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12 septembre 2014 5 12 /09 /septembre /2014 17:25

 

Source : www.bastamag.net

 

 

 

Mobilisations

Du rire aux armes : quand l’humour devient un contre-pouvoir

par Sonia (Lutopik) 12 septembre 2014

 

 

 

 

Pour certains activistes, rigoler et militer ne sont pas deux choses incompatibles, bien au contraire ! Des clowns engagés aux actions ironiques du collectif Sauvons les Riches, le rire est l’arme de nombreux militants qui l’utilisent pour médiatiser leurs actions, déstabiliser l’adversaire et, ce qui ne gâche rien, mettre un peu de joie dans leur vie.

Cet article a initialement été publié dans le magazine Lutopik.

« Pas d’allocs pour les dreadlocks », « Moins de festivals, plus de quinzaines commerciales », « Lacrymo, même pas mal, envoyez du napalm ». Ces slogans, scandés dès 2003 par les artistes du collectif Restons vivants lors de leurs « Manifs de Droite » contre la réforme du statut des intermittents, ont lancé en France la mode des actions militantes amusantes pour faire passer des revendications sérieuses. Des clowns mimant et caricaturant les forces de l’ordre aux goûters-surprises de Jeudi noir lors de visites d’appartements à louer à des tarifs exorbitants, en passant par les actions rigolotes du Collectif Sauvons les riches, l’humour a investi le champ du militantisme.

Car parmi tous ses pouvoirs, le rire possède un atout précieux pour les manifestants : sa force médiatique. Des images et des slogans amusants, précédés d’appels téléphoniques aux rédactions, attirent les caméras plus sûrement que quelques pancartes traditionnelles. Et nul besoin d’être nombreux. Une poignée de militants déguisés en Dalton devant le Sénat pour dénoncer les parlementaires ayant voté contre la levée de l’immunité de Serge Dassault, et presque toutes les chaînes de télé en parlent le jour même.

Sur le plan de la communication, c’est ultra-efficace, et le côté spectacle n’occulte pas pour autant les revendications. « Généralement, la médiatisation se fait en deux temps, explique élise Aubry, militante notamment au sein des collectifs Jeudi noir et Sauvons les riches. Le temps de l’action, où les médias assistent à l’opération humoristique, voire burlesque, qui pose le contexte de la protestation, et un second temps où la presse s’interroge sur le fond des réclamations et rapporte les contre-propositions portées par le collectif. » Ce genre de manifestations permet également d’aborder des sujets complexes de façon ludique et plus attrayante. Et puis elles sont un bon moyen de recruter. Après chaque action, de nouveaux membres rejoignent les collectifs, attirés par leur côté convivial.

 

Arme de dérision massive

Mais l’humour n’est pas qu’un aimant médiatique, c’est aussi une « arme de dérision massive » donc de remise en cause du pouvoir, assurent les clowns activistes. Nées en 2003 avec la CIRCA (Clandestine Insurgent Rebel Clown Army, l’Armée clandestine des clowns insurgés et rebelles) pour protester contre la guerre en Irak à l’occasion d’une visite de Georges W. Bush au Royaume-Uni, les armées de clowns se sont multipliées un peu partout dans le monde. En France, l’Artnez des Clowns compte plusieurs groupes, dont la BAC, la Brigade Activiste des Clowns, qui s’est fait connaître en karchérisant la mairie de Neuilly car « là où il y a des voyous, il faut nettoyer au Karcher » (la ville ne compte que 2,5% de logements sociaux, ce qui n’est pas conforme à la loi).

On peut aussi croiser des clowns membres du GIGN (le Groupement d’Intervention des Gros Nez), des CRS (les Clowns à Responsabilité Sociale) et autres corps de l’Artnez, dans des manifestations, singeant les forces de l’ordre, aussi bien dans leur accoutrement que dans leur gestuelle. Avec leurs mimiques, leurs tenues bariolées et décalées, les clowns déstabilisent et obligent leurs spectateurs à s’interroger, pour souvent se rendre compte que « dans ce monde tellement absurde, le clown est finalement le personnage le plus juste », rapporte le sous capt’aime Batman, clown mili-Terre depuis 2009.

 

 

Mais attention, être clown, c’est du sérieux ; il ne suffit pas de mettre un nez rouge. Pour interpeller les spectateurs et susciter la réflexion, il faut « être » clown et non « faire le clown ». L’Artnez des clowns, « c’est un mouvement artistico-politique », aime à le décrire le sous capt’aime. Et ça s’apprend. Il faut réussir à « libérer le clown qui est en nous, celui qui laisse parler ses sentiments, ses émotions ». Cela demande du temps, nécessite d’apprendre la communication non violente, le lâcher-prise, l’écoute… « C’est un outil super chouette et incroyablement efficace pour changer le monde en se changeant soi-même », témoigne Batman.

 

Gêner les forces de l’ordre

Dans les manifestations, les clowns ont aussi la capacité de gêner les forces de l’ordre. Mimées, ridiculisées, mais non agressées, celles-ci ne savent pas comment réagir. Lors de la manifestation contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, en février 2014 à Nantes, les clowns ont fait tampon pendant plus d’une heure entre policiers et manifestants, permettant d’une part à de nombreuses personnes de se calmer, de prendre un peu de distance, de rire à un moment où régnait plutôt la tension, et d’autre part de gêner la police qui ne peut plus tirer à travers les clowns dansant devant eux… Et puis, «  au milieu d’une zone de guerre, c’est beau, c’est plein de couleurs, d’amour, de fleurs... ». Finalement, la police a fait usage de gaz lacrymogènes pour venir à bout de la quarantaine d’activistes grimaçant devant eux, jetant des fleurs et gesticulant. Une intervention qui « met en lumière où se situe incontestablement la véritable violence ».

Que ce soit par la médiatisation ou par l’art, le militantisme joyeux permet aussi de « se faire plaisir. « Distribuer des tracts, ce n’était pas mon truc. Les actions humoristiques offrent une créativité, une liberté qui n’est pas possible dans des partis politiques », explique élise Aubry. « Une de nos forces est de montrer que militer, ce n’est pas forcément chiant. On peut s’épanouir », confirme un clown. Et « être heureux est un acte de résistance », rappelle le philosophe Patrick Viveret. « Le bonheur est important, car derrière tous les systèmes de domination, il y a de la maltraitance, de la peur. »

Sonia (Lutopik)

 

Lutopik est partenaire de Basta ! Retrouvez sa présentation sur notre page partenaires. Retrouvez le sommaire du dernier numéro du magazine, avec un dossier consacré aux nomades, sur cette page.

Photo de Une : Camille
Photo : Nicolas Portnoi pour Sauvons les Riches

 


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Source : www.bastamag.net

 

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12 septembre 2014 5 12 /09 /septembre /2014 17:15

 

Source : www.mediapart.fr

 

Dominique Méda: «Une autre voie que le modèle libéral ou la sortie de l’euro»

|  Par Joseph Confavreux

 

 

 

Les déclarations des responsables socialistes ne font pas qu'épouser les discours de la droite. Elles sont la marque d’un conservatisme idéologique tributaire d’un modèle périmé. Entretien avec la sociologue Dominique Méda.

Le refrain entonné en cette rentrée parlementaire par les responsables socialistes est affligeant pour ceux et celles qui jugent qu’ils ne font, ainsi, qu’emboîter le pas à ce que préconise la droite, que ce soit en matière de contrôle des chômeurs, d’organisation du travail, ou encore de recherche éperdue de la croissance, perçue comme la panacée de toute politique économique.

 

Dominique Méda 
Dominique Méda

Mais cette petite musique est également inquiétante pour tous ceux qui jugent, à l’instar de la sociologue Dominique Méda, un changement de société et d’économie, et d’organisation européenne, non seulement nécessaire mais urgent. Une révolution impossible à réaliser sans bouleverser les certitudes doctrinales, comme les outils idéologiques et les représentations du monde forgés durant les Trente Glorieuses, y compris à gauche, où la théorie keynésienne, devenue porte-drapeau de l’anti-austérité, trouve ses limites.

Professeure de sociologie à l’université Paris-Dauphine et titulaire de la chaire « Reconversion écologique, travail, emploi, politiques sociales » au Collège d’études mondiales, Dominique Méda est l’auteure de nombreux ouvrages, dont Le Travail – Une valeur en voie de disparition (Éd. Aubier 1995, rééd. Flammarion, Champs, 1998), Au-delà du PIB – Pour une nouvelle mesure de la richesse (1998, Éd. Champs-Actuel). Son dernier ouvrage, La Mystique de la croissance – Comment s’en libérer, vient d’être republié en poche aux éditions Champs-Flammarion.

On a beaucoup glosé sur l'affrontement entre Valls et Montebourg. Mais ces deux hommes ne font-ils pas du retour de la croissance l'alpha et l'oméga de leur politique économique ?

