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19 janvier 2016 2 19 /01 /janvier /2016 16:31

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Nouvelles technologies

Le cobalt des smartphones et voitures électriques extrait par des enfants

par

 

Composant essentiel des batteries de nos smartphones, tablettes et voitures électriques, le cobalt provient en grande partie des mines situées au sud de la République démocratique du Congo (RDC). Selon les estimations, le quart du cobalt exporté provient de mines artisanales, dans lesquelles les mineurs utilisent des outils très rudimentaires pour creuser et extraire le précieux métal. Ils travaillent sans aucune protection, exposant leurs peau et leurs poumons aux poussières très irritantes du cobalt. Creusés à mains nues, sans matériel adéquat et sans précautions, les puits et galeries s’écroulent régulièrement, ensevelissant les travailleurs. Des dizaines de morts sont signalées chaque année. « Les mineurs ont tellement peur que nombre d’entre eux s’alcoolisent pour se donner du courage », souligne un rapport sur la filière cobalt publié ce 19 janvier par Amnesty international et l’Observatoire africain des ressources naturelles (Afrewatch).

Intitulé « Voici pourquoi nous mourrons : les violations des droits humains dans le commerce globalisé du cobalt en RDC » [1], le document présente les témoignages recueillis sur place en avril et mai 2015. « Nous avons tous des problèmes aux poumons, et mal partout dans notre corps », rapporte Joséphine, 33 ans, mère de cinq enfants. Les enquêteurs ont rencontré une petite centaine de mineurs, dont plusieurs enfants. Ils sont plusieurs milliers à trimer 12 heures par jour, pour gagner un ou deux dollars [2]. Certains enfants trient le cobalt, en surface. D’autres descendent dans les boyaux sans air et sans lumières, parfois pendant 24 heures d’affilée. Vivre et travailler dans le secteur des mines expose en plus les enfants à la violence des adultes : nombre d’entre eux rapportent avoir été frappés. Il y a aussi des violences sexuelles, qui concernent également les femmes.

 

 

Apple, Samsung, Microsoft, Sony et Volkswagen interpellés

Qui achète le cobalt de RDC ? D’après le rapport d’Amnesty international et Afrewatch, le principal client des marchés congolais est une entreprise chinoise, la Congo Dongfang Mining (CDM), filiale détenue à 100 % par le géant chinois de l’exploitation minière Zhejiang Huayou Cobalt Ltd (Huayou Cobalt). La multinationale fournit ensuite le cobalt « à trois fabricants de composants de batteries lithium-ion », en Chine et en Corée du Sud [3]. « Ces trois fabricants ont acheté pour plus de 85 millions d’euros de cobalt à Huayou Cobalt en 2013. À leur tour, ceux-ci vendent leurs composants à des fabricants de batteries qui affirment fournir des entreprises du secteur de la technologie et de l’automobile, notamment Apple, Microsoft, Samsung, Sony, Daimler et Volkswagen », décrit le rapport. Contactées par les ONG, certaines de ces entreprises ne savent même pas d’où vient le cobalt dont elles se servent. Elles semblent se désintéresser des conditions dans lesquelles le matériau est extrait [4].

« En raison des risques pour la santé et la sécurité, l’extraction minière est l’une des pires formes de travail des enfants. Comment des entreprises dont les profits à l’échelle mondiale se montent à 125 milliards de dollars (115 milliards d’euros) osent-elles affirmer qu’elles sont incapables de vérifier d’où proviennent des minerais essentiels à leur production ? », s’insurge Mark Dummett, spécialiste de la responsabilité des entreprises en matière de droits humains à Amnesty International. « Des millions de personnes bénéficient des avantages des nouvelles technologies, sans se préoccuper de la manière dont elles sont fabriquées. Il est temps que les grandes marques assument leur part de responsabilité dans l’extraction des matières premières qui rendent leurs produits si lucratifs. »

Amnesty International et Afrewatch demandent aux multinationales qui intègrent des batteries lithium-ion dans leurs produits, d’enquêter pour déterminer si le cobalt est extrait dans des conditions dangereuses ou en recourant au travail des enfants, et de renforcer la transparence quant à leurs fournisseurs. « Les entreprises ne doivent pas se contenter d’interrompre une relation commerciale avec un fournisseur ou de décréter un embargo sur le cobalt de la RDC parce que des risques en termes de droits humains sont identifiés dans la chaîne d’approvisionnement, précise Mark Dummett. Elles doivent agir en vue de remédier aux souffrances endurées par les victimes d’atteintes aux droits humains. »

Photo : © Amnesty international

Notes

[1« This is what we die for : Human rights abuses in the Democratic Republic of the Congo power the global trade in cobalt »

[2Selon l’UNICEF, en 2014, environ 40 000 enfants travaillaient dans les mines dans le sud de la RDC, dont beaucoup dans des mines de cobalt.

[3Ningbo Shanshan et Tianjin Bamo en Chine, et L&F Materials en Corée du Sud

[4Les 16 multinationales examinées dans le rapport sont Ahong, Apple, BYD, Daimler, Dell, HP, Huawei, Inventec, Lenovo, LG, Microsoft, Samsung, Sony, Vodafone, Volkswagen et ZTE.

 

 

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Source : http://www.bastamag.net

 

 

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19 janvier 2016 2 19 /01 /janvier /2016 16:19

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

Médecine du travail: le conseil de l'ordre attentif aux... employeurs
19 janvier 2016 | Par Mathilde Goanec
 
 
 

La médecine du travail devrait figurer dans la loi qui sera présentée par Myriam El Khomri ce printemps. Les professionnels se disent sous la pression croissante des employeurs, qui attaquent leurs certificats médicaux devant le conseil de l'ordre des médecins.

L’histoire est toujours la même : un salarié consulte son médecin du travail, son généraliste, ou un psychiatre. Ce dernier rédige, via des certificats médicaux ou des courriers à des confrères, des écrits qui établissent le lien entre l'état de santé psychique de leur patient et son travail. Ces écrits se retrouvent, parfois des années plus tard, dans un dossier aux prud’hommes, quand le salarié se plaint de harcèlement ou licenciement abusif… Les employeurs s’insurgent alors, et attaquent les médecins devant les chambres disciplinaires du conseil de l’ordre, chargées de veiller à la déontologie médicale. 

 

Dans le petit monde des médecins du travail, le procédé fait bondir. Protégés contre les pressions des employeurs par leur statut, ces professionnels voient dans le recours au conseil de l’ordre une remise en cause insidieuse de leur indépendance. Bernadette Berneron, qui de son propre aveu n’était pas « une militante », n’en revient pas : embauchée en service interentreprises, elle a, depuis 2013, été attaquée tour à tour par EDF, un syndicat agricole ou encore un laboratoire d’analyses médicales, pour ses courriers et certificats. Localement, la chambre disciplinaire du conseil de l’ordre a abandonné une partie des poursuites, néanmoins deux plaintes sont remontées au niveau régional, à Orléans. Condamnée à un avertissement, elle fait appel de cette décision devant la chambre disciplinaire nationale, à Paris.

 

Pourquoi maintenant, alors que le docteur Berneron exerce depuis plus de 30 ans sans anicroches ? « Il y a de plus en plus de salariés qui vont aux prud’hommes pour des affaires de souffrance au travail. Or recourir au conseil de l'ordre, c’est la seule façon pour l’employeur d’avoir accès aux pièces du dossier médical et à nos courriers, explique Bernadette Berneron. Dans ce genre de procès, c’est difficile, voire quasi impossible d’avoir des attestations de collègues. Les salariés et leurs avocats se servent des éléments qu’ils ont sous la main. »

 

Pour le conseil national de l’ordre des médecins, les employeurs ont toujours eu « la latitude » de porter plainte contre des médecins, et ne se sont pas « privés de le faire ». Mais les médecins incriminés jugent que le tournant date de 2007. Cette année-là, un article du code de la santé publique donne la possibilité, « notamment », aux patients, aux assurances, à la Sécurité sociale et aux associations de malades de lancer une action disciplinaire contre un médecin. « À la faveur de ce notamment introduit en toute discrétion, les chambres disciplinaires régionales ordinales instruisent des poursuites de plus en plus nombreuses, à la demande de l’employeur, contre le médecin attestant par un écrit du lien entre la santé et le travail », constate le docteur Huez, membre actif de l’association Santé et médecine du travail (a-SMT), lui-même sous le coup d’une procédure (condamné au niveau régional, il attend son jugement en appel devant la chambre disciplinaire nationale, sa procédure ayant été regroupée avec celle du docteur Berneron). Le conseil de l’ordre voit les choses autrement : la modification du décret en 2007 permet à toute personne « ayant intérêt à agir » de porter plainte contre un médecin, salarié-patient et employeur compris.

 

« Les avocats patronaux se sont engouffrés dans la brèche, confirme depuis Nancy le professeur de droit Patrice Adam, alerté sur ce sujet il y a deux ans lors d’une formation dispensée à des médecins du travail lorrains. Quatre ou cinq décisions ordinales favorables, c’est suffisant pour faire peser une grosse pression sur les médecins. » Devant la montée en puissance des procédures pour harcèlement aux prud’hommes ou au pénal, « les employeurs et leurs conseils cherchent à se défendre », concède le vice-président du conseil national de l’ordre des médecins, André Deseur, interrogé sur le sujet. « Les avocats savent qu’ils peuvent monter une procédure et une partie des organisations patronales sont prêtes pour la guérilla juridique », insiste Patrice Adam.

 

L'affaire est suffisamment sérieuse pour que plusieurs sénateurs, en marge de la loi Santé, aient déposé l’an dernier un amendement visant à interdire l’accès aux employeurs à ce type de procédure ordinale, « pour garantir l’indépendance du médecin du travail ». La ministre de la santé a souhaité que cet amendement soit retiré, tout en ouvrant la porte à une discussion sur la révision du décret de 2007 et la préservation du secret médical (voir l'onglet Prolonger). Interrogé par Mediapart sur l’issue de cette réflexion, le cabinet de la ministre répond que le phénomène est « marginal ». 

 

Combien de médecins sont effectivement concernés ? Les chiffres des uns et des autres se contredisent totalement. Pour l’Ordre des médecins, en 2014, sur 1 173 décisions, 14 seulement concernaient les médecins spécialistes en médecine du travail et une seule a été rendue sur plainte d’un employeur. L’association a-SMT a recensé de son côté 40 affaires depuis 2013 dans son réseau militant, mais estime en extrapolant qu’il y aurait 100 à 200 plaintes annuelles d’employeurs contre des médecins, dont la moitié contre des médecins du travail.

 

« Les médecins, même de manière irrationnelle, ont peur et surveillent leurs écrits », affirme Patrice Adam. « Certains médecins ne font même plus de certificats pour des maladies professionnelles inscrites au tableau, c’est fou ! », s’insurge Alain Carré, ancien médecin du travail et lui aussi membre de l’a-SMT. De fait, outre l’autocensure, de nombreuses plaintes se règlent au premier niveau des chambres disciplinaires ordinales, en conciliation. Nicolas Sandret, médecin inspecteur de santé publique en Île-de-France jusqu’en 2014, confirme avoir été plusieurs fois « alerté par des médecins en difficulté ». Mais que la « honte » d’être impliqué dans une procédure ordinale pousse un certain nombre d’entre eux à concilier, voire à se dédire sur un écrit. Pour ce médecin, il y a bien eu un tournant : « Avant, un employeur pouvait déjà, devant l’inspection du travail, se plaindre d’un médecin, ou entamer une procédure au civil. Il pouvait aussi aller voir le conseil de l’ordre qui ne donnait pas suite. Maintenant, il arrive même que le conseil s’associe à la plainte. Ça a un impact sur nos pratiques. » Bernadette Berneron assure avoir « vu des collègues changer leurs écrits médicaux après des conciliations devant le conseil de l’ordre ». Les médecins généralistes sous la menace d’une interdiction d’exercer – fatale lorsque l’on pratique en libéral – acceptent aussi de revoir leur copie.

