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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 17:05

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/pascal-maillard

 

"La manip' pour tous"

Dans une chronique de ce jour, Hubert Huertas fait l'hypothèse d'un "pourrissement" de la "Manif pour tous" et d'une "démobilisation accompagnée de la radicalisation de petits groupes morcelés". Tout au contraire, j'estime que ce mouvement populaire, lié à "Jour de colère" et à bien d'autres branches de la fachosphère, constitue une lame de fond, puissante, durable, insidieuse. 

Un nouveau clérico-fascisme se développe en France, soluble dans le dieudonnisme, et qui se diffuse dans toutes les couches de la société, de la bonne bourgeoisie catholique aux classes sociales les plus défavorisées, prospérant particulièrement dans les quartiers pauvres des banlieues et se nourrissant de la misère matérielle et morale. Nous savons que c'est dans toute l'Europe que la peste brune reprend du poil de la bête, nourrie et renforcée par les politiques qui y sont conduites. La première cause du développement exponentiel des droites extrêmes est bien là!

Cela fait au moins un an que l'on peut observer comment ce milieu protéiforme se déploie sur la toile, emploie habilement les réseaux sociaux et noyaute les commentaires de tous les sites. Même Mediapart est envahi par plusieurs centaines d'abonnés hyperactifs et appartenant à cette fachosphère. L'efficacité de cette pieuvre sous-Marine repose sur un art consommé de la manipulation, qui s'est revélé redoutable à l'occasion du mouvement "Jour de colère" que les pouvoirs publics semblent bien impuissants à juguler. Le site Vigi-gender, d'un professionalisme exceptionnel, et une large campagne de "mailing" aux parents d'élèves, auront permis d'assoir durablement un travail de sape orienté vers l'Education nationale, la communauté enseignante et les recherches en sociologie. Les relais dieudonnesque et soraliens auront fait le reste. A cet égard, il est intéressant de lire l'entretien que Farida Belghoul a donné au site d'information franco-turc Zaman-France. Les commentaires sont éloquents, de même qu'une vidéo qu'on y trouve postée (ici sur Youtube).

Cette vidéo témoigne d'une attaque contre la sociologie à partir d'une conception strictement biologique et génétique de la sexualité. Une attaque délibérée contre tous les féminismes et les associations LGBT. Une attaque contre tous les homosexuels. Une attaque aussi contre l'Education nationale et les services publics. A écouter cette professeure de biologie, on a la conviction que ces très excellents manipulateurs voudraient nous faire retourner un siècle en arrière. N'aurait-elle pas peur de l'égalité entre les sexes? Ce qui est certain, c'est que cette campagne perverse est directement homophobe. Elle se développe avec des relais enseignants dans les écoles, les collèges, les lycées et les universités. Elle ment sciemment et va jusqu'à produire de faux documents. La plus grande vigilance s'impose de la maternelle à l'université.

Mais ce qu'il convient de souligner aussi, c'est que cette campagne a des soubassements antisémites. Peu semblent avoir aperçu que l'extrême-droite catholique fait cause commune avec les islamistes les plus radicaux, sur fond d'homophobie et d'antisémitisme. La supposée "théorie du genre" (elle n'existe pas, rappelons-le) serait, selon quelques dangereux idéologues, "le fruit de lesbiennes juives américaines". Où trouve-t-on cette thèse antisémite? Sur un site catholique (ici) et sur le site salafiste Al-Imane (c'est ). La même vidéo. La conférence de Claude Timmerman, un ingénieur qui se fait passer pour un scientifique alors qu'il ne professe que des insanités, circule sur les sites royalistes, catholiques intégristes, dieudonnistes, islamistes, de droite extrême, etc. Il est très facile de la retrouver. Les thèses de Timmerman et des catholiques anti-gender ont leur pendant dans les discours que tiennent aujourd'hui certains imams. Il faut entendre et analyser l'intégralité de ce prêche d'un imam toulousain. Il y a une urgence à saisir et alerter toutes les autorités religieuses, catholiques et musulmanes en priorité, afin qu'elles rappellent à leurs cadres religieux et à leur fidèles, le respect de l'Etat, les lois de la République et les règles du vivre ensemble.

Combattre l'extrême-droite est désormais inséparable d'une vigoureuse dénonciation de ces illuminés, catholiques intégristes ou réactionnaires, qui ont réussi à faire la jonction avec certains milieux  islamistes. Il y a un énorme travail d'analyse et d'explication à produire pour contrer leurs insinuations et leurs mensonges qui surfent sur l'homophobie ordinaire et visent à la renforcer. La contre-offensive face à ces extrémistes incultes mais bien organisés, doit être conduite dans tous les lieux où ils manipulent l'opinion et diffusent leur venin. C'est-à-dire partout, dans les lieux d'éducation et de culture, dans les établissements scolaires, publics et privés, dans les quartiers populaires surtout, où ils font des ravages. Et ici même, sur Mediapart, comme sur tous les sites où ils s'infiltrent et propèrent. 

Je profite de ce billet pour reproduire l'Appel de Strasbourg, déjà signé par une centaine d'universitaires, relayé par de nombreux journaux (ici, ou ), et qui sera mis à la pétition dans les jours qui viennent. Ce texte rétablit la vérité et gagnerait à être largement diffusé. Le combat pour l'égalité doit être conduit avec des outils d'information et d'explication efficaces, avec un souci de pédagogie, mais sans aucune concession pour les manipulateurs de tous poils. Il est temps de comprendre et de faire comprendre que "La manif pour tous", c'est "LA MANIP POUR TOUS"! Merci de faire passer le message.

Pascal Maillard

 

PS : Ce billet constitue la reprise de plusieurs commentaires publiés sur le fil de discussion de cette chronique de Hubert Huertas.

 

POUR EN FINIR AVEC LES IDÉES REÇUES.

LES ÉTUDES DE GENRE, LA RECHERCHE ET L’ÉDUCATION : LA BONNE RENCONTRE

Des enseignants et chercheurs de l’Université de Strasbourg réagissent.

Depuis quelques jours, les élèves et les parents d’élèves sont harcelés de mails et de SMS provenant d’associations extrémistes qui propagent la rumeur selon laquelle, parce que « le genre » est introduit dans les programmes scolaires, leurs enfants seraient en danger à l’école. Non seulement cette manœuvre de déstabilisation des parents est révoltante (les enfants ont été privés d’école) mais de plus cette rumeur est totalement mensongère.

NON, les enfants ne sont pas en danger. Non, il n’y aura pas de projection de films « sexuels » à l’école, et les garçons ne seront pas transformés en filles (et inversement). NON, la prétendue « théorie du genre » n’existe pas. Le genre est simplement un concept pour penser des réalités objectives. On n’est pas homme ou femme de la même manière au moyen-­âge et aujourd’hui. On n’est pas homme ou femme de la même manière en Afrique, en Asie, dans le monde arabe, en Suède, en France ou en Italie. On n’est pas homme ou femme de la même manière selon qu’on est cadre ou ouvrier. Le genre est un outil que les scientifiques utilisent pour penser et analyser ces différences.

OUI, les programmes scolaires invitent à réfléchir sur les stéréotypes de sexe, car l’école, le collège, le lycée sont le lieu où les enseignants promeuvent l’égalité et le respect mutuel, où les enfants apprennent le respect des différences (culturelle, sexuelle, religieuse).

OUI, l’école est le lieu où l’on permet à chacun, par les cours de français, d’histoire, de SVT, d’éducation civique, d’éducation physique, de réfléchir sur les conséquences néfastes des idées reçues et d’interroger certains préjugés, ceux qui ont fait que pendant des siècles un protestant ne se mariait pas avec une catholique, ceux qui font que l’on insulte encore aujourd’hui une ministre à cause de sa couleur de peau, ceux qui font que des petits garçons sont malmenés aux cris de « pédés » dans la cour de l’école, ceux qui font que Matteo n’osera jamais dire qu’il est élevé et aimé par deux mamans, ceux qui font qu’Alice veut mourir car on la traite de garçon manqué, ceux qui créent la haine et la discorde.

Les études de genre recouvrent un champ scientifique soutenu par le Ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur et le CNRS, et elles ont des utilités nombreuses dans l’éducation et la lutte contre les discriminations : ces études et ces travaux existent à l’université depuis longtemps. L’Académie de Strasbourg organise une journée de formation continue sur cette question, à destination des professeurs d’histoire géographie et, à l’Université de Strasbourg, un cours d’histoire des femmes et du genre est proposé dans la licence de Sciences historiques, tout comme, par exemple, plusieurs cours de sociologie, de sciences de l’éducation, d’anthropologie portent sur le genre. Des séances de sensibilisation aux questions d’égalité entre les sexes sont intégrées dans le parcours de formation des enseignants du primaire et du secondaire.

«Vati liest die Zeitung im Wohnzimmer. Mutti ist in der Küche.» (Papa lit le journal dans le salon, Maman est dans la cuisine). Voilà comment les petits Alsaciens apprenaient l’allemand, à travers les aventures de Rolf et Gisela, dans les années 1980.

Réfléchir sur le genre, c'est réfléchir sur les effets de ce type de messages. En permettant aux élèves de se demander pourquoi les princesses ne pourraient pas aussi sauver les princes, en montrant que, selon les lieux et les époques, les rôles des hommes et des femmes ont varié et que l’amour a des formes multiples, les chercheurs, les enseignants et les professeurs des écoles permettent aux enfants, citoyens et citoyennes de demain, de construire un monde plus égalitaire et plus harmonieux.

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/pascal-maillard

 


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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 16:31

 

 

Source : www.mediapart.fr

Lutte des classes de la Silicon Valley

|  Par Jérôme Hourdeaux

 

 

Depuis plusieurs mois, des manifestants s'attaquent aux bus affrétés par Google pour transporter ses salariés de leur domicile à leur lieu de travail. Ils dénoncent la gentrification de la baie de San Francisco.

Symbole de la réussite américaine de ces trois dernières décennies, berceau de la nouvelle économie, la baie de San Francisco est aujourd’hui le théâtre d’une lutte des classes opposant les habitants « historiques » aux géants de l’informatique, et leurs salariés, implantés dans la région.

Les bus affrétés par Google, Apple ou encore Yahoo ! pour conduire leurs salariés sur leur lieu de travail sont devenus le symbole de cette guerre sociale et la cible d’une véritable guérilla urbaine visant à dénoncer la gentrification de la région et l’éviction d’un nombre croissant d’habitants. Caillassages, crevaisons de pneus, actions de blocages, pressions sur les salariés… Ces derniers mois ont été marqués par une radicalisation des opposants à la Silicon Valley et par la violence croissante de leurs actions.

