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21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 16:10

 

 

Source : marianne.net

 

L'économie n'est pas une science morale
Jeudi 21 Novembre 2013 à 05:00

 

Michel Santi*

 

Dans le cadre de la crise économique et financière qui sévit aujourd’hui en Europe et aux Etats-Unis, la manipulation pratiquée sur les opinions publiques atteint son paroxysme.

 

L'économie n'est pas une science morale

Nous pensons que nous savons. Dans le cadre de la crise économique et financière qui sévit aujourd’hui en Europe et aux Etats-Unis, la manipulation pratiquée sur les opinions publiques atteint son paroxysme. Certes, cette intox n’est-elle (et de loin) pas un phénomène récent. Déjà en 1996, un sondage avait révélé que la majorité des citoyens américains était persuadée que le déficit budgétaire s’était détérioré sous la Présidence Clinton…alors que – en réalité - il n’avait fait que s’améliorer !


Pour autant, la désinformation subie par nos sociétés devient aujourd’hui carrément dramatique. Ainsi, un sondage conduit il y a quelques semaines par Google indique une majorité convaincue de l’aggravation du déficit budgétaire US depuis 2010, sachant que 40% des sondés vont jusqu’à déclarer que ce chiffre s’est même très substantiellement détérioré. Alors que seuls 12% des sondés semblent au courant de la réalité, qui est que le déficit budgétaire américain s’est considérablement amélioré depuis 2010 ! Nous pensons que nous savons. Mais nous sommes induits en erreur par des responsables politiques ultra-libéraux, dont l’unique objectif est de conditionner notre réflexion et nos réactions en faveur d’un strict conservatisme économique.


Restons sur le terrain américain où l’affrontement entre progressistes et orthodoxes prend des allures de pugilat. A cet égard, soyons sans illusion sur la situation prévalant en Europe, même si cette ligne de fracture – qui existe aussi très clairement – évite pour le moment de sombrer dans les excès verbaux. Ou dans des déclarations ambigües et fallacieuses, quand elles ne sont pas ouvertement mensongères, comme cela se pratique quotidiennement aux Etats-Unis. A l’instar de ce parlementaire Républicains éminent, Eric Cantor, qui affirmait tout récemment  que le déficit de son pays était en augmentation. Ou comme le Sénateur Rand Paul qui accuse le gouvernement US actuel d’accumuler depuis des années un déficit d’« un trillion de dollars », alors que ce dernier – qui ne fait que baisser- serat de seulement 642 milliards en 2013 ! Sachant que ce même Rand Paul, expert auto-proclamé en économie et potentiel candidat à la Présidentielle américaine, fit une réponse incroyable à une question posée par un journaliste. En effet, interrogé sur son candidat idéal à la succession de Ben Bernanke à la tête de la Réserve fédérale, Rand Paul devait afficher sa préférence pour … Milton Friedman, décédé en 2006 et qui – même encore vivant- aurait largement dépassé la limite d’âge pour diriger une banque centrale puisqu’il aurait eu 101 ans en 2013 !


Par delà cette bourde anecdotique et ridicule attestant de la culture et de la compétence économiques des « austériens », l’assainissement des déficits passe très clairement pour eux (bien) avant l’emploi. Leur pierre angulaire se décline donc en remboursement immédiat toutes les dettes et en réductions drastiques de toutes les dépenses publiques. Même si les travaux de leurs théoriciens – les économistes Reinhart et Rogoff cités à outrance pour leurs calculs déterminant un cliquet des endettements publics à 90% supposé nuire à la croissance – sont passés à la trappe pour des « erreurs excel » pitoyables.


Même si l’institution dont ils se réclamaient tous – à savoir le F.M.I. – a admis dès 2012  avoir sous-estimé les conséquences néfastes de la rigueur instaurée en Europe. En réalité, cette psychose de la dette est distillée pour des raisons identifiées il y a déjà près de 150 ans par Marx : pour asseoir et pour consolider l’emprise du capital sur nos sociétés.  Et décrites il y a 70 ans par l’économiste Kelecki dans son ouvrage –«  Les aspects politiques du plein emploi  «   – à une époque où il était encore du devoir des Etats d’assurer le plein emploi. Kalecki avait en effet lucidement décrit l’opposition féroce du monde des affaires, des patrons d’entreprises et du capital en général à l’encontre des dépenses publiques. Pour eux, toute intervention étatique était à bannir et à honnir – y compris dans le cadre d’une récession sévère -, car elle remettait en cause le climat de confiance, préalable à tout investissement.


Dès lors, la régulation, les dépenses sociales excessives, l’assurance-santé (comme on le voit aujourd’hui aux Etats-Unis) et les hausses d’impôts visant les nantis seraient autant d’écueils fragilisant la confiance, l’investissement et en définitive l’emploi ! Cette désinformation – ou ce chantage ! – se poursuit bien entendu de nos jours, tout en prenant une ampleur inédite puisqu’il nous est quotidiennement assené que l’expansion monétaire provoque l’hyperinflation, que les déficits budgétaires aboutissent à l’escalade des taux d’intérêt, que la rigueur budgétaire favorise l’emploi,  que la croissance s’inverse dès que les déficits publics dépassent 90% du P.I.B, et que la politique activiste de certaines banques centrales (Fed, Banque du Japon) empêche une croissance saine… Des forces à la puissance redoutable sont donc à l’œuvre – la droite conservatrice, les néo libéraux, la Bundesbank, la nation allemande, l’ignorance de nos politiques des mécanismes macro économiques –  dont l’objectif est d’instaurer toujours et partout la discipline et la culture de l’argent qui se doit d’être durement gagné.


Les organes de cette orthodoxie partent donc du principe dogmatique selon lequel souffrance et privations sont un chemin de croix incontournable pour lutter contre la dépression de nos économies. Ces austères austériens exigent une inflation nulle tout en récusant violemment une banque centrale dont la préoccupation serait de rétablir l’activité économique. Ces adeptes de l’ « école autrichienne » vivent dans un monde pré-copernicien, celui où l’on était encore persuadé que la Terre était plate ! Car, pour eux, tout doit être sacrifié – y compris l’emploi qui n’est en finalité qu’une variable – dans le but de conserver une inflation quasi-nulle, car leur morale leur enseigne que l’argent est une valeur sacrée. Tandis que la reflation est diabolique, parce que trop facile.

 

(*) Michel Santi est économiste, auteur de « L'Europe, chronique d'un fiasco politique et économique », « Capitalism without conscience » . Son dernier ouvrage est  «Splendeurs et misères du libéralisme»  (l’Harmattan), 

 

 

 

 

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21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 15:58

 

Source : marianne.net

 

Marianne rencontre Frédéric Lordon à Science PO
Jeudi 21 Novembre 2013 à 10:12

 

Philippe Petit

 

Dix sept ans ! Dix sept ans que Marianne s’associe avec les semaines européennes de la philosophie à Lille avec la même vocation : rendre la philosophie populaire.

 

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C’est la dix-septième année que Marianne s’associe avec les semaines européennes de la philosophie à Lille. Dix sept ans ! Cela correspond quasiment avec le début de notre journal dont la vocation fut toujours celle de Diderot : rendre la philosophie populaire. Il y a dix sept ans nous rendions compte quasiment jour par jour de cet événement inouï qui accueille chaque année une centaine d’intervenants et modérateurs à Lille, mais aussi Arras, Roubaix et d’autres villes de la région.

Ces semaines sont une institution désormais, mais qui a le souci de se renouveler, de s’ouvrir à d’autres disciplines, à d’autres arts, tel le cinéma, et d’inviter chaque année un pays. Cette année le Japon est ce pays : avec sa cuisine, son cinéma, sa catastrophe nucléaire. Pour faire vite. Vendredi 17 Novembre à 19 heures 30, j’aurai le plaisir de présenter Frédéric Lordon, qui a discuté cet été dans Marianne avec Emmanuel Tood, pour animer une soirée consacrée à son dernier livre : La société des affects. Pour un structuralisme des passions (Seuil).

Qu’est-ce que l’affect ? D’où vient ce mot ?