« Je suis désolée, mais interroger le lien entre santé et travail, c’est mon job. Que des salariés aient une copie de mes écrits, leurs avocats aussi, et que les employeurs chutent au tribunal, ce n’est pas mon problème. » Marquée par des cas de suicides qu’elle n’a pas pu éviter, Françoise (son prénom a été changé) travaille dans un service interentreprises en région parisienne et dénonce l'aveuglement sur la « violence des rapports sociaux ». Elle vient de passer en chambre disciplinaire à la suite d'une plainte d’employeur, à laquelle s’associe le conseil de l’ordre et attend le jugement. Aucune honte, mais une colère qui monte. « C’est toujours le même refrain, j’attesterais de choses qui ne sont pas vérifiables, genre harcèlement moral ou sexuel. Mais je ne suis pas la police, je constate la souffrance du salarié, et j’estime objectivement qu’elle est liée au travail. Ça ne sort pas de mon chapeau, j’ai une vision de l’entreprise, je vois les salariés, je fais les études de poste. Tout ça fait partie du dossier médical. » 

 

La question est au cœur du conflit lancinant entre les médecins examinant des salariés et le conseil de l’ordre : les médecins, a fortiori les généralistes ou les spécialistes hors médecine du travail, sont-ils habilités à établir un lien entre la santé du salarié et l’organisation du travail dans l’entreprise ? Pour les pathologies physiques, comme les maladies de posture ou liées à des produits chimiques, cela semble aller de soi. Pour les maladies psychiques, c’est plus délicat. André Deseur, non seulement vice-président du conseil de l’ordre national, mais également assesseur en chambre disciplinaire à Paris, concède qu’il est bien « du devoir des médecins du travail d’alimenter le dossier du salarié »« Malheureusement, certains écrits sont maladroitsLe médecin du travail peut rassembler un faisceau de preuves, mais n’est pas un témoin. Dire qu’il y a une pathologie, c’est de son ressort. Affirmer qu’il y a un lien, ça peut poser problème. »

 

Bernadette Berneron est convaincue qu’il s’agit au contraire de sa mission. Cette professionnelle exerce en partie en consultation psychopathologique, à l’hôpital de Tours. Dans ce cadre, elle n’est pas toujours le médecin du travail d’un salarié, et reçoit aussi des patients envoyés par des confrères : « C’est le propre de la clinique du travail. Nous ne sommes pas derrière les gens sur leur poste, qu’ils aient une tendinite ou qu’ils souffrent de dépression, ce qui ne nous empêche pas de pouvoir faire le lien. Ceux qui viennent nous voir simplement pour un argumentaire juridique, on les voit venir de loin et ils sont peu nombreux. » Une vision du métier que partage le docteur Huez, l’un des plus fervents défenseurs de la « clinique du travail ». « Nous devons pouvoir faire des écrits argumentés et motivés, sans avoir peur des conséquences, insiste-t-il. D'abord parce que la reconnaissance par le médecin, ça restaure la santé des gens. Ensuite parce que cela permet d'ouvrir des dossiers de maladies professionnelles. Mais attention, c'est un certificat, pas une preuve, et ça ne peut pas être utilisé tel quel par un tribunal qui devra juger en droit. Donc pourquoi attaquer ces écrits si ce n’est pour nous disqualifier moralement ? » 

 

Le sujet est d’autant plus compliqué quand « l’employeur » est lui-même médecin. Le docteur Jarrige, médecin du travail dans un hôpital psychiatrique du sud de la France, vient d’être convoqué devant la chambre disciplinaire du conseil de l’ordre de Paca pour avoir alerté sur la sécurité défaillante des agents de l’hôpital. Il pointe, dans un courrier, la responsabilité du chef de service. « L’employeur, qui est également médecin, porte plainte au nom de la “confraternité” que se doivent les médecins entre eux, décrypte son avocat, Jean-Louis Macouillard, du cabinet Teissonnière. Mais mon client a simplement fait son travail de médecin du travail, qui comprend une mission d’alerte et de conseil à la direction. »

 

Pour le conseil de l’ordre, le médecin peut bien « instruire le lien », mais pas « l’établir » « Si vous constatez que madame Machin a pris un coup, vous pouvez écrire qu’elle a un œil au beurre noir, pas dire que c'est son mari qui lui a donné, illustre André Deseur. C’est pareil pour le médecin du salarié. » L’allusion à la vie privée n’a rien d’anodin, note le médecin inspecteur Nicolas Sandret. « Le problème, c’est que le conseil de l’ordre estime que ce qui se passe dans l’entreprise, c’est un peu ce qui se passe en famille, du domaine de l’intime. Ce n’est pas de la malveillance, mais plutôt que les médecins de l'ordre ne comprennent pas vraiment nos métiers. Avoir un tiers dans une relation médicale, c’est compliqué. » La proximité entre les médecins du conseil de l’ordre et les employeurs fait partie du tableau, pour le docteur Berneron : « Ils ne nous haïssent pas mais sont eux-mêmes en plein conflit d’intérêts. La plupart des élus au conseil de l’ordre sont de petits patrons. Ça m’est arrivé de faire des études de poste chez des médecins, ce ne sont pas toujours les mieux traitants. »

 

Si, en 2006, dans un rapport sur les certificats médicaux, le conseil estimait qu’il était interdit à un quelconque médecin d’attester d’un lien de causalité entre les difficultés professionnelles et l’état de santé d’un patient, il a, fin 2015, changé de braquet. « Sa formation et ses missions permettent au médecin du travail d’établir un lien entre la santé du salarié, son activité professionnelle et son environnement professionnel  », peut-on désormais lire sur le site de l’Ordre« Ils sont gênés par cette affaire, c’est clair, et il est fort possible qu’ils finissent par absoudre les docteurs Huez et Berneron au national, histoire d’en finir », juge Alain Carré. Les deux intéressés souhaitent que l’affaire soit jugée en bonne et due forme, pour aller devant le Conseil d’État, et pouvoir trancher, définitivement, ce point de droit.

 

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

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18 janvier 2016 1 18 /01 /janvier /2016 19:15

 

Source : http://www.reporterre.net

 

 

En Allemagne, les ferme-usines deviennent la règle, malgré une rentabilité incertaine

18 janvier 2016 / Violette Bonnebas (Reporterre)
 

 

 

En Allemagne, les ferme-usines deviennent la règle, malgré une rentabilité incertaine

Vingt mille personnes ont manifesté samedi, à Berlin contre l’agriculture intensive et la généralisation des fermes-usines. Nous avons visité une de ces installations. Surprise : elles ne sont même pas rentables.

 

-  Berlin, correspondance

En marge de la Grüne Woche ("semaine verte") de Berlin, le salon de l’agriculture allemand, près de 20.000 personnes ont défilé samedi 16 janvier sous la bannière du collectif "Wir haben es satt" ("ça nous gave"). Elles réclament notamment la fin des subventions aux fermes-usines. Ces exploitations de masse prospèrent en Allemagne depuis cinquante ans. Dans l’Est du pays, elles ont même anéanti le maillage paysan. L’une d’entre elles a accepté de nous ouvrir ses portes.

Coup de téléphone au premier syndicat agricole d’Allemagne : on aimerait bien visiter une ferme-usine « typique » de l’Est du pays. Il paraît qu’elles sont gigantesques. « Appelez M. Bielagk, il vous recevra sans doute, il a l’habitude des journalistes. » Quelques jours plus tard, rendez-vous est pris à Beyern, à 140 kilomètres au sud de Berlin, avec cet éleveur qui « ne veu[t] rien cacher, pour que les gens comprennent [s]on métier ». Les chiffres du ministère annoncent 2.178 bovins, 8.300 porcins. Le vertige guette.

Arrivés sur place, surprise : l’exploitation ne contient que 870 vaches et 5.750 porcs. Le ministère recensait les capacités maximales. « Quand j’ai repris l’exploitation, il y a quinze ans, il y avait 2.000 vaches ici, mais ça me paraissait trop, alors j’ai pas mal réduit, explique Horst Bielagk. 800, 900 vaches, c’est une bonne taille. »

 

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Les vaches sont installées dans des étables ouvertes.

La coopérative de Beyern regroupe quatre anciennes LPG [1], ces outils de production agricoles sans limites enfantés par le régime communiste de l’ex-RDA (la République démocratique d’Allemagne, partie communiste du pays jusqu’en 1989 et la chute du mur de Berlin). M. Bielagk a connu cette époque, il a même travaillé dans l’une de ces structures. « Qu’est-ce qui a changé depuis ? » Silence. Puis : « Il y a moins d’animaux, c’est sûr, et aussi moins d’employés. Aujourd’hui, on en a 45. » Soit dix fois moins qu’en 1989.

 

Loin de l’image aseptisée et robotisée des élevages modernes 

Le chef d’entreprise se lance dans un tour du propriétaire. Six sites dans un rayon de 25 kilomètres, 2.800 hectares de terres (la superficie d’Orléans), essentiellement des champs de maïs destinés à l’alimentation du bétail. La visite, non-exhaustive, peut commencer.

 

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Le maïs récolté sur l’exploitation alimente le bétail et les méthaniseurs.

Direction Fermerswalde, à quatre kilomètres, où logent les velles et les génisses (les mâles sont vendus quelques jours après leur naissance), ainsi que les porcelets. Ce qui frappe d’abord, c’est la vétusté apparente des bâtiments, vieux de 55 ans. Le ciment se craquelle, les systèmes de ventilation sont rouillés, loin de l’image aseptisée et robotisée des élevages modernes allemands.

Pourtant, les dispositifs automatiques sont ici partout, sous les formes les plus inattendues. De vieilles cabines téléphoniques ont été transformées en robinets à lait pour les jeunes vaches. À la place du combiné, une urne métallique renferme des pastilles de poudre de lait, qui ressortent sous forme liquide dans l’enclos, à travers un pis de plastique. Le collier de chaque bête est connecté à la cabine pour enregistrer sa consommation. Les plus gloutonnes voient ainsi la tétine se tarir quand elles approchent. « Grâce à l’automatisation, je n’ai besoin que de deux personnes pour tous les veaux et les porcelets », se félicite l’entrepreneur.

 

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Le distributeur automatique de lait pour les veaux fait la fierté de l’éleveur.

À côté, une trentaine de génisses patientent dans une étable ouverte. « Avant, tous ces bâtiments étaient complètement fermés, explique l’éleveur en montrant les ouvertures faites dans le mur gris. On a fait de gros travaux pour le bien-être des animaux. » Au sol, le béton est recouvert de paille. Bientôt, ces jeunes vaches connaîtront leur première saillie. « Naturelle, dans le pré, là derrière, insiste M. Bielagk. On ne fait plus de fécondation artificielle, ça coûtait trop cher. » Si les vaches sont « choyées », le confort des porcs, lui, ne fait l’objet d’aucun zèle.

 

« Chacun son métier »

La lourde porte de fer attenante s’ouvre, le concert des jeunes cochons démarre quand la lumière des néons inonde la bâtisse jusque-là plongée dans l’obscurité. Les fenêtres ici sont de menus soupiraux. « Il y a 450 porcelets dans ces boxes-là. La nourriture est à volonté, elle arrive par des tuyaux reliés à un silo à l’extérieur. » Le sol est recouvert de caillebotis pour faciliter l’évacuation des déjections. À l’arrière des petits corps rosés, les queues ont été « raccourcies », pour éviter le cannibalisme.