Si, évidemment, mais ils ne sont pas les seuls. Presque tous les partis – à part EELV et Nouvelle Donne – font du retour de la croissance la condition de la sortie de crise. Très peu de responsables politiques s’interrogent sur ce que nous devrions faire si la croissance ne revenait pas de manière durable – et encore moins sur le fait de savoir si les effets négatifs de la croissance sur notre patrimoine naturel et notre cohésion sociale ne devraient pas nous conduire au plus vite à rompre avec cette obsession.

La croissance reste notre veau d’or alors même que des rapports et des articles de plus en plus nombreux mettent chaque jour plus précisément en évidence le lien qui existe depuis deux siècles entre la croissance et les prélèvements opérés sur les ressources naturelles, l’augmentation des pollutions de toutes sortes, le risque de changement climatique. Alors que nous devrions mettre en débat la possibilité d’une société post-croissance – où la croissance du PIB ne serait plus l’objectif principal – et discuter de la meilleure manière d’engager nos sociétés dans une reconversion écologique susceptible de remettre l’emploi et le sens du travail au cœur de nos réflexions…

Quelles sont les différences entre une société post-croissance et une société de décroissance ?


 

Je n’utilise pas le terme de décroissance parce que je crains toujours qu’il ne fasse peur : dans croissance il y a croître et le terme comporte des significations positives, même si peu nombreux sont ceux qui se demandent ce qui croît et savent qu’il s’agit du Produit intérieur brut, c’est-à-dire d’une réalité finalement extrêmement réduite par rapport à ce à quoi nous attachons vraiment de l’importance. Car le PIB ne prend pas en compte les activités domestiques, familiales, bénévoles, de loisir, amicales, politiques, c’est-à-dire toutes celles dont la dernière enquête emploi du temps de l’Insee a révélé qu’elles étaient les activités préférées des Français…

Cet indicateur est indifférent à la proportion de la population qui consomme et qui produit. Il comptabilise de la même manière les productions utiles et celles qui sont toxiques. Et surtout, il ne dit strictement rien des évolutions du patrimoine naturel (qualité de l’air, de l’eau, des sols…) et de la cohésion sociale. Il ne joue pas le rôle d’alerte. On pourrait un jour avoir de gros taux de croissance mais une Terre devenue inhabitable. Le mystère, c’est que malgré tout, nous continuons à prier pour le retour de la croissance.

Comment l’expliquez-vous ?

L’augmentation de la production est au centre de notre dynamique sociale depuis au moins le XVIIIe siècle. Elle est perçue depuis lors à la fois comme vecteur d’amélioration matérielle, processus de civilisation, fabrique du lien social, pourvoyeuse d’égalité. On a fini par la confondre avec le progrès. L’économie, devenue la « science » reine, a construit l’outillage conceptuel permettant de penser une société qui se reproduit sans même plus avoir besoin de la Nature (qui a disparu des équations) et en postulant que le progrès technologique nous permettra toujours de nous en tirer.

Nous sommes désormais tributaires de logiques, de représentations, de conventions économiques et comptables qui ont été adoptées par le monde entier. Le taux de croissance du PIB est devenu l’indicateur de performance de référence qui permet de classer les pays. Même la théorie keynésienne – qui revient à la mode et sert de porte-drapeau anti-austérité – fait de la consommation un quasi-devoir social. Pour engager la bifurcation, on a donc besoin de rompre avec tout l’outillage intellectuel élaboré au cours des deux siècles précédents.

Cette convergence rend-elle pour autant obsolètes les oppositions entre keynésianisme et néo-libéralisme ou entre communisme et capitalisme ?


 

Elle ne rend pas obsolètes les rapports de force, ni le caractère légitime de la remise en cause des politiques d’austérité. Mais elle oblige à franchir un pas de plus : non pas revenir au keynésianisme d’origine mais réinjecter dans Keynes tout ce qu’on appris sur la crise écologique depuis une vingtaine d’années. Car c’est à une véritable relecture de notre passé que nous invite la série de travaux que le rapport Meadows a inaugurée et ces courbes éloquentes qui montrent l’évolution parallèle de la croissance et des émissions de gaz à effet de serre, des pollutions, des dégradations. La croissance a été à l’origine d’immenses bienfaits, de progrès fantastiques, mais ces Trente Glorieuses qui ont tant marqué notre imaginaire et que nous regrettons sont aussi celles de la surconsommation, du gaspillage des ressources, de l’augmentation vertigineuse de l’effet de serre.

Comment convertir des économies fondées sur la croissance ?


 

Je crois qu’il faut d’abord parvenir à mettre en évidence les coûts cachés de la croissance – comme avaient su le faire les années 1970 : expliquer pourquoi la convention datée qu’est le PIB occulte par construction les maux ; opérer un travail de relecture de notre passé comme l’a fait le collectif de chercheurs dirigés par Christophe Bonneuil dans Une autre histoire des "Trente Glorieuses" ; montrer que les taux de croissance élevés n’ont pas produit que du plus mais aussi du moins, qu’il s’agisse des ressources naturelles, du climat, du sens du travail, de la santé ; et que les plus riches ont consommé une part disproportionnée des ressources communes. Il faut ensuite montrer le caractère désirable d’une situation dans laquelle ce ne sont pas les taux de croissance qui constitueraient l’objectif principal.

Nous disposons déjà d’un certain nombre de travaux – je pense notamment à ceux de Jean Gadrey – qui montrent qu’une production écologiquement et socialement plus propre exigerait un plus grand volume de travail et pourrait donc être fortement créatrice d’emplois.

Il se pourrait donc bien que la reconversion écologique de nos sociétés permette – si nous sommes assez malins – à la fois de redistribuer cette nouvelle quantité de travail sur un plus grand nombre de personnes et de changer le travail. Cela suppose de relocaliser une partie de la production, de réaliser celle-ci dans des unités plus petites – et pourquoi pas organisées autrement – de rompre avec la production Made in Monde, de viser des gains de qualité et de durabilité et non plus des gains de productivité. C’est évidemment une rupture majeure avec l’organisation économique actuelle.

L’idée que la crise économique puisse être l’occasion de changer de modèle en profondeur n’a-t-elle pas pris du plomb dans l’aile ces derniers temps ?

Si. En même temps, les propositions de nouveaux « modèles » fleurissent… Mais la crise économique et sociale est si violente et nos États sont tellement ligotés par les contraintes européennes que la crise écologique apparaît comme une menace très lointaine dont il sera bien temps de s’occuper plus tard, quand la croissance sera revenue. L’alliance qui avait commencé à se mettre en place au début de la crise, en 2008, entre syndicats, salariés, consommateurs, ONG et gouvernements autour d’une cause commune entre social et écologie, a éclaté. L’écologie apparaît aujourd’hui comme l’ennemie de l’emploi.

Dans les différents scénarios qui sont évoqués pour sortir de la crise (réformes structurelles détricotant notre modèle social, relance, sortie de l’euro…), il y en a un qui est très peu évoqué : faire de l’Europe non pas l’économie la plus « compétitive » mais une zone de très haute qualité écologique, démocratique et sociale. Cela suppose la mise en œuvre, au plus vite, d’un programme massif de transition, permettant d’engager la reconversion des industries les plus polluantes et le développement des énergies de substitution. Les ruptures avec le « modèle actuel » sont multiples : il faudrait un financement par une BCE réformée, une redistribution massive des revenus et une solidarité sans faille entre les États européens, une imposition commune, l’adoption de normes écologiques et sociales élevées… Mais cela pourrait avoir un effet d’entraînement sur le reste du monde. 

L’idée peut être séduisante, mais comment la mettre en œuvre ?

Des politistes néo-institutionnalistes qui théorisent le changement social – je pense à Peter Hall – montrent qu’on ne parvient à changer que lorsqu’on arrive à la fois à montrer les échecs du paradigme en vigueur et qu’un autre modèle est prêt. Je pense que les échecs et les impasses du système actuel sont flagrants, mais qu’il reste encore trop d’obscurités sur les contours du modèle futur désirable et sur le chemin qui va de l’un à l’autre. Mais des changements importants sont en cours du côté des acteurs : je pense à l’évolution d’un groupe politique comme Attac qui met aujourd’hui la reconversion écologique au premier plan de ses préoccupations alors qu’il a été longtemps en faveur de la croissance ; mais aussi à tous les mouvements décroissants, objecteurs de croissance, promoteurs de la sobriété ; enfin à tous ces citoyens qui refusent la double aliénation de la surconsommation et du travail sans sens.

Mais le travail est immense : il faut nous doter de nouveaux instruments, de nouvelles unités de mesures, de nouvelles représentations du monde, et donc sans nul doute inventer de nouveaux fondements et de nouvelles articulations entre les sciences. Par ailleurs, si nous ne parvenons pas à convaincre nos concitoyens, notamment les plus défavorisés, de l’intérêt de ce nouveau modèle, alors ce sont les solutions les plus simplistes qui triompheront. Pour les rallier à cette cause, il faudra engager une redistribution massive des revenus et des consommations.

Peut-on vraiment avoir à la fois l'emploi, la démocratie et le confort avec moins ou pas de croissance ?