Un groupe se faisant appeler « The counterforce » a publié sur internet, mardi 21 janvier, les coordonnées personnelles d’un ingénieur travaillant sur le projet de voiture sans chauffeur de « Google X », le laboratoire secret de la société. Le lendemain, à 7 heures du matin, un groupe de manifestants s’est présenté au domicile du salarié, à Berkley, bloquant son allée avant de s’en prendre au bus de Google qui passait non loin. Et au mois de décembre, c’est à coups de pierres qu’un groupe de militants s’était attaqué à un autre véhicule du géant du web, brisant une vitre et traumatisant les salariés. Face à la multiplication de ces attaques, Google aurait même affecté des vigiles à la surveillance du transport de ses salariés.

 

Une photo prise par un salarié de Google lors de l'attaque à coups de pierres d'un bus 
Une photo prise par un salarié de Google lors de l'attaque à coups de pierres d'un bus © Twitter

Ces réseaux de transports privés qui se sont mis à irriguer la ville depuis le milieu des années 2000 sont aujourd’hui le symbole du processus de gentrification de San Francisco. Et leurs bus blancs aux vitres teintés, équipés de Wi-Fi et aux horaires tenus secrets pour des raisons de sécurité, celui de l’arrogance des géants de l’internet. « La plupart d’entre eux sont d’un blanc étincelant, avec des vitres teintées, comme les limousines et, certains jours, je pense à eux comme aux vaisseaux spatiaux dans lesquels nos maîtres extraterrestres ont atterri pour nous asservir », écrivait ainsi, en février 2013 l’écrivaine, et habitante de San Francisco, Rebecca Solnit, dans le London Review of Books.

Au-delà de cette guérilla, ces attaques de bus sont un des symptômes d’une crise sociale sans précédent que traverse San Francisco. Capitale américaine des mouvements alternatifs et de l’expérimentation, terre d’accueil durant la seconde moitié du XXe siècle des beatniks, hippies et autres contestataires, la ville a longtemps été connue pour sa qualité de vie, son ambiance, son ouverture d’esprit et son accessibilité. C’est d’ailleurs dans ce creuset que sont nés un bon nombre des multinationales de l’informatique, que ce soit dans un garage d’étudiant, comme Apple ou Microsoft, ou dans les bâtiments de l’université de Stanford dont sont issus quelques-uns des gourous du web, tels que le fondateur de Facebook Mark Zuckerberg.

Mais, depuis l’avènement de la nouvelle économie, les start-up des petits génies de l’informatique se sont muées en multinationales surpuissantes, et leurs fondateurs en multi-milliardaires. Les locaux dans lesquels Bill Gates ou Steve Jobs ont construit leurs premiers ordinateurs se sont transformés en gigantesques « campus », de véritables villes du futur à l’intérieur de la ville, au sein desquelles les salariés peuvent manger, faire leurs courses, porter leur linge au pressing, se faire coiffer… Le tout sans avoir besoin de quitter leur lieu de travail.

Dans ces villes privées, bourrées de services high-tech, travaillent plusieurs milliers de salariés dans des conditions particulièrement favorables. Chez Google, les salaires à six chiffres sont ainsi relativement courants et la société est connue pour sa politique sociale particulièrement généreuse, permettant de s’assurer de la fidélité de ses salariés. Le problème est que la formidable croissance qu’a connue la Silicon Valley depuis le début des années 2000 a dramatiquement remis en cause l’équilibre démographique et social qui faisait de San Francisco une ville à part.

Comme le raconte le journaliste George Packer dans un long reportage publié par le New Yorker, dans les années 1980 « on ne savait pas ce qu’était un dîner haut de gamme, tout comme le qualificatif haut de gamme lui-même. Les écoles publiques étaient excellentes et quasiment tout le monde les fréquentait ; les quelques enfants que je connaissais qui allaient dans une école privée avaient merdé quelque part. La vallée était complètement classe moyenne, égalitariste, agréable, et un peu ennuyeuse ». Aujourd’hui, dans la rue principale du centre-ville, University avenue, les magasins de sports et les cinémas d’art et d’essais ont laissé la place aux sièges sociaux de Paypal, Facebook et Google. « Une maison moyenne à Palto Alto se vend à plus de deux millions de dollars », poursuit George Packer. « Le parking du centre commercial Stanford est une mer de Lexus et d’Audi, et leurs propriétaires font leurs achats à Burberry et Louis Vuitton. Il y a environ 50 milliardaires et des dizaines de centaines de millionnaires dans la Silicon Valley. »

« Un des endroits les plus inégaux d’Amérique »

« Si les sociétés créées par les anciens de Stanford fondaient une nation indépendante, il s’agirait de la dixième économie mondiale », soulignait de son côté Rebecca Solnit. Dans son texte, l’écrivaine expliquait avoir récemment vendu son appartement qu’elle occupait depuis des années, convaincue de pouvoir en retrouver un rapidement. À tort. « La compétition pour n’importe quel appartement à San Francisco est si intense que vous devez répondre aux annonces (…) dans les heures qui suivent leur mise en ligne pour recevoir une réponse du propriétaire ou de l’agence », raconte-t-elle. « Les annonces à la fois pour les locations et les ventes mentionnent souvent la proximité d’un arrêt de bus de Google ou d’Apple. »

En 2012, les prix des locations dans la région de San Francisco ont augmenté entre 10 % et 135 % en fonction des quartiers. Conséquence de cette explosion, nombre de propriétaires n’hésitent plus à expulser, souvent au mépris de la loi, leurs locataires trop anciens pour remettre sur le marché leurs biens et ainsi appliquer des loyers plus élevés, comme le dénoncent les associations Heart of the City ou Eviction Free San Francisco. Ainsi, raconte Rebecca Solnit, Larry Ellison, propriétaire d’Oracle et sixième fortune mondiale, a obtenu de la ville la concession pour 75 ans de trois jetées en échange de leur réparation et de leur entretien, et de l’expulsion d’une douzaine de petits commerces qui y étaient installés.

Autre victime de ce creusement des inégalités, le système éducatif connaît depuis quelques années un phénomène de privatisation particulièrement inquiétant. Dans les zones où sont installés les salariés des grandes entreprises du net, les parents ont en effet souvent créé des « fondations » privées destinées à financer les études de leurs enfants, alors que les écoles restées publiques ont, elles, de moins en moins de moyens.

« Il y a aussi un nombre record de personnes pauvres », explique Rebecca Solnit, « et les deux dernières années ont vu une hausse de 20 % du nombre de sans-abri, en grande partie à cause de l’augmentation du coût de l’immobilier. Après des décennies durant lesquelles tout le pays est devenu de moins en moins égal, la Silicon Valley est devenue un des endroits les plus inégaux d’Amérique. »

Baignant, eux aussi, dans les nouvelles technologies, les opposants à la Silicon Valley ne se limitent pas aux actions coups de poing sur le terrain. Plusieurs d’entre eux ont mis en ligne des sites internet et des cartes interactives permettant de juger de l’influence de ces lignes de bus sur le tissu social. Et toutes, comme celles de Chris Walker, d’Eric Rodenberg ou du site Anti-Eviction Mapping Project, montrent effectivement une explosion des prix des propriétés ou encore du nombre de cafés et restaurants.

 

La carte réalisée par Chris Walker 

Les autorités locales, et les entreprises visées peinent à juguler la colère des habitants et réagissent, jusqu’à présent, d’une manière assez maladroite. Le 20 janvier, le site Techcrunch a révélé un document interne envoyé aux salariés de Google, leur expliquant quels arguments opposer aux protestataires et à la presse. « Je suis tellement fier de vivre à San Francisco et de faire partie de cette communauté » ; « Je soutiens régulièrement les petites entreprises locales de mon quartier » ou encore « Les bus nous permettent mes collègues et moi de réduire nos émissions de carbone »

De son côté, la municipalité a récemment proposé d’imposer une taxe aux grandes entreprises pour l’utilisation des arrêts de bus, d’un montant de 1 dollar par jour par arrêt. Une solution qui coûterait en moyenne 100 000 dollars par an par société, et rapporterait environ 1,5 million de dollars à la ville.

Le blogueur, entrepreneur et « gourou du web » Anil Dash a proposé, lui, une solution impliquant les salariés de Google. « Tout d’abord, les gens travaillant dans la technologie devraient utiliser leur voix pour faire pression sur les patrons de leur société et sur l’industrie pour qu’ils fassent les bons choix. » Il propose une série de mesures concrètes. Par exemple, « les employés qui prennent les bus pourraient installer un simple panneau à l’arrêt : "X des 300 personnes qui prennent cette navette chaque jour ont promis de se porter volontaire une fois par mois dans un refuge ou centre, de supporter les droits du travail lorsqu’ils votent ou font leurs courses". » « À un niveau plus structurel », Anil Dash propose de s’attaquer au fond du problème, à savoir la rupture totale entre ces nouveaux habitants de San Francisco vivant en autarcie dans les campus, coupés du reste de l’économie locale, et le reste de la population. Pour cela, « les start-up qui fournissent des services luxueux sur leur site », comme des repas, des soins ou encore des services de santé, pourraient étendre ces services aux personnes habitant dans le voisinage. « Le bénéfice ? Vous pouvez rencontrer les "vraies gens" de votre quartier. »

 

 

Source : www.mediapart.fr

 


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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 16:25

 

Source : www.mediapart.fr

 

Le «devoir de vigilance» des multinationales risque d'être enterré

|  Par Lénaïg Bredoux et Mathieu Magnaudeix

 

 

 

Un an après le drame du Rana Plaza au Bangladesh, l’Assemblée se penche sur le projet de loi sur le développement. Un texte que certains députés aimeraient muscler pour renforcer la responsabilité des grands groupes. Bercy s'y oppose.

François Hollande s’y était engagé en mars 2013. L’Assemblée va examiner à partir du 10 février le projet de loi « d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale ». « Une première », souligne le ministre chargé du développement, l’écologiste Pascal Canfin. À raison, tant ce budget est historiquement marqué par l’opacité, l’absence de contrôle du Parlement et le spectre de la Françafrique. Au programme, l’affirmation de grands principes, comme le souci du « développement durable », l’évaluation des actions menées ou un cadre juridique plus clair pour les collectivités locales.

