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15 juillet 2014 2 15 /07 /juillet /2014 17:37

 

Source : www.bastamag.net

 

 

 

Conflit d’intérêt

L’ex-ministre des Finances du Luxembourg embauché par la Deutsche Bank

par Agnès Rousseaux 15 juillet 2014

 

 

 

 

 

Luc Frieden, ancien ministre des Finances du Luxembourg, vient de l’annoncer ce 10 juillet : il met fin à sa carrière politique, pour devenir à la rentrée vice-président de la Deutsche Bank, la plus grosse banque allemande. Actuellement député, il a été ministre sans interruption pendant quinze ans, de 1998 à 2013. D’abord ministre de la Justice, du Budget et de la Défense, puis ministre des Finances de 2009 à décembre 2013.

Cette reconversion dans la finance suscite de nombreuses critiques au Luxembourg. Ses détracteurs estiment que le code de déontologie n’a pas été respecté. Peut-on être recruté par une grande banque privée moins d’un an après avoir quitté le gouvernement, et après quinze ans passés au poste de ministre du Budget... d’un paradis fiscal ? Au sein de la Deutsche Bank, Luc Frieden sera chargé de conseiller le comité de direction sur les affaires européennes et internationales, et sur les réglementations. Réglementations qu’il a lui-même contribué à mettre en œuvre. « Ces cinq dernières années, il a représenté le Luxembourg lors du Conseil européen des ministres des Finances (ECOFIN et de l’Eurogroupe) et a participé à la stabilisation de la zone euro et la mise en forme de l’union bancaire européenne », précise dans un communiqué la Deutsche Bank, qui se réjouit de sa « vaste expérience dans les affaires gouvernementales et la finance internationale » ! En 2013, Luc Frieden a également présidé le Conseil des gouverneurs du FMI et de la Banque mondiale.

Longtemps pressenti pour succéder à Jean-Claude Juncker à la tête du gouvernement luxembourgeois, Luc Frieden, membre de la droite démocrate-chrétienne, a été écarté du fait de fait d’accusations sur son rôle dans différentes « affaires ». Il était soupçonné d’avoir favorisé Qatar Airways dans le cadre de la vente de parts de la compagnie aérienne publique Cargolux [1], et d’avoir détenu des informations concernant une série d’attentats au Luxembourg entre 1984 et 1986 (dossier Bommeleeër, lire ici).

En tant que ministre, il a préparé un plan d’action pour « renforcer l’attractivité de la place financière luxembourgeoise », estimant que « le développement de la place financière, épine dorsale de l’économie luxembourgeoise, est une priorité ». Après quinze années de bons et loyaux services au sein du gouvernement dirigé par Jean-Claude Juncker, nul doute que ce grand ami de la finance aura encore l’oreille attentive du futur président de la Commission européenne...

A lire aussi :
- En Suisse :
Nomination controversée : un ex-dirigeant d’UBS devient responsable de l’autorité de contrôle suisse
- En France :
Nomination controversée d’une responsable de la banque UBS à l’Autorité des marchés financiers

 

 


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Source : www.bastamag.net

 

 

 

 

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15 juillet 2014 2 15 /07 /juillet /2014 17:31

 

Source : www.bastamag.net

 

 

Droits humains

« Le pouvoir exorbitant des multinationales peut être l’un des nouveaux visages du despotisme »

par Ivan du Roy, Olivier Petitjean 15 juillet 2014

 

 

 

 

 

Une loi sur le « devoir de vigilance » des multinationales est en préparation. L’objectif : rendre responsables les grands groupes français des atteintes aux droits humains et à l’environnement qui pourraient être constatées dans leurs filiales et leurs chaînes d’approvisionnement. Soutenue par des députés du PS, écologistes, du Front de gauche, et par plusieurs organisations de défense des droits humains, la proposition de loi est combattue par le Medef. « Si les entreprises sont aussi vertueuses qu’elles le prétendent, cela doit pouvoir se vérifier », estime son initiateur, le député socialiste Dominique Potier. Entretien.

Dominique Potier est député socialiste de la 5e circonscription de Meurthe-et-Moselle depuis les élections de juin 2012, remportées face à Nadine Morano. Agriculteur-exploitant de profession, il a signé l’« Appel des 100 » députés socialistes pour plus d’emploi et de justice sociale. Avec ses collègues Danielle Auroi (EELV) et Philippe Noguès (PS), il est à l’origine d’une proposition de loi sur le « devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre » (lire le texte de loi).

« Il s’agit de responsabiliser ainsi les sociétés transnationales afin d’empêcher la survenance de drames en France et à l’étranger et d’obtenir des réparations pour les victimes en cas de dommages portant atteinte aux droits humains et à l’environnement », prévoit la proposition de loi. Très soutenue par les ONG de défense des droits humains, elle est combattue par le Medef. Dominique Potier et ses collègues espèrent que le projet sera débattu d’ici la fin de l’année, malgré les réserves du gouvernement et la réticence du ministère de l’Économie et des Finances.

Basta ! : Travailler sur la responsabilité des multinationales est plutôt rare dans l’Hémicycle. Pourquoi vous êtes-vous saisi de ce sujet ?

Dominique Potier : C’est par fidélité à mes engagements passés au sein de la mouvance du « christianisme social » de la gauche. Avant d’être député, j’ai été militant au sein du Mouvement rural de Jeunesse chrétienne (MRJC) et du Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD). Lors des élections de 2012, j’avais signé le « Pacte pour une terre solidaire », une plateforme de 16 propositions élaborées par le CCFD (à consulter ici), qui portent notamment sur la lutte contre les paradis fiscaux, la souveraineté alimentaire, la protection des migrants et sur la responsabilisation des multinationales en matière de droits de l’homme. Suite à mon élection, j’ai repris contact avec eux pour donner effet à ces propositions, ce qui nous a conduit à cibler la question de la responsabilité des sociétés mères vis-à-vis de leurs filiales et sous-traitants.

Vous êtes l’un des seuls hommes politiques français à vous être exprimé publiquement sur l’effondrement du Rana Plaza au Bangladesh, en avril 2013, ou le recours au travail esclave dans la chaîne d’approvisionnement en crevettes de Carrefour en Thaïlande (juin 2014) [1]

La semaine où j’ai demandé au groupe PS de poser une question orale sur le Rana Plaza, c’était la troisième fois que nous abordions dans l’Hémicycle l’affaire des affrontements entre supporters du PSG et forces de l’ordre sur l’esplanade du Trocadéro [en mai 2013, ndlr]. C’est une illustration de l’insoutenable légèreté de notre vie politique, qui fait d’un incident un fait majeur, et qui ne perçoit pas les véritables scandales, révélateurs d’un monde à la dérive, comme le Rana Plaza.

Sur le plan médiatique, en revanche, il y a eu, au moment du drame, puis à l’occasion de son premier anniversaire il y a deux mois, énormément de reportages, souvent de bonne qualité, sur le secteur textile au Bangladesh. Je ne pense pas qu’il reste beaucoup de Français qui n’aient pas été informés, à un moment ou un autre, sur les conditions de travail dramatiques et les salaires de misère des ouvrières qui fabriquent des vêtements pour les grandes marques occidentales. Ces reportages ont parfois fait le lien avec notre proposition de loi, mais pas suffisamment. Or celle-ci constitue bien un début de réponse à de telles situations, puisqu’elle vise à responsabiliser les donneurs d’ordres et les sociétés mères vis-à-vis des atteintes aux droits fondamentaux à l’autre extrémité de leurs chaînes d’approvisionnement. Nous avions d’ailleurs commencé à travailler sur cette proposition de loi avant l’effondrement du Rana Plaza : le problème avait déjà été identifié, notamment par les ONG, mais ce drame a servi de révélateur.

Comment expliquer ce silence des politiques alors que trois marques françaises – Carrefour, Auchan et Camaïeu – étaient impliquées dans le drame du Rana Plaza ?

Cela renvoie à une question fondamentale : pourquoi la gauche ne s’investit-elle plus sur ces sujets ? Pourquoi ne s’intéresse-t-elle plus aux plus fragiles, ici ou ailleurs ? Nous avons le même problème quand il s’agit d’évoquer le quart-monde en France. En octobre dernier, Claude Bartolone a organisé une journée sur la pauvreté à l’Assemblée nationale, mais très peu de députés se sont déplacés pour écouter les militants et les personnes précaire venus témoigner. La gauche semble avoir oublié ce qui était l’un de ses moteurs d’indignation et de révolte les plus fondamentaux. Avec quelques autres, j’ai fondé un cercle politique inspiré de la pensée des philosophes Emmanuel Mounier, Paul Ricœur et Emmanuel Levinas appelé « Esprit civique ». Nous venons de rédiger un manifeste qui évoque ce « décrochage » de la gauche vis-à-vis des plus vulnérables.

L’autre facteur qui explique ce silence est le sentiment d’impuissance, dès lors que nous semblons avoir accepté la vision dominante de l’ordre international, faite de compétition et de mondialisation à marche forcée. Nous acceptons d’emblée le terrain que nous impose le néolibéralisme, comme s’il n’existait pas d’autre logique possible. On se contente de mettre en avant une notion assez floue et assez naïve de « patriotisme économique ». La réponse à la mondialisation, ce n’est pas de ne penser qu’à soi. En ce début de 21ème siècle la question n’est pas de savoir si nous sommes pour ou contre l’entreprise ou la mondialisation, l’enjeu est de rendre ces dynamiques « vivables » autour d’un concept étonnamment moderne, celui de la loyauté.

Il y a aussi une incapacité de penser l’Europe et le monde au sein de la gauche, qui va de pair avec la perte d’attention pour les plus fragiles. Qui parle de Lampedusa aujourd’hui ? Pas le Parti socialiste. De même, on réduit les crédits alloués à l’Agence française de développement (AFD). Certes, il y a beaucoup à dire sur le fonctionnement de l’AFD. Nous avons d’ailleurs introduit dans la loi Canfin des dispositions qui pourraient amener des changements importants. Mais dans une optique de stratégie de coopération avec l’Afrique sub-saharienne, ces crédits auraient dû être doublés en réponse au défi de l’immigration.

En quoi la proposition de loi que vous avez présentée contribue-t-elle à « civiliser » la mondialisation ? Les grandes entreprises françaises prétendent toutes qu’elles promeuvent déjà les droits de l’homme, et qu’elles ont déjà mis en place toutes les procédures pour veiller à leur respect.

