surconsommation matérielle et la promotion d’un idéal dans le luxe génère en outre une ponction sur les ressources naturelles et un dumping social délétères.


Ce modèle de vie porté par la publicité et véhiculé par le luxe, outre le fait de pousser chacun à désirer une abondance bien éloignée de la sobriété et du bien vivre, n’est pas sans incidence pour le monde: ce sont bien, comme l'écrit Hervé Kempf, les riches qui détruisent la planète ! D'après un rapport de l'Insee en 2010, les 20 % des ménages les plus aisés émettent 2,7 fois plus d'émissions de GES que les 20 % des ménages les plus démunis ! 


Des propositions concrètes pour une révolution fiscale


Pour réhabiliter l'impôt comme outil de solidarité et faire de la fiscalité un outil de justice sociale et de bifurcation écologique, il est urgent d'engager une véritable révolution fiscale sur la base de ces constats :

     −pour répondre aux inégalités, il convient d'augmenter le nombre de tranches d'impôt sur le revenu afin de le rendre plus progressif, avec une dernière tranche à 100% permettant d'instaurer un revenu maximum autorisé ;
    −pour stopper l'impunité des actionnaires et grands dirigeants, et œuvrer à la mise en place d’une autre forme d’organisation du travail, il est urgent de limiter les écarts de salaire au sein d'une même entreprise, de lutter contre la fraude fiscale et de taxer davantage le capital et les transactions financières ;    
    −pour dégager des recettes supplémentaires afin de financer les services publics essentiels au bien vivre et investir massivement dans la transition écologique, il est nécessaire d’augmenter la TVA sur les produits de grand luxe et sur la publicité, de supprimer les niches fiscales socialement inutiles et nuisibles d'un point de vue environnemental ;
    −enfin, pour sortir les besoins fondamentaux de la précarité et décourager le mésusage, il faut prioritairement mettre en place une véritable tarification progressive de l'eau et de l'énergie, et assurer la gratuité des premiers m² et kWh afin d'en garantir l'accès universel.

La fiscalité est au cœur de l'écologie politique. Redevenue outil de redistribution des richesses, elle permettrait de démontrer que les biens communs tout comme l'argent existent et qu'il n'est nul besoin d'attendre un hypothétique retour de la croissance pour que la sobriété partagée assure le bien être de tous. Car comme l'indiquent de nombreuses études, notamment celles de l'économiste Jany Catrice comparant les indicateurs de santé sociale et de PIB en France, la croissance n'est pas synonyme de bien être. Elle ne résout plus les inégalités au-delà d'un certain seuil du PIB, et prospère sur un extractivisme qui met en péril la biosphère. Il est temps de changer de modèle, une révolution fiscale en serait le premier pas décisif.


*Corinne MOREL DARLEUX, Secrétaire nationale à l'écosocialisme du Parti de Gauche (PG)
Pierre LUCOT, Conseiller Fédéral Europe-Écologie les Verts (EELV), mandataire de la motion Objectif Terre

 

 

 

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29 novembre 2013 5 29 /11 /novembre /2013 19:06

 

Source : marianne.net

 

Cinq ans après Lehman Brothers, où en est la régulation financière ?
Vendredi 29 Novembre 2013 à 12:00

 

Les économistes atterrés

 

Le 15 septembre 2008, la banque Lehman Brothers chutait et l’économie mondiale entrait dans la crise le plus profonde depuis 1929. Les banques centrales, les autorités de régulation, les dirigeants politiques - les banques elles-mêmes… - promettaient d’adopter les réformes nécessaires au nom du «plus jamais ça». Où en est, depuis, la régulation financière ?

 

Rex Features/REX/SIPA
Rex Features/REX/SIPA

Le 15 septembre 2008, la banque Lehman Brothers chutait et l’économie mondiale entrait dans la crise le plus profonde depuis 1929. Les banques centrales, les autorités de régulation, les dirigeants politiques - les banques elles-mêmes… -  promettaient d’adopter les réformes nécessaires au nom du «plus jamais ça». Le candidat Hollande avait affirmé dans son engagement n° 7 : « Je veux mettre les banques au service de l’économie » et de promettre : « Je séparerai les activités des banques qui sont utiles à l’investissement et à l’emploi, de leurs activités spéculatives. J’interdirai aux banques françaises d’exercer dans les paradis fiscaux … ». 


Cinq ans après, où en est-on ? 


¬ Le système bancaire est-il plus sûr ? 


Pour empêcher la prise excessive de risques par des banques devenues « too big too fail », pour éviter que leur faillite soit un danger pour l’ensemble du système et de l’économie, une séparation des banques de détail des banques d’investissement est indispensable. Or les réformes adoptées se sont contentées d’apporter  « un ajustement à la marge ». Sous la pression des lobbies, la réforme adoptée en France ne touchera pas au modèle de la banque universelle, elle laisse intacte 99% des activités bancaires. Il n’y aura pas de séparation stricte de la banque de détail et des activités de marchés. Les banques vont pouvoir continuer à fonctionner comme avant la crise. 

