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21 mai 2015 4 21 /05 /mai /2015 16:13

 

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

 

Affaire Tefal : l'inspectrice du travail se retrouve au tribunal

|  Par Rachida El Azzouzi

 

 

L'inspectrice du travail qui avait subi des pressions de la part de la société d'électroménager est convoquée devant le tribunal correctionnel pour recel de documents volés. Les agissements de l'entreprise, en revanche, sont restés impunis.

 

Mediapart a longuement relaté ici et l’affaire Tefal, du nom de cette filiale du groupe Seb basée à Rumilly, près d'Annecy, principal employeur de Haute-Savoie, avec quelque 1 800 employés. En 2013, la société d’électroménager n’a pas lésiné sur les moyens pour se débarrasser de Laura Pfeiffer, une inspectrice du travail jugée trop regardante alors qu’elle n’effectuait que son travail en dénonçant un accord caduc sur les 35 heures.

Pour obtenir sa mutation, la direction de Tefal a instauré un véritable harcèlement, joué de ses pouvoirs et relations, du Medef local aux renseignements généraux, en passant par le préfet et, plus grave, par le supérieur hiérarchique de Laura Pfeiffer, Philippe Dumont. En témoignent des documents internes au service des ressources humaines de Tefal et des mails accablants, transmis à l’inspectrice du travail par un mystérieux informateur interne. Documents que Mediapart a consultés.

Comme cet échange : « Dan, j’ai échangé avec P. Paillard [responsable juridique de l’UIMM de l’Ain, le patronat de la métallurgie] au sujet de l’inspectrice. Il me dit que le DDTE [directeur départemental du travail] a le pouvoir de la changer de section administrative pour que Tefal ne soit plus dans son périmètre. Intéressant, non ? » Réponse du DRH : « Merci de nous prendre RDV avec Dumont dès mon retour. Je pense que nous devrons voir le préfet. »

Tout au long de cette affaire, tombée en plein démantèlement de l’inspection du travail au travers du plan Sapin, Laura Pfeiffer ne bénéficiera d’aucun soutien de sa hiérarchie régionale comme de son ministère de tutelle. Seul appui : les syndicats. Alors même que les pressions et l’atteinte à l’indépendance des inspecteurs du travail, garantie par l’OIT, étaient caractérisées, alors même qu’un avis du Conseil national de l’Inspection du travail (CNIT) reconnaît clairement les pressions indues exercées sur l’inspectrice, elle subira l’acharnement de sa Direccte (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi) et du ministère, refusant de reconnaître son accident de service.

Dans son avis, le CNIT regrette « que, dès lors qu’elles [ces pressions] ont été rendues publiques, aucune intervention publique des autorités administratives ou de l’autorité centrale de l’inspection du travail ne soit venue les condamner [...] Le système de l’inspection du travail ne peut fonctionner que si la hiérarchie soutient et protège les inspecteurs au regard de potentielles influences extérieures indues ».

Deux ans après les premières révélations de L'Humanité, l’affaire, emblématique des relations obscures entre les “Direccte et les gros pourvoyeurs d’emplois, connaît un nouveau rebondissement. La jeune inspectrice vient de recevoir une citation à comparaître devant le tribunal correctionnel d’Annecy le 5 juin à 14 heures. Elle est prévenue pour recel de documents confidentiels (passible de 5 ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende) et violation du secret professionnel (un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende).

Telles sont les suites données par le parquet d’Annecy (avec une célérité qu’on ne lui connaît pas dans les dossiers de droit du travail) à la plainte déposée par l’entreprise Tefal contre la fonctionnaire du ministère du travail. Elle est citée aux côtés de Nicolas M., l'informateur qui a permis de dévoiler la vérité et de mesurer l’ampleur des pressions subies par l’inspectrice. C’est lui qui l’alerte en octobre 2013 d’un mail anonyme : « Je suis en possession de documents hyperconfidentiels, prouvant que vous avez été victime de pression, je sais que le groupe SEB et la société Tefal ont exercé via des personnes du Medef une pression sur votre responsable, M. Dumont, afin qu’il vous fasse taire. »

Salarié de l’entreprise, informaticien, il a payé cher son courage : il a été licencié il y a un an pour faute grave après qu’il a été identifié comme étant « l'origine de la fuite » par la direction, qui a mené en interne une chasse aux sorcières et saisi les PC des salariés. Il est, lui, poursuivi pour vol et divulgation de documents confidentiels. « Ces documents circulaient en interne, Nicolas est tombé dessus par hasard », rappelle Jean-Claude Petit, délégué syndical Force Ouvrière du groupe Seb. Il est « estomaqué » : « C’est fou, la justice en France. Grâce à Nicolas, on a la preuve des abus de pouvoir de l’entreprise Tefal sur une inspectrice de l’administration du travail et c’est le lanceur d’alerte et la harcelée qui finissent sur le banc des accusés, pas Tefal. » D’ores et déjà, l’intersyndicale de l’usine a prévu un rassemblement de soutien des salariés devant le tribunal correctionnel d'Annecy le jour de l’audience pour soutenir leur ancien camarade ainsi que l’inspectrice.

Cette dernière peut compter aussi sur le soutien des syndicats de l’administration du travail de la région Rhône-Alpes. « Hallucinés » de voir leur collègue aujourd’hui poursuivie par le parquet d’Annecy à la demande de Tefal « pour avoir fait son travail et dénoncé l’obstacle à ses fonctions ». CGT, FSU, Sud, FO, CNT, appellent tous les agents du ministère du travail à se mettre en grève et à se rassembler le 5 juin à 13 h 30 devant le tribunal correctionnel d’Annecy en signe de protestation.

Dans un communiqué, ils demandent au ministre du travail François Rebsamen de condamner publiquement et fermement cette attaque contre leur collègue et leurs missions, et de lui assurer la protection fonctionnelle. Ce que la rue de Grenelle n’a jamais fait dans ce dossier. Pour les syndicats, « ce procès est éminemment politique ! C’est le procès de notre métier, de l’inspection du travail, démantelée depuis des années par les gouvernements successifs et qui doit faire face aux attaques incessantes du Medef et du patronat à travers la mise en cause de ses agents », écrivent-ils.

 

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

 

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21 mai 2015 4 21 /05 /mai /2015 15:53

 

Source : http://www.bastamag.net

 

Justice

Après le contrôle des chômeurs, 100 000 embauches pour lutter contre la fraude fiscale ?

par

 

 

Le gouvernement vient d’annoncer la création de 200 postes de conseillers spécialisés, au sein de Pôle emploi, pour « renforcer le contrôle des chômeurs ». Tous les demandeurs d’emploi sont concernés, des contrôles aléatoires venant s’ajouter aux contrôles ciblés de certaines catégories, comme les chômeurs de longue durée ou ceux qui ne trouvent pas de travail dans des secteurs qui recrutent. Si le sujet inquiète nos dirigeants, c’est que la fraude aux allocations chômage a fortement augmenté depuis la crise, passant de 62 millions d’euros en 2011 à 100 millions en 2013. Mais ce type de fraude reste très minoritaire : elle concerne 8 820 personnes en 2013, et représente 0,3 % des 30 milliards d’euros d’allocations versées chaque année aux chômeurs (et 0,003% des demandeurs d’emploi indemnisés).

 

100 millions de fraude aux allocations chômage...

Rappelons aussi que ce montant inclut pour un tiers des fraudes aux allocations repérées en amont, donc des « fraudes évitées », pour lesquelles il n’y a donc aucun préjudice financier réel. Et qu’une partie de cette fraude est le fait d’entreprises. 440 établissements étaient concernés en 2013, par exemple par la création d’emplois fictifs (coût : 16,2 millions d’euros en 2013). Autre élément à mettre en parallèle : par manque de moyens, Pôle emploi a versé à tort plus de 756 millions d’euros d’allocations chômage en 2013 [1]. Une situation qui peut s’avérer dramatique pour des demandeurs d’emploi en situation de détresse, à qui on demande de rembourser ces sommes ultérieurement.

