Si on se contente de lister les sauvetages intervenus depuis 2012, on peut mentionner : Dexia en Belgique et en France (2012, 3e sauvetage), Bankia en Espagne (2012), Espirito Santo (2014) et Banif (2015) au Portugal, Laïki et Bank of Cyprus à Chypre (2013), Monte dei Paschi, Banca delle Marche, Banca Popolare dell’Etruria e del Lazio, Carife en Italie (2014-2015), NKBM en Slovénie (2012), SNS Reaal aux Pays-Bas (2013), Hypo Alpe Adria en Autriche (2014-2015), n’en sont que quelques exemples. Le plus grave est que les pouvoirs publics ont décidé de couvrir les exactions de ces banques en faisant supporter les conséquences des agissements coupables des dirigeants et des actionnaires par la population. La séparation des banques des banques de dépôt et des banques d’affaires reste toujours un vœu pieux. La soi-disant réforme bancaire engagée en France en 2012 par Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, n’aura été qu’une fumisterie. Interrogé le 30 janvier 2013 par Karine Berger, rapporteur de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires pour savoir quelle est la part des activités spéculatives concernée par la loi, Frédéric Oudéa, PDG de la Société Générale, déclarait : « Cela représente entre 3 et 5 % de nos activités de BFI, qui représentent elles-mêmes 15 % des revenus totaux de la banque. » Ce qui fait entre 0,5 % et 0,75 % des revenus totaux de la banque. En ce qui concerne les rémunérations des banquiers, le plafonnement de la part variable décidé par le Parlement européen le 16 avril 2013 a eu pour conséquence immédiate… l’augmentation de la part fixe des rémunérations et le recours à une disposition dérogatoire prévue par la loi. Enfin, pour ce qui est du financement de l’économie réelle, les efforts déployés jusqu’à aujourd’hui par les banques centrales, la BCE en particulier, se sont révéler impuissants à enclencher un moindre début de reprise de l’économie.
Parce que nous pensons, notamment à la lumière de l’expérience grecque, que les banques sont un enjeu essentiel à tout projet de changement social, nous proposons ci-dessous les mesures immédiates à prendre pour atteindre les six objectifs suivants :
- 1. Restructurer le secteur bancaire
- 2. Eradiquer la spéculation
- 3. Mettre fin au secret bancaire
- 4. Réguler le secteur bancaire
- 5. Financer autrement les dépenses publiques
- 6. Renforcer les banques publiques
Dans une seconde partie, nous développons nos arguments en faveur de la socialisation du secteur bancaire.
I. MESURES IMMEDIATES
1. Restructurer le secteur bancaire
Réduire radicalement la taille des banques afin de supprimer le risque « trop grande pour faire faillite » que représentent les banques systémiques |1|.
Séparer les banques de dépôt et les banques d’affaires. Les banques de dépôt seront les seules institutions financières autorisées à collecter des dépôts auprès des épargnants et à bénéficier d’un soutien public (garantie publique des dépôts d’épargne et accès à la liquidité de la Banque centrale). Ces banques de dépôt ne seront autorisées à octroyer des prêts qu’aux particuliers, aux entreprises et aux acteurs publics locaux et nationaux. Il leur sera interdit de mener des activités sur les marchés financiers. Cela veut dire qu’il leur sera interdit de faire de la titrisation : les crédits ne peuvent pas être transformés en titres négociables et les banques de dépôt doivent conserver dans leurs livres de compte jusqu’à leur remboursement définitif les crédits qu’elles ont consentis. La banque qui a consenti un crédit doit en porter le risque.
Les banques d’affaires ne doivent bénéficier d’aucune garantie publique, en cas de faillite les pertes seront intégralement assumées par le secteur privé, à commencer par les actionnaires (sur l’ensemble de leur patrimoine, voir plus bas).
Interdire les relations de crédit entre banques de dépôt et banques d’affaire. D’accord avec Frédéric Lordon pour imposer un véritable ’apartheid’ entre banque de dépôt et banque d’affaires, une banque de dépôt ne pourra en aucun cas être impliquée dans une relation de crédit avec une banque d’affaires |2|.