J’ai pour habitude devant un tel massif conceptuel d’interroger le titre et de me demander ce que pourrait être la réaction d’un lecteur ordinaire, se promenant dans une librairie, musardant, et se trouvant nez à nez avec ce titre. Les affects d’abord ? Pourquoi ce mot. Le vocabulaire de l'affectivité est l'un des plus difficiles à traduire d'une langue à l'autre. Nos mots ont presque toujours une extension plus grande ou plus petite que ceux des autres cultures. Ils coïncident rarement entre eux. En anglais par exemple le terme de feeling, qui en est le plus proche, ne recouvre pas exactement l'extension de celui d'affectivité. Les traducteurs usent parfois de l'expression de « tonalité affective » pour rendre l'intraduisible Stimmung allemand.

Affectus en réalité traduisait en latin le pathos grec. Mais le pathos ne concerne pas seulement le sujet, il touche aussi l'objet, et à ce niveau d’explications il faudrait embrayer sur Aristote. Allons à l’essentiel. Car la première phrase du livre de Frédéric Lordon est celle-ci : « La société marche aux désirs et aux affects ».

Qu’est-ce que l’affect chez Spinoza ?

Le désir pose le monde comme disait Sartre. Et nous ne parlerons pas de lui ; et les affects, que posent-ils ? Le mot « affect » a été réintroduit dans la langue française via l’allemand Affekt - que l'on traduisait jusque-là par « émotion » ou par « passion. L'affect est, littéralement, ce qui nous fait (affacereafficere) quelque chose. Être affecté, cela signifie n'être pas soi-même l’auteur de ce que l'on éprouve. On se dispensera de Freud et on ira à l’essentiel. L’affect tel que le conçoit Frédéric Lordon renvoie à la définition de Spinoza. La troisième partie de l’Éthique de Spinoza est en effet consacrée à l'origine et à la nature des affects. C'est au début de sa préface et en évoquant la façon dont les affects ont été conçus que Spinoza dit, en une formule qui deviendra célèbre : on dirait que ceux qui ont écrit sur cette matière « conçoivent l'homme dans la nature comme un empire dans un l'empire »

Loin d'être hors de la nature, les affects, selon Spinoza, suivent les lois de la nature. Il ne saurait en être autrement dès lors que la Nature (identifiée avec Dieu) est conçue comme la substance unique. La troisième partie de l’Éthique commence par trois définitions - celle de la cause adéquate et de la cause inadéquate, celle de l'agir et du pâtir, et celle de l'affect. Ces trois définitions se suivent selon un lien de subordination : la première commande la seconde, qui commande la troisième :

« I. J'appelle cause adéquate celle dont l'effet peut se percevoir clairement et distinctement par elle. Et j'appelle inadéquate, autrement dit partielle, celle dont l’effet ne peut se comprendre par elle seule. II. Je dis que nous agissons quand il se fait en nous ou hors de nous quelque chose dont nous sommes cause adéquate, c'est-à-dire quand de notre nature il suit, en nous ou hors de nous, quelque chose qui peut se comprendre clairement et distinctement par elle seule. Et je dis au contraire que nous pâtissons, quand il se fait en nous quelque chose, ou quand de notre nature il suit quelque chose, dont nous ne sommes la cause que partielle. III. Par affect, j'entends les affections du corps, qui augmentent ou diminuent, aident ou contrarient la puissance d'agir de ce corps, et en même temps les idées de ces affections. Si donc nous pouvons être cause adéquate d'une de ces affections, alors par affect j'entends une action ; autrement, une passion ».

Spinoza appelle joie l'affection qui augmente la puissance d'agir du corps et tristesse celle qui la diminue. Tout ce que nous nommons aujourd'hui affectivité dérive ou bien de la joie ou bien de la tristesse, c'est-à-dire augmente ou diminue la puissance d'agir de notre corps.

Ceci pour dire qu’avant d’aller écouter Frédéric Lordon, il est utile de réviser son Spinoza !!!
Quel est l’affect vertueux qui nous pousse à vouloir réformer le capitalisme ? Qu’est-ce qui fait lever un trader le matin ?

Réponse vendredi à Sciences Po Lille*

Cité Philo à Lille, vendredi 22/11/ 2013
* www. citephilo.org
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21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 15:41

 

 

Source : bastamag.net

 

 

Responsabilité sociale ?

 Ecarts de rémunérations entre salariés et PDG : quelles sont les entreprises françaises les plus inégalitaires ?

par Ivan du Roy 21 novembre 2013

 

 

     

    Pour se rendre compte de l’ampleur des inégalités qui existent au sein d’une même entreprise, nous avons mesuré l’écart entre la rémunération des PDG et la dépense moyenne consacrée à chaque salarié de 47 sociétés cotées en bourse. En 2012, avec un écart allant de 1 à 264, l’entreprise la plus inégalitaire est Publicis, suivie de LVMH et Danone. Les entreprises les plus « raisonnables » en matière d’échelle de salaires sont Iliad (Free), Bouygues et Safran. De quoi alimenter le débat sur l’encadrement des rétributions des dirigeants. Enquête.

    Quel devrait être l’écart raisonnable de rémunération entre les salariés et leur patron ? Dans les années 1930, l’industriel Henry Ford, grande figure du capitalisme, estimait que pour être « admissible », l’échelle des salaires au sein d’une entreprise ne devait pas dépasser 1 à 40. Un bon demi-siècle plus tard, suite à la crise financière de 2008, le président Barak Obama propose de plafonner à 500 000 dollars la rémunération annuelle des dirigeants des entreprises renflouées par l’État. Soit un écart d’environ 1 à 25 avec le salaire minimum.

    De son côté, le gouvernement français décide en juin 2012 d’encadrer les rémunérations des dirigeants des entreprises publiques, sur une échelle de 1 à 20 comparé au salaire moyen. Soit 450 000 euros maximum – 37 500 euros par mois – pour les PDG d’Areva, d’EDF ou de La Poste. Promise par François Hollande avant son élection, la mesure est entrée en vigueur en 2013. Nos voisins suisses pourraient même aller plus loin encore, puisqu’ils doivent se prononcer par référendum populaire, le 24 novembre prochain, sur une restriction de l’écart des salaires au sein d’une même entreprise de 1 à 12.

    Le « marché » est, lui, beaucoup plus généreux avec les dirigeants d’entreprises cotées que ne le sont Barack Obama et François Hollande, ou que ne l’était Henry Ford, pourtant très éloigné de l’idéal socialiste. Au sein des 47 grandes entreprises du CAC 40 et du SBF 120 (Société des bourses françaises, un indice qui prend en compte les 120 premières capitalisations boursières) que Basta ! et l’Observatoire des multinationales ont étudié (voir notre tableau ci-dessous), seules 13 entreprises pratiquent un écart de salaire « admissible » au sens où le concevait Henry Ford. Toutes les autres sont au-dessus. L’écart moyen entre les rémunérations et avantages des PDG et les dépenses moyennes consacrées aux salariés – salaires bruts, cotisations patronales, primes, heures supplémentaires, plans d’épargne retraite et mutuelles d’entreprise le cas échéant – est de 77 : un PDG gagne en moyenne 77 fois plus que ses salariés ! Et cette échelle prend en compte tous les éventuels « avantages » dont bénéficient, en plus de leurs salaires, les employés. Toutes les données sont issues des documents de référence remis par les entreprises à l’Autorité des marchés financiers.

     

    Publicis, LVMH et Danone, champions des inégalités salariales

    Selon notre classement, l’entreprise la plus inégalitaire en 2012 est Publicis. Pour percevoir la rétribution annuelle du PDG Maurice Lévy en 2012, les 57 500 salariés du groupe de communication devront travailler en moyenne 264 ans ! En d’autres termes, six générations d’une même famille devront chacun leur tour bosser pendant 40 ans à Publicis pour égaler les émoluments de leur patron sur une année ! Pourtant, le groupe présidé par Elisabeth Badinter fait partie des dix entreprises qui dépensent le plus, en moyenne, par salarié [1]. Ce grand écart est en partie lié à la rétribution exceptionnelle accordée en 2012 à Maurice Lévy, qui s’est vu octroyer une « rémunération conditionnelle différée » de 16 millions d’euros s’ajoutant aux 2,7 millions de salaire annuel.

