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24 février 2014 1 24 /02 /février /2014 16:02

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

Ce qui nous arrive sur la Toile 24/02/2014 à 10h53
La prochaine Bastille qui brûlera sera un hangar plein d’ordinateurs
Xavier de La Porte | France Culture

 

 


Un avion miniature (Prime Tambayong)

 

Et si, sans le savoir, nous étions prisonniers ? Et si, au moment même où certains pensent se libérer d’un pouvoir, ils tombaient sous l’autorité d’un autre pouvoir, moins visible, moins physique, mais tout aussi autoritaire ? Et si nous étions tous prisonniers des algorithmes ?

C’est la thèse développée récemment par un journaliste de la revue américaine The Atlantic, Bill Davidow, et qui fait écho – sans le savoir sans doute – au travail mené par deux chercheurs belges, Antoinette Rouvroy et Thomas Berns.

Depuis plusieurs années déjà ceux-ci parlent de « nouvelle gouvernementalité algorithmique » et montrent que nous sommes en passe de nous soumettre à un nouveau genre de pouvoir : celui des programmes informatiques.

Notre solvabilité, nos goûts et nos dépenses

Intuitivement, on sent bien que de plus en plus de nos gestes de la vie quotidienne, d’interactions avec les autres, sont dépendants de programmes informatiques, mais de là à parler de prison, il y a peut-être un pas. Bill Davidow le franchit allègrement. Et il ne manque pas d’arguments.

Les gouvernements et les entreprises, explique-t-il, utilisent l’information d’une manière inédite : grâce à d’énormes bases de données le plus souvent puisées sur Internet, grâce à des algorithmes fins et puissants qui fouillent ces données, ils nous profilent, prévoient nos actes, notre solvabilité, nos goûts, nos dépenses, et ils agissent en conséquence.

Ainsi nombre d’Américains se voient-ils refuser un prêt, imposer une augmentation de leur police d’assurance ou refuser un emploi parce les algorithmes l’ont conseillé. La voilà cette prison algorithmique.

Interdits de vol sans le savoir

Vous pensez que Bill Davidow est un peu paranoïaque. Eh bien sachez que le service chargé aux Etats-Unis de la sécurité des transports utilise un programme du nom de « Automated Targeting System », dont l’algorithme confronte des données comme :

  • les feuilles d’impôts ;
  • les voyages précédents ;
  • les titres de propriété  ;
  • les caractéristiques physiques ;
  • le casier judiciaire et autres informations provenant des services de renseignements, pour établir la dangerosité d’un passager.

Plusieurs centaines d’Américains auraient ainsi leur nom sur une liste d’interdits de vol, sans même le savoir.

Vous pensez que de tel procédé sont réservées à la sécurité ? Une entreprise du nom de The Gild a inventé un algorithme qui prédit les capacités des programmeurs informatiques en allant voir les lignes de codes qu’ils ont écrites dans des programmes open source, comment ils ont établi leur profil sur LinkedIn (un réseau social professionnel) ou comment ils répondent aux questions dans les forums informatiques.

Spécialité : le renseignement client

Vous pensez que c’est réservé aux informaticiens ? Mais les algorithmes contraignent votre espace sur Internet, vous le savez au moins intuitivement. Les liens qui vous sont proposés, les publicités qui s’affichent sur votre écran, et dans une certaine mesure les résultats des moteurs de recherche, sont déterminés par des algorithmes, en fonction de ce qu’ils savent de vous.

Vous pensez que tout cela est réservé à votre vie en ligne ? Il existe aux Etats-Unis une quarantaine d’entreprises répertoriées pour faire du renseignement client.

Ces entreprises fournissent des dossiers aux banques, aux sociétés de crédit, aux établissements de jeu, aux compagnies d’assurance, aux sociétés de location, ou à une entreprise qui voudrait connaître l’historique professionnel de quelqu’un.

Un contrôle invisible et à bas coût

Ainsi il n’y a pas UNE prison algorithmique, mais une multitude de ces prisons. Parce que gouvernement et entreprises ont toujours eu cette tentation de contrôle invisible des populations mais surtout, parce qu’il est possible aujourd’hui de l’établir à un coût très bas.

Le problème de ces prisons algorithmiques, c’est qu’on ne sait pas où sont les barreaux, mais on ne sait pas vraiment non plus où sont les geôliers. D’où provient l’algorithme qui me refuse un prêt ? De quelle entreprise ? Ou est-ce un programme de ma banque ? Et puis, comment savoir quel comportement l’algorithme sanctionne ou encourage ? Tout cela est encore peu encadré.

Ce qui se joue donc – et ce n’est plus Bill Davidow qui le dit, mais Antoinette Rouvroy –, c’est une nouvelle forme de pouvoir qui ne s’exerce plus sur nos corps dans le présent (comme le fait une prison) mais sur nos comportements à venir.

Contre cette forme de pouvoir, il est dur de se rebeller, parce qu’il ne fait pas couler le sang, ne tue pas. A quoi ressembleront les révolutions de demain ? A quoi ressembleront les Bastilles que nous brûleront ? Sans doute à des hangars pleins d’ordinateurs.

 

Publié initialement sur
France Culture

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24 février 2014 1 24 /02 /février /2014 15:58

 

Source : www.reporterre.net

 

EDITO - Le mirage de la violence

Hervé Kempf

lundi 24 février 2014

 

 

Les provocations de samedi ont mis en danger les manifestants et affaiblissent la lutte.


 

La manifestation qui s’est déroulée le samedi 22 février à Nantes est une étape notable dans l’histoire de la lutte contre le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes.

Les médias institués auront retenu l’aspect spectaculaire de la confrontation de plusieurs centaines de provocateurs, venus pour en découdre, avec les forces de police. Cette violence a permis au ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, de réagir presque en direct, en fin d’après-midi, pour la stigmatiser et donner le ton de la réaction officielle.

Mais cette expression violente ne saurait faire oublier l’autre volet crucial de cette folle journée de Nantes : une mobilisation jamais atteinte dans la ville même, avec plus de trente mille manifestants et plus de cinq cents tracteurs. Ce succès atteste que la détermination populaire contre ce projet d’aéroport reste extrêmement forte.

En revanche, l’image de violence projetée par la manifestation l’a détournée de son but. Il ne fait pas de doute que les images des désordres à Nantes vont marquer l’opinion publique et être utilisés par les promoteurs du projet, sur le mode d’un syllogisme simplificateur : « Les opposants sont violents, donc il est légitime de faire l’aéroport ».

Au demeurant, les lieux détruits ont été précisément choisis : un bureau de la société Vinci, et deux agences de voyage, l’une de la SNCF (contre le projet Lyon-Turin), et l’autre de Nouvelles frontières (qui promeut des voyages en avion). Il n’y a pas eu de destruction généralisée, de volonté de saccage, de pillage. Les destructions avaient un sens politique, comme l’ont été le tagage d’un commissariat ou de l’hôtel de ville ou la destruction de deux engins de chantier. En même temps, il y a eu volonté de provoquer des gendarmes et CRS, massivement présents dans la ville, avec jets de projectiles, fusées, et bientôt pavés de la ligne de tramway, tandis qu’un bureau de cette ligne était incendié.

Mais au final, la ville de Nantes n’a pas été mise à feu et à sang, et dès samedi soir, rue de Strasbourg, les voitures des fêtards réoccupaient les trottoirs sans inquiétude

 

« Pour défendre notre terre, nous sommes prêts à la violence »

Il n’en reste pas moins que la manifestation a largement échappé à ses organisateurs, et que l’image des affrontements a fait le délice des télévisions et sans doute jeté l’effroi dans nombre de foyers.

Comment ont réagi les forces en présence ?