Je le crois, mais cela suppose des changements. Certains pensent que lorsque les choses iront vraiment mal (pénuries de ressources, changement climatique, pollutions majeures…), il faudra des régimes autoritaires pour limiter la consommation et réorienter les économies. Mais il y a aussi des scénarios qui, en insistant sur la sobriété ou le rapprochement des niveaux de consommations des très riches et des très pauvres, laissent au contraire penser que seul un développement intense de la démocratie à tous les niveaux permettra d’engager cette grande bifurcation : cela suppose de rompre avec un modèle où « démocratie » signifie aujourd’hui que les plus riches captent la majeure partie d’une croissance de plus en plus faible.

Pourquoi, malgré les destructions d'emplois, l'idée continue-t-elle à progresser que l'augmentation du taux et de la durée du chômage proviendrait des réticences des employeurs à embaucher et de leur crainte de ne pouvoir se séparer de leurs salariés ? Et pourquoi juge-t-on encore que l’importance du chômage serait liée à un manque de volonté des chômeurs, comme on l’a encore récemment entendu dans la bouche du ministre du travail ?

C’est l’ensemble du « paquet idéologique » forgé à la fin des années 1980 et inlassablement diffusé dès ce moment par les organisations internationales (OCDE, FMI, Banque mondiale) qui est désormais adopté, après le Royaume-Uni puis l’Allemagne, par la majorité des partis politiques français, droite et gauche confondues : tous les problèmes viendraient de la « rigidité de l’emploi » et il nous faudrait, pour regagner en compétitivité, démanteler les protections de l’emploi si patiemment construites au cours du dernier siècle, engager des « réformes structurelles » et finalement jeter au panier la fameuse déclaration de Philadelphie qui, en 1944, affirmait que « le travail n’est pas une marchandise ».

 

 

Nous avons montré dans L’Emploi en ruptures qu’il est facile de licencier en France et que ce ne sont évidemment pas les règles qui encadrent le travail qui sont à l’origine du chômage. L’explosion des ruptures conventionnelles le montre bien. Mais une partie des organisations patronales continue à rêver du « travail libre », de la situation qui existait avant l’intervention du droit du travail. C’est dans la même perspective que s’inscrivent les discours récurrents prônant la diminution permanente du coût du travail, du niveau d’indemnisation du chômage ou des minima sociaux, comme un des moyens de sortir de la crise. Au cœur de cette rhétorique se trouve une croyance : le chômage serait non pas un défi collectif mais un défaut individuel, de l’ordre de la paresse.

Mais les droits sociaux acquis par les salariés au XIXe siècle l’ont été dans une économie où la concurrence n’était pas mondiale ?

Certes, mais ce sont exactement les mêmes arguments qui étaient opposés aux partisans du droit du travail. Par ailleurs, la protection sociale et la protection de l’emploi ont permis d’améliorer la qualité de la main-d’œuvre et de la production. Je crains que la course à la baisse du coût du travail qui s’est engagée en Europe ne finisse par précariser une partie considérable de la population : cela me semble contradictoire avec le souhait d’une Europe qualifiée produisant des biens et services de haute qualité.

On a vu rejaillir dans la bouche du nouveau ministre de l’économie, Emmanuel Macron, une remise en cause de la réduction du temps de travail : cette réduction peut-elle être vraiment une solution d'un monde à croissance faible ou nulle ?

Cela dépend de ce qu’on entend par là. Il est sans doute préférable de parler de partage du travail que de réduction du temps de travail. En effet, la redistribution du travail sur l’ensemble de la population active supposerait certes la réduction du temps de travail de certains mais aussi l’augmentation de celui de beaucoup d’autres, notamment de ceux qui subissent des temps partiels subis et des horaires fragmentés. Il existe de fait, à tout moment, un certain partage du temps de travail, mais il est sauvage et inégalitaire. Il faut le civiliser en rapprochant les durées du travail, parce qu’il est urgent de réintégrer les chômeurs, notamment ceux de longue durée, dans l’emploi car on sait que les compétences (et le moral) se perdent vite dès qu’on est éloigné du travail.

Cessons de dire que la France serait paresseuse : tous les grands pays européens ont connu une importante réduction du temps de travail depuis soixante ans comme l’Insee l’a montré, mais les modalités de ce partage ont été différentes : beaucoup de petits temps partiels courts (occupés par les femmes) et de temps complets longs pour les hommes en Allemagne, des durées plus proches en France, grâce aux lois Aubry. Cela me semble un point fondamental, trop peu souvent commenté quand on se contente de comparer les durées du temps de travail à temps complet.

Derrière la question des modalités de partage du travail et de l’emploi, il y a donc des choix de société déterminants. Il nous faut absolument tirer un bilan serein des lois Aubry : le taux de chômage était au même niveau qu’aujourd’hui lorsque la RTT a été engagée. La période 1997 et 2001 a été marquée par la création de deux millions d’emplois, le retour de l’enthousiasme, un surprenant baby-boom…

Ne faut-il pas toutefois faire évoluer les modalités de ce nouveau partage de travail, par rapport à ce qui avait été fait avec Martine Aubry ?


Martine Aubry, en 2012 
Martine Aubry, en 2012

Je ne suis pas critique de la loi Aubry, même si un problème important a été l’intensification du travail. D’où l’importance de conditionner des aides ou des diminutions de cotisations sociales à l’obligation de créer des emplois et de ne pas modifier le décompte du temps de travail. Si la croissance ne revient pas, il n’existe qu’une méthode pour réintégrer au plus vite les chômeurs de longue durée – de plus en plus nombreux – dans l’emploi : c’est une grande opération de redistribution du travail accompagnant la reconversion écologique, doublée d’une massive opération de formation permettant des transitions professionnelles protégées.

Plusieurs études montrent qu’investir dans la reconversion écologique de notre économie (rénovation thermique des bâtiments, verdissement des procédés de production, développement des énergies renouvelables et des transports en commun, agro-écologie) pourrait créer des emplois : Philippe Quirion les chiffre à environ 600 000 emplois pour la France à l’horizon 2030. Et on peut s’attendre à ce qu’un ralentissement des gains de productivité redonne au travail le sens qu’il avait perdu dans un grand nombre de secteurs et de métiers. Cela suppose de faire participer les très hauts salaires, mais aussi et surtout les actionnaires et les revenus du patrimoine à travers une redistribution massive de richesses et de revenus.

Pourquoi estimez-vous que cette nouvelle répartition du volume d’emploi doit s’imbriquer avec une redéfinition du travail ?

Parce que si une telle opération était bien faite, elle pourrait nous permettre de rendre le travail plus supportable en évitant que l’on exige de chaque individu des gains de productivité plus élevés. Dans la plus grande partie des services aujourd’hui, faire des gains de productivité conduit à dégrader le sens et la qualité du travail. Nous avons tous appris en économie que les gains de productivité conditionnaient la croissance et le progrès, que la destruction créatrice était une bonne chose. On a oublié de nous parler de la destruction des ressources naturelles et de la perte de sens du travail…

Bertrand de Jouvenel le disait mieux que moi : les gains de productivité, s’ils constituent un progrès pour le consommateur, sont une régression pour le producteur… Je crois qu’aujourd’hui, à un moment où les solutions de sortie de crise se radicalisent – si je simplifie outrageusement, adoption du modèle libéral ou sortie de l’euro –, il existe une autre voie, qui exigera elle aussi de profonds changements mais qui semble la plus prometteuse : une reconversion écologique menée par une Europe forte et solidaire qui se serait débarrassée de ses démons...

 

 

Lire aussi

 

Source : www.mediapart.fr

 

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12 septembre 2014 5 12 /09 /septembre /2014 17:02

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/raoul-marc-jennar

 

 

La Commission européenne rejette l’initiative citoyenne sur le GMT/TAFTA

Lors du débat sur le traité constitutionnel européen, l’introduction de l’initiative citoyenne européenne (ICE) fut présentée comme « une grande avancée de la démocratie ». Cette disposition qui s’est retrouvée dans le traité de Lisbonne n’est rien d’autre que le droit d’adresser une pétition à la Commission européenne. Celle-ci peut refuser d’enregistrer l’ICE avant même que les signatures soient recueillies. Elle peut aussi classer sans suite le million de signatures exigé collecté dans au moins sept pays de l’UE.

Un collectif d’associations s’est créé « l’Alliance stop Tafta » et a introduit la procédure d’enregistrement. Celle-ci vient d’être rejetée par la Commission européenne.

Au-delà des arguties juridiques avancées pour justifier ce rejet, il y a bien un refus politique du débat sur un projet de première importance pour la vie des gens et les choix de société qui ont été opérés au cours des décennies dans chacun des pays de l’UE.