La proposition de loi ne vise pas ceux qui font bien, mais ceux qui trichent. Il s’agit de pouvoir identifier les fautes de ceux qui ne respectent pas les règles, et de les éliminer du jeu. Et pour cela, il faut rendre possible une sanction judiciaire. Il suffit de penser à ce qui se passe sur la route. Vous trouverez toujours des gens pour affirmer qu’il n’y a nul besoin de radars et de contrôles, et que l’on peut faire confiance aux automobilistes pour se respecter les uns les autres. La réalité, c’est qu’il y a bien des chauffards, et qu’il faut pouvoir les identifier. Si les entreprises sont aussi vertueuses qu’elles le prétendent, cela doit pouvoir se vérifier. Lorsqu’elles affirment vendre du bœuf, on doit pouvoir vérifier que ce n’est pas du cheval. Il en va de même lorsqu’elles assurent offrir des conditions de travail dignes à leurs fournisseurs.

Plus concrètement, la proposition de loi vise à instaurer un « devoir de vigilance » des grandes entreprises quant à leur responsabilité sociale et environnementale. Ce devoir de vigilance pourra être mis en cause en cas d’atteinte grave et continue aux droits fondamentaux. Contrairement à ce que prétend un certain patronat, il ne s’agit pas de multiplier les procès pour des motifs futiles ou des accidents inopinés. En cas de problème grave – le Rana Plaza ou le scandale de la crevette thaïlandaise de Carrefour en sont des exemples –, le juge pourra demander à l’entreprise de prouver qu’elle a effectivement mis en œuvre son devoir de vigilance. En cas de manquement, elle pourra être reconnue fautive.

La mise en œuvre de ce devoir de vigilance prend différentes formes. Suite au drame du Rana Plaza par exemple, plusieurs entreprises se sont associées à un « Accord sur la sécurité des usines » [lire notre article], qui inclut des engagements concrets de la part des donneurs d’ordre. Une entreprise qui souscrit à ce type d’accord et le met effectivement en œuvre prouvera alors qu’elle a exercé son devoir de vigilance. C’est ce qu’avait souligné l’économiste Armand Hatchuel dans Le Monde : plutôt que de devoir se justifier individuellement, les entreprises seront encouragées à s’acquitter de leurs obligations en adhérant à des formes de sécurité collective par filière ou par pays.

Il existe déjà des dispositifs similaires dans le domaine de la santé et la sécurité au travail : l’employeur a un devoir d’assurer la sécurité de ses employés, sous peine, en cas de manquement grave, que la faute inexcusable de l’employeur soit reconnue. S’agit-il du même principe ?

Tout à fait. Nous avons travaillé avec des juristes, et tous ont signalé l’existence de principes similaires dans d’autres domaines ou dans d’autres législations nationales. Sur le plan philosophique, l’essentiel du droit français et européen s’est bâti sur la défense de l’individu contre le despotisme. D’où l’importance du droit de propriété et des droits individuels en général. Aujourd’hui, le monde a changé, le danger a changé de visage. Le pouvoir exorbitant des multinationales, associé à une grande irresponsabilité juridique, peut être l’un de ces nouveaux visages. Il nous faut donc inventer un nouveau droit à l’échelle internationale qui puisse protéger les populations – des groupes et pas seulement des individus – face à la toute-puissance des multinationales. On retrouve le même enjeu à propos de la souveraineté alimentaire et la propriété des terres, ou encore du droit du vivant. Il s’agit de réinventer un droit qui protège nos biens communs à l’échelle de la planète, pour éviter leur privatisation, leur fragmentation. Cela doit être un combat majeur de la gauche.

Ceux qui critiquent la proposition de loi estiment qu’elle va nuire à la compétitivité des entreprises françaises au niveau international, particulièrement si la France avance seule, et qu’il serait plus pertinent d’agir à l’échelon européen. Que leur répondez-vous ?

L’Europe avance sous l’impulsion des nations qui la composent. L’histoire montre qu’il peut y avoir des cercles vertueux, notamment si l’on tient compte du poids des opinions publiques. On peut imaginer que l’Allemagne, l’Angleterre, l’Espagne suivent le mouvement, et que nous obtenions une majorité à l’échelle communautaire, comme cela a été le cas sur le travail détaché. Mais nous entendons toujours les mêmes discours, selon lesquels nos entreprises vont perdre en compétitivité dès lors que leurs concurrents anglo-saxons ou asiatiques ne seront pas soumis aux mêmes règles. C’est le contraire qui est vrai. Pour diverses raisons – plus grande sensibilité à l’opinion publique, héritage des traditions humanistes dans la culture des dirigeants –, les entreprises françaises et européennes font un peu mieux que leurs compétiteurs en terme de respect des droits fondamentaux. Ou font au moins semblant de se préoccuper de leurs impacts. Il est possible d’en faire une arme. La France et ses entreprises pourraient dire : « Nous sommes dans la mondialisation, en respectant des règles qui tirent la mondialisation vers le haut, et nous avons un peu d’avance dans ce domaine. »

Les représentants des grandes entreprises ne cachent pas leur opposition résolue à la proposition de loi, et semblent avoir l’oreille d’une partie du gouvernement. Où en est-on politiquement quant à la possibilité de son adoption ?

C’est une loi qui peut rassembler la majorité. Elle est soutenue par quatre groupes parlementaires. Ce qui est une bonne nouvelle dans la situation actuelle. Nous pensons que son examen par l’Assemblée pourra avoir lieu d’ici la fin de l’année.

Cette proposition de loi ne vient-elle pas à contre-courant au vu de la politique économique actuelle du gouvernement, qui multiplie les concessions aux entreprises ? Nous avons l’impression que celui-ci attend tout de « l’entreprise » (conçue en un sens très réducteur), au détriment de cette « autre économie » qui fait partie de la tradition de la gauche : coopératives, économie sociale et solidaire, associations, services publics…

Il faut nuancer. Ce gouvernement a fait adopter plusieurs lois qui constituent des avancées très importantes pour cette autre économie dont vous parlez. Il suffit de penser aux lois Hamon sur la consommation et sur l’économie sociale et solidaire, ou à la loi d’avenir agricole. Malheureusement, ce n’est pas ce qui est le plus audible aujourd’hui. On entend surtout un discours anti-impôts, un discours sur la compétition. On prend ainsi le risque de la régression sur le plan culturel. Tout ceci est en train de ruiner l’espérance des gens, comme l’ont montré les élections européennes.

En même temps qu’un effort de rigueur sur les finances publiques dans la mesure où c’était nécessaire, la gauche aurait pu aussi chercher à mobiliser les forces citoyennes du pays, celles de l’économie sociale et solidaire, du milieu associatif, et même de certains milieux d’entrepreneurs. Beaucoup de Français sont déjà dans des choix de vie de ce type. Moi-même, je suis membre d’une coopérative agricole. Il y a une prise de conscience grandissante de l’impasse du modèle consumériste actuel. Mais au lieu de demander à cette France innovante de se positionner en acteurs de changement, nous essayons vainement de montrer que nous sommes les « bons élèves » de l’austérité, sans chercher à mettre en avant un modèle alternatif de développement.

Le Conseil des droits de l’homme de l’Onu vient de lancer un processus pour élaborer des normes internationales contraignantes sur la responsabilité des multinationales en matière de droits humains. Que pensez-vous de la position de la France qui, comme toute l’Union européenne, a voté contre ce processus ?

Je n’ai pas connaissance de tous les termes du débat, mais je suis a priori favorable à un tel processus, et je souhaite que la position de la France ne soit pas définitive.

Propos recueillis par Olivier Petitjean et Ivan du Roy

Photo : CC Peter Kirkeskov Rasmussen

 

Notes

[1Lire la tribune de Dominique Potier et d’Edouard Martin dans Libération, et notre article Commerce de la crevette : des sous-traitants de Carrefour accusés de recourir au travail esclave.


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Source : www.bastamag.net

 

 

 

 

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15 juillet 2014 2 15 /07 /juillet /2014 17:09

 

 

Source : www.marianne.net


 

Traité transatlantique : opération transparence et... foutage de gueule !
Mardi 15 Juillet 2014 à 05:00

 

Alexandre Coste
Journaliste à Marianne chargé de l'animation de la communauté des Mariannautes En savoir plus sur cet auteur

 

La Commission européenne a lancé un simulacre d’opération transparence pour faire croire au bon peuple que les négociations sur le traité transatlantique ne se déroulent pas à huis clos mais au vu et au su de tous. Mais, sur la forme comme sur le fond, l'opération en question relève plus de la très mauvaise blague…

 

Markus Schreiber/AP/SIPA
Markus Schreiber/AP/SIPA
Lundi 14 juillet a commencé le sixième tour des négociations portant sur le traité transatlantique. Ces discussions, rappelons-le, risquent d'avoir d'importantes conséquences sur la vie de tous les citoyens européens et américains. Mais afin de nous « prouver » qu'elles se déroulent dans la plus totale transparence et non pas à huis clos et largement influencées par les lobbies, la Commission européenne a publié un résumé des concertations qui ont eu lieu jusqu’ici. Avoir enfin connaissance de l’état d’avancement sur chacun des points couverts par le traité transatlantique (pesticides, santé, produits chimiques, etc.), voilà une bonne nouvelle !
 
Mais en fait d’informations, la feuille de chou qui est téléchargeable sur le site de la Commission européenne, est une insulte à tous les citoyens qui demandent que les négociations sur le traité transatlantique soient menées dans le respect le plus simple de la démocratie. Prenons par exemple le paragraphe concernant les règles sanitaires et phytosanitaires. C’est une critique qui revient régulièrement chez les opposants au TTIP. Ceux-ci craignent en effet que les normes qui nous protègent actuellement ne finissent par être alignées sur les standards américains. Que nous dit à ce sujet le document gentiment fourni par la Commission européenne ? Une « compréhension commune de la plupart des éléments a été atteinte », bien que certains aspects aient encore besoin de « discussions importantes. » Dans la perspective de préparer le terrain à un accord écrit, les négociateurs américains et européens ont « intensifié » leurs discussions. Nous voici bien éclairés…

Le reste est à l’avenant. Vous souhaitez savoir ce qui s’est dit jusqu’ici au sujet des pesticides ? « Les deux partis ont eu des échanges sur de possibles zones de coopération spécifiques. » La seule surprise vient peut-être de la protection des investisseurs, sujet à l’origine de la possible création de tribunaux « indépendants » qui permettraient à des entreprises de poursuivre des Etats en cas de manque à gagner (par exemple un fabriquant de tabac qui poursuivrait un pays ayant interdit la cigarette) : « Les discussions sont suspendues en attendant l’issue de la consultation publique de l’Union Européenne. » Les peuples seraient consultés sur au moins un point ? Première nouvelle !

 

Mais l’« opération transparence » de la Commission européenne ne s’arrête pas là. Vendredi 11 juillet, des négociateurs européens  ont donné rendez-vous à la « plèbe » sur Twitter afin de répondre aux questions  de ceux qui seraient angoissés à l’idée de l’existence d’une vaste zone de libre-échange entre l’Europe et les Etats-Unis, ces gens que l’on tourne en dérision parce qu’ils craignent de trouver un jour du poulet au chlore dans leurs assiettes.

