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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:52

 

Marianne - Mardi 4 Décembre 2012 à 12:00

 

Emmanuel Lévy

 

Nos cousins germains nous narguent avec leur affolante compétitivité et leurs salaires modérés. On oublie de dire que, outre-Rhin, l'immobilier est bon marché et pèse très peu sur les ménages.

 

(Un immeuble de l'architecte Hans Schorun, à Berlin - Markus Schreiber/AP/SIPA )
(Un immeuble de l'architecte Hans Schorun, à Berlin - Markus Schreiber/AP/SIPA )
Tout le monde connaît l'Allemagne pour ses particularismes : ses montagnes noires, ses bretzels et ses centaines de bières. Mais ce sont surtout son industrie manufacturière florissante et ses grosses berlines exportées dans le monde entier qui suscitent l'envie de notre côté du Rhin. Ce cocktail alliant compétitivité hors prix - la «deustche Qualität» que vante Opel à longueur de spots publicitaires - à une modération salariale qui assure des prix bas fait rêver les dirigeants européens. Pourtant, une autre spécificité distingue l'Allemagne des autres grands pays industrialisés (à l'exception du Japon et, dans une moindre mesure, de la Belgique) : son marché immobilier est libre de toute bulle.

Une démographie atone, un stock de logements important et un vaste marché locatif - contrepartie d'un faible taux de propriétaires - expliquent pour beaucoup cette situation. Résultat : alors que les Français font face à une envolée des prix de la pierre (+ 140 % en dix ans) et doivent se saigner pour se loger, nos voisins connaissent les joies d'une courbe plane épargnant leur pouvoir d'achat.

Ces dix dernières années, l'Allemagne se sera donc différenciée par deux grands phénomènes : une absence de spéculation sur l'immobilier et une hausse de sa compétitivité. Simple coïncidence, comme voudraient le croire ceux qui louent les réformes menées par Gerhard Schröder ? Rien n'est moins sûr... Evariste Lefeuvre, chef économiste à la banque Natixis, est formel : «Le consensus social en Allemagne sur la modération des salaires a été d'autant plus facile à atteindre qu'il n'y a pas eu de hausse des prix, notamment dans le secteur immobilier.»

Le facteur salarial

De fait, à la fin des années 90, les Allemands consacraient pour leur toit un effort plus important que les autres Européens de l'union monétaire : 18,3 % de plus, selon Eurostat, contre «seulement» 10,6 % de plus pour les Français. Depuis dix ans, le rapport s'est inversé. Massivement. Les chiffres de la Banque centrale européenne le confirment. Sur la période 2000-2007, les prix des logements ont reculé de 0,4 % chaque année en Allemagne, quand la hausse moyenne dans la zone euro atteignait 6,1 % - voire 10,3 % en France, et pas loin de 12 % en Espagne. De quoi faire passer la pilule amère de la modération salariale. Sur la même période, les salaires annuels moyens des deux côtés du Rhin ont suivi des chemins différents : + 12,23 % en France, contre 3,5 % en Allemagne entre 2000 et 2011.

Ordinairement, en économie, la hausse des salaires suit celle de la productivité. Rien de tel ne s'est produit en Allemagne, au contraire. L'évolution de la productivité de nos cousins germains fut constamment supérieure à celle de la France. Il faut donc aller chercher ailleurs les raisons de la hausse des salaires dans l'Hexagone. Confrontés à l'augmentation des loyers et du prix d'achat des logements, les salariés français ont déconnecté leur demande de la situation de leur entreprise. Que les affaires soient florissantes ou pas, qu'importe, eux doivent payer un loyer chaque année plus important !

Malheureusement, ce canal de perte de compétitivité par les salaires n'est pas le seul à l'œuvre. La bulle immobilière a déformé le tissu économique de la France au profit de la construction et du BTP, et au détriment des entreprises manufacturières, comme Peugeot. Peu connue, l'étude de l'OCDE «Exports And Property Prices In France : Are They Connected ?», publiée en 2010, a cherché à mesurer la perte de compétitivité de l'économie française à l'exportation à la suite de la hausse des prix immobiliers. A la question : «Les exportations et les prix immobiliers sont-ils connectés ?», les deux auteurs, Balazs Egert et Rafal Kierzenkowski, répondent par l'affirmative. Et plutôt deux fois qu'une ! Ils ont calculé que, à chaque fois que la pierre se renchérissait de 10 %, cela se traduisait in fine par une baisse de 1,4 à 1,8 % des exportations françaises. Le lien entre ces phénomènes : la compétitivité.

Entre 2000 et 2010, toujours selon nos deux économistes, la France aurait perdu 5 % de sa compétitivité à cause de la hausse des prix de l'immobilier. C'est ce qu'on appelle l'effet d'éviction. «La hausse des prix de l'immobilier a augmenté les marges des entreprises du BTP. Ce faisant, leur plus grande attractivité pour les investisseurs s'est faite au détriment des entreprises industrielles tournées, elles, vers l'exportation», explique Rafal Kierzenkowski. Cette course à l'échalote se transforme rapidement en cercle vicieux. La baisse continue des marges conduit les entreprises à rogner sur leur budget en recherche et développement, ce qui signifie qu'elles sacrifient leur compétitivité hors prix, la qualité et l'innovation. Bref, Vinci se porte comme un charme quand Peugeot est au bord du gouffre.

 

 

 

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:45

 

Rue89 - Bons élèves 04/12/2012 à 18h33
Elsa Ferreira | Rue89

 

A Sephora Champs-Elysées, on travaille le soir et le dimanche. Pour l’instant. Le tribunal de grande instance de Paris doit décider ce jeudi, à la suite d’une plainte de l’intersyndicale du commerce de la capitale, Clic-P, si ces horaires sont contraires à la loi.

 


Publicité de Sephora sur l’emploi, début décembre 2012 

 

Mais l’enseigne n’a pas attendu le jugement pour répliquer : « L’emploi menacé aux Champs-Elysées… », peut-on lire dans les pages publicité du Figaro, du JDD et du Parisien depuis samedi dernier.

Acheter de l’espace pub pour prendre le lecteur à parti, ce n’est pas une première. Il y a deux semaines, Nutella prenait déjà d’assaut les quotidiens dans une double page pour dire que non, l’huile de palme, ce n’est pas si mauvais que l’on croit.