La Commission montre, une fois de plus, qu’elle n’est pas au service des peuples, mais bien au service des firmes privées qu’elle a, de son propre aveu, consultés 119 fois entre janvier 2012 et avril 2013 pour préparer le mandat de négociation accepté par les gouvernements, dont le nôtre. La Commission écoute le monde des affaires et de la finance ; elle refuse d’entendre les peuples.

rmj 

 

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/raoul-marc-jennar

 

 

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11 septembre 2014 4 11 /09 /septembre /2014 18:17

 

Info reçe par mail

 

 

Attac et l'Aitec publient aujourd'hui un rapport inédit, analysant le texte de l'accord commercial UE-Canada, CETA.  

Alors que cet accord est prévu pour être signé le 25 septembre prochain, le texte n'est toujours pas rendu public. 
 
Ce rapport d'Attac et de l'Aitec se base donc sur une version fuitée du projet d'accord. Il montre que l'accord économique et commercial global CETA ("Comprehensive Economic Trade Agreement"), négocié depuis 2009 entre l'Union européenne et le Canada, constitue par bien des aspects un cheval de Troie du traité transatlantique (Tafta). 

Cet accord contient en effet tous les aspects identifiés « à risque » dans l’accord transatlantique. Or, sauf opposition des États membres, il sera finalisé lors de la réunion du 12 septembre du Comité Politique Commerciale (CPC) du Conseil de l’Union Européenne.
 
Les deux associations appellent donc en urgence les citoyen.ne.s à interpeller leurs députés.
 
-> Le rapport "CETA, marche-pieds pour l'Accord transatlantique" : https://france.attac.org/nos-publications/notes-et-rapports-37/article/structure-generale-de-l-accord
 

-> La plate-forme de mobilisation et d'interpellation des parlementaires :  https://france.attac.org/se-mobiliser/le-grand-marche-transatlantique/article/ceta-le-cheval-de-troie-du-tafta

 

 

 

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11 septembre 2014 4 11 /09 /septembre /2014 17:41

 

 

 

*Note perso : ZAD du Testet - Forêt de Sivens  -

 Plein d'info en suivant le lienci-dessous (en français, malgré le nom du site) :

 
http://www.scoop.it/t/think-outside-the-box?q=Sivens

 

 

 

                                                                    **********************************

 

 

 

Source : www.terraeco.net

 

 

A quoi va servir le barrage de Sivens ?

11-09-2014

 

 

www.terraeco.net
(Crédit photo : Capture d'écran du film la lutte du Sivens de Roxanne Tchegini)
 
Le 1er septembre, les tractopelles sont arrivés sur le site de ce projet dans le Tarn, provoquant des affrontements entre forces de l'ordre et opposants. Mais au fait, pourquoi ce barrage ?

Grève de la faim, Zone à défendre (ZAD), GIGN (Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale) et affrontements. Dans le Tarn, la mobilisation contre le barrage de Sivens prend des airs de Notre-Dame-des-Landes. Et pour cause, sur les 42 hectares qui doivent être artificialisés pour le projet, 13 sont en zone humide et abritent 84 espèces protégées. Malgré les avis défavorables (à lire ici et ) émis par deux organismes, le Conseil national de protection de la nature (CNPN) et l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (Onema), la préfecture a donné son feu vert au projet en octobre 2013. Les tractopelles ont commencé a défricher la semaine dernière. Mais des zones d’ombre demeurent sur le bien-fondé du projet.

- Comment est justifiée la construction de ce barrage ?

Les défenseurs du projet, le conseil général, la Chambre d’agriculture et la CACG (Compagnie d’aménagement des Coteaux de Gascogne), l’entreprise semi-publique en charge de sa réalisation, estiment qu’il est nécessaire au maintien de l’agriculture. Car le département manque d’eau. Il est en moyenne déficitaire de 39 millions de mètres cubes par an. Le Tescou, cette rivière qui serpente dans une plaine agricole, est souvent à sec les mois d’été. Ce déficit chronique, que va accentuer le réchauffement climatique selon un rapport prospectif de l’agence de l’eau Adour-Garonne, inquiète les agriculteurs.

« Le manque d’eau, ajouté à la volatilité du cours des matières première et à l’empilement des règlementations, met notre activité en péril, estime Pierre Vincent, responsable du secteur irrigation de la FDSEA (Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles) du Tarn. Aucun exploitant n’a encore jeté l’éponge mais certains sont passés en pluri-activité, ils conduisent des bus, font des petits boulots. » Sur les 1,5 million de mètres cubes du barrage de Sivens, deux tiers doivent permettre aux agriculteurs « d’assurer l’autonomie fourragère de leur exploitation », selon Jean-Claude Huc, président de la Chambre d’agriculture interrogé dans La Dépêche. Manuel Valls lui-même présente ce barrage comme « un élément décisif pour l’installation des jeunes agriculteurs », rapporte le site Reporterre, même si les syndicats n’ont eu vent d’aucun projet de la sorte pour l’instant.

- Combien d’agriculteurs vont en bénéficier ?

Entre les pro et les anti-barrage, la bataille des chiffres fait rage. Du côté du collectif du Testet, l’un des deux groupes opposé au barrage, on estime à une vingtaine le nombre d’agriculteurs concernés. « Compte tenu du coup du barrage, évalué à 8,5 millions d’euros, ça fait 200 000 euros par ferme, l’investissement est jugé disproportionné », estime Ben Lefetey, porte-parole du collectif. De son côté, la Chambre d’agriculture parle de 82 exploitants. Ce chiffre correspond bien aux agriculteurs riverains du Tescou, potentiels bénéficiaires du barrage. « Ceux-ci sont en fait 51, car un autre barrage, celui de Thérondel, répond déjà aux besoins de ceux qui sont le plus en aval », poursuit-il. En amont, tous ne pratiquent pas l’irrigation et certains ont déjà leur propre retenue d’eau. Et rares sont ceux qui s’engagent tant que le prix de rachat n’est pas fixé. « Sur les 82, au moins une moitié est intéressée », évalue Pierre Vincent à la FDSEA, sur la base d’une enquête menée il y a 2 ans. Une estimation un peu légère pour Ben Lefetey qui déplore que les travaux commencent sans qu’aucun recensement des bénéficiaires n’ait été réalisé.

- De quel type d’agriculture s’agit-il ?

« Il y a deux petites exploitations, dont un maraîcher bio, qui sont intéressées, reconnaît un militant du collectif des Bouilles. Mais c’est l’arbre qui cache la forêt. Le reste ce sont des grosses exploitations de maïs. » Une accusation dont se défend la FDSEA : « L’agriculture dans la région n’a pas beaucoup bougé depuis quarante ans, alors certes il y a du maïs, mais aussi du soja, du tournesol, des éleveurs et des maraîchers », corrige Pierre Vincent. Un chiffre vient les départager : dans le Tarn, les exploitations de maïs représentent 48% des surfaces irriguées.

« Notre crainte, c’est qu’avec le barrage cette proportion augmente, explique Ben Letefey. Avec un apport en eau sécurisé, les agriculteurs pourraient travailler pour les semenciers. Il y a une demande forte et ce métier rapporte gros. Mais en termes d’engrais et d’eau, ce type d’agriculture n’est pas réputé pour sa sobriété. »

- Le barrage est-il le seul moyen de parer aux problèmes d’irrigation ?

Non. Dans la région, les exploitants agricoles ont surtout recours aux retenues collinaires, sorte de piscines d’environ un hectare construites à flan de colline. Sur le versant concerné par le projet, 185 retenues collinaires ont déjà été creusées. Elles ont une capacité de 4,5 millions de m3, soit le triple de celle du barrage de Sivens, et détournent déjà un tiers de l’eau du Tescou. Un modèle que défend la Coordination rurale. « Dans la région, la pluviométrie est acceptable mais les flux sont irréguliers c’est pourquoi nous avons besoin de retenir l’eau l’hiver pour irriguer l’été », explique Alain Reillis, vice-président du syndicat. « Ces bassins répondent aux besoins des agriculteurs et s’insèrent bien dans l’environnement mais on butte sur l’administration, déplore-t-il. Alors que dans le Lot-et-Garonne près de 200 retenues ont été creusées en deux ans, le Tarn n’en a autorisé que 2 cette année. » Retenue ou barrage, pour le collectif du Testet le stockage lui-même est une fausse solution. La preuve ? « 1900 retenues et 40 barrages construits en 25 ans sur le bassin Adour-Garonneiv n’ont pas réussi à résoudre le manque d’eau » déplore ces opposants.

- Le barrage est-il uniquement destiné aux agriculteurs ?

Deux tiers de sa capacité seulement. Le tiers restant doit maintenir l’étiage du Tescou à un niveau correct même les mois d’été. Ainsi, le président du conseil général du Tarn, Thierry Carcenac (PS) a déclaré au Monde que « même si aucun agriculteur ne pompait dedans, [il] le ferait quand même pour améliorer la qualité de l’eau ». En augmentant le débit de cette rivière, les élus entendent diluer les rejets des villages alentours, deux stations d’épuration et une laiterie. Mais pour Ben Lefetey, cette préoccupation est datée.