Cette loi pétrie de bonnes intentions est plutôt consensuelle. Mais une grande partie des députés de gauche aimeraient la muscler pour créer un cadre plus contraignant pour les multinationales. Un débat feutré fait ainsi rage au sujet de l’article 5, entre d’un côté des parlementaires, soutenus par Pascal Canfin, qui savent que leur marge de manœuvre depuis le début du quinquennat est quasi nulle, et Bercy dont les orientations pro-business ont le vent en poupe à l’Élysée.

Pour l’instant, cet article 5, un « article minimal », selon Canfin, tient en une phrase : « La politique de développement et de solidarité internationale prend en compte l’exigence de la responsabilité sociale et environnementale. » Une déclaration de principes qui n’a franchement rien de révolutionnaire. Mais plusieurs députés socialistes et écologistes ont déposé des amendements pour rendre responsables les grandes entreprises, qui investissent dans les pays en développement, des mauvaises conditions de travail ou des dégâts à l'environnement causés par leurs filiales ou leurs sous-traitants.

Cette vieille revendication des ONG et du mouvement altermondialiste fait directement écho au drame du Rana Plaza, cet immeuble de Dacca, capitale du Bangladesh, qui s’était écroulé le 24 avril 2013. Plus d’un millier de travailleurs du textile y ont trouvé la mort, avec, dans les décombres, des étiquettes de lignes de prêt-à-porter de grandes marques, notamment françaises (Camaïeu, Carrefour, Auchan).

 

Un sauveteur cherche des survivants dans les décombres du Rana Plaza, le 30 avril 2013. 
Un sauveteur cherche des survivants dans les décombres du Rana Plaza, le 30 avril 2013. © Reuters

L’émotion avait été si vive que de nombreuses initiatives avaient été lancées, y compris à l’Assemblée. Bruno Le Roux, le président du groupe socialiste, un proche de François Hollande, avait même déposé une proposition de loi en novembre 2013. Signée par des socialistes de toutes obédiences et votée par le groupe, elle prévoit « d’instaurer une obligation de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre à l’égard de leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs ». Et aussi très clairement de sanctionner celles qui ne jouent pas le jeu : « Il s’agit de responsabiliser ainsi les sociétés transnationales afin d’empêcher la survenance de drames en France et à l’étranger et d’obtenir des réparations pour les victimes en cas de dommages portant atteinte aux droits humains et à l’environnement. »

Des dispositions similaires existent déjà au Royaume-Uni, en Italie, en Suisse, en Espagne, au Canada et aux États-Unis. « Ces différents exemples prouvent qu’une telle législation n’entrave pas le dynamisme de l’économie », professe la proposition de loi. Récemment, les groupes écologistes, radicaux et communistes l’ont reprise à leur compte. Une unité plutôt rare à gauche.

Le texte a aussi le soutien d’ONG comme Oxfam, le CCFD ou Sherpa, réunies dans un « Forum citoyen pour la RSE » (RSE pour responsabilité sociale des entreprises), qui a contribué à sa rédaction. « Le drame du Rana Plaza a évidemment permis une plus grande sensibilisation », raconte Dominique Potier, député PS qui était engagé sur ces questions avant son élection à l’Assemblée en juin 2012.

« Les entreprises s’établissent pour des motifs d’évasion fiscale dans des pays où il est très difficile de contrôler le respect des normes sociales et environnementales, comme des conditions de travail pratiquées. Il est important de disposer d’outils permettant de contrôler sur place les sous-traitants, qui sont l’arrière-boutique de belles vitrines à Paris, Tokyo ou Londres », insiste Noël Mamère. Le député apparenté EELV cite par exemple les pratiques du groupe minier Areva au Niger, détenu par l’État à 87 %, « où l’accès à l’électricité est réduit alors qu’une ampoule sur trois en France dépend de l’uranium du Niger ».

Mais si Canfin n’a pas pu l’écrire dans sa loi, c’est que, malgré le soutien discret de plusieurs collègues, il est bien seul au gouvernement à défendre ce « devoir de vigilance » des multinationales. La semaine dernière, devant la commission des affaires étrangères de l’Assemblée, le ministre écologiste a clairement encouragé les députés à amender le texte : « C’est, je pense, le bon timing pour progresser sur les questions de responsabilité sociale et environnementale des entreprises. La présente loi est le bon objet politique pour affirmer une plus grande responsabilité des entreprises françaises quant à leurs pratiques et à celles de leurs sous-traitants. » « En parallèle de la mondialisation économique et financière, il faut mondialiser le droit et la responsabilité des multinationales », explique-t-il à Mediapart, tout en refusant de se prononcer sur les amendements déposés par les députés.

Et pour cause : ils suscitent l’opposition vive de Bercy et de la ministre du commerce extérieur, Nicole Bricq. Chargée de relancer les exportations et de rééquilibrer la balance commerciale française, elle est encouragée par Matignon et l’Élysée, convaincus que, sans le soutien des entreprises, la courbe du chômage ne s’inversera pas.

Une réunion interministérielle doit trancher lundi

« On est en train de mener une vraie bataille culturelle, estime le député PS Dominique Potier. Le gouvernement n’est pas si hostile à l’idée mais il subit un vrai barrage de l’AFEP » – l’Association des entreprises privées, qui regroupe les plus grandes entreprises. « Une grande partie du gouvernement n’est pas convaincue, reconnaît aussi l’écologiste Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes à l’Assemblée. On nous dit que la compétitivité de nos entreprises en pâtirait. Mais je ne comprends pas : il s’agit ni plus ni moins que de mener au niveau international la bataille que la France vient de mener, avec quelque succès, sur les travailleurs détachés. » Début décembre, la France avait arraché à Bruxelles un accord sur la directive détachement et réussi à faire adopter le principe de la « responsabilité solidaire », qui permet de rendre responsable le donneur d'ordre pour la cascade de sous-traitants.

« Il y a un blocage énorme, farouche au niveau du gouvernement, au sommet de l’État. L’Élysée et Matignon ne souhaitent pas que le devoir de vigilance apparaisse dans la loi car le grand patronat, à commencer par les entreprises du CAC 40 qui alignent les profits records, y est opposé. Pourquoi François Hollande écoute-t-il davantage les patrons que les parlementaires ? Cela pose un sérieux problème démocratique », tempête Antonio Manganella, du Comité catholique contre la faim et pour le développement-Terre Solidaire (CCFD).

À Bercy, on assume. Nicole Bricq l’a clairement signifié aux parlementaires mobilisés sur le dossier qu’elle a reçus. « On n’est pas dans un monde de bisounours. Il faut aussi que les entreprises puissent s’y retrouver », explique-t-on à son cabinet. Si la France adopte des dispositions trop contraignantes, ses entreprises risquent de perdre des contrats ; il faut donc trouver d’autres mesures moins pénalisantes : tel est, en résumé, le raisonnement de Bercy. « On a d’autres moyens pour que la RSE progresse à l’international », insiste l’entourage de Bricq.

 

Manifestation au Cambodge de l'opposition et des salariés du textile, le 30 décembre 2013 
Manifestation au Cambodge de l'opposition et des salariés du textile, le 30 décembre 2013 © Reuters

Depuis le Rana Plaza, la ministre a diffusé un guide de bonnes pratiques et écrit à la Banque mondiale pour modifier les critères d’appel d’offres. Elle veut surtout sortir des limbes un organisme au nom barbare, le PCN (pour point de contact national-OCDE), dont personne ou presque ne connaît l’existence et qui, sur saisine, émet des avis sur des entreprises ne respectant pas les principes directeurs de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Son activité, présentée sur le site de l’administration du Trésor dont il dépend, est quasi nulle même s’il a recommencé à publier des avis après un arrêt total de sept ans, de 2005 à 2012 ! Et même lorsqu'il se met au travail, le PCN a tendance à donner raison aux grandes entreprises, contre les ONG ou les syndicats, comme l'illustre le cas de l'implantation de Michelin en Inde, dont Mediapart parlait ici.

Rien n’est encore arbitré mais le ministère envisage d’en changer le nom, de le rendre indépendant de Bercy et d’en faire un « médiateur du commerce international ». Avec l’idée qu’un avis médiatisé vilipendant les pratiques de tel ou tel groupe est plus efficace pour des multinationales très sensibles à leur image que des sanctions financières.

« De l’eau tiède », balaie d’un revers de main un des élus en pointe sur le dossier. Une ultime réunion interministérielle prévue lundi tranchera définitivement. Mais à Bercy, la cause semble entendue : « Notre position n’est pas seulement celle de la ministre mais du gouvernement ! » dit-on chez Nicole Bricq. Canfin et les députés de gauche savent qu’ils n’obtiendront pas de sanctionner financièrement les grands groupes français qui dérogeraient aux principes de l’OCDE. Mais ils espèrent obtenir un engagement, même a minima, d’introduire le principe d’une responsabilité des multinationales vis-à-vis de leurs sous-traitants et de leurs filiales.

« Les sanctions pénales, si ça passe, je débouche le champagne ! s’amuse l’écologiste Danielle Auroi. Mais si déjà on fait rentrer dans la loi l’idée qu’il faut respecter les règles de l’OCDE, ce sera un grand pas. » Son collègue socialiste Dominique Potier acquiesce : « Il faut désormais espérer que la mobilisation dans les prochains mois pourra porter ses fruits. Et que, comme cela s’est passé avec les paradis fiscaux, la prise de conscience se fasse, par étapes. »

 

 

Lire aussi

 

 

 

Source : www.mediapart.fr

 

 

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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 16:19

 

Source : corporateeurope.org/fr

 

Pour en finir avec les mythes de transparence autour des négociations commerciales UE-US

 

January 2nd 2014
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(Traduction de notre article anglais de 25 Septembre)

 

 

Le 7 Octobre, la deuxième étape des négociations pour un accord commercial transatlantique, d’une portée considérable, commencera à Bruxelles. Au milieu des appels à une plus grande ouverture et une plus grande participation du public, la Commission Européenne a initié une offensive de propagande en diffusant des messages sur sa transparence et son comportement responsable au sein des discussions en cours. Ce guide de Corporate Europe Observatory vous permettra d'y voir à travers cette réthorique rassurante et de comprendre le secret observé autour de ces négociations, l’influence des grandes entreprises sur leur déroulement et le manque de responsabilité vis-à-vis de l'électorat de ses acteurs principaux.

