Il ne veut pas que ce soit un parti de plus, mais un endroit où « il faudra que les militants habitués au militantisme aient l’humilité de laisser la place aux autres ». Ce samedi, Pouria Amirshahi lance le « Mouvement commun » à Montreuil (Seine-Saint-Denis), à la suite d'un appel signé pour l'heure par 1 500 personnes (lire la boîte noire en pied de cet article), au milieu desquelles on retrouve pêle-mêle des acteurs associatifs et syndicaux, des universitaires ou des artistes, aux côtés de simples citoyens et de personnalités politiques de tous bords (notamment Pierre Laurent, Clémentine Autain, Cécile Duflot, Christian Paul ou Édouard Martin).
Le député, en rupture de ban du parti socialiste (il vient de voter contre le budget actuellement en cours de discussion), entend participer au « dépassement » des partis actuels, dont il juge « les appareils fatigués et fatigants », que ce dépassement survienne avant ou après la prochaine présidentielle. À ses yeux, « il ne s’agit plus de proclamer et de répéter qu’il faut relire Gramsci et mener la bataille culturelle, il faut s’y mettre et faire contre-culture ». Et pour cela, estime-t-il, « il faut s’adosser à des idées et des expériences réelles, et plus à une partie de baffes permanente entre la vraie gauche, même si elle a raison, et la gauche qui a trahi ». Entretien.
Vous lancez le « Mouvement commun » ce dimanche à Montreuil. Quel est son objectif ? Un futur parti, un club de réflexion ou un sas vers autre chose ?
C’est un mouvement politique sans visée électorale pour l’instant. L’idée part du constat que dans nos démocraties libérales (au bon sens du terme), nos gouvernants sont désormais incapables de faire face aux possédants. On est en train de passer d’un système délégataire à un système confiscatoire, des pouvoirs comme des richesses. Il faut donc faire à côté, presque sans, en demandant aux citoyens, élus ou non, de se retrousser les manches et de mettre leurs idées dans un pot commun pour dessiner la France de demain. Il nous faut définir nos causes communes dans un pays qui ne semble plus en avoir, et se réapproprier des biens communs aujourd’hui confisqués, pour dessiner une nouvelle radicalité démocratique.
Il ne s’agit pas d’ériger en théorie la rancœur et l’impatience grandissantes contre ces effets de domination, mais de construire un mouvement massif, créatif dans ses propositions, positif et bienveillant, et dont l’objectif devrait être de construire une plateforme, qui devra inspirer la société mobilisée. Il ne s’agit plus de proclamer et de répéter qu’il faut relire Gramsci et mener la bataille culturelle, il faut s’y mettre et faire contre-culture, en contestant la pente dangereuse du repli sur soi et des concurrences, en remettant au goût du jour les solidarités actives, les nouveaux combats écologiques et numériques… Ça prendra du temps, et le Mouvement commun doit s’inscrire dans le temps long de la reconquête du pouvoir.
Vous parlez de redéfinition de « causes communes » et les premiers signataires “politisés” vont du Front de gauche aux frondeurs, en passant par EELV et des socialistes disant appartenir encore à la majorité gouvernementale. Mais est-ce qu'aujourd’hui, avec l’orientation politique du pouvoir actuel, la gauche peut encore être commune ?
Avec le gouvernement actuel et son orientation, je n’y crois pas. Mais avec les bonnes volontés d’où qu’elles viennent, oui. Par exemple, Mao Péninou (adjoint PS d’Anne Hidalgo) ou Laurent Grandguillaume (député PS de Côte-d’Or), ce sont d’abord des militants de la cause démocrate, qui font preuve d’audace dans leur travail d’élu au quotidien. Ils ne sont pas au garde-à-vous du gouvernement, mais des relais de la société civile. Il y a des intelligences et des dynamiques innovantes dans tous les partis. Ce qui compte, c’est la sincérité, que l’on soit issu du communisme ou du socialisme républicain, du chevènementisme ou de l’écologie libertaire. Car reformuler un projet politique en plantant son drapeau et en assénant ce que doit être la gauche pure et véritable, ça fatigue tout le monde et ça ne marche pas.