  •  
¬ La spéculation financière et l’évasion fiscale vont-elles cesser ?

Les quelques avancées sur la transparence des activités des banques n’auront qu’un effet limité sur leurs opérations dans les paradis fiscaux. La moitié des transactions financières et commerciales transitent encore aujourd’hui par une centaine de territoires ayant les caractéristiques de paradis fiscaux. Les multinationales sont les premières clientes des paradis fiscaux, et les banques sont les multinationales les plus implantées dans ces zones off shore. Or il n’y a toujours pas d’accord international sur la fiscalité des entreprises multinationales. Les sociétés écrans, qui permettent de dissimuler des flux financiers, ne sont toujours pas bannies. 

 

  • ¬ L’Union bancaire, un remède à la crise actuelle ?


Au Conseil européen des 28 et 29 juin 2013, les chefs d’État ou de gouvernement de l’Union européenne ont décidé d’aller vers une intégration économique et monétaire plus poussée, et ont adopté le principe d’une union bancaire. L’objectif affiché est de « rompre le cercle vicieux entre les banques et les États ». Les députés européens ont voté le 12 septembre 2013 un système européen de surveillance bancaire qui placera les quelques 130 plus grandes banques de l'UE sous la surveillance directe de la BCE à partir de septembre 2014. Or la BCE a, jusqu’à présent, accordé des aides massives aux banques sans pour assurer leur pérennité. Aucune condition n'accompagne cet octroi de liquidités, aucune exigence n’est imposée quant à l'usage qui en est fait pour soutenir l'économie réelle et lutter contre le chômage. Qu'est-ce qui empêchera les banques de poursuivre sur le même modèle ?
 

Les économistes « atterrés » par les politiques actuelles et par l’absence de véritables mesures pour lutter contre la crise, vous invitent à participer à une conférence-débat sur ces questions et à discuter des politiques qui s’imposent afin de remettre les banques au service de l’économie.


Pour répondre à ces questions…

 

Dans le cadre des Rencontres mensuelles des « atterrés », 

 

Jeudi 5 décembre 2013, de 20h à 22h30 

Salle Bruxelles, FIAP Jean Monnet, 30 rue Cabanis 75014 Paris M° Glacière 

(entrée libre et gratuite dans la limite des places disponibles) 


Débat : cinq ans après Lehman Brothers, où en est la régulation financière?


Intervenants 

- Laurent Clerc, directeur de la stabilité financière à la Banque de France, et auparavant Directeur des Études Monétaires et Financières (2008-2011); Adjoint au directeur de la Stabilité financière (2008); Chef du Service d’Études et de Recherche sur la Politique Monétaire (2004-2007) Économiste à l’OCDE (2003) à la Banque Centrale Européenne (2002) et la Banque d'Angleterre (1999-2000) 

- Jean-Michel Naulot, 40 ans de carrière dans la banque et membre de l'AMF (Autorité des marchés financiers), qui vient de publier  Crise fianancière, pourquoi les gouvernements ne fontrien. _

- Laurence Scialom, professeur à l’Université Paris 10, spécialiste de la régulation bancaire, membre du Directoire d'EconomiX depuis la création du laboratoire, actuellement responsable de l'axe de recherche "Monnaie - Finance - Intermédiation" (MFI) au sein de l'UMR EconomiX. 


Animateurs : Esther Jeffers, maître de conférences à Paris VIII, spécialiste de l’économie bancaire et financière, et Dominique Plihon, professeur et responsable du pôle spécialisé en économie financière à Paris 13, tous deux membres du CA des « atterrés » et du Conseil scientifique d’Attac. 

D’ici là, retrouvez nos analyses et positions sur le sujet dans les chroniques et articles de notre site http://atterres.org.

Ce débat est soutenu chaudement par marianne.net

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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29 novembre 2013 5 29 /11 /novembre /2013 18:23

 

 

Source : mediapart.fr

Mory Ducros, la plus grosse faillite sur le bureau de Hollande

|  Par Dan Israel

 

 

7 000 emplois sont menacés par les graves difficultés du numéro deux français du transport routier de colis. Le secteur est tellement sinistré que les syndicats ne sont même pas sûrs de pouvoir sauver un emploi sur deux. Et un repreneur potentiel reste à trouver.

François Hollande et son gouvernement doivent faire face à la plus importante faillite depuis leur arrivée au pouvoir. Numéro deux français du transport de colis par la route (la « messagerie »), le groupe Mory Ducros a été placé mardi 26 novembre en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Pontoise (Val-d’Oise). Quatre jours auparavant, l’entreprise de 5 200 personnes avait annoncé lors d'un comité d'entreprise extraordinaire sa cessation de paiement.