    Derrière Publicis, arrive LVMH. Au sein de l’empire du luxe, il faudra travailler en moyenne 207 années pour gagner les 9,5 millions d’euros perçus par Bernard Arnault en 2012. Sa rémunération (3,9 millions) s’ajoute à la « valorisation des actions gratuites de performance attribuées au cours de l’exercice », soit plus de 5,5 millions d’euros. A mettre en parallèle avec les 45 163 euros que le groupe débourse en moyenne pour chacun de ses 106 348 « collaborateurs » dans le monde. Le multimilliardaire aime les records. Il est également la première fortune de France, avec un patrimoine équivalent à 1,8 million d’années de Smic.

     

    Le PDG de Publicis : 1091 années de Smic en 2012

    Médaille de bronze des inégalités salariales de 2012, le groupe agroalimentaire Danone, avec un écart allant de 1 à 195 entre le PDG Franck Riboud et la moyenne de dépenses consacrées aux 102 400 employés du groupe. Une gratification équivalente au travail de près de cinq générations de loyaux collaborateurs, qui, même s’ils partagent les valeurs du groupe, n’auront pas la « chance inouïe » de l’héritier d’Antoine Riboud. Derrière Danone, suivent le groupe hôtelier Accor, l’entreprise de service Sodexo – qui figurent parmi les entreprises qui dépensent le moins par salarié – ainsi que le groupe média Vivendi.

    Cliquez sur chaque entrée du tableau pour voir le classement des 47 entreprises par catégorie, par ordre croissant ou décroissant :

    Maurice Lévy, Bernard Arnault et Franck Riboud explosent ainsi allègrement le « maximum socialement acceptable » estimé par le cabinet de conseil et d’analyse financière Proxinvest, fixé à 240 Smic (1430 euros bruts par mois). Avec sa « rémunération conditionnelle différée », celle de Maurice Lévy atteint les 1091 années de Smic, 546 années de Smic pour Bernard Arnault et 319 pour Franck Riboud [2].

     

    Les moins inégalitaires : Iliad, Bouygues et Safran

    A l’inverse, quelles sont les entreprises les moins inégalitaires ? Iliad (télécoms), Bouygues (BTP), Safran (défense), Solvay (chimie) et Orange (ex-France Télécom) sont celles où les écarts de rémunérations pourraient être jugées « admissibles ». L’échelle entre employés et PDG n’excède pas 1 à 25. Les salariés n’y sont pas forcément mieux choyés qu’ailleurs : Iliad (Free), dirigé par Xavier Niel, est l’une des entreprises qui dépense le moins pour ses troupes : 26 160 euros en moyenne. Dans ce cas, le faible écart s’explique par la relative modération des rémunérations de ses dirigeants : 384 000 euros « seulement » pour chacun des deux directeurs généraux d’Iliad, Maxime Lombardini et Thomas Reynaud. De son côté, le fondateur de Free se contente de 175 360 euros par an. Ce qui en fait le grand patron de notre panel le plus modéré en matière de rémunération. Xavier Niel n’est cependant pas à plaindre : il détient 58 % de sa société, la valorisation de l’action l’ayant propulsé à la 10ème place des plus grosses fortunes françaises, selon le classement du magazine Challenges. Bien qu’elles dépassent le million, les paies des PDG de Bouygues, Safran, Solvay et Orange sont aussi parmi les dix moins élevées des 47 entreprises étudiées. Cette modération est toute relative. La direction de Safran envisage de verser un parachute doré de 2,8 millions d’euros à son PDG, Jean-Paul Herteman. Indemnités à laquelle l’État, actionnaire à 30%, s’est opposé.

    Qu’en est-il des entreprises publiques ? En juin 2012, le gouvernement a pris un décret limitant la rémunération des entreprises où l’État est majoritaire, à 450 000 euros par an. Deux entreprises de notre tableau sont concernées : Areva et EDF. Henri Proglio, le patron d’EDF, devra diviser par trois son salaire en 2013, et Luc Oursel, celui d’Areva, par six [3]. Si ce plafond est respecté, Areva et EDF deviendront les entreprises cotées les plus égalitaires, avec un écart entre patrons et dépenses moyennes par salarié allant de 1 à 6 pour Areva et de 1 à 11 pour EDF. Pas sûr que cela suffise à redorer le blason du nucléaire.

     

    Écarts inadmissibles

    Voici un an et demi, le gouvernement affichait sa volonté d’encadrer les émoluments des dirigeants de toutes les entreprises cotées, et pas seulement celles où il détient la majorité du capital. « Une loi régulera, voire prohibera certaines pratiques qui nous semblent excessives et donnera davantage de place aux représentants des salariés dans les instances qui fixent les rémunérations », prévenait alors Pierre Moscovici. Les velléités du ministre de l’Économie et des Finances n’ont pas duré longtemps. Trois semaines plus tard, fin juillet 2012, il annonce préférer « miser sur une autorégulation exigeante », laissée aux soins du Medef via son « code de gouvernement d’entreprise des sociétés cotées » censé encadrer ces hautes rémunérations. « Ils m’ont assuré qu’ils étaient prêts à des avancées importantes », ajoute le ministre. Il n’y a bien que lui pour le croire. « La rémunération totale moyenne des présidents exécutifs des 120 plus grandes sociétés françaises cotées a augmenté de 2,4% en 2012 et atteint 2 839 000 euros », révèle le cabinet Proxinvest. Avec les rémunérations exceptionnelles, comme les indemnités de départ, la hausse atteint même +6,3%. Une avancée importante, sans aucun doute...

    « À de tels niveaux de rémunération, toutes les études montrent qu’il n’y a pas de lien entre rémunération et performance des dirigeants », rappelle régulièrement l’économiste Thomas Piketty. Des écarts d’autant plus inadmissibles qu’en bas de la pyramide, les appels à la compétitivité, à la flexibilité et à la productivité sans augmentation de salaires sont devenus des injonctions permanentes.

    Ivan du Roy

    Infographie : Mathieu Lapprand

    Photo : CC Benjamine Scalvenzi

     


     

    Méthodologie du tableau

    Pour élaborer ce classement, l’Observatoire des multinationales et Basta ! ont étudié les documents de référence, remis à l’Autorité des marchés financiers, de 47 grandes entreprises cotées. Les dépenses globales en masse salariale de chaque multinationale ont été prises en compte. Elles incluent les rémunérations brutes, les cotisations patronales, les primes, les heures supplémentaires, les plans d’épargne retraite ou les couvertures santé internes, quand ils existent. Cette masse salariale divisée par l’effectif mondial de l’entreprise nous donne la dépense que chaque entreprise consacre en moyenne chaque année à chacun de ses salariés. Ce « budget moyen » par salarié est ensuite comparé à la plus haute rémunération de l’entreprise, celle du PDG en général, qui inclue le salaire fixe, les parts variables, les stocks options ou les plans de retraites. Ce qui donne l’écart qui figure dans notre tableau.

    Il existe bien évidemment d’autres disparités internes à une grande entreprise : entre un cadre supérieur et une employée d’un même site, entre un ouvrier français et son homologue turc, entre une caissière luxembourgeoise et sa collègue brésilienne. Les entreprises ne publiant pas de bilan social détaillé par pays, il nous est pour l’instant impossible de rendre compte de ces différences. De nombreuses entreprises ne publient pas non plus leur bilan social en France, où chaque tranche de salaires est détaillée ainsi que le nombre d’employés concernés. Nous ne pouvons donc pas comparer la situation des salariés français de ces groupes. Enfin, les grands groupes non cotés en bourse (Auchan, banques mutualistes comme le groupe Crédit Agricole ou le groupe BPCE…) n’ont pas l’obligation de publier leur document de référence. Ils n’apparaissent donc pas dans ce panel.

     

    Notes

    [170 887 euros par salarié si l’on prend les dépenses globales en masse salariale (rémunérations brutes, cotisations patronales, primes, heures supplémentaires, plans d’épargne retraite ou couvertures santé internes) rapportées à l’effectif mondial de l’entreprise.

    [2Treize dirigeants en 2012 dépassent la rémunération considérée par Proxinvest comme maximum socialement acceptable de 240 Smic, dont Bernard Charlès, DG de Dassault Systèmes (que nous n’avons pas encore intégré dans notre panel, cela ne saurait tarder), Carlos Ghosn, PDG de Renault-Nissan (nous n’avons pris en compte que sa fonction pour le groupe Renault) et Bernard Arnault. Lire ici.

