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25 novembre 2013 1 25 /11 /novembre /2013 16:18

 

 

Source : mediapart.fr

 

350 milliards d'avoirs français sont dans les paradis fiscaux

|  Par Dan Israel

 

 

Dans un petit livre percutant, l’économiste Gabriel Zucman dresse l'état des lieux glaçant de la domination des paradis fiscaux sur l’économie mondiale. Et donne les pistes pour faire cesser ce scandale.

D’abord dresser froidement une carte, la plus juste possible. Proposer, ensuite, une feuille de route exigeante, pour bousculer les choses. Et en finir une fois pour toutes avec les paradis fiscaux. Ces objectifs, Gabriel Zucman les remplit haut la main dans son livre, La Richesse cachée des nations (Le Seuil-La République des idées). L’économiste, âgé de seulement 27 ans, passé par l’école d’économie de Paris sous la houlette de Thomas Piketty, aujourd’hui professeur à la prestigieuse London School of Economics et chercheur à l'université de Berkeley (Californie), est en train de s’imposer comme l’une des références dans l’étude des paradis fiscaux et de leurs conséquences néfastes pour l’économie mondiale.

 

Gabriel Zucman 
Gabriel Zucman

Malgré toutes les annonces de réforme, toutes les promesses de transparence et de coopération, qui battent leur plein depuis quelques années (nous les détaillions ici), l’analyse de Gabriel Zucman est sans pitié : « Il n'y a jamais eu autant d'argent qu'en 2013 dans les paradis fiscaux, explique-t-il à Mediapart. Selon mes calculs, 8 % du patrimoine financier mondial des ménages y est logé, et échappe à tout impôt. Soit une fortune de 5 800 milliards d'euros, dont 350 milliards appartenant à des Français. C’est 25 % de plus qu’en avril 2009, quand le G20 de Londres avait annoncé la “fin du secret bancaire”. »

Sur la même période, le montant des fortunes gérées par la Suisse a augmenté de 14 %. Bref, « le nombre des super-riches explose et les paradis fiscaux se portent bien », explique l’économiste. Mais « peut-être se porteraient-ils encore mieux si rien n’avait été fait depuis 2009, il faut le garder en tête », reconnaît-il.

Le livre est un prolongement des premiers travaux de Zucman, qui datent de 2011. Selon lui, la fraude permise par le secret bancaire représente 130 milliards d'euros de perte d'impôts au niveau mondial, dont 17 milliards rien que pour la France. À court terme, il estime que l’Hexagone pourrait récupérer 10 milliards d’euros par an s’il luttait de façon efficace contre la fraude. Et sans l'évasion fiscale, la dette publique française ne s’élèverait pas à 95 % du PIB, mais à 70 %.

Ces chiffres, Zucman les a calculés lui-même, et c’est la principale originalité de ses travaux (toutes les données sont publiées sur son site). « Il existe peu de données incontestables que l’on peut exploiter sur ces sujets, et j’ai essayé de les traiter toutes », indique-t-il. Chiffres du FMI, balances des paiements nationales, bilans des banques, mais aussi statistiques trimestrielles émises par la Banque nationale suisse. Particulièrement précises, ces dernières n’avaient pourtant jamais été exploitées en ce sens. Son étude permet au jeune économiste d’éclairer un phénomène connu depuis longtemps, qui voit le total des actifs déclarés par tous les pays être largement inférieur au passif déclaré. Un trou de 4 800 milliards d’euros qu’il attribue à la place des paradis fiscaux dans les flux financiers.

Illustration, largement répétée par l’auteur au gré de sa (substantielle) tournée médiatique : si un Français possède une action Google via un compte non déclaré en Suisse, les États-Unis enregistrent à leur passif cette action, qui a été vendue hors de leur territoire. Mais la Suisse n’enregistrera aucun actif, car elle sait que le détenteur de l’action est français. La France ne le fera pas non plus, car elle ne connaît pas l’existence de cette action. D’où une incohérence comptable.

Le livre insiste fortement sur la place incontournable du trio Suisse – îles Vierges britanniques – Luxembourg dans l’organisation de l’évasion fiscale mondiale. Tout en haut de la pyramide, la Confédération helvétique, qui gère 1 800 milliards d’euros de fortunes étrangères, dont 1 000 milliards de fonds appartenant à des Européens. « C’est l’équivalent de 6 % du patrimoine financier des ménages de l’Union européenne, son plus haut niveau historique », souligne Gabriel Zucman. L’argent est déposé directement en Suisse ou dans les filiales de ses banques nationales à Hong Kong, Singapour, Jersey ou autres.

 

 

L’argent est ensuite investi aux deux tiers dans des fonds de placement, dont beaucoup sont hébergés au Luxembourg : au total, un tiers des fortunes gérées en Suisse sont investies dans des fonds d’investissements luxembourgeois (non taxés par le Grand-Duché). Un état de fait reconnu tout récemment par l'OCDE, qui a désigné pour la première fois le Luxembourg comme un paradis fiscal. Et afin de le rendre intraçable par les fiscs nationaux, les banquiers prennent soin, avant d’investir cet argent, de dresser un ou plusieurs paravents, en le confiant virtuellement à des sociétés écrans, basées aux îles Vierges (ou à Panama), et censées en être les propriétaires. Aujourd’hui, plus de 60 % des comptes en Suisse sont détenus par l’intermédiaire de sociétés écrans sises au Panama, de trusts enregistrés aux îles Vierges britanniques, de fondations domiciliées au Liechtenstein, etc.

Le Luxembourg, accusé principal

Le Luxembourg, qualifié de « gouffre », est largement accusé dans le livre. À un point sans doute jamais atteint dans un texte revendiquant une rigueur toute scientifique. L’économiste raconte comment le secteur financier, bâti sur le secret bancaire et représentant 40 % du PIB, a pris le pouvoir dans ce tout petit État de 500 000 habitants. Il estime qu’aucun pays n'est allé aussi loin dans « la commercialisation de sa souveraineté », en laissant les entreprises choisir les taxes et les règles auxquelles elles sont soumises. Et l’économiste va jusqu’à évoquer une exclusion du Luxembourg de l'Union européenne : « Rien dans les traités, dans l’esprit  de la construction européenne ou dans la raison démocratique ne justifie qu’une plate-forme hors sol pour l’industrie financière mondiale ait une voix égale à celle des autres pays », écrit-il.

 

 

Le constat de la fraude mondiale, rarement dressé aussi méthodiquement, permet de considérer d’un autre œil les fanfaronnades des gouvernements et des institutions internationales quant à leur lutte contre la fraude. Certes, Bercy peut se féliciter des 4 300 dossiers déposés depuis fin juin par des contribuables souhaitant régulariser des avoirs non déclarés. Mais selon les estimations, on compte au moins 80 000 comptes de Français non déclarés en Suisse ! La plupart sont protégés par des sociétés écrans, et resteront indétectables un bon moment, car une entreprise basée aux îles Vierges n’est pas assimilée à un particulier fraudant le fisc…

« La lutte commence tout juste. Des progrès importants ont été faits, je ne le nie pas, mais l’écart entre les proclamations d’une part et les actes et les chiffres d’autre part, est assez considérable, constate Gabriel Zucman. Les gouvernants et les technocrates qui réfléchissent à ces questions sous-estiment la progression de l’opacité financière. Ils pensent qu’avec des traités d’échange d’informations, à la demande ou automatiques, on va résoudre le problème du jour au lendemain, ce qui est très loin d’être le cas. »


Création d'un cadastre mondial des titres financiers

La feuille de route de l’économiste pour corriger les choses de façon durable est pour le moins ambitieuse. Il propose d’établir « d’urgence » un « registre mondial des titres de propriété financiers en circulation actions, obligations, dérivés, pour savoir qui possède quoi et où ». Des registres de ce type existent déjà dans des entreprises privées comme Clearstream et Euroclear, mais Zucman propose de les unifier et d'en transférer la gestion au FMI. Pour lui, il s'agit de créer un « cadastre financier mondial », à l’image du cadastre immobilier créé par l’État en France en 1791 pour taxer efficacement les propriétés foncières. « L’enjeu, qui n’est pas surhumain, c’est de fusionner des renseignements qui existent et d’en transférer la gestion à une puissance publique », résume l’expert.

Mais créer ce cadastre ne suffirait pas, puisqu’il révèlerait dans bien des cas qu’un produit financier est détenu par une société écran. Zucman propose donc, en parallèle, d’instaurer « un impôt global sur le capital », prélevé à la source par le FMI et levé sur la base du cadastre mondial, tous les ans, « à hauteur de 2 % de la valeur de chaque titre financier ». Pour récupérer l’argent versé automatiquement, le propriétaire de l’action n’aurait pas d’autre choix que de se déclarer à son administration fiscale.

Ce principe de l’impôt par anticipation est déjà appliqué… en Suisse. « Depuis 1945, la Suisse taxe à la source, à hauteur de 35 %, les intérêts et les dividendes de tous les produits financiers sur son territoire, charge aux détenteurs de ces produits de se déclarer pour vérifier s’ils ne devraient pas être taxés à ce niveau ! », rappelle Zucman. Alors, utopie ? Voilà un terme qu’il n’apprécie guère… « Mon projet est tout sauf utopique. Je n’ai pas écrit un livre pour présenter de belles utopies. Je m’intéresse aux questions concrètes, et à la façon de rendre les choses opérationnelles. Le cadastre financier mondial pourrait voir le jour à relativement brève échéance. Il existe déjà, mais de façon dispersée. Et la taxe par anticipation est tout à fait faisable techniquement. »

Il faut donner acte à Gabriel Zucman de cette volonté de s’inscrire dans le réel. Même si sa fougue pourrait lui faire négliger quelques contraintes existant bel et bien. Ainsi, aucun texte ne prévoit qu’un État membre de l’Union européenne puisse en être exclu, comme il le suggère en dernier recours pour le Luxembourg.

Surtout, la réalité des règles européennes pourrait être interprétée comme allant à l’encontre de sa dernière préconisation. Pour contraindre les grands paradis fiscaux à coopérer, il propose d'instaurer des sanctions douanières à leur encontre, équivalentes à ce que coûte leur secret bancaire aux autres pays. Ainsi, la Suisse prive la France, l'Allemagne et l'Italie de 15 milliards d'euros de recettes fiscales chaque année. Une perte qui pourrait être compensée par des droits de douane de 30 % sur les exportations suisses. De même, il souhaite que les États-Unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France forment une « coalition » et menacent d’appliquer une taxe de 50 % sur les exportations de Hong Kong. Ce qui ferait céder ce territoire opaque, sans même avoir besoin de mettre en place les sanctions douanières, espère l'auteur, guère favorable au protectionnisme sur le principe.

Problème : le tarif douanier européen doit être appliqué de manière uniforme à toutes les frontières extérieures de l'Union, rappelle-t-on chez Algirdas Šemeta, le commissaire européen à la fiscalité. L’unanimité des 28 pays membres est nécessaire. Un pays membre ne peut donc pas décider d’appliquer unilatéralement un droit de douane dissuasif envers un pays tiers, fait-on valoir à la Commission. Et surtout pas contre la Suisse, qui a conclu un accord de libre-échange avec l’Union européenne. Ce à quoi Zucman rétorque qu'il est possible de mettre en place des tarifs compensatoires, « c'est-à-dire des tarifs compensant la subvention implicite dont bénéficient les banques off-shore grâce au secret bancaire ».