Notre hôte nous informe que le vétérinaire doit passer, un porcelet est malade. Les antibiotiques ? « Ah ça, je ne sais pas, c’est le vétérinaire qui s’en occupe, chacun son métier », balaie-t-il.

 

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Un mètre carré par cochon, le minimum légal.

Les cochons ont une espérance de vie de cinq à six mois. Tout est fait pour qu’ils atteignent rapidement leur poids d’abattage, autour de 100 kilos. Il en passe 15.000 dans cette ferme chaque année. « On travaille avec des cochons français je crois...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : http://www.reporterre.net

 

 

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18 janvier 2016 1 18 /01 /janvier /2016 19:03

 

Source : http://www.bizimugi.eu

 

 

janv. 12 2016

Faucheurs de chaises : 4 militants Bizi à nouveau interrogés par la police

4 militants du mouvement Bizi étaient à nouveau convoqués au commissariat de Bayonne ce mardi 12 janvier 2016.

Ils ont été interrogés sur l’action de réquisition de chaises du 2 novembre 2015 à l’agence HSBC de Bayonne (voir aussi la vidéo ici), ainsi que sur le Sommet des 196 chaises qui s’est tenu le 6 décembre 2015 à Montreuil pendant la COP21.

Pendant ce temps, les banques comme HSBC ou BNP continuent d’organiser un système d’évasion fiscale de grande ampleur, détournant des milliards d’euros des finances publiques. L’argent pour le climat et la transition sociale et écologique existe bel et bien… il est dans les paradis fiscaux !

 

Affaire HSBC-Juger HSBC et non les lanceurs d'alertes

 

Pour la quatrième fois en moins d’un an, des militants de Bizi sont convoqués au commissariat de Bayonne et interrogés par la police au sujet des actions de réquisitions de chaises dans les banques impliquées dans l’évasion fiscale. Cette fois-ci, les autorités se sont intéressées non seulement aux actions de réquisitions qui ont eu lieu à Bayonne dans l’agence de la HSBC, mais aussi au Sommet des 196 chaises qui s’est tenu le 6 décembre à Montreuil pendant la COP21.

Les Faucheurs de chaises : un mouvement non-violent et déterminé

Depuis la première réquisition de chaises qui a eu lieu à Bayonne le 12 février dans une agence HSBC, c’est en effet un large mouvement citoyen non-violent et déterminé qui s’est mis en marche : les « Faucheurs de chaises ».

 

Affaire HSBC-Bizirecidive-3sièges à nouveau saisis

 

En l’espace de quelques mois à peine, des centaines de citoyens ont ainsi réquisitionné un total de 243 chaises dans 40 agences de banques impliquées dans l’évasion fiscale (BNP, HSBC, Crédit Agricole, Société Générale). Ces actions, menées à visage découvert aux quatre coins de l’Hexagone et même en Belgique, répondaient à l’Appel lancé par des personnalités et des intellectuels à réquisitionner 196 chaises (correspondant aux 196 parties représentées à la COP21) en vue de l’organisation d’un Sommet citoyen sur l’évasion fiscale et le financement de la transition sociale et écologique, qui s’est finalement tenu le 6 décembre 2015 à Montreuil pendant la COP21.

 

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Les 196 chaises réquisitionnées

 

Appel à internationaliser le mouvement de réquisitions de chaises

196 délégués de la société civile du monde entier, représentant une diversité de cultures et de mouvements engagés dans la lutte contre les dérèglements climatiques, ont ainsi pris place sur 196 chaises réquisitionnées, le 6 décembre, dans le cadre du Village Mondial des Alternatives et du Sommet Citoyen pour le Climat qui étaient organisés à Montreuil pendant la COP21.

Des acteurs majeurs de la société civile mondiale participaient à cet événement, dont John Christensen (Tax Justice Network), Aissatou Diouf (Enda), Bill McKibben (350.org), Lidy Nacpil (Jubillee South – Asia/Pacific Movement on Debt and Development), Vandana Shiva (Navdanya), Aurélie Trouvé (Attac France), Antolin Huascar (Via Campesina), et Jagoda Munic (Amis de la Terre International).

 

sommet 196 chaises - Hindou Oumarou

Hindou Oumarou Ibrahim (coordinatrice de l’association des femmes peuples autochtones du Tchad)

 

Des personnalités comme Marcos Arruda (économiste brésilien), Hindou Oumarou Ibrahim (coordinatrice de l’association des femmes peuples autochtones du Tchad), Anabella Rosenberg (syndicaliste), Yeb Saño (négociateur philippin à la COP 21), Txetx Etcheverry (Bizi, Alternatiba), Susan George (Attac), et d’autres porte-paroles des cinq continents ont proclamé lors de ce sommet citoyen mondial les « Solutions des peuples pour financer la transition » : taxe sur les transactions financières, taxe carbone, restructuration des dettes publiques, création monétaire pour le climat et l’emploi, désinvestissement des combustibles fossiles…

 

Sommet 196 chaises

 

Le Sommet des 196 chaises s’est conclu sur un Appel à internationaliser le mouvement de réquisition de chaises, « Des chaises pour la justice climatique », qui appelle « l’ensemble des mouvements citoyens du monde entier à utiliser cette méthode simple, non-violente et créative, pour placer au cœur du débat public mondial cette question de l’évasion fiscale et des paradis fiscaux et obtenir enfin la mise en œuvre effective de décisions plusieurs fois annoncées mais régulièrement étouffées sous la pression des lobbies financiers. » 

Ce ne sont pas les militants non-violents, agissant à visage découvert et pour l’intérêt général, qu’il faut poursuivre, mais bien les dirigeants des banques qui organisent sciemment un système massif d’évasion fiscale pour le profit de quelques-uns !

 

 

Source : http://www.bizimugi.eu

 

 

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18 janvier 2016 1 18 /01 /janvier /2016 15:37

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

L'économie mondiale fait le bonheur des 1%
18 janvier 2016 | Par martine orange
 
 
 

En 2015, 62 milliardaires possédaient autant que la moitié la plus pauvre de la population, relève un rapport publié ce lundi par Oxfam. L’accaparement des richesses se double d’un accaparement du politique. « La concentration du pouvoir économique ne fait que servir davantage les intérêts d’une élite au détriment d'autrui », accuse l’ONG.

La plaisanterie est attribuée à l’économiste américain Joseph Stiglitz : « Maintenant, un bus suffit pour rassembler les milliardaires qui possèdent la moitié des richesses mondiales. » Pour poursuivre, il aurait fallu deux wagons ou un peu plus pour véhiculer les milliardaires les plus riches en 2010. Cette image résume à elle seule l’accumulation de richesses et le creusement des inégalités sans précédent dans le monde depuis la fin du XIXe ou au début du XXe siècle.

« En 2015, 62 personnes possédaient à elles seules les mêmes richesses que 3,5 milliards de personnes (soit la moitié la plus pauvre de l'humanité), contre 388 personnes en 2010 », rappelle le dernier rapport Oxfam sur les inégalités, publié le 18 janvier. Ces 62 milliardaires ont vu leur fortune augmenter à la vitesse de la lumière : + 44 % entre 2010 et 2015, soit une hausse de 542 milliards de dollars. Leur fortune cumulée représente désormais 1 760 milliards de dollars. Dans le même temps, « les richesses de la moitié la plus pauvre de l'humanité ont diminué de plus de mille milliards de dollars au cours de la même période, soit une chute de 41 % », souligne Oxfam.

 

 

Ces chiffres, publiés désormais chaque année à la veille du sommet de Davos qui réunit « l’élite » économique mondiale, finissent manifestement par agacer. Beaucoup y voient une jalousie contre les responsables qui ont réussi. Des critiques ont commencé à circuler sur les analyses de l’ONG Oxfam. Les comparaisons frappent l’imagination mais ne reflètent pas la réalité, est-il rétorqué. 

 

Les 62 milliardiares les plus riches contre les 50 % les plus pauvres © Oxfam Les 62 milliardiares les plus riches contre les 50 % les plus pauvres © Oxfam

 

Les statistiques d’Oxfam s’appuient sur les rapports sur la richesse mondiale établis chaque année par le Crédit suisse, car ils ont l’avantage d’estimer les patrimoines entiers – qui sont devenus les principaux moteurs de l’accumulation des grandes fortunes, compte tenu de l’inflation des différents actifs immobiliers et financiers – plutôt que les seuls revenus. Parmi les reproches formulés contre ces estimations, figure leur méthodologie qui conduit dans les calculs des richesses à déduire les dettes accumulées. « Les propriétaires américains qui ont souscrit des emprunts désormais supérieurs à la valeur de leur maison se retrouvent parmi les plus pauvres au monde », ironise ainsi The Economist.

 

En mai dernier, l’OCDE avait publié un rapport sur les inégalités dans le monde. Sa méthodologie est totalement différente. Mais l’institution arrivait aux mêmes conclusions. « Au cours des 30 dernières années, les inégalités de revenu se sont creusées dans la plupart des pays de l’OCDE, pour atteindre parfois des niveaux historiques. Le coefficient de Gini – une mesure courante des inégalités de revenu qui varie entre 0 lors d’une égalité totale de revenu et 1 lorsque le revenu total va à une seule personne – s’élève aujourd’hui en moyenne à 0,315 dans les pays de l’OCDE. Il dépasse 0,4 aux États-Unis et en Turquie et frôle 0,5 au Chili et au Mexique », écrivait-il d’emblée. Tandis que les 1 % s’enrichissent, 40 % de la population mondiale s’appauvrit, était-il rappelé.

 

La question des inégalités, très débattue depuis la publication du livre Le Capital au XXIe siècle par Thomas Piketty, est donc bien un des sujets centraux de l’économie mondiale, mettant en cause la cohésion des sociétés, la démocratie et même « la croissance économique », insistait l’OCDE. Selon l’organisme, le creusement des inégalités pesait sur la croissance et le développement économique mondiaux.

 

Evolution entre la productivité et les salaires © Oxfam et  OIT Evolution entre la productivité et les salaires © Oxfam et OIT
 

À la source de ce fossé grandissant et menaçant, il y a l’inversion historique entre le capital et le travail mise en œuvre depuis les années 1980. « L'une des principales raisons alimentant cette incroyable concentration des richesses et des revenus est la croissance des rendements en faveur du capital, au détriment du travail. Dans la quasi-totalité des pays riches et dans de nombreux pays en développement, la part du revenu national revenant aux travailleurs a chuté. Autrement dit, les travailleurs récoltent de moins en moins les fruits de la croissance. A contrario, les détenteurs de capitaux ont vu leur capital constamment augmenter (sous la forme d'intérêts, de dividendes ou de bénéfices non distribués) à un rythme supérieur à celui de la croissance économique », rappelle le rapport d’Oxfam.

 

Les salariés et des travailleurs ne sont plus associés aux gains de l’innovation, de la technologie, de la croissance, de la productivité. Leurs revenus ont totalement décroché de l’expansion connue ces trente dernières années. L’essentiel a été capté par les détenteurs de capitaux. Les chiffres cités par Oxfam sont là encore impressionnants. Entre 1988 et 2011, les 10 % les plus riches dans le monde ont capté 46 % de la croissance des revenus. Dans le même temps, les 10 % les plus pauvres n’en recevaient que 0,6 %.