S’il peut paraître étrange d’opter pour un réseau social qui limite chaque message à 140 caractères lorsque l’on propose un débat sur un sujet aussi important et complexe que le traité transatlantique, la teneur des échanges justifie rapidement ce choix : la limitation imposée par Twitter permet de faire abstraction de toute forme d’argumentation. Par exemple, un twittos se basant sur des documents ayant fuités demande si les plans pour importer du pétrole brut des Etats-Unis ne risquent pas d’aggraver la crise climatique. Réponse : « Non. La diversification des sources d’énergie améliorera notre sécurité énergétique. » Circulez !

Plus étonnant, les négociateurs font preuve d’un certain cynisme lorsqu’ils répondent aux internautes, ce qui confère une désagréable impression de condescendance à la plupart des échanges. Lorsqu’un twittos évoque les réunions à huis clos, il obtient pour réponse : « Oui, il existe un bunker spécial dans lequel nous enfermons les négociateurs, et ensuite ils négocient. Nous ne leur donnons pas de nourriture jusqu’à ce qu’ils aient trouvé un terrain d’entente. » Ou encore, un peu plus loin dans la conversation : « En effet, le commerce est la source de tous les maux. Vilain marché unique européen ! Oh, attendez… » Espérons que la prochaine fois - de nouvelles sessions de « discussion » étant prévues sur Twitter -, les négociateurs se comportent un peu moins comme des « enfant irritables » pour reprendre l’expression d’un internaute visiblement choqué par le ton employé..

 

 

Source : www.marianne.net

 

 

 

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15 juillet 2014 2 15 /07 /juillet /2014 16:36

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/raoul-marc-jennar

 

 

Il y a 225 ans. Hier et aujourd'hui. Chassons l'Imposteur !

14 juillet 1789, le peuple de Paris s’empare de la Bastille, symbole du despotisme monarchique. La Révolution française commence. Même si une analyse plus fine pousse à voir ses prémisses dans la convocation des Etats-Généraux et la rédaction des cahiers de doléance, l’acte révolutionnaire, c’est le surgissement populaire qui ne va plus s’arrêter et conduira à l’abolition des privilèges, à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, à la proclamation de la République le 21 septembre 1792 – une date jamais célébrée – à l’approbation de la Constitution de l’an I, le 24 juin 1793. Menacée de l’intérieur par les royalistes et de l’extérieur par une coalition de six monarchies européennes, la jeune République survivra au prix d’immenses souffrances. On connaît la suite : le 9 Thermidor et le 18 Brumaire mettront fin à l’idéal égalitaire proclamé en 1793. Le Directoire puis l’Empire marqueront un recul sensible des exigences laïques, sociales et démocratiques.

En 1989, lors du bicentenaire de la Révolution, rien ne fut négligé par le pouvoir PS d’alors pour réécrire l’Histoire. Réduire l’événement à ce qui convenait le mieux à un PS transformé par le tournant de 1983 : magnifier la séquence bourgeoise de 1789-1792 et diaboliser la figure de Robespierre en faisant de celui qui avait le premier compris les limites de l’égalité formelle proclamée en 1789 le précurseur de Staline et de Pol Pot. Robespierre exprime une conscience aigüe de la permanence de la lutte des classes. C’est pour cela que toute une littérature en a fait un monstre sanguinaire.

Et aujourd’hui ?  Après avoir subi les attaques violentes d’une droite sans complexe, le peuple de France subit celles, plus violentes encore, d’une droite complexée qui n’ose pas encore dire son vrai nom et qui aveugle encore beaucoup tant l’abandon total de l’espérance socialiste par le PS suscite l’incrédulité et l’incompréhension.

Depuis 1983, ce sont des personnalités du PS qui ont été à la pointe de toutes les régressions démocratiques et sociales : le tournant de la rigueur encore appelé « plan Delors », la dérégulation financière organisée par Fabius, l’adhésion enthousiaste aux accords de l’OMC par Rocard, Cresson et Bérégovoy, les privatisations massives de Jospin et Strauss-Kahn,  l’adhésion de Hollande en 2005 et en 2012 aux atteintes à la souveraineté populaire par les traités européens, l’ANI que tous les présidents depuis Pompidou avaient refusé au patronat, les dizaines de milliards offerts sans contrepartie aux plus importantes des entreprises, le soutien des parlementaires PS nationaux et européens à des accords internationaux négociés dans le plus grand secret et qui ont tous pour objectif de soumettre les peuples au pouvoir du secteur privé...

Lorsque le peuple s’est opposé à leur volonté, comme en 2005, ils ont commis ce crime contre la démocratie d’ignorer la volonté du peuple.

« Le monde a changé et il faut s’adapter aux réalités nouvelles » nous disent les artisans de ce monde de plus en plus éloigné des idéaux socialistes. Car ce monde ouvert à la concurrence de tous contre tous,  ce monde de plus en plus inégalitaire, qui démantèle les uns après les autres les acquis démocratiques et sociaux, ils l’ont voulu, ils l’ont négocié, ils l’ont décidé. La social-démocratie française a été à la pointe de la mondialisation néo-libérale avec des Delors, des Pascal Lamy, des Strauss-Kahn, des Moscovici. En France, en Europe et dans le monde, ces gens-là ont donné aux firmes privées tout ce qu’elles demandaient. Ils ont créé les conditions de la dictature de la finance mondiale. Et ils continuent dans les négociations de l’Accord sur les Services (ACS ou TISA) et du Partenariat transatlantique (GMT ou TAFTA). Pour dissimuler leurs méfaits, ils usent du secret et du mensonge devenus de véritables méthodes de gouvernement.

Depuis 1983, face à la volonté de revanche et à la rapacité sans limites du monde des affaires et de la finance, la force politique historiquement en charge des plus faibles et de ceux qui ne vivent que de leur travail a déserté. Pire, elle a trahi. Ceux qui se prétendent les héritiers de Jaurès sont des imposteurs. Et le premier d’entre eux est à l’Elysée.

 « Il a été élu par le peuple », me dira-t-on. Certes, mais sur la base d’un engagement global qu’il renie chaque jour depuis le lendemain de son élection. Si son statut est légal, il a perdu toute légitimité. Au regard de son engagement, il y a forfaiture morale et politique. Il est devenu l’Imposteur.

Combien de temps encore allons-nous supporter cela ? Sommes-nous volontaires pour la servitude ou volontaires pour la révolte ?  

Aujourd’hui, pour commémorer le 14 juillet 1789, on amuse la galerie avec un défilé militaire sur les Champs-Elysées. Alors que la liberté et l’égalité réclament qu’on se souvienne du peuple insurgé, de sa volonté de briser les chaînes du despotisme et de l’obscurantisme, de son refus de la fatalité, de sa soif de justice. 

Ne serait-il pas plus approprié, pour honorer la mémoire de nos grands aînés de 1789, de 1793, de 1830, de 1848, de 1871, de 1936 et de la Résistance, de réclamer la révocation de celui qui incarne au plus haut niveau cette trahison des idéaux démocratiques et sociaux ?

Pour être dignes de nos aînés et des idéaux qu’ils ont portés dans le sang et les larmes, en ce 14 juillet, exigeons le départ de l’Imposteur ! Et préparons une VIe République, une République sociale, digne des ambitions de 1793.

Raoul Marc JENNAR

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/raoul-marc-jennar

 

 


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14 juillet 2014 1 14 /07 /juillet /2014 21:10

 

Source : cadtm.org

CADTM

 

BNP Paribas sanctionnée par les autorités des États-Unis :il faut aller plus loin

13 juillet par Eric Toussaint , Patrick Saurin

 

 


Fin juin 2014, afin d’éviter une condamnation, BNP Paribas a reconnu sa culpabilité et a passé un accord avec la justice des États-Unis. BNP Paribas accepte de payer 8,9 milliards $ d’amende.

Dix réflexions et une conclusion

1 - Il est possible de faire payer d’importantes amendes à une banque. Dans cette affaire, BNP Paribas déclare elle-même que l’amende, bien qu’elle soit d’un montant élevé, n’affectera pas la bonne santé et la solidité de la banque ! |1|

2 - Alors que les gouvernants se complaisent à affirmer qu’ils ne peuvent pas prendre des mesures à l’échelle nationale ou internationale, les États-Unis imposent seuls contre 99 % des États membres des Nations Unies des sanctions contre Cuba |2|. C’est notamment en vertu de ces sanctions inacceptables que les autorités des États-Unis ont obtenu de BNP Paribas le paiement de l’amende en question. Qu’attendent d’autres États pour prendre unilatéralement à leur tour des sanctions contre des banques ou d’autres entreprises, pour de bonnes raisons cette fois ?

3 - Qu’attendent des États comme la France, la Belgique ou l’Espagne pour sanctionner et condamner l’Union des Banques Suisses (= la principale banque helvétique) ou HSBC (= la première banque britannique) pour l’organisation de l’évasion fiscale à grande échelle ? L’implication de ces deux banques dans l’évasion de grandes fortunes est avérée |3| mais, les autorités des pays mentionnés plus haut ne s’en prennent pas directement à UBS, à HSBC malgré les preuves dont elles disposent |4|.

4 - Qu’attendent les États français et belge, actionnaires majoritaires de la banque Dexia SA pour lui interdire de mener des activités en Israël via sa filiale Otzar Hashilton Hamekomi  ? Il est avéré que cette filiale - Dexia Israël - finance des colonies illégales dans les territoires palestiniens occupés par Israël |5|. Richard Falk, le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la « situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », a présenté un rapport le 29 octobre 2013 à l’Assemblée générale des Nations Unies |6|. Celui-ci est accablant pour Dexia SA et ses actionnaires : la Belgique et la France. Constatant le financement des colonies illégales dans les territoires palestiniens par Dexia SA à travers sa filiale Dexia Israël, le Rapporteur de l’ONU exhorte ces deux États à mettre fin aux activités de la banque dans les territoires occupés, à sanctionner les responsables au sein de Dexia, et souligne la possibilité pour la Cour pénale internationale (CPI) d’enquêter sur l’implication du personnel belge et français de Dexia dans des crimes de guerre. Le rapport affirme également que la Belgique et la France pourraient être tenues pour responsables des dommages causés par Dexia SA et condamnées au versement de compensations et de dommages de guerre.