Après l’annonce du redressement judiciaire de FagorBrandt, Mory Ducros vient compléter la longue liste des grandes entreprises en difficulté de l’année 2013. La dernière entreprise de cette taille à avoir annoncé sa défaillance est Néo Sécurité, numéro deux français de la sécurité, en avril 2012.

Une centaine de chauffeurs étaient rassemblés devant le tribunal lors de l’annonce, à l’appel des syndicats, représentés à la barre par l’avocat Thomas Hollande, fils du président. Tous n’ont pu que constater la nécessité de la nomination de deux administrateurs judiciaires. Les dettes, plus de 200 millions d’euros, sont gelées pour six mois, aux termes desquels un repreneur sera désigné. Faute de candidat, l’entreprise risque la liquidation.

 

 

« Ça nous a mis un coup sur la tête », reconnaît Jim Beaucher, représentant CGT au Mans. « Une chose est sûre, il y aura de la casse, une casse énorme, pronostique Daniel Gianetto, de FO. Si l’entreprise reste dans la situation actuelle, on va droit dans le mur, c’est ce que nous disons depuis des mois. » Aucun syndicaliste ne surjoue la surprise. Ni l’optimisme. La panne économique du secteur est connue depuis longtemps. En 2012, Mory Ducros a réalisé un chiffre d’affaires de 670 millions d’euros, et enregistré une perte d’exploitation de 65 millions. Son chiffre d’affaires serait en baisse de 8 % depuis le début de l’année, et selon le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg, les pertes mensuelles sont de l’ordre de 5 millions d’euros actuellement. Le Monde a été le premier à faire état des gros soucis du transporteur, il y a trois semaines.

« Le secteur est en crise, incontestablement. Il y a des opérateurs en grand nombre, et un effondrement du trafic depuis plusieurs années dû à la crise économique que nous traversons, analyse Fabian Tosolini, le secrétaire national de la fédération transports de la CFDT (syndicat majoritaire dans le groupe). Face à la concurrence féroce, les entreprises sont obligées de baisser leurs prix, et donc leurs marges. » « La messagerie est en surcapacité, on le sait depuis une dizaine d’années, explique de son côté Denis Jean-Baptiste, secrétaire CFDT du comité d’entreprise. Dans le secteur, tout le monde est dans le rouge, personne ne gagne d’argent. Quand il y a une croissance économique de 2 %, on survit, mais aujourd’hui… »

Face à l’ampleur de la casse potentielle – 5 000 salariés et 2 000 sous-traitants ! –, le gouvernement fait assaut de déclarations déterminées. Vendredi, le premier ministre Jean-Marc Ayrault avait assuré rechercher « toutes les solutions, site par site ». Le ministre des transports Frédéric Cuvillier assurait, lui, que « tout va être mobilisé, tout va être étudié ».

Les syndicats rencontrent le gouvernement ce jeudi. Arnaud Montebourg a laissé entendre qu’il pourrait débloquer des fonds, sans doute grâce au « fonds de résistance économique », présenté il y a quelques jours. Doté de 380 millions d’euros, ce fonds est censé accorder des prêts de « plusieurs dizaines de millions d'euros », à des taux avantageux, aux entreprises à court d'argent mais dont l'activité est rentable à moyen terme. « Mory Ducros pourra profiter de ce fonds à la condition d'avoir un projet de reprise solide », indiquait Bercy, le 13 novembre.

Mais à lire l’interview de Montebourg dimanche 24 novembre au Journal du dimanche, l’avenir ne sera de toute manière par rose. « Vu l'état de l'entreprise, tout le monde devra faire des sacrifices. Les salariés, les actionnaires, les banques », a-t-il lâché. Le gouvernement a assuré vouloir assurer le « sauvetage de 2 000 emplois au moins ». Bien maigre pour les salariés. La CFDT, elle, annonce travailler sur son propre plan de reprise, avec « 3 000 emplois conservés » à la clé. Les 85 agences nationales devront passer au nombre de 50.

« Le redressement judiciaire, ce n’est absolument pas la fin de Mory Ducros », martèle Fabian Tosolini. Qui reconnaît toutefois qu’il n’y a que « deux solutions » : « Soit on trouve un candidat pour une reprise globale, avec un schéma territorial bien pensé qui permet d’assurer la pérennité de l’entreprise et d’une partie des emplois, soit c’est la liquidation judiciaire. » Le responsable national CFDT ne veut pas entendre parler de reprise partielle : « Ce serait un dépeçage de l’entreprise, et un massacre sur le plan de l’emploi. »

Faillites en cascade

Problème, trouver un repreneur « global » risque fort de ressembler à la recherche de la quadrature du cercle. « Des investisseurs de premier plan, industriels et financiers, ont d’ores et déjà marqué leur intérêt », affirmait hier la direction de Mory Ducros dans un communiqué. Mais les syndicats sont sceptiques. Bercy évoque plus prudemment « des manifestations d'intérêt ».