 

La crise a encore accentué le fossé. Tandis que les plus pauvres payaient lourdement les conséquences de la crise financière, les milliards déversés par les banques centrales pour relancer la machine économique étaient préemptés par les grandes fortunes. Le secteur financier en a été le principal bénéficiaire. Désormais, un milliardaire sur cinq est lié au secteur financier, selon le rapport d’Oxfam.

Accaparement

 

 © Oxfam © Oxfam
 

Les PDG des grands groupes participent aussi activement au système, s’octroyant des salaires démesurés, sans comparaison avec le reste des salariés. Les écarts peuvent aller jusqu’à 300 ou 400 fois, au sein d’un même groupe. Début janvier, la presse britannique soulignait ce fossé criant : en 22 heures, les patrons britanniques des plus grandes firmes avaient gagné le salaire moyen annuel d’un salarié.

 

Ce 1 % constitue désormais un monde à part. Il a ses conseils, ses avocats, ses gestionnaires de fortune. Toute une industrie fiscale, comptable, juridique s’est organisée autour d’eux pour les aider à recycler les fortunes dans les paradis fiscaux, à échapper par tous les moyens à l’impôt, à ne pas participer à l’intérêt général. D’après les estimations de l’économiste Gabriel Zucman, 7 600 milliards de dollars sont détenus sur des comptes offshores par des particuliers. Parmi les mesures à prendre, Oxfam estime qu’il est urgent d’en finir avec les paradis fiscaux et d’élaborer une harmonisation de la fiscalité au niveau mondial pour les multinationales.

 

Si les riches veillent avec un soin particulier à ne pas être mis à contribution par la société, ils sont tout aussi attentifs à se tenir très près du pouvoir. L’accaparement des richesses se double maintenant d’un accaparement du politique. Par tous les moyens, ils cherchent à influencer la loi, les textes, les décisions en leur faveur, dans leur seul intérêt. Les sommes investies par les groupes sont gigantesques pour obtenir la bonne décision : plus de 400 millions de dollars pour le secteur financier, plus de 200 millions de dollars pour l’industrie pharmaceutique sont dépensés chaque année en action de lobbying rien qu’aux États-Unis. 

 

« La concentration du pouvoir économique ne fait que servir davantage les intérêts de ces mêmes secteurs d'activité, entreprises et particuliers, en créant un cercle vicieux et injuste qui pérennise et renforce le contrôle des marchés et des ressources économiques par une élite au détriment d'autrui », accuse Oxfam qui dénonce une économie au service des 1 %. Ceux-ci obtiennent des pouvoirs économiques, des passe-droits, des fortunes sans rapport avec leur mérite. « Il n’est pas toujours nécessaire de procéder à de lourds investissements en matière de travail, d’efforts et de créativité pour obtenir des retours lucratifs et se hisser à une position de puissance et d'avantage économique. En fait, il arrive que la création de revenus et de richesses soit presque intégralement déconnectée de toute productivité ou valeur ajoutée », insiste l’ONG.

 

La connivence, les réseaux, la proximité avec les pouvoirs publics permettent, bien plus que les vraies innovations, de se fabriquer des situations de rente et d’enrichissement personnel. Une importante partie des grandes fortunes dans les pays émergents se sont ainsi constituées autour de l’immobilier, des exploitations minières, des privatisations, des concessions, en un mot des secteurs étroitement liés à des autorisations d’État, souligne Oxfam. Mais bien des exemples comparables pourraient être trouvés aussi dans les pays développés. Des noms viennent spontanément, si l’on songe à la situation de la France. « Si l’on regarde la richesse des particuliers qui provient à la fois de secteurs dépendant de l'État et de pays exposés à la corruption ainsi que l'extrême richesse qui a été héritée et non "gagnée", Oxfam estime qu'au moins 50 % de la fortune des milliardaires du monde pourrait avoir été acquise au moins en partie par des moyens non méritocratiques », est-il écrit.

 

« Tout le monde a parlé des inégalités en pointant les riches, en oubliant la pauvreté. Or il faut insister sur l’importance de celle-ci et sur le fait que pauvreté et inégalités sont inextricablement liées », déclare l’économiste britannique Anthony Atkinson, dans un entretien à L’Humanité dimanche, donné à l’occasion de la sortie de son dernier livre Inégalités. Il y préconise une série de propositions pour relancer la redistribution et lutter contre le chômage.

 

Car c’est bien l’autre côté de la médaille des 1 % : une partie de plus en plus importante de la population mondiale se retrouve reléguée dans la pauvreté, écartée de la croissance et du développement, sans possibilité d’échapper à son sort. Les plus grands ravages sont d’abord dans les pays les plus pauvres, qui sont aussi, rappelle Oxfam, ceux qui sont les plus menacés par le réchauffement climatique, les ravages environnementaux. Là aussi, il y a une accumulation, mais de malheurs.

 

Mais dans les pays développés aussi, une partie de plus en plus grande de la population est prise ou aspirée dans une trappe à pauvreté. « Entre 2007 et 2011, le taux de pauvreté ancrée dans le temps a augmenté d’un peu plus de 1 point de pourcentage dans la zone OCDE, pour s’établir à 9,4 %. En Grèce, il a plus que doublé et est passé à 27 %, et il a presque été multiplié par deux en Espagne, où il a atteint 18 % », soulignait le rapport de l’OCDE. La précarité, le chômage sont devenus le quotidien de ces pauvres. Leurs enfants sont privés d’une égalité de chance, des « opportunités d’avenir », les familles pauvres ayant de plus en plus de mal à financer leur éducation. 

 

Au fur et à mesure que se creusent les inégalités entre riches et pauvres, les inégalités entre hommes et femmes croissent aussi. « La part du "gâteau" économique dévolue aux femmes est bien moindre que celle des hommes, et les revenus les plus élevés sont réservés en quasi-exclusivité aux hommes, qui représentent 445 des 500 particuliers les plus riches de la planète. Parallèlement, les femmes constituent la majorité de la main-d’œuvre à bas salaire et sont concentrées dans les emplois les plus précaires », souligne Oxfam.

 

Toutes les grandes organisations internationales – OCDE, FMI, banque mondiale – s’accordent désormais pour considérer que le creusement des inégalités a atteint un tel niveau qu’il devient contre-productif, même en termes économiques. Toutes se disent favorables à une meilleure redistribution des revenus, au moins à un retour à l’égalité des chances. Pourtant, année après année, les mêmes chiffres scandaleux d’accumulation de richesses dans un nombre de mains de plus en plus restreint sont publiés. Rien ne bouge.

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

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16 janvier 2016 6 16 /01 /janvier /2016 17:51

 

Source : http://www.marianne.net

 

 

Alstom : quand Jérôme Pécresse supprime les emplois de la région de Valérie… Pécresse

 
Près de 800 licenciements ont été officialisés par Alstom et General Electric, essentiellement à Levallois et Massy, en Ile-de-France. Une "restructuration des effectifs" pilotée par un certain... Jérôme Pécresse, époux de la toute nouvelle présidente de la région Ile-de-France. La même qui a fait de la lutte contre le chômage sa priorité.
 
Valérie et Jérôme Pécresse - SIPA
 
 

Elle vient d’être élue à la tête de la région Ile-de-France après de longs mois de campagne marqués par une « priorité » absolue ; l’emploi. Lui, l’a accompagnée, soutenue, encouragée à chaque instant. Le soir de sa victoire, Valérie Pécresse ne manquera donc pas de remercier ce précieux soutien, l’un des plus fidèles.

"Je voudrais dire à (…) mon mari, (…) que j'ai entraîné malgré [lui] dans cette rude épreuve, que c'est dans [son] affection que j'ai puisé toute ma force", confie en effet, émue, l’ex-UMP à l’issue des élections régionales, le 13 décembre dernier. Il aura toutefois fallu moins d’un mois pour apprendre que « l’affectueux » monsieur Pécresse se cache aussi derrière les centaines de licenciements qui toucheront bientôt la région dirigée par… sa femme.

Ce mercredi 13 janvier, ce qu’il reste de la direction d’Alstom, dont la prestigieuse branche Energie a été rachetée, , par le géant américain General Electric (GE), en avril 2014, a en effet annoncé la , essentiellement à Levallois (dans les Hauts-de Seine) et à Massy (Essonne), au coeur du fief de Valérie Pécresse.

Une "restructuration des effectifs" en France - et en Europe où 6500 postes seront au total supprimés - née de la fusion avec General Electric, directement pilotée par un certain Jérôme Pécresse, membre du comité exécutif (constitué de 7 personnes) et précisément en charge, côté français, de "l’intégration" des activités de la branche Energie d’Alstom dans celles de General Electric.

Son nom apparaît d’ailleurs en bonne place dans le mail qui a été envoyé aux salariés, début janvier, pour leur faire part des orientations de l’entreprise, et dont Marianne a obtenu une copie. Dans un jargon technico-technique incompréhensible, on retiendra que la vision globale proposée par GE se réduit pour l’instant à "la nécessité d’aligner l’entreprise sur les réalités du marché" et par conséquent "d’intégrer efficacement les structures de GE et d’Alstom", autrement dit de supprimer "les doublons".

 

(...)

Extrait de la version anglaise du courriel adressé aux salariés d'Alstom

 

On savait qu’il y aurait de la casse"

Sur place, à Massy, les salariés n’étaient pas dupes mais n’en restent pas moins sonnés. "On savait qu’il y aurait de la casse", résume un responsable Force ouvrière (FO) de la région, à qui les informations "parviennent au compte goutte." Contactée à plusieurs reprises par Marianne, l’équipe de Jérôme Pécresse, a quant à elle refusé toute demande d’interview.

Une source proche du dossier explique néanmoins que ces "restructurations", finalisées entre "novembre et décembre", sont dans "les cartons" depuis "plusieurs mois" et que le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, qui a ardemment soutenu l’offre américaine a "été mis dans la boucle depuis le début." Mais plutôt que de se battre pour sauvegarder les emplois et le savoir faire français, l’intéressé a préféré minimiser l’impact de ces suppressions de postes en France, qui restent pour lui, .

"Emmanuel Macron ressort toujours les mêmes éléments de langage », poursuit cette source. En réalité tous ont cherché à "gagner du temps", en se gardant bien, par exemple, de faire publiquement ces annonces "avant les élections régionales."  Quant à la création de 1000 emplois promise par GE et soigneusement mise en avant par le gouvernement, "personne ne rappelle que 1000 autres emplois ont été supprimés depuis 2014 » alors que GE « était déjà dans les locaux". 

Outre le flou qui entoure la création de ces 1000 emplois, dont on sait encore peu de choses, (250 postes seraient à pourvoir dans le numérique, 300 représenteraient de "l’internalisation" d’effectifs déjà existants mais actuellement en sous traitance), le choix de couper en Ile-de-France interroge. 

"Ils ont réussi à épargner les sites emblématiques de Belfort" conclut notre source [ndlr Emmanuel Macron s’y est rendu au printemps dernier prompt, disait-il, à défendre « l’objectif zéro licenciement »]. Il y avait donc à Belfort plus de "pression" qu’ailleurs. Puis, en Ile-de-France, "le marché du travail est différent", comme si taper officiellement là ferait moins mal. Mais dans les faits, GE a discrètement commencé a dégraisser un peu partout en France, à Grenoble notamment où une centaine de postes seraient dès à présent touchés sous couvert de "départs volontaires".