 

 

Depuis de nombreuses années, des groupes défendant l’intérêt public ont critiqué les politiques commerciales de l’Union Européenne pour leur manque de transparence, leur sévère déficit démocratique et leur parti pris rampant en faveur des grandes entreprises (Voir par exemple ici, ici et ici). Le Parlement européen a rejeté l’infâme Anti-Counterfeiting Trade Agreement (ACTA), les membres du Parlement européen arguant pour de bonnes raisons qu’une loi négociée en secret est habituellement une mauvaise loi. Ces mêmes parlementaires appellent aujourd'hui à plus d’ouverture dans les négociations du projetde Partenariat transatlantique pour le commerce et l'investissement (TTIP). Et les militants des libertés numériques ont averti la Commission européenne que le secret « pourrait tuer le TTIP aussi sûrement qu’il a tué l’ACTA ».

En réponse, la Commission a lancé une offensive de relations publiques. Dans une série de Questions Réponses, de documents préparatoires, portant sur la transparence dans les négociations commerciales dans l’UE, et de notes expliquant pourquoi le TTIP n’est pas l’ACTA, la Direction du commerce de la Commission (DG Commerce) se dépeint comme un modèle de transparence. « Il y a plus d’intérêt pour cet accord potentiel que pour aucun autre auparavant » disent-ils, «  nous réalisons que ceci nécessite de nouvelles initiatives pour éclairer davantage ce qui se déroule pendant les négociations. »

Cependant, ces « nouvelles initiatives » opacifient davantage qu'elles n'éclairent les évènements. Voici, un mythe après l'autre, quelques précisions sur ce que signifient réellement ces discours d'ouverture et de responsabilité à la DG Commerce.

Mythe 1 : L’Union Européenne est très ouverte à la prise en compte d'une grande diversité de points de vue lors de la préparation des négociations commerciales

Réalité : L’Union Européenne est très ouverte aux intérêts des grandes entreprises dans la préparation des négociations commerciales.

Dans sa fiche d’information sur la transparence, la Commission affirme que «  les points de vue de la société civile jouent un rôle crucial «  dans les négociations de l’Union Européenne sur le commerce et qu’elle «  s’appuie sur les informations reçues du public avant que les négociations ne commencent », et qui «  reflètent un très large éventail de vues ».

Mais pendant ce temps, un document interne à la Commission, obtenu grâce aux règles d’accès à l’information de l’UE montre que, pour préparer les négociations sur le commerce transatlantique, la Direction générale du Commerce (DG trade) avait eu au moins 119 réunions avec les grandes entreprises et leurs lobbies – contre une poignée avec les syndicats et les associations de consommateurs (voir notre version des faits sur cette question.)

Les contributions aux consultations en ligne de l’UE, également, proviennent presque uniquement des multinationales et des représentants de l’industrie. Ce qui n’est pas très étonnant au vu du questionnaire : comment un citoyen lambda pourrait-il répondre à une question comme : «  Si les obstacles aux investissements vous préoccupent, quels sont les coûts additionnels pour votre entreprise (en pourcentage d’investissement) provenant de ces obstacles ? »

Les négociations commerciales précédentes suggèrent que nous aurons bientôt davantage de preuves de l’accès privilégié aux négociateurs de l'industrie et de l’influence excessive de celle-ci dans les discussions entre la DG Commerce et les USA (voir notre rapport Trade Invaders sur les négociations UE-Inde).

Un rapport interne fuité, consulté par Corporate Europe Observatory, suggère déjà que la Commission est en rapport étroit avec les associations industrielles « compétentes » - et personne d’autre - « pour se faire une idée de la qualité offensive de leurs intérêts » sur des questions comme la libéralisation des services. On voit bien quels points de vue comptent vraiment.

Mythe 2 : La Commission fournit les informations les plus complètes possibles

Réalité : La Commission dissimule au public la plupart des informations sur les propositions d’accords commerciaux.

La Commission se prétend « engagée à fournir autant d’informations que possible » au public à propos des négociations en cours. Elle a même fait « un pas sans précédent en rendant disponible au public un certain nombre de documents sur les positions initiales de l’Union Européenne », présentées aux USA lors de la première étape des négociations à Washington en Juillet.

Il est bien sûr encourageant que la Commission ait commencé à publier ses positions dans les négociations commerciales. Ces publications sont cependant très peu nombreuses. D'après des rapports internes fuités et analysés par Corporate Europe Observatory portant sur la première étape des négociations, de nombreux autres points que ceux à propos desquels la Commission a publiés des documents ont été discutés à Washington, allant de la libéralisation des services à la question brûlante des mécanismes de règlements des différends investisseur-état. Sur plusieurs de ces points, la Commission met sur la table de négociation des documents qui ne peuvent être trouvés sur son site web. Le public lui aussi n’a-t-il pas le droit d'être informé de ces questions ? Que cache la Commission ?

Une lettre adressée par le négociateur principal de l’UE aux USA montre que la Commission entend cacher au public la plupart des informations relatives aux propositions d’accords commerciaux. «  Tous les documents concernant les négociations ou le développement du TTIP, y compris les textes des négociations, les propositions faites des deux côtés, le matériel explicatif joint, les emails échangés et les autres informations échangées dans le contexte des négociations ( …) seront gardés confidentiels » et plus loin «  La Commission peut décider de rendre publics certains documents qui refléteront exclusivement la position de l’UE » (nous soulignons).

« Si le texte n'est pas publiquement disponible, il est presque impossible de fournir un retour approprié pour ces propositions mêmes celles qui affecteront le plus la vie publique »(…) l’élaboration précise des dispositions, les références à d’autres documents, actes juridiques internationaux ou renvois tout au long du texte sont d’une importance vitale pour comprendre pleinement l’impact des accords dans leur totalité »

Knowledge Ecology International dans leur contribution à la consultation US sur le TTIP

Ce qui est en revanche nécessaire, c’est la mise à disposition immédiate du public de tous les documents proposés et des textes des négociations – qui, par définition ne seront plus secrets. Encore plus que pour les accords commerciaux précédents, l’accord UE-USA peut avoir un impact sur la vie de millions de personnes, de même que sur l’avenir de notre démocratie. Il nécessite donc un examen public minutieux ainsi qu'une évaluation approfondie - tout comme n’importe quelle loi européenne est publiée sous différentes formes avant d’être discutée puis adoptée.

Mythe 3 : Un certain niveau de secret est nécessaire pour conclure avec succès des négociations commerciales

Réalité : La proposition d’accord commercial UE-USA est dissimulée au public car si celui-ci comprenait ses impacts potentiels, ceci pourrait conduire à une opposition généralisée à ces négociations.

Le « Guide pour la transparence » dans la politique commerciale de la Commission Européenne dit : «  Pour que des négociations commerciales fonctionnent et réussissent, un certain niveau de confidentialité est nécessaire, sinon ce serait comme montrer ses propres cartes à l’autre joueur dans un jeu » et plus loin « c’est entièrement normal dans des négociations commerciales » que les pourparlers eux-mêmes et les textes discutés soient secrets « pour protéger les intérêts de l’UE » et pour garantir un « climat de confiance » afin que les négociateurs puissent « travailler ensemble pour obtenir le meilleur accord possible ».

Il existe cependant des négociations (commerciales) internationales où le secret n’est pas « entièrement normal ». Au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce par exemple, les membres (Européens inclus) publient leurs positions de négociations. Il en va de même aux Nations Unies dans les négociations globales sur le climat où les parties (Européens inclus à nouveau) ne semblent pas considérer l’opacité comme une précondition à des accords fructueux.

Même certains négociateurs commerciaux sont en désaccord avec les positions de la Commission sur le secret, Robert Zoellick, à propos du manque de transparence dans les négociations dit «Franchement, ça me surprend toujours » ; selon lui, les textes d’ébauches des propositions sont vus par des centaines de personnes de toute façon - des officiels du gouvernement, conseillers et lobbyistes. Pourquoi donc ne pas simplement mettre l’information en ligne ? » (Voir à partir de la minute 36.24 de la vidéo d’un événement public aux USA le 19 Juin).

Donc, sur quoi porte vraiment ce secret ? Il s’agit surtout de cacher un accord au public qui, si ses impacts potentiels étaient mieux compris, pourrait conduire à une opposition généralisée – parce qu’il pourrait mettre en danger l’innocuité de notre nourriture, notre santé, nos emplois et notre environnement, la stabilité des marchés financiers et les droits numériques. Et qu’il consiste à sécuriser « le meilleur accord possible » pour les multinationales, pas pour les peuples européens ou américains.

Mythe 4 : Les négociations sont encadrées par des études d’impact indépendantes

Réalité : Ces études soi-disant indépendantes ont en fait été rédigées par la Commission elle-même ainsi que par des think-tanks financés par des entreprises directement intéressées par les négociations commerciales proposées par l’UE et les US.

À chaque fois que l’UE s’engage dans des négociations commerciales, son « guide de la transparence » affirme qu’elle « délègue à une étude indépendante le pouvoir d’analyser les impacts économiques, sociaux et environnementaux de tout accord » dont le résultat alimente les négociations. La figure clef de l’étude d’impact – en fonction de laquelle un ménage européen moyen gagnerait 545 Euros supplémentaires par an – est partout dans la propagande pour le TTIP de la Commission.

Regardons de plus près cette étude « indépendante ». Elle est écrite par la Commission elle-même, avec la DG Commerce dans un rôle dominant. Ainsi, la même institution qui conduit les négociations et que des universitaires ont décrite comme un groupe de « fonctionnaires généralement carriéristes et orientés vers le libre-échange » nous vient avec une « étude » défendant son programme et se disant maintenant « indépendante ». Logiquement, le Parlement européen a déjà pointé un nombre de défauts méthodologiques dans cette étude d'impact et exige d’apporter sa propre analyse.