Le préfet de Loire-Atlantique, Christian de Lavernée, a donné dimanche matin sa version, lors d’une conférence de presse à laquelle assistait Reporterre : « Il y a un rapport entre ce qui s’est passé à Nantes et ce qui se passe sur la Zad. (…) Le combat de Nantes est une répétition de ce qui se passerait si les travaux commençaient sur la Zad ».

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : www.reporterre.net

 

 

 

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24 février 2014 1 24 /02 /février /2014 15:46

 

Source : www.mediapart.fr

Nantes : un manifestant éborgné par des tirs

|  Par Louise Fessard

 

 

Quentin, un charpentier cordiste de 29 ans, a été gravement blessé à l'œil samedi lors de la manifestation contre le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes.

Un jeune homme de 29 ans, Quentin, a perdu son œil suite à un tir reçu lors de la manifestation du 22 février 2014 à Nantes contre le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes. Selon sa mère Nathalie, jointe ce matin, « il a été opéré trois heures dès samedi soir par le chef du service ophtalmologie du CHU de Nantes ». « Il  n'a plus d'œil, ni de paupière, et souffre de plusieurs fractures », indique-t-elle.

Dans une interview réalisée dimanche midi par une amie de son père et publiée sur un blog de Mediapart, Quentin, charpentier-cordiste à Carquefou, près de Nantes, explique qu'il a été touché alors qu'il cherchait à se replier pour échapper aux affrontements. « Je reculais en les regardant (les policiers, ndlr) pour pas être pris à revers et pouvoir voir les projectiles qui arrivaient, indique-t-il. Et là, à un moment, j’ai senti un choc, une grosse explosion et là je me suis retrouvé à terre et, comme ils continuaient à nous gazer, ils continuaient à envoyer des bombes assourdissantes alors que j’étais au sol, des gens ont essayé de me sortir le plus vite possible, de m’emmener plus loin aussi. » 

Pour l'heure, ses proches cherchent à rassembler les témoignages pour comprendre l'origine du tir. Dans son entretien, Quentin qui est toujours hospitalisé, estime avoir été touché par une grenade assourdissante, mais évoque également des CRS qui « visaient, au Flashball ». « Il n'était pas masqué, pas armé, en train de reculer face à une charge, dit sa mère Nathalie. J'ai une tristesse infinie, une rage qu'un gosse qui est là pacifiquement pour manifester son désaccord se retrouve dézingué. Il n'a rien fait que d'être là. »

Selon la préfecture de Loire-Atlantique, une dizaine de personnes ont été hospitalisées dans les rangs des forces de l'ordre à la suite de la manifestation.

DOSSIER: L'AÉROPORT DE LA DISCORDE

 

Source : www.mediapart.fr

 

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24 février 2014 1 24 /02 /février /2014 15:40

 

Source : rue89.nouvelobs.com


 

Témoignage 24/02/2014 à 12h00
NDDL : j’étais à la manif, et je n’ai pas vu la même chose que les télés

Isabelle Thibault

 

 

 


Des opposants déguisés lors de la manifestation anti-Notre-Dame-des-Landes à Nantes, le 22 février 2014 (SALOM-GOMIS SEBASTIEN/SIPA)

 

J’étais présente à la manifestation anti-Notre-Dame-des-Landes à Nantes et, de 13h30 à 17 heures, je suis restée sur cette place du commerce où ont eu lieu les incidents de samedi. Je n’étais pas cagoulée, j’ai plus de 50 ans, je suis enseignante et je venais de Bordeaux pour soutenir les opposants à l’aéroport.

Ce que j’ai vécu ce jour-là, je ne le reconnais pas dans la quasi-totalité des infos lues sur le Net ou dans la presse papier, ou vues à la télé.

« Guérilla urbaine », vraiment ?

Making of

Suite à la manifestation anti-aéroport de ce samedi à Nantes, Isabelle Thibault a contacté Rue89. Elle est indignée par le décalage entre ce qu’elle a vécu et la représentation médiatique, axée seulement sur l’aspect violent et occultant l’« ambiance bon enfant », « la musique », « les cafés pris en terrasse entre manifestants ». Selon elle, « le combat des paysans n’a pas été montré à sa juste valeur ».

Cette quinquagénaire, employée de l’Education nationale, syndiquée au SGEN, a déjà pris part à la manifestation du 17 novembre, sur le site de la ZAD. Pour marquer son soutien aux paysans, à la ZAD et au mouvement en général. « Le plus important, c’est de se demander quel avenir on veut pour nos enfants. » Amélie Robaux

Les images, en boucle : elles montrent des lieux cassés, détruits, quelques flammes, une barricade. Elles sont accompagnées d’un vocabulaire relatif à une violence forte : « guérilla urbaine », le fait de « quelques milliers de personnes », « commerces saccagés », « centre de Nantes saccagé », « vitrines détruites ».

En fait, sur cette place du commerce, deux cabanes ont brûlé, un abri a été détruit. J’ai vu la façade de Vinci repeinte ainsi que celle de la SNCF, des murs tagués. Une vingtaine de personnes cagoulées ont essayé à partir de 13h30 de franchir un barrage de police devant les yeux d’une foule hétérogène (enfants, jeunes vieux, paysans sur leurs tracteurs).

En interrogeant des personnes dans la foule, il se racontait que la rue barrée par la police était prévue initialement dans le parcours. D’où la colère de certains…

Des personnes cagoulées demandaient à la foule de ne pas s’arrêter, de continuer la manif. D’autres, toujours cagoulées, annonçaient par porte-voix qu’il y avait de quoi soigner les personnes touchées par les gaz lacrymogènes. La violence n’était donc pas uniquement du côté des manifestants.

Pourquoi ne pas avoir montré son côté festif ?

A aucun moment je n’ai eu un sentiment de peur (« guérilla urbaine… »). C’était comme si on attendait que la rue s’ouvre à nouveau.

Des cabanes détruites, certes, deux de trop. Des murs tagués, c’est vrai. Mais le fait de filmer les mêmes lieux sous des angles différents a amplifié aux yeux des téléspectateurs un phénomène très réduit.

Pourquoi ne pas avoir montré les centaines de tracteurs (vus un quart de seconde dans un seul reportage, sur BFM-TV), preuve que le mouvement est suivi et s’amplifie dans le monde paysan ?

Pourquoi ne pas avoir montré les petits orchestres (cor, guitare, tambours) et les multiples déguisements (personnes et chars) qui donnaient à la manifestation un caractère festif ?

Pourquoi ne pas avoir interviewé les participants de la manif ?

Ça me laisse un goût amer

Je n’ai vu aucun journaliste, aucune télé sur la place (et j’y suis restée de 13h30 à 17 heures…). J’ai plus de 50 ans et ce que je viens de vivre me laisse un goût amer et me fait davantage comprendre la méfiance de nombreux Français vis-à-vis d’une certaine presse et des JT qui ne donnent qu’un aspect réducteur et peu objectif.

Propos incomplets, images prises du côté des forces de l’ordre, réaction des politiques, texte de l’AFP repris mot pour mot par plusieurs sites de journaux… J’aurais aimé entendre les gens s’exprimer sur leur vision de la manifestation.

Enfin, les propos du préfet amènent encore de la confusion dans la connaissance de la réalité : assimiler violence urbaine et violence sur la ZAD [Zone à défendre, ndlr] est un signe de méconnaissance de ce mouvement.

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

 

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24 février 2014 1 24 /02 /février /2014 15:27

 

Source : rue89.nouvelobs.com


 

Vie de bureau 24/02/2014 à 11h59
Faire ses 35 heures sur quatre jours, c’est possible (et c’est bien !)
Anne-Laure Pineau | Journaliste

 

 


Des brochettes dans un barbecue (Pixabay/CC)

 

Tous les mercredis, Sébastien Antonio reste chez lui. Une journée « sacrée » pour se reposer, profiter de ses enfants et faire les courses. Ce père modèle, ancien serveur, est responsable du site d’exploitation rémois d’Yprema, une société de valorisation de déchets du BTP. Il ne travaille pas à temps partiel. Il fait ses 35 heures en quatre jours. Comme 80% de ses collègues.