McDonald’s avait ouvert la tendance deux semaines plus tôt en expliquant au député PS Thomas Thévenoud que la baisse de la TVA ne lui avait pas permis d’engranger 19 millions d’euros comme il l’avait affirmé, mais avait au contraire grevé son budget de 33 millions d’euros.

Les bons élèves de la citoyenneté

Pour Caroline de Montety, enseignante et chercheuse au Centre d’études littéraires et scientifiques appliquées (CELSA), spécialisée dans la publicité et le marketing, la méthode n’est pas nouvelle. Elle fait appel à la notion de « responsabilité sociale de l’entreprise ».

Ainsi, lorsque Sephora explique par voie de publicité-communiqué que « l’obligation de fermer à 21 heures […] menacerait plus de 45 emplois », l’entreprise joue sur la fibre citoyenne des lecteurs-consommateurs. Pour Caroline de Montety :

« Sephora cherche à allumer un contre-feu sur le fait que, contrairement à ce qu’on pourrait penser, c’est une bonne citoyenne, puisqu’elle agit pour préserver des emplois. »

Pour McDonalds et Nutella, c’est le même principe. L’un utilise les abaissements de TVA pour embaucher et investir (et baisser le prix du Big Mac de 5%), l’autre utilise de l’huile de palme qui ne participe pas à la déforestation en Indonésie et dont le profil nutritionnel est proche de celui du beurre (et donc, n’est pas dangereux pour la santé).

« On est sur un terrain extrêmement prisé en ce moment : le bien-fondé de la marque sur de grands sujets. L’écologie notamment, la non discrimination, l’emploi, la bonne conduite. »


Publicité de Nutella sur l’huile de palme, en novembre 2012 

 

Pression sur les pouvoirs publics

Mais si nos entreprises sont citoyennes, elles n’en restent pas moins intéressées. Et comme le rappelle la spécialiste en publicité et en marketing, « la parole d’une marque n’a jamais vocation à la neutralité ».

Sephora a la conjoncture économique de son côté, et elle le sait. On peut lire à la fin du texte, en blanc sur fond noir :

« A un moment où notre pays est violemment frappé par la crise et le chômage qui en résulte, la liberté du travail ne saurait être mise en cause pour des raisons idéologiques ou administratives. »

Caroline de Montety explique :

« Sephora cherche à toucher un public consommateurs d’informations, des leaders d’opinion, des leaders économiques, sensibles à cette argumentation. […] On est sur une cible périphérique : des fournisseurs, des banquiers, d’autres chefs d’entreprises ou d’autres dirigeants qui peuvent se retrouver dans ces questions-là et faire du lobbying pour l’ouverture des magasins le dimanche ou le soir. »

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:33

 

Rue89 - A Lille 03/12/2012 à 19h23

 Camille Polloni | Journaliste Rue89

 

 


Des sans-papiers, dans le temple lillois, le 30 novembre 2012 (Alexandre D.)

 

Alors que Cécile Duflot en appelle à l’Eglise pour héberger des sans-abri, 120 sans-papiers occupent le temple protestant de Lille-Fives, depuis le 25 novembre. Ils sont tous en grève de la faim, depuis 32 jours pour les plus anciens, plus de 25 pour les autres.

Pour les responsables de l’Eglise réformée, la situation est compliquée. Les fidèles ne peuvent plus assister au culte dans le bâtiment occupé.

D’après La Voix du Nord, les responsables du temple ont finalement sollicité l’évacuation des lieux ce lundi. Le conseil presbytéral s’était jusque-là refusé à faire intervenir les forces de l’ordre, par principe.

Du sucre, du thé et du café

 


Dans le temple lillois (Alexandre D.)

 

Tenant à éviter que d’autres sans-papiers se joignent aux occupants, les responsables du temple filtrent les entrées. Pas de journalistes, pas de curieux et pas trop de militants. Ils restent devant la porte.

Le Comité de soutien aux sans-papiers (CSP59) peut toutefois faire passer à l’intérieur de l’eau, du sucre, du thé et du café (seule alimentation possible pour des grévistes de la faim). Le temple est situé à quelques mètres du local du collectif, qui sert de base logistique.

Alexandre, l’un des soutiens, a réussi à entrer dans le temple vendredi, à l’occasion d’un ravitaillement en boissons. Il se dit « dégoûté et révolté » par l’attitude du préfet du Nord, qui « fait mine d’ignorer l’occupation et la grève de la faim » :

« Après des manifestations chaque mercredi soir, de multiples rassemblements devant la préfecture, des marches, des cérémonies de parrainages, des rendez-vous avec des élus ou des maires ainsi que des occupations (qui se soldent par des gaz, des coups de matraques et des arrestations), les sans-papiers ont décidé de mettre leur vie en danger. »

Le militant a pris des photos et tourné une vidéo, « à la demande des sans-papiers », pour essayer de médiatiser leur situation au-delà de la presse locale. On y voit des dizaines de personnes, allongées dans des lits de fortune à l’intérieur du temple, parfois un gobelet à la main.

 

 

Grève de la faim des sans-papiers à Lille, vendredi 30 novembre.

Une cinquantaine de passages à l’hôpital

Kamel, du CSP59, s’inquiète. « On est pas en train de jouer. » Il rapporte « une cinquantaine d’évacuations » par les pompiers et le Samu depuis une semaine, après des malaises.

 


Un camion de pompiers devant le temple lillois (Alexandre D.)

 

Selon le Centre hospitalier régional universitaire de Lille, ce sont au total « 100 personnes » qui « ont été prises en charge par le SAMU 59 et transférées sur tous les services d’urgence de la métropole lilloise. »

Refusant malgré tout de s’alimenter, les sans-papiers finissent par revenir au temple, contre l’avis des médecins. Kamel décrit la situation :

« A l’intérieur, il y a des hommes et des femmes de toutes les nationalités : des Maghrébins, des gens d’Afrique noire, des Asiatiques. Il y a aussi quelques enfants, qui ne font pas la grève de la faim bien sûr.