5 - D’autres affaires concernent BNP Paribas. Un rapport interne de l’Inspection générale de BNP Paribas |7|, daté du 25 octobre 2011, explique qu’entre 2008 et 2011, BNP Paribas Wealth Management à Monaco |8| a reçu et encaissé plusieurs dizaines de milliers de chèques provenant de quatre pays africains (Gabon, Sénégal, Burkina Faso et Madagascar). L’enquête préliminaire a montré qu’en réalité, 21 pays africains étaient concernés. Ces chèques, émis par des ressortissants français, étaient détournés à leur insu vers des comptes à Monaco, le but de cette manœuvre étant d’échapper au contrôle des changes ainsi qu’au fisc, peut-être aussi de blanchir l’argent du crime organisé. Que vont faire les autorités compétentes ? L’instruction entamée par le procureur général de Monaco aboutira-t-elle à une condamnation ?
Que font les autorités françaises et belges (l’Etat belge est un des actionnaires principaux de BNP Paribas avec 10 % du capital) par rapport au scandale des filiales de BNP Paribas dans les paradis fiscaux et des centres offshores ? En 2011, elles étaient au nombre de 219 ! |9|

Jusqu’ici, BNP Paribas s’est chaque fois tirée d’affaire. C’est le cas, en Australie, où les autorités ont versé carrément dans la farce : elles ont réprimandé BNP Paribas pour mauvaise conduite potentielle (« potential misconduct », sic !) concernant la manipulation des taux d’intérêt interbancaire australien de 2007 à 2010. BNP Paribas s’est contenté de licencier des traders et a déclaré qu’elle ferait un don d’un million de dollars australiens pour promouvoir la littérature sur la bonne gouvernance financière |10|.

En France, on suivra de près la plainte déposée le 3 mars 2014 par 400 emprunteurs contre une filiale de BNP-Paribas. Celle-ci leur a octroyé des prêts immobiliers en francs suisses dont les remboursements en euros se sont accrus avec la dépréciation de la monnaie européenne face à la monnaie helvétique. Les plaignants réclament 40 millions d’euros de dommages et intérêts.

6 - Apparemment, les autorités des États-Unis frappent les banques là où cela fait mal : au portefeuille. Mais en réalité les amendes qu’elles imposent aux banques ne permettent pas de mettre fin à leurs comportements délictueux, voire criminels. Aux États-Unis comme en Europe et dans la plupart des pays de la planète, les autorités appliquent la doctrine « Too Big To Jail » (Trop Grandes pour être emprisonnées ou même condamnées). Pour éviter d’être condamnées et afin de pouvoir continuer leurs activités, il suffit jusqu’ici aux banques de payer une amende. Eric Holder, procureur général des États-Unis, interrogé en juin 2013 par une commission du Sénat de son pays, a résumé clairement le fond de la doctrine « Trop grandes pour être condamnées ». Il a déclaré en substance à propos des grandes banques que « ces institutions sont si grandes qu’il est difficile de les poursuivre en justice, et si on le faisait, on se rendrait compte qu’effectivement, les inculper pour activités criminelles pourrait avoir des répercussions négatives pour l’économie nationale, voire mondiale ». Cela démontre, s’il en était besoin, que les banques ne sont pas des justiciables comme les autres, mais des entités auxquelles les autorités permettent de se soustraire à la loi. Cette exception s’explique par la puissance des banques et les liens étroits qu’elles entretiennent avec les pouvoirs en place.
En effet, bien que les autorités des États-Unis ont démontré en 2012 qu’HSBC avait blanchi 661 millions de dollars pour les cartels de la drogue du Mexique et de Colombie, elle a pu poursuivre ses activités, aucun de ses dirigeants ou de ses employés n’a été condamné, HSBC s’est contentée de payer une amende.

Longue est la liste des arrangements financiers pour payer des amendes : il est prouvé que Goldman Sachs, Deutsche Bank, Barclays ont manipulé le marché de l’électricité en Californie. Il leur a suffi de payer une amende pour se soustraire à des poursuites. UBS et Crédit Suisse ont admis avoir donné illégalement les moyens à leurs clients aux États-Unis de dissimuler leur fortune. Il leur a suffit de payer une amende pour être exonérées elles aussi.

Goldman Sachs (5e banque aux États-Unis) fait l’objet en 2014 d’une plainte pour fraude déposée par la SEC (l’autorité de surveillance des marchés financiers aux États-Unis) concernant Abacus 2007-AC1, un produit structuré synthétique commercialisé par Goldman Sachs en 2007. Selon la SEC, Goldman Sachs a menti aux acheteurs de ce produit concernant le rôle joué par le hedge fund Paulson & Co. La banque a affirmé que ce hedge fund était lui-même acheteur, alors qu’en réalité il pariait contre elle. Les pertes des acheteurs ont été considérables, à la mesure des gains énormes de Goldman Sachs et de Paulson & Co. On s’attend également à une simple amende. 

JPMorgan (1re banque des États-Unis) a payé en janvier 2014 une amende de 2,6 milliards de dollars pour éviter une condamnation dans l’affaire Bernard Madoff. Rappelons que ce filou de Wall Street a réussi à arnaquer des clients fortunés pour plus de 50 milliards de dollars et a été condamné à 150 ans de prison en 2009. Les autorités ont la preuve que JPMorgan avait de très sérieux doutes sur l’honnêteté de Madoff dès 1994. Elles accusaient la banque de ne pas les avoir informées et d’avoir laissé Madoff mener comme si de rien n’était son business profitable. Il faut dire que la banque prélevait des commissions sur les opérations effectuées par Madoff qui était un de ses clients mais qu’elle refusait d’investir ses propres fonds dans les affaires de celui-ci. JPMorgan n’a informé les autorités des doutes à l’égard de Madoff qu’après son arrestation… 

Au cours des années 2010-2013, les autorités des États-Unis ont également passé des accords avec les banques pour leur éviter une condamnation en justice dans le scandale des crédits hypothécaires et des expulsions illégales de logement. Il a suffi aux banques de payer une simple amende. Depuis l’éclatement de la crise en 2006-2007, plus de 14 millions de familles ont été expulsées de leur logement. Au moins 500 000 l’ont été de manière illégale. En tout, depuis 2008, JPMorgan, Bank of America, Citigroup, Wells Fargo, Goldman Sachs et Morgan Stanley (ce sont les principales banques des États-Unis) ont accepté de payer environ 86 milliards $ pour échapper à des condamnations en matière de crédits hypothécaires |11|. Bank of America a accepté des amendes s’élevant à environ 44 milliards $, JPMorgan, 26,4 milliards $, Well Fargo, 9,5 Milliards $, Citigroup, 4,7 milliards $, Goldman Sachs, un peu moins d’un milliard $ et Morgan Stanley, 330 millions $. Pour donner un élément de comparaison, rien que pour l’année 2012, les bénéfices nets des 6 banques concernées se sont élevés à 59,5 milliards $ (après paiement des amendes de cette année-là bien sûr). Elles ont fait mieux en 2013. Après avoir défalqué de leurs profits 18 milliards $ pour faire face aux amendes de la même année, leurs bénéfices nets ont progressé de 21 % en 2013 pour atteindre 74 milliards $ |12|. Cela montre que ces amendes présentées au public comme exceptionnellement lourdes n’empêchent pas les banquiers de sabrer le champagne pendant que des millions de familles sont victimes de leurs abus. Malgré les preuves des escroqueries et des abus auxquelles les banques se sont livrées, malgré les millions de victimes dans les classes populaires, aucune charge criminelle n’a été retenue à leur encontre, aucune arrestation n’a été réalisée. Les accords qui sont intervenus entre les autorités et les banques exemptent ces dernières de leur responsabilité à répondre financièrement ou légalement d’accusations similaires survenues au cours de la période antérieure. Comble d’ignominie, Jamie Dimon, le patron de JPMorgan (qui a promis en 2013 de payer une amende de 13 milliards $), a vu, cette année-là, sa rémunération augmenter de 74 % pour atteindre 20 millions $ !

7 - Il n’y a pas qu’aux États-Unis que les banques bénéficient d’un climat d’impunité. En France, le gouvernement vient de faire voter en procédure accélérée par le Sénat (le 13 mai dernier) et par l’Assemblée nationale (le 10 juillet) un projet de loi d’amnistie bancaire qui valide rétroactivement les contrats d’emprunts toxiques illégaux car dépourvus de taux effectif global (TEG) |13| ou possédant un TEG inexact en privant les collectivités impactés de tout recours. Mais non content d’exonérer les banques prêteuses, le gouvernement français se refuse à attaquer les grandes banques, étrangères pour la plupart, qui ont accompagné les banques prêteuses dans ces montages spéculatifs qui ont spolié les collectivités locales.
Ces dernières années, les banques françaises ont fait souscrire aux collectivités françaises des emprunts toxiques spéculatifs |14|. Or, pendant qu’elles faisaient prendre aux collectivités des risques démesurés, ces banques prenaient bien soin de s’assurer contre leur propre risque en souscrivant des assurances auprès de banques de contrepartie sous la forme de contrats de swap. Or, dans la mesure où ces contrats d’emprunt sont considérés non conformes à la réglementation, les instruments de couverture |15| souscrits par les banques prêteuses auprès des banques de contrepartie doivent être en conséquence déclarés eux aussi illégaux. En effet, les instruments de couverture sont affectés par contrecoup du vice affectant les contrats d’emprunts auxquels ils sont adossés et liés de manière consubstantielle. Si l’on considère non conforme à la réglementation le contrat relatif à l’instrument de couverture (passé entre la banque prêteuse et la banque de contrepartie), le mécanisme du dénouement des instruments de couverture ne peut s’appliquer de la façon prévue par le contrat. La banque de contrepartie ne peut se prévaloir d’une demande de versement de flux financiers relatifs à une opération non conforme, il lui appartient de supporter l’intégralité des coûts de débouclage de l’opération |16|.

En France, les banques de contrepartie doivent être tenues co-responsables des montages délictueux auquel elles ont participé avec les banques prêteuses. Ces banques de contrepartie, parmi lesquelles on compte notamment Goldman Sachs, JPMorgan, Morgan Stanley, HSBC, Deutsche Bank, UBS, Crédit Suisse, etc., portent une lourde responsabilité dans la crise financière qui a débuté en 2007. Les faire payer ne serait que justice. Les autorités françaises doivent prendre sans tarder des mesures contraignantes pour que ces grandes banques assument enfin leurs responsabilités.

8 - Les crimes commis par de grandes banques privées ces dernières années sont d’une gravité extrême : escroquerie à l’encontre des clients (notamment dans la ventre de produits structurés et de crédit hypothécaires), des (petits) actionnaires et des actionnaires publics ; organisation systématique de l’évasion fiscale à très grande échelle ; manipulation en bande organisée des taux d’intérêts ; manipulation en bande organisée des marchés de change ; faux et usage de faux ; délits d’initiés ; destructions de preuves ; enrichissement abusif ; manipulation du marché physique des matières premières et des aliments ; blanchiment d’argent du crime organisé ; complicité dans des crimes de guerre… |17| Face aux crimes commis par les grandes banques, il faut mettre en pratique une solution radicale : retirer la licence bancaire aux banques coupables de crimes, bannir définitivement certaines de leurs activités, poursuivre en justice les dirigeants et les grands actionnaires. Il faut aussi obtenir des réparations de la part des dirigeants et des grands actionnaires. Il faut interdire aux banques de réaliser toute transaction avec un paradis fiscal. Le non respect de l’interdiction doit être assorti de sanctions très lourdes jusqu’au retrait de la licence bancaire et le paiement de lourdes amendes (une amende équivalente au montant de la transaction réalisée). Il faut restaurer la responsabilité illimitée des grands actionnaires. En cas de faillite, le coût de la faillite doit pouvoir être récupéré sur l’ensemble du patrimoine des actionnaires (personnes physiques ou entreprises/personne morale). Les dettes publiques accumulées en raison des sauvetages bancaires tels qu’ils ont été réalisés sont typiquement des dettes illégitimes, elles doivent être annulées.