Yprema a été créée il y a 24 ans. L’entreprise s’inscrit dans une politique de développement durable et fait 22 millions d’euros de chiffre d’affaire. Elle emploie 90 salariés et se déploie sur une petite dizaine de sites en France.

En 1997, devançant les 35 heures de Martine Aubry, le PDG de la société, Claude Prigent, décide de profiter de la loi Robien sur le partage du temps de travail (voir encadré). Tomber de 39 à 35 heures lui permet d’embaucher quatorze CDI en un an, et de passer de 42 à 90 salariés en une dizaine d’années.

« Moi je suis pour travailler moins »

Les exonérations de charges qu’offrait ce dispositif ont été selon lui le moyen d’oser appliquer cette politique. « Moi je suis pour travailler moins », nous dit-il :

« Mon entreprise œuvre pour le développement durable. Tout en développant l’entreprise, je trouve normal de lutter contre la pénibilité au travail. »

La loi Robien
Dès 1993, l’industriel Antoine Riboud, fondateur de Danone, déclarait au Monde : « Il faut descendre à 32 heures [...], cela obligera toutes les entreprises à créer des emplois ». Cet avis, le membre de l’UDI Gilles de Robien, alors vice-président de l’Assemblée Nationale, le partage. Il fait voter en 1996 la loi facultative de partage du temps de travail, dite Loi Robien. Cette formule, c’est un troc : en échange d’une exonération de charges sociales, l’entreprise doit réduire le temps de travail et recruter 10% de sa masse salariale en plus, et en CDI. Des centaines d’entreprises, de la TPE au grand groupe, ont fait ce pari : parmi elles, Télérama, Mamie Nova, la Macif ou encore les Brioches Pasquier. A.L.P.

Aujourd’hui, les salariés sont tous sous le régime des 35 heures et la règle des quatre jours travaillés est appliquée pour 80% d’entre eux. Ce jour de repos supplémentaire, les salariés le choisissent en grande majorité : Sébastien a par exemple opté pour le mercredi, Jean [le prénom a été changé], comptable au siège depuis cinq ans, a préféré le lundi, une journée proposée dès la signature de son contrat.

Par contre, certains n’ont pas eu le même choix : « Les lundis, mercredis et vendredis, sont les jours les plus demandés », nous confie Susana Mendez, DRH de la société, qui poursuit :

« On ne peut pas répondre oui à tous. Donc on a imposé à certains les mardis et les jeudis, parce qu’il faut bien que ce soit fixe, sinon c’est ingérable. »

La cadre l’assure, si « nouvelles contingences personnelles » il y a, alors la journée peut être modifiée en cours d’année.

Dans les ateliers, pas le temps de souffler

Bien sûr, 35 heures sur quatre jours, il faut le dire, ce sont aussi des journées sans temps morts, 8h30-18h15, avec une pause d’une heure comme en témoigne Sébastien Antonio :

« Parfois c’est dur, car tout est concentré, et dans les ateliers les cadences peuvent être rudes, pas le temps de souffler, mais quand je sais que c’est pour passer une journée de plus chez moi, ça me va. »

Les 20% de salariés restants, qui travaillent 35 heures ou plus (avec des RTT) sur cinq jours, sont les cadres dirigeants, les commerciaux et les agents d’accueil.

Pour ces derniers, le poste a été divisé en deux, le premier effectuant l’ouverture, l’autre la fermeture. Cela a permis en outre d’élargir les horaires d’ouverture de l’accueil : au siège social d’Yprema, à Chennevière-sur-Marne par exemple, les bureaux sont ouverts de 7h à 19h.

Pour Ornella Champion, embauchée début janvier à l’accueil, de 11h à 19h, c’est un rythme tout à fait convenable. Et pour ce qui est de la politique des quatre jours, même si elle concerne ses collègues, elle n’y voit que du positif :

« Pour les seniors et les parents surtout, c’est très pratique. Et ça participe du bien-être en entreprise. »

Le casse-tête des jours fériés et des ponts

La mise en place de la semaine de quatre jours a pourtant connu quelques couacs lors de sa mise en place. Pour la gestion des jours fériés et les ponts, en particulier. Un « casse-tête » comme la qualifie Susana Mendez :

« Certains petits malins se débrouillaient pour placer leurs RTT avant ou après leur jour de congé : ils pouvaient avoir quasiment une semaine sans aller au travail. Les plannings d’exploitation étaient pleins de trous, c’était impossible. »

En accord avec les syndicats, un avenant a donc été signé pour changer de facto les jours fériés en RTT. Une pilule pas trop difficile à avaler pour Sébastien :

« Pour les jours fériés, c’est vrai, on a fait une concession. Mais il ne faut pas oublier qu’on est là pour bosser, pas pour partir en week-end. »

« Comme il pleut, j’ai pris du poulet »

Pour Yprema, il existe d’autres avantages, moins évident que le confort des salariés, à la semaine de quatre jours. Les dizaines de postes créés grâce à la Loi Robien ont facilité un système de turn-over dans tous les services : ainsi, les contrats de 35h sur quatre jours ne coûtent pas plus cher à l’employeur.

Pour combler les absences de postes en postes, l’entreprise a opté pour des postes polyvalents, qui comblent les trous, sur ses sites d’exploitation. Victor Lopez fut le premier employé de ce type sur le site de Lagny-sur-Marne :

« Quand j’ai commencé j’étais pilote d’installation : je surveillais les tapis, le tri du mâchefer. Puis on m’a proposé le poste polyvalent : ça m’a tout chamboulé. En tant qu’adjoint du chef, je me suis servi d’un ordi, ce qui n’est pas du tout mon truc, mais j’ai aussi été initié au chargement de la camelote dans les camions ou au nettoyage des machines... »

Cet ancien cuisinier, qui avait quitté la profession à cause de ses horaires impossibles, s’occupe même du barbecue hebdomadaire :

« Ce jeudi, comme il pleut, j’ai pris du poulet. »

Obligés de « travailler ensemble »

Dans les bureaux par contre, pas de poste polyvalent : le fonctionnement a été repensé en binômes et en trinômes. Chaque membre remplace l’autre, si besoin, pendant sa journée de congés. Le comptable, Jean Dupont, analyse :

« Comme ça, quoi qu’il arrive, notre interlocuteur a les réponses qu’il cherche auprès de notre binôme ou de notre chef de service. »

Selon Susana Mendez, ce fonctionnement a contribué à changer le « travailler ensemble » :

« Ça a encouragé la communication entre les salariés et, parce que chacun apprend de l’autre, ça a aussi favorisé la promotion en interne. »

Beaucoup de cadres de l’entreprise, comme Sébastien Antonio ont profité de cet ascenseur social. Ils le reconnaissent volontiers.

« On est un petit Google du recyclage »

Côté bénéfices, l’entreprise y a aussi gagné. Grâce au système de turn-over, les machines tournent 44 heures, contre 39 auparavant. Soit cinq heures de plus par semaines. « Ça nous a fait gagner en moyenne un mois de production par an, c’est énorme », estime Claude Prigent l’heureux PDG qui ne reviendrait sur sa décision pour rien au monde :

« On est un petit Google du recyclage : nos salariés, plus reposés, sont plus efficaces et donc on y gagne. On est la preuve que ça marche ! »

Même si Pierre Larrouturou, économiste de gauche et fervent avocat de la semaine à 32h, est convaincu que la réduction du temps de travail est la solution à une baisse durable du chômage, il n’en reste pas moins qu’elle est très rarement appliquée dans les entreprises, et encore moins dans les PME.

