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22 janvier 2015 4 22 /01 /janvier /2015 18:19

 

Source : www.bastamag.net

 

 

 

Dialogue social : menaces sur la liberté d’expression et la santé de millions de salariés

par Ivan du Roy 22 janvier 2015

 

 

 

 

 

Les négociations sur la « modernisation du dialogue social » entrent ce 22 janvier dans leur phase ultime. Menées entre patronat et syndicats, elles se déroulent à huis-clos. Et pour cause ! Si l’accord rédigé par le Medef est signé, l’expression collective de millions de salariés sera largement entravée. Les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), un outil précieux et indispensable pour protéger la santé des travailleurs, seront tout simplement supprimés. Et les moyens dont disposent les représentants du personnel seront grandement diminués, creusant encore davantage l’asymétrie de l’information entre directions d’entreprises et salariés. Décryptage d’un déni de démocratie sociale.

Leur liberté d’expression est menacée, en France. Il ne s’agit pas de celle des journalistes ou des blogueurs, mais des 24 millions de salariés et de leur possibilité de pouvoir s’exprimer, au sein de leurs entreprises, sur leurs conditions de travail. Plusieurs mesures risquent de drastiquement limiter leur expression collective permise par les instances représentatives du personnel. Ces mesures sont dispersées dans le projet de loi Macron « pour la croissance et l’activité » et dans le projet d’accord élaboré par le Medef pour réformer le dialogue social. Un projet en cours de négociation avec les syndicats. Ces dispositions vont toutes dans le même sens : restreindre les possibilités d’expression et d’action des travailleurs face à leur employeur et remettre en cause l’existence du CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail).

Sous prétexte de moderniser le dialogue social, le patronat propose de créer une « instance unique de représentation du personnel dans l’entreprise », le conseil d’entreprise. Celui-ci est censé reprendre les prérogatives des actuels délégués du personnel (présents dans les entreprises de plus de 11 salariés), des comités d’entreprise et des CHSCT (dans les entreprises de plus de 50 salariés). Pour que cette proposition entre en vigueur, encore faut-il qu’une majorité représentative de syndicats signe l’accord, et que celui-ci soit transcrit tel quel dans la loi. Alors que s’ouvre ce 22 janvier l’ultime journée de négociation, la CGT et Force ouvrière (49% des voix aux dernières élections professionnelles) s’y opposent, pendant que la CFDT, la CFE-CGC et la CFTC (51%) pourraient finalement le signer. Le sort de la liberté d’expression collective des 24 millions de salariés va-t-il donc être scellé par une négociation conduite jusqu’à maintenant à huis-clos, sans aucun débat public ?

François Hollande, fossoyeur des lois Auroux ?

La mesure la plus dangereuse est probablement la suppression du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Créé par les lois Auroux, du nom du ministre du Travail socialiste Jean Auroux, en 1982, renforcé par Martine Aubry en 1991, c’est – ironie du sort – sous un gouvernement socialiste que le CHSCT risque bien de disparaître. Cette instance, où siègent des représentants de l’employeur et des salariés, médecins du travail ou inspecteurs du travail, joue un rôle crucial pour la protection de la santé, dans un contexte où, du scandale de l’amiante à l’explosion des troubles musculo-squelettiques et des risques psychosociaux, les directions d’entreprise se montrent encore trop peu soucieuses de la santé des travailleurs qu’elles emploient.

L’existence d’un CHSCT permet aux salariés et à leurs représentants d’intervenir, d’analyser, et éventuellement de contester, les projets de l’employeur en matière d’organisation du travail si ceux-ci risquent d’avoir des effets néfastes sur la santé. Alors que les pénibilités physiques diminuent peu, que les situations de « tensions au travail » et les risques psychosociaux se banalisent, les CHSCT sont devenus un outil précieux. Et arrivent désormais à stopper des projets nuisibles à la santé des salariés, donc au bon fonctionnement de l’entreprise. Parmi les exemples le plus emblématiques, « l’arrêt Snecma » en 2008. Cette filiale aéronautique du groupe Safran souhaitait mettre en œuvre, dans son usine francilienne de Gennevilliers (1400 salariés), une nouvelle organisation de la maintenance. Avec pour conséquence une augmentation du nombre de nuits et de week-ends travaillés, une baisse du nombre de salariés le jour, des risques liés au travail isolé… La CGT, s’appuyant sur une expertise commandée par le CHSCT, a porté plainte. La justice a suspendu la réorganisation.