 

50 à 80 milliards perdus dans la fraude fiscale

On aimerait en tout cas que les pouvoirs publics déploient autant d’ardeur à repérer et sanctionner les autres fraudes. Par exemple, la fraude aux cotisations sociales, par les entreprises, estimée en 2007 entre 8 et 14 milliards d’euros par le Conseil des prélèvements obligatoires, et qui aurait doublé depuis cette date [2]. Ou l’évasion fiscale, qui coûte chaque année à l’État français la très modique somme de 50 à 80 milliards d’euros. L’équivalent de ce qui est collecté chaque année par l’impôt sur le revenu ! Proportionnellement, si l’État décidait d’y consacrer autant d’énergie que pour le contrôle des chômeurs (200 agents pour 100 millions de fraude), il faudrait dédier 100 000 personnes supplémentaires à la lutte contre l’évasion fiscale, au vu de son ampleur. Doubler les effectifs de l’administration fiscale, donc. Ou multiplier par 1000 le nombre de salariés de Tracfin, l’agence spécialisée dans le renseignement et l’action contre les circuits financiers clandestins, qui emploie actuellement 104 agents.

Mais il semble plus simple de pointer du doigt le « chômeur-assisté-fraudeur ». Rassurons-nous : Pôle emploi promet une démarche de contrôle « à visage humain ». Et aucun objectif de radiation n’a été fixé : « Cela n’a pas pour vocation de modifier les chiffres du chômage (...) Ce n’est pas un flicage de la société », a déclaré François Rebsamen, le ministre du Travail. En cas d’« insuffisance de recherche d’emploi », le chômeur se verra proposer un accompagnement renforcé pour « redynamiser » sa recherche... Pourrait-on aussi proposer aux fraudeurs fiscaux de redynamiser leur sens moral et leur attachement à la solidarité nationale et à l’intérêt général ?

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21 mai 2015 4 21 /05 /mai /2015 15:40

 

Source : http://www.bastamag.net

 

Scolarité

Austérité : les dépenses d’éducation par élève atteignent leur niveau le plus bas depuis quinze ans

par

 

 

 

 

Sur fond de réforme des collèges, quels sont les moyens alloués par élève pour assurer leur scolarité ? Selon le ministère de l’Éducation nationale, les dépenses par élèves ont augmenté de 500 euros en dix ans. Mais si l’on se penche en détail sur les chiffres fournis, le discours officiel peut être mis en doute. Une étude réalisée par le syndicat Force ouvrière montre au contraire que ces dépenses, en grande majorité assurées par l’Etat et les collectivité locales, diminuent. Pour le collège, la France consacrerait même moins d’argent par élève qu’il y a 15 ans. Priorité à la jeunesse ?

Le temps n’est plus aux restrictions budgétaires : la dépense par collégien aurait augmenté de près de 500 euros entre 2006 et 2013. C’est ce qu’affirme le ministère de l’Éducation nationale, alors que les syndicats ont manifesté ce 19 mai contre la réforme du collège proposée par la ministre Najat Vallaud-Belkacem, qui a pourtant inscrit le texte au Journal officiel dès le lendemain. Des dépenses en augmentation ? Les chiffres du ministère eux-mêmes montrent pourtant le contraire.

La dépense moyenne par élève a chuté de 7% entre les années scolaires 2010-2011, alors que Luc Chatel (UMP) était ministre de l’Éducation nationale, et 2013-2014, sous son successeur Vincent Peillon (PS). C’est ce que révèle une analyse détaillée réalisée par le syndicat Force ouvrière, à partir des documents de synthèse publiés chaque année par la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) du ministère. Ces dépenses moyennes par élève prennent en compte toutes les dépenses d’éducation : celles de l’État pour payer les enseignants, l’administration, la documentation pédagogique ou la médecine scolaire par exemple, celles des collectivités locales pour assurer l’entretien des établissement l’activité des cantines ou des transports scolaires, celles engagées par les ménages pour l’achat de fournitures liées à l’école [1]. État et collectivités assurent 84% des dépenses et les ménages 7,5%.

Loin des tendances à la hausse annoncées par le ministère, pour tout le second degré (collège et lycées), le niveau de dépense moyen par élève est aujourd’hui au plus bas depuis 2006. La baisse des dépenses par élève serait de 6% pour le collège et de 10% pour les lycées d’enseignement général et technologique, sur ces quatre dernières années.

 

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[Cliquez sur l’image pour agrandir]

 

D’où vient ce différentiel entre les chiffres annoncés par le ministère et les études sur le plus long terme ? De calculs statistiques pour le moins étranges... Exemple : en 2013, le ministère annonce qu’un collégien coûte 8240 euros, contre 7750 euros en 2006. Ce chiffre est calculé en euros constants, en tenant compte de l’inflation des sept dernières années. L’augmentation de la dépense serait de 500 euros par collégien, donc. Sauf que la synthèse annuelle réalisée par la même direction du ministère en 2006, indique que, cette année-là, le montant de la dépense par collégien était de 7960 euros, en « euros 2006 ». Des chiffres incompatibles, au vu de l’inflation totale de 11 % entre 2006 et 2013, explique FO. Une dépense évaluée à 7960 euros en 2006 ne peut pas être ramenée à 7750 euros quelques années plus tard si l’on prend en compte l’inflation. D’autant que certains chiffres augmentent, d’autres baissent, pour les mêmes années, selon les différents documents. Si même les hauts-fonctionnaires du ministère ont des problèmes en mathématiques...

 


 

« Au lieu des 500 euros de plus annoncés par le ministère, on a en réalité une baisse de 600 euros en 2013-2014 par rapport à l’année scolaire 2006-2007 », conclut FO. Ou comment embrouiller des statistiques, en espérant que personne n’ira rechercher les chiffres annoncés les années précédentes...

« Avec la chute du nombre d’enseignants, l’augmentation du nombre d’élèves par classes et du nombre global d’élèves ces dernières années, ces chiffres ne constituent pas une surprise », pointe Jacques Paris, du Syndicat National FO des Lycées et Collèges (SNFOLC). Durant la dernière décennie, le nombre de collégiens a progressé de plus de 2 %, pendant que le nombre de classes reculait de 1,2 %. Soit 53 000 élèves en plus, pour 1 208 classes en moins. Au collège, le nombre moyen d’élèves par classe approche les 25.

Dans la même période, le nombre d’enseignants titulaires en collège a baissé de 11,6 %. La disparition de 50 000 postes de titulaires dans le secondaire ces dix dernières années n’a pas été compensée par l’embauche de 10 000 enseignants non titulaires [2]. On reste encore bien loin de la promesse de François Hollande de créer 60 000 postes supplémentaires dans les cinq années de son mandat présidentiel. Et de faire de la jeunesse une priorité, alors même que les inégalités continuent de progresser pour les 1,2 million d’enfants vivant dans des familles pauvres.

Agnès Rousseaux

Photo : Deux écolières d’Argenteuil (Île-de-France) / CC Julie Kertesz


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21 mai 2015 4 21 /05 /mai /2015 15:31

 

Source : http://cadtm.org

 

Si la Grèce respire, c’est toute l’Europe qui ira mieux

21 mai par Olivier Bonfond

 

 

 

Interview radio de Olivier Bonfond diffusée le 19 mai 2015 sur La Première (RTBF).

La dette publique qui pèse sur la population grecque est-elle irrégulière ? Illégale ? Illégitime ? Doit-elle être remboursée ? C’est ce que doit déterminer la Commission parlementaire d’audit mise sur pieds tout récemment par le parlement grec. Voici les premiers échos des travaux de cette Commission, avec Olivier Bonfond, économiste au CEPAG, qui prend part activement à ses travaux et revient tout juste d’Athènes.

 

A écouter ici 

 

Source : http://www.fgtb-wallonne.be/outils-...

 

 
Auteur
Olivier Bonfond

est économiste, conseiller au CEPAG et auteur du livre “Et si on arrêtait de payer ?" Editions Aden. Juin 2012

 

 

Source : http://cadtm.org

 

 

 

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20 mai 2015 3 20 /05 /mai /2015 20:50

 

Source : http://cadtm.org

 

 

Communiqué du CADTM et d’ACIDE Bruxelles à l’occasion de l’Assemblée générale de Dexia S.A.

Dexia : Merci pour la dette !

20 mai par CADTM

 

 

 

Cette après-midi, l’assemblée générale de Dexia S.A. fut agitée : des actionnaires ont posé des questions dérangeantes à la direction du groupe bancaire et l’un d’entre eux a même sauté sur la table où siégeaient les membres de cette direction en arborant un t-shirt « DEXIA : MERCI POUR LA DETTE : 9 MILLIARDS € » et en scandant « Dexia, dégage ! Paye ta dette et bon voyage ! », « Dexia, t’as joué, mais qui paye l’austérité ? »

 

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« Dexia, dégage ! ¨Paye ta dette et bon voyage ! »

 

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« Dexia, t’as joué, mais qui paye l’austérité ? »

Rappelons que Dexia a très bien fonctionné pendant plus de 100 ans lorsqu’elle était une banque publique. Mais moins de 20 ans après sa privatisation, elle s’est effondrée.