L’interprétation de l’analyse de la Commission sur laquelle l’étude d’impact est basée – et d'où l’affirmation d’un gain de 545 euros par famille est issue – a aussi été critiquée. Dans cet article révélateur, Clive George, Professeur au Collège de l’Europe à Bruges, qui a mené des études d'impact commerciaux pour la Commission Européenne par le passé, écrit « de tous les scénarios examinés dans cette étude, le plus optimiste produit une augmentation largement médiatisée de 120 milliards (pour l’économie européenne). Ce qui correspond à seulement 0,5 % du PIB de l’UE. Ceci ne se produira pas immédiatement et ne représentera pas une hausse de la croissance annuelle de 0.5 %[…]. Les études de la Commission Européenne estiment que cela prendra dix ans pour que l’accord atteigne son plein effet, période pendant laquelle la croissance économique ne sera pas de 0.5% mais de 0.05 % pendant seulement dix ans. À plus forte raison, il s’agit du plus optimiste des scénarios (ou des suppositions) quant à ce qui pourrait être atteint dans les négociations. Dans ses scénarios plus réalistes, l’étude estime à un peu plus de 0.1% l’augmentation du PIB, c’est-à-dire une augmentation du taux de croissance de 0.01% sur une période de dix ans. C’est insignifiant et la Communauté Européenne le sait. » Georges conclut : «  Les accords commerciaux UE.US vont n’offrir au mieux qu’un bénéfice minimum ».

« Les crimes commis sous couvert d'économétrie ont autant à voir avec la science que les prévisions météorologiques avec les abats de poulets javellisés. »

Le journaliste Jens Berger dans l’une des nombreuses études montrant les bénéfices du TTIP

L’étude originale, déboulonnée par le Professeur George, était un rapport «  indépendant » du Centre de Recherches pour la Politique Economique (CEPR) situé à Londres. Le CEPR est financé par quelques-unes des plus grandes banques qui se positionnent pour bénéficier du projet d’accord commercial – dont la Deutsche Bank, la BNP Paribas, Citigroup, Santander, Barclays et JPMorgan. Ces firmes paient entre 600 et 20.000 euros par an pour financer ce think tank, qui, selon son site web, offre à son tour à ses généreux membres ( « dont le succès dans les affaires dépend de la présence en première ligne dans les processus de formulation de la politique économique européenne ») une influence active sur les recherches du CEPR et les orientations politiques.

Voilà pour l' « indépendance » des études d'impact.

Mythe 5 : La Commission négocie au nom de toute l’Union Européenne

Réalité : La Commission négocie en son propre nom et au nom des entreprises multinationales mais certainement pas au nom de l’Union Européenne et encore moins de ses peuples.

Selon le guide de la transparence de la Commission, celle-ci négocie les accords de commerce « en accord avec les instructions reçues par les États Membres ». Pendant les négociations, prétend-elle, elle « reste totalement redevable à la société civile européenne, aux États membres et au Parlement Européen qui exerce le contrôle démocratique. »

En fait, l’équilibre du pouvoir entre la Commission et les États membres de l’UE penche lourdement vers la Commission. Elle a une plus grande capacité, l’expertise technique et l’initiative de préparer les textes des négociations. Les États membres ont besoin de s'allier entre eux pour changer de façon significative les propositions de la Commission. Il est aussi rapporté que la Commission utilise toutes sortes d’astuces pour contourner les objections des États Membres. Quand ces derniers furent confrontés aux textes des négociations avec le Canada qui avaient fuité, par exemple, des sources d’un État membre ont admis qu’elles n’avaient jamais vu les textes et que la Commission était allée bien au-delà de son mandat de négociation.

D’une façon similaire, beaucoup de membres du Parlement Européen n’ont pas la capacité d’analyser correctement des piles de dossiers hautement techniques liés à l’agenda d'expansion commerciale de l'UE. Selon une source au Parlement, les membres du Parlement Européen faisant partie du Comité pour le Commerce International (INTA) reçoivent entre 500 et 1000 pages par semaine. Le résultat, selon cette même source, est une « ouverture de façade où vous recevez des milliers de pages mais où vous ne savez pas ce qui se passe ».

«  La politique commerciale de l’Europe (…est) dirigée par un comité de technocrates non élus qui croient aux bienfaits de la libéralisation et qui sont largement isolés des tensions et des pressions politiques. »

Richard Baldwin, Professeur d’économie international Geneva Graduate Institute

Voici à quoi ressemble la démocratie

Pour une vision plus démocratique de la politique commerciale de l’Europe, nous vous suggérons de vous rendre sur l'Alternative Trade Mandate Alliance, une alliance d’actuellement 50 organisations de la société civile (dont Corporate Europe Observatory). Nous développons une vision alternative de la politique commerciale, qui place les individus et la planète avant les multinationales.

Le cœur de cette vision est la revendication d’un contrôle démocratique sur la politique commerciale de l’UE (voir l’article : Est-ce ce à quoi la démocratie ressemble ?) Les principes guidant l’alliance devraient aller de soi dans n’importe quelle démocratie : transparence et ouverture plutôt que secret,  décisions politiques prises par le Parlement élu au lieu de bureaucrates non élus et investissement des citoyens à la place de la mainmise politique par les lobbies des multinationales.

Mettant ces principes en pratique, l’alliance a publié en ligne un avant-projet de cette vision - pour rassembler les commentaires afin « d’améliorer le Mandat du Commerce Alternatif et d’en faire un authentique mandat populaire ». Les derniers commentaires sont attendus pour le 4 Octobre. Sur la base de la version finale de ce texte, le « Alternative Trade Mandate Alliance » a l’intention de mobiliser le public partout en Europe afin de transformer la politique commerciale de l’UE. Un de ses principaux objectifs est de transformer les négociations se déroulant entre l’UE et les USA en un enjeu pour les élections européennes de 2014.

L' accord UE-USA en discussion cède plus de pouvoir aux multinationales et mine encore davantage notre démocratie. En finir avec les mythes le concernant et révéler la vérité à propos de cet accord secret est un pas important vers une reprise en main par les peuples du processus démocratique. Pendant combien de temps encore le public acceptera-t-il de se laisser abuser par la propagande de la Commission ?

 

Traduction : Elisabeth Guerrier

 

Source : corporateeurope.org/fr

 

 


 

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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 16:17

 

Source : www.bastamag.net

 

 

Evolution

Bienvenue dans une nouvelle ère géologique, déterminée par les humains pour le meilleur et pour le pire : l’Anthropocène

par Sophie Chapelle 3 février 2014

 

 

 

 

 

La civilisation industrielle a franchi une nouvelle étape. Selon de nombreux scientifiques, elle s’est élevée au rang de force géologique capable de décider de l’avenir de la Terre. Notre empreinte sur l’environnement est telle que ses impacts se font déjà ressentir : hausse de la température du globe, « sixième extinction » des espèces, acidification des océans… Nous entrerions ainsi dans l’Anthropocène, « le nouvel âge des humains ». Loin d’être inéluctables, ces impacts sont déterminés par des choix politiques, économiques et idéologiques pris par une petite partie de l’espèce humaine. Comment l’Humanité peut-elle reprendre collectivement la main sur son destin ? Analyse.

« Nous ne sommes plus dans l’Holocène mais dans l’Anthropocène ! », lance le prix Nobel de chimie Paul Crutzen devant un parterre de scientifiques [1]. C’était il y a 14 ans. Depuis, de plus en plus de scientifiques commencent à penser que nous avons changé d’époque géologique. De quoi s’agit-il ? L’histoire de la Terre est subdivisée en époques géologiques de plusieurs milliers à quelques millions d’années [2], chacune marquée par un évènement biologique, climatique ou sismique dont le sol, puis les couches sédimentaires, garderont la trace indélébile. Le Jurassique supérieur a ainsi vu l’apparition des premiers oiseaux, quand, 70 millions d’années plus tard, la fin du Crétacé entérinait la disparition des dinosaures. Nous vivons actuellement dans l’Holocène, commencée il y a 11 500 ans avec l’émergence de l’agriculture et la sédentarisation de l’être humain.

Or, ces mêmes humains, nous, sont aujourd’hui devenus une force géologique, influençant la faune, la flore ou le climat de la même manière que pourraient le faire les courants telluriques faisant dériver les continents. « L’empreinte humaine sur l’environnement est devenue si vaste et intense qu’elle rivalise avec certaines des grandes forces de la Nature, en termes d’impacts sur le système Terre », explique Paul Crutzen [3]. L’avènement de cette puissante empreinte marquerait donc la fin de l’Holocène et le début de l’Anthropocène. Un nom issu du grec ancien anthropos, qui signifie « être humain », et kainos pour « récent, nouveau ». Un groupe de travail de l’Union internationale des sciences géologiques prépare un rapport pour savoir si cette nouvelle époque géologique doit être officialisée dans le tableau de l’échelle des temps géologiques. Il sera rendu en 2016.

En quoi les êtres humains sont-ils devenus une force géologique ?

Autour de vous, des zones industrielles, des autoroutes, des villes, des lotissements, mais aussi des prairies et des forêts plantées. Ce modelage artificiel des milieux naturels couvre désormais près du tiers de la surface terrestre, contre seulement 5 % en 1750. D’autres bouleversements naturels moins perceptibles sont à l’œuvre. 90 % de la photosynthèse sur Terre se fait aujourd’hui par des écosystèmes aménagés par les êtres humains. Même le cycle de l’eau a été modifié par les 45 000 grands barrages édifiés [4]. Des substances nouvelles comme le plastique ou les perturbateurs endocriniens sont largués dans l’atmosphère depuis 150 ans, laissant des traces dans les sédiments et les fossiles en cours de formation.

 

 

Pour mieux évaluer l’empreinte humaine, des scientifiques ont observé l’évolution de 24 paramètres du système Terre depuis 1750, de l’accroissement de la population à celles des véhicules motorisés, en passant par la déforestation, l’équipement en téléphones, l’utilisation d’engrais ou les grandes inondations... [5]. Tous ces indicateurs s’emballent dès le 19e siècle, boostés par l’envolée de la consommation énergétique. Hausse de la température du globe, appauvrissement de la couche d’ozone, recul des glaciers, montée des mers, acidification des océans constituent autant de changements planétaires provoqués sur des échelles de temps très courtes par l’exploitation maximaliste de l’écosystème.

Quand l’Anthropocène a t-il débuté ?

Plusieurs hypothèses sont débattues. William Ruddiman, paléoclimatologue américain, propose de situer le début de l’Anthropocène il y a 5 000 à 8 000 ans. Les humains pourraient avoir émis suffisamment de gaz à effet de serre – par la déforestation, les rizières et l’élevage – pour modifier la trajectoire climatique de la Terre. D’autres scientifiques mettent en avant la nouveauté de l’ère nucléaire, pétrochimique et électronique pour faire débuter l’Anthropocène après la seconde guerre mondiale.