    [3Nous avons cumulé la rémunération d’Anne Lauvergeon, partie courant 2012, et celle de son remplaçant, Luc Oursel, les deux ayant occupé le même poste alternativement en 2012.

     

     

     

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    21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 15:37

     

    Source : leparisien.fr

    Etats-Unis: à Arlington, la santé se gagne à la loterie
    20 nov. 2013, 21h31

     
    Ravie, Mossamat Jhumu brandit son ticket gagnant: le 15. A la loterie d'une clinique d'Arlington (Virginie, est), la jeune femme vient de gagner non pas des vélos ou des dollars, mais des soins gratuits. Fabienne Faur

    Ravie, Mossamat Jhumu brandit son ticket gagnant: le 15. A la loterie d'une clinique d'Arlington (Virginie, est), la jeune femme vient de gagner non pas des vélos ou des dollars, mais des soins gratuits.
    "C'est la quatrième fois que je venais tenter ma chance", raconte à l'AFP cette aide-soignante de 39 ans, originaire du Bangladesh et aujourd'hui naturalisée américaine. Comme 48 millions de ses concitoyens, elle ne bénéficie pas d'assurance-.


    De bon matin par une froide journée de novembre, Mossamat a donc patiemment attendu, avec une centaine d'autres personnes, que s'ouvrent les portes de l'Arlington Free Clinic, un centre de santé aux locaux clairs et modernes, dans la banlieue de Washington.
    A Arlington, "environ 10% des habitants n'ont pas d'assurance-santé", indique Jody Steiner Kelly, directrice administrative de la Free Clinic. Elles peuvent aller aux urgences si nécessaire, mais "pour un suivi complet, nous sommes une roue de secours", explique-t-elle.
    Alors une fois par mois, ce centre de santé privé, par des dons, organise une loterie d'où sortiront entre 20 et 25 vainqueurs. Le prix: l'inscription de l'heureux gagnant, après vérification qu'il est bien éligible, qui pourra ainsi soigner autant son mal de dos que son diabète ou son cancer.
    "La plupart des gens qui viennent nous voir souffrent de maladies chroniques, parce qu'ils attendent le dernier moment quand il faut choisir entre la nourriture, le loyer ou la santé", explique Mme Steiner Kelly.
    "Un docteur, c'est trop cher"
    En Virginie, la situation est d'autant plus aiguë pour les quelque 400.000 personnes en précarité qu'elles sont au centre d'une bataille politique sur la question de l'"Obamacare", la réforme de santé du Barack Obama.
    Les républicains, majoritaires en Virginie, ne veulent pas entendre parler d'une extension du nombre de bénéficiaires de "Medicaid", la couverture santé pour les plus démunis, optionnelle dans la réforme.
    Or, cet Etat tout proche de la capitale vient d'élire un gouverneur démocrate, Terry McAuliffe, qui a fait de cette extension son cheval de bataille.
    Plus d'une vingtaine d'Etats, tous à majorité républicaine, ont déjà annoncé leur opposition à cette extension qu'ils estiment trop coûteuse.
    Pour sa part, Mossamat Jhumu a déjà essayé deux fois de consulter le site internet de la réforme, dont le lancement a connu de spectaculaires ratés reconnus par Barack Obama.
    "Ca n'a pas marché. J'attends qu'ils réparent. J'espère pouvoir trouver une assurance", dit la jeune femme avant de prendre calmement sa place dans la file pour pouvoir s'inscrire et prendre un ticket.
    Puis chacun s'assoit en attendant le tirage. Claudia Nerio Mejia, 28 ans, "souffre du pied et a besoin de radios pour savoir d'où ça vient". "Un docteur, c'est trop cher", dit la jeune Salvadorienne qui, sans papiers, ne pourra jamais avoir d'assurance.
    Greg Bennett, 60 ans, qui présente des problèmes cardiaques, est citoyen américain. "Les gens dans ce pays ont des biens mais c'est le cash qui manque", dit-il en assurant que "les bords des routes américaines abondent en motos ou en voitures à vendre".
    Mme Steiner Kelly, traduite par une collègue hispanisante, rappelle à la cantonade les règles de la loterie: "La clinique n'est que pour les adultes, pas d'étudiants, et vous devez habiter les Etats-Unis depuis un an", dit-elle. Et bien sûr ne pas avoir d'assurance.
    L'heure est au tirage. Le ticket "A3" est sorti d'un petit panier d'osier. On s'exclame, on congratule le gagnant. Puis le 15 sort. "C'est comme gagner le gros lot!", s'exclame Mme Jhumu.
    Elle vient de remporter le droit de rejoindre les 1.700 patients traités par le centre, en consultation interne ou externe, grâce à un corps médical bénévole.
    Mme Steiner Kelly attend pour sa part avec impatience la mise en place de la réforme Obama. "Chaque patient nouvellement assuré laissera sa place à quelqu'un que nous ne pouvions pas prendre", dit-elle.
    Avant de lancer aux malchanceux, qui s'en vont en silence: "Prochaine loterie le 10 décembre !"

     

     

     

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    21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 15:33

     

    Source : mediapart.fr

     

    90 multinationales responsables de 60 % de la pollution mondiale

    |  Par La rédaction de Mediapart

     

     

    Alors que se déroule actuellement, en Pologne, une nouvelle conférence des Nations unies sur le changement climatique, le quotidien britannique The Guardian révèle que seulement 90 multinationales jouent un rôle majeur dans le réchauffement climatique.  

    Le quotidien britannique The Guardian révèle, mercredi 20 novembre, que plus de 60 % des émissions de gaz à effet de serre, responsables du changement climatique, sont produites par seulement 90 multinationales.

    Les principales entreprises citées par le journal pour leur implication dans le réchauffement climatique, Chevron, Exxon et British Petroleum, ont des activités dans le pétrole et l'extraction de matières premières.

    Lire sur The Guardian

     

     

     

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    21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 15:13

     

     

     

    Source : blogs.mediapart.fr

    Climat : les mouvements et ONG quittent les négociations – Explications !

    En décidant de quitter les négociations climat ce jeudi 21 novembre à Varsovie, les mouvements sociaux et ONG veulent faire dérailler le train-train de conférences qui nous mènent dans le mur. Place aux véritables solutions portées par les populations !

    Il serait tentant, mais beaucoup trop facile, d'accabler la présidence polonaise de la 19ème conférence de l'ONU sur le climat qui se déroule à Varsovie (11-22 nov). Au risque de laisser dans l'ombre ceux qui ont conduit ces négociations dans une impasse tragique.

    A Varsovie, c'est à se demander si le climat et des objectifs ambitieux de réduction d'émissions de gaz à effets de serre n'ont tout simplement pas disparu des négociations. Place à la promotion des énergies fossiles et à la liquidation du reste. Dans son registre, la Pologne fait fort. En introduisant au cœur de la conférence, comme sponsor et comme négociateur, quelques-unes des entreprises les plus polluantes de la planète, le gouvernement polonais contribue à étendre la mainmise des intérêts privés sur la conférence et le climat. Une présence tellement visible, jusque dans les annonces publiques diffusées en ville, qu'il est étonnant que la société civile n'ait pas mis sa participation dans la balance pour imposer leur retrait.

    Mainmise du secteur privé sur le climat !

    Mieux ! Le gouvernement polonais appuie un sommet mondial sur le charbon et le climat... Il promeut ainsi la plus polluante des énergies fossiles au moment où les rapports s'accumulent pour dire combien il est urgent de laisser dans le sol au minimum deux tiers des réserves prouvées d'énergies fossiles pour garder une chance de ne pas dépasser les 2°C de réchauffement d'ici la fin du siècle. Que fait l'ONU ? En acceptant d'intervenir lors de cette conférence et en affirmant que le « charbon pouvait faire partie de la solution », Christiana Figueres, secrétaire exécutive de la convention climat de l'ONU, a légitimé l'opération « charbon propre » menée par le gouvernement polonais. Un gouvernement qui multiplie les provocations en ayant renvoyé ce mercredi son ministre de l'environnement pour le remplacer par un promoteur encore plus enthousiaste du développement des gaz de schiste.