« Les niveaux de pollution étaient préoccupant au début des années 2000, depuis les installations ont été mises au normes, la pollution a considérablement diminué », soutient le militant, qui observe le retour d’une vie aquatique dans la rivière. « Mais là encore c’est le grand flou, nos demandes répétées d’information sur les rejet de la laiterie aujourd’hui sont restées lettre morte. » « La seule utilité évidente de ce projet, c’est de faire bosser le BTP », estime un membre du collectif des Bouilles. « C’est un projet sur mesure pour la CACG qui a réalisé les études d’impact et porte le projet », acquiesce Ben Lefetey. De son côté, le conseil général est à la fois commanditaire et maître d’ouvrage du projet. Un imbroglio d’intérêts qui conforte les opposants.

- A voir sur le sujet : le film de Roxanne Tchegini

 

 

 

Source : www.terraeco.net

 

 


 

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11 septembre 2014 4 11 /09 /septembre /2014 17:24

 

Info reçue par mail

 

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Nouvelles importantes

 

Bonjour à toutes et à tous,

Journée désive aujourd'hui pour notre lutte. Protection de la zone humide à travers le blocage des entrées pour empêcher le Conseil Général et la CACG de passer en force. La journée a débuté avec une attitude très agressive des forces de l'ordre. Après plusieurs heures d'apaisement du fait de la pression exercée sur la Ministre Ségolène Royal et sur Thierry Carcenac, les gardes-mobiles et le PSIG de Gaillac ont chargé des manifestants pacifiques en fin d'après-midi.(Voir vidéos ici)

Après que tous les opposants unis aient empêché les machines à massacrer la forêt de rentrer dans la zone y compris en coupant plusieurs routes, dont la route Gaillac-Montauban pendant toute la matinée, les forces de l'ordre ont utilisé la violence pour réussir à faire rentrer deux machines vers 16h30. Celles-ci ont travaillé seulement 2h donc ce passage en force avait seulement pour but de matter des opposants qui ont réussi à tenir tête aujourd'hui à une centaine de garde-mobiles aidés d'un hélicoptère. Carcenac parle de dialogue aux journalistes mais envoie les matraques et les gaz lacrymogènes.

Concernant le bilan détaillé de la situation sur le terrain, voir le site du Collectif tant qu'il y aura des bouilles

En fin de journée, nous avons appris que Ségolène ROYAL nomme une mission d’expertise pour favoriser le dialogue et vérifier les garanties d’une gestion durable de la ressource en eau. voir communiqué

. Thierry Carcenac la rencontrera ce mardi à Paris. Nous sommes très satisfaits de cette mission d'expertise.

Mais malheureusement, aucun signe de moratoire pour autant. Est-ce à dire que le projet serait réévalué mais que sa version d'origine continuerait son chemin et son oeuvre de destruction ? Les experts vont examiner le projet dans le bruit des tronçonneuses ?

France Nature Environnement Midi-Pyrénées a obtenu du Tribunal de Toulouse qu'il avance la date de l'audience de notre recours suspensif commun au 15 septembre (au lieu du 26 originellement). Il faut s'attendre à entendre la décision dans la semaine du 15.

Notre liste des médias relayant la situation est à jour en ligne, beaucoup de médias sur place aujourd'hui. A noter ce mardi 9/9, reportage sur BFM à 22h45.

La mobilisation doit se poursuivre pour obtenir le moratoire ! Pour rejoindre le Collectif sur place, sauf contre-ordre, rendez-vous au carrefour de Barat (Voici le plan d'acès en PDF)  où vous serez accueillis. Il faut continuer à soutenir les grévistes de la faim qui entrent dans le 13e jour de grève.


Nous comptons sur vous pour empêcher la destruction de la zone humide du Testet, nous pouvons encore gagner !

 

 

 

 

Info envoyée par l'auteure

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/blog/burkinafaso

 

 

La résistance sur la zone humide du Testet

Nous sommes arrivés dimanche avec des amis sur la zone du Testet après plus de 3 heures de route répondant ainsi à l'appel lancé sur les réseaux sociaux. A cette occasion nous avons pris connaissance du dossier (et de l'état du saccage) ainsi que du mot d'ordre lancé par José Bové (bien que ce ne soit pas forcément ma tasse de thé) : sabotage et désobéissance civile (en refusant notamment de payer nos impôts utilisés sur des projets qui nous desservent et profitent d'abord aux intérêts privés).

Imaginez un paysage bucolique, entouré de collines aux teintes verdoyantes, où serpente au gré des prairies et des sous bois, une petite rivière. Une belle métairie abandonnée, en briques et en pisée, propriété du Conseil Général, parfait le tableau... Mais... En écoutant on apprend que le four à pain qui avait été remonté par les jeunes qui occupent et défendent ces terres et la forêt de Sivens, a été démoli par les forces de l'ordre... Puis en s'approchant d'un lieu nommé les "Bouilles", on tombe sur un paysage lunaire qui annonce le début de la destruction programmée de la forêt... Un trou béant à travers bois, les machines mécaniques ont comme avalé et digéré cette partie de la forêt... Il ne reste rien ... Que de la désolation... Plus un seul brin d'herbe... Un sol argileux défoncé qui laisse apparaître ici et là des moignons de feu nos amis les arbres...Et ce n'est qu'un début...

Puisqu'il faut tout raser, détruire pour permettre la construction d'un barrage qui mettra 4 ans à se remplir (et quelques mois à se vider) grâce à la toute petite rivière qui circule...  Barrage qui servira à irriguer des champs immenses de maïs... Au nom (dissimulé) de l'agriculture intensive, spéculative et polluante...

Au nom d'un président de Conseil Général, socialiste et cumulard sur la durée (encore un spécialiste du genre), on privilégie l'intérêt d'une vingtaine de gros exploitants au détriment du bien commun (la terre, la forêt, l'eau).

Et pourtant des recours en justice sont en cours... Mais plutôt que d'attendre le résultat de la justice, le président du conseil général du Tarn préfère passer en force. La stratégie du "fait accompli", très courant actuellement chez les "politiciens" (qui n'ont plus rien de politiques) locaux, révélant au passage le peu de cas qu'ils font de notre justice et de notre état de droit... Ce sont les pires offenseurs de notre Démocratie et de notre République...

Le plus grave dans cette histoire c'est cet hélicoptère qui n'a cessé de survoler dimanche les citoyennes et citoyens réunis dans la belle prairie pour trouver les moyens d'arrêter ce désastre environnemental, comme s'ils n'étaient que de dangereux malfaiteurs...

Plus grave encore ce sont ces gardes mobiles qui ont été déployés lundi sur le site pour permettre aux machines de pénétrer et continuer la sale besogne de destruction massive et de servir les intérêts d'une minorité destructrice muée par l'appât du gain sans se soucier des lendemains qu'elle pousse à déchanter...

Plus grave encore c'est ce service des forces de l'ordre payés par notre caisse commune et solidaire (du moins de ce qu'il en reste), nos impôts,  pour nous taper dessus femmes et hommes, jeunes, vieux et moins vieux...Alors que nous défendons le bien commun...

Plus grave encore et quelle honte (!) ce sont ces mots d'ordre du préfet (reçus de qui?) ordonnant aux forces de l'ordre de forcer et piétiner les barrages... barrages de voitures et de tracteurs, barrages de corps humains enterrés... Et partout la violence policière cède au dialogue citoyen...

Jusqu'en début d'après midi nous avons cru à une avancée, à un répit gagné pour la forêt... Mais la bêtise n'a pas de limite et c'est dans l'après midi que la charge a eu lieu et que les machines ont continué...

Quel gâchis mesdames et messieurs les socialistes ... Après Notre Dame des Landes, vous continuez à tabasser votre jeunesse pour défendre les intérêts de quelques uns...

Ces jeunes sincères dans leur combat, qui n'ont que leur corps et leur courage pour défier vos instincts destructeurs... Ces jeunes qui ont compris que notre seul voie de survie c'est de préserver la terre qui nous nourrit... Il semble que vous ne voulez pas de ces jeunes, amoureux de la forêt et des cours d'eau, qui refusent d'être de simples consommateurs et spectateurs d'une vie de plus en plus virtuelle...

Vous préférez sans doute ceux qui partent à la City, ou encore ces ingénieurs sans génie qui travaillent quotidiennement à perfectionner et mettre au point, des armes qui permettront de tuer l'autre, ou encore de mieux nous contraindre, des machines aussi, celles qui permettent de dévorer, avaler les forêts...

Vous pariez peut-être sur un jour où ils nous construirons des machines qui remplaceront les arbres et nous permettront de respirer, des machines ou autres formules scientifiques qui nous fourniront de l'eau sans l'aide des nuages et des rivières...

Vous faites le pari fou de la mort contre celui de la vie... Il est temps pour vous de laisser votre place... Et à nous de redonner sens à la vie en société en lien les uns avec les autres et avec la nature...

Face à l'appel des habitants du coin et des jeunes, nous sommes restés lundi pour aider à faire barrage...Mais il nous fallait rentrer le soir...