Mais qu’en pense Valérie Pécresse qui a fait des 700.000 franciliens qui cherchent d’ores et déjà du travail sa "priorité immédiate" ? Gêné, le service presse de l’élue, peu au fait de la situation, n’a d’abord pas bien su quoi répondre, avant d’affirmer que la présidente de la région Ile-de-France serait bien sûr "attentive" à ces suppressions d’emplois. Bien qu’elle n’y ait pas beaucoup prêté attention jusqu’ici malgré les bruits de couloirs toujours plus insistants. 

 

Chômage pour certains, retraite dorée pour d’autres

, sur le départ, s’apprête, lui, à quitter le groupe le 1er février avec les poches pleines. Au-delà de sa retraite dorée de 10 millions, il touchera une prime exceptionnelle de 4 millions supplémentaires. Mais l’homme a su être généreux avec ses soldats les plus dévoués, dont Jérôme Pécresse, bras droit dans l’intégration Alstom/GE, membre du comité exécutif et promu à la tête de GE Renewable, (secteur très prometteur de l’Energie Renouvelable).

Ses multiples casquettes lui permettront ainsi d’empocher, lui aussi, , une coquette somme, soit 430.000 euros d’actions gratuites auxquelles s’ajoutent selon le rapport d’activité du groupe la rémunération fixe (3.546.000 euros que se répartiront les sept membres du comité exécutif), et la rémunération variable (2.214.000 euros à diviser là encore par sept.) Sans compter leur propre retraite chapeau : 7.806.000 euros à se partager au 31 mars 2015. En tout, Jérôme Pécresse est par conséquent, à ce jour, assuré de toucher, au minimum, plus de deux millions d’euros pour ses loyaux services. Hors rémunération GE Renewable que permettra d'évaluer le prochain rapport d'activité de General Electric.

Valérie Pécresse n’est pas en reste. Dans sa déclaration de patrimoine, l’ancienne députée affirme en effet détenir, par le biais de son mari, des actions chez feu Alstom, absorbé depuis par General Electric, pour une valeur, disait-elle, "impossible à évaluer aujourd’hui."  Le calcul, tel que , n'est pourtant pas bien compliqué. 

Les milliers de salariés d’Alstom à qui GE avait promis, avant le deal en 2014, un avenir lumineux, (à l’époque les campagnes publicitaires avaient abondamment arrosé l’ensemble de la presse) iront quant à eux, pointer au chômage, et pour certains, (nombreux)... en Ile-de-France. 

 

 

 

 

Source : http://www.marianne.net

 

 

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16 janvier 2016 6 16 /01 /janvier /2016 17:16

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

Débattre Déchéance de nationalité

« Les élites politiques ne cherchent plus à susciter l’espoir mais à jouer sur la peur »

par

 

 

 

 

Incapable d’obtenir le moindre résultat en matière de lutte contre le chômage et les inégalités, le gouvernement se réfugie dans la manipulation de la peur et du repli sur soi, estime l’économiste Thomas Coutrot, porte-parole de l’association altermondialiste Attac. Car répondre au terrorisme par la déchéance de nationalité, c’est plonger dans un imaginaire où l’ennemi ne saurait être français. Il est tellement plus facile de pointer un « barbare » venu de l’étranger. « Pour en finir avec le terrorisme, faut-il éradiquer les terroristes au prix du renoncement à la liberté, à l’égalité et à la fraternité ? Ou bien faut-il prendre enfin au sérieux la devise de la République ? »

L’improbable basculement de François Hollande, de « président ordinaire » obnubilé par le chômage à « chef de guerre » implacable contre le terrorisme, est d’autant plus révélateur que le personnage semble à contre-emploi. Pathétique retour de virilisme, tout se passe comme si le chef de l’État, héritier malgré lui d’une tradition impérialiste, d’une force de frappe et d’un siège au Conseil de sécurité, ne pouvait résister à la tentation d’exhiber ses attributs militaires pour masquer une impuissance par trop criante en matière économique et sociale.

Lors de ses vœux de décembre 2012, François Hollande avait promis « d’inverser la courbe du chômage d’ici un an ». En décembre 2013, il vantait le « pacte de responsabilité » qui allait relancer la croissance, et en décembre 2014 le plan de « 315 milliards d’euros » du Président de la Commission européenne Juncker et la loi Macron qui allait « libérer les initiatives et développer l’emploi » (lire aussi : « Moi Président » : trois ans de dérégulation du droit du travail et d’augmentation du chômage).

Cette année, le ton a changé. Les attentats de 2015 l’autorisent à mettre au premier plan le terrorisme, la sécurité, l’état d’urgence, la patrie et la déchéance de nationalité pour les terroristes. Certes, mention est faite d’un « état d’urgence économique et social ». Mais la lutte contre le chômage, rituellement évoquée comme « première priorité », se réduit désormais à deux slogans : la « simplification du Code du travail » et un énième « plan massif de formation des demandeurs d’emploi ». Hormis l’évocation d’un énigmatique « programme de grands travaux pour la croissance verte » (sans financement nouveau annoncé), les marqueurs habituels du discours hollandiste - « maîtrise des déficits », « compétitivité », « emploi », « croissance » - ont disparu, comme usés d’avoir perdu tout lien avec le réel.

 

Avant le prochain krach boursier

Arrêtons-nous un instant sur les deux mesures évoquées. Les groupes du CAC 40 distribuent des profits records à leurs actionnaires, les inégalités flambent tout comme les cours boursiers – avant un prochain krach –, les banques croulent sous les liquidités déversées par la Banque centrale européenne. En même temps les investissements du secteur privé reculent et ceux du secteur public s’effondrent sous l’impact de l’austérité.

Que se passe-t-il alors dans le cerveau des économistes technocrates de Bercy ? Croient-ils véritablement pouvoir relancer l’emploi en simplifiant à nouveau les règles du licenciement ? Quand dix demandeurs pour la plupart sur-qualifiés se disputent chaque emploi, qui peut penser qu’on va réduire le chômage en formant les chômeurs ? Après trente années de chômage de masse et presque autant de « plans massifs de formation des chômeurs », chacun sait que ces plans peuvent tout au plus dégonfler la catégorie A des demandeurs d’emploi, pas entamer le chômage.

Le but réel est donc évidemment autre : comme toujours et encore, conforter la profitabilité du capital, véritable totem des politiques néolibérales depuis trente ans. En passant, ces mesures permettent comme par surcroît d’engranger un bénéfice idéologique secondaire mais non négligeable en assénant, avec le pilonnage médiatique adéquat, que le chômage provient non pas de l’avidité des détenteurs du capital mais de l’incompétence des chômeurs et des droits abusifs des salariés.

 

Assez de la « culture de l’excuse » !

La même question (« qu’ont-ils donc dans la tête ? ») se pose concernant la déchéance de nationalité. À une différence près : il ne faut pas chercher dans la tête des techniciens de la sécurité (aucun policier ne pense que cette mesure ne dissuadera un quelconque terroriste) mais dans celle des politiques. Car le bénéfice recherché, comme l’a reconnu Manuel Valls lui-même, est « hautement symbolique » : faire prévaloir la grille de lecture ethnique de la conflictualité sociale. Les « barbares » sont forcément (c’est le sens du mot en grec ancien) des étrangers. Les terroristes au passeport français ne sont donc pas de vrais Français. Pour mieux s’en convaincre, la France doit mettre en scène, jusque dans sa Constitution, ce déni de réalité.

Les contradictions et complexités à la racine du djihadisme français et international – la relégation et le mépris structurels, tolérés et parfois organisés depuis trois décennies y compris par la gauche, des immigrés et de leurs descendants, la montée mondiale de l’islam politique face notamment aux échecs de la gauche et du nationalisme arabe, l’interventionnisme militaire et la décomposition de l’ordre impérial au Moyen-Orient dans un contexte de lutte acharnée pour le contrôle des ressources pétrolières et gazières, etc... – sont donc ouvertement rejetées (assez de la « culture de l’excuse » !) au profit d’une « explication » inepte par la traîtrise ou l’inhumanité des auteurs. La patrie souillée par ces monstres doit se purifier imaginairement en les expulsant de son sein.

 

Des postures nationalistes, sécuritaires et guerrières

Point n’est besoin de sortir de Sciences Po pour constater ce jeu de vases communicants : la démission face à la précarité, aux inégalités et aux discriminations débouche sur les postures nationalistes, sécuritaires et guerrières. Les élites politiques ne cherchent plus à susciter l’espoir mais à jouer sur la peur. Dans un même mouvement vers la droite, elles s’exonèrent simultanément de toute responsabilité dans les montées du chômage, de l’insécurité et de la désespérance. Quant à la gauche de la gauche, elle s’est abîmée dans des conflits d’ambitions et d’appareils.

La question qui agite une partie de la classe politique, notamment au Parti socialiste, de savoir si la réforme constitutionnelle ne visera que les binationaux, ou permettra de déchoir n’importe quel Français, est sans doute importante : dans le premier cas, les enfants d’immigrés nés en France seront clairement désignés comme des suspects par nature. La reprise telle quelle par le couple exécutif de cette proposition du Front national signale assez son abdication de toute éthique minimale. À cet égard on peut comprendre le souci de certains, à gauche et même à droite, d’infléchir la réforme pour atténuer la stigmatisation des binationaux.

L’enjeu essentiel du débat est pourtant ailleurs : les djihadistes français, quelle que soit leur origine, sont-ils des monstres étrangers à la cité ? Ou bien nous tendent-ils le miroir hideux de la trahison par cette République de ses idéaux républicains égalitaires et solidaires ? Pour en finir avec le terrorisme, faut-il éradiquer les terroristes au prix du renoncement à la liberté, à l’égalité et à la fraternité ? Ou bien faut-il prendre enfin au sérieux la devise de la République ? Comment le faire si ce n’est en transformant profondément nos modes de vie, nos rapports à l’autre – donc aussi à l’étranger – et à la nature ? Inscrire dans la Constitution qu’un terroriste ne peut être français, c’est s’enfermer dans un monde imaginaire où les dangers ne sauraient venir que de l’étranger. C’est basculer dans le monde du Front national. Les gauches ont trahi ou failli, c’est aux mouvements sociaux de s’attacher à construire ensemble un projet désirable pour une transformation sociale radicale, démocratique et inclusive.

Thomas Coutrot

Photo : CC Gustave Deghilage

 

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16 janvier 2016 6 16 /01 /janvier /2016 16:54

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

A Marseille, faire la grève chez Sodexo, c’est risquer la porte
16 janvier 2016 | Par Rachida El Azzouzi
 
 
 

En novembre, le géant de la restauration collective licenciait dix-neuf salariés à Marseille qui avaient initié et poursuivi une grève alors qu'un accord de fin de conflit avait été signé avec les délégués du personnel. Deux mois plus tard, la direction annonce qu'elle est prête à les réintégrer s'ils abandonnent leurs procédures en justice.

«C’est une grande victoire. Après deux mois de combat, la direction centrale plie et annule les licenciements. Sur les dix-neuf licenciés, onze vont être réintégrés, il s’agit de ceux qui en ont émis le souhait. Sept autres ne veulent plus entendre parler de l’entreprise après ces événements et iront au bout de la procédure en justice ou négocieront avec l’avocat un chèque avec la direction. Quant au 19e, Yvon Caprice, qui était délégué syndical CFDT, donc salarié protégé, sa réintégration est entre les mains de l’Inspection du travail. » Délégué syndical central CGT, Gilles Sevilla a appris ce vendredi soir que la direction des ressources humaines France du groupe Sodexo annulait les licenciements de dix-neuf de ses collègues, employés de la cuisine centrale de Marseille.