2. Eradiquer la spéculation
Interdire la spéculation. Comme le propose Paul Jorion, il faut interdire la spéculation. « En France la spéculation a été autorisée en 1885, en Belgique en 1867. La spéculation était d’ailleurs définie très clairement par la loi qui visait à « interdire les paris à la hausse ou à la baisse sur des titres financiers ». Avec une telle interdiction, les gens qui la pratiquent seraient en infraction ; qu’ils se trouvent dans une banque X ou Y, cela ne changerait rien » |3|. On peut ajouter que les banques qui spéculent pour le compte de clients ou pour leur propre compte seront condamnées.
L’acquisition par une banque ou une autre institution financière d’un bien matériel (matières premières, aliments, terres, immeubles…) ou d’un titre financier (actions, obligations ou tout autre titre financier) dans le but de spéculer sur son prix sera interdite.
Interdire les produits dérivés. Cela signifie que les banques et autres institutions financières qui veulent se couvrir contre les risques de différents types (risques de change, de taux d’intérêt, de défaut de paiement…), doivent revenir à des contrats d’assurance classiques.
Obliger les banques d’affaire à demander une autorisation préalable de mise sur le marché de produits financiers. Tout produit financier nouveau (les produits dérivés ne sont pas concernés ici puisqu’ils sont interdits) devra être soumis aux autorités de contrôle par les banques d’affaires afin d’obtenir une autorisation avant d’être mis sur le marché.
Séparer les activités de conseil et les activités de marché. D’accord également avec l’économiste belge Eric de Keuleneer qui propose de séparer les activités de conseil et les activités de marché : « Il est en effet anormal que des banques prennent des risques de placement de titres, et conseillent leurs clients quant à la qualité de ces titres, ou soient actuellement en mesure de spéculer sur l’or, tout en conseillant de façon « désintéressée » à leurs clients d’acheter de l’or. » Pour cela il propose de recréer la fonction de courtage.
Interdire le trading de haute fréquence et le shadow banking. Limiter strictement ce qui peut être mis dans le hors-bilan |4|. Interdire les ventes à découvert et les ventes à nu.
3. Mettre fin au secret bancaire
Interdire les marchés financiers de gré à gré. Toutes les transactions sur les marchés financiers doivent être enregistrées, traçables, réglementées et contrôlées. Jusqu’ici, les principaux marchés financiers sont de gré à gré, c’est-à-dire qu’ils ne sont soumis à aucun contrôle : il s’agit du marché des changes (5 300 milliards de dollars chaque jour) |5|, du marché des dérivés, du marché des matières premières et des produits agricoles |6|…
Mettre fin au secret bancaire. Les banques doivent avoir l’obligation de communiquer toutes les informations sur leurs responsables, leurs différentes entités, leurs clients, les activités qu’elles exercent et les transactions qu’elles réalisent pour le compte de leurs clients et pour elles-mêmes. De même, les comptes des banques doivent également être lisibles et compréhensibles. La levée du secret bancaire doit devenir un impératif démocratique minimal pour tous les pays.
Concrètement cela signifie que les banques doivent tenir à la disposition de l’administration fiscale :
une liste nominative des bénéficiaires d’intérêts, de dividendes, de plus-values et autres revenus financiers ;
les informations sur les ouvertures, les modifications et les fermetures de comptes bancaires en vue d’établir un répertoire national des comptes bancaires ;
toutes les informations sur les entrées et sorties de capitaux avec en particulier l’identification du donneur d’ordre.
Interdire les transactions avec les paradis fiscaux. Il faut interdire aux banques toute transaction avec un paradis fiscal. Le non-respect de l’interdiction doit être assorti de sanctions très lourdes (pouvant aller jusqu’au retrait de la licence bancaire) et du paiement de lourdes amendes.
4. Réguler le secteur bancaire
Exiger des banques une augmentation radicale du volume de leurs fonds propres en rapport avec le total du bilan |7|. Alors que les fonds propres sont en général inférieurs à 5 % du bilan de la banque, nous sommes favorables à porter leur minimum légal à 20 %.