     

     

    L'ONU a donc laissé les murs de l'enceinte des négociations se couvrir des logos des sponsors climaticides : deux-tiers des émissions de gaz à effets de serre sont le fruit de 90 entreprises dans le monde. De l'autre côté, l'ONU contrôle hyper-strictement les actions de la société civile à l'intérieur de ces mêmes murs. Pire, elle n'hésite pas exclure des négociations de jeunes militants, dont Clémence, militante française de 23 ans, qui ont osé exprimé leur soutien aux Philippins victimes du typhon Haiyan. « Les négociations des Nations-Unies sur le climat sont-elles encore un lieu démocratique, où la société civile est la bienvenue, et les multinationales polluantes, dont le modèle économique est incompatible avec une action ambitieuse pour combattre le changement climatique, combattues » demande Clémence et, avec elle, l'ensemble des mouvements pour la justice climatique qui sont tolérés dans l'enceinte mais pas respectés ni écoutés ?

    « No numbers, no roadmap, no finance »

    Cette mainmise du secteur privé sur la conférence climat et la marginalisation de la société civile ne seraient qu'anecdotiques si au même moment les négociations ne nous conduisaient pas dans le mur. Le texte rendu public en début de semaine et qui doit donner les grandes orientations de ce que serait un accord en 2015 pour l'après-2020, est tout simplement inacceptable. Extrêmement vague, notamment sur les principes de justice et de partage des responsabilités, il légitime une approche bottom-up, celle défendue par les Etats-Unis – qui ne ne veulent pas d'accord contraignant et à laquelle s'est ralliée l'Union européenne, consistant à laisser chaque pays définir lui-même son niveau de réductions d'émissions.

    C'est à celui qui sera le moins ambitieux ! Une course au moins-disant climatique a débuté. Le Japon, cinquième pays le plus émetteur de la planète, a ainsi sabré ses objectifs de réduction de 25 % d'émissions d’ici 2020, pour s'engager sur un objectif … d'augmentation de 3,1% par rapport à 1990. L'Australie a quant à elle supprimé tout objectif de réduction, mis fin au projet de taxe carbone et à ses dispositifs de soutien des énergies renouvelables. Elle a par ailleurs annoncé vouloir arrêter tout financement international en lien avec le climat. Le tout sous les applaudissements et félicitations du Canada, qui avait déjà annoncé sortir du protocole de Kyoto et ne pas respecter ses engagements de réduction d'émissions.

    L'Union européenne aux abonnés absents

    Le Canada, le Japon et l'Australie sont-ils des délinquants et criminels climatiques ? Sans aucun doute. Mais également des pays qui sont encouragés en ce sens par la nouvelle stratégie de l'Union européenne. Loin de l'image usurpée de leader des négociations climat qu'elle s'était décernée, l'Union européenne a décidé de ne pas proposer d'objectifs ambitieux pour l'après 2020 avant que les autres pays n'en fassent de même. Ainsi, on est sûr que rien ne bouge. Sur le point d'abandonner tout objectif contraignant de développement d'énergies renouvelables et d'efficacité énergétique pour 2030 pour ne maintenir qu'un objectif très insuffisant de réduction d'émissions de gaz à effets de serre (GES) – on parle de - 40 % par rapport à 1990 – l'Union européenne mine toute possibilité d'obtenir en 2015 un accord à la hauteur des enjeux.

    Et il ne semble pas que le gouvernement français ne s'en émeuve, alors qu'il annonce vouloir aboutir à « un accord applicable à tous, juridiquement contraignant et ambitieux, c’est-à-dire permettant de respecter la limite des 2°C ». A ce stade, ce ne sont que des paroles en l'air, quoiqu'en disent Pascal Canfin et Laurent Fabius. Ce d'autant plus qu'il ne semble y avoir aucune volonté politique, y compris au sein de l'Union européenne, pour relever les objectifs de réductions d'émissions d'ici 2020 sans attendre. Ce qu'exige le dernier rapport de l'UNEP qui démontre qu'il y a un écart de de 8 à 12 milliards de tonnes de CO2 entre les engagements de réduction d'émission d'ici 2020 et ce qu’il serait nécessaire d'atteindre pour être sur une trajectoire de maintien de la température globale en-deçà d’1,5 ou de 2°C.

    Pas un zloty sur la table !

    Les sujets portant sur les financements climat ne manquent pas à Varsovie : financements de long-terme, Fonds vert pour le climat, fond d'adaptation, mécanismes de financement des pertes et dommages, etc. Mais cette COP19 dont il avait été promis à Doha l'année passée qu'elle serait une COP « finance » n'a toujours pas vu de financements majeurs être annoncés. Ainsi, le fonds vert pour le climat, annoncé en grande pompe chaque année depuis 4 ans, est-il toujours non doté. Et lorsque des pays du Nord annoncent quelques millions d'euros, ce sont le plus souvent des fonds dévolus au développement des pays du Sud déjà existants dont on change juste le nom ou, pire, un appel du pieds à des financements du secteur privé. Les pays les « moins développés » (terminologie de l'ONU) réclame 60 milliards par an d'ici 2020 et que l'engagement d'obtenir 100 milliards par an à partir de 2020 soit suivi d'une feuille de route clairement identifiée. Jusqu'à aujourd'hui, ce n'est pas le cas et personne ne sait s'il y aura de l'argent sur la table dans les prochaines années.

    La dernière conférence climat, à Doha au Qatar, l'un des pays les plus émetteurs de GES de la planète, avait été l'occasion pour les pays les plus vulnérables d'obtenir un engagement des pays industrialisés d'ouvrir des négociations sur un mécanisme de « pertes et dommages ». Une fois que les catastrophes climatiques ont frappé, et qu'il ne s'agit plus seulement de trouver des solutions pour s'adapter aux dérèglements climatiques, qui doit payer les conséquences, s'assurer qu'il sera possible de reconstruire ou du moins d'offrir les moyens aux populations touchées de survivre. Sur ce plan non plus, aucune avancée notable. L'Australie et le Canada ne veulent pas en entendre parler et les pays industrialisés ne veulent pas d'engager formellement, refusant ainsi d'assumer leurs responsabilités dans les crises climatiques actuelles et à venir.

    De la conférence des pollueurs à un Seattle du climat ?

    Cela fait des années que les mouvements sociaux et les ONG alertent les gouvernements, l'ONU et l'opinion publique sur l'absence de propositions à la hauteur des enjeux sur la table et les risques encourus à donner toujours plus de place et de pouvoir au secteur privé. Une fois encore à Varsovie, ils ont multiplié les initiatives pour obtenir une profonde transformation des négociations en cours. Après avoir manifesté samedi dernier (voir également ces photos), pour exiger une action immédiate à la hauteur des enjeux, ils ont dénoncé publiquement, et dans la rue, le sommet sur le charbon et le climat, tout en multipliant les actions symboliques, ici contre les énergies fossiles (charbon, gaz et pétrole de schiste) ou encore le nucléaire promue comme une énergie non émettrice de gaz à effets de serre.

    « Assez c'est assez » !

    Rien n'y fait. Les gouvernements s'écoutent les uns et les autres et tendent l'oreille dès que le secteur privé exigent de ne rien faire, s'enferrant dans une inertie dramatique et criminelle. Raison pour laquelle de nombreux mouvements sociaux et oeuvrant pour la justice climatique, les Amis de la Terre International, PACJA, Jubilee South Asia Pacific, les syndicats internationaux, mais aussi Oxfam ou Greenpeace ont décidé de quitter les négociations ce jeudi 21 novembre en milieu de journée pour dénoncer « ce manque d'ambitions et la mainmise du secteur privé sur les négociations ».

    Dans leur déclaration, les mouvements annoncent vouloir construire une véritable mobilisaiton citoyenne pour « transformer les systèmes alimentaires et énergétiques au niveau national et mondial, reconstruire un système économique en faillite pour créer une économie durable et à faible intensité de carbone avec des emplois décents et des moyens de subsistance pour tous ». « Sans une telle pression, impossible de faire confiance à nos gouvernements pour qu'ils fassent ce dont le monde a besoin ». Une pression citoyenne que les gouvernements ne veulent pas voir, mais qui est pourtant déjà présente. En parallèle de la conférence de Varsovie, une rencontre des mouvements et réseaux d'Asie du Sud-Est s'est tenue à Bangkok (Thailande) exigeant des actions urgentes des gouvernements, à la fois du Nord et du Sud, pour faire face à la crise climatique. A Durban (Afrique du Sud), un camp climat vient de se terminer pour s'opposer à des projets destructeurs appuyés par le gouvernement sud-africain et des multinationales.