 

ILS ONT BESOIN DE MONDE SUR PLACE et de relais... Faisons marcher à plein les canaux de la solidarité...

 http://www.collectif-testet.org/

 http://tantquilyauradesbouilles.wordpress.com/

Un article de journalistes qui racontent en détails et très justement ce qui se passe depuis lundi  : http://www.reporterre.net/spip.php?article6275

Des vidéos qui montrent la violence qui s'abat sur les opposants à la destruction :  http://www.networkvisio.com/barrage-de-sivens-tarn/tv-zad-du-barrage-de-sivens-dans-le-tarn-les-opposants-malmene.html?vod=9788

 

 

 

 

 

 

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11 septembre 2014 4 11 /09 /septembre /2014 16:47

 

Info reçue par mail

 

 

Bonjour,

les nouvelles de Gardanne sont très inquiétantes : depuis 20 août de nombreux camions sont arrivés à la centrale chargés de grumes (voir photo ci-dessous). En plus, nous devons constater que La Provence apporte son appui à E.On : "En Provence, on ne coupe pas assez d'abres" (4 septembre 2014).

 

Premiers bois à broyer-red

Il est urgentissime de réagir. Le Collectif SOS Forêt du Sud étudie les possibilités de référé juridique pouvant accélérer l'examen de nos deux recours déjà déposés. Dans ce cadre, nous avons demandé à nos amis britanniques de Biofuelwatch de rédiger des documents sur les impacts extrêmement négatifs sur la santé publique de mégacentrales à biomasse. Nous avons reçu deux documents qui sont en cours de traduction, que nous vous enverrons une fois prêts.

D'autre part, nous avons décidé d'organiser un grand rassemblement contre le projet d'E.On qui aura lieu le dimanche 5 octobre à 10h30 sur la place de la Mairie à Gardanne.

Il est ESSENTIEL que nous soyons TRES NOMBREUX pour ce rassemblement, avec un maximum de maires et d'élus avec écharpes. Il faudrait coordonner les covoiturages ou éventuelle location de cars au niveau de chaque département :

- pour le 04, écrire à
nicholas.bell@gmx.net -

 -pour le 05, écrire à Etienne Decle : etienne.decle@wanadoo.fr
- pour le 83, écrire à Jérôme Tron : jtron1@free.fr
- pour les Cévennes : contact@sosforetcevennes.org

Nous rédigerons prochainement un tract à diffuser aussi largement que possible sur ce rassemblement.

Lors d'une réunion le 5 septembre à Alès, nous avons aussi décidé d'organiser une manifestation et réunion publique le jeudi 16 octobre à Florac (Lozère). La manif sera devant le siège du Parc National des Cévennes afin de protester contre l'accord de partenariat signé par le PNC avec E.On. Ce serait important que des élus qui ont adopté des motions contre le projet d'E.On y participent, notamment des élus des Parcs Naturels Régionaux qui ont exprimé leur opposition (Luberon, Baronnies).

Je tiens aussi à insister sur le fait qu'il ne s'agit pas uniquement de défendre les forêts de nos régions face à l'appétit d'un mastodonte comme E.On (ou Inova à Brignoles). La menace est planétaire. Nous venons de recevoir un article qui explique que le Canada est devenu le pays avec la pire déforestation au monde, dépassant le Brésil (voir article du "Ottawa Citizen"), notamment dans la forêt boréale qui a besoin de siècles pour se recréer, à cause des températures très basses. Une bonne partie du bois coupé aujourd'hui est destiné aux mégacentrales à biomasse en Europe, comme la centrale de Drax au Royaume-Uni qui a besoin de 15 millions de tonnes de bois par an!!! Nous savons qu'E.On importera la moitié du bois pour Gardanne, au moins pendant 10 ans.

A ce propos notons que, selon Pierre Calfas, président de FNE 13, qui
a participé, vendredi dernier, à la mise en place du nouveau conseil de développement du Grand Port Maritime de Marseille,  la nouvelle directrice du directoire a annoncé avec plaisir qu'E.On avait signé fin juin un contrat avec une société manutentionnaire (Sea Invest / Carfos) pour 300.000 tonnes par an de bois pour 10 ans.

Voilà pour le moment. C'est le moment de bouger! Salutations, Nicholas Bell, Collectif SOS Forêt du Sud


PS: Nous avons fait imprimer l'excellent dossier "Forêt, un trésor inépuisable?" (20 pages A4 en couleur) publié dans le numéro d'été de la revue de Nature et Progrès. Il y a deux articles sur E.On et son impact prévisible sur les forêts, et d'autres sur le Réseau pour les Alternatives Forestières, Pro Sylva etc. Vous pouvez le commander chez moi. Le dossier coûte 2 euros par exemplaire, il faudrait rajouter les frais de port : 1.50 euro pour un exemplaire, 3.20 euros pour cinq). Vous pouvez m'envoyer un chèque à :
Nicholas Bell, Le Pigeonnier, 04300 Limans

 

 

 


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11 septembre 2014 4 11 /09 /septembre /2014 15:57

 

Source : www.mediapart.fr

 

Economie: échec, confusion et amateurisme

|  Par Laurent Mauduit

 

 

 

Croissance en baisse, déficits en hausse: le gouvernement a brutalement révisé ses prévisions ce mercredi. L'échec qui prend forme est d'autant plus inquiétant qu'il avait été prédit de longue date par de nombreux experts. Mais François Hollande n'a rien voulu entendre.

À quelques jours de la présentation du projet de loi de finances pour 2015, qui interviendra le 1er octobre, le gouvernement s’est livré à un exercice inédit. Il a admis, même si c’est à demi-mot, que sa politique économique conduisait tout droit à l’échec. Donnant implicitement raison à tous ceux qui depuis des mois dénoncent les effets récessifs induits par l’austérité et les effets d’aubaine des cadeaux aux entreprises, il a été dans l’obligation de reconnaître que toutes les prévisions économiques de Bercy, sur la croissance, les déficits ou l’inflation, devaient être revues. Toutes dans le mauvais sens.

À l’occasion d’une conférence de presse, mercredi matin, c’est le ministre des finances, Michel Sapin, flanqué de son secrétaire d'État chargé du budget, Christian Eckert, qui s’est livré à cet exercice périlleux : admettre, sans l’admettre vraiment, que le gouvernement avait tout faux ; reconnaître que les priorités économiques du gouvernement conduisaient vers une impasse, mais sans les changer d'un iota.

 

Christian Eckert et Michel Sapin 
Christian Eckert et Michel Sapin © Reuters

En bref, le ministre des finances a admis que les prévisions économiques du gouvernement les plus récentes, celles qui avaient été rendues publiques en juin dernier lors de la présentation du projet de loi de finances rectificative, étaient toutes déjà obsolètes. Beaucoup moins de croissance ! Beaucoup plus de déficits ! Plus de déflation ! Comme dans un mouvement de panique, Bercy a enfin reconnu que, bien loin de la reprise prophétisée au printemps par François Hollande, tous les indicateurs économiques étaient mal orientés.

« On est entré dans la deuxième phase du quinquennat, le redressement n'est pas terminé, mais le retournement économique arrive », fanfaronnait le chef de l’État le 4 mai dernier (lire Croissance et chômage : Hollande, l’extralucide !). Las ! Quatre mois plus tard, le gouvernement doit avouer que tout cela n’était que fariboles.

Concrètement, le gouvernement a d’abord révisé à la baisse sa prévision de croissance. Pour 2014, elle ne devrait pas dépasser 0,4 %, et pour 2015 Bercy table désormais sur une croissance de seulement 1 % au lieu du 1,7 % qui était attendu en juin dernier. En clair, François Hollande s’est totalement trompé – à moins qu’il n’ait abusé l’opinion ? – en annonçant ces derniers mois une reprise, confortée selon lui par les retombées de la politique économique du gouvernement. C’est exactement l’inverse qui est à l’œuvre. Même si le gouvernement n’a pas évoqué dans la foulée l’évolution du chômage, la révision à la baisse de la prévision de croissance fonctionne, là encore, comme un aveu : le chômage va malheureusement continuer à grimper les mois prochains.

Les déficits publics vont du même coup déraper beaucoup plus que prévu. De l’aveu même de Michel Sapin, ils devraient atteindre 4,4 % du produit intérieur brut (PIB) en 2014, alors que l’objectif affiché en loi de finances initiale était de 3,6 %, et de 3,8 % en loi de finances rectificative. Ces déficits publics, qui ont atteint 4,3 % en 2013, ne sont donc pas en baisse, mais… en hausse ! En clair, la réduction des déficits publics qui était présenté comme l’objectif central de la politique économique – et qui est la justification de la politique d’austérité – est en train d’échouer.

Cet échec sur les déficits publics est un camouflet pour François Hollande, car initialement il voulait réduire les déficits publics sous la barre des 3 % dès 2013, or Bercy envisage maintenant que l’objectif pourrait être atteint au plus tôt en… 2017.