La préfecture n’est pas venue, ils ne nous ont même pas appelés. Ils n’ont parlé qu’avec la Ligue des droits de l’homme (LDH), pour leur dire que les sans-papiers doivent cesser la grève de la faim et quitter les lieux, avant toute négociation. »

« Après dix ans de sarkozysme, le désespoir »

Annick Batallan fait partie des membres de la LDH qui ont rencontré le directeur de cabinet du préfet, mercredi dernier. Elle déplore une situation « extrêmement bloquée » :

« L’un des sans-papiers nous a dit qu’il avait déjà fait la grève de la faim à Roubaix, il y a quelques années. Il a arrêté quand la préfecture a promis de réexaminer les dossiers, mais n’a pas été régularisé. Cette fois-ci, il est donc hors de question qu’il bouge.

A la LDH, nous ne sommes pas très partisans de la grève de la faim, un mode d’action violent pour les grévistes, mais ce sont des adultes responsables. Nous n’avons pas à leur dire quoi faire.

Ils sont dans un triste état. Certains ont dit que c’était bidon, vu l’état dans lequel ils sont je peux témoigner qu’ils ne mangent pas. Tous ces sans-papiers sont amenés à la grève de la faim par l’attitude du gouvernement et de la préfecture.

Il y a eu un immense espoir après les élections présidentielles et législatives, et depuis six mois on attend. Après dix ans de sarkozysme, c’est le désespoir. »

Hollande élu, « on avait fait la fête »

Dans le temple lillois (Alexandre D.)

Sans illusion, la LDH a écrit à nouveau à la préfecture du Nord ce lundi matin. Kamel, lui, répète qu’ils n’ont « pas demandé la Lune » :

« Ce sont des gens avec des dossiers béton, des emplois. La politique menée est dans la continuité de ce que faisait l’UMP. Nous n’avons ressenti aucun changement, pourtant on avait fait la fête... »

Ce lundi matin, un huissier est passé au temple, évoquant une expulsion prochaine pour raisons sanitaires. Mais, selon Kamel, il n’a précisé « ni le jour ni l’heure ». La préfecture du Nord n’a pas donné suite à notre appel.

 

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:21

 

Rue89 - Sauvetages 04/12/2012 à 12h52
Elsa Fayner | Journaliste Rue89

 

La France a volé au secours de ses banques, mais peut-elle éviter la disparition d’un site industriel ? Retour sur les décisions qui ont réussi et celles qui ont échoué.

 


Les hauts fourneaux de Florange, le 29 septembre 2012 (POL EMILE/SIPA)

La nationalisation du site sidérurgique de Florange, en Moselle, est-elle toujours envisagée ? Partielle ? Temporaire ? Possible ? Surtout, serait-ce vraiment une première ?

L’Etat peut effectivement sauver des banques – il l’a prouvé aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, et en France. Mais a-t-il déjà réussi à maintenir des usines en vie ? Oui, souvent même, mais à certaines conditions. Nous avons passé en revue les techniques qui marchent, et celles qui mènent dans le mur.

                                                                                                                                                                                                                                 1 Mettre un coup de pression sur les dirigeants : trop aléatoire

 

La technique du coup de pression peut marcher. Mais cela reste rare, et impossible à généraliser. Les deux derniers gouvernements ont, par exemple, réussi à :

  • exiger, entre les deux tours de la présidentielle, que la SNCF abandonne d’importantes créances à l’égard de SeaFrance, pour permettre à Eurotunnel d’acheter les navires de la société et à la Scop d’anciens salariés de les exploiter ;
  • intervenir auprès des principaux clients publics de Neo Security pour qu’ils maintiennent leur confiance à leur prestataire en dépôt de bilan et permettre au repreneur, Fiducial, de conserver plus de salariés que prévu ;
  • négocier avec Sanofi pour que le laboratoire réduise la voilure de son plan social. 900 postes sont malgré tout supprimés en France ;

La victoire risque d’être de courte durée, voire en trompe-l’œil. Chez Lejaby, par exemple, seules les 93 salariées d’Yssingeaux ont été repêchées. Lésées de leurs différentes indemnités et primes de licenciement, celles de Bellegarde sont toujours une trentaine à se mobiliser pour obtenir gain de cause et faire respecter des engagements de l’Etat.

                                                                                                                                                                                                                             2 Conseiller, accompagner, écouter : ça ne suffit pas

 

L’échec est assuré quand l’Etat se contente de conseiller, accompagner, écouter, sans débourser un euro. Les deux derniers gouvernements ont par exemple voulu :

  • « faciliter les offres de reprise et lever les obstacles administratifs » pour Pétroplus, se félicitait Arnaud Montebourg dans un communiqué de presse ;
  • « examiner les modalités d’une entrée au capital » pour Technicolor, expliquait Eric Besson, alors ministre de l’Industrie ;
  • missionner un conseiller chez Freescale à Toulouse.

Les trois entreprises ont fermé. Et Pétrolus voit défiler les repreneurs plus ou moins crédibles.

Pour Jean-Louis Levet, économiste, c’est l’une des conditions nécessaires à la réussite d’une intervention de l’Etat : il faut y mettre le prix.

                                                                                                                                                                                                                             3 Apporter une aide financière massive : ça marche

 

Le spécialiste des questions industrielles cite trois cas de figure en France, trois dossiers symboliques d’une intervention de l’Etat réussie.

Renault, tout d’abord, qui se trouvait au bord du dépôt de bilan au début des années 80 :

« Deux possibilités s’offraient à l’Etat : laisser couler en cédant la place à l’industrie automobile japonaise, ou relancer l’industrie automobile française. L’Etat a choisi la seconde option.

Une mission a été montée pour comprendre ce qui n’allait pas. Et, là, on a découvert que l’entreprise mettait huit ans à faire une voiture que les Japonais fabriquaient en quatre ans, qu’il y avait beaucoup de problèmes de qualité, à cause – entre autres – d’une multitude d’échelons hiérarchiques.

L’Etat a réinjecté de l’argent en demandant au nouveau patron, Georges Besse, de remédier à ces problèmes. Tandis que le Fonds national pour l’emploi (FNE) a permis à des salariés de partir en préretraite. »

Même schéma chez Air France, au bord du dépôt de bilan dans les années 90. L’intervention se joue cette fois aussi au niveau européen. Jacques Delors parvient à convaincre la Commission européenne qu’il faut laisser l’Etat sauver la compagnie aérienne française.