Un mystère pour le PDG d’Yprema :

« Moi, je suis prêt à payer une étude pour rencontrer toutes les entreprises qui utilisent les quatre jours, et montrer aux sceptiques que tout est possible. »

Avis aux amateurs.

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

 

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 22:54

 

 

Source : www.lemonde.fr

 

La chimie, c'est presque fini

M le magazine du Monde | 21.02.2014 à 14h34 • Mis à jour le 23.02.2014 à 10h36 | Par Elisa Mignot

 

  • Caroline Chenet a perdu son mari en 2011, intoxiqué chronique au benzène. Depuis, elle a repris la gestion de l'élevage de bovins à Saujon (Charente-Maritime) qu'elle aimerait passer en bio.
  • Crédits : Guillaume Riviere pour M Le magazine du Monde

 

 

 Paul François est un rescapé. En février 2012, cet homme a gagné un procès contre Monsanto. La firme de Creve Cœur, dans le Missouri, a été jugée responsable de son intoxication aiguë au Lasso, un herbicide qu'elle fabriquait. Mais le géant américain a fait appel. David et Goliath n'en ont pas terminé. En 2004, Paul François avait inhalé ce désherbant – depuis retiré de la vente – en nettoyant une cuve. Après des mois d'hospitalisation, il a gardé des séquelles neurologiques et doit aujourd'hui travailler à mi-temps. Le quinquagénaire n'a plus le droit de manipuler de pesticides. Pourtant, ses deux salariés le font encore. Y compris de la marque Monsanto.

"Une exploitation, c'est pire qu'un paquebot à faire changer d'orientation, explique le céréalier. Dès 1995, bien avant mon accident, nous avions déjà diminué de 30 % les produits phytosanitaires. Pas pour des raisons de santé ou d'environnement mais parce que les rendements diminuaient. On s'est aperçu que l'agriculture intensive était une fuite en avant." L'homme d'affaires agricole, smartphone vissé à l'oreille et mèche poivre et sel, déclare pratiquer désormais une "agriculture raisonnable".

Il entend diminuer encore l'usage de produits chimiques, pour faire des économies, mais pas s'en passer complètement. Même si ces "produits phytosanitaires" ont failli lui coûter la vie, il leur alloue encore aujourd'hui deux locaux dans sa grande et belle ferme de Bernac, en Charente. La terminologie censée être rassurante désigne les pesticides que le céréalier répand, plusieurs fois par an, sur les 260 hectares de son exploitation charentaise.

Par ailleurs, il est également président de Phyto-Victimes, une association créée en 2011 pour venir en aide aux agriculteurs victimes de pesticides. En janvier, il a même reçu la Légion d'honneur au nom de cet engagement. Paul François a opté pour le compromis.

 

 LENTE PRISE DE CONSCIENCE

Comme lui, les agriculteurs sont de plus en plus nombreux à remettre en question le tout-chimique. Qu'ils aient touché les limites économiques de cette pratique qui finit par appauvrir leurs sols ou qu'ils aient compris les dangers pour eux, leurs proches, l'environnement et le consommateur, de l'agriculture intensive. La prise de conscience est en marche. Mais elle est très lente. La France figure toujours parmi les premiers utilisateurs de produits phytosanitaires en Europe.

En octobre 2012, un an après la création de l'association Phyto-Victimes, Nicole Bonnefoy, sénatrice de Charente, rendait un rapport consacré à l'impact des pesticides sur l'environnement et la santé, assorti d'une longue liste de recommandations. Elle avait auditionné une centaine de personnes, dont Paul François. L'association et le rapport ont mis le département agricole sous les projecteurs. "On entend souvent qu'avant les produits étaient pires, qu'on avait moins de protections qu'aujourd'hui... Sans doute, déclare la sénatrice socialiste. Mais ils restent dangereux ! Il n'y a qu'à voir comment, dans les usines où on les fabrique, les salariés prennent d'infinies précautions. On ne peut donc pas continuer avec le tout-chimique."

Son rapport a été adopté à l'unanimité, en juillet 2013, par les membres de la mission parlementaire mais sa proposition de loi n'a pas été mise en discussion au Sénat. L'élue aux yeux charbonneux essaie donc, à coups d'amendements, de faire passer ses recommandations dans des projets sur la santé, la consommation, la biodiversité, l'agriculture... Plusieurs fois confrontée aux lobbys des grands fabricants de pesticides, qui répètent à l'envi que le lien entre certaines maladies et leurs produits n'est pas prouvé, la socialiste demande aussi que les décès et les accidents dus aux pesticides soient mieux comptabilisés.

 

« ON NE PEUT PAS FAIRE CONFIANCE AUX FIRMES »

Caroline Chenet est la vice-présidente de l'association Phyto-Victimes. Elle a vu mourir son mari à petit feu, emporté par une leucémie en 2011. Ils se sont battus pour la faire reconnaître comme maladie professionnelle par la Mutualité sociale agricole. Ce cancer résultait d'une intoxication chronique au benzène, un hydrocarbure qui sert d'adjuvant à nombre de pesticides. Dans sa maison aux volets lavande, Caroline Chenet boit du thé, mais pas de café – à cause de ses ulcères. La petite femme gironde, ancienne secrétaire, est récemment entrée à la chambre d'agriculture de Charente-Maritime pour mieux comprendre ce milieu agricole dont elle n'est pas issue. "On a traité leurs grands-pères de bouseux, eux ont été considérés comme plus modernes avec la mécanisation et la chimie, ils ont pu enfin participer à la société de progrès, voir leurs conditions de vie améliorées et aujourd'hui, le monde urbain commence à les traiter de pollueurs, d'assassins."

 

Caroline Chenet a perdu son mari en 2011, intoxiqué chronique au benzène. Depuis, elle a repris la gestion de l'élevage de bovins à Saujon (Charente-Maritime) qu'elle aimerait passer en bio.

 

Caroline Chenet aimerait passer son exploitation en bio, en appliquant des méthodes qu'elle apprend dans les livres. Mais elle doit reconnaître que, seule, à 48 ans, c'est compliqué. "Agriculture raisonnée, raisonnable, peu importent les noms, quels que soient les produits, on ne peut pas faire confiance aux firmes qui les fabriquent. Eux ne feront pas de produits raisonnables !", s'emporte-t-elle, avant d'ajouter : "Ça me rend malade à chaque fois que j'en utilise un."

Car elle aussi en emploie encore. Elle a pulvérisé cinq produits sur sa vigne l'année dernière – certes, c'est mieux que les douze des voisins – et loue une partie de ses terres à un céréalier qui traite plusieurs fois par récolte. Egalement éleveuse, elle fait paître ses 130 vaches à viande, à destination des hypermarchés Leclerc, dans ses marais bio et les nourrit avec de l'épeautre traité "de façon limitée". Pour sa consommation personnelle, elle a sa vache "qui n'a pas vu la couleur d'un pesticide" et son potager bio.

 

« LES AGRICULTEURS SONT ESCLAVES »

Chez tous les agriculteurs rencontrés, la conscience des dangers butte sans cesse sur la vie quotidienne, comme un gros caillou sous le soc d'une charrue. Leur situation économique, la pression des vendeurs de produits phytosanitaires, le regard des collègues, les aides financières favorisant les grosses exploitations, leur âge, et leur retraite proche, l'impossibilité de valoriser une production de meilleure qualité... en pétrifient plus d'un.

De plus, la conversion au bio leur fait craindre de nouvelles difficultés : travailler encore plus et perdre de l'argent, être débordé de paperasses administratives, assailli de contrôles. Ils sont donc quelques-uns à tâtonner vers une agriculture plus respectueuse de la nature. Impossible de déterminer leur nombre, car le ministère de l'agriculture les englobe dans les 95 % d'agriculteurs conventionnels (non bio) – qu'ils usent à tout-va des produits chimiques ou le moins possible.