Enfin, Michel Sapin est venu implicitement confirmer que la France, comme le reste de l’Europe, était confrontée à un grave danger, celui de la déflation. Le ministre a donc révisé la prévision d’inflation pour 2014 à seulement 0,5 % et 0,9 % en 2015.

Il y a quelque chose de confondant dans ces révisions des prévisions économiques. Car, de longue date, le gouvernement avait été prévenu que sa politique économique n’était pas la bonne et qu’elle conduirait à moins de croissance et plus de déficits. Or, c’est très exactement ce scénario qui est à l’œuvre. De nombreuses alertes ont été adressées au gouvernement depuis 2012, et auxquelles ce dernier, prisonnier de la doxa libérale à laquelle il s’est ralliée sitôt passée l’élection présidentielle, n’a jamais voulu prêter attention. Avec entêtement, il a même aggravé ces erreurs.

Une politique qui « s’auto-annule »

Le gouvernement a en effet adossé sa politique économique à deux priorités majeures, toutes les deux d’inspiration libérale. En premier lieu, il a fait de la lutte pour la réduction des déficits sa première priorité, avec à la clef le plan de 50 milliards d’euros d’économies que l’on connaît. Puis il a fait de son plan de plus de 40 milliards d’euros d’allègements fiscaux et sociaux sa seconde priorité. Et mariant les deux priorités, il a argué qu’il avait mis au point la bonne recette pour renouer avec la croissance. On connaît les arguments avancés : il n’y a pas de croissance durable sans rétablissement des comptes publics ; et il n’y a pas plus de croissance dynamique si la compétitivité des entreprises est grevée par des impôts trop lourds ou des cotisations sociales trop fortes.

Mais ces arguments, puisés dans la boîte à outils intellectuelle du patronat et des milieux d’affaires, sinon même de l’UMP, ont été réfutés par de nombreux experts – avant de l’être dans les rangs mêmes du Parti socialiste par les députés frondeurs – et pas seulement eux.

Dans le cas de l’austérité, un seul exemple : dès le 6 juillet 2012, l’économiste de l’OFCE Xavier Timbeau tire la sonnette d’alarme dans un entretien prémonitoire avec Mediapart (lire Xavier Timbeau (OFCE) : « C’est l’escalade vers la catastrophe »). Avec le recul, ce que dit cet expert prend une forte résonance. Car, quand il prend la parole, le 6 juillet 2012, la gauche socialiste n’est au pouvoir que depuis quelques semaines. Et le gouvernement de Jean-Marc Ayrault n’a fait que prendre de premières mesures budgétaires d’économie. À l’époque, on est encore très loin du plan d’austérité de 50 milliards.

Avec le recul, il est utile de relire ce que disait cet expert : il expliquait que dans une période de stagnation ou même de récession, il était aberrant de conduire une politique restrictive car cela conduirait à casser toute possibilité de reprise. Il expliquait qu’une politique qui chercherait en priorité à réduire les déficits publics à marche forcée dans cette période de conjoncture dépressive serait radicalement contre-productive : cassant la croissance, elle conduirait à tarir les rentrées de recettes fiscales et sociales. En clair, prévenait-il, c’est une politique qui « s’auto-annule ». « On est dans un processus à plusieurs étapes : dans un premier temps, on annonce un peu plus d'austérité ; et puis on dit : “Ah! c'est pas de chance ! Il y aura moins de croissance que prévu ; il faut donc que l'on soit un peu plus dur" ; et ainsi de suite…On est dans un processus où l'objectif s'éloigne au fur et à mesure que l'on cherche à s'en rapprocher. C'est la logique à l'œuvre au niveau français, comme elle l'est au niveau européen », expliquait Xavier Timbeau.

Cette critique, il n’était pas le seul à l’exprimer. Dès le printemps 2011, c’est même cela qui avait conduit le Parti socialiste à adopter une plate-forme pour la présidentielle, ratifiée par les militants, qui critiquait la décision de Nicolas Sarkozy de vouloir atteindre les 3 % de déficits publics dès 2013. Pour ne pas étouffer l’activité, le projet socialiste préconisait de réduire les déficits de manière beaucoup plus prudente, en repoussant l’objectif des 3 % à 2014 sinon même 2015. Mais on sait ce qu’il en est advenu : foulant au pied le projet de son propre parti, François Hollande a décidé de retenir l’objectif de Nicolas Sarkozy, avec une réduction à 3 % des déficits dès 2013.

Le résultat, on le voit aujourd’hui. Comme l’avait prédit Xavier Timbeau, c’est une politique qui « s’auto-annule » que les socialistes ont mise en place. Fixant le cap sur l’austérité au nom de la réduction des déficits, ils ont cassé la croissance et… creusé les déficits. Et en bout de course, on en arrive à ce bilan paradoxal : les fameux 3 % de déficits que François Hollande voulait atteindre dès 2013 sont maintenant repoussés à… 2017 !

Le plus stupéfiant de l’histoire, c’est que ces mises en garde se sont ensuite multipliées, en provenance d’un peu tous les horizons. Et dans les rangs mêmes du PS, ils ont pris de plus en plus d’ampleur, ce qui a renforcé les rangs des frondeurs. Car le gouvernement, faisant toujours la sourde oreille, a durci progressivement son action, jusqu’à adopter le plan d’austérité de 50 milliards d’euros, dont 21 milliards d’euros d’économies.

Que l’on se souvienne par exemple de la mise en garde qu’avait formulée pas plus tard qu’au printemps dernier la rapporteure générale du budget (PS) à l’Assemblée. Dans un rapport publié le 23 juin dernier (on peut le télécharger ici), à la veille du débat budgétaire qui devait tout à la fois examiner le plan d’austérité de 50 milliards d’euros et les cadeaux offerts aux entreprises (lire La politique d’austérité conduit tout droit à la catastrophe), Valérie Rabault faisait ces mises en garde – qui n’ont pas plus été entendues que les précédentes : « Selon les prévisions établies par le ministère des finances et des comptes publics dont dispose la Rapporteure générale, le plan d’économies de 50 milliards d’euros proposé par le gouvernement pour la période 2015 à 2017, soit une réduction des dépenses de plus de 2 points de PIB, aurait ainsi un impact négatif sur la croissance de 0,7 % par an en moyenne entre 2015 et 2017, et pourrait entraîner la suppression de 250 000 emplois à horizon 2017. » (Lire L’échec économique, le désastre social.)

Mais à l’époque, cette prévision de simple bon sens avait été accueillie par des moqueries par Michel Sapin. Et pourtant, nous y sommes : si le gouvernement est contraint de revoir ses prévisions à la baisse, c’est Valérie Rabault qui avait raison.

40 milliards de dividendes pour les actionnaires

On sait d’ailleurs pourquoi François Hollande s’est enfermé dans cette erreur : voulant apporter plus de 40 milliards d’allègements fiscaux et sociaux aux entreprises, il fallait bien que le gouvernement trouve les moyens de les financer. Impossible donc d’amender le plan d’austérité, car du même coup, cela aurait menacé encore plus gravement l’équilibre des finances publiques au moment où elles étaient par ailleurs sollicitées pour mettre en place le système de crédit d’impôt en faveur des entreprises, puis d’allègements des cotisations sociales.

La première erreur du gouvernement sur la réduction des déficits publics s’est donc doublée d’une seconde sur son plan de 40 milliards d’euros d’allègements en faveur des entreprises. Comme dans une folle fuite en avant, les dignitaires socialistes ont joué avec ce plan leur va-tout : ils ont répété à l’envi que de lui viendrait le salut. On connaît la ritournelle : les 40 milliards apportés aux entreprises vont stimuler leurs projets d’investissement et d’embauche ; la croissance va donc repartir et le chômage baisser.

Et comme il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, le gouvernement a cherché à tourner en dérision tous ceux qui lui faisaient observer que cette somme exorbitante en faveur des entreprises, déboursée sans la moindre contrepartie de la part des entreprises, ne produirait guère que des effets d’aubaine. C’est ce qu’ont répété en particulier de nombreux députés frondeurs tout au long des derniers mois.

Or, avec la révision de ses prévisions, le gouvernement vient là encore de convenir – sans le dire vraiment – que les frondeurs avaient raison : les allègements risquent de conduire à des effets d’aubaine massifs pour les entreprises ou leurs actionnaires, mais sans dynamiser l’investissement ou la croissance.

Tout invite à cette conclusion ravageuse : aussi bien ces révisions de prévisions que les dernières données dont on dispose sur les résultats des entreprises. Car si l’investissement est en chute et l’emploi en berne, les actionnaires, eux, se portent au mieux – merci pour eux ! On a même appris le mois dernier grâce à une étude d’un organisme financier, Henderson Global Investors, que la France avait décroché le trophée (assez peu glorieux pour le gouvernement socialiste !) de championne d’Europe des dividendes versés aux actionnaires. Les rémunérations versées en 2014 aux actionnaires ont en effet augmenté de 30,3 % en France pour atteindre 40,7 milliards de dollars.