En 2004, enfin, l’Etat français prend 21,36% du capital d’Alstom, dans le cadre d’une aide de 2,8 milliards d’euros (à peine plus que pour Renault et Air France). Bruxelles dicte ses conditions : Alstom doit céder des actifs. Le groupe vend ses chantiers navals, son activité turbines industrielles et sa division transmission et distribution d’énergie, rappelle L’Usine Nouvelle. Dès 2006, l’Etat cède ses parts à Bouygues, pour une plus-value de 1,26 milliard d’euros.

                                                                                                                                                                                                                                    4 Soutenir un secteur entier : oui

 

La France n’est pas la seule à soutenir aussi massivement ses industries, prévient Jean-Louis Levet :

« Aux Etats-Unis, on fait ça en permanence pour des secteurs entiers, à coup de subventions et de protectionnisme. Ça a été l’acier dans les années 80, l’automobile durant cette même période, et plus récemment depuis la crise, ou encore les ports et les produits agricoles. »

Quand des Länder n’hésitent pas à entrer dans le capital de grosses entreprises de taille intermédiaire en Allemagne.

                                                                                                                                                                                                                             5 Prévoir un plan de développement de long terme : efficace

 

En France, Renault, Air France et Alstom sont devenus, à la suite de leur sauvetage par l’Etat, des géants de leur secteur. Pour l’expert, ces trois situations démontrent la nécessité de réunir trois conditions pour que l’intervention porte ses fruits. Il faut :

  • prévoir un plan de développement de l’entreprise sur cinq ou dix ans, et ne pas se contenter de mesures ponctuelles ;
  • changer le patron à la tête de l’entreprise, ou s’appuyer sur un nouvel arrivant ;
  • exiger le remboursement de la somme investie.

                                                                                                                                                                                                                                    6 Licencier ? Pas forcément

 

Faut-il que l’entreprise licencie massivement, comme l’a fait Georges Besse chez Renault par exemple ? Ce n’est pas automatique pour l’économiste :

« Le sureffectif est la conséquence, pas la cause, du manque d’innovation, d’adaptation, d’évolution de l’entreprise : elle innove peu, elle a de moins en moins de clients, de moins en moins de chiffre d’affaires, et elle se retrouve à compter trop de salariés. »

Les licenciements peuvent cependant être nécessités par le plan de développement, reconnaît Jean-Louis Levet :

« Ce ne sont pas des licenciements secs, il y a des cellules de reconversion. Le problème, c’est que ces entreprises, qui ont peu innové, ont aussi, du coup, peu formé leurs salariés, et qu’il est souvent difficile pour eux de trouver du travail. En moyenne, un sur deux en retrouve. »

                                                                                                                                                                                                                                     7 Anticiper les transitions technologiques : encore mieux

 

Mieux vaut que l’Etat anticipe, donc, pour soutenir les entreprises en difficulté. Des entreprises à ne pas confondre avec les « canards boiteux », qui existent finalement peu, constate Jean-Louis Levet :

« Un canard boiteux, c’est une entreprise qui n’a ni compétences, ni marché, ce n’est pas une entreprise en difficulté. Et on parle souvent de vieilles industries à laisser mourir, et de nouvelles industries à soutenir.

Mais on peut être vieux dans les nanotechnologies s’il n’y a pas de marché... Et il n’y a pas de vieilles industries, au sens d’industries dépassées. Il y a des ruptures technologiques, et il faut accompagner les entreprises pour qu’elles les dépassent.

C’est le cas de Florange. Le marché existe toujours, même si, conjoncturellement, il va mal : on aura besoin d’acier après la crise comme avant. Simplement, Florange vit une rupture technologique. Elle peut se convertir, par exemple, avec le projet Ulcos, qui prévoit de réduire d’au moins 50% les émissions de gaz carbonique lors de la fabrication d’acier, de devenir le pilote industriel de la sidérurgie de demain. L’entreprise fait un pari, et il est normal que l’Etat s’intéresse à elle. »

Pour l’économiste, finalement, il relève du rôle de l’Etat :

  • de stimuler l’innovation dans les industries dites matures : « Dans l’industrie automobile, par exemple, on réfléchit maintenant en termes de mobilité, de ville de demain, d’architecture. Les comportements évoluent aussi : notre souci ne sera bientôt plus d’acheter une voiture mais de savoir quelle voiture utiliser à quel moment. On n’achètera plus un bien, mais un usage. » Les entreprises vont devoir prendre des risques pour envisager cette rupture technologique et sociale, et l’Etat doit les y aider ;
  • d’accompagner les entreprises quand elles rencontrent des ruptures dans leur trésorerie : « car toute entreprise, dans sa vie, a des difficultés ».

 

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:15

 

Rue89 - « Avant fin 2012 » 04/12/2012 à 11h48

 Zineb Dryef | Journaliste Rue89

 


 

« On est chaud bouillant », s’enthousiasme Julien Bayou, l’un des fondateurs de Jeudi noir, collectif de lutte pour le logement, et conseiller régional Europe Ecologie-Les Verts (EELV) d’Ile-de-France.

Favorable depuis des années à la réquisition des bâtiments vides, il prend acte de la promesse de Cécile Duflot. La ministre écologiste du Logement s’est engagée fin octobre à utiliser l’arme des réquisitions de logements vacants pour offrir un toit aux sans-abri et aux mal-logés.

Parmi ces bâtiments vides (d’entreprises, de banques etc.), il y aurait également ceux appartenant à l’Eglise. Une proposition qui suscite un tollé depuis deux jours, ses opposants y voyant un règlement de compte sur fond de mariage pour tous.

« Il y a une liste »


SDF : Duflot en appelle à l’Eglise (Baudry)

Du côté des associations de soutien aux mal-logés, les déclarations de la ministre sont plutôt bien accueillies à condition qu’elles soient appliquées cet hiver.

Le Droit au logement (DAL) estime que c’est un « espoir » même s’il arrive un peu tard. Pour Julien Bayou :

« On est évidemment pour. Ça a été souvent promis à l’approche de l’hiver mais cette fois, ça semble plus proche d’aboutir : il y a une liste de bâtiments à réquisitionner.