"C'est bien sûr un mieux qu'il y ait des agriculteurs dans cet entre-deux", souligne Claude Bourguignon, microbiologiste et militant de longue date du bio. Avec sa femme Lydia, ils ont créé un laboratoire indépendant d'analyse des sols, et ensemble ils vont toute l'année de conférences en études de parcelles. "On explique aux agriculteurs qu'il faut se réapproprier les sols qu'ils violent depuis des années, qu'il faut réapprendre l'agronomie, enchaîne Lydia Bourguignon. Mais il faut aussi arrêter de penser que c'est un agriculteur qui, tout seul, dans l'adversité, peut faire changer les choses."

Eux, la sénatrice et les agriculteurs évoqueront tous le rôle essentiel du consommateur qui doit faire attention à ce qu'il achète et mange. "Il faut dire aussi que les agriculteurs sont esclaves, avance Claude Bourguignon. Ils sont coincés dans des systèmes, pieds et poings liés avec les firmes qui leur vendent semences, produits, et les coopératives qui achètent à des prix qu'elles ont fixés."


« POURQUOI NE DIT-ON PAS QUE L'ON PEUT FAIRE AUTREMENT ? »

Didier Sardin a assisté à une conférence que le couple Bourguignon donnait dans la région. C'était il y a plus de quinze ans. L'éleveur charentais s'intéresse depuis toujours à l'agronomie. Sur sa table de cuisine, il y a toute une littérature sur le sujet. "Nous autres, on a toujours été contre ce système, on a toujours fait comme les anciens, raconte le très grand homme à l'oeil curieux. Et puis on n'est pas des moutons, on a l'habitude de dire non à ce qu'on nous impose."

 

Didier et Madeleine Sardin élèvent 57 vaches laitières sur leur exploitation à Montemboeuf (Charente). Ils utilisent le minimum de produits phytosanitaires sans pour autant être en bio.

 

Au bout d'un chemin du village de Montemboeuf, avec sa femme Madeleine, ils élèvent 57 vaches laitières. Ils vendent à la seule coopérative du coin, Terra Lacta, précisent-ils en levant les yeux au ciel. Pas le choix. Mais ils ont toujours refusé les désinfectants pour les pis des vaches, achètent des produits naturels pour nettoyer leur matériel de trait, diminuent chaque année un peu plus leur usage de produits phytosanitaires et ne traitent pas leurs champs situés près du collège voisin. A la coopérative, leur production quasi bio est malgré tout mélangée à celle des autres.

Les Sardin ne seraient pas sortis de leur réserve s'ils n'avaient pas perdu leur fils, 28 ans, foudroyé en un mois par un cancer des testicules, en août 2013. Stéphane était mécanicien agricole, il entretenait et dépannait les pulvérisateurs, les tracteurs, les épandeurs, les désherbeurs. "Dans son camion, c'était infect, se souvient Madeleine. Les produits étaient juste à l'arrière, il n'y avait aucune ventilation. L'entreprise ne lui avait fourni que des gants, même pas une combinaison !" Leur fils se plaignait souvent de maux de tête et de ventre après des interventions.

Pour les Sardin, il est mort empoisonné par un cocktail de ces produits ingérés à la longue, par petites doses. "Ça fait trente ans que nous nous battons contre toute cette cochonnerie en évitant d'employer les produits et les semences des firmes, martèle Didier Sardin, son épaisse main crispée sur la toile cirée. Pourquoi ne dit-on pas que l'on peut faire autrement ?" Avec sa femme, ils n'ont jamais voulu pratiquer une agriculture 100 % biologique, trop de contraintes, pensent-ils. En plus, la coopérative ne fait pas de lait bio et ne le leur achètera pas plus cher. Et puis, au fond, ils n'y croient pas vraiment, au bio : "Entre les avions au-dessus de nos têtes qui larguent tout leur benzène et les voisins qui polluent les champs et les nappes phréatiques."


 "FALLAIT QUE JE CHANGE DE MÉTIER OU DE MÉTHODE"

Sophie Brard-Blanchard n'est pas d'accord. La viticultrice de 38 ans prend bien soin de la haie qui justement la sépare de ses voisins. En bio depuis plus de quatre décennies, son vignoble de 20 hectares à Boutiers-Saint-Trojan produit du cognac, du vin de pays et du pineau, tous certifiés AB (agriculture biologique). Malgré la proximité de vignerons moins scrupuleux, son vignoble contrôlé chaque année remplit tous les critères. La grande femme blonde aux yeux dorés ne cache pas le travail que cela demande. "Même après toutes ces années, il faut être très attentif et en recherche perpétuelle. Par exemple, il y a deux ans, le mildiou a anéanti les trois quarts de nos récoltes, malgré tous nos tests. On a dû tenir grâce à nos stocks. D'un autre côté, nous n'avons plus de problème d'insectes depuis trente-cinq ans !"

Pour elle qui a baigné dans le bio depuis son enfance, le respect de sa santé, de la nature et du consommateur est une évidence, une philosophie de vie. Elle était d'ailleurs complètement perdue dans son BTS viticulture et œnologie qui n'enseignait que le tout-chimique. Mais elle n'a jamais douté. "Et quand je vois tous les gens du milieu qui, autour de moi, ont des problèmes pour faire des enfants, je ne regrette vraiment rien."

Son père, Jacques Brard-Blanchard, était un pionnier. Le deuxième vigneron bio de Charente. Après des allergies respiratoires liées à un fongicide, le folpel, il a décidé de passer en bio, d'abord sur une parcelle puis sur toutes. On était au début des années 1970. "Fallait que je change de métier ou de méthode", raconte-t-il, casquette sur la tête, accoudé au bar en bois où lui et sa fille font de la vente directe. "Tous les anciens qui se sont mis au bio ont eu le déclic après des problèmes de santé avec les traitements", se souvient-il. Pourtant au début, rien n'était gagné. Son look barbe, cheveux longs et sa passion pour Le Métèque de Moustaki n'arrangeaient rien. "Tous les collègues attendaient que je me plante."


LE CANCER DE LA VESSIE, « MALADIE DES VITICULTEURS »
 

Jacky Ferrand était de ceux-là. Viticulteur de la même génération, près de Cognac lui aussi, il se baladait alors dans les vignes bio en se moquant des herbes et des fleurs qui poussaient entre les pieds. Lui a traité, produit plus et traité à nouveau. Il n'en est pas fier du tout. Triste ironie du sort, le même folpel est également accusé d'avoir causé la mort de son fils en 2011. Frédéric Ferrand avait 41 ans, deux enfants. Et un cancer de la vessie métastasé au niveau des os. "C'est la maladie des viticulteurs", lui avait-on dit dans le service de cancérologie de Bordeaux où il était soigné.

 

Jacky Ferrand, installé à Gondeville (Charente), a perdu son fils en 2011, des suites d'un cancer de la vessie, "la maladie des viticulteurs".

 

Là-bas, ils étaient une petite dizaine touchés par ce cancer. Jacky et Marie-Rose Ferrand revoient encore leur fils s'en aller vomir après avoir fait les mélanges pour traiter sa vigne. A sa mort, ils ont épluché, avec l'aide d'un médecin, vingt ans de factures de produits achetés pour leur exploitation : pas une n'était exempte de produit cancérigène. "Frédéric a grandi dans les vignes, c'était sa passion, c'est ce qui l'a maintenu en vie", murmure sa mère. C'est aussi ce qui l'a tué.