9 - Le métier de la banque est trop essentiel à la société pour être laissé dans les mains du secteur privé, il est nécessaire de socialiser le secteur bancaire dans son intégralité et de le placer sous contrôle citoyen. Socialiser le secteur bancaire signifie :

  • l’expropriation sans indemnité des grands actionnaires (les petits actionnaires seront indemnisés) ;
  • l’octroi au secteur public du monopole de l’activité bancaire à une exception près : l’existence d’un secteur bancaire coopératif de petite taille ;
  • la création d’un service public de l’épargne, du crédit et de l’investissement structuré en un réseau de petites implantations proches des citoyens ;
  • la définition avec participation citoyenne d’une charte sur les objectifs à atteindre et sur les missions à poursuivre ;
  • la transparence (de la comptabilité) des comptes qui doivent être présentés au public de manière compréhensible. 

10 - La socialisation du secteur bancaire et son intégration aux services publics permettront :

  • de soustraire les citoyens et les pouvoirs publics de l’emprise des marchés financiers ;
  • de mettre un terme aux pratiques spéculatives en dédiant les activités financières au service de l’économie réelle ;
  • de financer les projets des citoyens et des pouvoirs publics ;
  • de dédier l’activité bancaire au bien commun avec entre autres missions celle de faciliter la transition d’une économie capitaliste, productiviste à une économie sociale et écologique.

Conclusion : À l’instar des autorités américaines, les autorités politiques des autres États doivent à leur tour prendre des mesures unilatérales contre les banques qui ont commis des exactions et des malversations. Si les mandataires politiques continuent à se montrer passifs en faisant preuve d’une indulgence coupable à l’égard des banques, il appartient aux citoyens de s’emparer du débat et d’exiger de ceux qui les représentent de prendre les mesures qui s’imposent.

Notes

|1| C’est ce qu’a déclaré Jean-Laurent Bonnafé, directeur général de BNP Paribas (voir le Huffington Post – Le Monde du 1 juillet 2014 http://www.huffingtonpost.fr/2014/07/01/bnp-paribas-action-amende-etats-unis-bourse_n_5546557.html ; Le Soir, « BNP Paribas n’est pas inquiété par les sanctions américaines », 2 juillet 2014 ;

|2| ’L’assemblée générale des Nations unies a voté mardi 29 octobre 2013 pour la 22e fois en faveur d’une résolution qui condamne l’embargo américain contre Cuba, en vigueur depuis plus de 50 ans. Comme l’an dernier, 188 pays ont voté en faveur de cette résolution. Seuls les États-Unis et son allié israélien ont voté contre. La Micronésie, les Iles Marshall et Palau, trois nations du Pacifique qui votent habituellement comme les États-Unis, se sont abstenues cette année. ’Les dégâts humains qu’engendre le ’blocus’ sont incalculables. Il provoque des souffrances et constitue une violation massive, flagrante et systématique des droits de l’homme’, a déploré Bruno Rodriguez, le ministre cubain des Affaires étrangères. Cuba a dû subir des pertes de plus de 1 000 milliards de dollars à cause de l’embargo depuis sa mise en place en 1962 sous l’administration de John F. Kennedy, selon Bruno Rodriguez.’ RTBF, ’L’embargo américain contre Cuba condamné par l’assemblée générale de l’ONU’, 29 octobre 2013, http://www.rtbf.be/info/monde/detail_l-embargo-americain-contre-cuba-condamne-l-assemblee-generale-de-l-onu?id=8124177
Voir le texte de la résolution adoptée par l’ONU : http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/68/L.6&referer=http://www.un.org/en/ga/info/meetings/68schedule.shtml&Lang=F
Voir le compte-rendu réalisé par le département de l’information de l’ONU : http://www.un.org/News/fr-press/docs/2013/AG11445.doc.htm A noter que les autorités françaises et belges (l’Etat belge possède 10 % des actions de BNP Paribas France) n’ont même pas profité de l’affaire soulevée par l’amende payée par BNP Paribas pour dénoncer l’embargo exercé par les États-Unis contre Cuba.

|3| Sur l’organisation de l’évasion fiscale par UBS, lire Eric Toussaint, ’De grandes banques organisent massivement l’évasion fiscale à l’échelle internationale’ 11 mai 2014, http://cadtm.org/De-grandes-banques-organisent ; sur HSBC et l’évasion fiscale voir Eric Toussaint, ’HSBC : une banque au lourd passé et au présent sulfureux’, 21 avril 2014, http://cadtm.org/HSBC-une-banque-au-lourd-passe-et

|4| Les autorités des Etats-Unis et d’Allemagne, pour lesquelles nous n’avons aucune sympathie, ont quant à elles mis à l’amende UBS et le Crédit Suisse dans des affaires d’évasion fiscale.

|5| Voir Robin Delobel, Eric Toussaint et Renaud Vivien, ’Dexia complice de violations très graves des droits humains dans les territoires occupés par Israël’, 29 mai 2014, http://cadtm.org/Dexia-complice-de-violations-tres

|6| Lire ce rapport sur : http://www.intal.be/files/20131021_Richard_Falk_-_A_68_376_SR_oPt_report_2013_-_English.pdf Voir également le site de la campagne « Palestine occupée - Dexia impliquée qui regroupe en Belgique 85 organisations dont le CADTM Belgique http://www.intal.be/fr/campagne/palestine-occupee-dexia-impliquee

|7| Voir http://www.asso-sherpa.org/le-procureur-de-monaco-decide-douvrir-information-judiciaire-x-dans-laffaire-de-blanchiment-de-capitaux-africains/#.UxSW6s5fmls

|8| Site officiel de la banque : https://www.wealthmanagement.bnpparibas.mc/public/fr/home

|9| Le Crédit Agricole compte 116 filiales dans les paradis fiscaux et des centres offshores, la Société Générale, 81 et la BPCE, 79. Source : Philippe Lamberts et Gaspard Denis, http://www.philippelamberts.eu/les-7-peches-capitaux-des-banques/

|10| Financial Times, « BNP Paribas sacks staff for interbank rate-fixing attempt », 29 janvier 2014.

|11| SNL, “Credit crisis and mortgage-related settlements for select bank holding companies” http://www.ababj.com/images/Dev_SNL/CreditCrisis.pdf consulté le 11 juillet 2014

|12| Bloomberg, ’Big Six U.S. Banks’ 2013 Profit Thwarted by Legal Costs’, 9 Janvier 2014, http://www.bloomberg.com/news/2014-01-09/big-six-u-s-banks-2013-profit-thwarted-by-legal-costs.html Voir aussi Thinkprogress, ’Profits At The Biggest Banks Bounce Back To Post-Crisis Record High’, 21 janvier 2014, http://thinkprogress.org/economy/2014/01/21/3184401/banks-profits-2013-record/#

|13| Le taux effectif global est un élément essentiel des contrats. Ce taux doit refléter l’ensemble des coûts et des frais d’un contrat ramené à une année. Il doit non seulement figurer sur le contrat mais être exact.

|14| Sur cette question, voir : Patrick Saurin, Les prêts toxiques : une affaire d’État. Comment les banques financent les collectivités locales, Demopolis & CADTM, Paris, 2013.

|15| Ces instruments de couvertures sont pour l’essentiel des contrats de swap ou d’échange de taux qui permettent aux banques prêteuses d’échanger par exemple le taux révisable du contrat d’emprunt contre un taux fixe et de se prémunir par anticipation contre des évolutions de taux qui leur seraient défavorables.

|16| Lorsqu’un emprunt est remboursé par anticipation, l’instrument de couverture qui protège l’emprunteur n‘a plus de raison d’être et il doit être mis un terme au contrat par lequel cet instrument a été mis en place, on parle ici de débouclage de l’opération. Or ce débouclage se traduit très souvent par un coût de sortir pour la partie qui a souscrit la couverture et qui est dans notre cas la banques prêteuse. Mais celle-ci a pris soin de prévoir dans son contrat de prêt, en cas de remboursement anticipé de celui-ci, le paiement par l’emprunteur d’une indemnité appelée soulte et dont le montant est égal au coût de sortie que la banque prêteuse doit payer à la banque de contrepartie. C’est donc l’emprunteur, la collectivité en l’espèce, qui supporte au final l’intégralité du risque.

|17| Voir Eric Toussaint, Bancocratie, Aden 2014, 455 pages. A commander sur www.cadtm.org

Patrick Saurin est porte-parole de Sud BPCE, membre du CADTM et du Collectif pour un audit citoyen de la dette publique. Il est l’auteur du livre Les prêts toxiques une affaire d’État. Comment les banques financent les collectivités locales, Demopolis & CADTM, Paris, 2013.

Éric Toussaint porte-parole du CADTM international et est membre du conseil scientifique d’ATTAC France. Il est auteur des livres Bancocratie, Aden, Bruxelles, 2014 ; Procès d’un homme exemplaire, Editions Al Dante, Marseille, 2013 ; Un coup d’œil dans le rétroviseur. L’idéologie néolibérale des origines jusqu’à aujourd’hui, Le Cerisier, Mons, 2010.

Source : cadtm.org

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14 juillet 2014 1 14 /07 /juillet /2014 21:04

 

Source : cadtm.org

 

 

CADTM

Remplacer la bancocratie par la démocratie sociale et économique

Recension du livre Bancocratie d’Eric Toussaint

 

13 juillet par Renaud Duterme

 

 

Lors de la crise de 2007-2008, la finance fut désignée de toute part comme l’ennemi à abattre. Les bonus, les paradis fiscaux, la spéculation furent considérés comme les maux de la société. Ce qu’Éric Toussaint nous montre dans cet ouvrage, c’est que derrière ces concepts obscurs se cachent des acteurs concrets, en particuliers les grandes institutions financières, banques en tête.

Il dévoile ainsi les responsabilités de ces banques qui sont à l’origine de la plus grave crise économique depuis 1929. À travers une perspective historique, il passe en revue les mécanismes créés par le monde bancaire, avec l’aval de nombreux gouvernements, qui ont été à l’origine de profits considérables. L’auteur dénonce également les agissements coupables des grandes banques qui, de par leur importance dans l’économie, ont bénéficié d’une quasi impunité dans de nombreux domaines (spéculation à l’origine de crises, blanchiment d’argent, organisation de l’évasion fiscale, etc.). Par ailleurs, le livre contient de nombreuses alertes quant aux multiples risques de nouvelles débâcles dans les années à venir, lesquelles approfondiront à coup sûr la crise actuelle |1|. À la lecture de l’ouvrage, il apparaît qu’un tel scénario a toutes les chances de se réaliser puisque dans leur gestion de la crise, les gouvernements et les banques centrales, loin d’avoir muselé le secteur financier, ont accru sa puissance, notamment à travers les politiques de faibles taux d’intérêt et de sauvetages bancaires.