Aujourd'hui, les textes prévoient que pour enclencher un tel processus, il faudrait une plainte de l'industrie bancaire européenne qui s'estimerait victime de dumping, puis une enquête de la Commission, qui trancherait ensuite. « Ce que je propose, précise l'économiste, c'est que les États allemands, français et italiens enclenchent eux-mêmes la procédure en portant plainte, car après tout ce sont eux, plus que les banques, qui sont volés. Ensuite de deux choses l'une : soit la Commission juge la requête recevable, et dans ce cas-là les droits de douane entrent en vigueur (au niveau de toute l'UE) ; soit elle juge la demande franco-italiano-allemande irrecevable, mais alors il faudra qu'elle explique pourquoi… Et avec un peu de chance la Suisse aura cédé avant sous la menace. »

Les débats théoriques sont ouverts. On peut espérer que les discussions pratiques suivront très vite.

 

Lire aussi

 

 

 

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25 novembre 2013 1 25 /11 /novembre /2013 16:04

 

Source : bastamag.net

 

30 000 euros d’amende pour avoir refusé... de polluer !

par Sophie Chapelle 25 novembre 2013

 

 

Emmanuel Giboulot, vigneron en biodynamie à Beaune, encourt jusqu’à six mois de prison et 30 000 euros d’amende. Son délit ? Avoir refusé de traiter son vignoble avec un insecticide pour lutter contre une maladie de la vigne, la flavescence dorée [1], comme en témoigne sa convocation au tribunal. En résumé, le vigneron est condamné pour avoir refusé de polluer...

Pourquoi ce scénario ubuesque ? En 2011, un foyer de flavescence dorée est identifié en Saône-et-Loire, au cœur des crus de Bourgogne. Branle-bas de combat à la Préfecture qui impose trois applications d’insecticides autour des communes concernées. Parmi les pesticides préconisés figurent des produits réputés pour leur toxicité, dont plusieurs perturbateurs endocriniens et un néonicotinoïde... Quant au « Pyrévert », seul produit préconisé en agriculture biologique, il est « photosensible, disparait rapidement, a seulement un effet choc et est toxique pour tous les insectes (dont les régulateurs de la population d’acariens) », souligne le site Veille au Grain.

Spirale infernale

Emmanuel Giboulot vit, lui, en Côte d’Or, département limitrophe, où aucun foyer de la maladie n’est identifié. Mais la Préfecture préfère prendre des précautions : via un arrêté le 7 juin dernier, elle exige « une lutte chimique contre le vecteur » qui doit se traduire par une application d’insecticide. « Je suis très conscient du danger que peut représenter cette maladie, mais ça me paraissait complètement démesuré de faire un traitement systématique alors qu’il n’y avait pas de foyer avéré, témoigne Emmanuel Giboulot, contacté par Basta !.

Ce vigneron cultive 10 hectares de vigne en biodynamie. Pour lui, recourir à un traitement insecticide n’est pas neutre. « Cela revient à détruire une partie de la faune auxiliaire, tout ce qui génère les équilibres de nos vignobles, sachant que nous cultivons des parcelles en bio depuis 43 ans ! » Il constate, amer, les dégâts causés par ces traitements chimiques systématiques en Saône-et-Loire. Le département en est à sa troisième campagne contre la flavescence dorée, avec trois traitements dans la saison. « La faune auxiliaire, qui sont les prédateurs naturels des acariens, a été complètement détruite, souligne t-il. Les vignerons sont obligés de faire deux traitements acaricides supplémentaires. » Une spirale infernale... « Ceux qui prennent ces décisions ne sont pas ceux qui sont sur les tracteurs pour épandre ».

Harcèlement ?

Plutôt que de traiter automatiquement, Emmanuel Giboulot et d’autres vignerons privilégient la « prospection collective ». Ils surveillent les parcelles, recensent les pieds atteints, vérifient en laboratoire que les symptômes sont bien ceux de la flavescence dorée, impossible à diagnostiquer à l’œil nu, avant d’arracher les pieds. « Il faut que chacun fasse une prévention systématique et obligatoire », préconise t-il. Mais le Service régional de l’alimentation, une sorte de « police du vignoble » rattaché à la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, ne l’entend pas de cette façon. Il le contrôle le 30 juillet dernier pour vérifier s’il a bien traité ses vignes. « Les viticulteurs en bio en Bourgogne représentent 13 % de la surface en vignoble. Or, 50 % des viticulteurs en bio ont été contrôlés », note t-il. Un de ses collègues dans le Beaujolais vient d’ailleurs lui aussi d’être contrôlé, « après avoir clamé haut et fort sur TF1 qu’il ne traitait pas ses vignes ».

Emmanuel Giboulot a été convoqué une première fois le 12 novembre par le substitut du procureur et attend une seconde convocation. Outre les nombreux témoignages de soutiens individuels reçus, il bénéficie de l’appui de plusieurs associations de protection de l’environnement. En juin dernier dans le Vaucluse, un vigneron bio qui avait fait le choix de ne pas respecter la loi a été reconnu coupable. Mais il a été dispensé de peine pour avoir accepté de reprendre des traitements d’insecticides...

 

Notes

[1La flavescence dorée se traduit par le jaunissement de la vigne puis généralement par sa mort. Cette « jaunisse du raisin » est causée par un insecte, la cicadelle, qui, peu reconnaissante envers les souches dont elle se régale, leur transmet une vilaine bactérie appelée le phytoplasme.

 

 

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 23:54

 

Transmis par "Les alternatifs"

Pour communiquer vos dates, contacter : 

30@alternatifs.org

 jmarneguy@wanadoo.fr

 

 

 

 

 LES INDIGNE/E/S -  AG  chaque mercredi 18h et samedi 13h  - Maison Carrée


Mercredi 18h RESF Nîmes au local de l’APTI


Agenda Démosphère Gard-Cévennes http://gard.demosphere.eu

 

 


Dates

Evènement

Lieu

heure

Mardi 26/11

Colloque CIDFF sur les Violences faites aux Femmes

Audit Conseil Général

 

Mardi 26/11

Avec l’AREN : rencontre des territoires d’Avenir

Salle Morice Pissevin

9 à 14h

Du 25 au 30/11

Campagne e marquage Vélos par « Croco vélo »

Quartiers Gazelle, La Placette, J.Jaurès, Le Planas +

 

Mardi 26/11

GAZA actualités avec le Pr Christophe Oberlin et présentation de son livre « La Vallée des Fleurs »

Auditorium Pablo Neruda

19h30

Mardi 26/11

UCCN Conf « Ethique et progrès médical »avec P.Maresse

IUFM

18h30 à 20h30

Jeudi 28/11

Rassemblement contre l’injustice fiscale et sociale, pour la Révolution fiscale (et pique nique) 

Devant Centre des Impôts Boul Saintenac

12h

Vendredi 29/11

Conf Débat avec F.Viale Economiste ATTAC sur le Grand Marché Transatlantique

Pablo Neruda

20h

Samedi 30/11

Marché d’Automne :Plantes de saison,fruits, légumes d’automne,produits maison, ou à déguster sur place, bourse aux jouets…

Ecole Calandreta. Mont Duplan

10 à 16h

Samedi 30/11

Rassemblement anti raciste : LDH, CIMADE +++ 

Carré d’Art

11h

Samedi 30/11

Marché de Noël au Nemausus : expo vente d’objets artisanaux

2 Cours Nemausus

13 à 19h

Samedi 30/11

Collectif NDDL stand, infos

Place Horloge

14h30à 16h

Samedi 30/11

Dimanche 1/12

Expo céramique et peinture et intermède musical de Danielle Moralès qui chante barbara

Comité de quartier, 980 chemin Mas de Roulan

16h

11h30

Dimanche 1er décembre

Marchons pour la Révolution fiscale, contre l’injustice fiscale et sociale (bus, train++)

Place d’Italie Paris

13h30

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 23:19

 

 

Suite de la sortie de congénies par Mathurin

 

 


Je suis partisan de produire et consommer peu et localement, autant que possible, dans cette perspective j'aimerais créer un réseau de troc alimentaire autour de Nîmes dont voici l'esprit:
Fruits frais ou secs, confitures, légumes frais ou conserves, poule, lapin, œufs, vin, huile, fromage, miel, olives ou ce que vous avez en trop chez vous, en bref si jamais vous avez une petite production domestique de biens alimentaires, le moment est venu d’échanger votre surplus contre les aliments « faits maison » dont vous manquez… vous envoyez simplement par mail (balavelo@yahoo.fr) ce que vous pouvez offrir et ce que vous demandez, avec vos coordonnées.
Mathurin, à l’initiative du projet, se charge de centraliser tout ça. Dès que votre offre rencontre une demande on effectue aussitôt la mise en relation.
L’idée est de créer un réseau de personnes dans la région Nimoise qui pourront se nourrir sans faire appel à leur pouvoir d’achat!
Troquons, en attendant de trinquer ensemble

                                                          ***************************

 