La population a alors été contrainte par les dirigeants politiques - sans même que les parlementaires n’aient été consultés - d’éponger ses pertes. Depuis 2008, le coût des différents sauvetages de Dexia s’élève déjà à 9 milliards d’euros ! |1| Ce montant pourrait encore s’alourdir vu que Dexia continue d’enregistrer des pertes et que l’État belge a déposé à l’époque une garantie d’État sur toutes ses dettes jusqu’en 2031 pour un montant de 43,7 milliards d’euros... (soit 20% du budget de l’État).

Bien que Dexia continue de constituer une menace pour la collectivité, les dirigeants de la banque ne donnent pas de réponses satisfaisantes à ces questions essentielles :

  • Qui sont les créanciers de Dexia qui bénéficient de cette incroyable garantie de l’État belge ?
  • Les pertes du groupe Dexia s’élèvent à plus d’un demi-milliard pour 2014. Quel est le risque de devoir recourir encore une fois aux fonds publics pour recapitaliser la banque ? 

 
Le CADTM et le groupe bruxellois de la plateforme d’audit citoyen de la dette en Belgique ACIDE exigent :

  • des réponses claires à ces questions ;
  • l’annulation de la garantie de l’État belge aux dettes privées de Dexia S.A.
  • l’annulation des 33 milliards d’euros de dette illégitime que constituent les sauvetages bancaires réalisés par l’État depuis 2008 ;
  • que des poursuites soient engagées contre les responsables de la débâcle de Dexia, parmi lesquels se trouvent l’ex-Ministre des Finances Didier Reynders, l’ex-gouverneur de la Banque nationale de Belgique Guy Quaden, l’ex-président de l’autorité des services et marchés financiers Jean-Paul Servais, ainsi que les administrateurs et directeurs en charge |2| ;
  • qu’il soit interdit à ces responsables d’exercer un métier bancaire vu leur incompétence ;
  • que Belfius (séparée du groupe Dexia) soit mise sous contrôle de ses employé.e.s et des usagers.

Plus généralement, nous sommes pour que l’ensemble du secteur des banques et des assurances soit socialisé car « la banque est un métier bien trop sérieux pour le laisser aux mains des banquiers », que les responsables de la crise se voient présenter la facture et que cesse toute forme d’austérité.

Contacts :

pour le CADTM : Renaud Vivien 0497 04 79 99 - renaud AT cadtm.org
pour ACiDe Bruxelles : Antoine Hermelin 0498 59 93 94 antoine AT fian.be

Pour plus de détails, voir le documentaire ’Dexia : démocratie confisquée’ produit par Zin TV, le CADTM, ATTAC-Bruxelles 2 et ATTAC-Liège.

 

Et nous ne manquons pas de rappeler au Ministre des Finances actuel ses belles paroles de 2013 :

Les responsables

Ce que les citoyens reprochent peut-être encore plus à leurs politiques, c’est qu’on n’a toujours pas désigné de responsables pour la débâcle Dexia. La commission parlementaire chargée du dossier s’est révélée inutile. Il a été seulement constaté qu’une banque, sans que personne ne s’en inquiète, peut gonfler son bilan jusqu’à trois fois le PIB de ce pays en contractant des dettes énormes. En tant que successeur de Bacob et du Crédit Communal, Dexia comptait de nombreux politiques et responsables dans ses groupements d’intérêt et conseils d’administration de ses différentes sociétés bancaires. Ces derniers n’ont rien fait.

Les personnes en cause ne manquent pas. L’internationalisation mégalomane et l’expansion endettée de Dexia a eu lieu sous la direction du président Piere Richard et du CEO Axel Miller. Aujourd’hui Richard profite d’une belle pension aux frais de Dexia, Miller continue sa carrière (à la tête de D’Ieteren). La FSMA de l’époque, sous la direction de Jean-Pol Servais, n’a rien vu, rien entendu, rien remarqué des dérapages de Dexia. Pourtant, ce même Servais se trouve toujours à la tête de la FSMA et espère prolonger son mandat.

Après 2008 aussi, des erreurs ont été commises. Jean-Luc Dehaene et le CEO Pierre Mariani n’ont pas sauvé le navire en perdition, notamment parce qu’ils désiraient conserver le groupe Dexia dans sa totalité et qu’ils ont voulu épargner les actionnaires et les créanciers. C’est pourquoi, à un moment où c’était peut-être possible, le portefeuille gigantesque d’obligations d’état n’a pas été supprimé et les créanciers n’ont pas été impliqués.

Et que dire des nombreux administrateurs de Dexia Group et de Dexia Banque (l’actuelle Belfius) et des responsables d’Arco et du Holding communal, les deux gros actionnaires belges de Dexia ? Personne n’a donc rien à se reprocher ? La Cour des comptes française a récemment publié une analyse démontrant que Dexia a chaviré à cause de son modèle financier vulnérable (financer à court terme des obligations à long terme) et sa faiblesse administrative où les administrateurs, les actionnaires, la direction et les contrôleurs se comportaient comme un groupe d’amis et de personnes partageant les mêmes idées. Peuvent-ils tous continuer comme si de rien n’était ? Manifestement, c’est le cas en Belgique.

Trends Tendances du 27 août 2013 : http://trends.levif.be/economie/politique-economique/les-10-travaux-de-di-rupo-le-cas-dexia-1-10/article-normal-175641.html

 

 
Notes

|1| Premier sauvetage en 2008 pour 2 milliards + achat de Belfius en 2011 pour un prix surévalué de 4 milliards + deuxième sauvetage en 2012 pour 3 milliards.

|2| Pour ne citer qu’un exemple : Pierre Richard, ancien patron du groupe Dexia, s’est vu remercié d’une retraite-chapeau dont la provision dépasse les 10 millions d’euros...

 

 

Source : http://cadtm.org

 

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19 mai 2015 2 19 /05 /mai /2015 16:03

 

 

 

Ma très chère banque
Ni les assureurs ni les banquiers ne s’étonnent de voir leurs clients vivre très longtemps, jusqu’à un record de 167 ans.

.

 

..C’est du moins ce qu’un contrôle de divers assureurs par l’Autorité de contrôle prudentiel (ACPR) laisse penser.

cour-des-compte

par Michel Crinetz, ancien superviseur financier, Collectif Roosevelt

 

 

En fait, ils étaient morts depuis longtemps, mais leur contrat leur survivait, et faisait prospérer leur assureur, qui continuait à prélever les frais de gestion et sa part des bénéfices. Quand il “n’oubliait” pas de revaloriser des capitaux décès pendant 20 ou 30 ans…

Des bénéficiaires se sont plaint des retards importants des assureurs à les prévenir et des montants proposés étrangement faibles. Nos députés s’en sont émus, et ont voté depuis 2007 des lois obligeant les assureurs à consulter le RNIPP (répertoire national d’identification des personnes physiques) pour savoir si leurs assurés étaient décédés, puis à rechercher les bénéficiaires. L'ACPR et la Cour des comptes sont allées vérifier si ces lois étaient effectivement appliquées.

Pas vraiment. Pas toujours, en tout cas.

L'ACPR a trouvé des centaines de milliers de contrats d’assurance-vie non réglés depuis longtemps, pour au moins 4,6 milliards d’euros. Les assureurs ont rétorqué qu’il n’était pas facile de trouver les bénéficiaires. Même le conjoint et les enfants, clients de l’assureur, à la même adresse que le défunt ? Ou des associations caritatives connues ?

“En fait, ils étaient morts depuis longtemps, mais leur contrat leur survivait, et faisait prospérer leur assureur, qui continuait à prélever les frais de gestion et sa part des bénéfices”

Mais si l’assuré a déménagé, eu d’autres enfants ou changé de conjoint, il faut payer des salariés pour faire des recherches, ou des honoraires à des généalogistes allant chercher des aïeux ou cousins en France ou à l’étranger. Ce serait plus coûteux que de conserver les fonds qui, en attendant, rapportent. Environ 1 % de 4,6 milliards, cela fait 46 millions par an. Désormais, l’argent non attribué doit être transféré au bout de dix ans à la Caisse des dépôts. Mais si on oublie ? Et puis, pour un décès dont on ne s’est pas informé, ce délai ne commence jamais.