Ce serait un énorme symbole de considérer que le logement est un bien commun, qu’il doit retourner à sa fonction première et que les pouvoirs publics ont les moyens d’agir. »

De nombreuses réquisitions après la guerre

S’il reconnaît que « ce n’est pas avec les réquisitions uniquement qu’on réglera le problème du logement », il attend que l’engagement soit tenu avant la fin de l’année :

« S’il n’y a pas de réquisitions avant fin 2012, ce sera un désaveu de Duflot. »


Cécile Duflot, le 25 novembre 2012 à Paris (ALFRED/SIPA)

 

Les réquisitions ont été extrêmement rares depuis la promulgation de l’ordonnance du 11 octobre 1945 donnant la possibilité aux pouvoirs publics de réquisitionner des logements à titre « exceptionnel », ou en cas de « crise grave du logement ».

Dans les cinq années qui ont suivi la la Seconde Guerre mondiale, les réquisitions ont été nombreuses avant d’être progressivement abandonnées.

Les dernières remontent à l’hiver 1994 lorsque Jacques Chirac, alors maire de Paris, avait demandé la réquisition de plus de 100 logements pour des familles en difficulté, logées dans un immeuble de la rue du Dragon (VIe arrondissement de Paris) par le DAL. D’autres réquisitions seront ordonnées au courant des années 1995 et 1996.

 

MERCI RIVERAINS ! Pas tripette.

 

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:13

 

Rue89 - « Pression constante » 04/12/2012 à 10h15

 Rozenn Le Carboulec | Journaliste pigiste


 


A la CAF de Lille (Nord), le 22 octobre 2012 (M.LIBERT/20 MINUTES/SIPA)

 

« Ils pètent un câble là-dedans, ils ne vont pas bien ! » Mickaël, la trentaine, un usager, vient de s’entretenir avec un agent de la Caisse d’allocations familiales d’Argenteuil, dans le Val-d’Oise. En allumant sa cigarette, il dit s’être énervé au guichet. Ce jour-là, il ne s’était pas muni de son numéro d’allocataire : il est rentré bredouille.

Des situations comme celle-là, les techniciens conseil, qui travaillent à l’accueil, en voient régulièrement. Mais ils ne peuvent pas s’y attarder. Ils n’ont plus le temps.

Plus de 50 000 dossiers en souffrance dans le Val-d’Oise

Ils croulent tellement sous les dossiers que, depuis deux ans, les CAF d’Argenteuil et de Sarcelles ferment quinze jours par mois, pour résorber les retards : 52 000 dossiers sont en souffrance dans le seul département du Val-d’Oise. En vingt ans, le département enregistre 56 000 allocataires supplémentaires et les CAF ont perdu près de 120 emplois.

Sur les trois dernières années, au niveau national, les effectifs des CAF ont baissé de 1 147 en trois ans (selon FO et la CGT). Les réformes s’enchaînent, et le nombre de prestations ne cesse d’augmenter avec des situations familiales de plus en plus complexes à traiter. Les salariés des CAF sont débordés.

Le 22 novembre dernier, ils étaient 40% à faire grève dans le 95 pour dénoncer un système « au bord de l’explosion » et demander des créations de postes en CDI. Sur l’ensemble du territoire, le taux moyen de grévistes était de 30,6%, d’après les derniers relevés de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf).

« Il y a eu quelques embauches quand le RSA est apparu, mais tout autant de départs non remplacés », regrette Brigitte Poli, secrétaire syndicale de la CGT pour le Val-d’Oise. Christian Le Petitcorps, directeur de la CAF de Cergy, fait lui-même état d’une « augmentation tendancielle des flux d’activité de 7% par an ». Une augmentation qui devient ingérable pour les salariés.

Pas plus de trois minutes avec un allocataire

« C’est vraiment le jour et la nuit entre le moment où j’ai commencé et aujourd’hui », observe Emma, technicienne conseil à Marseille depuis dix ans.

« Dans mon service, on doit traiter 40 dossiers par jour. On mise soi-disant sur la qualité, mais on nous demande de faire du chiffre en contrepartie. On est soumis à une pression constante, c’est terrible ! »

Au guichet, les agents ont pour consigne de ne pas rester plus de trois minutes avec chaque allocataire.

« On nous a mis sous le nez un système qui nous chronomètre. Au bout de trois minutes, une flèche rouge s’allume et clignote pour indiquer qu’on a dépassé le temps conseillé. Comment voulez-vous que les salariés ne soient pas stressés ? » s’exclame Brigitte, qui a travaillé à l’accueil pendant seize ans, avant de rejoindre le service médiation. Encore aujourd’hui, elle descend parfois en renfort, quand les files d’attente sont bondées.

« On est le confesseur, l’assistant social... »

« Il y a un gros malaise, c’est sûr, il y a quand même une surcharge de travail », reconnaît une employée de la plate-forme téléphonique de la CAF du 95, qui n’a toutefois pas fait grève : « Je relativise. Au moins, j’ai la santé. »

Mais tous ses confrères n’ont pas sa force de caractère. A Marseille, Emma voit ses collègues enchaîner les arrêts maladie.

« Il y a beaucoup d’agressivité de la part des allocataires, ce qu’on comprend, vu leur situation. Mais quand vous rentrez chez vous après une telle journée et que vous entendez vos enfants crier, vous pétez un câble ! »

Plus que de simples relais, les employés de la CAF incarnent la dernière lueur d’espoir. « On est le confesseur, l’assistant social... Un jour, une personne m’a remerciée en me disant que c’était grâce à moi si elle n’avait pas fini sous un train... Ça, ça vous prend aux tripes ! », raconte Brigitte Poli, encore émue.

L’accueil sacrifié au profit des téléprocédures

Lionel Dell’Angelo, responsable de la section FO de la CAF 95 et chargé de la gestion électronique des courriers, fait état de dossiers de plus en plus complexes, dus aux situations de plus en plus fragiles des allocataires. Il dénonce :

« Au lieu de consacrer la totalité des fonds disponibles à embaucher en CDI, l’employeur préfère recourir aux contrats précaires, aux heures supplémentaires. »

La rencontre annuelle entre les présidents de CAF et le directeur de la Cnaf, qui avait lieu les 22 et 23 novembre à Marseille pour préparer la nouvelle Convention d’objectif et de gestion (COG), n’a pas satisfait les syndicats. Christian Le Petitcorps, directeur de la CAF 95, s’est prononcé pour « la préservation des effectifs, au moins pendant quatre ans, jusqu’à la prochaine COG ». Ce qui est loin d’être suffisant aux yeux de Lionel Dell’Angelo, qui craint, à terme, une « déshumanisation des relations ».