Comme on pouvait le craindre, les cadeaux aux entreprises ont donc bel et bien généré des effets d’aubaine, mais pas d’effet économique véritable. Ce n’est d’ailleurs qu’un hasard, mais on ne peut s'empêcher d'y voir une valeur symbolique : ces 40 milliards de dividendes correspondent très exactement aux 40 milliards d’allègements fiscaux et sociaux. 

Mais au-delà de l’échec économique, qui est assurément celui de François Hollande, c’est aussi le grand désordre régnant dans les sommets du pouvoir qui transparaît au travers de ces modifications de prévision. Le grand désordre et aussi la panique, l’amateurisme, l’improvisation permanente qui président à l’élaboration de la politique économique. Car il ne se passe plus un jour sans que l’on assiste à un changement de pied, à un ordre suivi tout aussitôt d’un contrordre…

La semaine passée, Michel Sapin avait ainsi semblé prendre la mesure des effets récessifs du plan d’austérité et avait annoncé, prétextant la faible inflation, que le plan de 21 milliards d’euros d’économies serait revu à la baisse. Mais ce mercredi, craignant sans doute les réactions de Bruxelles après l’annonce du dérapage des déficits publics, il a annoncé qu’il n’en serait rien et que les 21 milliards seraient bel et bien appliqués. Comprenne qui pourra... Sur le front de la TVA, même confusion généralisée : agissant en sous-main pour Manuel Valls pour sonder l'opinion, le député socialiste Christophe Caresche a ainsi avancé la semaine passée la suggestion – passablement réactionnaire et inégalitaire – d’une nouvelle hausse de deux points de la TVA. Mais dans les sommets du pouvoir, on craint fort que ce projet, s’il voyait le jour, ne soit perçu comme la provocation de trop par des députés socialistes qui sont à cran.

De cette exaspération, il existe d’ailleurs des signes innombrables. Il suffit par exemple de se reporter à la réaction très révélatrice du député socialiste Pierre-Alain Muet. Ancien conseiller économique de Lionel Jospin, homme mesuré s’il en est et économiste chevronné, le député a accueilli l’annonce de Bercy par un communiqué mi-vengeur mi-moqueur qui, quand on connaît le tempérament de son auteur, en dit long sur l’état d’esprit des troupes socialistes :

« La poursuite de la récession européenne conduit à un déficit public qui ne se réduit pas en France en 2014. Dans cette situation, le gouvernement a raison de reporter à 2017 la réalisation de l'objectif de 3 % pour ne pas ajouter de nouvelles mesures d'austérité à une stagnation, due, comme l'a rappelé le président François Hollande le 20 août, à "un problème de demande dans toute l'Europe"... résultant des politiques d'austérité menées depuis plusieurs années. Je salue notamment le fait que la hausse de la TVA, parfois envisagée, ait été écartée. En revanche, faut-il continuer à programmer 41 milliards d'allègements sur les entreprises dont les effets n'apparaîtront qu'à long terme, en maintenant en contrepartie l'objectif de réduction de dépenses dont l'effet dépressif est immédiat ? Cela ne semble guère réaliste au regard des réductions de dépenses réalisées antérieurement et encore moins optimal pour retrouver rapidement la croissance. Dans cette conjoncture, il serait plus efficace d'augmenter plus fortement les emplois d'avenir et l'apprentissage et de soutenir l'investissement des collectivités locales qui est en train de s'effondrer. »

Que pense le secrétaire d'État chargé du budget, Christian Eckert, de la politique budgétaire et fiscale qu’il est lui-même chargé de mettre en œuvre ? Loyal, il n’en laisse rien transparaître. Mais il n’est guère besoin d’être grand clerc pour deviner qu’il doit, lui aussi, avoir des états d’âme, même s’il ne les met pas sur la place publique. Il suffit de se reporter à l’entretien très critique qu’il avait donné à Mediapart le 24 janvier 2014 (Lire Christian Eckert (PS) : « Le chef de l’État n’est pas le seul maître à bord.)

En bref, la politique économique prend eau de toutes parts : c’est celle du bateau ivre.

 

Lire aussi

 

 

Source : www.mediapart.fr

 

 

 

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11 septembre 2014 4 11 /09 /septembre /2014 15:25

 

Info reçue par mail

 

 

Rassemblement devant la gare SNCF de Nîmes ce jeudi 11/09 à 18h en soutien à Fouad (CNT Metz)

Communiqué de Solidaires 30

 

Bonjour camarades,

Pour info ci-dessous, le communiqué de Solidaires 30 en soutien à Fouad de la CNT- Metz qui passera aujourd'hui au tribunal en appel après sa condamnation à une amende de 40 000 euros.

Pour rappel, ce jeudi 11 septembre à 18h, la CNT Nîmes appelle à un rassemblement devant la gare SNCF. Nous appelons nos militant-e-s à y participer.

salutation syndicalistes de lutte de classe et solidaires.

J. B. (Solidaires 30)

_____________________________________________________________________

 

 

Soutien de Solidaires 30 à Fouad Harjane (CNT Metz)

condamné à une amende de … 40 000 euros !


Le 23 mars 2013, un militant de la CNT-Metz, Fouad Harjane, a été condamné à 40 000 € de dommage et intérêtpour avoir bloqué la gare de Metz lors d’une manifestationdurant le mouvement anti-CPE de 2006.


Cette condamnation, au-delà d’être injuste dans la mesure où elle fait porter à un seul individu la responsabilité d’une décision collective mise en œuvre par 800 personnes, est également un signal fort envoyé au mouvement social.


L’audience devant juger de la recevabilité de l’appel de Fouad sur ce jugement est fixée au 12 septembre 2014.


Cette pratique de condamnation de ceux et celles qui luttent sur le terrain syndical n’est hélas pas une pratique isolée qui s’abat aujourd’hui sur Fouad.


Cette pratique est utilisée, aussi bien par les patrons que l’État, quand il s’agit de faire taire les militan-t-es syndicaux les plus combatifs. Dans le Gard, Sébastien Migliore(CGT Alès)ou encore Jean-Christophe Jolbert (CGT Haribo à Uzès) en ont été victimes ces dernières années. A Paris, nombre de syndiqué-e-s de SUD PTTsont inquiété-e-s et menacé-e-s de révocation. ARoanne, des militant-es CGTpasseront au Tribunal le 5 novembre prochain pour avoir refusé de se soumettre à un prélèvement ADN.


Solidaires 30 demande la fin des poursuites pénales et civiles, pour le mouvement social depuis le 1erjanvier 2002, et tous ceux et celles qui ont été condamné-e-s pour leur participation aux mobilisations sociales.


Contre la criminalisation du mouvement social !

Un coup contre l’un-e d’entre nous est un coup contre nous tous et toutes !


Solidarité !


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11 septembre 2014 4 11 /09 /septembre /2014 15:24

 

Source : www.transparency-france.org

 

 

Transparency International France publie un guide pratique à l’usage des lanceurs d’alerte

 

Ce guide offre des conseils pratiques sur les étapes à suivre, des adresses pour un conseil juridique ou un soutien et des informations sur les législations et les jurisprudences à connaître.

Paris, le 23 juillet 2014


La France s’est récemment dotée de cinq lois en faveur de la protection des lanceurs d’alerte. Transparency International France  publie aujourd’hui un Guide Pratique à l’usage du lanceur d’alerte français. Ce guide offre des conseils pratiques sur les étapes à suivre, des adresses pour un conseil juridique ou un soutien et des informations sur les législations et les jurisprudences à connaître.


Les lanceurs d’alerte jouent un rôle essentiel dans la lutte anti-corruption, au risque de leur carrière, et parfois de leur vie. En révélant des violations de la loi, de graves dysfonctionnements, des conflits d’intérêts,  des menaces pour la santé, la sécurité publique ou l’environnement, ils permettent de sauver des vies, comme de préserver biens et fonds publics.  Nombreux sont les scandales et les tragédies qui auraient pu être prévenus, si les salariés ne s’étaient tus, de crainte de perdre leur emploi, en l’absence d’une législation suffisante ou dans l’ignorance de la protection que leur offrait la loi.

«  64% des salariés se taisent de peur de perdre leur emploi, ou de peur que leur signalement ne soit pas entendu » précise Nicole-Marie Meyer, chargée de mission alerte éthique pour Transparency International France.

C’est pourquoi Transparency International a fait de la protection des lanceurs d’alerte (comme des victimes de la corruption) l’un des piliers de son plaidoyer et de son action.

En France plusieurs lois récentes qui gagneraient à être harmonisées et complétées sur certains points ont été adoptées afin d’assurer une meilleure protection des lanceurs d’alerte. Transparency International France a élaboré ce guide pratique à l’usage des citoyens désireux de faire un signalement dans l’intérêt général, et pour ce faire de mettre en œuvre les droits nouveaux qui leur sont désormais reconnus par notre législation.

>> Retrouvez le guide pratique (ici)
 
***


Contact presse :

Julian Névo : 01 84 16 95 65
contact@transparency-france.org
 

 

 

 

Source : www.transparency-france.org

 


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