Maintenant, il ne faut pas se tromper sur la part qui va être dévolue au politique dans ce mouvement. La grande majorité des signataires sont d’abord des acteurs de la société mobilisée : des représentants associatifs, de simples citoyens aux profils sociologiques divers, des élus locaux qui sont dans l’expérimentation démocratique. Ils ne se situent pas forcément dans l’échiquier partisan de la gauche, et sa recomposition ne les intéresse pas. Mais ce qu’il y a de commun à tous, c’est la volonté de discuter de la France telle qu’on veut la voir et de ne pas se résigner à la voir s’enlaidir et s’abîmer. Donc pour les politiques présents dans le « Mouvement commun », il s’agit d’être humbles, de se placer dans une logique d’égaux, et de se fondre parmi les autres.
La plus grande difficulté n’est pas, en réalité, d’additionner des points de vue de gauche, ni même d’en faire la synthèse. Le plus dur c’est d’arriver à se convaincre, dans une société qui ne cherche plus que le conflit. Il n’y a plus de maïeutique ni de débat argumenté, et c’est aussi cela qu’on doit retrouver. Prenons le débat sur les banlieues. Est-ce qu’on peut considérer, sans se sentir complice d’un quelconque communautarisme, que les jeunes des quartiers populaires relevant aujourd’hui la tête ont raison de le faire ? Je le pense. Mais on doit aussi être capable d’entendre ceux qui craignent, même si cette crainte leur a fait déserter le terrain, que des revendications sociales ne virent au communautarisme. Est-il possible d’en débattre ? Le Mouvement commun doit permettre de confronter et mettre en commun des points de vue qui ne sont pas forcément contradictoires.
Il va nous falloir proposer des changements d’angle dans la façon de se poser des problématiques, pour parvenir à se convaincre. Car si on ne se convainc pas, alors ce sera gauche libertaire contre gauche autoritaire, ou démocrates contre républicains. C’est-à-dire le type de clivages que veulent nous imposer aujourd’hui les grands médias et ceux qui gouvernent depuis si longtemps.
Vous étiez justement l’un des rares élus de gauche à avoir participé à la « marche de la dignité » samedi dernier. Cette mouvance militante a-t-elle sa place dans le « Mouvement commun », alors qu’elle cristallise des débats très vifs à gauche ?
Notre mouvement ne peut être « commun » que si toutes les expressions y ont leur place. À la fois ceux qui pensent que la laïcité, c’est l’expression de toutes les diversités et des identités singulières, mais aussi ceux qui pensent qu’elle est un ensemble de principes et de comportements qui seraient indiscutables. Paradoxalement, et personnellement, je procède un peu des deux écoles, mais sans me sentir tiraillé. Bien qu’issu de la fabrique à assimilation républicaine, alors que j’étais destiné à une république islamique [en Iran – ndlr], je vois bien que des millions de Français ne bénéficient pas de ce dont j’ai bénéficié. Les nouvelles classes populaires françaises issues de l’immigration ne le vivent plus ainsi, et il faut l’entendre.
Quoi que je pense de Tariq Ramadan, quand il fait un livre de dialogues avec Edgar Morin, ça fait avancer le débat intellectuel. Je n’ai jamais renoncé à me rendre au rassemblement commémorant le 17 octobre 1961, au prétexte que depuis dix ans les Indigènes de la République s’y rendent aussi.
Ceux-là même qui s’inquiètent de voir un certain nombre de partis ou de collectifs progresser et s’auto-organiser, ne peuvent s’en prendre qu’aux causes de cette progression, c’est-à-dire le recul de la République, de l’État et des partis dans les quartiers populaires. On me dit : “Attention, il y a du communautarisme !” Mais moi je n’ai vu à Barbès aucun communautarisme, ni aucune posture victimaire. Je n’ai vu que des Français, noirs, arabes et blancs, qui disaient “Non aux bavures policières”, “Non aux contrôles au faciès”, “Non aux discriminations incessantes”, “Non à l’effacement des mémoires immigrées de la mémoire nationale”.