L’autorité a infligé trois amendes en 2014 : 10 millions d’euros à Cardif (BNP Paribas), 40 millions à la CNP (La Poste, les Caisses d’épargne et… la Caisse des dépôts), 50 millions à Allianz Vie (qui avait même “purgé” des contrats non réglés !). Les punis ont, devant l’ampleur finalement supportable des sanctions (inférieures aux profits récoltés ?), renoncé à faire appel ; et déclaré qu’ils allaient prendre des mesures. Espérons-les suffisantes, et que les autres assureurs restitueront aussi aux bénéficiaires plusieurs milliards d’euros leur revenant dès 2015, car en 2016, les fonds iront se faire oublier à la Caisse des dépôts.

Félicitons notre superviseur national pour ce nécessaire rappel aux lois ; du moins aux assureurs.

Pour les banques, le compte n’y est pas

Du côté des banques, la Cour des comptes a trouvé au moins 1,5 milliard d’euros dormant sur 1,8 million de comptes et livrets inactifs appartenant notamment à 674 014 centenaires – contre seulement 20 106 centenaires recensés en France. Sans compter les coffres-forts, qui rapportent aussi, ni les 0,4 % de commissions sur les nombreux livrets A.

Nos parlementaires, qui s’étaient émus pour les contrats vie, ont été beaucoup moins réactifs et exigeants avec les banquiers, lesquels ne devront interroger le répertoire national qu’en 2016, soit 8 ans après les assureurs. Et toujours pas d’obligation de rechercher les héritiers, on se demande pourquoi. Ainsi, leurs clients, très peu mobiles de leur vivant, le sont encore moins après leur mort !

“Du côté des banques, la Cour des comptes a trouvé au moins 1,5 milliard d’euros dormant sur 1,8 million de comptes et livrets inactifs appartenant notamment à 674 014 centenaires – contre seulement 20 106 centenaires recensés en France”

Le Code civil fait obligation d’exécuter ses contrats de bonne foi (article 1134) – même aux banquiers –, et donc de contacter les héritiers une fois le décès connu. L’ACPR ne doit faire appliquer que les textes visant les établissements financiers, pas les règles générales du Code civil. Suggérons donc à nos très chers banquiers de trouver de bonne foi et rapidement les héritiers, avant qu’ils ne meurent à leur tour…

 

Publié le

 

 

 

 

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18 mai 2015 1 18 /05 /mai /2015 15:35

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

Economies d'énergie : le conflit d'intérêts qui menace de tout bloquer

|  Par Jade Lindgaard

 

 

EDF et Engie, ex-GDF-Suez, les plus gros producteurs et fournisseurs d’énergie en France, sont aussi devenus les principaux maîtres d’œuvre des économies de chauffage dans les bâtiments. Peut-on vendre tout et son contraire dans un contrat ? Pour la première fois, des acteurs de la commande publique s'inquiètent des effets de ce double jeu.

 

« Vous fumez ? » La question tombe, impromptue, sur la petite salle qui planche sur les contrats de performance énergétique, à l’étage du palais des congrès de Bordeaux, lors des Assises de l’énergie, en janvier 2015. C’est Pauline Mispoulet, présidente du Gesec, un groupement d’intérêt économique qui réunit des PME spécialisées dans les services énergétiques. Elle poursuit : « Si je vous dis qu’un fabricant de tabac a très envie de vous faire arrêter, qu’est-ce que vous dites ? » Quelques secondes de silence, suivies de sourires et de rires. « Eh bien, dans l’énergie, on a dit que les producteurs étaient vraiment les mieux placés pour vous faire faire des économies d’énergie. Et tout le monde l’a cru. » Pour l’oratrice, c’est un « conflit d’intérêts génétique ».

Un conflit d’intérêts généralisé menace la politique française de lutte contre le changement climatique. Personne n’en discute et beaucoup d’acteurs l’ignorent : EDF et Engie, ex-GDF-Suez, les plus gros producteurs et fournisseurs d’énergie, sont aussi devenus les principaux maîtres d’œuvres des économies d’énergie dans les bâtiments. Or logements, bureaux, hôpitaux et locaux commerciaux constituent le secteur économique le plus énergivore. Ils consomment près de la moitié de toute la demande finale d’énergie du pays et émettent le quart de toutes nos émissions de gaz à effet de serre. C’est notre principal canal de dérèglement du climat.

Depuis 2009, des objectifs très ambitieux ont été votés pour réduire la consommation d’énergie et les rejets de CO2 des bâtiments résidentiels et tertiaires. Mais dans les faits, ils sont souvent contredits par la façon dont ils sont mis en œuvre : contrats d’entretien de chauffage sans objectif d’économie d’énergie, marchés associant la fourniture de chaleur à la maintenance des appareils, appels d’offres parfois attribués sans concurrence, bureaux d’études à la fois juges et parties, opacité généralisée et omerta de règle.
 

Évolution de la consommation d'énergies par secteur en France (SOes, 2014).Évolution de la consommation d'énergies par secteur en France (SOes, 2014).


Janvier 2015. Une fois passés les comptoirs d’hôtesses en uniforme, des nuées de costumes, de tailleurs et de petites valises à roulettes tournent et virevoltent dans les travées du palais des congrès de Bordeaux. Ce sont les 16e Assises de l’énergie des collectivités territoriales, un rendez-vous qui compte car pendant trois jours, les directeurs de services et référents énergie des collectivités locales y retrouvent leurs fournisseurs en électricité, gaz et réseau de chaleur. C’est le moment idéal pour dévoiler un contrat avec une agglomération, une nouvelle offre destinée à la clientèle institutionnelle ou faire visiter un chantier de rénovation thermique. Un pur moment d’activation de réseaux et de lobbying. EDF y dispose d’un stand majestueux. Il n’est pas venu seul : ERDF, sa filiale de distribution, en loue un autre juste en face, équipé d’une micro salle de conférence. RTE, sa filiale transport aussi. Ainsi que Dalkia, sa filiale à 100 %, pour ses activités, en France, de services énergétiques. EDF collectivités sponsorise une conférence sur la précarité énergétique, tandis qu’ERDF soutient le « carrefour des métiers ». Côté gaz, GDF a lui aussi sorti son gros stand, tout comme GRDF, sa filiale de distribution. Le groupe est « partenaire » d’une rencontre sur l’innovation et la transition énergétique.

 

Bruno Léchevin, président de l'Ademe, aux Assises de l'énergie 2015. (DR)
Bruno Léchevin, président de l'Ademe, aux Assises de l'énergie 2015. (DR)
 

À l’entrée, chaque participant reçoit son guide, avec la liste des plénières, ateliers et forums. « T’as pris ton livre de messe ? Y a tous les cantiques », se moque la responsable d’une PME de services énergétiques. La liturgie, c’est la transition énergétique qui donne son nom au cru 2015 des Assises : « Tous concernés, faisons-la ensemble » ! Le mot est sur toutes les lèvres. Il clignote dans le mot de bienvenue du maire, Alain Juppé, dans les piles de rapports déposés chez les exposants, dans les communiqués de presse. Pourtant, qui dit transition vers un système plus écologique, pense réduction de la consommation d’énergie, donc perte de parts de marché pour les fournisseurs de courant électrique et de gaz. Alors pourquoi un tel adoubement ?

La réponse jaillit de l’analyse du marché des services énergétiques. Elle est renversante : EDF et GDF Suez, fournisseurs historiques d’énergie en France, et toujours de très loin les champions nationaux de l’offre, sont à tous les deux les premiers bénéficiaires des marchés de l’efficacité énergétique pour le bâti. Autrement dit, les principaux maîtres d’œuvre de la baisse de la demande. Ils occupent les deux extrémités de la chaîne, en pleine schizophrénie au regard de leurs stratégies commerciales actuelles.

Récente, la notion de services énergétiques désigne les activités conçues pour améliorer l’efficacité énergétique, c’est-à-dire la capacité à consommer le moins possible. Les acteurs sont nombreux, les actions diffuses et souvent couplées à d’autres opérations. Pour le bâtiment, il existe deux grands modes d’intervention : la rénovation des édifices (isolation, combles, fenêtres…), terrain de prédilection des groupes de BTP, et l’amélioration de l’exploitation de leur mode de chauffage. Mais en l’absence d’obligation d’économie d’énergie, chaque bailleur social, chaque collectivité, chaque hôpital organise comme il lui sied son approvisionnement en chaleur. Si bien qu’il est difficile de dresser un tableau synthétique du marché tant les contrats varient, en durée et en objet. Pour y parvenir, il faut recomposer un puzzle aux pièces éparses.  