    Et si la France renonçait à accueillir la conférence climat de 2015 ?

    Le gouvernement français doit tirer toutes les leçons de ce qui vient de se passer à Varsovie. Alors qu'il est incapable d'introduire une fiscalité écologique juste et efficace et qu'il a repoussé la loi sur la transition énergétique aux calendes grecques, il ferait bien d'inaugurer l'« agenda positif » qu'il appelle de ses voeux : abandonner définitivement l'aéroport de Notre-Dame des Landes, annuler tous les permis concernant manifestement les hydrocarbures de schiste et ne pas en signer de nouveaux, obtenir la fin du financement des énergies fossiles par les banques et mécanismes publics (AFD, CDC, BEI, BERD, Coface, etc) et par les banques privées françaises, etc. Le tout en menant réellement bataille à Bruxelles pour des politiques climatiques à la hauteur des enjeux et qui ne soient pas contradictoires avec l'engagement de diviser par au moins quatre les émissions de GES d'ici 2050.

    Par ailleurs, le gouvernement français serait bien intentionné de s'inspirer de l'immense succès d'Alternatiba, le Village des Alternatives organisé à Bayonne le 6 octobre dernier. Pourquoi ne pas encourager et soutenir financièrement les milliers d'associations, de collectivités locales, d'individus qui inventent, expérimentent un large éventail d'alternatives concrètes, donnant à voir ce que pourrait être la transition écologique et sociale dont nous avons besoin ? Ces alternatives, loin d'être dérisoires ou secondaires, rendent visibles des activités créatrices d'emplois, un sens du travail retrouvé, une inventivité pour aller vers des sociétés conviviales, justes, solidaires et réconciliées avec la nature. Elles opposent à l'inertie politique leur détermination à affronter concrètement les intérêts des lobbies et des transnationales qui ont décidé de ne rien changer, comme le prouve leur emprise sur la COP19 à Varsovie.

     

    Nous avons les solutions – Créons 10, 100, 1000 Alternatiba !


    Si le gouvernement refusait de s'engager dans cette voie, à quoi sert-il d'envoyer trois ministres à Varsovie ? De quelle légitimité dispose le gouvernement français pour organiser la COP21 de 2015 ? Ne ferait-il pas mieux de remettre les clefs de la conférence climat de l'ONU de 2015 à l'un des pays les plus vulnérables, tel que les Philippines, qui ont cruellement besoin d'un « accord juridiquement contraignant et ambitieux » que ni la France, ni l'Union européenne ne semblent en mesure de faire émerger ? Il est temps d'agir, plus de parler.

     Maxime Combes, membre d'Attac France et de l'Aitec, engagé dans le projet Echo des Alternatives (www.alter-echos.org)

     

     

     

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    21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 15:01

     

     

    Source : mediapart.fr

    Notre-Dame-des-Landes : l’Etat ne lâche rien

    |  Par Jade Lindgaard

     

     

    Les services de l’État s’apprêtent à publier les arrêtés “loi sur l’eau” et “déplacement d’espèces protégées”, étape préalable au lancement des travaux de transfert de l’aéroport dans la campagne nantaise. Explications.

    Suspension de l’écotaxe, renoncement à la taxe sur l’excédent brut d’exploitation, mais on ne lâche rien sur Notre-Dame-des-Landes. Après plusieurs semaines d’incertitude, les services de l’État s’apprêtent à publier les arrêtés “loi sur l’eau” et “déplacement d’espèces protégées”, étape préalable au lancement des travaux de transfert de l’aéroport dans la campagne nantaise. Ils sont attendus pour décembre, délivrés conjointement par souci de visibilité, et en même temps que la publication d’un nouveau calendrier d’actions.

     

    Mare dans la zone d'aménagement différé (Zad) de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, avril 2013 (JL) 
    Mare dans la zone d'aménagement différé (Zad) de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, avril 2013 (JL)

    La parution de ces textes doit lever le dernier obstacle administratif à la réalisation des travaux. Pour la puissance publique, c’est une étape importante, et la manifestation de sa volonté de poursuivre ce projet pourtant très contesté. Autre étape obligatoire tout juste franchie : le conseil de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) de Loire-Atlantique, commission consultative départementale, vient de donner un avis favorable à l’arrêté loi sur l’eau – en présence du préfet de région, un geste inhabituel.

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    Retrouver ici notre dossier sur l'aéroport de la discorde

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    Pour autant, rien n’assure que les premiers travaux programmés commenceront dans la foulée. D’abord parce que les arrêtés feront vraisemblablement l’objet de recours par les opposants, dont certains pourraient être suspensifs. Ensuite, parce qu’en plein drame national de l’écotaxe, et alors que le démontage de portiques et de radars routiers devient un sport national, le lancement d’une nouvelle opération d’expulsion de la zone d’aménagement différée (ZAD) promet d’élever encore d’un cran la tension sociale à l’ouest de la France. La zone s’est peuplée de collectifs plus ou moins actifs depuis l’échec de l’opération d’évacuation « César » l’année dernière. Des occupants organisent la plantation d’un « barreau forestier » ce week-end (voir ici) en lieu et place du barreau routier prévu.

    En juin, Frédéric Cuvillier, le ministre des transports, s’était engagé au nom du gouvernement à « reconstruire des espaces de dialogue » sur place. Plusieurs réunions de concertation se sont ainsi tenues depuis la rentrée au sujet du plan d’exposition au bruit de l’actuel aéroport de Nantes Atlantique. Cet aspect technique du dossier n’en est pas moins stratégique car la nuisance sonore – et la sécurité des habitants – est l’un des principaux arguments brandis par la direction générale de l’aviation civile (DGAC) pour justifier le transfert de l’aéroport. À la demande de la commission de dialogue, dont le rapport a été rendu au printemps dernier (voir ici), la DGAC a réalisé une nouvelle estimation de l’impact du bruit aérien de l’actuel aérogare en fonction de l’essor de son trafic dans les années à venir. Comme dans son précédent mémoire, elle conclut qu’un développement du site créerait des nuisances sonores incompatibles avec le développement urbanistique de l’île de Nantes. De son côté, le collectif des élus opposés au nouvel aéroport, le CéDpa, a commandé un rapport à un cabinet européen d’experts, Adecs Airinfra, qui conteste ces conclusions (voir ici). Il doit être discuté par porteurs et opposants du projet lors de la dernière réunion prévue, le 27 novembre.

     

    Manifestation de réoccupation de la Zad, octobre 2012 (JL) 
    Manifestation de réoccupation de la Zad, octobre 2012 (JL)

    Mais cet échange d’arguments restaure-t-il le dialogue ? Rien n’est moins sûr. Conseillère générale (Front de gauche) de Loire-Atlantique et membre du CéDpa, Françoise Verchère regrette les mauvaises conditions de cette « concertation » : « Il y a une rétention d’information terrible. Le plan de la DGAC sur un éventuel réaménagement de Nantes Atlantique nous a été présenté en power point le 6 novembre, a été mis en ligne le 18 et nous devons en présenter une contre-expertise le 27 ! Nous avons très peu de temps. »

    Les naturalistes en lutte, à pied d’œuvre sur la préservation de la faune et de la flore autour de Notre-Dame-des-Landes (voir ici), ont subi les mêmes déconvenues. La consultation du public sur les futurs arrêtés de dérogation « espèces protégées », uniquement sur internet, ne devait initialement durer que quinze jours. Elle s’est finalement prolongée de deux semaines. « Cela atténue le déni de démocratie qu’elle représentait sans l’annuler », considère François de Beaulieu, membre du collectif. Selon son décompte, au total, le dossier mis à l'enquête court sur 4 247 pages, ce qui représente 785 Mo de fichiers informatiques, « mais tout est en petits morceaux et en vrac ». Les naturalistes en lutte ont rendu leur propre contre-expertise, découvrant l’oubli de nombreuses espèces protégées dans les documents officiels. Le site ne permettait pas de la déposer en ligne, ils ont dû l’envoyer par courrier.