Sur ce point, l’engrenage semble s’être déjà enclenché, comme l’explique Brigitte Poli :

« Au niveau national, la direction sacrifie peu à peu l’accueil, au profit des télé-procédures. »

Pour elle, le but est clair :

« C’est pour habituer les gens à venir de moins en moins. »

Croisée à la sortie de l’antenne d’Argenteuil, Salia explique d’ailleurs qu’elle ne se déplace quasiment plus : « Je fais tout par Internet. » L’avenir des CAF est-il tout tracé ? Dans le Val-d’Oise, comme dans les autres départements, externalisations et mutualisations deviennent monnaie courante, quand il ne s’agit pas de fusions ou restructurations. L’année dernière, la direction envisageait de regrouper toutes les antennes du 95 dans un seul bâtiment, à Cergy.

Suite à un mouvement de grève, le projet a été abandonné. « Mais pas l’idée », assure Lionel Dell’Angelo. Le combat des salariés de la CAF semble donc loin d’être terminé.

 

 

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:08

 

 

Le Monde.fr avec AFP | 04.12.2012 à 10h24 • Mis à jour le 04.12.2012 à 11h36

 

 

Plusieurs quotidiens indépendants et d'opposition égyptiens ont décidé de ne pas paraître, mardi 4 décembre, pour protester contre les articles concernant la presse et les libertés dans le projet de Constitution devant être soumis à référendum le 15 décembre.

Il s'agit de "faire face à la tyrannie", a affirmé le quotidien Al-Tahrir sur son site Internet. Les journaux entendent "protester contre les articles concernant la presse et les libertés dans le projet de Constitution (...) et rejeter le décret publié par le président de la République le 22 novembre", a de son côté indiqué Al-Masry Al-Yom.

Par ce décret, le président islamiste Mohamed Morsi a considérablement élargi ses pouvoirs, mettant notamment ses décisions et la commission chargée de rédiger la future Constitution à l'abri de tout recours en justice. Le président a convoqué un référendum pour le 15 décembre sur le texte adopté en toute hâte par la commission constituante, auquel il est reproché de ne pas protéger certains droits fondamentaux, dont la liberté d'expression, et d'ouvrir la porte à une application plus stricte de la loi islamique.

PROFONDE CRISE POLITIQUE

 

"Vous lisez ce message parce qu''Egypt Independent' s'oppose aux restrictions continues contre les libertés des médias, surtout après que des centaines d'Egyptiens ont donné leur vie pour la liberté et la dignité".

 

Le pendant anglophone d'Al-Masry Al-Yom, Egypt Independent, affichait un message sur fond noir sur son site Internet. "Vous lisez ce message parce qu'Egypt Independent s'oppose aux restrictions continues contre les libertés des médias, surtout après que des centaines d'Egyptiens ont donné leur vie pour la liberté et la dignité", a-t-il expliqué.

Les quotidiens gouvernementaux, comme Al-Ahram, étaient pour leur part disponibles mardi en version papier.

Des chaînes privées, comme ON-TV et Dream, doivent rejoindre le mouvement de protestation mercredi en ne diffusant pas de programme. Lundi, les journaux indépendants et d'opposition avaient déjà exprimé leur rejet des décisions du président en titrant simultanément "Non à la dictature".

L'Egypte vit une profonde crise politique qui divise le pays ainsi que le pouvoir judiciaire depuis le décret du 22 novembre. L'opposition a prévu une nouvelle manifestation mardi, dite du "dernier avertissement", devant le palais présidentiel.

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 18:05

 

Le Monde.fr avec AFP | 04.12.2012 à 11h14

 

 

 

La quatrième économie de la zone euro a enregistré en novembre une hausse de 1,54 % par rapport à octobre, tandis que sur un an, la hausse ressort à 11,02 %.

Le chômage a poursuivi sa progression en Espagne au mois de novembre, avec 4,91 millions de demandeurs d'emploi, a annoncé mardi 4 décembre le ministère de l'emploi, alors que le pays est pris en tenailles entre l'objectif de réduction de son déficit et la récession de son économie.

La quatrième économie de la zone euro a enregistré en novembre 74 296 chômeurs de plus qu'en octobre (+ 1,54 %), tandis que sur un an il y a eu 487 355 demandeurs d'emploi supplémentaires (+ 11,02 %), pour arriver à 4 907 817 chômeurs.

Selon l'Institut national de la statistique (INE), qui utilise une méthode de calcul différente de celle du ministère, le taux de chômage a franchi au troisième trimestre la barre historique des 25 %, avec 25,02 %, le niveau le plus élevé, après la Grèce, dans l'ensemble du monde industrialisé.

Le gouvernement continue pourtant de tabler sur un taux, à la fin de 2012, de 24,6 %, puis sur une légère baisse en 2013, à 23,3 %. Les chiffres du mois de novembre sont partiellement gonflés par un effet ponctuel, souligne le ministère dans un communiqué : 37 983 personnes supplémentaires sont apparues dans les statistiques le mois dernier, du fait de la suppression d'une convention concernant les aides-soignants non professionnels auprès des personnes dépendantes. Sans cette mesure, le nombre de chômeurs aurait augmenté de 0,75 % par rapport au mois précédent.

 

 LES FEMMES ET LES SERVICES TOUCHÉS

Les femmes sont plus touchées par l'augmentation du chômage, avec une progression de 2,08 % par rapport à octobre, contre une hausse de 0,98 % chez les hommes. Par ailleurs, il diminue légèrement chez les jeunes de moins de 25 ans (- 0,21 %), une catégorie où le taux de chômage atteint les 52 %, selon l'INE.

Les services continuent à être le secteur où le nombre de chômeurs augmente le plus (63 166 demandeurs d'emploi supplémentaires), devant l'agriculture (+ 5 777) et l'industrie (+ 4 670), ne baissant que dans la construction (de 2 271 personnes).