Il suffit en effet de rappeler l’histoire récente du secteur pour douter de l’existence d’un « chevalier blanc » capable de sortir l’entreprise du marasme. « Ducros Mory est déjà l’aboutissement de deux reprises d’entreprises en très grande difficulté », rappelle Martial Brancourt, représentant CGT au CE. En effet, Caravelle, le propriétaire du groupe, est un spécialiste du redressement de PME en difficulté. En 2010, il a repris DHL à Deutsche Post, qui cherchait à s’en séparer depuis un an, et qui a accepté de remettre 240 millions d’euros dans l’entreprise avant la cession. DHL devient Ducros Express, et en janvier 2011, près de 600 des 3 200 employés sont remerciés.

Un an plus tard, Caravelle met la main sur Mory Team après son dépôt de bilan, pour un euro symbolique mais en acceptant d’injecter 10 millions d’euros dans les comptes. 800 salariés sont licenciés. Mais le nouveau groupe, officialisé fin 2012, rencontre immédiatement de graves difficultés. « Nous nous sommes retrouvés dans une société qui possédait deux groupes de messagerie similaires, avec les mêmes métiers, explique Martial Brancourt. Caravelle, ce sont des investisseurs financiers, pas des transporteurs. Ils pensaient additionner les deux chiffres d’affaires, tout en réduisant fortement les coûts, mais ça ne marche pas comme ça… »

Il y a bien sûr eu une réduction des déficits, avec déjà une vingtaine de fermetures d’agence, mais la grande diversité de types de colis transportés, du simple paquet à la grosse palette, et le nombre élevé de client, n’ont en fait pas permis de réduire suffisamment le nombre de camions et de chauffeurs nécessaires pour le transport. D’autant que Mory Ducros n’est pas spécialisé dans un secteur particulier. « La fusion a permis des économies d’échelle, mais la crise économique est trop aiguë, constate Denis Jean-Baptiste. Le transport international ou la logistique sont moins touchés, mais la direction avait justement décidé de réduire la voilure sur ses secteurs. La messagerie, ça ne suffit pas à faire vivre 5 000 personnes. »

Malgré ce paysage désolé, la direction actuelle se dit prête à participer à un plan de relance. « Cette période d’observation est l’occasion d’élaborer, avec le soutien des pouvoirs publics, une solution pour l’avenir », a dit aux Échos André Lebrun, le président d’Arcole Industries, filiale de Caravelle qui gère Mory Ducros. Selon le quotidien économique, son entourage indiquait que le fonds était prêt à « accompagner un ou des repreneurs en restant au capital de Mory Ducros ».

Un geste de bonne volonté ? Voire. Martial Brancourt s’étonne que le repreneur n’ait en fait « presque rien dépensé jusqu’à présent dans ce dossier » et qu’il puisse éventuellement rester dans la partie grâce au soutien de l’État. « Il va falloir mettre de l’argent sur la table un jour », s’agace le représentant CGT. Il rappelle que le placement en redressement judiciaire de l’entreprise permet aussi à son propriétaire de « ne pas payer les licenciements », puisque c’est l’AGS, fonds public financé par une cotisation patronale, qui avancera les frais, en attendant d'être remboursée quand l'entreprise ira mieux ou qu'elle sera liquidée. Mory Ducros, beaucoup de perdants, et quelques gagnants ?

 

 

 

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29 novembre 2013 5 29 /11 /novembre /2013 18:15

 

 

Source : mediapart.fr

Redistribution : les classes « moyennes inférieures » exclues

|  Par La rédaction de Mediapart

 

 

Le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc) publie un rapport dans lequel il pointe le manque de redistribution du système social français au profit des classes « moyennes inférieures ».

Le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc) publie, mardi 26 novembre, une étude qui révèle que les classes « moyennes inférieures » françaises, dont le niveau de vie est compris entre 1 200 et 1 600 euros par mois pour une personne, bénéficient moins de la redistribution sociale que dans d'autres pays.

Selon l'étude du Crédoc, les classes « moyennes inférieures françaises verseraient 43 % de leur revenu aux administrations publiques, par le truchement de l'impôt sur le revenu de la TVA, (...), et ne toucheraient, en retour, à travers les différentes aides sociales, que 42 % de leur revenu disponible ». 

Par comparaison avec le Royaume-Uni, où les classes moyennes inférieures sont « mieux soutenues financièrement par les pouvoirs publics », selon le Crédoc, les membres de la classe moyenne reçoivent 49 % de leur revenu disponible en aides sociales, pour 34 % de prélèvements obligatoires.