C’était « la plus grosse boucherie sociale » jamais vue en quinze ans de carrière par ce syndicaliste, au sein du géant mondial coté en bourse des « services de qualité de vie » aux entreprises (la restauration collective, les tickets restaurant, l’entretien, etc.). « Un massacre », dit son collègue cégétiste Nordine Ziani. Du jour au lendemain, Sodexo a brutalement licencié quatorze chauffeurs-livreurs, quatre allotisseurs (ils préparent les tournées des livreurs - ndlr) et un cuisinier. Elle les a licenciés juste avant la trêve de Noël pour « faute lourde », sans préavis, ni indemnités, pour les remplacer par des intérimaires.

Le groupe, premier employeur privé français au monde et fleuron « made in Marseille » aux mains de la famille Bellon, l’une des plus grosses fortunes de l’Hexagone, leur reprochait « un abandon de poste », en fait, d’avoir fait grève le 25 novembre dernier. Oui, grève. Trois heures de grève très exactement. Ce droit individuel instauré en 1864, inscrit dans la Constitution en 1946.

 

Michel Landel, le patron de Sodexo, en juin 2014. © Reuters Michel Landel, le patron de Sodexo, en juin 2014. © Reuters

 

« Un dossier hallucinant, d’une violence sociale inouïe, sans précédent, où l’abandon de poste devient un subterfuge grossier pour casser le droit de grève. Sodexo se croit revenu au XIXe siècle et veut semer la terreur en interne, envoyer un message à ses milliers de salariés, ‘‘chez nous, la grève est interdite’’ », avait plaidé, en décembre dernier, leur avocat Steeve Doudet devant le tribunal des prud’hommes de Marseille saisi en référé. Il avait exigé la poursuite immédiate de leur contrat de travail et la condamnation de Sodexo pour atteinte au droit de grève. Mais le juge départiteur des prud’hommes avait renvoyé l’affaire au fond, plongeant un peu plus dans la détresse « les licenciés » et leurs familles, en reportant à plusieurs mois, plusieurs années, l’examen par la justice de leur dossier.

Déchus de leur emploi, de leur gagne-pain, chacun d’eux vécut les fêtes de fin d’année, replié sur lui-même et son drame, « sans sous, ni cadeaux, ni extras ». « Comme un cauchemar éveillé dont on ne sort pas », confiait Stéphane, 45 ans, dont quinze chez Sodexo, un jour où il rentrait, abattu, de Pôle Emploi. Il venait de passer des heures dans la file d’attente pour s’inscrire, en luttant contre les larmes parce qu’« un homme, ça ne doit pas pleurer ».

Stéphane allait « très mal ». La nuit, il se levait pour relire « la lettre recommandée » : « Nous vous notifions par le présent courrier votre licenciement pour faute lourde (...) Vous avez commis un abandon de poste (...) Veuillez recevoir nos salutations distinguées (…). » Il « tenait le coup grâce à des médocs, à la solidarité entre ‘‘virés’’, au soutien de la CGT » et à sa femme, cantinière dans les écoles de Marseille qu’il se maudissait d’« avoir foutue dans la merde ». Sans elle, il aurait « fait une connerie ». Le couple a acheté un petit appartement il y a un an, s’engageant dans un crédit immobilier conséquent sur vingt ans : « On doit débourser 800 euros par mois, comment on va faire si je ne retrouve pas de boulot ? » Stéphane ne savait plus « s’il était fier ou pas d’avoir fait grève » : « J’étais fier mais maintenant, cette fierté, cette grève, même si c’est un droit, me coûte mon emploi et m’empêche de nourrir les miens. »

C’était la deuxième grève de sa carrière. La première remonte à plusieurs années. La trentaine, il était déjà livreur, en CDII, en contrat à durée indéterminée intermittent, pour un autre prestataire que Sodexo qui détenait alors le marché de la cuisine centrale de Marseille. « C’était un patron humain, on avait demandé une revalorisation des salaires et la requalification des CDII en CDI, il avait accepté et on avait tous rapidement repris le travail. » Stéphane, jamais syndiqué, avait espéré la même issue avec Sodexo. Il a découvert « un autre monde » et a dû quitter l’entreprise précipitamment sans se retourner, une vraie mort à soi. « Ils ne m’ont même pas laissé y retourner vider mon casier. » Et récupérer ce cadenas que lui avait transmis « comme un relais » son défunt père, ravitailleur chez Elf à Marignane : « C’était le dernier truc qu’il me restait de lui »…

La CGT Sodexo, appuyée par les unions locales et départementale CGT des Bouches-du-Rhône, avait érigé leur « tragédie » en étendard de la répression patronale à l’œuvre dans les entreprises, cette violence quotidienne, tue, invisible, qui frappe des milliers de salariés, syndiqués ou non, ceux qui se lèvent pour défendre leurs droits, refusant de raser les murs. Elle avait décidé de hausser le ton et de frapper un grand coup dans les prochains jours en lançant plusieurs actions.

Mardi 19 janvier, elle devait bloquer la cuisine centrale de Marseille qui livre 55 000 repas dans les cantines scolaires et le siège de la Société générale à la Défense en région parisienne, entreprise que Sodexo espère reconquérir, son contrat avec elle s’achevant cette année. Mardi 26 janvier, elle comptait s’inviter à l’assemblée générale de Sodexo dans le poumon vert du bois de Boulogne à Paris dans le restaurant étoilé de Frédéric Anton, le Pré Catalan, où Bellon Père doit transmettre à Bellon Fille le flambeau de la petite entreprise familiale, devenue soixante ans après sa création, multinationale à dividendes sonnants et trébuchants.

Tout a commencé le 16 novembre dernier. Un banal conflit social comme il en survient tous les jours dans le monde du travail. La vingtaine de chauffeurs-livreurs de Sodexo, qui livre les repas dans les écoles de Marseille, menace la direction Sodexo Education Provence-Alpes-Côte d’Azur d’une grève du service logistique le 23 novembre si un dialogue social n’est pas rapidement ouvert. Devant l’insolente bonne santé du groupe, qui affiche en 2015 des résultats meilleurs que ceux attendus (760 millions de bénéfices net), ils réclament, en dehors de tout mot d’ordre syndical, des miettes du gâteau, une augmentation de leurs « salaires de smicards » bloqués (0 % d’augmentation en 2013, 0,4 % en 2014, 0,6 % en 2015), 200 euros précisément. « À chaque NAO (négociations annuelles obligatoires), la direction nous répète que ce n’est pas possible à cause de la conjoncture mondiale alors que le groupe ne s’est jamais aussi bien porté financièrement malgré la crise », fustige Christian Balaki, un des rares syndiqués (à la CGT), bientôt 60 ans dont 38 à livrer les cantines scolaires marseillaises pour 1 400 euros net hors primes d’ancienneté.

Autres revendications : des embauches — « on livre à 23, 55 000 repas par jour, dans des camions surchargés (trois tonnes alors que la charge maximale est de 635 kilos) » — et la requalification des derniers CDII en CDI. Les CDII sont une sorte de contrat à temps partiel annualisé où le salarié alterne périodes travaillées et non travaillées, et voit sa rémunération « lissée » sur l’année. « C’est un contrat pire qu’un CDD pour lequel est au moins prévue une prime de précarité ou qu’un contrat saisonnier qui permet au moins de percevoir des allocations chômage quand on ne travaille pas, ce qui n’est pas le cas pour un CDII », explique Charles Hoareau, figure de la lutte et de l’union CGT des Bouches-du-Rhône qui va découvrir ce conflit social « trop tard lorsqu’ils seront virés ».

« On aurait pu passer un joyeux Noël en réglant cela par le dialogue social »

Le 17 novembre, les autres services (cuisine centrale, magasins, administratifs, production, maintenance), soit quelque 130 salariés, emboîtent le pas de la logistique et approuvent une grève générale à durée indéterminée à compter du lundi 23 novembre, 5 heures du matin. La direction ne réagit pas. « Ce n’est que le 23, jour annoncé de grève générale, qu’elle se manifeste. Mais les repas avaient été préparés. Alors on a été gentils, responsables, on a tous accepté de reporter la grève au lendemain, mardi, pour que la nourriture soit livrée dans les écoles et pas gaspillée », raconte un des grévistes.

Au soir de la grève, le mardi 24 novembre, la direction se décide à réunir les délégués du personnel (DP), consciente de l’insuffisance des stocks de secours pour traverser la crise et du risque de priver de repas les enfants des cantines de Marseille, un marché attribué par la municipalité qu’elle a arraché en 2011. Un protocole de fin de conflit est signé dans la foulée par sept des huit délégués du personnel CGT, CFDT et FO. Sodexo lâche du lest, notamment une augmentation du salaire de base entre 60 et 100 euros net selon les grilles et les anciennetés. Mais dans les rangs de la logistique à l’origine du mouvement de grève, l’accord, qui prévoit une augmentation de 80 euros net pour quatorze chauffeurs-livreurs et de 60 euros pour les autres, ne passe pas.

La logistique veut 200 euros d’augmentation, pas moins. Elle envoie son délégué CFDT Yvon Caprice, qui avait déserté les négociations étant en désaccord, le redire haut et fort à Éric Gardet, le directeur régional de Sodexo Education PACA, le prévenir aussi qu’en conséquence, le service poursuivra la grève le mercredi 25 novembre. Ce dernier avait déjà mis un coup de pression au délégué syndical.

« Gardet était venu me voir pour me convaincre de signer le protocole de fin de conflit pour les autres services malgré mon désaccord, que ça ne changerait rien au mouvement de grève de la logistique. Naïvement, je lui ai fait confiance. J’ai signé pour les autres en lui expliquant que nous, à la logistique, nous allions continuer la grève parce que nous n’avions pas obtenu gain de cause, 200 euros d’augmentation, sauf que je l’ai fait oralement, pas par écrit, et c’est ce que la direction nous reprochera. Elle estime que le protocole de fin de conflit a mis fin de fait à la grève et qu’on devait coucher sur un papier nos revendications », témoigne Yvon Caprice qui signe l’accord de fin de conflit mais demeure gréviste.

Lâché par sa centrale et ses pairs de la CFDT pour avoir osé continuer la grève, il démissionne de son syndicat quand sa vie, ainsi que celle de ses collègues, bascule le 25 novembre au matin. À sept heures du matin, lors d’une assemblée générale dans leur local de la cuisine centrale, les 23 chauffeurs-livreurs votent à l’unanimité la poursuite de la grève. Trois heures plus tard, à 11 h 16, un huissier, mandaté par la direction, vient constater qu’ils ne travaillent pas.

Mais nulle part, il consigne dans son procès-verbal qu’ils sont grévistes alors que les salariés le lui martèlent. « Nous considérons que vous êtes en abandon de poste… Nous vous informons qu’un courrier recommandé va vous être adressé allant jusqu’au licenciement… Vous êtes mis à pied à titre conservatoire… Vous devez quitter les locaux de l’entreprise sur-le-champ… » C’est le choc, la sidération... Et le début du cauchemar. D’abord les entretiens préalables au licenciement auxquels la plupart des salariés ne se rendront pas (ndlr : à l'exception de quatre d’entre eux qui ont été repris à condition de se désolidariser du mouvement) puis les lettres de licenciement dans la boîte aux lettres dix jours avant Noël…

En France, dans le privé, débrayer, ce n’est pas compliqué. Nul besoin d’être syndiqué, ni de prévenir à l’avance les patrons contrairement aux salariés du public qui doivent manifester leurs intentions 48 heures à l’avance et les syndicats lancer un préavis au moins cinq jours avant le mouvement. Il suffit d’être deux dans l’entreprise ou seul si son mouvement s'inscrit dans une grève nationale. C’est un droit fondamental, individuel, inscrit dans le préambule de la Constitution de la Ve République. Et les salariés sont protégés par le Code du travail (article L2511-1).