    Par ailleurs, l’État n’a toujours pas répondu aux demandes d’une autre commission dont il avait aussi sollicité l’expertise, sur l’agriculture cette fois-ci. Au nom de la préservation des espaces agricoles, les auteurs du rapport réclamaient des aménagements notables au projet du nouvel aéroport (réduction de l’impact au sol des constructions, la réduction du périmètre des parkings, le déplacement du barreau routier…). Malgré l’engagement du gouvernement à « mettre en œuvre les préconisations des trois commissions qu’il a mandatées », les autorités n’ont toujours pas dit si elles souhaitaient revoir le chantier sur ces points et comment. Sollicitée par Mediapart, la préfecture n’a pas répondu à nos questions.

    En revanche, le front européen se dégage pour l’État français. La commission européenne vient de donner son accord à la subvention de 150 millions d’euros accordée par Paris à la filiale de Vinci, Aéroport du Grand Ouest (AGO), estimant qu’elle « est compatible avec les règles de l’Union européenne relatives aux aides d’État » et ne cause pas de « distorsion indue de la concurrence ».  L'instruction se poursuit par ailleurs à Bruxelles concernant la conformité du projet de nouvel aéroport avec le droit de l'environnement.

    Sur place, la situation reste tendue. Le bureau nantais de Biotope, l’un des principaux bureaux d’études actifs sur le projet d’aéroport, a été cambriolé. Et Vinci a déposé plainte au pénal contre la destruction de mares devant servir à des actions de génie écologique. 

    Le 18 novembre, le conseil municipal du village de Notre-Dame-des-Landes a été informé d'une décision de report à l'année prochaine du déplacement des espèces protégées de la zone concernée par le projet d'aéroport. L'information a aussitôt circulé parmi les opposants, est arrivée à Mediapart... mais s'est révélée erronée comme je l'ai compris au bout de quelques vérifications. Sollicitée, la préfecture de Loire-Atlantique n'a pas répondu à mes questions.

     

     

     

     

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    21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 14:53

     

    Source : reporterre.net

     

    À découvrir

    Notre Dame des Landes : manifestation le 22 devant siège de Vinci

    jeudi 21 novembre 2013

     

     


     

    Le gouvernement et la multinationale Vinci sont très silencieux sur le projet de construction d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes ces temps-ci, pourtant ils s’apprêtent à lancer "discrètement" les travaux de construction d’un barreau routier pour desservir le futur complexe aéroportuaire. De ce côté-ci de la barricade, nous sommes toujours aussi déterminé.e.s et nous continuons et nous continuerons à réclamer l’abandon du projet !

    Une manifestation-happening déguisée aura donc lieu le 22 novembre 2013 devant le siège social de Vinci à Rueil-Malmaison.

    Elle se situe pendant la semaine d’action en soutien à Notre-Dame-des-Landes (17-24 novembre). Cette action a lieu pour montrer notre mobilisation présente et rappeler certains événements qui ont eu lieu l’année dernière sur la Zone à Défendre — expulsions violentes et destructions de lieux de vie, puis réoccupation et reconstructions, constitution de plus de cent comités de soutien en Europe...

    Alors que sur place, à NDDL, les 23 et 24 novembre, des opposant.e.s vont planter des arbres sur le tracé du barreau routier, pour notre part, en île-de-France, nous allons interpeler l’éxécuteur du projet Vinci, là où se trouve son siège social, et "construire" SON aéroport devant chez lui, à notre façon, c’est-à-dire avec humour.

    Engagez-vous dans l’aviation !

    Imaginez votre propre rôle : hôtesse de l’air ou stewart, aiguilleur du septième ciel, capitaine au long cours, touriste, femme d’affaire ou femme de ménage de l’aéroport...

    à chacun de faire preuve d’imagination !

    Rendez-vous à 11h30, cours Ferdinand de Lesseps, sortie rue des deux gares RER A - Arrêt Rueil-Malmaison

    Notre demande aux futures participantEs et acteurs de cette manifestation :

    Merci de laisser toute banderole et drapeau témoignant d’une participation à un syndicat ou parti à la maison, et de ne vous adresser aux medias présents qu’en votre nom propre...

    Note : toutes ceLLEux qui le souhaitent peuvent apporter leur documentation pour la mettre à disposition sur la table de presse et chaque individu ou organisation pourra prendre la parole après le happening pendant quelques minutes.

     


     

    Source : Le Collectif IDF de soutien à la lutte de NDDL

    Voir par ailleurs Les événements de Reporterre

     

     

     

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    20 novembre 2013 3 20 /11 /novembre /2013 15:53

     

    Source : reporterre.net

     

    Les paysans se sont imposé à un colloque sur les OGM à l’Institut de France

    Barnabé Binctin (Reporterre)

    mercredi 20 novembre 2013

     

     

     

    Peut-on parler d’organismes génétiquement modifiés sans entendre les paysans ? C’est la question posée par la Confédération paysanne, qui s’est imposée mardi 19 novembre dans un colloque discrètement organisé par l’Institut de France.

     


     

    - Reportage, Académie française, Paris

    Mardi matin 19 novembre, un colloque sur les plantes génétiquement modifiées se tenait à l’Institut de France, sous l’égide de l’Académie des Sciences, de l’Académie d’Agriculture de France et de l’Académie des technologies. Sous les lustres en or et les portraits d’illustres savants tels Lavoisier, Turgot ou Voltaire, il était question de mutagénèse, de marqueur moléculaire, de fragments chromosomiques et de variabilité génétique. Il s’agissait notamment de promouvoir l’amélioration des plantes par le « génie génétique, qui permet de favoriser des variétés adaptés au changement climatique et de répondre ainsi aux besoins de l’agriculture durable », selon André Gallais, professeur honoraire d’AgroParisTech.

     

     

    Dehors, l’ambiance est beaucoup moins calme. Une vingtaine de membres de la Confédération Paysanne sont bloqués par un cordon policier leur interdisant l’entrée. Les forces de sécurité sont deux fois plus nombreuses que les représentants syndicaux.

     

     

    Derrière une banderole affichant le message « Les plantes mutées sont des OGM », la revendication de la Confédération Paysanne est simple : participer aux échanges sur la question pour faire entendre un point de vue opposé aux OGM. L’entrée leur est d’abord refusée : « Le colloque est un débat scientifique alors que les manifestants portent un message citoyen, ils font du social, cela n’a pas sa place ici », justifie l’attachée de presse de l’Institut de France. La directrice des services administratifs de l’Institut poursuit : « Ici, c’est le parlement des savants, on ne peut pas laisser la parole aux membres de la Confédération, car il faut avoir un certain niveau d’expertise. Leur propos ne porte pas sur le même niveau, il y a des choses qu’on ne peut pas laisser dire ici sur les OGM ».

    Deux membres de la délégation sont finalement autorisés à rejoindre la grande salle des séances. Dans une brève allocution, Laurent Pinatel, porte-parole du syndicat, regrette de devoir « faire le coup de poing pour pouvoir s’exprimer ». Sur les deux minutes qui lui sont allouées, il concentre son discours sur l’absence de transparence des pouvoirs publics alors qu’il existe un refus populaire des OGM : « Les citoyens rejettent massivement ces biotechnologies et les pollutions qu’elles induisent ».

    Guy Kastler est le responsable sur les semences à la Confédération Paysanne. Il explique que les plantes mutées sont des OGM au sens de la définition qu’en donne la Commission européenne dans la directive 2001/18. Alors que la transgénèse reste interdite par la réglementation, la mutagénèse permet selon lui de contourner la loi pour produire des « OGM clandestins ». Il dénonce l’opacité des informations quant à l’utilisation de cette technique : « Il n’y a aucune traçabilité, donc il est difficile d’avoir des chiffres exacts. Mais tout le riz cultivé en France et tout le colza autorisé sont par exemple issus de mutagénèse. On estime que plus du tiers de notre alimentation vient des plantes mutées. Or si on ne peut pas établir des preuves de toxicité pour l’instant, il est scientifiquement prouvé que la mutagénèse a plus d’effets indirects que la transgénèse ».

    Quelques minutes après cet incident, un ancien ingénieur agronome devenu expert en biologie cellulaire, et membre de l’Académie d’agriculture, Jean-Claude Mounolou décrypte pour Reporterre les conceptions qui s’entrechoquent sur la question de la modification génétique du vivant.