 
Le prochain stage de
« sensibilisation à la survie en milieu naturel »
de l’association Corporailes
est prévu pour le dernier week end de septembre
Pour plus d’informations contactez l’encadrant au 06 20 79 68 05 ou par mail balavelo@yahoo.fr à l’attention de mathurin
(ci-joint un petit dossier de présentation/inscription...)
DOSSIER D’INSCRIPTION
« sensibilisation à la survie en milieu naturel »
Par l’association Corpor’ailes
Siret : 47991409500027
Présentation générale :
Pour tous ceux qui ont des activités professionnelles ou de loisirs au sein de l’espace naturel il est vital d’envisager la possibilité d’une survie, définie comme étant le prolongement, souvent involontaire, de la vie en milieu naturel.
En vérité chacun est concerné. A pieds, à cheval, en vélo et même en voiture, un accident, un évènement imprévu peut nous confronter à une situation de survie, et par là même nous mettre tout simplement en danger de mort, nous et nos proches, cela en quelques heures à peine selon les circonstances.
La vie ordinaire, confortable, ne nous prépare pas à faire face, et à réagir vite et bien.
Connaitre la base de la survie est un gage de tranquillité supplémentaire pour pratiquer les activités de pleine nature, mais aussi pour la vie de tous les jours, sans paranoïa ou catastrophisme infondés.
Le propos n’est pas de faire peur à qui que ce soit, pour ensuite balancer sans vergogne deux ou trois vagues notions de survie faussement rassurantes à destination des plus curieux ou des plus angoissés d’entre nous (garder en mémoire le proverbe africain, toujours d’actualité, qui nous dit « si tu ne sais pas qui a allumé le feu regarde bien qui vient l’éteindre) !
Sensibiliser et former le public sur un temps très court est nécessaire… et insuffisant !
Ainsi posséder quelques trucs simples et efficaces peut effectivement servir, mais chacun comprendra que notre position est d’encourager les plus motivés à poursuivre l’expérience, et enrichir avec d’autres structures de notre connaissance leur savoir-faire en matière de survie.
Le sage en haut de sa montagne dit « pas après pas on fait beaucoup de chemin » c’est valable pour bien des choses, dont l’apprentissage des techniques de survie, qui en réalité demande des années d’investissement, ce que nous proposons est alors humblement de tendre la main pour faire ce premier pas, décisif, dans des conditions rudes… mais pas trop !
Description du stage:
Il s’agit durant 24h d’amener les adhérents de l’association à profiter de l’espace
naturel par le biais d’une randonnée pédestre suivie par une séance d’escalade,
dans un premier temps, pour ensuite faire la démonstration à l’occasion d’un
bivouac, de la nécessité d’acquérir quelques techniques de survie, permettant par
exemple de savoir quoi boire, quoi manger, ou encore comment se protéger du froid
ou du chaud en cas de besoin.
La vie en plein air procure un certain bien être, avoir des connaissances en matière
de survie, chercher à les développer, à pratiquer, peut également être source de
plaisir.
Etre bien ensemble fait partie des objectifs de ce stage, en conformité avec les
statuts de l’association Corpor’ailes, contribuer à vous sauver la vie est un autre de
ces objectifs…
Programme détaillé :
- rendez-vous à Cabrières samedi 28/09/2013 à 9 heures devant l’église
- briefing du séjour sur le lieu de bivouac (les voitures seront garées à proximité)
- départ de la rando pour Collias, environ une heure trente de marche
- déjeuner puis séance d’escalade ou de via ferrata (matériel fourni) sur le site de
collias
- rando direction le lieu de bivouac, atelier trouver et rendre l’eau potable au passage
- préparation du couchage (tente ou hamac selon météo)
- atelier s’abriter et se chauffer
- diner et nuit à la belle étoile, dans les senteurs de thym et de romarin
- débriefing et petit déjeuner avant la fin du stage à 9 heures environ le 29/09/2013
Contribution financière et aspects techniques :
La participation financière de 60 euros (dont 10 euros d’adhésion à l’Association) est payable d’avance, elle comprend la nourriture et l’eau pour 24 heures, le couchage (tente ou hamac : si vous avez une préférence merci d’en faire part dès l’inscription) et le matériel d’escalade.
Cette participation financière ne comprend pas le matériel à prévoir par chacun, c’est-à-dire : une tenue de randonnée avec chaussures adéquates, une veste imperméable légère style kway, une protection pour la tête du genre grande écharpe en coton (ou chèche), lunettes de soleil, crème solaire, popote avec au moins couverts et gobelet, couverture de survie (celle qui pèse 200 g de préférence), lampe de poche ou frontale (pas d’électricité sur le terrain !), tenue chaude type grosse polaire ou gros pull en laine pour le soir, duvet confort à 0 degré, gel hydro alcoolique pour l’hygiène des mains, votre nécessaire personnel en pharmacie, un sifflet.
Si vous souhaitez présenter du matériel qui vous semble particulièrement pertinent au groupe, n'hésitez pas.
Paiement du stage par chèque à l’ordre de l’association corporailes (encaissé seulement la semaine qui suit le stage) ou bien en espèces en main propre le matin du stage, en échange du chèque que vous avez joint au dossier d’inscription.
Les inscriptions ne sont validées que sur réception du présent dossier complet dans notre boîte aux lettres, et après réception de votre paiement
En cas de désistement de votre fait, les inscriptions ne seront remboursées que s’il reste au minimum deux semaines avant le début du stage. Par contre, un reclassement à une date ultérieure ou un remboursement vous sera proposé si nous devions annuler le stage, sachant que l’association organise un stage de sensibilisation à la survie une fois par mois.
Information sur les risques
Je soussigné(e) ______________________________________________ atteste avoir lu ce document, et avoir compris les risques, listés ci-dessous, auxquels je m'expose en participant au stage de sensibilisation à la survie organisé par l’association Corporailes les 28 et 29 septembre 2013.
Accidents :
● Entorses de la cheville, du genou, ou autres atteintes à l'appareil locomoteur du fait d'un terrain accidenté ou d'un faux pas, blessures diverses lors d'une chute, d'un impact, d'une collision, notamment en terrain escarpé ou accidenté ;
● Coupures (avec des outils coupants, ou présence d'objets tranchants sur le terrain) ou blessures aux yeux notamment à cause de la végétation
● Brûlures (lors de l'utilisation de réchauds, ou encore avec des liquides chauds) : ces brûlures peuvent être aggravées par le port de vêtements en tissus synthétiques qui peuvent brûler et/ou fondre et coller à la peau ;
Risques environnementaux :
● Piqûres d'insectes : guêpes, abeilles, scorpions, scolopendres, moustiques, taons, tiques (ces dernières pouvant transmettre des maladies graves dont la maladie de Lyme et diverses formes d’encéphalite virale) ;
● Exposition à la chaleur, avec risque d'hyperthermie et ses complications ou exposition au soleil, avec les risques de coup de soleil et brûlures qui y sont inhérents, ou bien exposition au froid, avec risque d'hypothermie et ses complications, gelures, etc.
● Présence de parasites, protozoaires, bactéries, virus ou divers polluants chimiques dans l'eau ou les végétaux récoltés et consommés sur le terrain ;
● Exposition au pollen, spores, et autres agents pathogènes ou allergènes présents sur le terrain ;
Risques occasionnels : foudre, chutes de grêle, tempêtes de neige et impossibilité de circuler, chutes de branches, chutes d'arbres, chutes de pierre en milieu montagnard, feux de forêt ou d'herbes, piqûres de vipères, glissements de terrain.
J’atteste par ailleurs être titulaire d’une assurance responsabilité civile qui couvre les préjudices que je pourrais causer à des tiers pendant le stage de survie en question.
Je comprends qu’en cas de non-respect des consignes, l’association corporailes ne pourra en aucun cas être tenu responsable de mes actes.
J’atteste finalement avoir vu un médecin qui certifie par écrit l’absence de toute contre-indication, pour moi, à la pratique de ce stage de survie.
Fait à le
Signature du stagiaire :
Si l’encadrant responsable du stage constate sur place que vous n'êtes pas en état de suivre les activités il pourra vous en interdire l'accès, pour votre sécurité et celle des autres. Vous serez alors remboursé intégralement, sauf les frais de déplacement engagés qui ne seront pas pris en charge.
Nous vous prions de bien vouloir imprimer et remplir la page ci-dessus puis nous la renvoyer par courrier avec le bulletin d’adhésion à l’association (pas en recommandé SVP! Accusé de réception du dossier par mail !) à l'adresse suivante :
Association Corporailes, 55 ter rue bonfa, 30000 Nîmes
Pour avoir une information supplémentaire contactez l’encadrant au 06 20 79 68 05 ou par mail balavelo@yahoo.fr à l’attention de mathurin.
___________________________________________________________________
Bulletin d’adhésion à l’association Corpor’ailes
Année 2013
NOM : PRENOM :
ADRESSE :
DATE DE NAISSANCE :
TELEPHONE : MAIL :
Fait à le
Signature de l’adhérent :
___________________________________________________________________
Mentions légales :
Les informations recueillies font l’objet d’un traitement informatique destiné à assurer la préparation de chaque stage ou cours. Le destinataire des données est uniquement le secrétaire de l’association Corpor’ailes.
Conformément à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée en 2004, vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification aux informations qui vous concernent, que vous pouvez exercer en vous adressant à : corporailes@yahoo.fr
Vous pouvez également, pour des motifs légitimes, vous opposer au traitement informatique des données vous concernant.

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 22:51

CADTM

 

Source : cadtm.org

 

Capitalisme ou démocratie

20 novembre par Esther Vivas

 


Le capitalisme est le meilleur garant de la démocratie. C’est du moins ce qu’on nous a toujours dit. Mais la réalité, elle, contredit cette affirmation. La crise nous le démontre chaque jour.

Aujourd’hui, alors que les gens descendent dans la rue et manifestent face au Parlement espagnol, occupent des logements vides, chahutent les responsables politiques, se mettent en grève et cherchent à porter la démocratie jusqu’au bout, le discours du pouvoir déclare que ceux qui se lèvent en faveur de la justice sociale sont des anti-démocrates, des putschistes et des philo-fascistes. La démocratie actuelle est incapable d’assimiler les aspirations pleinement émancipatrices et démocratiques des gens. La disqualification et l’insulte est le recours de ceux qui ne convainquent déjà plus avec leurs tromperies. Ils ont menti au dessus de leurs moyens et leur crédit s’est épuisé.

Plus de capitalisme, c’est plus de marché et moins de démocratie. Nous avons ainsi pu le constater en novembre 2011 avec les coups d’Etat effectués par les marchés en Italie et en Grèce. En Italie, ce n’est les citoyens qui ont eu « l’honneur » de se débarrasser du Premier ministre Silvio Berlusconi, ce furent les marchés qui l’ont expulsé du gouvernement et l’ont remplacé par Mario Monti, un ancien de Goldman Sachs. En Grèce, Yorgos Papandréou a été remplacé en un tour de main par Lucas Papademos, ex vice-président de la Banque Centrale Européenne. Des hommes de Goldman Sachs occupent des postes clés dans toute l’Union Européenne. Des banquiers déguisés en politiciens toujours disposés à nous faire payer la facture de leur crise.

Avant de perdre son poste, Papandréou, comme tout politicien professionnel qui se respecte, a tenté par tous les moyens de se maintenir, allant même jusqu’à prévoir un référendum sur les mesures d’ajustement (à la bonne heure !). Mais le mot référendum a rendu très nerveux les marchés and co. (il suffit de relire les titres des journaux de cette période) : « Qu’est-ce que c’est que ces Grecs qui veulent donner leur avis sur les mesures de la Troïka ! » Finalement, la consultation n’a pas eu lieu. Pour reprendre une analogie : quand les marchés entrent par la porte, la démocratie s’enfuit par la fenêtre.

Le capitalisme veut une démocratie de salon, une démocratie à exhiber les jours de fête, une démocratie décorative qu’elle place sous une vitre. La démocratie, cependant, est prise de conscience, mobilisation, rue, protestation, désobéissance. Rien à voir avec la « loi et l’ordre » que veut le capital. La démocratie réelle est aux antipodes du capitalisme réel.

Ils nous disaient également que le capitalisme est le meilleur garant de la justice. Mais les prisons sont pleines de pauvres. L’Etat pénal avance à chaque millimètre que recule l’Etat social. Et la minorité qui occupe le pouvoir politique et économique a transformé la judicature en une marionnette à son service. La justice pour ceux d’en haut n’a rien à voir avec celle de ceux d’en bas. Les exemples sont nombreux, et nous en avons vu plusieurs cas ces derniers jours : du naufrage du Prestige, qui n’a aucun responsable, à une infante royale qu’il est impossible d’inculper jusqu’à une gifle considérée comme un attentat contre l’autorité et pour laquelle le procureur demande cinq ans de prison. Il est vrai que les baffes font mal, surtout pour l’image.