Un contre-pouvoir devenu trop gênant pour le patronat

En septembre 2012, c’est la direction de la banque Caisse d’épargne dans le Rhône qui se voit interdire par la justice d’évaluer sous forme de « benchmark » – un outil de comparaison – les performances de ses salariés et de ses agences. Suite à une plainte du syndicat Sud, s’appuyant là aussi sur une expertise du CHSCT, le tribunal a estimé que cette méthode d’évaluation managériale portait « atteinte à la dignité des personnes par leur dévalorisation permanente utilisée pour créer une compétition ininterrompue entre salariés » et provoquait « une multiplication des troubles psychiques et mentaux constatés chez les salariés ». Trois mois plus tard, c’est au tour de la direction de la Fnac. Elle est contrainte de suspendre une restructuration. Celle-ci prévoyait des suppressions de poste et une réorganisation du travail. Suite aux travaux de plusieurs CHSCT dans toute la France et aux expertises menées, la justice estime que la direction n’a pas suffisamment anticipé « la charge de travail et les moyens donnés ou maintenus, notamment en personnel pour y faire face ». Cette situation était dès lors « génératrice de stress » et « de nature à compromettre la santé et la sécurité des salariés concernés ».

Les obligations de l’employeur sont pourtant claires : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs », stipule le Code du travail. Encore faut-il veiller à ce que ces obligations soient respectées. La jurisprudence permet désormais aux CHSCT de faire annuler des réorganisations, des méthodes d’évaluation ou des licenciements au nom de ce principe. « Le CHSCT est devenu un véritable contre-pouvoir dans l’entreprise avec lequel les employeurs doivent composer », plaide François Desriaux, rédacteur en chef de la revue Santé & Travail. « Il bénéficie aussi d’un formidable dynamisme militant. C’est devenu une voie d’intégration pour de nouveaux syndicalistes, qui recherchent dans cette instance la défense d’une cause noble a priori dépourvue de clivages partisans. » [1]

« Une réécriture totale du droit du travail »

Résultat : « C’est devenu insupportable pour une partie du patronat », commente Daniel Sanchis, du cabinet d’expertise Degest [2]. Comment neutraliser une institution devenue trop gênante ? En la fusionnant avec toutes les autres instances représentatives du personnel. Au sein du nouveau conseil d’entreprise, le CHSCT deviendra une simple commission sans plus aucun pouvoir ni autonomie. Elle sera obligatoire dans les entreprises – ou les établissements – de plus de 300 salariés (l’existence d’un CHSCT est aujourd’hui obligatoire à partir du seuil de 50 salariés). Sa création deviendra facultative – et soumise à l’accord de l’employeur – pour les PME de 50 à 300 salariés. Environ 2,5 millions de personnes qui bénéficient actuellement d’un CHSCT s’en trouveraient privées (ceux qui travaillent dans les entreprises entre 50 et 300 salariés), sans non plus bénéficier de cette nouvelle commission.

Un nombre considérable de salariés, même au sein de grandes entreprises, travaillant dans des établissements dont l’effectif est inférieur à 300 employés, perdraient également le bénéfice d’un CHSCT de proximité. Potentiellement, ce sont ainsi 80% des salariés qui ne seront plus couverts par une instance dédiée spécifiquement à la protection de leur santé ! [3]. « C’est une réécriture totale du droit du travail », déplore Daniel Sanchis. D’autant que le CHSCT devenu commission ne sera plus doté de la personnalité juridique, et ne pourra donc plus se pourvoir en justice.