L'Espagne, frappée par l'éclatement de la bulle immobilière en 2008, a renoué avec la récession à la fin de 2011, moins de deux ans après en être sortie. Engagée dans une course à la réduction du déficit public, pour le ramener de 9,4 % du PIB en 2011 à 2,8 % en 2014, elle a lancé un vaste programme de rigueur pour récupérer d'ici à cette date 150 milliards d'euros, multipliant les coupes budgétaires et les hausses d'impôt.

Mais selon les analystes, cette cure d'austérité repousse un peu plus la reprise économique du pays, et le gouvernement conservateur s'est lui-même résigné à une nouvelle année de récession en 2013.

Dans un pays où un actif sur quatre est au chômage, un tel régime de rigueur provoque un fort mouvement de contestation sociale et une compression des dépenses des foyers espagnols. Les ventes de détail sont ainsi en recul depuis vingt-huit mois consécutifs, signe de la morosité des ménages, auxquels un nouveau coup dur a été porté en septembre, avec la hausse de la TVA, de 18 % à 21 % pour le taux plein.

1,5 milliard d'euros de plus pour les banques

 

 

En plus des 39,5 milliards d'euros prévus initialement (37 milliards pour les banques nationalisées et 2,5 milliards pour financer la structure de défaisance des actifs immobiliers toxiques), le secteur bancaire espagnol aura encore besoin de 1,5 milliard d'euros provenant du fonds de soutien de la zone euro pour être recapitalisé, a affirmé le ministre des finances espagnol, Luis De Guindos.

Il a expliqué avoir effectué lundi la "demande formelle" d'aide pour les quatre banques nationalisées, dernière étape avant son versement par le Mécanisme européen de stabilité (MES). Cette demande a été acceptée par le MES, a répondu le chef de file de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker.

L'aide européenne de près de 37 milliards d'euros aux banques espagnoles en difficulté sera par ailleurs versée "autour du 12 décembre". La Commission européenne avait donné, mercredi, son aval au plan de restructuration des quatre entités nationalisées (Bankia, Novagalicia, CatalunyaCaixa et Banco de Valencia), feu vert dont dépendait le versement de l'aide de la zone euro.

 

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 17:01

 

 

Le docteur Joël Dutertre tient depuis six années à la Mission locale de Sénart (Seine-et-Marne) une consultation de généraliste gratuite et très fréquentée. Ce Point santé jeunes représente souvent le seul accès possible au soin pour une population de 16-25 ans en recherche, de plus en plus malaisée, d’emploi, et menacée par la précarité. Le médecin est ainsi aux premières loges pour mesurer la dégradation de l’état de santé de cette jeunesse non-insérée.

 

Le Dr Joël Dutertre, médecin à la Mission locale de Sénart. (Photo : Capucine Granier-Deferre pour Le Monde)

 

L’accès au soin

 "Les jeunes que je reçois, les plus en difficulté sur un territoire, ne fréquentent pas les cabinets libéraux. Ils se 'débrouillent', se rendent à l’hôpital en urgence ou de façon inappropriée. Dans 60 % des cas, il y a un frein financier qui les empêche de consulter. Même quand ils ont une mutuelle, ils ne peuvent pas avancer les honoraires. Ils ont aussi l’impression de ne pas savoir s’y prendre, d’être mal accueillis, d’entendre un langage incompréhensible. Il y a une appréhension du rapport au monde médical qui leur semble très éloigné d’eux. Tout cela témoigne d’une fracture entre ces jeunes et la société. Du coup, le gamin qui se tord la cheville ou le genou au foot et ne consulte pas, donc n’immobilise pas son articulation, devra se faire opérer. Les ulcères non-soignés donnent des hémorragies digestives, etc." 

Les maux dentaires

"Aucun jeune n’arrive à décrocher de rendez-vous chez le dentiste. La petite carie se transforme en abcès. Au bout de trois semaines de douleur, le mal disparaît, la dent est mortifiée. Certains patientent en avalant des boîtes entières de Doliprane, d’autres se mettent la tête entre deux baffles, la musique poussée à fond. Pour combler le creux dans la dent, les jeunes mettent du chewing-gum, du coton et même de la colle !"

Les plaintes fonctionnelles

"Maux de tête, de ventre, de dos… C’est le cas des trois quarts des jeunes femmes que je reçois. Parfois, la douleur au ventre dissimule autre chose. Dans 15 % des cas, les jeunes femmes finissent par signaler des sévices sexuels. Les premiers rapports sexuels sont souvent une catastrophe, ils se déroulent 'à l’arrache', avec des pratiques de sodomie imposées."

La souffrance psychique

"40 % des jeunes reçus au Point santé présentent une souffrance explicite ou implicite qui nécessiterait un suivi psychologique ou psychiatrique – dont en fait seulement un sur dix bénéficie. Qu’ils aient des psychoses, dont beaucoup sont dépistées ici pour la première fois, ou des troubles de la personnalité qui vont compromettre l’insertion. Ou qu’ils soient en vraie dépression. Beaucoup de ces jeunes plus vulnérables que d’autres s’amélioreraient grâce à la seule insertion professionnelle, facteur d’autonomie et de séparation du milieu familial. Mais aujourd’hui, ils sont les premiers à rester sur la touche. La mise en échec socio-professionnelle alimente leur perte d’estime d’eux-mêmes."


(Photo : Capucine Granier-Deferre pour Le Monde)

L’obésité

"15 % de mes patients souffrent d’obésité sévère. C’est terrible, parce que si l’on n’agit pas à cet âge là, on sait que cela va s’aggraver. Cette obésité veut dire des choses. Elle fait écran, elle attire l’attention sur un mal-être, elle cache souvent chez les filles des violences sexuelles… Mes patients qui en sont atteints sont passifs, ils ne se sentent pas exister. Et depuis six ans, je n’ai jamais trouvé personne alentour chez qui les orienter ! Les diététiciens hospitaliers sont débordés, les médecins nutritionnistes libéraux pratiquent tous le dépassement d’honoraires."

 Les maladies chroniques

"Elles sont mal suivies, mal stabilisées. Je n’ai jamais vu ici aucun diabétique convenablement soigné. Je suis également stupéfait du nombre de maladies auto-immunes. Ces maladies dans lesquelles on développe des anticorps contre soi. Je ne me l’explique pas, je constate."