Capitalisme ou démocratie, that is the question. Opter pour la démocratie et la justice implique de s’opposer au capitalisme. Les droits de la majorité ne seront seulement effectifs qu’en abolissant les privilèges de quelques uns. La crise, au moins, permet de voir les choses telles qu’elles sont. Les mesures d’austérité minent la légitimité du système politique et de la politique représentative. Chaque jour, il y a de moins en moins de gens qui croient au conte de fées avec lequel ils nous ont endormis pendant des années. Leurs mensonges mis à nu, il reste désormais à accomplir la tâche de nous convaincre que ce monde injuste peut changer. De savoir que oui, nous pouvons le faire.

Source :
http://blogs.publico.es/esther-viva...

 

 

 

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 22:47

 

Source : reporterre.net

 

Alternatives

En 2014, des dizaines d’archipels d’utopie concrète

Quartiers en Transition

samedi 23 novembre 2013

 

 

 

Après le formidable élan né à Bayonne début octobre autour d’Alternatiba et alors que s’est conclu sans résultat la conférence sur le climat de Varsovie, un appel est lancé en Ile-de-France pour créer des dizaines d’Alternatiba franciliens. Le but : préparer fin 2015 une grande mobilisation au moment où se tiendra en France un nouveau sommet climatique.

 


 

Appel pour des villages des alternatives en Ile-de-France

Venues de France et d’ailleurs en Europe plus de 12 000 personnes se sont réunies à Bayonne le 6 octobre 2013 à l’appel de l’initiative Alternatiba. Ce rassemblement a été l’occasion de mettre en lumière et de faire converger des initiatives citoyennes alternatives en matière d’enjeux climatiques, de justice sociale, d’économie solidaire, de relocalisations…

En réponse à l’appel d’Alternatiba 2013, des Francilien-n-es engagés dans des alternatives concrètes et motivés par la volonté de s’appuyer sur la réussite de ce projet souhaitent constituer un collectif francilien. La région est riche de mille et une initiatives citoyennes qui proposent des alternatives alliant local et global.

Nous appelons tout-e-s citoyen-n-e-s, toutes organisations ou collectifs qui se reconnaissent dans cette dynamique à participer à la réalisation de dizaines de villages des alternatives d’ici 2015, année de la 21ème conférence onusienne sur le climat (COP21) organisée en Ile de France au Bourget.

Sur la route qui mène au Bourget, faisons fleurir dès 2014 des dizaines d’archipels d’utopie concrète.

 

 

Avec le logo d’Alternatiba IDF rassemblons nos initiatives et communiquons via un site commun : www.alternatiba.eu/idf. Vous pouvez nous joindre à l’adresse suivante : alternatiba-idf@lists.riseup.net

Nous proposons au débat une grande initiative collective, un grand village des alternatives en Île-de-France lors d’un week-end de juin ou de septembre 2015 dans un lieu et sous une forme à définir tous ensemble. Cette dynamique participera à la mobilisation internationale qui se développera au delà de l’Ile-de-France jusqu’à la conférence en novembre 2015.

Avec nos alternatives, montrons que d’autres mondes sont possibles !

Faisons vivre le souffle d’Alternatiba, engageons sans attendre dans nos rues, nos quartiers et nos villes la transition écologique, économique et sociale.

 


 

Source : Quartiers en Transition

Lire aussi : "Que mille Alternatiba fleurissent", affirment les participants de la ville des alternatives

 

 

 

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 22:44

 

Source : reporterre.net

 

L’Etat organise un simulacre de débat public autour d’un site géant de déchets dangereux

Collectif Destocamine

samedi 23 novembre 2013

 

 

 

En Alsace, le site de stockage de déchets industriels ultimes, Stocamine, a stoppé son activité depuis plus de dix ans suite à un incendie. Alors que les associations militent pour le déstockage de tous les déchets ainsi que le prévoit la loi, le gouvernement a choisi un autre scénario, et organise un "débat public" visant à le valider.

 


 

Il existe à Wittelsheim, dans le Haut-Rhin, un lieu de stockage de déchets industriels ultimes unique en France (44 000 tonnes de déchets de classe 0 et 1 contenant du cadmium, du mercure, de l’antimoine, de l’amiante et autres produits chimiques toxiques).

Ce stockage a été réalisé à partir de 1999 par l’entreprise Stocamine dans des mines de potasse, sous la plus grande nappe phréatique d’Europe qui alimente tout le bassin rhénan.

Le 10 septembre 2002, un incendie de plusieurs mois (impossible selon les experts) stoppe l’activité de Stocamine. Son directeur est condamné pour "violation délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence, ayant entraîné un risque de mort ou de blessure".

L’hypothèse de pressions exercées par un des actionnaires de Stocamine, l’entreprise Séché Environnement, sur le directeur lampiste, n’est pas irréaliste quand on sait que le même Séché a été à l’origine du stockage de colis de déchets non conformes, descendus quelques semaines plus tôt malgré plusieurs alertes formulées par le personnel.

Les actionnaires privés se sont bien vite retiré de l’entreprise Stocamine et l’État français est à présent seul chargé de la fermeture du site.

Pendant dix ans, de 2002 à 2012, nous avons eu droit à des expertises, débats publics, création de COPIL (Comité de Pilotage), etc. Dix ans de palabres et soixante millions d’euros dépensés en entretien du site.

Le collectif Destocamine, composé d’associations et de syndicats, demande le déstockage de tous les déchets ainsi que le prévoit l’arrêté préfectoral d’autorisation du 3 février 1997.

De nombreux conseils Municipaux, le Conseil général du Haut-Rhin, le CESER (Conseil Economique, Social et Environnemental Régional), le Conseil régional d’Alsace, tous votent des motions en faveur du déstockage total ainsi que tous les élus locaux.

 

 

Fin 2012, Madame Batho, ministre de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie annonce le déblocage de cent millions d’euros pour le déstockage des déchets mercuriels.

Alors que le seul expert du COPIL a avoir de l’expérience de déstockage pour avoir assaini plusieurs sites pollués en Suisse, Marcos Buser, affirme qu’il faut tout déstocker pour un coût nettement moindre que celui d’un déstockage partiel (60 millions d’euros), cela fait désordre dans le scénario proposé par l’exploitant Stocamine, et cette proposition n’a jamais été prise en compte.

L’entreprise plaide depuis toujours pour le confinement de tous les déchets.

 

Et voilà le comble qui arrive en octobre 2013 :

Après cette décision d’État, voici un nouveau débat public qui est proposé pour décembre 2013 !

Et pourquoi un débat après décision ? Tout simplement pour fermer définitivement le site après la sortie d’une partie des déchets mercuriels, cette procédure exigeant légalement un débat public.

Pourquoi est-ce l’entreprise Stocamine qui est chargée de l’organisation du débat public ? Parce que c’est la loi qui impose au maitre d’œuvre de l’organiser, et en l’occurrence il est de fait juge et partie !

Pourquoi le débat reste-t-il confiné au niveau local alors que la problématique de la gestion des déchets toxiques dépasse la cadre du seul bassin potassique alsacien, et qu’il devrait être national ?

Pourquoi le nouveau médiateur, Alain Dorison, est-il un chargé de mission au conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies, conseil placé sous l’autorité de Monsieur Moscovici (économie) et de Monsieur Montebourg (redressement productif) ? Où est le ministère de l’Ecologie ? Après le débat public, ce médiateur conseillera le ministre. Lequel ?

Ce débat, biaisé dès le départ, sert uniquement à respecter la procédure de fermeture de la mine.

Démonstration est faite que l’esprit de la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité et du Grenelle de l’environnement n’est pas respectée dans ce débat public tant il apparait que les décisions ont déjà été prises par l’Etat.

Les débats publics sont une fausse démocratie et que quoiqu’il en sorte, les décisions sont prises a priori au plus haut niveau.

 


 

Source : Courriel du Collectif Destocamine à Reporterre.

Contact : yan.flory (arobase) orange.fr

Photos : L’Alsace.fr

Lire aussi : Déchets nucléaires : à Bure, dans la Meuse, des défis techniques insolubles rapidement

 

 

 

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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 22:40

 

Source : blogs.mediapart.fr

 

Vinci, SNCM : le double jeu de la Commission européenne

Marie Batoux et Corinne Morel Darleux, du Parti de gauche, soulignent l'incohérence, selon elles, des décisions prises à Bruxelles, qui autorise l'Etat français à aider la filiale du groupe Vinci en charge de Notre-Dame-des Landes, mais pas la SNCM, qui assure le service public de transport entre la Corse et le continent.


 

A Bruxelles, la concurrence est libre et non faussée... Enfin, ça dépend des fois. C'est ainsi qu'on apprend que la Commission européenne vient d'autoriser l’État français à verser 150 millions d'euros à la filiale de Vinci en charge de la réalisation de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et dans le même temps qu'elle réclame en tout 440 millions d'euros à la SNCM pour remboursement d'aides du même État.

Voilà qui a de quoi étonner. D'un côté, le groupe Vinci, qui en 2011 affichait 1,9 milliard de résultat net. De l'autre, la SNCM, compagnie d’utilité publique, dont le chiffre d'affaires annuel n'atteint pas le seuil des 440 millions que lui réclame aujourd'hui la Commission européenne !


Pour que la SNCM redevienne un service public, il faut désobéir à l'Union

Celle-ci s'appuie, pour réclamer cette somme à la SNCM, sur la requalification en aides d’État de la recapitalisation au moment de la vente. La Commission européenne justifie ainsi la décision : « Les interventions des pouvoirs publics en faveur d'entreprises peuvent être considérées comme ne constituant pas des aides d’État au sens des règles de l’UE dès lors qu’elles sont effectuées à des conditions qu’un opérateur privé guidé par les critères du marché aurait acceptées (principe dit de l’investisseur en économie de marché) ». Mais quel opérateur privé dans un système capitaliste privilégie la continuité de service public plutôt que ses profits ? Les salariés en lutte, qui se font traiter de « mafieux » pour vouloir maintenir les traversées et l’emploi, le savent : la Corse n’est pas qu’une destination touristique ! 300 000 personnes y vivent, et plus du quart des natifs corses vivent sur le continent. Tous se déplacent toute l'année entre PACA et la Corse. Toutes et tous sont nos concitoyens et vivent sur le territoire de la République française. Ils ont droit à la mobilité et à la continuité d'un service public des transports ! Seulement voilà, en période « basse », cela est bien moins lucratif. Alors qui va prendre en charge des traversées nécessaires mais peu, voire pas rentables ? Pas le concurrent direct Corsica ferries, c’est certain. Il serait plus que temps de revenir à un véritable service public de transport entre la Corse et le continent.