À mon sens, ils ont raison. Il y avait des femmes voilées ? Et alors ? On a bien le droit de manifester dans ce pays, même avec un voile… Toutes proportions gardées, le 11 janvier, j’ai manifesté derrière des dictateurs. Ça s’appelle des contradictions secondaires, il y en a aussi dans les débats économiques et sociaux, et il faut les surmonter.
Admettons qu’il y ait une part de communautarisme dans cette mobilisation, on ne peut le balayer d’un revers de main, avec le ton professoral et docte de ceux qui sauraient ce qu’est la République. La lutte pour les droits civiques des Noirs américains était communautariste, comme celle des musulmans qui se regroupent en Inde dans certains États où ils sont persécutés, comme les Afghans qui se regroupent en Iran. On peut comprendre que l’on soit gêné par le repli communautaire, ou que l’on soupçonne une instrumentalisation identitaire. Mais il faut aussi comprendre qu’il s’agit de défenses immunitaires face à l’abandon républicain.
Je m’exprime là à titre personnel, mais je serais heureux si l’on pouvait débattre de tout ça posément dans le « Mouvement commun », sans se faire la leçon, et en évitant les dérives réactionnaires d’une partie de la gauche, mais aussi les dérives démagogiques d’une autre petite partie de la gauche, qui parfois est aveugle et a pu dans le passé soutenir l’ayatollah Khomeiny. La cause sociale ne justifie pas tout, mais le meilleur moyen d’empêcher les dérives, c’est d’occuper le terrain. À la manif, plusieurs amies organisatrices de la marche, qui sont de vraies militantes antiracistes, m’ont dit « Merci d’être là, mais où sont tes copains ? » S’ils avaient été là depuis longtemps, on n’aurait pas ces débats aujourd’hui.
Concrètement, en termes opérationnels, comment va fonctionner le « Mouvement commun » ?
Ça s’inspire de Podemos, d’Obama et de mouvements français plus traditionnels. Le mouvement ne sera pas que dans la réflexion, mais aussi dans l’action, avec des campagnes de mobilisation. Charge aux membres de les définir, après s’être entendus sur une charte de principes (indépendance politique, bienveillance, parité, éthique…) et des statuts, mais aussi après avoir identifié ensemble des causes communes. Tout cela sera soumis à un vote électronique dans les mois qui viennent.
Il y aura aussi des groupes locaux, et ce sera très ambitieux, car il faudra que les militants habitués au militantisme aient l’humilité de laisser la place aux autres. La question du partage du pouvoir est essentielle. On ne convoque pas les citoyens seulement pour voter. Il n’est plus possible que des personnes qui ont le pouvoir, parce qu’on le leur a accordé, décident de tout à notre place. Si déjà ils tenaient leurs promesses, ils respecteraient leurs mandats. Mais au-delà, on ne peut plus admettre que la légitimité démocratique permette l’omnipotence, il faut mettre un terme à cette dérive. Le pouvoir que l’on donne n’est qu’un pouvoir que l’on prête. Sur ce plan, il s’agit de renouer avec les principes fondateurs de la Révolution française.
Est-il possible aujourd’hui de faire de la politique en faisant l’impasse sur la présidentielle de 2017 ? Cette échéance ne va-t-elle pas planer comme une épée de Damoclès au-dessus du « Mouvement commun » et altérer sa sincérité ?
La présidentielle est un poison. Les citoyens vont être convoqués à des élections auxquelles finalement ils ne croient que peu, et qui vont progressivement se résumer à un chantage au vote utile. Je trouve d’ailleurs de mauvais goût que ceux qui ont une responsabilité directe dans la croissance du monstre depuis tant d’années s’érigent désormais en rempart, sans se remettre en question.
Le paysage politique de 2017 se résume pour l’instant à des candidats soutenus par des appareils fatigués et souvent fatigants, qui proposent aux électeurs une série de mesures élaborées par quelques experts. Enfin, même si ce sont des millions de gens qui se déplacent aux urnes, ils n’ont pas d’autre choix que de confier toutes les clés du pouvoir à un seul individu, qui décidera au nom de la nation tout entière, mais tout seul, du destin de notre élan collectif. Et pour l’instant, le casting est peu séduisant et usé. Et puis on est lucide, on voit bien depuis plusieurs présidentielles que le piétinement de la démocratie est devenu normal.