Si ce livre, aussi complet qu’accessible, sera utile pour tout un chacun, il intéressera particulièrement tous ceux et celles désireux de mettre un terme à la toute puissance des banques. Comme Éric Toussaint aime à le souligner, « le secteur bancaire est trop important pour être laissé aux mains du privé ». Ainsi, outre de nombreuses mesures permettant de limiter drastiquement le pouvoir des grandes banques, il propose sans détour la socialisation du secteur, à savoir une gestion publique du système financier, à laquelle la sphère politique mais aussi les salariés, les clients et les représentants d’association participeraient. En d’autres termes, remplacer la bancocratie par la démocratie sociale et économique.

 

Notes

|1| À noter qu’Éric Toussaint, parmi d’autres auteurs et contrairement à la plupart des économistes grand public, avait anticipé la crise immobilière américaine plusieurs années auparavant. Une explication est donnée dans son livre « La finance contre les peuples ».

Renaud Duterme est enseignant, actif au sein du CADTM, il est l’auteur de Rwanda, Une Histoire volée, paru en 2013 aux éditions Tribord et co-auteur avec Eric De Ruest de La dette cachée de l’économie, parue en 2014 chez Les Liens Qui Libèrent.

 

 

Source : cadtm.org

 

 

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14 juillet 2014 1 14 /07 /juillet /2014 20:47

 

Source : www.collectifstoptafta.org

 

 

Toutes et tous hors TAFTA !


Les citoyens d'Europe contre le traité transatlantique

 

L’Union européenne (UE) et les États-Unis négocient un accord de libre-échange, dit PTCI* ou TAFTA*. Au-delà des
États-Unis et de l’UE, cet « OTAN de l'économie » impacterait toute la planète. De nombreux autres accords sont
également en cours de négociation, dont l'AECG* ou CETA* entre l'UE et le Canada en passe d'être conclu.

Ces négociations opaques se déroulent dans le dos des peuples d'Europe et d'Amérique du Nord. Elles visent à établir
un grand marché transatlantique qui consacrerait la domination des multinationales européennes et américaines au
détriment des citoyens de part et d’autre de l’Atlantique. Sous couvert d'une hypothétique relance de la croissance,
ces négociations risquent de niveler par le bas les normes sociales, économiques, sanitaires, culturelles et
environnementales. Ces nouvelles normes seraient placées sous le contrôle de tribunaux supranationaux d'arbitrage
privés, hors de tout contrôle démocratique.

Cet accord de libre-échange menace de mettre en péril ce qui rend nos sociétés encore vivables. C'est la raison pour
laquelle nous appelons les parlementaires français et européens nouvellement élus à faire pression sur les États
membres et la Commission européenne afin d'interrompre les négociations du TAFTA.

Nous exigeons la mise en place d'un cadre de coopération alternatif qui permette des échanges commerciaux
équitables, l’extension des droits civiques et sociaux, une alimentation saine, une santé accessible à toutes et tous, le
respect de la diversité culturelle et des réponses à l'urgence écologique.

De plus en plus de collectivités locales se déclarent « hors TAFTA ». Nous demandons aux élus, aux organisateurs de
manifestations culturelles et aux acteurs des secteurs d'activité concernés de faire entendre leur voix en se déclarant
eux aussi « hors TAFTA ».

Nous appelons à une large mobilisation de la population pour faire vivre ce débat partout dans nos villages et nos
quartiers, sur nos lieux de travail et d'étude et créer des collectifs locaux partout en France pour enrayer le TAFTA, le
CETA et sortir du piège des accords de libre-échange.

 

Premiers signataires :
Christophe Alévêque, humoriste; Geneviève Ancel, Dialogues en humanité; Mariano Andor, collectif Rosia Montana; Isabelle Attard, co-présidente Nouvelle Donne; Clémentine Autain, Ensemble; Geneviève Azam, porte-parole Attac; Etienne Balibar, philosophe; Alexandra Baudelot, Laboratoires d'Aubervilliers; René Becker, président Terre de Liens ; Eric Beynel, Union syndicale Solidaires; Martine Billard, co-présidente PG; Pascal Blanchard, historien; Nicolas Bouchaud, acteur; Mona Bras, porte-parole UDB; Dominique Cabrera, cinéaste; Matthieu Calame, ingénieur agronome FPH; Amélie Canonne, Aitec-Ipam; Jean-Michel Carré, réalisateur/producteur Films Grain de Sable; Bernard Cassen, Mémoire des luttes; Roland Castro, architecte; Charb, dessinateur Charlie hebdo; Laura Chatel, secrétaire fédérale Jeunes Écologistes; Eve Chiapello, sociologue; Patricia Coler, déléguée générale UFISC; Florent Compain, président Amis de la Terre; Nathalie Coutinet, économiste les économistes atterrés; Céline Curt, avocate; Fanny Darbus, sociologue; Jean-Marc De Boni, président du directoire La Nef, Christian De Montlibert, sociologue; Karima Delli, députée européenne EELV; Marianne Denicourt, actrice; Florence Denier- Pasquier, vice-présidente FNE; Jean-Pierre Dubois, président d'honneur de la LDH; Marc Dufumier, ingénieur agronome; Eric Fassin, sociologue; Gérard Filoche, ex inspecteur du travail; Bruno Gaccio, scénariste et producteur; Marcel Gauchet, historien, philosophe EHESS; Susan George, écrivain; François Gèze, éditeur; Gaël Giraud, économiste, jésuite; Pierre-William Glenn, réalisateur; Vincent Glenn, réalisateur; Cécile Gondard-Lalanne, Union syndicale Solidaires; Roland Gori, psychanaliste appel des appels; Bernadette Groison, secrétaire générale FSU; Claude Gruffat, président Biocoop; Jeannette Habel, co-présidente Copernic; Kadour Haddadi, chanteur de HK et Les Saltimbanks; Yannick Jadot, député européen EELV; Béatrice et Jean-Paul Jaud, réalisateurs; Esther Jeffers, économiste les économistes atterrés; Raoul-Marc Jennar, essayiste; Paul Jorion, anthropologue; Pierre Khalfa, co-président Copernic; Denez L’Hostis, président FNE; Thomas Lacoste, cinéaste et éditeur La Bande Passante; Laetitia Lafforgue, présidente Fédération nationale des arts de la rue; Bernard Lahire, sociologue; Bruno Lamour, président Collectif Roosevelt; Pierre Larrouturou, co-président Nouvelle Donne; Pierre Laurent, secrétaire national PCF; Patrick Le Hyaric, député européen PCF; Renée Le Mignot, MRAP; Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice de Paris; Annick Manteaux, Collectif stop-petrole-de-schiste-sud-77; Myriam Martin, Ensemble; Françoise Martres, présidente Syndicat de la magistrature; Margaret Maruani, sociologue; Gustave Massiah, Aitec-Ipam; Mathilda May, actrice; Dominique Méda, philosophe et sociologue; Jean-Luc Mélenchon, député européen, co-président PG; Annie-Thebaud Mony, directrice de recherche Inserm; Gérard Mordillat, réalisateur; Antonio Negri, philosophe; Frédéric Neyrat, philosophe; Julien Noé, Enercoop; Birthe Pedersen, vice-présidente Peuples Solidaires; Henri Pena-Ruiz, philosophe; Laurent Pinatel, porte-parole Confédération paysanne; Michel Pinçon, sociologue; Monique Pinçon-Charlot, sociologue; Christine Poupin, NPA; Philippe Poutou, NPA; Ignacio Ramonet, journaliste Mémoire des luttes; Frédérique Rigal, Collectif Roosevelt; Marie-Monique Robin, réalisatrice; Michel Rocard, ancien premier ministre; Christian Salmon, écrivain; Chloé Sécher, coordinatrice réseau culturel
Actes if; Laura Slimani, présidente MJS; Bernard Stiegler, philosophe Ars Industrialis; Jean-Pierre Thorn, cinéaste; Louis-
Georges Tin, maître de conférences; Philippe Torreton, acteur; Aurélie Trouvé, Attac; François Veillerette, porte-parole
Générations Futures; Marie-Christine Vergiat, députée européenne; Patrick Viveret, philosophe; Marina Vlady, actrice; Sophie Wahnich, historienne CNRS.


Pour signer cet appel et vous déclarer « hors TAFTA », rendez-vous sur le site du collectif :

http://www.collectifstoptafta.org/

 


* Jungle des sigles des accords :
• Le projet de partenariat transatlantique entre l’Union européenne et les États-Unis est appelé : TAFTA (Transatlantic Free
Trade Agreement), PTCI (Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement), TTIP (Transatlantic Trade and
Investment Partnership ) ou encore grand marché transatlantique.
• L'accord entre l’Union européenne et le Canada est appelé AECG (Accord économique et commercial global) ou CETA
(Comprehensive Economic and Trade Agreement).

 

 

Source : www.collectifstoptafta.org

 

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13 juillet 2014 7 13 /07 /juillet /2014 18:41

 

Source : www.pauljorion.com/blog

 

 

LES CHOSES BOUGENT EN ESPAGNE, par Diego Carretero

5 juillet 2014 par Paul Jorion | 

Billet invité.

Voici quelques informations sur ce qui se passe chez nous en Espagne. Un phénomène très intéressant est en train de se passer. Ce que vous en savez c’est qu’un nouveau parti, PODEMOS, a raflé 5 députés d’un coup aux élections européennes. Ce que je vous en dis est que cela a constitué le début d’une lame de fond qui est en train de changer la donne dans ce pays.

D’abord, ce n’est pas « un parti ». Depuis le 15M (Indignados) le feu couve dans tous les coins du pays. Les mesures prises par les différents gouvernements et leurs répercussions dans la vie quotidienne des gens servent de carburant. Et cette galaxie d’initiatives diverses découlant du mouvement du 15M a pris consistance en plusieurs partis et mouvements, qui travaillent depuis des mois et des années en forme de groupes s’opposant physiquement (d’une manière non-violente) aux différentes politiques du gouvernement.

Pablo Iglesias, commentateur habituel de deux chaînes de télévision, lui-même issu du mouvement 15M, et participant à un de ces petits partis, a eu l’énorme intelligence, aidé par son entourage de la même famille, de lancer le mouvement à partir de ses apparitions en télévision, s’adressant directement aux gens ordinaires, leur parlant un langage vrai et simple. Et en ce langage vrai et simple il leur a dit que la division gauche-droite n’était pas aussi importante que la division bas-haut : nous sommes les gens d’en bas et allons déboulonner les gens d’en haut, tout en ne cachant pas sa position de gauche.