Interdire la socialisation des pertes des banques et des autres institutions financières privées. Il s’agit d’interdire aux pouvoirs publics de mettre à la charge des finances publiques des dettes privées.
Restaurer la responsabilité illimitée des grands actionnaires en cas de faillite. Le coût de la faillite doit pouvoir être récupéré sur l’ensemble du patrimoine des grands actionnaires (personnes physiques ou entreprises/personne morale).
En cas de faillite, les clients de la banque de dépôt doivent continuer à bénéficier d’une garantie d’État pour leurs dépôts, limitée au montant raisonnable d’épargne d’un ménage moyen-supérieur (estimé aujourd’hui à 150 000 euros, montant à soumettre au débat démocratique).
Taxer fortement les banques. Les bénéfices des banques doivent être soumis strictement aux dispositions légales en matière d’imposition des sociétés. En effet actuellement le taux effectivement payé est très nettement inférieur au taux légal lui-même largement insuffisant. Les transactions bancaires sur les devises |8| et sur les titres financiers doivent être taxées. Les dettes bancaires à court terme doivent être taxées afin de favoriser le financement à long terme.
Poursuivre systématiquement les dirigeants responsables de délits et de crimes financiers et retirer la licence bancaire aux institutions qui ne respectent pas les interdictions et se rendent coupables de malversations.
Sauver les banques d’une autre manière. Outre les dispositions mentionnées plus haut : responsabilité illimitée des grands actionnaires (sur leur patrimoine global), garantie des dépôts jusque 150 000 euros, interdiction de mettre des dettes privées à la charge des finances publiques, il s’agit de créer un mécanisme de mise en faillite ordonnée des banques avec la création de deux structures : une banque de défaisance privée (à charge des actionnaires privés et sans aucun coût pour les pouvoirs publics) et une banque publique vers laquelle sont transférés les dépôts ainsi que les actifs sains. Certaines expériences récentes peuvent servir de source d’inspiration, notamment l’expérience islandaise engagée depuis 2008 |9|.
5. Financer autrement la dette publique
Imposer aux banques privées la détention d’un quota de titres de la dette publique.
Donner pour mission nouvelle à la Banque centrale d’octroyer des prêts à taux zéro aux pouvoirs publics. A l’inverse de ce qui est pratiqué par la BCE du fait des traités européens, la banque centrale serait en capacité de permettre un financement à taux zéro de l’État et de l’ensemble des structures publiques (collectivités, hôpitaux, organisme de logement social, etc.) afin de mener des politiques socialement justes inscrites dans la transition écologique.
6. Renforcer les banques publiques existantes
et en recréer dans les pays où elles ont été privatisées (bien sûr en les soumettant comme toutes les autres banques aux mesures concrètes mentionnées plus haut). En France, s’est mis en place en 2012 un collectif « Pour un Pôle Public Financier au service des Droits ! » |10| favorable à la création d’un pôle public bancaire. Mais le grave inconvénient de ce projet est qu’il ne va pas au fond des choses car il laisse subsister, à côté d’un pôle public insignifiant, des banques privées et un pôle mutualiste qui n’a de mutualiste que le nom. Dans le cas de la Belgique où le gouvernement a privatisé les dernières banques publiques dans les années 1990, l’État a racheté en 2011, la « partie » banque de Dexia et en est actionnaire à 100 %. Dexia Banque est devenue Belfius et garde un statut privé. Il faut que Belfius devienne une véritable banque publique et qu’on y mette en pratique les mesures concrètes formulées plus haut. Le montant payé par l’État s’élève à 4 milliards d’euros, ce que la commission européenne a considéré elle-même comme tout à fait exagéré. Ce qu’il aurait fallu faire : Belfius aurait dû être constituée sans coût pour les finances publiques comme institution bancaire publique bénéficiant des dépôts des clients chez Dexia Banque et de tous les actifs sains. Cette banque aurait dû être mise sous contrôle citoyen. Les conditions de travail, l’emploi et les revenus du personnel auraient dû être garantis tandis que les rémunérations des dirigeants auraient dû être nettement réduites. Il fallait interdire aux administrateurs et directeurs d’avoir un mandat dans une institution privée. Les dirigeants de Dexia auraient dû être poursuivis en justice par le ministère public pour les différents délits qu’ils ont commis. Le rapport d’information du Sénat n° 58 sur la Société de financement local évalue à environ 20 milliards d’euros (13 milliards pour la France dont 6,6 milliards affectés à la recapitalisation et le reste à la prise en charge d’une partie des indemnités de remboursement anticipé des emprunts toxiques ; 6,9 milliards d’euros, correspondant à la nationalisation de Dexia Bank Belgique et à la recapitalisation de Dexia). Le 1er février 2013, la France a créé une structure à 100 % publique (avec l’État à 75 %, le CDC à 20 % et la Banque postale à 5 %) afin de procéder à l’acquisition à 100 % de la société de crédit foncier Dexia Municipal Agency (filiale de Dexia Crédit Local) qui est devenue la Caisse Française de Financement Local (CAFFIL).