Pour autant, j’ai bien conscience que 2017 est incontournable, et si quelques militants du « Mouvement commun » iront faire campagne pour l’un ou pour l’autre, j’espère que nous pourrons adresser une plateforme aux partis et aux candidats. Si elle pouvait être inspirante pour certains des candidats et contribuer à revivifier le débat démocratique ou à faire émerger de nouveaux visages, j’en serais ravi.
Mais 2017 n’est au fond pas le problème du « Mouvement commun », qui n’a pas à s’inscrire dans le strict agenda des échéances électorales, mais plutôt dans le temps long, celui de la reconquête du pouvoir et des idées. Car même si la gauche libérale-conservatrice conservait le pouvoir, ça ne réglerait pas les questions centrales de la réduction de la pauvreté, du “bien-vivre”, de son rapport aux pays du Sud, ou des pannes démocratique et européenne… Pour nous, la présidentielle aura comme enjeu principal de parvenir à imposer des thèmes aux candidats, et pas le contraire.
Vous allez lancer une « web-télé », directement inspirée de Podemos…
On veut s’inspirer de tous ceux qui sont dans une démarche de « chercher la vérité et de la dire », comme disait Jaurès. Dans l’histoire militante de la gauche, il a toujours fallu se doter d’un outil de presse, pour faire une propagande de reconquête culturelle assumée comme telle. On veut faire une télévision qui soit le lieu de la confrontation entre ceux qui veulent faire « cause commune » et leurs adversaires, mais aussi entre ceux qui veulent faire « cause commune » eux-mêmes, pour donner à voir les paradoxes et les contradictions, afin de mieux pouvoir les surmonter. Cette « web-télé » se veut aussi un « anti-BFM », qui rechercherait le cheminement de la conviction et non le match de boxe entre postures, qui tournerait le dos à l’anxiété permanente ou à la complaisance à l’égard des pouvoirs. On fera aussi un « journal des bonnes nouvelles », qui promouvra toutes les expériences de contre-modèle possibles, en France comme à l’étranger.
Il y a deux ans, quasiment jour pour jour, le député socialiste que vous êtes expliquait dans Mediapart qu’il était temps d’amorcer un « autre chemin », et vous invitiez ceux qu’on appellera ensuite “les frondeurs” à refuser certaines orientations gouvernementales. Vous nous disiez alors : « On ne va quand même pas attendre cyniquement la catastrophe électorale, que tout le monde prédit. On peut encore l’éviter. » Vous le pensez encore ?
On a trop attendu, et c’est sans doute une des leçons à tirer de la période. Il se trouve que depuis, Manuel Valls, dans sa cohérence – car il n’a jamais caché ses opinions – a décidé de dérouler sans recherche de compromis une orientation qu’il croit juste. Et c’est une orientation à laquelle je ne crois pas, non seulement parce que je la trouve injuste, mais aussi parce qu’elle n’a jamais été discutée en amont. Il y a aujourd’hui deux points de vue à gauche. Le sien, qui considère qu’il faut libéraliser l’économie, admettre certains conservatismes d’ordre sociétal et s’en tenir non plus au socialisme, mais à une culture démocrate et d’ordre républicain. Et puis il y a une vision plus émancipatrice, plus écologique et au final plus moderne.
Objectivement, je veux juste poser quelques questions. Le nombre de chômeurs a-t-il augmenté ou reculé ? La pauvreté a-t-elle augmenté ou reculé ? Le Front national est-il en hausse ou en baisse ? La réponse est dans chacune de ces trois questions, et devrait quand même appeler à un peu d’humilité de la part de ceux qui gouvernent. Que tout ne soit pas à jeter, c’est une chose. Mais on ne peut pas aller contre la vérité, y compris la vérité électorale. Je ne sais pas ce que donneront les régionales, mais je sais quels ont été les trois précédents scrutins. À un bras d’honneur politique a été renvoyé un bras d’honneur électoral.