  • Elisa Mignot

 

 

Source : www.lemonde.fr

 

 

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 20:24

 

Source : www.bastamag.net

 

 

Grand projet inutile

« Si le pouvoir veut passer en force, ce sera la révolution à Notre Dame des Landes »

par Barnabé Binctin, Hervé Kempf 24 février 2014

 

 

 

 

 

 

Entre 20 000 et 50 000 manifestants, 520 tracteurs, des clowns, un bosquet vivant et quelques heurts. La manifestation organisée à Nantes le 22 février montre que la mobilisation contre le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes est toujours aussi importante. Et avant tout pacifique, malgré des affrontements avec les force de l’ordre. Les journalistes Hervé Kempf et Barnabé Binctin ont suivi cette journée. Un reportage en partenariat avec le site Reporterre.

Les opposants au projet d’aéroport sont venus en nombre, ce samedi, à 13 h, devant la préfecture de Loire-Atlantique. L’objet de la manifestation est de marquer fortement que la détermination ne faiblit pas, même si Notre Dame des Landes semble avoir disparu de l’actualité. La manifestation est préparée de longue date. Mais la veille, la préfecture a changé l’itinéraire prévu : « Considérant que plusieurs milliers de personnes sont attendues dans le cadre de cette manifestation, indiquait vendredi l’arrêté préfectoral, considérant que la présence de groupes violents a été observée dans des manifestations de ce type par le passé, à Nantes, et qu’ils ont causé dans des circonstances comparables de sérieux troubles à l’ordre public », l’autorité a interdit le centre ville – qui concentre les rues commerçantes.

Sous la pluie, on attend le début de la marche, qui va bientôt commencer.

 

Tout avance dans la bonne humeur. Couleurs, masques d’animaux, percussionnistes, clowns, et puis des milliers de personnes portant pancartes et le parapluie, qui n’est bientôt plus nécessaire.

 

Les politiques sont aussi venus, du moins ceux d’Europe Écologie les Verts et du Parti de gauche. Les comités locaux – de Bretagne, Basse-Normandie ou des Pays de la Loire – qui rappellent leur engagement de toujours contre l’aéroport, mais aussi les « nationaux », José Bové, Eva Joly, Pascal Durand, Yannick Jadot pour EELV, Jean-Luc Mélenchon et Martine Billard pour le Parti de gauche. Les deux ministres Duflot et Canfin sont absents ; la secrétaire nationale du parti, Emmanuelle Cosse explique : « Ils ont aussi le droit à des vacances. Mais ils auraient pu être là, ils ont manifesté leur soutien à cette manifestation ». Tout de même, n’y a-t-il pas un nouveau grand écart avec la participation au gouvernement ? « Non, c’est une position très assurée depuis le début, Notre-Dame-des-Landes fait partie de nos combats, tout comme Fessenheim. Et dans le cas de cet aéroport, c’est plus en local qu’en national que le projet est porté. Notre présence au gouvernement est importante, d’autant plus qu’il y a de plus en plus de socialistes qui ont marre de ce projet, même s’ils ne le disent pas ».

Pendant ce temps-là, alors que le long cortège entame sa déambulation au départ de la rue de Strasbourg, un des manifestants profite d’un arbre dans la ville pour y monter une cabane, symbole de la résistance sur la ZAD.

 

 

Les zadistes participent pleinement à l’animation de la manifestation, par des clowns qui égaient le cortège ou par d’autres qui mènent quelques tracteurs.

 

 

L’importance de la mobilisation tient à son caractère hétéroclite. On tombe sur quelques bonnets rouges, qui viennent eux aussi revendiquer leur opposition à l’aéroport de Notre Dame des Landes. Officiellement, l’organisation n’a pas pris de position ; mais une cinquantaine a fait le déplacement pour exprimer leur doute quant à la pertinence économique du projet : « Je suis convaincu qu’on peut développer l’actuel aéroport, et qu’il créera tout autant d’emplois », explique Dider, bretonnisation officielle du prénom Didier, « reconnue par l’office de langue bretonne ! ». Il est là pour défendre le pays breton, dont Nantes fait partie, selon sa philosophie du « vivre, décider et travailler au pays ».

 

 

L’ambiance est détendue, rythmée par les batucadas – percussions – ou quelques simagrées de clowns activistes. Les gens viennent en famille, comme Émilie avec son bébé de 15 mois, Mano. « Il n’y a pas de problèmes d’insécurité, c’est convivial. Et puis Mano était prédestiné : il est né deux jours après la grande manifestation de réoccupation, en novembre 2012… » sourit-elle.

 

 

A l’avant de la manifestation, la bonne humeur règne. Le porte-parole de l’Acipa (Association citoyenne intercommunale des populations concernées par le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes), Julien Durand, est tout sourire : « Ce jour est dans la continuité des manifestations de réoccupation, fin 2012, ou de la chaîne humaine, au printemps 2013 : autour de 40 000 personnes sont venues dire non à l’aéroport. Et ça se passe dans la bonne humeur, avec des familles. Il n’est pas question, après une telle détermination, que le pouvoir revienne occuper le terrain. Si le pouvoir veut passer en force, ce sera la révolution à Notre Dame des Landes. »

Le cortège a passé le pont Haudaudine, arrive sur l’ile de Nantes, prend à droite. Tracteurs, passants en K-way et portant pancartes, musiciens et clowns avancent gaiement sous le ciel bleu dans les quartiers modernes et froids de l’ïle. Des jeunes crient « Non non non au mariage PS-Vinci, Avortement pour l’aéroport ! ».

Au volant de son tracteur, Sylvain Fresneau, le paysan dont l’exploitation est située au centre de la Zad, est ravi : « Nous sommes 520 tracteurs ! Plus qu’il n’y en a jamais eu ».

Mais la fin de la troupe arrive déjà. Un grand vide apparait derrière les derniers manifestants. Les derniers ? C’est déjà fini ? Non. Mais à l’arrière, le gros des manifestants s’est arrêté au niveau de l’hôpital de l’Hôtel Dieu.

Car au croisement du Commerce, la situation a dégénéré, dès quinze heures. Face aux murs de grillages soutenus par plusieurs blindés de police, des petits groupes envoient des projectiles en verre, parfois quelques pavés. Les forces de l’ordre répondent par des gaz lacrymogènes et des canons à eau, projetés abondamment. L’air est saturé, et la manifestation se fige face au spectacle de ces heurts.

 

 

Un peu plus loin sur le Cours Roosevelt, c’est un abri-bus et des toilettes publiques qui prennent feu, pendant que les affrontements redoublent d’intensité, au choc des déflagrations de grenades assourdissantes. Les pavés du tramway sont enlevés pour servir de projectiles. Les gendarmes, retranchés derrière leurs grilles, ne bronchent pas, répliquant par des tirs de grenades – en l’air et non en tir tendu – et par le canon à eau. Il s’agit de ne pas blesser les milliers de manifestants pacifiques qui sont encore sur le cours Franklin Roosevelt.

 

 

Pendant plus de trois heures, cette bataille rangée, en plein centre-ville, va concentrer l’attention des manifestants, éteignant quelque peu l’élan collectif.

Marco, 55 ans, vit à Nantes depuis plus de trente ans ; il souligne l’importance du dispositif policier pour l’occasion : « J’ai fait beaucoup de manifestations dans ma vie ici, mais c’est la première fois que je vois le centre-ville bloqué pour l’occasion. Un tel déploiement policier ressemble un peu à de la provocation ».

Gérard (prénom changé) est venu de la Zad, où il vit depuis plus d’un an. Il observe les affrontements de près, comme des centaines de manifestants qui restent là en discutant. « Cela dessert la lutte, pas tant pour l’image que cela donne que par ce que cela va empêcher de faire. que cela va donner une mauvaise image. En fait, près de 250 "antifas" sont descendus de partout pour affronter la police. Mais il y a tellement de haine en France, du fait des politiques menées, que l’on comprend qu’elle s’exprime ».