 

Il faut dire que le panorama dessiné par « la crise », les compromissions étalées au grand jour, de politiques de droite et de gauche, socialistes et communistes compris, de syndicats socialistes et communistes, objets de scandales sans fin, pris la main dans le sac, les destructions des différents aspects de l’état de bien-être que les élites, discréditées au plus haut point, ont perpétré, n’ont laissé aux citoyens qu’un sentiment d’écœurement profond (la notion de ciudadanos est continuellement invoquée, en Espagne, mais en France l’utilisation du mot « citoyen » classe la personne qui l’utilise. Ici, je l’emploie dans le sens espagnol, sans préjuger de ce que j’en pense dans le contexte français). Le mécontentement est généralisé et des signes de fermeté sont en train d’apparaître (Les marches du 22 mars… le quartier du Gamonal à Burgos, à Barcelone..). L’on sent, de manière palpable que les gens ne veulent plus se laisser faire… d’où le succès des différents aspects de réponse qui apparaissent

Ce mouvement se tient par son organisation et son attitude ouverte et tolérante, son fonctionnement en assemblées qui font et défont inlassablement en une pratique démocratique poussée. Ce faisant il a rassemblé en peu de temps énormément de gens. Les dernières prévisions sont qu’ils constituent, aujourd’hui, la troisième force politique en Catalogne, dont la donne locale est en train de changer à toute vitesse, et probablement la deuxième force dans le levant (Valencia).

Parallèlement, la gauche/système (IU : Izquierda Unida) change également à toute vitesse, sa tête de liste au parlement européen s’est vue obligée de démissionner, ses pratiques discutables ayant été mises en évidence, et la tête même d’IU vacille au profit d’un jeune issu lui aussi du 15M, Alberto Garzón, qui dit que les idées et la tâche à accomplir passent avant le parti. Une certaine forme de dirigisme communiste est en train de disparaître (ou de se cacher). Et Alberto se trouve en phase avec Pablo Iglesias. Et dans cette même phase se trouvent les gens ordinaires, les activistes sociaux, tous les contestataires antisystème… en somme une part majoritaire du pays. La composition et l’interaction des éléments composant cette majorité est sans cesse en mouvement vital, s’influençant les uns les autres continuellement. On peut dire, sans risque de se tromper, que trois personnes, actuellement, incarnent le mouvement en marche : par ordre subjectif d’influence, Ada Colau, de Catalogne, Pablo Iglesias, de Madrid, et Alberto Garzón, d’Andalousie. À mon avis, cela peut-être une garantie de bonne fin, mais il n’est pas question d’ignorer les difficultés, aussi bien internes au mouvement (attention à la vieille garde) qu’externes (l’ordre établi se défend et se défendra plus durement…) Mais ne pas perdre de vue ce que ces personnes incarnent, et si cette incarnation fait défaut, ces personnes ne sont plus qu’elles-mêmes… et elles le savent bien, et pour le moment leur attitude de service n’a pas été prise en défaut.

Tout récemment, un rassemblement (il faut tenir compte du caractère fluide et peu-dirigiste du contexte) autour d’Ada Colau, à Barcelone, sous le nom de Guanyem (Gagnons), prétend se faire avec la municipalité de Barcelone, et il est sympathique que les analystes sérieux pensent que cela est possible. Aussitôt, Madrid embraye avec le même schéma, et apparaît un groupe, Municipalia, avec les mêmes caractéristiques, englobant les différents éléments de 15M en évolution, dont PODEMOS, qui se plie à la discipline majoritaire, en consultations répétées, aussi bien à Barcelone qu’à Madrid. Non content de cela, des villes moyennes s’y mettent, Saragosse y est déjà, ainsi que Valladolid. Malaga est en route, il est bien probable que Séville aussi.

Un détail d’importance concernant la question catalane, est qu’au sein de Guanyem il y a des indépendantistes et des non indépendantistes, et apparemment il y a consensus pour ne pas traiter la question à ce niveau en ce moment. Une qualité d’attitude est en train d’émerger, partout dans le pays, qui était impensable avant le 15M.

Où l’on voit donc que PODEMOS n’est le centre du processus qu’à un moment, ensuite il rentre dans le rang du mouvement lui-même, pour jouer le rôle que le mouvement, dans ses délibérations va lui attribuer. Ceci n’est pas exempt d’explications musclées, comme les différents avis exprimés par les « dirigeants » de PODEMOS en préparation de la grande réunion de cet automne qui dotera PODEMOS de structures politiques intégrant tous les avis.

Un aspect important est l’entrecroisement de on peut dire tout avec tout, et les groupes, de PODEMOS, ou du Partido X, ou de EQUO, etc. se forment dans les villes, les quartiers, les zones géographiques (cantons…), mais aussi chez les professionnels de la santé, les travailleurs indépendants, les défenseurs de la nature…etc., il n’y a pas de domaine à l’abri, et cela tisse un réseau dont nous verrons dans le futur les avantages et les inconvénients.

Mon sentiment personnel est qu’un mouvement a été lancé qu’il est impossible, au moment présent, d’arrêter. Et il s’amplifie à vue d’œil. Aux dernières nouvelles, l’influence de cette « ambiance » a obligé les parlementaires socialistes en Europe à s’interroger et à envisager de ne pas voter Junker, de peur des répercussions négatives dans l’électorat qu’il reste encore aux socialistes. Pour l’heure, que je sache, il n’y a pas encore de décision définitive. Un petit événement (beaucoup moins important que les processus exposés) a lieu en ce moment, l’élection du prochain secrétaire général du parti socialiste, et il y a trois candidats. Les trois se sont prononcé contre le vote à Junker… Il est certain que si les événements à l’intérieur du parti socialiste prennent la tournure de participer au mouvement, les choses changeraient dans le sens imprimé jusqu’à maintenant, certainement avec des ajustements et une certaine influence de la vieille garde… Mais il n’est pas bon de broder le futur, soyons attentifs et aidons-en l’enfantement… un peu de maïeutique sied !

 

 

Source : www.pauljorion.com/blog

 

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13 juillet 2014 7 13 /07 /juillet /2014 17:05

 

Souce : www.mediapart.fr

 

Illégal et hors de prix, l'incinérateur de Marseille a tout faux

|  Par Louise Fessard

 

 

 

Jugé illégal le 4 juillet 2014 par le tribunal administratif de Marseille, l'incinérateur de Fos-sur-Mer se révèle également un boulet financier. La justice administrative va se pencher d'ici fin 2014 sur une partie des 173 millions d'euros réclamés par l'entreprise concessionnaire à la communauté urbaine de Marseille.

Un incendie a ravagé une partie du centre de traitement des déchets de Fos, le 1er novembre 2013. 
Un incendie a ravagé une partie du centre de traitement des déchets de Fos, le 1er novembre 2013. © Institut écocitoyen

Nouveau coup dur pour l’incinérateur de Fos-sur-Mer, qui accueille depuis avril 2010 les 410 000 tonnes de déchets annuels de la communauté urbaine de Marseille. L’usine avait été implantée sur le domaine du grand port maritime de Marseille, malgré l’opposition des communes voisines. Or le tribunal administratif de Marseille vient, le 4 juillet dernier, de donner en partie raison à la commune de Fos-sur-Mer et à deux associations locales de défense de l’environnement qui contestaient cette implantation.

Le tribunal a annulé, vendredi 4 juillet, deux délibérations de la communauté urbaine Marseille Provence métropole (MPM) de février 2009 autorisant son président à signer la délégation de service public avec l’industriel Evéré, qui a construit et gère l’usine de traitement des déchets.

En 2003, après l’échec de deux projets d’incinérateurs dans les quartiers est et nord de Marseille, Jean-Claude Gaudin décide de délocaliser son usine géante chez ses voisins, au bord d’un étang de Berre déjà sinistré par l’industrie pétrochimique et métallurgique. Et pour contourner un éventuel droit de préemption de la commune voisine, Fos-sur-Mer, opposée au projet, ses services choisissent de l’implanter sur un domaine privé du Grand port maritime de Marseille (GPMM). À quelques kilomètres de Port-Saint-Louis-du-Rhône et de Fos-sur-Mer, mais à 70 kilomètres du Vieux-Port.

Le 13 mai 2005, la communauté urbaine conclut un bail à construction avec le GPMM, avant de céder ce bail au concessionnaire Evéré, filiale du groupe espagnol Urbaser. C’est ce tour de passe-passe juridique que le tribunal administratif a jugé illégal. Pour les juges, le terrain, qui a été affecté au service public du traitement des déchets ménagers, est automatiquement entré dans le domaine public du GPMM, comme le soutenaient depuis 2003 les opposants au projet. Or la loi ne permet pas de bail à construction sur un domaine public. Le bail à construction de l’usine de traitement des déchets de Fos-sur-Mer est donc « illégal », ce qui « entache d’illégalité les autres stipulations du contrat », indique le tribunal. Voilà donc les délibérations de MPM à l’eau.

Guy Teissier (UMP), nouveau président de MPM, a immédiatement annoncé dans un communiqué son intention « de faire appel de cette décision et, en attendant, d’en demander le sursis à exécution ». Mais la communauté urbaine de Marseille se retrouve dans une impasse. Comment régulariser cette usine dont le coût a explosé à 411 millions d'euros ? En juin 2008, le tribunal administratif avait déjà annulé pour vice de forme la première délibération de mai 2005 autorisant l’implantation de l’usine sur le port. Le 19 février 2009, sous la présidence d’Eugène Caselli (PS), les élus communautaires avaient alors été priés de voter une nouvelle délibération dans les formes.

Un échappatoire impossible cette fois, puisque c’est le bail à construction lui-même qui est jugé illégal. « Le centre technique multifilières (c'est son petit nom – ndlr) continuera à accueillir et traiter les déchets ménagers, mais la décision du juge administratif nous contraint à tirer les conséquences sur la gestion de cet équipement », a indiqué Guy Teissier, le 4 juillet dernier. Ses équipes sont perplexes. « On ne va pas raser le centre, mais on ne voit pas comment s’en sortir », indique-t-on du côté de MPM. Pour Evéré cependant, «cette décision n’impacte pas directement le contrat de délégation de service public qui reste en vigueur».