 

Lire le rapport du Credoc

 

 

 

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29 novembre 2013 5 29 /11 /novembre /2013 18:04

 

 

Source : mediapart.fr

Poitiers : le maire, le théâtre et le promoteur

|  Par Martine Orange

 

 

Le maire socialiste de la ville, Alain Claeys, a accepté la cession de l’ancien théâtre municipal au prix de 510 000 euros, soit moins de 200 euros le mètre carré. La vente réalisée de gré à gré se fait au bénéfice d’un promoteur local, avec de confortables plus-values à la clé. Une association demande l’annulation de la vente.

Ce devait être une opération immobilière sans problème. Mais rien ne s’est passé comme prévu. En lançant la vente du théâtre municipal, le maire socialiste de Poitiers, Alain Claeys, espérait bien expédier le dossier de façon habile et rapide, afin de dégager le terrain avant les élections. Il a juste sous-estimé l’effet que produiraient l’annonce et surtout le prix de la vente du théâtre municipal auprès de ses électeurs.

Depuis des mois, des associations, des représentants de la culture, des étudiants, des jeunes, des vieux se mobilisent pour sauver leur théâtre municipal. Une pétition a déjà recueilli plus de 6 000 signatures. Une lettre a été adressée à la ministre de la culture, restée jusqu'ici sans réponse. La presse locale se fait écho régulièrement de la contestation sans trouver de relais. 

Le 20 novembre, une association pour la défense de l’ancien théâtre de Poitiers, animée par Jacques Arfeuillère, professeur de lettres, a déposé deux recours, l’un auprès de la mairie, l’autre auprès de la préfecture pour faire annuler le projet de vente. « Des écologistes, des gens du Front de gauche, des membres du NPA », tente de relativiser avec un brin de condescendance Alain Claeys, maire mais aussi député, élu à la tête d’une majorité plurielle.

 

 
© dr

Mais l’opposition au projet de vente de l’édifice public déborde désormais largement ceux que le maire désigne comme ses adversaires depuis que les habitants ont découvert le prix de la cession. Le 23 septembre, le conseil municipal annonçait qu’il allait vendre l’ancien théâtre municipal de gré à gré à un promoteur privé pour 510 000 euros. Les habitants de la ville se sont frotté les yeux : 2 500 mètres carrés en plein centre-ville pour moins de 200 euros le mètre carré ! Beaucoup s’interrogent sur le bien-fondé de l’opération. Où est l’intérêt de la ville dans cette cession d’un bien public à un promoteur privé sans aucun rapport avec le prix du marché ?

« Tout est clair. Tout s’est fait dans la légalité et la transparence. Une estimation a été demandée aux domaines. La loi a été respectée. Si les opposants ont des doutes, qu'ils portent plainte », soutient Alain Claeys, visiblement agacé des questions sur ses choix et sa gestion. Député depuis 1997, maire depuis 2008 (il a succédé au socialiste Jacques Santrot, maire durant trente et un ans !), habitué à un mandat sans trop d’anicroches, il n’avait pas vu venir la contestation. D'autant que celle-ci s'élargit maintenant à d'autres projets immobiliers du maire, dont le futur palais de justice. Aujourd’hui, l’affaire du théâtre municipal risque de se retrouver au cœur de la campagne municipale, censée jusqu’alors se dérouler sans grand problème.

Au début était un théâtre. Situé en plein centre-ville entre la préfecture et la mairie, sur la place principale que les Poitevins s’entêtent à continuer d’appeler place d’Armes, des décennies après avoir été renommée, ce théâtre municipal, inauguré en 1954, a été des années durant le lieu de culture de la ville. Dans une ville qui vit au rythme de la vie universitaire, bouillonnante de vie pendant l’hiver, vide et déserte l’été – la ville de 90 000 habitants accueille 25 000 étudiants –, c’est un endroit de rencontres, de souvenirs, d’émotion, de découvertes qui a marqué des générations. 

 

 

Il y a quelques années, la ville de Poitiers, qui mène une ambitieuse politique culturelle, s’est dotée d’une nouvelle scène, le théâtre auditorium de Poitiers (TAP). Une scène nationale placée sous l’égide du ministère de la culture, qui accueille théâtres, concerts, spectacles vivants. Le maire de l’époque, Jacques Santrot, avait promis alors que l’ancien théâtre continuerait à fonctionner, en liaison avec le TAP : il était devenu depuis longtemps un cinéma d’art et essai. Un cinéma à l’ancienne avec orchestre et balcons. Un endroit rare, représentatif de l’architecture du milieu du XXe siècle avec son immense miroir en verre églomisé, ses lustres et ses ferronneries. Bizarrement, l’immeuble n’a jamais été classé, ce qui aurait sans doute permis de le mettre à l’abri de toute spéculation immobilière.