A deux pas des détonations et des nuages de gaz lacrymogènes, certains manifestants tentent d’attirer l’attention sur le message premier de la manifestation : ainsi Mireille a-t-elle paré son manteau de feuilles et fleurs diverses : « Je suis un bosquet vivant pour rendre hommage au bocage ». A quelques mètres des violences urbaines, la danse collective de ces hommes et femmes déguisés en arbustes a forcément quelque chose de surréaliste…

 

 

Ambiance étrange : pendant que l’affrontement se fixe au coin du cours Franklin Roosevelt et de l’avenue Olivier de Clisson, à l’arrière, tout le monde discute tranquillement, au son des tirs de grenades lacrymogènes. Autour d’une fanfare, des jeunes dansent joyeusement.

 

 

Le maire de Notre Dame des Landes, Jean-Paul Naud, est venu, ceint de son écharpe tricolore, avec plusieurs conseillers municipaux. « C’est une belle manifestation, dit-il. Dommage qu’il y ait tous ces cagoulés. Mais cela n’empêche pas que je maintienne mon opposition à l’aéroport. J’ai bon espoir qu’on trouve une porte de sortie juridique par les recours sur la loi sur l’eau. » Il explique qu’il ne s’agit pas d’être "contre le progrès", mais d’arrêter de consommer des terres agricoles. « On vient d’adopter notre plan local d’urbanisme. On va construire sur douze hectares, mais on ne touche pas aux zones agricoles : ce sera sur des friches ou au sein des lotissements ».

 

 

Sur la place de Petite Hollande, longée par de longues files de tracteurs, les gens discutent autour de la petite scène. Elle aurait dû être au centre de l’attention pour les prises de parole, mais celles-ci se perdent dans l’indifférence. Le gros de l’attention et des discussions portent sur l’affrontement qui se poursuit, presque comme un jeu, à quelques centaines de mètres.

La station de tramway est incendiée et brûle.

 

 

L’après-midi s’achève et le froid revient. La foule commence à se disperser, les tracteurs s’en vont, la musique se tait. Les terrasses de café sont remplies, et les gens discutent au son des grenades lacrymogènes. Qui se rapprochent, car les gendarmes ont commencé à avancer et font reculer les fauteurs de trouble. Les incidents s’achèvent vers vingt heures. Laissant dans leur sillage une agence immobilière de Vinci dévastée, un poste de police peinturluré, plusieurs vitrines de magasins brisés, deux engins de chantier et une voiture incendiés.

 

 

Des événements qui laissent un goût amer au très grand nombre des manifestants – plus de trente mille – qui venaient signifier leur détermination dans la gaieté et la non-violence. L’autre visage de la journée aura imprimé une image plus forte : celle d’une violence qui ne demande qu’à surgir. En réaction à la violence de l’État, sans doute, mais qui dessert à court terme le mouvement de lutte contre l’aéroport de Notre Dame des Landes.

 

Hervé Kempf et Barnabé Binctin

Reportage publié en partenariat avec Reporterre

Photos : Laurent Guizard/Basta ! (une), Barnabé Binctin/Reporterre, Hervé Kempf/Reporterre, et dépavage, Twitter.

 


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Source : www.bastamag.net

 

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 20:03

 

Source : www.lepoint.fr

Les Espagnols dénoncent un "coup d'État contre la démocratie"

 

Le Point.fr - Publié le 23/02/2014 à 16:10 - Modifié le 23/02/2014 à 16:24

Des milliers de manifestants ont défilé dans les rues de Madrid, fustigeant aussi bien les coupes budgétaires que les projets de lois sur l'avortement.

 

Manifestation de milliers d'Espagnols à Madrid le 23 février 2014. Manifestation de milliers d'Espagnols à Madrid le 23 février 2014. © Pedro Armestre / AFP

Des milliers de personnes ont défilé dimanche à Madrid pour dénoncer pèle-mêle les coupes budgétaires et les projets de loi sur l'avortement, ou la sécurité du gouvernement conservateur espagnol, clamant contre un "coup d'État porté contre la démocratie". Au son des tambours et des sifflets, les manifestants ont marqué le jour anniversaire de la tentative de coup d'État du 23 février 1981 contre la jeune démocratie espagnole en rassemblant des revendications très diverses derrière une banderole où était écrit "Pour nos droits et libertés. Contre le coup à la démocratie. Non à la répression".

"Aujourd'hui, les citoyens veulent dénoncer le fait que la société vit un nouveau coup d'État contre la démocratie", expliquaient les dizaines d'associations et de plateformes citoyennes qui avaient convoqué le défilé dans un manifeste. "Mais cette fois-ci, il n'est pas militaire mais financier." "Ils réservent le pire aux travailleurs et à la classe moyenne et gardent le meilleur pour eux", dénonçait, à propos du gouvernement conservateur de Mariano Rajoy, Pedro Miguel, chômeur depuis un mois du secteur de la construction. À 59 ans, il estime n'avoir "aucune possibilité de trouver" un emploi dans ce pays frappé par un taux chômage de 26 %.

"Il y a de plus en plus de coupes", expliquait Ruth Pascual, une employée de grande surface de 38 ans venue manifester avec sa fille de huit ans, toutes deux portant les pulls verts marqués du mot d'ordre "École publique de tous pour tous", devenus emblématiques de la défense de l'éducation publique.

De multiples revendications

"Liberté d'expression", "Il ne nous feront pas taire", "Loi sur la sécurité.. de Rajoy comme Franco" : les pancartes étaient aussi multiples que les revendications.

Les manifestants dénonçaient notamment le programme d'austérité sans précédent lancé en 2012 par le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy, et visant à économiser 150 milliards d'euros d'ici la fin de cette année, ainsi que ses projets de loi très controversés sur la "protection de la sécurité citoyenne" ou la suppression du droit à l'avortement (ne le permettant que dans certaines circonstances).

Portant des casquettes rouges marquées du logo de Coca Cola, les employés des usines d'embouteillages de la célèbre boisson étaient également présents pour dénoncer la fermeture prévue de quatre usines de Coca-Cola Iberian Partners, unique entreprise d'embouteillage de la multinationale en Espagne, qui menace près de 1 200 emplois, selon les syndicats.

 

Source : www.lepoint.fr

 


 

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 19:18

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

Explicateur 23/02/2014 à 18h29
La prochaine guerre ? La Crimée, enjeu entre la Russie et l’Ukraine
Pierre Haski | Cofondateur Rue89

 

 

Il est temps de réviser votre histoire et votre géographie avant le prochain conflit. La Crimée, ça vous dit quelque chose ? La « guerre de Crimée », un vague souvenir scolaire ? Yalta, un peu plus ? Sébastopol, autre chose qu’une station de métro parisien ?

La Crimée et ses 2 millions d’habitants ont tout pour devenir le nouveau point chaud de la crise ukrainienne, après l’euphorie qui a suivi l’issue du carnage de Kiev ces derniers jours.

Vous avez aimé l’Ossétie du Sud, voici le tour de la Crimée. L’Ossétie du Sud, c’est cette région de Géorgie dont la majorité des habitants sont russes, et qui, après avoir unilatéralement fait sécession, a été l’enjeu de la brève guerre russo-géorgienne de 2008. Elle reste aujourd’hui séparée de la Géorgie et occupée par l’armée russe.

La Crimée peut potentiellement suivre la même voie. C’est la seule partie de l’Ukraine à avoir une population majoritairement russe, et la flotte russe de la Mer noire y est basée. C’est peu dire que les développements politiques à Kiev sont vécus de manière particulièrement dramatique en Crimée.