La thèse la plus acceptée fait commencer l’Anthropocène à la fin du 18e siècle. Paul Crutzen avance précisément l’année 1784, date du brevet de James Watt sur la machine à vapeur, et symbole du commencement de la révolution industrielle. « Si l’on rapporte l’histoire de notre planète (4,5 milliards d’années) à une journée de 24h, la révolution industrielle se situe dans les deux derniers millièmes de seconde », illustre David Brower, le fondateur de l’organisation écologiste les Amis de la Terre. Deux millièmes de seconde dans une journée planétaire qui ouvrent une nouvelle condition humaine ! Par comparaison, le règne des dinosaures aura duré environ trois quarts d’heure.

L’Anthropocène aboutira-t-il à une « sixième extinction » ?

« Nous avons déséquilibré le monde d’une façon telle que nous sommes aujourd’hui en droit de penser que le processus est pratiquement irréversible », explique à Mediapart le glaciologue Claude Lorius, qui a popularisé la notion d’Anthropocène en France [6]. Aucun retour à la « normale » n’est prévisible. Les scientifiques ont d’ailleurs détecté plusieurs points de basculement au-delà desquels les êtres humains entrent dans des zones d’incertitude. Trois paramètres – cycle de l’azote, émissions de gaz à effet de serre, extinction de la biodiversité – auraient déjà dépassé ce seuil, avec un risque de basculement brutal vers des états non maitrisables [7].

C’est dans l’atmosphère que s’observe ce premier « basculement ». La concentration du dioxyde de carbone est passée de 280 parties par million (ppm) à la veille de la révolution industrielle à 400 ppm en 2013, un niveau inégalé depuis 3 millions d’années (voir notre dossier sur le réchauffement climatique). Outre la modification de la composition chimique de l’atmosphère, le rythme de disparition des espèces est 100 à 1000 fois plus élevé que la normale géologique. Au point que les biologistes parlent désormais de la « sixième extinction » – la cinquième étant celle qui a emporté les dinosaures il y a soixante-cinq millions d’années...

Sommes-nous tous coupables ?

Les êtres humains ont donc désormais acquis la capacité de transformer l’ensemble du système Terre. Pour le meilleur et, surtout, pour le pire... Mais tous les êtres humains sont-ils uniformément responsables ? Le risque d’associer le rôle de nos sociétés à une nouvelle période géologique serait de penser que l’ « espèce humaine » est, globalement, responsable. Dans ce cas, peu importe que les banques états-uniennes, chinoises et britanniques soient championnes en matière d’investissements ultra polluants (voir ici). Inutile de savoir qu’un Américain moyen consomme 32 fois plus de ressources et d’énergie qu’un Kenyan moyen. Ou que 90 entreprises sont responsables de deux tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre (voir là). Et que moins de 1 % de la population possède à elle seule 40 % des richesses mondiales. Pointer l’espèce humaine dans sa globalité dilue les responsabilités. Ce qui ne doit pas être le cas si l’on veut encore réagir. La question de la responsabilité historique des États industrialisés sera ainsi au cœur des discussions de la conférence climat à Paris en 2015.

 

 

La version scientifique de l’Anthropocène induit aussi l’idée que l’espèce humaine aurait détruit la nature... par inadvertance. « Une fable ! », rétorquent les historiens français Jean-Baptiste Fressoz et Christophe Bonneuil, auteurs de L’Evénement Anthropocène [8]. Leur ouvrage revisite l’histoire de l’énergie sous l’angle des choix politiques, militaires et idéologiques. Les usages domestiques du solaire étaient par exemple très développés aux États-Unis au début du 20e siècle, avant qu’une coalition de promoteurs immobiliers menée par General Electric n’entrave le développement des chauffe-eau solaires au profit du chauffage électrique. C’est aussi pour contourner les mouvements ouvriers dans les mines que les États-Unis ont ouvert l’ère du tout pétrole malgré son coût plus élevé.

Face à l’impuissance des politiques, le règne de la techno-science ?

Face à cette tâche prométhéenne, que l’on peut difficilement appréhender à l’échelle d’une vie, et encore moins à l’échelle d’un mandat politique, comment considérer que l’action collective sert encore à quelque chose ? « L’Anthropocène et sa temporalité grandiose anesthésient le politique », redoutent les deux historiens. L’Anthropocène marquera-t-il non seulement l’élévation des humains au rang de force géologique, mais aussi l’avènement de leur impuissance [9] ? Dans ces conditions, experts et savants vont-ils devoir prendre les commandes d’une planète déréglée ? « Une tâche redoutable attend les scientifiques et ingénieurs qui auront à guider la société vers une gestion environnementale soutenable à l’ère de l’Anthropocène », prédit le prix Nobel de chimie Paul Crutzen.

Plusieurs dispositifs de manipulation du climat à grande échelle, répondant au nom de « géo-ingénierie », sont déjà financés et expérimentés (voir notre enquête). Dans ce scénario, exit les expérimentations « par en-bas » de sobriété volontaire et de transformation écologique et sociale. Retour à la case « techno-science », au complexe militaro-industriel, et à leur culte de l’opacité. « Nous nous méprenons à jouer à Dieu avec l’avenir de notre planète », alerte l’économiste australien Clive Hamilton [10]. « Pour les vrais Prométhéens, réguler le climat d’aujourd’hui ne suffit pas. L’objectif est de prendre le contrôle de l’histoire géologique elle-même. »

Les mouvements démocratiques peuvent-ils reprendre la main ?

Les critiques des dégâts du « progrès » sont anciennes. Et n’ont pas attendu l’actuelle prise de conscience sur l’ampleur du réchauffement climatique. Les cahiers de doléances de 1789 témoignent de plaintes innombrables contre les activités industrielles accusées de causer la déforestation et d’augmenter le prix du bois [11]. A cette époque sont déjà débattues les conséquences climatiques de la déforestation. La mécanisation de la production fait aussi l’objet d’un large mouvement de contestation et de bris de machines en Europe à la fin du 18e siècle. « Les résistances ne portent jamais contre "la" technique en général mais contre "une" technique en particulier et contre sa capacité à écraser les autres », rappellent les deux historiens français. Toutes ces luttes ont été tenues à la marge en leur temps par les élites industrielles et supposées progressistes, avant d’être oubliées. Les nouvelles formes d’engagement contre les décisions politiques et économiques de quelques-uns subiront-elles le même sort ?

Le rêve de l’abondance matérielle s’évanouit. Des scénarios de pénurie se dessinent. Comment refonder l’idéal démocratique dans ce contexte ? Des citoyens et chercheurs imaginent et discutent les contours de la « résilience » : la capacité d’un système à s’adapter à des évènements extérieurs et à des changements imposés. C’est l’une des notions clés du réseau des villes en transition. Initié en Grande-Bretagne, ce réseau explore les voies permettant de libérer les villes et leurs habitants de la dépendance pétrolière (comme à Boulder aux Etats-Unis). « L’enjeu est de traverser la mutation de nos sociétés en préservant leur cohésion sociale, leur capital écologique et leur stabilité », explique l’un des initiateurs, Rob Hopkins [12].

En France, les initiatives en matière de sobriété énergétique foisonnent, à l’instar du Mené, petit territoire breton où la transition écologique est en voie d’achèvement (à découvrir ici). Dans les Alpes-Maritimes, des hackers et agriculteurs s’allient pour l’autonomie énergétique. La lutte pour une véritable transformation écologique et sociale s’ancre à Notre-Dame-des-Landes. Des chercheurs se penchent sur d’autres scénarios d’utilisation des terres agricoles tels Afterres 2050, ou de transition énergétique comme Negawatt. Parmi les différentes voies ouvertes, l’une propose de sacrifier une partie du monde – et de ses habitants – pour prolonger le rêve de l’abondance, une autre invite à vivre l’Anthropocène avec lucidité et humilité.

Le passage à l’Anthropocène nous rendra-t-il plus responsable ?

Si le dérèglement climatique apparaît comme un phénomène abstrait et mondial, que dire de l’Anthropocène ? Jusqu’à maintenant, ce concept demeure confiné dans la communauté de chercheurs. Il est devenu un point de ralliement entre géologues, écologues, spécialistes du climat, historiens et philosophes pour penser cet âge dans lequel l’humanité est devenue une force géologique majeure.

Malgré sa technicité, l’Anthropocène bouleverse les représentations du monde et se veut d’une brûlante actualité. A l’aune de cette nouvelle ère, même le mot « crise » est marqué d’un optimisme trompeur car il renvoie à une période dont l’issue est imminente. « Vivre dans l’Anthropocène, c’est donc se libérer d’institutions répressives, de dominations et d’imaginaires aliénants, ce peut être une expérience extraordinairement émancipatrice », espèrent Jean-Baptiste Fressoz et Christophe Bonneuil, qui appellent à « reprendre politiquement la main sur les institutions, les élites sociales, les systèmes symboliques et matériels puissants qui nous ont fait basculer. L’Anthropocène condamne à la responsabilisation. »

Sophie Chapelle
@Sophie_Chapelle

Photo : wockerjabby (Une) / Troy Holden / Romain Guy

 

A lire : Christophe Bonneuil, Jean-Baptiste Fressoz, L’Evénement Anthropocène. La Terre, l’histoire et nous, Editions du Seuil, 2013.

 

Notes

[1Colloque du Programme international Géosphère-Biosphère à Cuernava (Mexique)

[2Plusieurs époques composent une période géologique, le quaternaire actuellement, qui elles-mêmes composent une ère de plusieurs dizaines de millions d’années.

[3W. Steffen, J. Grinevald, P.J. Crutzen et J.R. McNeill, « The Anthropocene : Conceptual and historical pesrpectives », Philosophical Transactions of the Royal Society A, vol 369, n° 1938, 2011, 842-867

[4Les 45 000 barrages de plus de 15 mètres de haut retiennent 15 % du flux hydrologique des rivières du globe. Source : Christer Nilsson et Al, « Fragmentation and flow regulation of the world’s large river systems », Science, vol. 308, 15 avril 2005, pages 405-406.

[5Les 24 paramètres sont les suivants : population, PIB réel total, investissement direct étranger, construction de barrages sur les rivières, consommation d’eau, consommation d’engrais, population urbaine, consommation de papier, restaurants Mc Donalds, véhicules motorisés, téléphones, tourisme international, concentration atmosphérique de CO2/N2O/CH4, appauvrissement de la couche d’ozone, température moyenne de surface de l’hémisphère Nord, grandes inondations, écosystèmes océaniques, infrastructures des zones côtières, biogéochimie des zones côtières, perte de forêts et forêts tropicales, surface de terres exploitées, biodiversité mondiale. Source : données issues de igpb.net, W. Steffen (dir.), Global Change and the Earth System : A planet under pressure, New York, Springer, 2005, p 132-133.