Ce qui de fait n'est pas tout à fait le cas : l'attaque de la Commission européenne s'inscrit en réalité dans un contexte de délégation de service public attribuée en septembre à la SNCM. Rappelons que le capital de la SNCM a été ouvert au privé par le gouvernement de Villepin, permettant ainsi à Veolia, numéro un mondial de l'eau et des déchets de devenir actionnaire indirect de la SNCM par l'intermédiaire de Transdev, sa co-entreprise avec la Caisse des Dépôts, qui détient 66 % du capital. On est donc loin d'un monopole de service public. Pourtant, la Commission européenne se montre beaucoup moins sourcilleuse quand il s’agit des 150 millions d’euros perçus par Corsica ferries de la part de l’Etat français par le biais de l’aide au passager. C'est d'ailleurs ce groupe, écarté de la délégation de service public, qui avait déjà saisi la justice européenne en 2007.

Corsica Ferries bénéficie pourtant déjà d'un « avantage concurrentiel » grâce à la mise en concurrence entre travailleurs organisée par l’Union européenne, qui permet aux compagnies low-cost de faire du dumping social. Quand une compagnie maritime peut choisir le registre de son pavillon, la Commission lui permet en réalité de respecter ou non le droit du travail français. Démarche singulière qui permet à des opérateurs privés de contourner les lois françaises pour assurer une traversée d’un port français à un autre port français. En choisissant un pavillon de régime international, une compagnie peut ainsi recruter un personnel qui ne parle pas la même langue, ne pas respecter le salaire minimum défini par la loi française et les droits des travailleurs.

Il faut donc changer ces règles européennes, ou leur désobéir. Le ministre Cuvillier l’avait promis à sa dernière visite à Marseille, il ne laisserait pas couler la SNCM. Il est temps de passer du double discours aux actes clairs. 


Coup de pouce pour Vinci à Notre-Dame-des-Landes, en remerciement des bons et loyaux services de M. Ayrault ?

Au-delà du cas de la SNCM, la Commission européenne joue un double jeu, mis spectaculairement en lumière avec le cas Vinci. Elle a beau jeu d'écrire que « sans l'existence de ces règles communes, la concurrence au sein du marché unique de l'UE serait faussée par une “course aux subventions” entre les États Membres au profit d'entreprises particulières ». N'est-ce pas précisément ce qu'elle fait en autorisant l’État français à octroyer 150 millions d’euros à Vinci ? Pour un aéroport dont la pertinence économique est largement contestée, sans parler de son caractère anachronique à l'heure de l'urgence à réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Est-ce vraiment aujourd’hui la priorité pour l’État français que d'aider Vinci, un groupe déjà à la limite du monopole ? Parkings privés, tunnels, autoroutes, transport ferroviaire de personnes : tous les partenariats publics-privés tombent déjà dans son escarcelle. Cela rapporte beaucoup aux actionnaires de Vinci et coûte en revanche cher à l'État et aux citoyens qui payent pour alimenter leurs profits deux fois, par l’impôt et par les péages !

L'explication des inconséquences de la Commission européenne est peut-être à chercher du côté des bons et loyaux services rendus par le gouvernement Ayrault à la Commission européenne : ratification du TSCG, application minutieuse de la règle d'or et des budgets d'austérité, annonce en pleine conférence environnementale de la privatisation accrue d'EDF et GDF, poursuite de l'ouverture du rail à la concurrence et plus largement organisation de la libéralisation à marche forcée de ces dangereux monopoles que représentent les services publics face à la “ concurrence libre et non faussée ”... 

Sans vergogne, la Commission européenne affirme que ce cadeau à Vinci de 150 millions est « compatible avec les règles européennes relatives aux aides de l’État ». En pleine cure d'austérité imposée par la même Commission européenne, en pleine annonce de hausse de la TVA pour financer le crédit d'impôt emploi compétitivité, cette double décision est une véritable provocation et un bras d'honneur fait par les oligarques de Bruxelles et le gouvernement Ayrault à toutes celles et ceux qui sont attachés à un usage juste et républicain des deniers publics, à la notion de service public et à l'écologie. La conséquence de ces politiques libérales du gouvernement et de l'Union europénne est toujours la même : le privé s'enrichit sur fonds publics et le service public pâtit de l'austérité. Ça suffit. Ce sont pour toutes ces raisons que nous serons nombreux à marcher le 1er décembre sur le portique de Bercy pour une vraie révolution fiscale !

Aider ce projet d'aéroport est un non sens, couler la SNCM est une aberration. Tant d'un point de vue économique, social qu'environnemental, c'est un signe de plus du fonctionnement oligarchique de la Commission européenne et une motivation supplémentaire pour dire que nous ne voulons plus de cette Europe-là.

 

Marie Batoux, membre du Bureau national du Parti de gauche (PACA), candidate aux municipales dans le 13-14e arrondissement de Marseille
Corinne Morel Darleux, secrétaire nationale à l'écosocialisme du Parti de gauche et conseillère régionale FDG (Rhône Alpes), candidate aux élections européennes 2014

 

 


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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 22:27

 

 

Source : mediapart.fr

Au Pérou, la résistance indienne contre les mines d'or de Newmont

|  Par La rédaction d'infoLibre et Pablo Ferri, Jaled Abdelrahim

 


Une famille du nord du Pérou voit son bout de terre menacé par un gros projet d’exploitation minière. Tous les villageois des environs sont mobilisés, avec quelques associations, pour défendre leurs maigres ressources, et la plus précieuse d’entre elles : l’eau.

Armée de rage et de pierres, la famille Chaupe a essayé de repousser la police ce matin-là. La compagnie minière Newmont venait ouvrir une route juste où se trouve sa maison et plusieurs dizaines d’agents protégeaient une énorme pelle mécanique. C’était en août 2011. « Ma fille s’est agenouillée devant l’excavatrice, alors ils l’ont frappée et traînée par terre », raconte Jaime Chaupe. « Ma femme a commencé à lancer des pierres sur la police. Ils l’ont attrapée et l’ont frappée aussi. Ils lui donnaient des coups de pied. Moi aussi j’ai pris des pierres, j’en ai lancé une sur l’ingénieur. »

La voix cadencée et les mains rugueuses, le chef de famille se souvient parfaitement de ce moment : « Ils sont partis parce que ma fille a perdu connaissance [sous les coups] et ils ont cru qu’elle était morte. »


Jaime Chaupe derrière sa maison et à côté de son champ de pommes de terre, menacés par le projet minier. ©Pablo Ferri 
Jaime Chaupe derrière sa maison et à côté de son champ de pommes de terre, menacés par le projet minier. ©Pablo Ferri

La maison des Chaupe est minuscule, une baraque sans lumière ni eau courante. Les murs sont en torchis, comme la balustrade qui protège le feu pour cuisiner. Il fait froid là haut, à 4 000 mètres d’altitude. Malgré le soleil, Jaime Chaupe porte un bonnet en laine, un pull, une chemise et une polaire. C’est une sensation étrange de rencontrer quelqu’un là-bas, au milieu de la cordillère des Andes. Aucun chemin ne mène à sa maison ; elle ressemble à une meule de foin au milieu de nulle part, un accident entre les arbustes et les lacs de cette planète étrange qu’est le nord du Pérou.

Depuis la mi-2011, la famille est en conflit avec le géant étasunien Newmont pour son territoire : la compagnie minière prévoit de construire une mine à ciel ouvert juste à côté de sa maison. Son projet est de vider quatre lacs des alentours, de faire des trous énormes dans deux d’entre eux pour y chercher de l’or et du cuivre, et de reverser la terre stérile dans les deux autres. Pour ce faire, Newmont a besoin de la vallée des Chaupe, pour y installer ses machines servant à ouvrir des routes et construire des infrastructures. En tout, le projet Conga – ainsi nommé par Newmont en honneur aux lacs – occupera 3 069 hectares.

Les Chaupe défendent leur terrain, 20 hectares au sommet de Cajamarca, la deuxième région la plus pauvre du Pérou – 54,2 % des 1,4 million d’habitants sont pauvres, plus du double de la moyenne nationale. La famille a acheté la terre en 1994. Elle y cultive des pommes de terre et nourrit ses cochons et autres animaux. Jaime Chaupe affirme qu’ils ne l’ont jamais vendue. Newmont prétend qu’elle l’a achetée en 2001 – mais à un autre propriétaire –, que la justice lui a donné raison contre les Chaupe pour usurpation de territoire et qu’ils doivent partir. Puis un tribunal a annulé toute la procédure, qui doit être recommencée depuis le début. En attendant, la famille, soutenue par des paysans de la province, résiste à la pression exercée par l’entreprise. Ses vigiles les surveillent, la police fait une apparition de temps en temps dans les montagnes alentour. Selon des estimations de la compagnie, l’exploitation du sol des Chaupe et des environs arracherait à la terre 20 tonnes d’or par an, avec une marge bénéficiaire de 34 500 dollars le kilo, autrement dit la valeur de tout le café exporté par le Pérou chaque année.


Le symbole d'une lutte contre les compagnies minières

Les Chaupe peuvent compter sur l’aide de leurs « frères » paysans et le soutien d’une bonne partie de la population. Depuis ce jour d’affrontement avec la police en 2011, des voisins de villages environnants les accompagnent dans leur vallée. Leur affaire est devenue le symbole d’une vieille lutte à Cajamarca, celle de la défense de ses propres ressources – de l’eau surtout – contre les intérêts des compagnies minières.

Arriver à la maison des Chaupe est une petite odyssée de transport informel. Il faut monter la cordillère depuis Cajamarca par des sentiers escarpés. Celendín est à mi-chemin entre Cajamarca et les lacs. C’est un village de paysans et d’éleveurs comme on en trouve plus de 200 dans la région – seulement cinq ont les mines pour activité principale. Les affrontements les plus graves entre paysans et policiers en raison du projet Newmont ont eu lieu ici en juillet 2012. Les villageois protestaient et ils ont fini par affronter la police. Selon les journaux locaux, ce sont les paysans qui ont lancé des pétards et les autorités ont répondu à coups de feu. Cinq villageois sont morts et trente ont été blessés par balles, ainsi que deux policiers.

Le village de Celendín a aujourd’hui des slogans peints sur les murs. C’est ainsi que les paysans rejettent la compagnie minière. Ils disent « oui à l’eau » et « non à l’or » en lettres énormes, et aussi « Conga ça va pas ». Newmont est l’objet de leur rejet. Elle incarne les maux de la mine dans la région, du moins pour les paysans. Ce n’est pas seulement pour l’eau et les Chaupe, c’est aussi l’histoire de l’entreprise, associée à des mots et des expressions maudites comme « Yanacocha » ou « le mercure de Choropampa ».

Yanacocha est le joyau de Newmont à Cajamarca, une mine d’or et de cuivre qui rapporte des tonnes chaque année depuis 1993 – aujourd’hui, c’est la plus grande d’Amérique du Sud. Une fois, un camion de la mine est sorti chargé de mercure dont il a perdu 150 kilos quelques kilomètres plus loin, près du hameau de Choropampa. L’avocate Mirta Vásquez, qui dirige l’ONG Grufides, se souvient bien de cette histoire : « La première chose qu’a fait la compagnie a été de placarder des affiches offrant 10 soles (2,5 euros) pour chaque gramme récupéré. Ces jours-là, un cirque faisait étape à Choropampa et, comme les enfants voulaient y aller, ils cherchaient du mercure comme des fous. Ils l’enfermaient dans des bouteilles de soda et gagnaient 30 soles. »

Grufides, qui surveille les méthodes des compagnies minières à Cajamarca, dit que 5 000 personnes de Choropampa et des environs ont été affectées par le mercure d’une façon ou d’une autre. « Il faut savoir que seulement 5 000 personnes vivent à Choropampa », précise l’avocate. De son côté, l’entreprise ne reconnaît que quinze cas.