Mais brusquement, le maire de Poitiers, Alain Claeys, ne se sent plus du tout tenu par les engagements pris par son prédécesseur. En 2012, il confirme que la ville n’a plus besoin du théâtre, au nom du nouveau développement du centre-ville.

Après avoir multiplié les centres commerciaux à chaque sortie de la ville – comme presque partout en France –, la municipalité se rend compte que le centre-ville est en train de dépérir. Les magasins ferment, à l’instar du Printemps, sacrifié par la direction de la chaîne de grands magasins sans que la municipalité ne s’en émeuve beaucoup. D’autres menacent de le faire, notamment la chaîne de cinéma CGR – aussi importante dans le sud-ouest de la France qu’UGC – qui pense supprimer ses salles de cinéma en centre-ville. « CGR a construit un complexe cinématographique à Fontaine-le-Comte (dans la banlieue de Poitiers). Il ne voyait plus l’intérêt de se maintenir en centre-ville. Mais une ville comme Poitiers sans cinéma au centre, ce n’est pas possible », explique Bernard Cornu, adjoint au maire chargé de l’urbanisme, au cœur du projet de reconversion du théâtre.

Qu’à cela ne tienne ! Au terme d’une année de négociations, un compromis étonnant est trouvé : pour maintenir les salles privées, la mairie accepte de sacrifier son cinéma municipal. Pour justifier son choix, l’équipe municipale explique qu’elle n’a plus les moyens d’entretenir le bâtiment et son exploitation. « Le TAP nous a coûté 55 millions d’euros. Il faut financer son exploitation. La ville n’a pas les moyens de payer deux théâtres », explique le maire.

Cependant, en contrepartie de la fermeture du théâtre, la municipalité propose de louer trois salles chez l’exploitant privé pour faire du cinéma d’art et d’essai en centre-ville pour 180 000 euros par an. Quels étaient les coûts de fonctionnement du théâtre ? La ville n’avait-elle pas plutôt intérêt à moderniser son théâtre plutôt que de subventionner un exploitant privé ? Autant de questions que le maire n’a guère envie de discuter. « Je ne vais pas rentrer dans les détails », balaie-t-il de la main avant de se féliciter de l’augmentation de la fréquentation depuis l’ouverture des trois salles payées par la municipalité.

Non classé

Fin décembre 2012, le théâtre devient un grand vaisseau échoué. Du jour au lendemain, les poignées de porte ont été enlevées, les portes et les vitres obscurcies. Plus rien ne filtre vers l’extérieur.

Dans le cadre de l’enquête publique sur la sauvegarde du centre-ville, les habitants ont multiplié les remarques sur le sort réservé au théâtre. Beaucoup plaident pour sa sauvegarde, pour son maintien dans le giron public, et en tout cas pour que soit procédé au classement du théâtre avant toute opération, afin de préserver l’architecture de l’ensemble. Des remarques considérées comme en partie justifiées par le commissaire enquêteur, qui recommandait que « les décisions soient prises en concertation avec les intéressés ».


Partie du miroir 
Partie du miroir © dr

Malgré cela, le classement complet de l’édifice n’aura jamais lieu. Alain Claeys assure que la préservation du patrimoine a été au cœur de la réflexion de la ville. « C’est la  ville qui a demandé le classement d’un certain nombre d’éléments comme la façade, le miroir, les ferronneries », insiste-t-il. Dans ce type de dossier, l’architecte des bâtiments de France, chargé notamment de la préservation des patrimoines, a normalement une voix prépondérante. A-t-il fait des recommandations ? Ont-elles été suivies par la mairie ? « L’architecte des bâtiments de France n’a pas obtenu l’autorisation de la Drac (Direction régionale des affaires culturelles) pour communiquer », nous a-t-il été indiqué dans un courriel en réponse à une demande d’entretien. Mais que craint donc la Drac pour interdire à l’architecte de parler ?  

Pour rassurer les associations et les habitants de plus en plus inquiets sur le sort futur de l’édifice, Alain Claeys promet une grande concertation. Fin avril, ils découvrent que tout est déjà bouclé. La ville lance un appel à projets pour le théâtre. Cette procédure publique, souvent utilisée pour des associations ou des sujets sociaux ou culturels, est normalement destinée à aider les collectivités à trouver des solutions pour des problèmes complexes. Une sorte de concours d’idées.

Mais là, la mairie de Poitiers a déjà tout arrêté. Un comité de pilotage a été constitué avec six adjoints et le maire pour élaborer le cahier des charges dès le début de l’année. « Le cahier des charges n’a pas été soumis au conseil », assure Maryse Desbourdes, élue NPA au conseil municipal et opposée à la vente.