II. POUR LA SOCIALISATION DU SECTEUR BANCAIRE
La mise en pratique des mesures concrètes qui sont mentionnées plus haut constituerait une avancée dans la résolution de la crise du secteur bancaire mais le secteur privé continuerait à occuper une position dominante.
Il faut aller plus loin que les mesures immédiates proposées.
Ce que démontre l’expérience des dernières années, c’est qu’on ne peut pas laisser les banques aux mains des capitalistes. Si, par la mobilisation sociale, on arrive à faire appliquer les mesures présentées plus haut (qui sont soumises à la discussion afin de les améliorer et compléter), les capitalistes chercheront par tous les moyens à récupérer une partie du terrain perdu, ils multiplieront les activités leur permettant de contourner les réglementations, ils utiliseront leurs puissants moyens financiers pour acheter l’appui de législateurs et de gouvernants afin de déréglementer à nouveau et d’augmenter au maximum leurs profits sans prise en compte de l’intérêt de la majorité de la population.
Il faut la socialisation du secteur bancaire sous contrôle citoyen
Parce que les capitalistes ont démontré à quel point ils étaient capables de commettre des délits et de prendre des risques (dont ils refusent d’assumer les conséquences) dans le seul but d’augmenter leurs profits, parce que leurs activités entraînent périodiquement un lourd coût pour la société, parce que la société que nous voulons construire doit être guidée par la recherche du bien commun, de la justice sociale et de la reconstitution d’une relation équilibrée entre les humains et les autres composantes de la nature, il faut socialiser le secteur bancaire. Comme le propose Frédéric Lordon, il s’agit de réaliser « une déprivatisation intégrale du secteur bancaire » |11|. La socialisation de l’intégralité du secteur bancaire est préconisée par le syndicat Sud BPCE |12|.
Socialiser le secteur bancaire signifie :
l’expropriation sans indemnité (ou avec comme seule indemnité l’euro symbolique) des grands actionnaires (les petits actionnaires seront indemnisés) ;
l’octroi au secteur public du monopole de l’activité bancaire à une exception près : l’existence d’un secteur bancaire coopératif de petite taille (soumis aux mêmes règles fondamentales que le secteur public).
la création d’un service public de l’épargne, du crédit et de l’investissement, doublement structuré : un réseau de petites implantations proches des citoyens, d’une part, et, d’autre part, des agences spécialisées en charge des activités de gestion de fonds et de financement d’investissements non assurés par les ministères en charge de la santé publique, de l’éducation nationale, de l’énergie, des transports publics, des retraites, de la transition écologique, etc. Ces ministères devront être dotés du budget nécessaire aux financements des investissements relevant de leurs attributions. Les agences spécialisées quant à elles interviendraient dans des domaines et des activités excédant les compétences et les sphères d’action de ces ministères et ce afin d’assurer le bouclage d’ensemble.
la définition avec participation citoyenne d’une charte sur les objectifs à atteindre et sur les missions à poursuivre, qui mette le service public de l’épargne, du crédit et de l’investissement au service des priorités définies selon un processus de planification démocratique ;
la transparence (de la comptabilité) des comptes qui doivent être présentés au public de manière compréhensible.