[6Claude Lorius, Laurent Carpentier, Voyage dans l’Anthropocène, cette nouvelle ère dont nous sommes les héros, Actes Sud, janvier 2011.

[7Selon l’équipe scientifique du Resilience Centre à Stockholm. Source : Anthony D ; Barnosky et al., « Approaching a state shift in Earth’s Biosphere », Nature, vol. 486, 7 juin 2012, 52-58.

[8Editions Seuil, 2013

[9L’idée d’ « impuissante puissance » est due à Michel Lepesant, lors des Rendez-vous de l’Anthropocène, co-organisés par l’EHESS et l’Institut Momentum au printemps 2013.

[10Clive Hamilton, Les Apprentis sorciers du climat : raisons et déraisons de la géo-ingénierie, coll. Anthropocène, Ed. Seuil, 2013.

[11Arlette Brosselin, Andrée Corvol et François Vion-Delphin, « Les doléances contre l’industrie », in Denis Woronoff (dir.), Forges et forêts. Recherches sur la consommation proto-industrielle de bois, Paris, EHESS, 1990, 11-28.

[12Rob Hopkins, The transition handbook : from oil dependancy to local resilience. Green Books, 2008.

 

 

 


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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 16:07

 

 

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Conflit d’intérêt ?

Nomination controversée d’une responsable de la banque UBS à l’Autorité des marchés financiers

par Agnès Rousseaux 3 février 2014

 

 

 

Le « gendarme de la bourse », l’Autorité des marchés financiers (AMF), a renouvelé en décembre la moitié des membres de sa Commission des sanctions. Celle-ci instruit les dossiers, enquête et décide des sanctions sur les fraudes et manipulations présumées du secteur bancaire et financier. Parmi les personnes nommées par Pierre Moscovici, ministre des Finances : Françoise Bonfante. Elle est responsable depuis 2010 de la filière Risques de la banque suisse UBS, et a été pendant quinze ans (de 1995 à 2010) directrice de la conformité à UBS France et Europe. Elle était donc chargée de faire respecter par la banque les lois et règlementations [1].

Sa nomination dans un organe aussi stratégique que la Commission des sanctions de l’AMF a de quoi surprendre. UBS France a en effet été condamnée en juin 2013 à une amende de 10 millions d’euros, pour « laxisme » dans le contrôle de pratiques commerciales susceptibles de relever du blanchiment de fraude fiscale. Selon l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP), qui surveille l’activité des banques, UBS avait été informée de « graves soupçons » concernant la possible implication de son réseau commercial « dans la facilitation d’opérations susceptibles d’être qualifiées de démarchage illicite et de blanchiment de fraude fiscale ». En clair : l’organisation d’un système d’évasion fiscale de la France vers la Suisse, assurés par des chargés d’affaires de la banque démarchant de nouveaux clients et instaurant une double comptabilité. La direction d’UBS a « attendu plus de dix-huit mois avant d’entreprendre la mise en place des procédures d’encadrement et de contrôle nécessaires pour remédier à ce risque de non-conformité de son activité transfrontalière », décrit l’ACP [2]. Une fraude organisée à propos duquel Françoise Bonfante a été entendue par l’ACP. Elle était en première ligne en tant que responsable de la conformité et des risques chez UBS à cette époque.

 

« Blanchiment de fraude fiscale en bande organisée »

Sa nomination à l’AMF a fait bondir le sénateur communiste Éric Bocquet, rapporteur en 2012 de la Commission d’enquête sur l’évasion fiscale : « Quels sont les critères qui ont présidé à la désignation de la représentante de la banque UBS au sein de la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers ? », interpelle-t-il dans une question au gouvernement. « Une ancienne de la banque UBS qui a maille à partir avec la justice pour blanchiment de fraude fiscale en bande organisée ! C’est incroyable !, s’indigne-t-il. Déconnecter le politique des financiers et particulièrement des banques est une absolue nécessité. On ne nous fera pas croire qu’il n’y a de compétences que chez les banquiers ! ».

Les liens entre la Commission des sanctions de l’AMF et le secteur bancaire ne sont pas nouveaux : sur les douze membres de cette commission, six sont des professionnels nommés par le ministre de l’Économie, après consultation des organisations représentatives du secteur financier. Mais avec la nomination d’un haut-responsable d’UBS, Pierre Moscovici envoie un signal très alarmant. Le journaliste Antoine Peillon a décrit, dans son ouvrage Ces 600 milliards qui manquent à la France [3], « l’existence d’un "carnet du lait" et d’un "fichier vache", comptabilité clandestine des opérations d’évasion fiscale organisées par plusieurs dizaines de chargés d’affaires d’UBS sur tout le territoire français », et ce pendant plusieurs années. L’auteur a notamment recueilli le témoignage de nombreux cadres supérieurs de la banque, affirmant que les membres du directoire étaient au courant de ces pratiques illicites. La direction générale d’UBS a apporté un démenti catégorique.

Une responsable de cette banque peut-elle vraiment siéger dans la Commission des sanctions ? Comment cette décision a-t-elle pu être prise ? « La banque que vous avez mentionnée fait l’objet de procédures à caractère judiciaire. Les obligations qui sont les miennes m’interdisent de faire des commentaires, de manière à ne pas obérer l’efficacité des procédures en question », a répondu, dans une déconcertante langue de bois, Bernard Cazeneuve, ministre délégué au Budget, à la question du sénateur Éric Bocquet. Certaines décisions semblent visiblement difficiles à assumer.

 

- Voir la composition de la Commission des sanctions de l’AMF

 

Notes

[1En finance, la « conformité » ou « compliance » en anglais désigne le respect des lois et règlementations propres aux activités bancaires et financières, mais aussi des normes déontologiques.

[2Lire le rapport de l’ACP ici. UBS France a depuis formé un recours devant le Conseil d’État contre la décision de la Commission des sanctions du 25 juin 2013.

[3Antoine Peillon, Ces 600 milliards qui manquent à la France, Enquête au cœur de l’évasion fiscale, Editions du Seuil, 2012.


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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 16:01

 

Source : www.reporterre.net

 

 

Les Jeux olympiques de Sotchi battent déjà le record du dégât écologique

Andrea Barolini (Reporterre)

lundi 3 février 2014

 

 

 

 

D’ici quelques jours, le coup d’envoi des Jeux Olympiques d’hiver sera donné en Russie. Mais la ville de Sotchi, au climat méditerranéen, n’est pas propice à de tels jeux. Dont la tenue n’est possible qu’à un prix environnemental et humain très élevé.

 


 

Il suffit de taper le nom de la ville qui va héberger les prochains JO pour s’apercevoir qu’elle est située à l’extrémité sud de la Russie, entre la mer Caspienne et la mer Noire. Et pour obtenir des belles images de plages, palmiers, baigneurs en plein soleil.

Eh bien oui, vous avez bien compris : c’est la mer. Et il ne s’agit pas de la mer glaciale de Barents, celle de l’océan Arctique, délimitée par la mer de Norvège, les îles Svalbard et la Russie occidentale, mais de la mer de Noire, au climat méditerranéen.

 

 

Sotchi, ville d’environ 370.000 habitants, est une station balnéaire très renommée. Le premier à avoir compris les potentialités maritimes et touristiques de cette ville fut Joseph Staline qui, à partir des années 1930, avait lancé son développement vigoureux. Aujourd’hui la ville est considérée comme la « Riviera du Caucase ».

Il est donc difficile d’imaginer qu’elle puisse vraiment héberger une compétition de sport d’hiver : c’est comme si la France avait proposé d’organiser les Jeux d’hiver de 2020 en Corse. Certes, on peut le faire. Mais à quel prix économique et environnemental ?

Quelques chiffres : environ six mille athlètes et accompagnateurs de plus de quatre-vingt-dix pays sont attendus en Russie. Ils animeront ski, luge, patinage, bob, hockey, biathlon et curling (le Comité International Olympique, CIO, a décidé d’inclure six nouvelles disciplines au programme).

Et, en effet, Sotchi a déjà atteint son premier record : avec 36 milliards d’euros dépensés, la facture est la plus lourde de l’histoire des Jeux olympiques d’hiver. Lors que l’édition 2010 de Vancouver, en Canada, n’avait pas dépassé les 1,4 milliards d’euros.

Ne pas lésiner sur les coûts résulte de la volonté du président russe Vladimir Poutine de faire des J.O. un événement à la fois sportif et politique. Pour le Kremlin, Sotchi est une opération de prestige pour son pays et sa présidence. Le sport est un dérivatif efficace aux soucis du régime : Moscou a déjà organisé les championnats du monde d’athlétisme, en août. Et la Russie attend d’héberger la Coupe du Monde de football de 2018.

Sotchi a été presenté comme l’événement le plus important depuis la chute de l’Union soviétique. Comme il n’existait quasiment aucun équipement sportif hivernal, la plupart des infrastructures ont été édifiées de zéro. Et aux stades et tremplins ont été ajoutés de nombreux hôtels, resorts et restaurants.

Le « parc olympique » se partagera entre la ville maritime et le lieu choisi comme domaine de ski, Krasnaïa Poliana, situé à soixante kilomètres, avec une capacité totale de 75.000 spectateurs.

A Sotchi, le nouveau stade Fisht, de 40.000 places, ne sera utilisé que pour les cérémonies d’ouverture, de clôture et de remises de médailles. Le gouvernement a assuré que la structure sera ensuite utilisée pour les matchs de l’équipe nationale de football à l’occasion de la Coupe du monde du 2018.

 

 

A quoi s’ajouteront deux arènes pour le hockey sur glace (la « Bolchoï » et la « Shaïba »), un centre pour le curling (dénommé « Ice Club »), un stade pour le patinage de vitesse (« Adler Arena ») et un palais pour le patinage artistique (« Iceberg »).

 

 

Cela a impliqué des travaux gigantesques, qui ont été menés par des milliers de travailleurs, surtout étrangers : selon Amnesty international, les cas de sous-paiement, d’absence de contrat de travail, de non-respect des normes de sécurité ont été très nombreux, les passeports de certains ouvriers auraient été même confisqués.