Selon une étude qu’ont menée des professionnels du secteur sur une centaine d'appels d’offres publics, entre 2012 et 2014, portant sur les marchés de services énergétiques, EDF et Engie, ex GDF-Suez, remportent 78 % des contrats. Ils concernent des collèges, piscines, bâtiments communaux, HLM, maisons de retraite… Même si cette liste n’est pas exhaustive, ils représentent une grosse majorité du marché, et offrent ainsi une bonne indication de sa structure et des effets de la commande publique. Les deux énergéticiens ne se présentent pas en leur nom propre, mais par l’intermédiaire de leurs filiales : Dalkia pour l’électricien, racheté à 100 % pour ses activités en France en 2014 et Cofely, Ineo et Ciec pour le gazier.

Jeu trouble

À la suite de l’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie, les anciens monopoles publics, EDF et GDF, ont adopté une stratégie de concentration verticale de la filière. Après sa fusion avec Suez en 2008, GDF a regroupé sous l’entité Cofely toute une série de PME spécialisées (Elyo, Ineo, Cofatech, Axima, Seitha, Savelys), racheté des acteurs de renouvelables (Clipsol, Panosol, Compagnie du vent), gobé Energia, spécialisée en services aux particuliers. De son côté, EDF, partenaire historique de toutes les collectivités territoriales, a racheté les activités françaises de Dalkia et repris SIIF Énergies, devenu EDF Énergies Nouvelles.

Parallèlement, agglomération, départements et régions ont sorti des appels d’offre de plus en massifs. En 2009, la région Alsace signe un contrat de performance énergétique de 64,6 millions d’euros pour 14 lycées sur 20 ans. En 2013, la région Midi-Pyrénées ouvre un marché de 200 millions d’euros pour les lycées sur dix ans. Jusqu’ici, les contrats d’exploitation de chauffage étaient signés site par site, pour une moyenne de 10 000 à 200 000 euros annuels. Même si ces nouveaux marchés sont divisés en lots, ils sont hors de portée de la plupart des PME.

 

François Hollande à la Conférence environnementale, en 2014. (Reuters)François Hollande à la Conférence environnementale, en 2014. (Reuters)


Et si l’on se concentre sur les seuls réseaux de chaleur, un système de distribution centralisée à partir de gaz, géothermie, biomasse, récupération de chaleur d’incinérateurs…, le tableau est massivement déséquilibré en faveur de Dalkia, comme l’indique le graphique ci-dessous. Les lattes bleues de la filiale d’EDF, et dans une moindre mesure, les bandes rouges de Cofely, apparaissent très clairement majoritaires. C’est logique, puisqu’ils sont les délégataires historiques de ces réseaux.

 

Répartition des réseaux de chaleur et de froid par acteurs et par régions.Répartition des réseaux de chaleur et de froid par acteurs et par régions.

 

Dalkia refuse de communiquer son pourcentage de parts de marché pour les services énergétiques. « C’est très compliqué, chacun a développé son métier différemment », répond Jean-Michel Mazalérat, son PDG. C’est l’ancien directeur adjoint de Dalkia, mais il a effectué l’essentiel de sa carrière chez EDF. Il conteste le conflit d'intérêts énergétique : « Non, car nous ne sommes pas sur la même énergie. Nous faisons très peu de contrats sur l’électricité. » EDF produit en effet du courant électrique, alors que Dalkia vend de la chaleur.

Mais en réalité, c’est un conflit d’intérêts à double niveau. D’abord, Dalkia se trouve lui-même pris par des injonctions économiques contradictoires. Il règne sur les réseaux de chaleur et est en même temps bénéficiaire de contrats d’économie d’énergie, activité qu’il souhaite développer. Peut-on vendre tout et son contraire dans un même contrat ? C’est le grand écart permanent. Mediapart en a découvert plusieurs exemples, détaillés ci-dessous.

Mais le problème est aussi plus indirect, et plus politique. Les visées commerciales d’EDF sur le secteur des économies d’énergie s’opposent au lobbying politique récurent du groupe contre la politique de réduction de la demande. Sous la présidence d’Henri Proglio, EDF n’a cessé de combattre l’idée qu’il fallait diminuer les consommations d’énergie. Quand l’année dernière, la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) annonce prévoir une baisse très importante de l’utilisation de l’électricité dans les logements, le tertiaire et l’industrie d’ici 2030, l’électricien continue de tabler sur une hausse de 1 % chaque année. Pendant le débat national sur l’énergie, en 2013, quand GRDF, la filiale de distribution du gazier, propose un scénario prévoyant une chute d’un tiers de la consommation d’énergie primaire d’ici 2050, EDF monte au créneau pour l’écarter (retrouver ici notre article à ce sujet).

Quant à Engie, son PDG Gérard Mestrallet s’illustre par ses attaques répétées contre les renouvelables (tout en étant très présent dans ce secteur), comme dans cet entretien au Monde, où il explique que privilégier l’éolien et le solaire abîme la compétitivité européenne, et surtout, insiste sur l’importance de construire de nouveaux moyens de production.

Le grand public n’a pas saisi la portée concrète de la lutte contre le dérèglement climatique. La France s’est fixée pour but de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. Les consommations énergétiques des bâtiments doivent baisser de 38 % d’ici 2020. Cela requiert un effort colossal, un changement drastique d’organisation de l’économie. La réalité est tout autre. La consommation énergétique du secteur résidentiel était en hausse de 0,6 % en 2011 (selon les derniers chiffres exhaustifs disponibles), et progressait de 1,6 % dans le tertiaire. Depuis, la demande d’électricité stagne, et celle de gaz baisse, d’après des estimations provisoires.

 

Évolution des émissions directes liées au résidentiel/tertiaire en millions de tonnes équivalent CO2 (CNUCCC, Citepa, 2013)Évolution des émissions directes liées au résidentiel/tertiaire en millions de tonnes équivalent CO2 (CNUCCC, Citepa, 2013)

 

Pour essayer de mettre en œuvre ces objectifs, et cesser de vider de son sens la politique climatique, il faut un changement de braquet du secteur. Les acteurs de la maîtrise de l’énergie auront besoin de mobiliser toutes les ressources économiques et toute l’ingéniosité professionnelle disponibles. Anciens monopoles publics, EDF et Engie possèdent une légitimité inégalée et des liens anciens avec les collectivités territoriales. Mais leur culture professionnelle est encore entièrement tournée vers la production et la fourniture d’électricité et de gaz, alors que pour transformer les bâtiments en sites d’économie d’énergie, il faudrait être obsédé par la baisse de la demande. Se positionner sur les services énergétiques pourrait être un moyen pour les fournisseurs de s’adapter aux enjeux de la transition vers un modèle moins destructeur du système climatique, en faisant évoluer leurs métiers. Mais dans les faits, le jeu qu’ils mènent est trouble.

« Celui qui fournit l’énergie ne peut pas être celui qui entretient les chaudières »

 

Ségolène Royal à côté de Ban Ki Moon, dans la manif géante pour le climat de New Yok, septembre 2014 (DR).
Ségolène Royal à côté de Ban Ki Moon, dans la manif géante pour le climat de New Yok, septembre 2014 (DR).
 

En septembre 2013, la ville d’Annemasse (Haute-Savoie) signe avec SPIE, pour six bâtiments, un contrat de performance énergétique (CPE), qui oblige le prestataire à réaliser des économies d’énergie. Mais c’est ce qui s’est passé juste avant qui retient l’attention : en réponse à l’appel d’offres, Dalkia refuse de s’engager à la réduire de 23 %, comme le demande la commune, et Cofely propose de ne baisser la consommation de chaleur que de 11 %. Au final, SPIE signe pour 25 %. Résultat ? « On a baissé de 30 %. Nous sommes satisfaits », explique Philippe Pelissier, le directeur énergie de la ville. Le contrat ne concernait pas la fourniture d’énergie.