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A lire également : Pauvre jeunesse (1) : "Le monde qu'on leur propose n'est pas terrible" 

 

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4 décembre 2012 2 04 /12 /décembre /2012 16:47

 

Le Monde.fr | 04.12.2012 à 17h00 • Mis à jour le 04.12.2012 à 17h27 Par Cédric Pietralunga

 

 

Le site ArcellorMittal de Florange, dans l'Est de la France, le 3 décembre 2012.

Dans ce document, il est indiqué que seuls 53 millions d'euros, sur les 180 millions d'investissements sur cinq ans promis par l'industriel à Florange, seront consacrés aux "investissements stratégiques".

 


 
ArcelorMittal s'est engagé à investir 180 millions à Florange.

La réunion entre les syndicalistes de Florange (Moselle) et le premier ministre Jean-Marc Ayrault, prévue mercredi 5 décembre à 18 heures, risque de virer à l'explication de texte. L'accord signé entre ArcelorMittal et le gouvernement, que Matignon refuse de publier mais dont Le Monde s'est procuré une copie, est en effet loin de lever toutes les interrogations sur le site lorrain du numéro un mondial de la sidérurgie.

Dans ce document de – seulement – deux pages, il est ainsi indiqué que les 180 millions d'euros d'investissements sur cinq ans promis par ArcelorMittal seront certes "réalisés de manière inconditionnelle", à la différence de ceux promis par Lakshmi Mittal à Nicolas Sarkozy en 2008. Mais "les investissements stratégiques" ne représenteront que 53 millions d'euros de l'ensemble.

Tout le reste, ce sera "le flux d'investissements courants, les investissements de pérennité, santé, sécurité et progrès continu, et la maintenance exceptionnelle", c'est-à-dire un vaste fourre-tout où à peu près tout et n'importe quoi peut être comptabilisé, et notamment les frais de maintenance. Exactement ce que craignaient les syndicats, qui accusent Lakshmi Mittal de vouloir faire passer pour une concession de sa part des dépenses qu'il était de toutes façons obligé d'effectuer.

Néanmoins, il est indiqué que le train à chaud, un équipement stratégique du site, "fait partie des outils majeurs du dispositif de laminage" de l'entreprise et verra donc son niveau de production "maintenu autour de 2 millions de tonnes par an pour alimenter en bobines l'aval de la Lorraine ". Cette pérennisation du train à chaud était réclamée depuis longtemps par l'intersyndicale de Florange.

 

 SÉCURISER L'EMPLOI

Concernant les activités de packaging (fabrication du métal pour boîtes de conserve et canettes), dont une ligne sur deux seulement fonctionne actuellement sur le site, il est écrit noir sur blanc que "ArcelorMittal concentrera les activités de l'amont du packaging de l'entité Atlantique et Lorraine sur Florange ", ce qui devrait assurer la survie des lignes d'étamage "pendant cinq ans" et sécuriser du même coup l'emploi sur la même période. En échange, "l'activité amont de Basse-Indre [un autre site d'ArcelorMittal situé en Loire-Atlantique] sera mise en arrêt temporaire" et l'activité de recuit d'Ebange, une usine du groupe située près de Florange, pourra être mise en "arrêt temporaire" elle aussi, "en fonction de l'optimisation des carnets".

Mais, peut-on lire dans cet accord, "ce transfert d'activité n'impactera pas les effectifs inscrits à Basse-Indre", un engagement sur lequel Jean-Marc Ayrault s'est battu puisque ce site est situé dans son fief électoral, près de Nantes.

Concernant Ulcos, le programme de recherche sur la captation du dioxyde de carbone (CO2), présenté par Matignon comme la bouée de sauvetage des hauts-fourneaux de Florange, les engagements d'ArcelorMittal sont là aussi très succincts. S'il est indiqué qu'Ulcos "reste un projet important pour développer de nouvelles solutions mieux adaptées aux enjeux du changement climatique", il est aussi clairement écrit que "l'état actuel des résultats de la recherche ne permet pas de passer directement sur le démonstrateur industriel de Florange". Autrement dit : le projet n'est pas près de voir le jour.

Seul engagement concédé par Lakshmi Mittal : son groupe "va proposer (...) de continuer à travailler sur le projet de recherche et de validation technologique, en s'appuyant notamment sur l'expertise du centre R&D de Maizières-lès-Metz".

Conséquence, les "installations de la phase liquide seront mises sous cocon dans l'état actuel et compatible avec la perspective de réalisation d'un démonstrateur industriel Ulcos sur un haut-fourneau". Une phrase qui confirme que le P3, arrêté depuis juin 2011, est bien définitivement abandonné, et que le P6 ne sera pas relancé tout de suite puisque "le fonctionnement de toutes ces installations sera arrêté en toute sécurité à l'issue de la procédure légale", c'est-à-dire fin mars 2013. Le groupe s'engage simplement "à ne pas démonter ces installations dans les six ans".

 

 LES SALARIÉS DE LA FILIALE GEPOR PRIS EN CHARGE

Sur le plan social, il est stipulé que les salariés des hauts-fourneaux, au nombre de 629, seront reclassés "sur des bases exclusivement volontaires", avec "un dispositif de gestion des fins de carrière et sur la mobilité interne au site". "ArcelorMittal continuera à proposer à des personnes volontaires les postes disponibles sur ses autres sites", est-il également indiqué.

Par ailleurs, le document stipule que les salariés de Gepor, une filiale d'ArcelorMittal qui emploie 130 personnes à Florange et pour lesquelles les syndicats se montraient très inquiets ces derniers jours, bénéficieront "des mesures de gestion de fin de carrière et de mobilité avec des conditions similaires à Florange".

Enfin, et cela devrait déclencher l'ire des salariés concernés, il est indiqué que seulement trois hauts-fourneaux seront conservés à Dunkerque (Nord) "à l'échéance minimale des cinq prochaines années". Autrement dit, le HF2 arrêté pour maintenance cet été, et dont la mise en sommeil a été prolongée cet automne, ne devrait plus produire avant longtemps le million de tonnes de fonte qu'il sortait chaque année auparavant... 

 

Cédric Pietralunga

 

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