    Il y a d’abord, selon lui, les chercheurs en biologie moléculaire qui travaillent sur les méthodes de sélection, à l’échelle microscopique des génomes. Leur objectif est de développer les connaissances dans ce domaine. Ils représentaient l’importante majorité des participants du colloque.

    Ensuite, ce qu’il appelle les écologistes, qui réfléchissent aux milieux naturels, aux réserves de biodiversité. L’enjeu des plantes génétiquement modifiées pose pour eux la question de la diversité du vivant, le risque d’une généralisation des OGM étant d’aboutir à l’uniformité des paysages et des milieux agricoles.

    Et puis, il y a les agriculteurs-paysans, qui s’inquiètent d’un certain modèle social issu du développement de ces cultures. Il s’agit de savoir comment tirer un revenu suffisant pour vivre quand les semences brevetées réduisent toujours plus l’autonomie de leur profession. « Ils ressentent les OGM et PGM comme une façon d’être toujours plus exploités, à juste titre », reconnaît le scientifique.

    Pour Jean-Claude Mounolou, ces trois approches sont légitimes et doivent exister. Elles peuvent ne pas être contradictoires en soi, bien qu’elles s’opposent sur l’angle d’approche du problème. Se pose alors la question de l’arbitrage et de l’utilisation des avancées de la science, qui, par définition, ne doit pas être contrainte dans ses recherches ? « C’est le citoyen qui doit trancher, à travers le pouvoir politique, et avec l’aide des médias. Au fond, la question n’est pas tant de régulation que d’éducation ».

     


     

    Source et photos : Barnabé Binctin pour Reporterre.

    Lire aussi : En Inde, le refus des OGM se généralise.

     


     

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    20 novembre 2013 3 20 /11 /novembre /2013 15:39

     

     

    Source: mediapart.fr

    Espionnage des salariés : Ikea frappé à la tête

    |  Par Mathilde Mathieu et Michaël Hajdenberg

     

     

    Le patron d'Ikea France a été mis en examen dans l'affaire d'espionnage des salariés. Son prédécesseur a subi le même sort, bien qu'il ait assuré avoir tout ignoré de ces pratiques et suggéré aux enquêteurs que le dossier aurait été supervisé en direct par le responsable “sécurité” d'Ikea-monde.

    Cette fois, l’entreprise est touchée au cœur. Mardi 19 novembre, Ikea France a été mise en examen, en tant que personne morale, dans l’enquête sur l’espionnage de ses salariés (comme Le Monde l’a dévoilé). D’un coup, ce n’est plus l’histoire de quelques cadres intermédiaires déviants, mais bien celle d’un véritable système.

    Elle a aussi été touchée à la tête, puisque l’actuel directeur général, Stefan Vanoverbeke, a été mis en examen à titre individuel pour « complicité de collecte de données à caractère personnel » et « complicité de violation du secret professionnel », à l’issue d’une longue garde à vue dans les locaux de la police judiciaire de Versailles, de même que son prédécesseur Jean-Louis Baillot et que l’actuel directeur financier, Dariusz Rychert.

     

    S. Vanoverbeke 
    S. Vanoverbeke © DR

    « Stefan Vanoverbeke conteste toute implication, réagit aujourd’hui son avocat, Me Alexis Gublin, interrogé par Mediapart. Il a toujours condamné ce type de pratiques et pris les mesures correctrices nécessaires quand les faits ont été révélés. »

    Dans ce dossier instruit depuis avril 2012 sur plainte du syndicat FO, une dizaine de personnes ont déjà été mises en examen, dont quatre policiers et l’ex-directeur de la gestion du risque d’Ikea France, Jean-François Paris, l’homme qui a mis les mains dans le cambouis en achetant auprès d’une société de sécurité privée (Eirpace) des masses de données confidentielles sur des employés illégalement extraites du fichier policier Stic (cette base de données géante qui répertorie les citoyens déjà mis en cause pour une infraction, condamnés ou non, avec un taux d’erreur affligeant de 40 %).

    Ce rebondissement est un coup dur pour l’actuelle direction du groupe qui tentait, depuis les révélations de Mediapart et du Canard enchaîné de février 2012, de circonscrire le scandale aux années passées, imputant l’essentiel des responsabilités à l’ex-directeur général Jean-Louis Baillot (aux manettes de 1996 à 2009) et à son subordonné en charge de la sécurité, Jean-François Paris, parfait fusible licencié avec fracas dès le mois de mai 2012.

    D’après des procès-verbaux de 2013 consultés par Mediapart, ce dernier a bien concédé devant le juge Alain Gallaire avoir initié l’achat de données policières (au tournant des années 2000), mais il a déclaré avoir généralisé ce système sur l’injonction de Jean-Louis Baillot lui-même, aux alentours de 2006 ou 2007. À cette époque, « c’est Baillot qui m’a demandé de faire des recherches systématiques des antécédents judiciaires des nouveaux collaborateurs que nous embauchions pour les nouveaux magasins », a affirmé Jean-François Paris sur PV, le 22 janvier 2013. « Je demandais (au directeur du magasin) de me fournir la liste du personnel qu’il souhaitait faire valider (…) ; il me donnait plusieurs dizaines de noms (…) ; ça allait de 80 à 120. (…) Les directeurs de magasins ont reçu des consignes de M. Baillot. »


    © Reuters

    Pour sa défense, mardi, Jean-Louis Baillot a non seulement juré qu’il avait tout ignoré du “flicage” illégal mis en place par Jean-François Paris et de la nature exacte des prestations achetées à Eirpace – tout en admettant avoir signé plusieurs factures de sa propre main. Mais pour mieux se dédouaner, l’ex-numéro un d’Ikea France a surtout donné une dimension internationale inédite au dossier : d'après nos informations, il a suggéré que s'il n'avait jamais échangé avec Jean-François Paris sur le “profilage” des salariés, c’est sans doute que ce dernier a plutôt géré ce dossier sensible avec son référent « Sécurité » en Suède, directement au siège d’Ikea monde.

    En clair, Jean-Louis Baillot a soufflé aux policiers que l’espionnage des salariés pourrait être autre chose qu’une spécificité hexagonale, sans apporter toutefois d’éléments probants à ce stade. Interrogé par Mediapart sur ce sujet, l’avocat d’Ikea France, Me Alexis Gublin, conteste formellement ces allégations.

    Quoi qu’il en soit, d’après la lettre de licenciement de Jean-François Paris (que Mediapart a pu consulter), la société ne conteste plus en interne la réalité des pratiques illégales commises dans ses magasins entre 2001 et 2011, bien au contraire. Signé de Stefan Vanoverbeke en personne (l’actuel DG), ce courrier s’appuie sur des « vérifications » maison menées « parallèlement à l’enquête judiciaire » et accuse Jean-François Paris, noir sur blanc, d’avoir « eu recours au service de prestataires et enquêteurs privés pour (se) procurer des renseignements d’ordre personnel et confidentiel (sur les salariés)... tels que leurs casiers judiciaires, leurs situations familiales, leurs situations financières et bancaires, etc. ». Et de confirmer plusieurs cas dénoncés par Mediapart, notamment celui d’une « cliente de la société avec laquelle nous avions un différend commercial » !

    Simplement, l’actuel patron d’Ikea (arrivé à son poste en janvier 2010) écrit n’avoir « eu connaissance (de ces faits) que le 29 février 2012 », date de publication des premiers articles de presse. Sa ligne de défense apparaît ainsi clairement : rien vu, rien entendu.

    Lors d’un interrogatoire daté de janvier dernier, Jean-François Paris a pourtant précisé que sa « dernière demande faite à (Eirpace) » datait de « novembre 2011 ». Stefan Vanoverbeke était-il au courant ? lui a aussitôt demandé le juge. « Je ne suis pas sûr (…) Je ne lui en ai jamais parlé... »

    Dans le courrier de licenciement consulté par Mediapart, Stefan Vanoverbeke semble toutefois se tirer une balle dans le pied, puisqu’il accuse Jean-François Paris d’avoir fait « la promotion (de ses pratiques illégales) au sein de la société au travers de mails envoyés à des responsables de magasins ». Comment le siège, lui seul, aurait-il pu les ignorer ?

     

     

     

     

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