Le mot « socialisation » est utilisé de préférence à celui de « nationalisation » ou « étatisation » pour indiquer clairement à quel point est essentiel le contrôle citoyen avec un partage de décision entre les dirigeants, les représentants des salariés, des clients, d’associations, les élus locaux et les représentants des instances bancaires publiques nationales et régionales. Il faut donc définir de manière démocratique l’exercice d’un contrôle citoyen actif. De même, il faut encourager l’exercice d’un contrôle des activités de la banque par les travailleurs du secteur bancaire et leur participation active à l’organisation du travail. Il faut que les directions des banques remettent annuellement un rapport public sur leur gestion. Il faut privilégier un service de proximité et de qualité rompant avec les politiques d’externalisation menées actuellement. Il faut encourager le personnel des établissements financiers à assurer à la clientèle un authentique service de conseil et rompre avec les politiques commerciales agressives de vente forcée.
La socialisation du secteur bancaire et son intégration aux services publics permettront :
de soustraire les citoyens et les pouvoirs publics de l’emprise des marchés financiers ;
de financer les projets des citoyens et des pouvoirs publics ;
de dédier l’activité bancaire au bien commun avec entre autres missions celle de faciliter la transition d’une économie capitaliste, productiviste à une économie sociale et écologique.
Parce que nous considérons que l’épargne, le crédit, la sécurité des encaisses monétaires et la préservation de l’intégrité des systèmes de paiement relève de l’intérêt général, nous préconisons la création d’un service public bancaire par la socialisation de la totalité des entreprises du secteur bancaire et de l’assurance.
Parce que les banques sont aujourd’hui un outil essentiel du système capitaliste et d’un mode de production qui saccage la planète, génère un inégal partage des ressources, sème les guerres et la paupérisation, rogne chaque jour davantage les droits sociaux et attaque les institutions et les pratiques démocratiques, il est essentiel d’en prendre le contrôle et d’en faire des outils au service de la collectivité.
La socialisation du secteur bancaire ne peut être envisagée comme un slogan ou une revendication qui se suffirait en elle-même et que les décideurs appliqueraient après en avoir saisi le bon sens. Elle doit être conçue comme un objectif politique à atteindre par un processus porté par une dynamique citoyenne. Il faut non seulement que les mouvements sociaux organisés existants (dont les syndicats) en fassent une priorité de leur agenda et que les différents secteurs (collectivités locales, petites et moyennes entreprises, associations de consommateurs, etc.) se positionnent en ce sens, mais aussi – et surtout – que les employé.e.s de banque soient sensibilisé.e.s au rôle de leur métier et à l’intérêt qu’ils auraient à voir les banques socialisées ; que les usagers soient informés là où ils se trouvent (exemple : occupations d’agences bancaires partout le même jour) afin de participer directement à la définition de ce que doit être la banque.
Seules des mobilisations de très grande ampleur peuvent garantir que la socialisation du secteur bancaire soit réalisée en pratique car cette mesure touche au cœur le système capitaliste. Si un gouvernement de gauche ne prend pas une telle mesure son action ne pourra pas véritablement provoquer le changement radical pour rompre avec la logique du système et enclencher un nouveau processus d’émancipation.
La socialisation du secteur bancaire et des assurances doit faire partie d’un programme bien plus vaste de mesures complémentaires permettant d’enclencher une transition vers un modèle post-capitaliste et post-productiviste. Un tel programme, qui devrait avoir une dimension européenne tout en commençant à être mis en pratique dans un ou plusieurs pays, comprendrait notamment l’abandon des politiques d’austérité, l’annulation des dettes illégitimes, la mise en place d’une réforme fiscale d’ensemble avec une forte imposition du capital, la réduction généralisée du temps de travail avec embauches compensatoires et maintien du salaire, la socialisation du secteur de l’énergie, des mesures pour assurer l’égalité hommes-femmes, le développement des services publics et de la protection sociale et la mise en place d’une politique déterminée de transition écologique.
Aujourd’hui, la socialisation de l’intégralité du système bancaire est bien une urgente nécessité économique, sociale, politique et démocratique.