Des milices russes en formation

Cette photo (tweetée dimanche par Paul Sonne, un journaliste du Wall Street Journal sur place) de Russes de Simferopol, capitale de la Crimée, s’inscrivant pour rejoindre des milices de protection contre les opposants pro-européens désormais aux commandes à Kiev, ressemble à s’y méprendre aux veillées d’armes nationalistes qui ont conduit aux désastres dans les Balkans et ailleurs.

 

Voir l'image sur Twitter

Will Russia abet or restrain? @JoeWSJ: Ominous @PaulSonne: Russian-speaking Crimeans signing up to brigades

 

François Heisbourg, président de l’Institut international des études stratégiques (IISS) de Londres, pose la bonne question en retweetant la photo : « La Russie soutiendra-t-elle, ou calmera-t-elle » cet embryon de guerre civile en Crimée ? C’est à Moscou, en effet, que tout se décidera.

Sus aux « fascistes »

On voit dans cette vidéo, filmée également ces derniers jours en Crimée, à quel point les tensions sont vives. Un meeting de l’opposition pro-européenne est attaqué par des Russes aux cris de « fascistes » et de maigres forces de police tentent de protéger les Ukrainiens des coups et des insultes.

On les voit également brûler un drapeau américain, en écho aux accusations de Moscou contre les Occidentaux qui attiseraient le feu à Kiev.

 

 

Rassemblement de l’opposition ukrainienne attaquée aux cris de « fascistes » par des pro-Russes

Un coup d’œil à la carte permet de comprendre l’enjeu. Depuis le début de la crise ukrainienne, les commentateurs décrivent un pays clivé coupé en deux, entre une région ouest qui regarde vers l’Europe, et une région orientale qui lorgne vers la Russie.

On en oubliait presque la Crimée, cette péninsule au sud de l’Ukraine, bordant la Mer noire, la seule région dont plus de 60% de la population est d’origine russe, et qui abrite la flotte russe.

 


Carte de la population de l’Ukraine : la Crimée est la seule région majoritairement russe (« Atlas des peuples d’Europe centrale » de J. Sellier et A. Sellier, éd. La Découverte, 2002)

 

Plongée dans l’histoire

Le passage par l’histoire est nécessaire pour comprendre la situation. La Crimée est dans l’orbite de l’empire russe depuis le XVIIIe siècle après avoir fait partie de l’empire ottoman.

 


Victoire française à Malakoff durant la guerre de Crimée, par Horace Vernet, 1858 (Wikimedia Commons)

 

Mais la Russie doit faire face, de 1853 à 1856, à la « guerre de Crimée », considérée par les historiens comme la première guerre « moderne », qui vit l’empire russe s’opposer aux armées ottomane, britannique et de la France napoléonienne. Guerre extrêmement meurtrière (la France perdit 90 000 hommes) mais gagnée par la coalition hétéroclite anti-Russie.

Au XIXe siècle, l’aristocratie russe fait de cette région au climat agréable, dotée de vignobles et de stations balnéaires comme la célèbre Yalta (où se retrouvèrent Churchill, Roosevelt et Staline en 1945), son centre de villégiature.

Glamour pour les aristos russes, la Crimée a une histoire tragique pour ses habitants. Sous l’empire, sous les Soviets, face aux Nazis, cette région a payé le prix fort.

En 1954, pour le 300e anniversaire du rattachement de l’Ukraine à la Russie, le numéro un soviétique, Nikita Khrouchtchev, décide de placer la Crimée au sein de la République socialiste soviétique d’Ukraine plutôt qu’à celle de Russie. Une décision qui pèse lourd dans l’équation actuelle.

Personne, alors, ne pouvait imaginer un jour l’URSS éclater, et encore moins l’Ukraine accéder à une indépendance dont l’histoire l’a plusieurs fois privée.

Accès aux mers chaudes

Depuis l’éclatement de l’Union soviétique en 1991, et l’accession de ses républiques à l’indépendance, la Crimée fait l’objet d’accords spécifiques entre Kiev et Moscou, dont l’un, prévu pour vingt ans, jusqu’en 2017, permet la présence de la flotte russe de la Mer noire au port de Sébastopol.

C’est l’accès aux mers chaudes qui est en jeu, et Moscou ne peut pas accepter de perdre ce point d’ancrage historique. En 2008, au moment du conflit en Géorgie voisine, le site spécialisé DeDefensa.org écrivait à propos de la Crimée et du port militaire de Sébastopol :

« Il est difficile de trouver un casus belli plus significatif, avec toutes les implications possibles, dans un pays (l’Ukraine) lui-même soumis aux mêmes tensions antagonistes. »

C’est le message diffusé ces derniers jours, notamment dans les confidences d’un officiel russe au Financial Times, soulignant qu’en cas d’éclatement de l’Ukraine (entre ses parties est et ouest), la Russie interviendrait militairement en Crimée.

La naissance de milices russes en Crimée pourrait lui en offrir le prétexte si elle en voulait un, en s’abritant derrière une opinion majoritaire comme dans les Républiques d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, dont les indépendances unilatérales vis-à-vis de la Géorgie ne sont reconnues que par... la Russie.

N’oublions pas les Tatars de Crimée

On en oublierait presque les Tatars, peuple aux origines turques et mongoles, composé en grande partie de musulmans, qui a subi un sort impitoyable, d’abord à l’époque impériale où il fut poussé à l’émigration, puis de la part de Staline après la Seconde Guerre mondiale, qui reprochait aux Tatars de Crimée d’avoir favorablement accueilli l’armée allemande en 1941.

Staline décréta que les Tatars devaient tous être expulsés de Crimée, et ils le furent, déportés en Asie centrale dans des conditions telles que près de la moitié d’entre eux moururent de faim ou de maladie.

A la mort de Staline, ils furent autorisés à revenir au compte-gouttes en Crimée, mais n’y constituent aujourd’hui que quelque 10% de la population. Leur langue n’est toujours pas reconnue (seuls l’ukrainien et le russe sont langues officielles) et la spoliation économique qu’ils ont subie n’a jamais été réparée.

Pas de surprise, dès lors, à ce qu’ils veuillent, eux aussi, se faire entendre à la faveur des bouleversements que connaît actuellement l’Ukraine. Ce week-end, eux aussi organisaient un rassemblement à Simferopol, pour que les Tatars ne soient pas, une fois de plus, les victimes d’une histoire qui s’est remise en mouvement.

 

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Rally of Crimean Tatars in Simferopol.

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 19:01

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

En images 23/02/2014 à 08h46
Les surprises de la carte du monde selon les connexions à Internet
Pierre Haski | Cofondateur Rue89

 

 

C’est une autre façon de regarder le monde : la taille des pays en fonction de la part de leur population connectée à Internet.

En rouge vif, les pays à plus de 80% de population connectée : sans surprise, on retrouve l’Europe du Nord, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, le Canada et la Corée du Sud. La France appartient au deuxième groupe, entre 60 et 80%, tout comme les Etats-Unis.

Plus intéressant, observez le contraste entre la Chine et l’Inde, les deux pays à plus d’un milliard d’habitants chacun, mais qui n’ont pas mis le même effort d’équipement au numérique. La Chine est bien plus « grosse » que l’Inde selon ce critère. Bien plus énorme aussi que son autre voisine, la Russie.

Idem en Afrique, la partie centrale du continent est quasiment absente, et, au Maghreb, regardez les différences entre le Maroc, l’Algérie et la Tunisie : l’Algérie est minuscule comparée à ses deux voisins bien plus connectés.

La carte, signée par Mark Graham et Stefano De Sabbata, deux chercheurs de l’Oxford Internet Institute, est basée sur des chiffres de la Banque mondiale de 2011. A suivre avec les réactualisations, ce baromètre pertinent d’un outil de modernité.

 


Le monde vu par la pénétration d’Internet (@geoplace & @maps4thought)

 

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

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