Mais, visiblement, cela déplaît à Sodexo qui, à la grande surprise des « licenciés », est revenu en arrière, ce vendredi 15 janvier. « Sous la pression syndicale et un peu médiatique car son image sociale a pris un sacré coup et qu’on ne comptait pas lâcher la lutte », pense Gilles Sevilla. Le délégué central CGT Sodexo a passé les dernières 48 heures à négocier directement avec le DRH France Christian Lurson descendu de Paris : « C’est grâce à lui si on a trouvé une issue au conflit, pas à la direction régionale. »

« C’est une bonne nouvelle mais on aurait pu passer un joyeux Noël en réglant cela par le dialogue social », réagit Yvon Caprice. Le délégué CFDT démissionnaire va rejoindre « certainement la CGT ». Salarié protégé, il attend la décision de l’Inspection du travail qui doit statuer d’ici le 10 février sur sa réintégration ou pas dans l’entreprise. Il a « bon espoir » mais se sait dans le viseur de sa direction : « Sodexo préférera me faire une proposition financière plutôt que me voir revenir. » Père de famille, enfant de La Castellane, il a grandi dans la misère et ne la craint plus à 45 ans. « Ce qui m’empêche de dormir, c’est de savoir mes collègues à la porte. Ils avaient une vie tranquille et se retrouvent au chômage pour une grève. »

« On licencie puis on reprend. C’est incompréhensible. La crise aurait pu se régler en novembre en dix minutes. Des familles et leurs gosses ont été anéantis à l’heure des fêtes de fin d’année par une procédure infâme parce que leur père, leur mari avait fait grève », renchérit Christian Balaki. Le plus ancien des chauffeurs-livreurs, 38 ans de maison, « zéro arrêt maladie, jours d’absence », se dit « détruit » d’avoir été « jeté comme un malpropre ». 

Il ne reprendra pas le chemin de Sodexo. « J’ai 60 ans, plus que quelques années à travailler, soit je négocie un chèque acceptable avec eux, soit je vais au bout de la procédure en justice », annonce-t-il. Fils d’immigrés tunisiens d’une fratrie de huit, il aurait voulu faire des études mais il a dû travailler tôt pour subvenir aux besoins de la famille et il n’imaginait pas finir sa carrière ainsi. Il « ne comprend plus la France », « ce pays qui redouble de violence avec les faibles, où l’ouvrier finit en taule ou est licencié parce qu’il défend son emploi ».

 

 

 

Source : https://www.mediapart.fr

 

 

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14 janvier 2016 4 14 /01 /janvier /2016 20:55

 

Source : http://www.franceculture.fr

 

 

le vendredi de 7h35 à 7h39 Durée moyenne : 3 minutes

 
Ecoutez l'émission 4 minutes

Etat d'urgence : l'opposition citoyenne s'organise 

08.01.2016 - 07:35

 

 

 

 

 

 

Un "Comité de vigilance citoyenne" a vu le jour cette semaine. Objectif : permettre aux citoyens de faire émerger un débat sur l'état d'urgence et à la réforme constitutionnelle annoncée, Alors qu'une partie de la société civile s'inquiète d'une dérive sécuritaire, elle organise l'opposition à travers des collectifs et rassemblements.

Par Catherine Petillon, avec vos réactions.

 

Manifestation contre l'état d'urgence © maxppp

 

Ils sont peu audibles, et pourtant de nombreux citoyens s'inquiètent des mesures d'exception mises en place depuis les attentats, et des changements d'équilibre des pouvoirs qui pourraient leur succéder. Alors que la déchéance de nationalité occupait les débats cette semaine, l'état d'urgence continue.
Et ce qui se joue dans les prochains jours, c'est l'arsenal juridique que l'exécutif  prépare, pour prendre la suite de l'état d'urgence. Le projet de constitutionnalisation doit être discuté à l’Assemblée nationale à partir du 3 février. Et le 26, les députés devront décider de la prolongation ou de la fin de l’état d’urgence. Un vote qui interviendrait alors que le projet de loi antiterroriste, dont  Le Monde a publié les premiers contours, prévoit un renforcement des pouvoirs du parquet, de la police et des préfets.
Rappelons que l’état d’urgence permet notamment au gouvernement de mener des perquisitions sans mandat du juge, y compris la nuit, d’interdire les rassemblements pouvant troubler l’ordre public ou encore d’assigner des personnes à résidence.

 

Visite de François Hollande aux forces de sécurité le 31 décembre 2015
Michel Euler © POOL/EPA/MaxPPP

 

L’exécutif met régulièrement en avant une opinion publique favorable et sécurisée par des mesures. Il faut dire que la  plupart des instituts de sondage dresse le constat d’un fort soutien aux mesures prises depuis le mois de novembre. « Quand on interroge les personnes spontanément, le mot « exception » - qui peut sous -entendre un débat - n’apparaît absolument pas  pour qualifier les mesures prises (...) Cela s'explique en partie par le contexte d’émotion lié aux attentats, et continué par cette période de commémoration de Charlie Hebdo », estime Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop :

 

« Juges et citoyens avons une responsabilité collective »

 

Perquisition administrative à Carcassonne C. Boyer © L'INDEPENDANT/Maxppp

 

Pourtant, toute une partie de la société civile s’inquiète de la modification de l'équilibre des pouvoirs qui a suivi l’horreur des attentats.

Dès le mois de décembre, une centaine d’associations - de la Ligue des droits de l’homme à Emmaüs en passant par la CGT -  se sont rassemblées dans le collectif “Nous ne céderons pas”. Ils ont depuis lancé des appels à "sortir de l’état d’urgence".

 

Mais l'opposition aux nouvelles mesures législatives et la crainte d'une dérive sécuritaire ne se limite pas aux traditionnels défenseurs des libertés.

 

Dans une tribune publiée par Mediapart le 29 décembre dernier, ce sont des juges administratifs qui s’inquiétaient du "risque réel d'instaurer durablement une réponse dont nous n'aurons pas mesuré les conséquences". 
"Juges et citoyens avons une responsabilité collective", nous explique l'une d'entre elles, anonymement, devoir de réserve oblige.

Les lois qui sont prises en ce moment ont un effet durables. On cherchait jusqu'à présent à avoir un équilibre entre ordre public et libertés publiques et là les libertés publiques deviennent vraiment secondaires. En outre, on nuit trop à ces libertés car potentiellement tout individu pourrait être considéré comme suspect. Il faut vraiment que les gens le sachent.

Un certain nombre de juges remettent d'ailleurs en cause les mesures déjà prises, comme le rapportait Le Monde dans un article intitulé "le réveil des tribunaux administratifs".

Des libertés diminuées ?

 

« Ils ont produit très peu de choses pouvant être liées au terrorisme mais ils ont traumatisé des citoyens et laissé une dévastation dans leur sillage. La majorité de ces raids ont visé des maisons, des entreprises, des mosquées et des salles de prière musulmanes." C'est dans ces termes que le New York Times décrivait la mise en oeuvre de l'état d'urgence dans son édito du 4 janvier, titré  « Les libertés diminuées de la France ». 

 

Appel à la "grève citoyenne" le 3 février

 

C'est cette urgence qui a poussé un certains nombres d'associations et collectifs à se rassembler. «  Nous instituons officiellement un Comité de vigilance citoyenne » Mercredi dernier, dans une théâtre du XIXè arrondissement, a pris corps un collectif éclectique, regroupant artistes, avocats, universitaires, membre de la Convention pour la 6è République. 

S. Tessier, fondatrice d'Anticor et J.Karsenti, avocat C.P. © Radio France

 

 

 

Séverine Tessier de l'association de lutte contre la corruption Anticor, est l'une des initiatrices de cet appel à "combattre le terrorisme tout en respectant les droits fondamentaux"

 

Ce conseil appelle à une grève citoyenne le 3 février. C'est ce jour-là que les députés commenceront l'examen de la constitutionnalisation de l'état d'urgence.

 

« L’état d’urgence a été le déclencheur de notre urgence à nous, urgence de se réunir, urgence de faire quelque chose, d’alerter.  L’enjeu, c’est comment on passe d’une revendication militante à une revendication citoyenne. La question des libertés est toujours difficile car le citoyen ordinaire s’imagine irréprochable », souligne Jérôme Karsenti. Pour l’avocat – qui a notamment défendu l’association Anticor- la réforme constitutionnelle annoncée montre qu’un changement des institutions est possible. Il fait partie de ceux qui réclament une modification qui laisse plus de place aux citoyens.

 

Les citoyens, "seule force d'opposition"

 

« Un sondage avec une questions posée à quelques centaines de personnes qui n’ont jamais réfléchi avant à la déchéance de nationalité, ca n’a aucun sens”, ne décolère pas Isabelle Attard. Elle est l’une des six députés à n'avoir pas voté la prolongation de l'état d'urgence. Si cette parlementaire membre du groupe écologiste a rejoint le collectif, c'est qu'elle estime que dans la situation actuelle, c'est sur les citoyens qu'il faut compter pour faire émerger un débat. "Ils représentent aujourd’hui la seule opposition réelle », insiste-t-elle.

 

 

Isabelle Attard, députée, et Sophie Wahnich, historienne, lors du lancement du Comité de vigilance citoyenne C.P. Radio France

 

Sophie Wahnich directrice de recherche au CNRS, historienne des émotions et spécialiste de la Révolution, fait partie des universitaires qui ont signé des tribunes, (comme dans L'Humanité ou Libération), contre l'état d'urgence. Mais pour elle, la situation actuelle, oblige à davantage.

 

La vigilance ne suffit pas. Pétitionner c’est témoigner. Mais témoigner c’est pour l’histoire, pas pour le présent immédiat : ce n’est pas parce qu’on témoigne que cela produit de l’action politique . Il faut passer du refus à l’action et  inventer les formes de l’action et les imaginaires sociaux contemporains pour refonder la politique 

 

 

 

« Nous sommes dans une double situation extreme :  le terrorisme auquel répond une situation extrême me de réponse institutionnelle. La société elle-même est acculée à répondre sur un mode à la hauteur de la situation historique. », estime Sophie Wahnich. L'urgence crée un effet levier : « Tout ce qui était latent peut devenir plus émergent et peut fonder un moment démocratique." Pour l'historienne, à la tête d'un collectif de revues, Tenons et mortaises, cela passera par "la capacité à politiser les institutions civiles qui se sont constituées depuis une quinzaines d’années et qui sont à la bordure du culturel et du politique » - les cafés citoyens, certaines universités populaires, les goupes d’éducation populaire comme les Crefad, des lieux culturels comme Les laboratoires d’Aubervilliers....

Le manifeste du Conseil d'urgence citoyenne

 

 

Et vos réactions sur les réseaux sociaux

A voir ici

 
 

Lien(s)

Etat d’urgence : « de graves violations des droits humains sont allégrement envisagées ». Le MondePar Gilbert Achcar, professeur à l’Ecole des études orientales et africaines (SOAS, université de Londres), le 26 novembre.

Lois d'urgence : Faut-il s'asseoir sur les libertés au nom de l'anti-terrorisme ?Par Vincent Bénard, le 28 novembre.