À Lille, en 2008, deux marchés de chauffage ont été signés pour huit ans avec Dalkia et Cofely, pour les bâtiments municipaux. Sur ses bâtiments en chaufferie gaz autonome, Dalkia a diminué la demande de 12 à 15,3 % alors que sur les lots connectés au réseau de chaleur qu’il opère, et dont il fournit l’énergie, la baisse n’a été que de 6,5 %. Pour Stéphane Baly, conseiller municipal EELV, « il y  a un conflit d’intérêts entre la fourniture de chaleur par le réseau et la fonction de services. Il est clair que le fournisseur d’énergie ne va pas se tirer une balle dans le pied »

De son côté, la région Île-de-France a décidé de récupérer la gestion du marché du chauffage de ses 470 lycées afin de les piloter elle-même et d’obtenir de meilleurs contrats. Pour Corinne Bord, vice-présidente de la région, « celui qui fournit l’énergie ne peut pas être celui qui entretient les chaudières. Ce sont des logiques économiques qui ne sont pas compatibles. On récompense l’un pour qu’il consomme moins que l’autre. C’est une décision de bonne gestion ». Pour réaliser des économies d’énergie, « il faut que les chaudières soient réglées au millimètre et que les gens soient payés sur les économies d’énergie, et que ceux qui sont chargés de l’entretien des chaudières soient correctement rémunérés ». Le conseil régional a donc lancé un marché sur le chauffage de 8 lots de 50 lycées, en distinguant la fourniture de l’entretien des équipements. Il porte sur l’exploitation, l’entretien, le renouvellement de matériel et est assorti d’obligations de résultats. Cinq lots ont été attribués à des PME. « Les grands groupes ont parfois été écartés car leur offre était qualitativement moins bonne. C’est la preuve que les PME ont toutes les qualités requises pour répondre à de telles consultations », explique l’élue francilienne.

Lors de la seconde consultation visant à attribuer les deux derniers lots des lycées parisiens, des représentants de Cofely ont souhaité la rencontrer. Le rendez-vous a eu lieu. « Je n’avais pas en tête le calendrier des commissions d’attribution. Quand j’ai vu les dates, je me suis dit qu’ils ne manquaient pas d’air. » Au départ, « la négociation avec les gestionnaires fut difficile, d’une part, parce qu’ils ne choisissaient plus leur prestataire et d’autre part, parce que la structuration de leur rémunération de comptable est assise sur le montant des factures acquittées par les établissements. Mais aujourd’hui, tout le monde admet que cela fonctionne bien », décrit Corinne Bord.

Robert Gregori, ancien responsable du service Energie de Montreuil (93), a participé à l’élaboration du cahier des charges de ces contrats pour la région. L’objectif était de remettre la technique et les prestations de qualité au centre de l’exploitation des chauffages. Résultat : -20 % d’économies d’énergie dès la première année. « Obtenir -30 voire -40 %  après renouvellement du matériel en chaufferie » devient possible sans trop d’investissements, et bien avant la fin du marché (sur neuf ans), selon lui.

Aujourd’hui en charge de l’éclairage public à Aurillac (Cantal), il considère que le combat est exactement le même vis-à-vis des fournisseurs d’énergie et des prestataires : « Quand on est vendeur d’énergie, faire croire que l’on va vous aider à en économiser est tout simplement malhonnête intellectuellement. Les économies d’énergies ne représentent rien par rapport à leur chiffre d’affaires. Pour les fournisseurs d’énergie, l’argument des économies  ne sert qu’à maintenir captif le client final qu’est la collectivité. » L’éclairage public représente près de la moitié des dépenses d’électricité d’une collectivité. Robert Gregori vise à les diviser par deux dans sa ville : « Cela contribue à assainir les finances d’une ville et surtout à arrêter l’hémorragie sur les budgets de fonctionnement. »

 

Dépenses moyennes énergétiques par ménage en France (SOes, 2014).Dépenses moyennes énergétiques par ménage en France (SOes, 2014).


Les marges des prestataires sont une véritable boîte noire. « C’est opaque. Personne ne maîtrise ce qui se passe. Tout le monde gobe le discours des prestataires », témoigne un responsable d’achat de gaz en collectivité. Dans les contrats de fourniture de gaz ou de chaleur, souvent sur des très gros montants, « tu n’as même pas de droit de regard sur les contrats ». C’est sur la fourniture d’énergie que les prestataires réalisent la plus grande part de leurs marges. Sans surprise, ils poussent donc pour que les contrats d’exploitation de chauffage comportent la fourniture de combustibles.  

Le marché des services énergétiques représente 12 milliards d'euros. Mais les activités de maîtrise de l’énergie à proprement parler (si l’on retire l’exploitation, la maintenance et la fourniture) en représentent moins de 7 %. Et quand on regarde le détail de ces contrats, leur ambition est parfois très faible : moins 6 % de dépenses énergétiques prévues à Valence, moins 12 % à Chassieu, moins 14 % à Saint-Priest, moins 15 % à Toulouse (tous ces marchés ont été remportés par Dalkia). C’est, au mieux, moins de la moitié de l’objectif officiel de baisse de 40 % de la consommation des bâtiments.

 

 

« Ne serait-ce qu’en réglant correctement une chaufferie et son réseau, en effectuant une maintenance correcte, en sensibilisant un peu les acteurs, on peut gagner facilement 10 à 15 % sans aucun investissement, selon Pauline Mispoulet, présidente du Gesec, un groupement de PME spécialisées. Un degré de moins chez soi représente déjà 7 % d’économie. » Elle s’en explique en détail dans un livre appelant à une vraie transition énergétique, en reconnaissant le rôle des PME, Energie et Prospérité - Les entrepreneurs au cœur de la transition (Les Petits matins), préfacé par l’économiste Gaël Giraud (co-écrit avec Raphaële Yon-Araud).

Si l’on reprend l’étude empirique qu’ont menée des professionnels du secteur sur une centaine d' appels d’offres publics entre 2010 et 2014 portant sur les marchés de services énergétiques, un quart des marchés ont été attribués sans concurrence : une seule entreprise a répondu à l’appel d’offre. À Avignon, un marché sur les bâtiments communaux a été conçu par un bureau d’études qui est aussi une filiale d’EDF. Dalkia en a remporté une bonne partie. Ailleurs, lors d’un marché auquel seuls Dalkia et Cofely avaient répondu, l’un des commerciaux en charge de l’appel d’offres lui a confié que les concurrents s’étaient entendus sur les prix. Dalkia et Cofely sont de loin les premiers clients de GDF. Leurs activités sont intrinsèquement liées.

Pour Stéphane Baly, conseiller municipal EELV à Lille : « Il faut impérativement que les collectivités se donnent les moyens de surveiller la bonne exécution de ces marchés et ce avec des moyens à la hauteur des enjeux financiers. C’est très exigeant pour les services des collectivités alors que leurs dotations budgétaires baissent et qu’il n’y a pas assez de monde pour effectuer ce travail. » Selon l’élu, « le conflit d’intérêts est renforcé par le manque de surveillance ».

Pour les responsables des services énergie, la tâche est rude. « Il faut être un très bon technicien, un bon financier et un bon communicant : il faut vendre sa sauce à sa hiérarchie, et c’est très difficile car la direction des services en général ne veut pas de vagues et se montre peu réceptive à l’innovation », décrit Robert Gregori. Surtout que « derrière, les élus sont souvent approchés par les commerciaux des grands groupes, EDF, GDF, Cofely, qui les invitent à des séminaires, des voyages… Vous avez beau batailler, vous n’êtes pas entendu et vous passez pour le vilain petit canard ». Le travail des fonctionnaires municipaux techniciens est peu valorisé. Or tout est dans le pilotage des appareils, explique-t-il : « Ne serait-ce que bien gérer les périodes d’inoccupation, vous faîtes des progrès monstrueux. Quand vous voyez des établissements scolaires vides pendant les vacances de Noël maintenus à 23° 24 heures sur 24… »
 

Pour la Coalition France pour l’efficacité énergétique (CFEE), qui regroupe des entreprises, des associations, des copropriétaires et des consommateurs, il est urgent de séparer la fourniture d’énergie de la prestation d’efficacité énergétique. C’est l’une de ses propositions phares pour mettre en œuvre la rénovation thermique dans le bâtiment. Elle souhaite que les contrats de performance énergétique ne puissent pas comporter de vente d’énergie non renouvelable. Ces professionnels de la maîtrise de l’énergie considèrent que « les cadres législatif, juridique et réglementaire français n’ont globalement pas évolué depuis le dernier choc pétrolier » et restent orientés vers le développement de l’offre.