Malgré le torrent d’argent déversé et l’exploitation des travailleurs, les travaux ont été menés très rapidement, ce qui ne garantirait pas un niveau suffisant de sécurité. La stabilité du tremplin de saut à ski serait, par exemple, sous la menace permanente d’un glissement de terrain : « Ce n’est pas bien de bâtir de telles infrastructures dans un délai si court. La qualité sera forcément mauvaise et on en paiera les conséquences », a expliqué au Figaro un écologiste local, Vladimir Kimaev.

En outre des associations environnementalistes ont dénoncé une véritable métamorphose des lieux qui seront le théâtre des J.O. L’association WWF fustige la mauvaise qualité des études d’impact sur l’environnement. Quant aux espèces rares et menacées qui risquent de ne pas survivre à cause des changements de l’écosystème local, la société publique Olympstroy, qui gère l’ensemble des travaux des sites olympiques, a déclaré que « plus de 55 000 plants d’espèces rares et menacées ont été replantés en 2012 dans le parc national de Sotchi. La compensation s’élève à trois pour un ».

Mais pour Mikhail Kreindlin, expert en zones protégées de Greenpeace, « cela n’est que du greenwashing. Il est impossible de reproduire le même écosystème. Les conditions naturelles originelles et complexes ont été transformées ».

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : www.reporterre.net

 

 

 


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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 15:45

 

 

Source : www.mediapart.fr

 

Notre-Dame-des-Landes : les opposants contre-attaquent

|  Par Jade Lindgaard

 

 

Plusieurs associations attaquent les arrêtés sur l’eau et la destruction des espèces protégées signés par l’État en décembre pour lancer les travaux préalables à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.

Plusieurs associations attaquent les arrêtés sur l’eau et la destruction des espèces protégées signés par l’État en décembre pour lancer les travaux préalables à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique). Les recours portent notamment sur la méthode de compensation des dommages causés à la faune et à la flore, jugée très insuffisante. Ils sont déposés lundi 3 février devant le tribunal administratif de Nantes, conjointement par l’Acipa, l’association historique des opposants au projet, le Cédépa, un collectif d’élus, la Confédération paysanne, la Ligue de protection des oiseaux (LPO), Bretagne vivante, Europe Écologie-Les Verts, ainsi que des particuliers. Sans caractère d’urgence, leur examen pourrait durer de trois à six mois, au minimum, selon Raphaël Romi, professeur de droit à la faculté de Nantes, qui insiste sur la « complexité » technique du dossier.

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Retrouver ici notre dossier complet sur « l'aéroport de la discorde »

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Pour les requérants, il faut revoir toute la méthode d’évaluation de la qualité environnementale du site, bâclée selon eux. Ils dénombrent sur le terrain une bonne trentaine d’espèces animales et végétales oubliées par le maître d’ouvrage et ses bureaux d’études, parmi lesquels Biotope (voir notre enquête à son sujet). Ils attaquent aussi la méthode destinée à « compenser » le déplacement des espèces protégées et la destruction d’une partie de leur habitat.

 

Dans la zone de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, avril 2013 (JL). 
Dans la zone de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, avril 2013 (JL).

En avril 2013, les experts mandatés par l’État avaient disqualifié le mode opératoire choisi par AGO, la filiale de Vinci chargée de construire l’équipement (voir ici). La zone concernée par le transfert de l’aérogare est une zone humide très étendue. Le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) oblige à en préserver le double de la superficie en compensation du bétonnage. Une telle surface est impossible aujourd’hui à trouver. Pour contourner cette difficulté, Vinci veut calculer la valeur de l’écosystème concerné, et le compenser de façon qualitative et non quantitative. Une méthode expérimentale réprouvée par une partie de la communauté scientifique (voir ici).

En décembre dernier, plusieurs juristes ont signé un appel contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, qualifié d’« horreur juridique » : « L’État se prévaut sans cesse du droit pour justifier son projet. Mais le droit a été "modernisé" pour précisément permettre ce projet. En réalité, il est devenu bien plus difficile de construire une éolienne qu’un aéroport. »

L’exécutif s’est engagé à ne pas lancer les travaux sur la zone d’aménagement différé (ZAD), occupée depuis 2009 par un nombre variable d’opposants, tant que tous les recours n’ont pas été jugés. Or une fois passé ce délai, certains déplacements d’espèces ne seront sans doute plus possibles (leur calendrier est très encadré car il faut respecter les périodes de reproduction, etc.). Si bien que les travaux pourraient rester bloqués jusqu’aux derniers mois de l’année.

Mais en décembre, la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, a déclaré qu’« après une étape de dialogue qui a duré ces derniers mois, pendant laquelle l'utilité du projet de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes a été plutôt confirmée, confortée, il est temps en effet de passer aux travaux préalables avant la réalisation du projet ». Après la parution des arrêtés, Mikaël Doré, sous-préfet chargé du dossier, a renchéri : « Désormais, on a toute latitude pour réaliser les travaux. Sur le terrain, des repérages sont actuellement menés en vue de préparer l’opération de transfert des espèces protégées. Rien ne nous interdit de passer à l’action. »

De leur côté, les opposants assurent que si les pouvoirs publics décidaient d’intervenir sur le terrain avant l’épuisement des recours, ils riposteraient aussitôt devant les tribunaux, en référé cette fois. La destruction d’espèces protégées est un délit pénal. Une nouvelle manifestation d’opposition au projet d’aéroport s’organise pour le 22 février.

 

Source : www.mediapart.fr

 

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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 15:41

 

Source : www.mediapart.fr

 

Vers un troisième plan de sauvetage en Grèce

|  Par martine orange

 

 

 

Dans la plus grande discrétion, les responsables européens ont repris les négociations sur la Grèce, bien que celle-ci soit officiellement sur la bonne voie. Un troisième plan de sauvetage semble inévitable.

Après avoir tenté d’oublier le sujet pendant un an, les Européens sont bien obligés de reconnaître que le sauvetage de la Grèce n’est pas du tout résolu. L’hebdomadaire Der Spiegel a publié pendant le week-end une note de cinq pages issue du ministère allemand des finances sur la Grèce : un nouveau programme de crédit allant de 10 à 20 milliards d’euros est à nouveau à l’étude. Sans confirmer l’information, le ministre des finances Wolfgang Schäuble a assuré dans un entretien au magazine économique Wirtschaftswoche que « toute aide supplémentaire serait bien inférieure aux 240 milliards d’euros versés précédemment ». 

Dans ce qui semble une volonté de préparer l’opinion publique, le gouvernement allemand a exclu lundi toute possibilité d’une nouvelle restructuration de la dette grecque. « Je peux démentir totalement cette hypothèse », a assuré un porte-parole du gouvernement à Reuters. En novembre 2012, les responsables européens, après d’interminables tergiversations, s’étaient finalement résolus à un défaut partiel de la Grèce. Sa dette était tombée de 144 % à 124 % du PIB. Depuis, l’écroulement de son économie, le chômage et la déflation ont effacé tous les gains de l’opération. L’endettement de la Grèce correspond à 170 % du PIB. Un niveau jugé intenable par tous les experts.

En coulisses, les responsables européens s’agitent à nouveau beaucoup autour du cas grec. Samedi, le Wall Street Journal dévoilait l’existence d’une réunion secrète à Bruxelles lundi 27 janvier. À l’issue d’un sommet de l’Eurogroupe, les responsables de la troïka (BCE, FMI, Union européenne) et les ministres des finances allemand et français se sont rencontrés discrètement pour évoquer à nouveau le sujet grec. Le ministre des finances grec, qui était dans les locaux, n’avait pas été convié.

L’objet de cette réunion était d’examiner la situation budgétaire d’Athènes. Si officiellement la situation se redresse, dans les faits, le pays est piégé par la dette. En mai, le gouvernement doit payer un remboursement obligataire de 11 milliards d’euros mais n’a aucun moyen de le faire. Le FMI, qui n’a versé aucune aide au gouvernement depuis juillet dernier, refuse de faire le moindre déboursement tant que le gouvernement grec n’a pas accepté ses conditions. L’institution internationale exige qu’Athènes mette enfin en œuvre les réformes structurelles touchant la santé, le travail, la protection sociale, qu’il s’est engagé à réaliser. 153 actions des différents ministères sont exigées par le FMI, selon le quotidien grec Ekathimerini qui a consulté un document du ministère des finances.

Le FMI demande aussi à avoir une vision claire de la situation budgétaire sur les douze mois à venir. Au-delà de l’engagement du gouvernement grec, les responsables européens sont aussi requis et doivent dire s’ils comptent aider Athènes et comment. Cette situation est tout sauf imprévue. Dès juillet 2013, un rapport du FMI pointait qu’il manquait au moins 11 milliards d’euros pour que le sauvetage de la Grèce soit viable.

Les membres de la troïka doivent retourner à Athènes dans les semaines à venir. Les discussions risquent de monter d’un ton à Athènes aussi bien qu’à Bruxelles.

 

 

Source : www.mediapart.fr

 


 

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3 février 2014 1 03 /02 /février /2014 15:29

 

 

Source : www.mediapart.fr

 

Réunion secrète européenne pour parler de la Grèce

|  Par La rédaction de Mediapart

 

 

 

Lundi, les membres de la Troïka et les ministres des finances allemand et français se sont rencontrés discrètement pour parler de la Grèce, toujours en grande difficulté. Le ministre grec des finances n’avait pas été convié.

Lundi dernier, les membres de la Troïka (Union européenne, BCE, FMI) se sont retrouvés en compagnie des ministres des finances allemand et français et des responsables européens pour une réunion à l’abri des regards, raconte le Wall Street Journal. Sujet : la Grèce. Le ministre des finances grec, qui était présent dans le même bâtiment bruxellois, n’avait pas été convié.

En dépit des assurances répétées sur le redressement de la Grèce, les responsables européens et du FMI sont très inquiets : le sauvetage d’Athènes est loin d’être acquis. La Grèce doit rembourser 11 milliards d’euros en mai. Le FMI , qui n’a versé aucune aide depuis juillet dernier, conditionne les prochains déboursements à deux mesures : que le gouvernement grec mette enfin en œuvre les réformes structurelles (travail, santé, protection sociale) qu’il s’est engag à faire, et qu’il donne une vision très claire de sa situation budgétaire sur les douze mois à venir. Selon les informations du Wall Street Journal, il manque 5 à 6 milliards pour boucler le second semestre.

La réunion n’a débouché sur aucune décision. Les membres de la Troïka doivent retourner bientôt à Athènes

Lire dans le Wall Street Journal

 

 

 

 

Source : www.mediapart.fr

 

 

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