 

 

Source : http://www.franceculture.fr

 

 

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14 janvier 2016 4 14 /01 /janvier /2016 20:11

 

 

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

 

Santé publique

« À Bruxelles, la vie des personnes est moins prioritaire que la bonne santé de l’industrie chimique »

par

 

 

 

L’Union européenne n’a toujours pas réglementé l’usage des perturbateurs endocriniens, ces substances chimiques aux effets sanitaires colossaux utilisées dans de très nombreux produits de consommation courante. Malformations, cancers, obésité... Les perturbateurs endocriniens sont pourtant à la source de bien des maux. Ce retard, qui vient d’être condamné par la justice européenne, ne doit rien au hasard. Les industries de la chimie, des pesticides ou du plastique pratiquent un lobbying intensif, et entravent toute avancée sérieuse. La journaliste Stéphane Horel a décrypté dans un ouvrage intitulé Intoxication ce lobbying et ces objectifs. Entretien.

 

Basta ! : Votre enquête porte sur la réglementation des perturbateurs endocriniens, ces substances chimiques omniprésentes dans notre quotidien, et suspectées de participer à l’explosion des maladies modernes. Où en est-on sur ce sujet ?

Stéphane Horel  [1] : Les perturbateurs endocriniens (PE) sont des substances chimiques qui peuvent interagir avec le système hormonal (endocrinien veut dire hormonal). Ces substances agissent sur les humains mais aussi sur les animaux, comme les ours polaires, les chatons, les escargots. Plusieurs catégories d’êtres vivants sont ainsi touchées. C’est l’exposition du fœtus pendant la grossesse qui présente le plus grand risque, même si l’exposition reste problématique à d’autres périodes de la vie. La vie in utero est vraiment un moment crucial, puisque ce sont les hormones qui fabriquent les bébés. Les effets d’une exposition à ce moment-là peuvent se voir à la naissance, avec par exemple des malformations génitales ; mais aussi dix, vingt ou trente ans plus tard. Avec l’apparition de cancers, de diabètes, de problèmes d’obésité ou d’infertilité.

Les perturbateurs endocriniens sont présents dans des milliers d’objets de la vie courante : des tongs aux rideaux de douche, en passant par les canapés et les jouets mais aussi les poches à sang et les cathéters. La plupart de ces produits ont une vraie utilité : les phtalates, par exemple, sont des PE qui assouplissent le plastique. Et le bisphénol A, qui est l’un des PE les plus connus, permet de fabriquer un vernis que l’on met à l’intérieur des boîtes de conserves et qui ralentit la corrosion du métal. Pour le moment, on n’a trouvé aucun équivalent qui soit aussi efficace dans la durée. Il est impossible de faire l’inventaire des endroits dans lesquels on trouve des PE. Tous les secteurs de l’industrie sont concernés. Le sang, le lait maternel, l’air, la poussière, la pluie : les PE sont présents partout ! On estime qu’il y en a environ 1000 en circulation dans le monde, mais c’est peut-être beaucoup plus.

 

Une réglementation européenne est en cours d’élaboration, mais les scientifiques ont alerté sur le problème des perturbateurs endocriniens il y a près de vingt-cinq ans ! Pourquoi un tel délai ?

Le moment scientifique Eurêka pour les PE, c’est 1991. Cette année-là une vingtaine de scientifiques (toxicologues, zoologistes, biologistes, endocrinologues...) se réunissent dans une petite ville du Wisconsin, aux États-Unis. Au terme d’un séminaire de trois jours, ces scientifiques rédigent ce que l’on appellera la déclaration de Wingspread, du nom du centre de conférence où s’est tenu le séminaire. Cette déclaration s’alarme des effets des altérations du développement induites par les produits chimiques. Les scientifiques insistent sur les risques encourus suite à des expositions in utero. Et ils remettent en question l’équation toxicologique qui disait que la dose fait le poison. Pour les PE, c’est plutôt le moment qui fait le poison. La déclaration de Wingspread prévient aussi : « À moins que la contamination de l’environnement par les perturbateurs hormonaux [ne] soit rapidement contrôlée et réduite, des dysfonctionnements généralisés à l’échelle de la population sont possibles. »

Depuis, il y a eu des milliers de publications scientifiques qui montrent que ces produits posent problème. Il y a maintenant un consensus sur leur dangerosité. En 2013, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié un rapport. Réalisé par une vingtaine de scientifiques du monde entier, tous spécialistes des PE, ce rapport insiste sur le fait que les PE représentent « une menace mondiale ». En 2009, puis en 2015, la société savante Endocrine Society dit la même chose. Il y a quelques semaines, c’est la Fédération internationale des gynécologues obstétriciens qui a appelé à réglementer les PE, évoquant les bébés qui naissent tous « pré-pollués ».

 

Quelles sont les industries qui utilisent des PE et qui organisent le lobbying visant à court-circuiter le projet européen de réglementation ?

Elles sont, du fait de l’abondance du recours aux PE, très nombreuses. Au moment de faire du lobbying, les industriels se regroupent. D’abord dans le lobby de la chimie (ou CEFIC), qui est l’un des plus puissants de Bruxelles, avec 150 employés et un budget de 40 millions d’euros. Ce lobby réunit des PME mais surtout des grosses multinationales, comme BASF, Syngenta, Bayer, Dow ou DuPont [2]. Nous avons aussi le lobby des pesticides (ECPA, qui fait par ailleurs partie du CEFIC), des industries qui sont en première ligne s’il y a réglementation des PE. Il y a enfin l’industrie du plastique, et, dans une moindre mesure, Cosmetics Europe).

 

Parmi les manœuvres utilisées par ces lobbies pour contrer toute réglementation, retrouve-t-on la stratégie du doute et du déni, inventée par le lobby du tabac ?

Effectivement. Pour les perturbateurs endocriniens, le premier moment de ce qu’on appelle « la manufacture du doute » a lieu en 2012, suite à la sortie du Rapport sur l’état de la science sur les perturbateurs endocriniens. Commandé par la Commission européenne, c’est un état de la science réalisé par l’équipe du Professeur Andreas Kortenkamp, l’un des plus grands spécialistes mondiaux des perturbateurs endocriniens, indépendant des industriels. Ce rapport conclut que « les perturbateurs endocriniens justifient une considération à la hauteur de substances aussi préoccupantes que les cancérogènes, les mutagènes et les toxiques pour la reproduction, ainsi que les produits persistants, bioaccumulables et toxiques ».

Leur rapport a aussitôt été attaqué dans la littérature scientifique. Mais cette critique a été financée par le lobby américain de la chimie. Elle a été écrite par deux salariés d’une société de consultants spécialisés, Gradient Corp, qui travaille au seul service des industriels ; et par des scientifiques qui travaillent tous avec l’industrie de la chimie et des pesticides. Les reproches sont essentiellement méthodologiques. Les auteurs chicanent sur des omissions de référence, des choix de vocabulaire, ils ergotent sur des détails. C’est une véritable opération de « science washing » qui vise à donner l’illusion qu’il y a une controverse scientifique. C’est en effet plus présentable que d’aborder directement l’impact sur les entreprises. L’industrie des pesticides a par ailleurs essayé de décrédibiliser Andreas Kortenkamp en envoyant des mails à la Commission, suite à des propos qu’il avait tenus dans la presse britannique.

 

Que proposent les industriels pour répondre au vaste problème de santé public créé par leurs produits ?

L’industrie chimique a mis au point une astuce : il faudrait s’occuper des produits dont les effets sont les plus puissants. Cela revient à écrémer : on enlève les soi-disant plus dangereux et on laisse tous les autres en liberté. Mais cela n’a aucun sens scientifique puisque les PE peuvent agir à très faible dose. Leur toxicité est telle qu’on ne peut pas prétendre qu’il y a une dose en deçà de laquelle ils ne sont pas dangereux. De plus, on est exposés à des dizaines de PE simultanément. Une étude aux États-Unis a montré qu’il y en a en moyenne 43 dans chaque femme enceinte. 43 ! Quel est le résultat de ces cocktails d’exposition ?

C’est notamment pour ces raisons que l’idée de « puissance » n’a absolument aucun sens. Ce qui n’empêche pas la Commission de la considérer comme une question valable, soumise à son examen ! La direction générale de l’environnement de la Commission, à qui avait été confié le travail préalable de définition des PE, l’avait pourtant éliminée au terme de quatre ans de travail. Cela révèle un grave dysfonctionnement de l’Europe. On piétine quatre ans de travail simplement parce que les conclusions déplaisent à l’industrie.

 

En plus de jeter le doute sur les études scientifiques indépendantes, les industriels s’attaquent au principe de précaution...

En Europe, le principe de précaution est inscrit dans les textes et il a valeur de loi, même s’il n’existe pas de définition précise. Pour les négociations TAFTA, c’est un principe qui fait barrière à certains engagements, au niveau de la réglementation chimique notamment. C’est un peu notre seul joker éthique contre le libre marché tout puissant. Et c’est la raison pour laquelle les industriels américains sont bien décidés à le faire disparaître à l’occasion de ces négociations. Un think tank financé par les industriels du tabac, de la chimie, des pesticides, ainsi que des pétroliers tente de le faire remplacer par un « principe d’innovation ». En France, le principe de précaution est inscrit dans la Charte constitutionnelle de l’environnement, et il y a aussi eu des tentatives de suppression. En octobre 2014, le député UMP Eric Woerth avait déposé une proposition de loi pour son remplacement par « un principe d’innovation responsable ». Savait-il que cette idée venait d’un obscur think tank fondé et animé par le fabricant des Lucky Strike ?

Un an plus tôt, une lettre signée de 56 scientifiques du monde entier est envoyée à Anne Glover, la conseillère scientifique principale du président de la Commission de l’époque José Manuel Barroso. Dans ce courrier, les scientifiques se plaignent des critères retenus par la direction générale (DG) de l’environnement de la Commission pour décrire les PE. Ils regrettent notamment l’approche de précaution. Ce courrier, doublé par la publication d’éditoriaux dans une quinzaine de revues scientifiques, est plein d’approximations. Mais il servira quand même d’alibi à la Commission pour arrêter le processus de réglementation des PE en cours. J’ai documenté que la grande majorité des scientifiques qui ont rédigé cette lettre sont liés à l’industrie.

 

Pourquoi les décideurs sont-ils si réceptifs à ce lobbying ?

Il est très choquant de constater que les lobbies rencontrent une telle adhésion du côté des décideurs. Plusieurs facteurs l’expliquent. À Bruxelles, nous sommes dans un rapport de force où les intérêts publics sont en minorité. L’écrasante majorité des représentants d’intérêts sont ceux des intérêts commerciaux. Le dialogue avec les « parties prenantes », c’est-à-dire les industriels, remplace le débat démocratique. Il y a une proximité très importante entre le monde des décideurs politiques et le monde des affaires. En plus, Bruxelles permet une vraie proximité géographique. Tout le monde travaille au même endroit et se croise au quotidien dans la bulle bruxelloise. Il y a également un manque de formation sidérant. Les ressorts du lobbying sont maintenant connus, et très documentés. Mais les fonctionnaires et les élus européens n’y sont pas du tout formés.

Dans les institutions publiques européennes, il existe une grande confusion entre l’intérêt général et l’intérêt des grandes entreprises. Pour justifier le retard de deux ans qu’elle a pris sur son obligation de réglementation des PE, la Commission mène une étude d’impact : celle-ci mesure les effets négatifs d’une interdiction des PE sur l’économie et les entreprises, mais pas les effets positifs d’une telle interdiction sur la santé et l’environnement ! La vie des personnes est devenue moins prioritaire que la bonne santé des entreprises.

Propos recueillis par Nolwenn Weiler

Photo : CC Jacques Lebleu

Intoxication. Perturbateurs endocriniens, lobbyistes et eurocrates : une bataille d’influence contre la santé, de Stéphane Horel, publié aux éditions La Découverte, 19 euros.

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