« Les exploitations de Yanacocha ont laissé des communautés entières sans eau, elles ont contaminé des sources et les ont fait disparaître, et elles ont provoqué le déplacement de paysans, regrette-t-elle. On a l’impression que s’il se passe quelque chose maintenant, ils ne prendront pas leurs responsabilités. » Vásquez insiste sur le fait que l’ONG n’est pas contre l’exploitation minière : « Qu’ils fassent ce qu’ils veulent à condition que ça ne nous touche pas, et Conga nous fait du tort. »


Brouillage sémantique

Quelques jours avant notre visite aux Chaupe, le représentant de Newmont et d’autres compagnies minières de la région, Freddy Regalado, a organisé une visite en jeep dans la province de Hualgayoc, l’une des plus touchées par l’exploitation minière à Cajamarca depuis l’époque de la colonisation. Médecin de formation, Regalado a utilisé un vocabulaire emprunt de termes techniques pour défendre l’attitude responsable des compagnies modernes.

Il n’a jamais parlé de sources disparues, de nids de poule ou de flancs de colline pelés mais de « passifs environnementaux ». Les entreprises ne réparent pas ce qu’elles abîment mais elles « introduisent des remédiations ». Il n’y a pas de pollution mais des « affectations ».

Regalado explique le rejet de Conga par la méconnaissance, parce que les gens « ne veulent pas comprendre » – 78 % de la population refuse le projet, selon une enquête du quotidien El Comercio. « L’eau de Cajamarca contient des résidus en raison du passif des anciennes mines, pas de l’actuelle, affirme-t-il. L’exploitation d’aujourd’hui affecte moins de 1 % du territoire et respecte la nature. »

La jeep s’est arrêtée plusieurs fois à Hualgayoc. Sous la pluie, le paysage perdait sa couleur verte, le marron foncé des mines à ciel ouvert dominait à l’horizon. On aurait dit des cônes vides et inversés incrustés dans la terre. 

 

Cyanure et mercure

Une mine à ciel ouvert implique de dynamiter d’énormes étendues de terre, d’utiliser des millions de litres d’eau, du cyanure pour récupérer les métaux et de la poudre de zinc pour les solidifier. Selon l’Observatoire des conflits miniers d’Amérique latine, 25 kilos d’or extraits génèrent 50 000 tonnes de déchets solides, de dioxyde de carbone et de cyanure de sodium.

Bien qu’il s’agisse de substances polluantes, Regalado assure que les mines suivent un protocole pour parvenir à des dégâts « nuls ou minimes, comme cela sera le cas dans les lacs de Conga ». Le protocole est très simple. On sort la terre du cône inversé et on la jette dans des piscines naturelles couvertes de plastique blanc. Là, on y ajoute du cyanure et on récupère les minerais – ce processus implique aussi l’utilisation de mercure. La terre reste dans la piscine et, quand celle-ci est pleine, la mine la recouvre et s’assure qu’il n’y a pas de fuites. Le but est, évidemment, de laisser le cyanure et autres déchets dans le plastique sans contaminer la terre et l’eau. 

Et c’est bien là que se cristallise la principale crainte des paysans avec Conga. À 4 000 mètres d’altitude, la compagnie extrairait en amont de sources qui irriguent toute la province et toute fuite serait fatale. Freddy Regalado assure que ce genre de problèmes n’arrive presque jamais. 

 

Groupes d'autodéfense

Depuis des décennies, la population rurale du Pérou organise des rondes de groupes d’autodéfense pour éviter vols et agressions dans la campagne. Elle pallie ainsi l’absence historique de l’État dans les régions isolées comme Cajamarca. Ce qui se passe en ce moment, pour eux, c’est un peu la même chose. « Il ne s’agit pas de défendre seulement les Chaupe, mais aussi nos intérêts », dit Jenny Cojal, présidente du groupe d’autodéfense de Celendín. Bottes camarguaises aux pieds et chapeau western, Cojal parle et marche avec détermination, et d’ailleurs elle s’exclame plus qu’elle ne parle : « Nous utilisons toutes les voies légales pour les freiner. S’ils ne freinent pas, nous irons jusqu’où il faudra ! »

Des milliers de patrouilleurs sont montés aux lacs ces dernières années. Ils ont leur base entre Celendín, la maison des Chaupe et le village de Santa Rosa, épicentre commercial du district les vendredis de marché. Il y a quelques mois, sur la place d’armes de Celendín, plus d’un millier de patrouilleurs se sont réunis pour ratifier leur engagement pour les lacs. « Nous donnerons la vie ! » ont-ils crié.

 

Des villageois de Cajamarca au marché du vendredi de Santa Rosa, épicentre commercial du district. 
Des villageois de Cajamarca au marché du vendredi de Santa Rosa, épicentre commercial du district. © Pablo Ferri

Lorsqu’ils s’expliquent, Cojal et les autres ne s’attardent pas sur les différences entre les deux parties. Ils ignorent les arguments du procureur sur la vallée des Chaupe ou ceux de Newmont à propos des lacs et se contentent d'un lapidaire « Conga ça ne va pas ».

Dans le village de Santa Rosa, proche des lacs, Edilberto Guamán, 66 ans, donne la clé du raisonnement paysan : « La qualité de l’eau a empiré depuis que les mines travaillent tout près, ce n’est pas comme quand j’étais petit, explique-t-il. Avant, elle était cristalline, et maintenant je l’ai vue noire. Elle s’assèche. Mon bétail ne veut plus la boire. »

Sergio Sánchez, technicien de l’ONG Grufides, rend les mines responsables de cette dégradation, vu qu’elles n’ont commencé à se préoccuper des conséquences de l’extraction qu’en 2004, quand le Pérou a voté une loi sur les dégâts environnementaux. Jusqu’alors, Cajamarca était une terre sauvage. Le gouvernement d’Alberto Fujimori a ouvert la brèche dans les années 1990 en invitant les entreprises à renifler le sous-sol. Il leur a accordé des avantages fiscaux extraordinaires et a promis que personne ne leur augmenterait jamais les impôts. Dante Vera, représentant de Newmont et d’autres compagnies minières à Lima, reconnaît que les extractions étaient alors très agressives. « C’étaient des mines de courte durée. Les gringos arrivaient avec leur sécurité privée, ils extrayaient et repartaient. »

À en croire la compagnie, les choses ont changé. Pour Newmont, l’extraction est aussi importante aujourd’hui que la « remédiation ». Regalado explique que les eaux des lacs qu’ils veulent assécher sont stagnantes, qu’elles ne communiquent avec aucune source. Il dit aussi que ce sont surtout des eaux acides qui ne servent à rien. Il ajoute que l’entreprise construit en plus des lacs artificiels pour les remplacer.

Sánchez, lui, affirme qu’il est faux de dire que les eaux sont stagnantes et acides. Grufides et l’entreprise présentent donc des rapports d’impact sur l’environnement contradictoires. Même le ministère de l’environnement a polémiqué avec celui des mines. Après l’intervention d’experts internationaux, le gouvernement d’Ollanta Humala a tranché la question : le projet est viable avec certaines modifications. Les Chaupe, leur terre et la volonté des paysans sont le dernier obstacle.

En août, un tribunal de Cajamarca a annulé la procédure contre les Chaupe et ordonné de la reprendre à zéro. La famille espère maintenant que le juge acceptera leur version : ils n’ont jamais rien signé et la communauté ne pouvait pas vendre leur terrain sans les prévenir. Préoccupée, l’avocate Mirta Vásquez reconnaît que, s’ils perdent, il n’y aura pas d’autre recours. « Si Newmont gagne, la police pourrait les expulser. »

Conscient de son acte de résistance, Jaime Chaupe marche avec enthousiasme vers l’arrière de sa maison. Máxima, sa femme, est partie à Lima chercher des soutiens à leur cause. Ses enfants sont à Cajamarca, c’est jour d’école. Un petit groupe de patrouilleurs tourne toujours aux alentours. Ils s’habillent comme Chaupe, mais se cachent le visage et évitent de se laisser prendre en photo.

Derrière la maison, Chaupe montre son petit trésor en souriant, un champ de patates vers le bas de la vallée. Voilà sa joie : même si cette terre renferme beaucoup d’or, ce qui intéresse Chaupe, ce sont ses patates.

Pablo Ferri et Jaled Abdelrahim pour tintaLibre n°7, octobre 2013

Pablo Ferri fait partie du collectif Dromómanos de journalisme itinérant. Il collabore avec El País, Tiempo, Interviu (Espagne), Vice (Mexique, États-Unis) et El Universal (Mexique). Le journaliste Jaled Abdelrahim écrit le blog Kilómetro Sur pour le supplément El Viajero de El País, récit de ses voyages en Amérique du Sud. Il collabore avec Tiempo (Espagne), Vice (Mexique, États-Unis) et Gatopardo (Colombie).

Version française : Laurence Rizet, Mediapart

Et Dimitri : Premièrement, ce qui l'embarasse le plus en parlant de la poésie contemporaine russe, c'est de l'envisager dans le cadre/dans les catégories de la poésie nationale. Tout de suite surgit donc la problématique du local et du global, de l'impérial et du colonial. En faisant le parallèle avec la poésie américaine, on peut difficilement lui poser la question que nous posons ici par rapport à la poésie russe. Parce que la poésie américaine est une sorte de construction comme ça...(?) Je préfère parler de la poésie transnationale qui travaille les thèmes, les motifs, les sujets, les narratifs globaux et locaux. Et le plus important est que c'est une poésie qui permet de révéler la demande socio-politique de l'infrastructure mondiale globale. C'est pour cela que je pense que l'une des possibilités de construire une biographie d'un poète russe contemporain est de sortir de son propre cadre, de dépasser les frontières de la tradition russe. La deuxième question est de voir comment le champ de la poésie russe est structuré.

Patrice : Alors toi tu vois la poésie non pas en couches ou en zones parallèles, mais plutôt dans son sens global planétaire?

Dimitri : Non, c'est un peu différent. On peut penser le global et le planétaire par l'idée de l'existence de zones, parce que c'est justement dans un contexte planétaire qu'on voit des zones de souffrance, d'injustice, d'expériences traumatisantes qui se révèlent. Par exemple, l'un de mes textes publiés dans l'anthologie Baccanales s'appelle «Zones d'ignorance». Ce qui m'intéresse justement, c'est la découverte de ces zones d'ignorance, zones où l'homme moderne ne se reconnaît plus, n'arrive pas à s'identifier lui-même, il se passe donc une aliénation de l'homme moderne. Il me semble que ces zones d'ignorance sont communs à la littérature russe et à la littérature américaine où il y a un narratif???? Mes textes sont actuellement en traîn d'être traduits par un professeur de l'université de Pensylvanie, Kenneth? Platt. Et ce dernier, il a dit que cette expérience d'aliénation, de perte, d'abandon, d'impuissance qui est présente dans mes textes est justement proche de l'expérience d'un jeune homme au fin fond de quelque Massatchussets, de la Nouvelle Angleterre, de la génération perdue.