René Raimondi (PS), maire de Fos-sur-Mer, est, lui, très amer de cette victoire tardive qui « aura des conséquences minimes par rapport à nos ambitions d’arrêter l’incinérateur ». « C’est un gâchis incroyable, le tribunal administratif se prononce cinq ans après avoir été saisi, s’indigne l’élu, président du syndicat d'agglomération nouvelle (San) Ouest Provence. Comment un justiciable peut-il avoir gain de cause alors que l’usine tourne depuis quatre ans ? » Il veut désormais « explorer toutes les pistes » avec l’avocat de la commune, Me Jean-Daniel Chetrit. « Même si nous gagnons l’appel, le préfet passera outre, car il n’y a plus d’autre solution pour traiter les déchets de Marseille, avance de son côté Daniel Moutet, président de l'association de défense du Golfe de Fos. Mais nous aurons prouvé qu’il n’était pas légal d’aller mettre ses déchets chez le voisin. »

Des surcoûts gigantesques

Un autre contentieux lié à l’incinérateur risque d’arriver d’ici quelques mois devant le tribunal administratif de Marseille et de peser lourd sur les finances déjà exsangues de la communauté urbaine. Selon le tribunal administratif, l'audience est « prévue cette année ».

La filiale d'Urbaser, qui avait remporté le marché en 2005 face aux multinationales Suez et Veolia avec un modèle économique qui s'est révélé irréaliste, réclame une rallonge de 173 millions d’euros à la collectivité. Au terme des vingt ans d'exploitation prévus par le contrat, les demandes d'Evéré atteignent même 273 millions d’euros, selon une expertise remise au juge d'instruction Duchaine dans l'un des volets de l'affaire Guérini. L’entreprise argue de « retards provoqués par les 38 recours juridiques », de « l'état du sol et du sous-sol » et de « changements liés à des réflexions menées avec MPM ».

La communauté urbaine de Marseille a déjà été, le 13 septembre 2011, condamnée en référé à verser une provision de 8,6 millions d’euros. L’expert, désigné en décembre 2009 par le tribunal administratif, devrait bientôt rendre sa dernière note de synthèse sur la première facture de 107 millions d’euros présentée par Evéré. D’après nos informations, cette note ne serait pas du tout favorable à Marseille Provence Métropole. « Tout ce qui est aléa revient à MPM, tout ce qu’on ne sait pas, c’est MPM qui paye, et tout ce qu'a demandé Evéré, c’est Evéré », indique une source.

En bref, les habitants de MPM, qui ont vu leur taxe d’enlèvement des ordures ménagères (Teom) s’envoler de 12,29 % en 2001 à 16,42 % en 2014, n’ont pas fini de payer leur incinérateur. Taxés à 18,1 %, les Marseillais paient déjà le double de la moyenne nationale (9,3 % en 2012).

Un comble pour financer un équipement dont la partie méthanisation n’a jamais bien fonctionné et qui creuse chaque année un peu plus son déficit. Depuis 2011, l’entreprise Evéré perd chaque année entre 24 et 22 millions d’euros. L’incendie qui a détruit une partie du site de Fos dans la nuit du vendredi 1er au samedi 2 novembre 2013 ne va pas arranger ses comptes. Depuis lors, toute la chaîne de tri des déchets et de méthanisation, en partie détruite, est à l’arrêt. Seule l'incinération a repris fin 2013 et brûle depuis à plein pour engloutir les déchets produits par les 18 communes de Marseille Provence Métropole. Les travaux de reconstruction, qui devraient démarrer début septembre selon Evéré, s’étaleront sur au moins 18 mois. «Notre volonté est toujours la même que celle affichée les jours qui ont suivi le sinistre : retrouver, dans les meilleurs délais, la configuration multifilière de notre centre avec ses 3 modes de valorisation réunis sur un même site : tri, valorisation organique et valorisation énergétique», indique l'entreprise. Reste également à régler le problème des milliers de tonnes de déchets des fosses qui ont pris feu lors de l'incendie et ont été noyées par les pompiers.

Selon le rapport du 30 novembre 2013 de l’expert mandaté par les assurances et que s'est procuré Mediapart, « la thèse d’un incendie d’origine volontaire demeure la seule plausible pour expliquer la survenance de cet incendie », même si aucune trace d’accélérateur « autre que l’huile hydraulique naturellement présente dans la centrale hydraulique » n’a pu être retrouvée. L’auteur, un ingénieur incendie expert auprès de la cour d’appel de Montpellier, écarte toute « cause accidentelle crédible notamment sur sa capacité de propagation pour dégénérer en incendie généralisé ».

Il souligne que l’incendie est survenu « en pleine nuit dans les seuls bâtiments du site à être à l’arrêt, éteints et vides de tout personnel ». Et rappelle que, malgré la clôture du site, « l’accès à l’intérieur de ce bâtiment ne pose aucune difficulté particulière », que ce soit pour un employé ou un simple piéton entré « à partir de la gare de trains dans l’extrémité Nord ».

De son côté, le parquet d’Aix-en-Provence indique que l’enquête préliminaire sur l’origine de l’incendie et l’expertise judiciaire sont toujours en cours. Marseille Provence Métropole s'est constituée partie civile, après la plainte contre X pour incendie volontaire déposée en décembre 2013 par Evéré. Et un dossier judiciaire de plus pour un incinérateur qui n'en manquait déjà pas…

 

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13 juillet 2014 7 13 /07 /juillet /2014 15:51

 

 

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Gaza : première incursion terrestre israélienne, plus de 160 morts palestiniens

|  Par Pierre Puchot

 

 

 

Israël a mobilisé quelque 30 000 réservistes et positionné ses tanks à la frontière. Mais la plupart des observateurs militaires ne croient pas à une offensive terrestre, qui aurait un coût politique et matériel important pour Tsahal, à moins que les tirs de plusieurs dizaines de roquettes depuis Gaza ne fassent un nombre important de victimes, ce qui n’est pas le cas. L’Onu, les États-Unis et le France demandent un cessez-le-feu immédiat.

Depuis le début de l'opération militaire d'Israël dans la bande de Gaza, lundi 7 juillet 2014, les bombardements israéliens ont causé la mort d'au moins 162 Palestiniens, dont au moins 56 pour la seule journée du samedi 12 juillet, et près de 100 civils, femmes et enfants.

Ce dimanche 13 juillet a marqué une nouvelle étape, quand une fusillade a éclaté entre des combattants du Hamas et des membres d'un commando de la marine israélienne. C’est le premier accrochage au sol, qui pourrait entraîner plusieurs opérations dites de « hit and run », des incursions de soldats israéliens dans la bande de Gaza pour détruire un objectif militaire. Les soldats du commando israélien, appuyés par l'aviation, ont ainsi attaqué ce dimanche un site de lancement de roquettes à longue portée dans le nord de la bande de Gaza, avant d'être eux-mêmes attaqués, indique l'armée israélienne dans un communiqué. Les brigades Ezzedine Al-Qassam, la branche militaire du Hamas, ont confirmé que « des échanges de feu nourris ont eu lieu entre (ses) combattants et des soldats de la marine sioniste qui tentaient de pénétrer dans la zone de Sudanyia, de la bande de Gaza ».


Des habitants de Gaza cherchent les restes des corps, après un bombardement israélien, le 13 juillet. 
Des habitants de Gaza cherchent les restes des corps, après un bombardement israélien, le 13 juillet. © Reuters

Israël a mobilisé quelque 30 000 réservistes et positionné ses tanks à la frontière. Mais la plupart des observateurs militaires ne croient pas à une offensive terrestre, qui aurait un coût politique et matériel important pour Tsahal, à moins que les tirs de plusieurs de dizaines de roquettes depuis Gaza fassent un nombre important de victimes, ce qui n’est pas le cas : vendredi, l’explosion d’une station-service à Ashdod a fait trois blessés mais aucun Israélien, civil ou militaire, n’a encore péri.

Pour mémoire, en novembre 2012, l’offensive israélienne « Pilier de défense » avait duré huit jours, et entraîné la mort d'au moins 161 Palestiniens, dont une majorité de civils. Six Israéliens – quatre soldats et deux civils – avaient été tués par des tirs de roquette. Une offensive terrestre comme celle de « Plomb durci » en 2008-2009, entraînerait Israël et les Palestiniens de Gaza sur une toute autre échelle : plus de 700 civils, femmes et enfants, sur un total de 1 400 victimes palestiniennes, avaient péri dans cette offensive, ainsi que 13 Israéliens.

Soumis à un blocus constant, Gaza ne s’est d’ailleurs jamais remise de « Plomb durci » et des destructions massives qui eurent lieu alors, et ont entraîné durablement des grandes difficultés pour l’accès à l’eau et à l’électricité.

Largement minoritaires, mais agissant tout de même, plusieurs centaines d’habitants de Tel Aviv ont manifesté samedi soir, pour dénoncer l’offensive israélienne et la mort de civils palestiniens. Et dimanche 13 juillet, le quotidien israélien Haaretz notait que le « crédit » international d’Israël allait en s’amenuisant, à mesure que l’offensive se prolongeait, après les demande d’un cessez-le-feu immédiat de la part de l’Onu, du président des États-Unis Barack Obama et de la France, malgré la position pour le moins contestée de l’Élysée cette semaine. « Si Netanyahou (le premier ministre israélien – Ndlr) veut le retour au calme, il ferait mieux d’initier l’arrêt des hostilités, plutôt que d’attendre pour une offre », écrit le quotidien israélien. « La France appelle au cessez-le feu immédiat. (…) Nous condamnons les tirs de roquettes qui se sont produits de la part du Hamas sur la population civile israélienne, mais nous demandons aussi à Israël de faire preuve de mesure dans sa riposte et en particulier de respecter le droit international et de faire en sorte que les victimes civiles soient épargnées », a déclaré le ministre français de la défense Jean-Yves Le Drian lors de l’émission Le Grand rendez-vous d'Europe 1, ce dimanche. Le premier ministre israélien ne paraît cependant pas enclin pour l’heure à évoquer la perspective d’un cessez-le-feu.

Ce dimanche, dans le New York Times, le chroniqueur Ethan Bronner est revenu lui, sur 20 ans de processus d’Oslo. Comme tant d’autres textes publiés cette semaine, le NYT met en avant l’évidence : la succession d’offensives israéliennes contre Gaza depuis 2008 (Plomb Durci, Pilier de Défense, Bordure de protection) résulte avant tout de la faillite complète du processus de paix soutenu depuis 20 ans par la communauté internationale et le Quartet, les États-Unis et l’Union européenne en tête. Symbole de cette faillite, la visite en Égypte, ce samedi, de Tony Blair – l’envoyé spécial du Quartet depuis 2007 –, venu tenter de convaincre les Égyptiens de s'engager dans une médiation, alors qu'il n’a obtenu aucun résultat tout au long de sa mission.

L'épisode que traverse le Proche-Orient démontre une fois que plus que le conflit israélien ne peut se résoudre que par la perspective d’une solution politique. Or cette solution ne peut être trouvée dans le cadre du processus de négociation bilatérale asymétrique actuel, quand l’une des parties (Israël) est infiniment supérieure à l’autre (les Palestiniens) en terme de ressources politiques, économiques, militaires. « Je n’ai pas de partenaire pour une solution à deux États », a redit une fois encore samedi Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, cité par Haaretz.

 

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Source : www.mediapart.fr

 

 

 

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