Dans son appel à projets (consultable ici), la ville précise que le théâtre va être découpé, sans toucher à la façade principale. Elle se réserve l’orchestre de la salle, au sous-sol, pour faire une nouvelle salle qui devrait être consacrée aux arts visuels, ainsi que l’entrée. Pour le reste, l’intérieur peut être redécoupé pour accueillir des commerces, des bureaux, et des logements aux derniers étages. « L’association de la culture et du commerce est désormais une tendance lourde. Cela permet de faire un lieu vivant en préservant l’essentiel », dit Alain Claeys.

De façon un peu inattendue, cet appel à projets est lié à une vente de gré à gré. Les candidats doivent se presser : ils ont à peine un mois pour imaginer le futur du théâtre et remettre leur dossier. Tout doit être bouclé le 31 mai 2013.

Chargé par l’association de défense de rédiger les recours, l’avocat Nicolas Duflos s’interroge sur la procédure retenue qui semble relever de la commande publique sans en être officiellement une, en liant un projet à une vente de gré à gré.

Avant même que le conseil municipal ne se soit prononcé, toute la ville paraît connaître le nom de l’équipe gagnante : il s’agit des promoteurs Thierry Minsé et Thierry Février, et de l’architecte François Pin. En quelques années, ces promoteurs sont devenus des gloires locales. Ils ont réalisé plusieurs centres commerciaux dans la périphérie de la ville, et dans la région, ils ont construit des bureaux, des logements, des hôtels. Une opération a particulièrement frappé les Poitevins : Thierry Minsé a racheté l’ancien hôtel des archives départementales – un ancien couvent –  pour y réaliser un hôtel de luxe en 2011, dessiné par l’architecte François Pin.

Découvrant ce qui semble être acté, un adjoint chargé du bâtiment, Robert Rochaud (EELV), s’étonne alors de ne pas avoir été convié avec une autre adjointe chargée du patrimoine à la réunion du comité de pilotage devant dépouiller les offres. « Le maire m’a répondu : "Tu ne peux pas manifester à l’extérieur contre le projet et siéger en même temps au comité de pilotage" », explique aujourd’hui l’élu. Ainsi va la démocratie locale...

A main levée

Sans surprise, le conseil municipal du 23 septembre vote la vente du théâtre et le nom du repreneur. « Beaucoup d’élus, y compris dans la majorité, étaient opposés au projet de cession. Nous avons demandé un vote à bulletin secret. Mais le maire a refusé. Il a obligé les élus à voter à main levée. Il savait ce qu’il faisait : personne de son équipe n’allait oser le contester publiquement. Ils ont tous voté pour », se souvient Maryse Desbourdes. Le principe de la cession est adopté ce jour-là par 34 voix pour, 9 contre et 5 abstentions.

Mais la vraie surprise pour les habitants de la ville, c’est le prix. Jamais jusqu’alors, il n’y avait été fait référence, même dans l’appel à projets. Les textes régissant les collectivités locales précisent que, si les municipalités ont toute liberté de choisir une vente de gré à gré, cela ne les dispense pas « après avoir décidé de la vente, de fixer un prix de base ou de retrait ainsi que les conditions de vente sous forme d’un cahier des charges comme en matière d’adjudication ». Or, dans ce dossier, rien de tel. Ce n’est qu’à l’issue du conseil municipal, alors que l’équipe gagnante a déjà été retenue, que tous découvrent le prix : 510 000 euros !

« Si nous avions connu le prix, nous aurions organisé une souscription pour racheter le théâtre. Je suis sûr que nous aurions réussi à réunir la somme », assure Jacques Arfeuillère, président de l’association de défense. Dans son recours pour obtenir l’annulation, celle-ci insiste sur ce prix dérisoire, sans aucun rapport avec le marché immobilier de la région. « C’est un prix qui n'a aucun sens. Il est interdit de brader un bien public », renchérit Arnaud Clairand, membre d’EELV très actif dans le collectif de défense.

« Nous avons tout fait dans la légalité. Nous avons demandé l’avis aux Domaines. Et le prix que nous avons retenu est même 20 % au-dessus de leur estimation », se défend Alain Claeys. De fait, une estimation a bien été demandée aux services des Domaines. Leur étude a été rendue le 6 septembre 2013. D’un côté, ils ont estimé les deux commerces attenants au théâtre. Alors que ceux-ci rapportent à la ville un loyer de 35 000 euros par an, leur valeur a été estimée à 210 000 euros, soit six années de loyer. Mais le plus étonnant est l’estimation de l’ancien théâtre. Après avoir sous-estimé de 1 000 mètres carrés l’espace intérieur, comme l’a relevé l’avocat de l’association, les Domaines ont chiffré la valeur du bâtiment à 225 000 euros.