Nathalia : Alors, si le langage fait partie de cette expérience, il est plus important d'envisager ce langage que de parler de cette expérience elle-même.

Patrice : On est déjà là dans quelque chose de l'ordre du contenu, il y a dans ta poésie quelque chose de l'ordre du témoignage... donner la parole justement à ces gens-là qui vivent dans ces zones de l'ignorance.

Dimitiri : Ben oui, et justement, reste à savoir ce qui se passe, et Nathalia l'a dit aussi, avec le langage. Parce que très honnêtement, il me semble que nous vivons actuellement à l'époque qui est post-civilisatrice (post-Lumières) et post-moderniste. Donc les catégories de la poésie nationale ne marchent plus, parce que la catégorie nationale appartient à l'époque des Lumières. Et comme nous vivons à l'époque post-Lumières qui succède à celle-ci, un nouveau paradigme global commence, mais il n'a pas encore de nom. Donc, cette catégorie de national passe au second plan, et par conséquent, ce qui m'intéresse, c'est le langage poétique qui est maximalement aliéné de lui-même et de la figure de l'auteur. Cela veut dire qu'on passe la parole aux millions de personnes souffrantes, indigentes, qui n'ont pas trouvé leur place dans l'industrie de la production de la culture, dans l'industrie créative. Donc de l'Adorno jusqu'à l'économie créative contemporaine. Et par exemple nous avons fait il y a trois jours un enregistrement avec un poète très intéressant américain aux Etats-Unis, Peter Guizi (?), et nous avons trouvé un sujet commun, ça s'appelle en fait «le réfugié intérieur», mais «intérieur» non pas dans sa propre subjectivité isolée, mais intérieur justement dans ces zones sociales où se passent les événements importants liés à l'exploitation, à la précarité, à la justice, etc. L'universalité apparaît de cette absorbtion totale dans la parole des autres personnes.

Patrice : Dans la parole du particulier?

Dimitri : Non, ce n'est pas exactement du particulier, la parole poétique est donnée à ce qui ne font pas partie de la société. Et comme le particulier ne peut pas être articulé dans la production contemporaine postculturelle post-Lumières, une tentative d'approcher l'horizon de l'universel apparaît, mais cette tentative, ce n'est qu'une tentative.

Nathalia : Ce projet de passer la parole à l'opprimé, c'est un projet des Romantiques, mais quand tu as parlé de l'universel, je comprends cela comme ce n'est pas parler pour l'opprimé, mais de projeter la parole sur l'opprimé. Mais en même temps la question de l'image, du portrait de l'opprimé apparaît; et l'opprimé parle une langue nationale concrète, alors comment ça travaille ?

 

 


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24 novembre 2013 7 24 /11 /novembre /2013 22:19

 

 

 

Source : mediapart.fr

L’affaire Taubira ou la rencontre de l’impensé colonial et du néolibéralisme

|  Par christian salmon

 

 

Si Christiane Taubira est attaquée, c’est qu’elle résiste à la crise de souveraineté qui mine la politique. C'est aussi parce qu'elle trace une diagonale audacieuse entre les deux blocs qui arraisonnent le débat public, le souverainisme xénophobe nourri au racisme colonial et le mondialisme néolibéral.

«Pourquoi Christiane Taubira cristallise les haines », titrait presque innocemment Le Monde du 8 novembre 2013 sur une pleine page. Oui, c’est vrai : pourquoi Taubira cristallise-t-elle la haine d'Anne-Sophie Leclere ? Cette candidate FN affirmait sur son site internet qu’elle préférait la voir avec ses semblables « dans les branches de son arbre plutôt que de la voir au gouvernement ». Pourquoi la garde des Sceaux cristallise-t-elle les haines des catholiques de l’institut Civitas, opposants à la loi sur le mariage pour tous, qui manifestent dans les rues de Paris aux cris de : « Y a bon Banania, Y a pas bon Taubira » ?

Il doit bien y avoir une raison pour qu’une enfant de onze ans lance sur son passage en joignant le geste à l’insulte : « Elle est pour qui la banane ? » « Franchement, je suis incapable de vous dire ce qui a pu lui traverser l'esprit. Elle a dit “guenon” comme elle aurait pu dire “girafe” », relativisent les parents qui s’étonnent de l’écho qu’a reçu dans les médias l’« espiègle » apostrophe de leur fille. « Ce n'était en rien prémédité », proteste la mère, qui a pourtant emmené sa fille à ce qui ne mérite pas le nom de « manifestation » mais plutôt celui de « lynchage » : « La banane n'a pas été apportée sciemment pour provoquer la ministre », affirme-t-elle. Ah ! C’était juste pour le goûter ? Nous voilà rassurés. D’ailleurs la petite est « née aux Antilles », et a vécu « la moitié de sa vie en Outre-mer et en Afrique », renchérit le père en guise d’excuse, comme si les blagues racistes étaient incongrues sous les palétuviers.

 

Christiane Taubira (Reuters) 
Christiane Taubira (Reuters)

Les attaques contre Christiane Taubira ne constituent pas seulement une faute morale et une transgression de nos soi-disant « valeurs » républicaines qu’il suffirait de sanctionner par un sursaut républicain. Ou par un surcroît de morale, comme si cette république exemplaire ne s’était pas illustrée il y a moins d’un siècle en organisant des zoos humains en plein Paris, exhibant les populations des colonies à des spectateurs qui leur lançaient des victuailles. Cette violence symbolique, qui n’a d’égale que la violence réelle de la conquête coloniale, n’était pas gratuite que l’on sache. Si elle se plaisait à animaliser les populations des colonies, c’était pour légitimer l’entreprise civilisatrice de la colonisation.

Plutôt que de pousser des cris d’orfraie devant la résurgence du racisme, nos républicains vertueux feraient mieux de s’interroger sur cet impensé colonial qui, faute d’être analysé, hante la société française et s’exprime à nouveau depuis dix ans à visage découvert. Ce fut la loi de février 2005 évoquant, dans sa première mouture, les « aspects positifs » de la colonisation ; le discours présidentiel de Dakar sur l’homme africain « qui n’est pas entré dans l’Histoire » ; la création du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale ; le débat sur l’identité nationale, dont L’Identité malheureuse, le dernier livre d’Alain Finkielkraut plébiscité par les médias, est à la fois le navrant symptôme et une piqûre de rappel.

Loin de disparaître de l’inconscient (ou de la conscience) collectif, la « racialisation des esprits » et « l’animalisation de l’autre » sont les composantes indissociables de toute politique identitaire… Elles sont congruentes avec un effort de redéfinition de l’identité nationale, de réarmement national, l’accent mis sur une identité vécue comme inquiète ou menacée.

 

 

C’est un régime de signes qui détermine un certain langage, un certaine forme d’humour qui stigmatise, infantilise, animalise les autres qu’ils soient noirs, roms, étrangers. L’historien Pap Ndiaye, auteur de La Condition noire (Calmann-Lévy), attirait récemment l’attention sur le retour d’un « racisme biologique, fortement racialisé, avec des références animalières banales à l’époque coloniale… qui relèvent d’un registre qui semblait avoir disparu après la Seconde Guerre mondiale et la décolonisation » (lire ici notre article sur ce livre). 

Si on répète à bon droit que le racisme n’est pas une opinion mais un crime et que, comme l’a affirmé François Hollande à Jérusalem, « il n’y a pas de différence entre les paroles et les actes racistes », c’est que la parole raciste n’est pas seulement une parole attentatoire, un défi ou une insulte. C’est ce que les théoriciens du langage avec John Searle appellent un « speech act », c’est-à-dire une parole qui agit, un acte performatif qui a le pouvoir de réaliser ce qu’il énonce.

La parole raciste exclut de « l’espèce humaine », comme l’a rappelé Christiane Taubira, celui ou celle qu’elle animalise. Ce n’est pas une blague, c’est un scalpel qui permet depuis l’aube de la colonisation de tracer la frontière entre humains et esclaves, colons et colonisés, civilisés et sauvages. Et lorsque l’insulte se met en scène au travers des expositions coloniales et des zoos humains, le racisme devient une performance collective. C’est une cérémonie et un rituel. Sa fonction ? Redéfinir les contours de la communauté nationale.

Déconstruire le racisme

Jean-Marie Le Pen a accusé Christiane Taubira d’être « antifrançaise » reprenant la rhétorique de l’anti-France utilisée par la droite et l'extrême droite en France depuis l'affaire Dreyfus. Quant à Marine Le Pen, elle a euphémisé comme à son habitude mais en s’exprimant cette fois en sociologue : « Taubira a d’abord été indépendantiste guyanaise, c’est un élément essentiel dans sa construction politique. » Mais qui s’interroge sur « la construction politique » de Marine Le Pen, nourrie au lait de la xénophobie et du ressentiment colonialiste, les deux mamelles de l’ultra droite française ? Qui se demande dans les médias ce que signifie la reconfiguration du paysage politique opérée par les « Le Pen » à partir non plus de l’axe droite/gauche mais de la polarité patriote/mondialiste apparue à la faveur de l’affaire Dreyfus ?

C’est pourquoi il ne suffit pas de s’insurger contre le racisme, il faut le déconstruire. Il faut lui opposer non pas seulement des « valeurs », des manifestations et des concerts de SOS racisme, mais un travail patient de déconstruction qui consiste à défaire l’imaginaire colonial, son bestiaire, ses imageries, ses plaisanteries et à rendre contagieux un autre état d’esprit. Il faut opposer à l’imaginaire colonial des symboles, un récit, une histoire commune. Comme le fait par exemple en ce moment même l’exposition « Kanaks » au musée du Quai Branly (lire ici notre article sur cette exposition).

 

Exposition temporaire : "Kanak, l'art est une parole". Du 15 octobre 2013 au 26 janvier 2014 
Exposition temporaire : "Kanak, l'art est une parole". Du 15 octobre 2013 au 26 janvier 2014 © musée du quai Branly, photo Gautier Deblonde

 

C’est ce que réussit Christiane Taubira lorsqu’elle fait adopter en 2001 la reconnaissance des traites et des esclavages comme crime contre l'humanité. Mais surtout lorsqu’elle bataille en 2013 à l’Assemblée pour défendre son projet de loi sur le mariage pour tous en démasquant l’imaginaire biologiste qui hante la droite. Elle fait sortir le débat sur le mariage pour tous du ghetto de la « norme biologique » dans lequel la droite voulait l’enfermer pour en faire l’enjeu d’un combat pour l’émancipation humaine, rappelant au passage que c’est toujours le droit des minorités qui trace l’horizon des nouveaux droits pour tous… On se souvient de sa formidable réplique aux députés UMP qui invoquaient les « lois naturelles »:

« Vous avez la fascination du naturel, du biologique et de la génétique ! (...) Vous faites revenir avec vénération et fascination les lois naturelles, revenant au temps de Lamarck et de l’évolutionnisme…. Il y a longtemps que les Lumières ont imprégné la réflexion philosophique et scientifique ! Il y a longtemps que l’on sait ce qu’est l’environnement social et culturel ! Et vous, vous en êtes encore aux lois de Mendel, qui travaillait sur les petits pois ! » Au cours de ce débat exemplaire, Taubira a démasqué la droite ; elle a mis fin à cette imposture qui veut que la droite se prétende depuis trente ans, moderne, transgressive et même « révolutionnaire » quand il s’agit de s’attaquer au droit du travail ou de déréguler la finance… Pour une fois la droite était renvoyée à son archaïsme, à ses fantômes biologistes, à ses fantasmes d’exclusion : biologisme. Petits pois de Mendel.