Objectivement, on est aussi obligé de constater que la réponse alternative de gauche à ce bras d’honneur n’a pas été opérationnelle non plus. Sauf à considérer que les électeurs sont des cons, on constate que ceux qui se déplacent encore pour voter à gauche le font un peu plus pour un PS dont ils sont déçus que pour d’autres partis. Peut-être que le rassemblement de toutes ces autres forces rééquilibrerait le rapport de force, mais il n’est pas à l’ordre du jour, si l’on en croit les dirigeants de ces partis.
Or il ne s’agit pas seulement d’avoir raison, il s’agit d’en apporter la preuve. Et on est confronté à une trop grande violence politique. Sans les mettre sur le même plan, les principaux responsables politiques, au gouvernement ou à la gauche de la gauche, de la droite ou du FN sont dans la violence verbale incessante. Et cela énerve chaque jour un peu plus un pays qui a envie d’apaisement, c’est d’ailleurs là-dessus que Hollande a gagné en 2012. Les postures martiales et les rancœurs haineuses fatiguent tout le monde et ne mènent nulle part. Elles doivent désormais se transformer en énergie positive. Mais pour cela, il faut s’adosser à des idées et des expériences réelles, et plus à une partie de baffes permanente entre la vraie gauche, même si elle a raison, et la gauche qui a trahi.
Vous êtes le seul député adhérent du PS à voter contre le budget. Allez-vous être exclu ? Et d’une façon plus générale, cinq mois après le congrès de Poitiers, et hormis pour préserver d’ultimes positions électorales, à quoi cela sert-il pour vous et ceux qui pensent comme vous de rester au parti socialiste ?
Concernant mon exclusion, comme il n’y a pas de précédent, il n’y a pas de raison de décréter qu’on exclut des gens en raison de leurs convictions, surtout quand celles-ci ne sont que la traduction littérale des orientations décidées par son propre parti. M’exclure reviendrait à reconnaître comme une faute la défense de décisions votées par les instances du PS le 27 juillet dernier, à propos de la politique économique du gouvernement. Les années précédentes, on avait obtenu la promesse d’un rapport d’évaluation des aides publiques aux entreprises. Dès lors que ce rapport n’existe même pas, et qu’on refuse toute discussion sur la pertinence de l’utilisation de l’argent public, il n’y a aucune raison pour que je ne vote pas contre le budget.
Par ailleurs, je ne fais pas de différence fondamentale avec ceux qui se sont abstenus, car le rejet de la pratique et de la méthode est le même. On ne peut pas dans le même temps répéter qu’il faut bien gérer l’argent public et le dilapider sans aucun contrôle. J’assume tranquillement cette divergence de vues avec Manuel Valls. Comme je ne lui reproche pas sa cohérence, qu’il ne me reproche pas la mienne. Je suis prêt à avoir le débat avec lui sur lequel des deux est le plus socialiste.
Alors pourquoi rester dans son parti, alors qu’il y a un désamour indéniable et que, 95 fois sur cent, un socialiste s’emmerde en militant ? À mon sens, l’essentiel est de continuer à se sentir libre. Les claquements de porte, c’est souvent beaucoup de bruit pour pas grand-chose. Je préfère essayer de construire quelque chose d’autre, à côté, sans être dans la guerre des gauches. Aujourd’hui, il n’y a de toute façon pas de partis enthousiasmants. On est souvent dans un engagement qui est le fruit de sa première rencontre militante. Il se trouve que ma première rencontre a été avec des socialistes. Mais si cela avait été avec des trotskystes ou des écologistes, qui sait ce que je serais devenu.
Le mépris de certains socialistes vis-à-vis de partenaires de gauche, considérés comme des “minoritaires”, m’insupporte tout autant que la haine recuite de certains militants d’autres partis de gauche à l’égard de socialistes sincères, au prétexte qu’ils sont encore au PS. L’essentiel, quel que soit son parti, c’est d’être à l’aise au moment de défendre ses convictions. Mais de toute façon, tout ça ne durera pas et je suis persuadé que le dépassement de tous ces vieux partis est à l’ordre du jour, et surviendra bien plus vite qu’on ne le croit.
Source : http://www.mediapart.fr