À ce jour, leur demande est restée lettre morte. La loi de transition énergétique de Ségolène Royal, en cours de vote au Parlement, n’aborde même pas le sujet. Plus grave, la question cruciale de la mise en œuvre des objectifs climatiques de la France n’est jamais abordée par les figures politiques de premier plan. Cette cécité est catastrophique : à quoi cela sert-il de promettre de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre si personne ne vérifie si l’on essaie de le respecter ? Les chaudières, réseaux de chaleur et chaufferies d’hôpitaux n’intéressent personne alors qu’elles sont un lieu d’action contre le dérèglement du climat bien plus important que les estrades des forums estampillés « Cop 21 », du nom du sommet international qui se tiendra à Paris en décembre. Il n’y aura pourtant pas d’avancée réelle pour le climat sans ouvrir les portes des chaufferies et plonger les mains dans le cambouis.

 

 

 

Source : http://www.mediapart.fr

 

 

 

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17 mai 2015 7 17 /05 /mai /2015 22:21

 

Source : http://www.humanite.fr

 

Révélation. Après la fraude fiscale, Amazon triche sur les accidents du travail
Jean-Baptiste Malet
Dimanche, 17 Mai, 2015
L'Humanité

Photo AFP
 
Lire nos révélations dans l'Humanité ce lundi 18 mai. Alors que la médecine du travail de Saône-et-Loire a rendu un rapport accablant sur les conditions de travail dans les entrepôts logistiques Amazon, la multinationale est prise en flagrant délit d’une fraude qui vise à faire baisser ses statistiques élevées d’accidents du travail.

Amazon, numéro 1 des ventes en ligne, champion de l’optimisation fi scale, est aussi régulièrement épinglé pour ses méthodes de management particulièrement inhumaines. Pressions psychologiques, loi du silence, postures pénibles, répression antisyndicale, sur les trois entrepôts de logistique de Bourgogne, la productivité du travail est poussée à l’extrême… Face au nombre élevé de maladies professionnelles, le groupe semble prêt à tout pour faire baisser les statistiques d’accidents du travail. Même à mentir. Selon les documents que s’est procurés l’Humanité, sur le site de Sevrey, ouvert en 2013 en Saône-et-Loire, la direction a rédigé une déclaration mensongère à la Sécurité sociale après qu’un salarié a fourni un certifi cat de son médecin constatant une maladie professionnelle. Les élus Front de gauche et écologistes de la région demandent le remboursement des aides publiques accordées au moment de l’installation. Lire notre enquête dans l'Humanité ce lundi.

 

Source : http://www.humanite.fr

 

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17 mai 2015 7 17 /05 /mai /2015 21:37

 

 

Entretien
"L’Europe se désagrège et personne ne sait quel sera le premier domino à tomber"

 

Propos recueillis par
Julien Leclerc
 
 
Grèce, Royaume-Uni, l'Union européenne craque de toutes parts. Pour Coralie Delaume, auteur de l'essai "Europe. Les États désunis" (Michalon), l’UE se délite en raison de ses propres règles. Pour l'animatrice du blog "L'Arène nue", ça ne fait en effet aucun doute : la crise que traverse l'UE trouve en effet ses fondements "dans les choix mêmes des pères fondateurs de l’Union européenne".
 
VARELA/SIPA
 

Marianne : La situation actuelle de l’Union européenne était-elle selon vous écrite de longue date ?
Coralie Delaume : La crise que connaît l’Europe actuellement est une crise à la fois économique et démocratique. La première était prévisible au moins depuis la création de l'euro. La seconde trouve son origine très en amont, dans les choix mêmes des pères fondateurs de l’Europe. Ceux-ci ont fait le choix dès le début de mettre sur pied non une Europe politique mais une Europe technique, supposée devoir générer des solidarités de fait.
C’est ce que l’on a appelé la « méthode des petits pas » de Jean Monnet, qui consistait à imbriquer des secteurs précis de plus en plus nombreux, et à mettre les peuples devant le fait accompli. Une sorte de « fédéralisme furtif » si l'on veut. Il n'y a jamais eu de grande ambition démocratique là derrière, au contraire. Une ponction lente des prérogatives des nations pour les transférer à des échelons supranationaux ne pouvait qu'aboutir à terme à un déficit démocratique. Le choix de la supranationalité plutôt que la coopération traditionnelle entre nations européennes — par la voie simple de la diplomatie classique — portait nombre de problèmes en germe.
Pour ce qui est de la crise économique, on trouve l'une de ses sources principales dans la création de la monnaie unique. Le partage d'une même monnaie par des pays aux structures économiques très différentes, la mise en place d'une monnaie fédérale sans Etat fédéral auquel s'adosser, était voué à l'échec. Au lieu de les faire converger, l'euro a contribué à faire diverger les différentes économies, notamment en imposant aux pays d'Europe du Sud un fonctionnement « à l’allemande » fait de rigueur budgétaire et d'inflation quasi nulle, qui ne leur convient pas. 

 

Le vrai risque d’un départ du Royaume-Uni de l’Union européenne ne serait-il pas celui d’une étendue de la domination économique allemande sur le continent européen ?
"On parle encore de “couple franco-allemand” mais on devrait davantage parler d'une servitude volontaire de la France"

Cela renforcerait en effet sa centralité économique, politique, géographique. La relation franco-allemande est désormais très déséquilibrée. On parle encore de « couple » mais on devrait davantage parler d'une servitude volontaire consentie par de la France vis-à-vis de l’Allemagne.
Un départ éventuelle du Royaume-Uni est une chose, mais on voit bien globalement que toute les nations dites « périphériques » sont actuellement la proie de tensions centrifuges. On le voit bien avec la Grèce par exemple. L'Allemagne deviendrait évidemment le pivot d'une Union européenne réduite au noyau central.

 

La crainte de perdre un nouveau pays peut-il amener les institutions européennes à adopter une attitude plus conciliante dans ses négociations avec le gouvernement d’Alexis Tsipras ?
Non, je n'en suis pas convaincue. « Les Européens » pourront tenter de faire des concessions mineures pour se laisser le temps de voir venir. C'est ce que fait d'ailleurs la BCE, contrainte et forcée. Au départ, elle a cru pouvoir faire mettre le gouvernement Tsipras à sa merci en fermant aux banques grecques l'accès au refinancement normal. Du coup, ces banques se refinancement uniquement via l'accès à la liquidité d'urgence (ELA). Mais c'est au tour de la BCE d'être à présent coincée, et elle n'en finit plus de devoir relever le plafond de l'ELA, en attendant mieux.
Il pourrait y avoir éventuellement le déblocage de la dernière tranche de l'actuel plan d’aide, de 7,2 milliards d’euros, ou la négociation d'un troisième plan d'aide à partir de juin. Ou, beaucoup mieux, une restructuration de la dette. Mais là, si la Grèce parvient à obtenir ça, il fait bien voir que ça donnera des idées à d'autres pays. En Espagne par exemple, le parti Podemos de manquerait pas de faire campagne sur l'idée d'obtenir les mêmes concessions que son parti frère Syriza.
En tout cas, il faut bien voir que depuis 2008, les décisions économiques qui sont prises constituent un bricolage. Cela permet d’ « acheter du temps », de faire tenir la zone euro, mais ça ne résout pas les problèmes de structure de celle-ci. Et les problèmes économiques deviennent politiques, avec la montée de l’eurosceptisme dans tous les pays. On sent de nombreuses forces centrifuges à l'œuvre. L’Europe se désagrège, et personne ne sait quel sera le premier domino à tomber…

 

L’Union européenne pourra-t-elle accepter dans les futures négociations les mesures revendiquées par le gouvernement Cameron, comme celle du « carton rouge » (c’est-à-dire la dotation aux chambres parlementaires nationales d’un droit de véto sur les décisions de la Commission européenne ne respectant pas le principe de subsidiarité) ?
"Entre perdre l'Ecosse et sortir de l'UE, le Royaume-Uni va sans doute devoir choisir... "

Je pense que le Royaume-Uni, souhaite surtout obtenir des concessions. Il est intéressé par le libre-échange avec l'UE, mais souhaite couper un à un les fils qui le relient à la bureaucratie bruxelloise. Peut-être utilisera-t-il également le chantage au « Brexit » pour tenter de faire accélérer les négociations dans le cadre du traité transatlantique ?
De toute façon, les Anglais ont de la ressource. Ils sont branchés sur tout le monde anglophone, sur leurs anciennes colonies... Après, reste le problème écossais. Les indépendantistes du SNP dominent désormais très largement l'Ecosse. Or il s'agit d'un parti de gauche européiste. Entre perdre l'Ecosse et sortir de l'UE, il va sans doute falloir choisir…

 

Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des Finances, a déclaré récemment que « si le gouvernement grec juge nécessaire un référendum sur la question de la dette, alors qu'il le fasse. » Comment interpréter cette nouvelle provocation ?
Au sein du gouvernement allemand Wolfgang Schäuble semble s'être donné pour rôle de « terroriser » les Grecs. Il fait le « mauvais flic ». Angela Merkel passe derrière pour recoller les morceaux. Elle, c'est le « bon flic ». Un peu comme Varoufakis pour la Grèce, qui va à l’affrontement, avec un Tsipras qui joue ensuite l’apaisement. Mais je pense que si ça ne tenait qu'à Schäuble, tout aurait déjà été fait pour faire obtenir un « Grexit », car il a des convictions ordo-libérales très fortes.
En réalité, les deux camps doivent avoir compris qu'il n'y a guère d'issue à long terme, mais chacun s'efforce de montrer que l'impasse des négociations est imputable à l'autre.
Pour ce qui est de la Grèce, il est très probable que Tsipras soit en train de préparer doucement son opinion à une sortie de l'euro. Il lui faut un peu de temps pour montrer qu'il n'y a pas d'autre issue à une opinion encore rétive. Peu à peu, les Grecs réalisent qu'ils ont un mur en fasse d'eux, et l'idée fait son chemin. Aujourd'hui, près de 20% d'entre eux sont favorable à un retour à la drachme. C'est peu, mais on était à moins de 10% avant l'arrivée au pouvoir de Tsipras.

 

L’agence Eurostat a dévoilé hier sa première estimation du PIB du premier trimestre de l’année 2015, correspondant à une augmentation de 0,4%, couplé à une croissance annuelle de 1% dans la zone euro. Secondé par une croissance en hausse en France, en Italie et en Allemagne, ce rebond signifie-t-il, selon vous, que l’Europe sort la tête de l’eau ?
"La tendance lourde, c'est l'absence de croissance dans toute l'Europe, et un approfondissement des divergences entre les pays"Pas du tout, ce sont des soubresauts conjoncturels, de petits rattrapages ou de petites pauses habituelles qui ne signent en rien un retournement de conjoncture. J'avoue que j'ai presque cessé de m’intéresser à ces chiffres. La tendance lourde, c'est l'absence de croissance dans toute l'Europe, et un approfondissement des divergences entre les pays créditeurs et pays débiteurs. Par exemple, l’excédent commercial allemand n'en finit jamais d'augmenter : 217 milliards d'euros en 2014 soit 11% de plus que l'année précédente. Et le chômage reste à 25% en Espagne et en Grèce. Ça oui, c'est spectaculaire, et ça montre des déséquilibres majeurs. La zone euro est profondément mal foutue ! 

 

La situation en Europe en cas d’un « Grexit » et d’un « Brexit » pourrait-elle placer l’Union sous un angle géopolitique instable, avec un Est sous l’œil avide de la Russie de Vladimir Poutine et un forcing des Chinois sur les accords économiques ?
Je vous avoue que la Russie ne m'inquiète pas, au contraire. Un rapprochement avec la Russie pourrait bénéficier à toute l'Europe, en la rééquilibrant. On ne peut tout de même pas souhaiter une Europe rabougrie, autiste, recroquevillée sur un noyau dur dominé par l'Allemagne. Avec un Royaume-Uni en train de filer en douce et une Russie perçue comme une menace. Le général de Gaulle doit se retourner dans sa tombe, lui qui appelait de ses vœux une Europe « de l'Atlantique à l'Oural ».
Mais il faut être vigilant. Car le Royaume-Uni est ouvert a des liens privilégié avec les Etats-Unis. La Russie, elle, a manifesté beaucoup de pragmatisme à la suite des sanctions votées contre elle, en allant chercher d'autres partenariats en Asie. Le dindon de la farce in fine.... ce sera nous ! Il faut retrouver un équilibre sain entre les différentes nations d'Europe, Russie comprise.

Article réactualisé le 17 mai à 12h45

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17 mai 2015 7 17 /05 /mai /2015 20:33

 

Source : http://www.humanite.fr

 

Les vrais chiffres de nos politiques migratoires

 

Les horizons de l'Humanité
Emilien Urbach
Vendredi, 15 Mai, 2015
L'Humanité

 

Idé
 
 
 
 
 
Les drames humains en Méditerranée ont replacé l’immigration au centre des débats. Souvent utilisées pour justifier l’inertie des pays de l’Union, 
les statistiques, regardées de près, démontent pourtant bien des a priori.

Les agents de police frappent des hommes à terre et les basculent par-dessus les glissières de sécurité de l’autoroute. Ce sont des migrants. Ça se passe à Calais. Le tout a été filmé et diffusé sur Internet par l’association Calais Migrant Solidarity, en début de semaine. Pendant ce temps, à Bruxelles, l’Union européenne feint de réagir aux naufrages à répétition qui transforment la Méditerranée en vaste cimetière marin. « Aucun pays ne devrait être seul face aux immenses pressions migratoires », affirmait Jean-Claude Juncker avant de proposer l’instauration de quotas par pays pour la prise en charge des demandes d’asile des exilés secourus en mer (lire p. 24). Mais de quelle « pression » parle-t-on ? Et quel est le si grand péril que représentent ces migrants pour que la police de la République les traite de la sorte, sur les rives de la Manche ?

Un demi-million de migrants pourraient tenter cette année la traversée de la Méditerranée, estime l’Organisation maritime internationale (OMI). Si on choisissait de répartir l’ensemble de ces migrants sur le territoire de l’Union, cela reviendrait à… cinq personnes pour chacune des 103 000 communes que compte l’Europe des Vingt-Huit !

Mais nos chefs d’État ne s’inquiètent pas du sort de ces hommes, femmes et enfants. Dans le cas contraire, les sommes qu’ils comptent dépenser dans l’opération militaire défendue, cette semaine, par Federica Mogherini, chef de la diplomatie européenne, au Conseil de sécurité de l’ONU, seraient employées au sauvetage et à l’accueil des exilés. Mais cette fois encore, l’UE préfère la répression en cherchant à neutraliser et à détruire les bateaux utilisés par les migrants pour leur traversée. Nos dirigeants surfent sans vergogne sur les fantasmes populistes liés à l’immigration.

En France, on avance le chiffre de 200 000 entrées d’étrangers tous les ans. On oublie de préciser qu’on compte parmi eux 60 000 étudiants. On omet aussi d’indiquer que certains meurent, d’autres repartent réduisant le chiffre à 90 000 âmes dont plus de la moitié sont européennes.

Il faut, par ailleurs, distinguer les flux migratoires de ce que les démographes nomment le « stock ». Il correspond à la part de la population constituée d’immigrés, à un moment donné. En France, le « stock » actuel approche les 23 % de la population si on prend en compte les immigrés de la première et de la deuxième génération, parmi laquelle la moitié des enfants sont nés en France d’un seul parent immigré. Manuel Valls, premier ministre, et Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Éducation, font, de ce point de vue, partie du « stock »

Par contre, les flux, sont particulièrement modérés. Chaque année, la population française augmente, mais le taux d’accroissement lié à l’immigration est de seulement 0,06 %, une infime partie. Et tout cela est extrêmement stable, quels que soient les motifs d’immigration. Nous sommes loin du « grand remplacement » que certains xénophobes télévisuels feignent de craindre. L’Allemagne doit, pour sa part, son salut à l’immigration. L’accroissement naturel outre-Rhin est négatif, mais la population continue, cependant, de croître grâce à un taux de migration de 0,58 %. Sans étrangers, la première puissance européenne serait démographiquement en déclin.

Les clichés tombent également concernant l’asile. La France serait prête à faire un effort de solidarité en acceptant la proposition des quotas présentée, mercredi, par Jean-Claude Juncker. Elle aurait donc à étudier les demandes de 11,9 % des réfugiés aux frontières de l’UE. En reprenant les prévisions de l’OMI, cela reviendrait à étudier 59 500 dossiers de demande d’asile. Autant dire que ce plan ne change rien pour la France. C’est à peu près le nombre de demandes d’asile étudiées, en 2014, par l’Ofpra… On fera moins de publicité sur les 71 % de personnes dont les dossiers n’auront pas été traités ou tout simplement rejetés. L’Angleterre qui, pour sa part, n’aura étudié que 26 000 cas l’an dernier, s’obstine dans la logique de forteresse. « Nous devons nous assurer de ne rien faire qui aggrave le problème », déclarait Theresa May, la ministre de l’Intérieur britannique, sans se soucier des conséquences humaines de son inaction, telles que nous les constatons à Calais.

 

 

Source : http://www.humanite.fr

 

 

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