Christiane Taubira a réussi à faire revivre une crédibilité perdue de la parole politique, une certaine « entente » des signes d’autorité et d’intelligence. Si elle est attaquée, c’est qu’elle résiste à la régression médiatique du politique. Non qu’elle résolve à elle seule la crise de souveraineté qui mine le politique. Mais parce qu’elle trace une diagonale entre les deux blocs qui arraisonnent le débat public. Elle est le visage audacieux de ceux qui livrent bataille au-delà des lignes de front, suivant une diagonale d’invention… Loin de « cristalliser les haines », elle est un révélateur, au sens chimique, de ce moment politique. Un atout et un reproche pour le gouvernement, son récit manquant. Elle est le visage de ce que la gauche pourrait être et qu’elle n’est pas.

Les attaques racistes contre Christiane Taubira ne sont pas fortuites. Elles sont tout à la fois un symptôme et un instrument : le symptôme d’un impensé colonial et l’instrument d’une décomposition/recomposition du champ politique longtemps structuré autour de la bipolarité droite/gauche. Cette bipolarité cède la place à un affrontement entre un souverainisme qui fixe et un mondialisme qui disperse ou égare…

D’un côté les souverainistes de tous poils, nostalgiques de l’État qui exigent une reterritorialisation de la puissance, la sortie de l’Euro, la résurrection des frontières... Bref, le retour à la maison. D’un autre les mondialistes, les nomades, qui abandonnent tous les attributs de la Nation et jusqu’au système démocratique, et confient la politique aux experts, aux marchés financiers, aux capitaux. D’un côté la resubstantialisation de l’État ; de l’autre sa dissolution ; d’un côté le volontarisme nationaliste, de l’autre la déconstruction néolibérale ; d’un côté la règle, de l’autre la dérégulation ; d’un côté la chimère nationaliste, de l’autre l’utopie mondialiste… Nous avons le choix entre nous pétrifier ou nous dissoudre. Ces deux fronts, ces deux machines sont face à face ; elles se regardent en chiens de faïence. Dualisme funèbre dans lequel se consume l’échec du politique.

Le boomerang de l'insouveraineté de l'Etat

Chaque camp a son pathos. Si vous faites un pas de côté par erreur ou par distraction, il vous faudra chanter à tue-tête l’hymne national et vous enrouler dans le drapeau national quand ce n’est pas le bonnet rouge et le Gwenn ha Du, le “kit” du Breton en colère, tant il est vrai que la régression comme la fuite en avant ne connaissent pas de limite. Vous vouliez défendre la nation, vous voilà patriote de canton…

Si vous penchez du côté des mondialistes, acceptez de vous dissoudre dans l’éther néolibéral, abandonnez toute singularité et plongez dans ce nouveau monde fort bien décrit dans les pubs de HSBC, la banque des comptes en Suisse et des aéroports, qui annonce rien de moins qu’un eldorado néolibéral dont « les investisseurs seront les explorateurs, où tous les marchés auront émergé, un monde merveilleux où les déchets seront source d’énergie, où même la plus petite entreprise sera multinationale... ». À l’instar des affiches géantes du patronat US en pleine crise des années trente qui vantaient la supériorité du mode de vie américain au-dessus des files d’attente des chômeurs…

À chaque camp son récit. D’un côté le retour à la maison. De l’autre la conquête du monde. D’un côté l’Hexagone comme unique horizon, de l’autre l’horizon sans limite. D’un côté la ligne Maginot, de l’autre un monde imaginaire… D’un côté un récit de guerre régressif ; de l’autre une épopée naïve sans frontières.

C’est désormais ce double front qui structure le débat politique… D’un côté les sédentaires zemourriens (de Éric Zemmour), de l’autre les nomades attaliens (de Jacques Attali). Depuis la crise de 2008, les attaliens perdent du terrain, les zemourriens capitalisent sur la crise, la peur du lendemain rameute les foules orphelines… Entre les « zemmouriens » favorables à un retour négocié à la maison avec armes et bagages, frontières et ancien franc, et les « attaliens » qui plaident pour un « élargissement » (des nations, de l’Europe, du monde même), il n’y a pas de compromis possible. Les uns sont tournés vers un passé illusoire, les autres louchent vers un avenir sans visage. Les uns et les autres s’accusent de tous les maux. C’est « l’anti-France ! » s’insurge les uns, allergiques à la diversité, extracteurs de quintessence nationale, en mal d’identité. « Ce n’est pas la France ! » s’indignent les autres antiracistes sincères, haltérophiles endurcis… Bref, une France fantasmée contre une France idéalisée. Deux mythologies, deux croyances : la source et le creuset, l’identité et l’altérité, la France des villages et des clochers contre l’Europe des marchés…

La seconde devait présider aux commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale comme une victoire sur les nationalismes, mais la première s’est invitée sous les traits de la petite Angevine de onze ans et de sa funeste banane comme un retour du refoulé colonial qui est venu contaminer le récit de la Grande Guerre.

Les insultes racistes dont est victime Christiane Taubira sont le symptôme d’une fusion dangereuse de trois séries de phénomènes hétérogènes que la droite décomplexée (et son double, l’extrême droite complexée) ont réussi à ré-assembler dans une splendide illusion : l’impensé colonial de la France, la politique néolibérale répressive à l’égard des étrangers, et l’insouveraineté de l’État.

 

Le 11-Novembre, sur les Champs-Elysées 
Le 11-Novembre, sur les Champs-Elysées © (Elysée)

Depuis les manifestations contre la loi sur le mariage pour tous jusqu’à la jacquerie des bonnets rouges en Bretagne et les manifestations à venir contre la TVA ; des sifflets lors des cérémonies du 11-Novembre aux insultes racistes contre Christiane Taubira et aux coups de feu tirés contre Libération qui ont fait un blessé grave, c’est la même crise qui s’approfondit sous nos yeux ; non plus seulement l‘impopularité de tel ou tel homme politique, le discrédit de tel ou tel gouvernement, mais une crise de la souveraineté de l’État.  

L’instauration du quinquennat et l’inversion du calendrier électoral avaient contribué à brouiller durablement la répartition des pouvoirs entre les deux têtes de l’exécutif et exposé la fonction présidentielle à une télé présence de tous les instants, hyperprésence plutôt qu’hyperprésidence, qui a eu pour effet de banaliser la figure présidentielle et de décrédibiliser la parole publique sous le quinquennat précédent. Les mensonges d’un ministre du budget, responsable de la politique fiscale et garant de la justice des efforts demandés aux contribuables, ont achevé de décrédibiliser la parole publique. Comment éviter que le pouvoir de lever l’impôt, une des fonctions régaliennes de l’État, ne soit contesté après une telle faute.

Les manifestations qui se multiplient contre l’écotaxe et une nouvelle hausse de la TVA dépassent ainsi la simple défense d’intérêts catégoriels pour acquérir la signification d’une rupture du principe du consentement à l’impôt qui est la base de la souveraineté de l’État. Affaibli de l’intérieur par les affaires et la perte de crédit de la parole publique, l’État endetté est soumis de surcroît à la tutelle des marchés sur lesquels il emprunte et des agences de notation qui évaluent sa  crédibilité financière. La nouvelle dégradation de la note française par Standard & Poor's n’a fait que confirmer ce discrédit.

En abandonnant le pouvoir de battre monnaie et le contrôle de ses frontières, l’État n’a pas seulement concédé des abandons de souveraineté, il a asséché le terrain symbolique sur lequel s’édifie sa crédibilité. La souveraineté fuit de partout : par le haut, au bénéfice de la Commission européenne et des marchés ; par le bas, au bénéfice des régions, qui aujourd’hui se soulèvent contre l’État comme la Bretagne qui fut le terrain d’élection des socialistes et le terreau de la hollandie. Effet boomerang de l’insouveraineté…

Une idéologie, la xénophobie néolibérale

Comment s’étonner alors que l’autorité de l’État n’apparaisse plus que comme une fiction trompeuse qu’on s’efforce de crédibiliser à coups de menton sécuritaires et de politique répressive à l’égard des Roms, des exclus et des étrangers. C’est ce qui donne à la politique néolibérale son caractère nécessairement répressif. Non pas pour protéger une population apeurée, menacée par les vagues migratoires et l’explosion de l’insécurité, mais pour faire acte d’autorité et recharger un crédit qui se dissipe de tous côtés.

 

Des lycéens défilent à Paris le 17 octobre, contre l'expulsion d'élèves étrangers. 
Des lycéens défilent à Paris le 17 octobre, contre l'expulsion d'élèves étrangers. © Reuters

D’où ce visage de Janus des politiques ultralibérales, hostiles à toute régulation en matière économique et financière et animées d’une véritable passion de la réglementation quand il s’agit de la sécurité et de l’immigration. C’est qu’il s’agit moins de flatter l’instinct répressif des foules que de redessiner le champ d’un affrontement fictif en opposant une majorité silencieuse, dont les souffrances demeurent dans l’ombre, à des minorités assistés et hypervisibles qu’elles soient roms, étrangères, noires de peau.

Il ne faut pas chercher ailleurs l’inspiration de tous les discours de Grenoble, de Dakar et d’ailleurs, et leurs effets de légitimation du racisme et de la xénophobie ; il ne s’agit pas d’une dérive populiste mais d’une idéologie, que cette xénophobie néolibérale, un prisme déformant permettant de reconfigurer la société, en traçant une « frontière » entre les honnêtes contributeurs et les profiteurs du modèle social français, entre les insiders voués à s’intégrer et les outsiders qui n’ont vocation qu’à s’en aller. Cette construction fictive d’un ennemi (intérieur ou axe du mal) est la “masse de manœuvre” que l’État insouverain se donne pour manifester son pouvoir de police, dernier refuge régalien, dernier reflet de sa souveraineté perdue. C’est l’intrigue néolibérale qui nous maintient en haleine depuis trente ans.

Il y a donc une spirale périlleuse de l’insouveraineté où s’entraînent et s’enchaînent le refoulé raciste de l’histoire coloniale, la xénophobie néolibérale et l’impuissance politique à proposer des récits alternatifs. C’est là que ce qu’il faut bien appeler « l’affaire » Taubira prend tout son sens : pour paraphraser Lautréamont, elle réalise la rencontre fortuite de l’impensé colonial et du néolibéralisme sur la table de dissection de l’État impuissant.

 

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