 

 

Comment les Domaines ont-ils pu parvenir à une telle évaluation ? « Dans ce dossier, mes services sont intervenus de façon classique. On évalue sur la base de l’existant. D’habitude, on est plusieurs à regarder, celui-là a été fait par un seul. Car ce n’était pas une opération très compliquée. Le prix ? Je ne m’en souviens plus. Cela fait plus de six mois que nous avons fait l’étude. Je ne sais même pas ce qu’il est advenu par la suite, je ne sais même pas si le théâtre a été vendu. Vous savez, vendre un théâtre, c’est une opération  banale », explique le directeur régional des finances publiques, Robert Monniaux, responsable à ce titre des services des Domaines. 

Depuis l’affaire de l’hippodrome de Compiègne, il est apparu que les services des Domaines n’étaient pas forcément les mieux outillés pour faire des évaluations immobilières, comme l’ont noté plusieurs expertises réalisées pour le compte de la Cour de justice. Député, membre de la commission des finances de l’Assemblée nationale, rapporteur de la commission d’enquête sur Jérôme Cahuzac, Alain Claeys pouvait difficilement ignorer ce précédent. Pourquoi n’a-t-il pas demandé une contre-expertise ? « Mais les services de l’État sont là pour cela. D’ailleurs, nous avons augmenté le prix de 20 % par rapport au prix arrêté par les Domaines. De toute façon, ce sont des droits à construire », explique Alain Claeys, qui explique que le nouveau propriétaire va devoir construire à ses frais une dalle pour la nouvelle salle pour les arts visuels. Cette dalle, selon ses estimations, va coûter au moins 500 000 euros.  

Mais derrière la transformation projetée de l’édifice public, il y a une opération de promotion immobilière privée qui s'annonce fort rentable. Des commerces réservés à de grandes enseignes comme H&M sont prévus. Ces dernières en général acceptent de payer fort cher les loyers commerciaux. De plus, des logements doivent être construits aux étages supérieurs, qui n’ont rien à voir avec des logements sociaux.

« C’est n’importe quoi », rétorque le maire quand on lui signale les prix pratiqués dans le cadre de la dernière opération immobilière en centre-ville. Une opération à laquelle participe le promoteur Thierry Minsé. Et pourtant ! À peine trois semaines après la décision du conseil municipal, le journal gratuit de la ville (lire l'article ici) présentait la nouvelle opération immobilière, en train de se réaliser juste en face du théâtre, dans les anciens murs du Printemps. Il y était annoncé la vente d’appartements au prix de 3 000 euros le mètre carré. « C’est un seuil en deçà duquel on ne pouvait aller pour un immeuble aussi bien situé », expliquait un agent immobilier de la ville chargé de la commercialisation. Le plus grand appartement (163 mètres carrés et 200 mètres carrés de terrasse) est vendu 800 000 euros sans le parking ! Rapportées au prix du mètre carré vendu par la mairie, même après d'importants travaux de modernisation, les plus-values espérées pour la vente des logements dans l'ancien théâtre ont toutes les chances de prendre l'ascenseur !

Quel est l’intérêt de la municipalité qui dispose de ces références de marché d’accepter malgré tout un prix manifestement hors norme et de subventionner un promoteur privé qui, lui, empochera les plus-values futures ? L’adjoint chargé de l’urbanisme se défend de tout bradage. « D’ailleurs, si c’était une opération aussi intéressante que cela, nous n’aurions pas eu que deux candidatures, dont une ne répondant pas du tout au cahier des charges », déclare-t-il.

Deux candidats seulement ont répondu à l’appel à projets de la ville, qui n’a pas révélé l’identité du second. C’est peu pour un programme aussi ambitieux. Mais il est vrai que la mairie de Poitiers n’a guère fait de publicité autour de ce projet. Alors qu’elle a multiplié les annonces pour tous les appels d’offres – des travaux d’impression à la fourniture de sanitaires – pendant cette période, elle n’a fait aucune annonce ni dans Le Bulletin officiel des annonces des marchés publics ni dans Le Moniteur des travaux publics pour cette cession. Le projet a juste été annoncé dans La Nouvelle République, le journal local. « Une photo, quelques lignes », a relevé quelques jours plus tard le journaliste chargé de la vie locale, s'étonnant de la discrétion de cet appel à projets. Cette discrétion, en tout cas, n'a guère aidé à susciter des vocations.

Représentant l’État, la préfecture est normalement chargée de veiller à la légalité des opérations réalisées par les collectivités locales. Interrogée sur l’opération, elle nous a répondu : « En matière de cession immobilière, la jurisprudence ne porte que sur des ventes effectuées à un prix inférieur à l'estimation des Domaines. La vente de l'ancien théâtre est prévue pour un montant supérieur d'environ 15 % à l'estimation. À ce stade, aucune irrégularité n'a été observée. »

 

 


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