CE : des moyens humains divisés par deux

« Avec un appauvrissement des moyens humains, c’est la santé au travail qui sera sacrifiée », avertit François Desriaux. Les élus du nouveau conseil d’entreprise devront tout faire. Ils s’occuperont toujours des œuvres sociales et culturelles destinées au personnel, que gèrent jusqu’à présent les comités d’entreprise : les locations de vacances, la restauration collective, les offres de spectacle… Ils assumeront les attributions des délégués du personnel : rencontrer les salariés, contrôler le respect du code du travail, négocier les accords collectifs, surveiller les menaces sur l’emploi. Ils devront analyser les documents comptables et financiers, ou rendre des avis sur les divers projets de l’entreprise en matière d’organisation du travail, de formation professionnelle, d’intéressement, de gestion des carrières… Autant d’activités qui demandent du temps et des moyens. Dans ce contexte, la santé au travail, si tant est qu’une commission ad hoc soit créée, risque fort de passer à la trappe.

Et ce n’est pas tout. Du fait des regroupements des instances, les représentants du personnel seront moins nombreux qu’actuellement et disposeront de moins d’heures de délégation. Exemple ? Une grande entreprise de 30 000 salariés contenant une douzaine d’établissements distincts compte aujourd’hui 656 représentants du personnel si l’on cumule les mandats de délégués du personnel, de délégués syndicaux, d’élus aux comités d’entreprises et aux CHSCT. La CGT a estimé les conséquences de l’accord. Selon ses calculs, les représentants du personnel ne seront plus au total que 322. Les heures de délégation, donc consacrées à l’ensemble des missions confiées au conseil d’entreprise et aux salariés, chutent d’autant. Les élus, déjà accaparés par des tâches parfois jugées bureaucratiques (négociations, analyses de documents…) et souvent critiqués pour leur éloignement du terrain et des salariés, disposeront d’une disponibilité encore plus réduite pour être à l’écoute du personnel.

Les salariés des PME pourront dire adieu aux expertises

Quel sera le budget de fonctionnement des conseils d’entreprise ? Le même que celui accordé aujourd’hui aux comités d’entreprises (hors activités sociales et culturelles), soit 0,2% de la masse salariale. Malgré des prérogatives élargies, il ne sera pas augmenté. Pire, « l’employeur assure la prise en charge des frais d’expertise dans la limite de 80% des dépenses », prévoit la proposition du Medef [4] 20% du coût de ces expertises serait ainsi désormais à la charge du futur conseil d’entreprise [5]. Dans ces conditions, seuls les CE des très grandes entreprises, dotés de moyens importants du fait de la masse salariale, pourraient éventuellement faire face. « Mais pas les autres », déplore Daniel Sanchis.

Les PME pourront dire adieu à ce précieux outil. « Une action en justice, et c’est terminé : le budget est épuisé. Et il sera de toute façon impossible de mener la moindre expertise », déplore un ancien élu d’un comité d’entreprise d’une PME d’une soixantaine de personnes. Son budget annuel ne dépasse pas 4 500 euros. Face à des directions d’entreprises multipliant les restructurations et les réorganisations, les salariés n’auront plus les moyens d’en analyser les conséquences sur la santé au travail et d’en contester les éventuels abus. Pour les salariés, le droit à recourir à l’expertise est pourtant crucial.

Comment compenser l’asymétrie de l’information ?

« Depuis la Libération, le législateur permet aux instances représentatives du personnel de se faire aider par des spécialistes sur des questions techniques et pointues, pour que les élus soient en mesure d’émettre un avis éclairé », rappelle Daniel Sanchis. Les comités d’entreprise recourent à des experts comptables pour décrypter les bilans financiers. De même, en cas de nouvelle organisation du travail ou d’un risque grave pesant sur la santé des salariés, les CHSCT peuvent demander une expertise à un cabinet agréé pour analyser le travail et ses conséquences sur les salariés. Un outil indispensable pour compenser l’asymétrie de l’information entre représentants du personnel et directions d’entreprises. Lesquelles peuvent toujours recourir à de grands cabinets de consultants et à des batteries de fiscalistes et d’avocats...

Ces expertises sont souvent jugées trop coûteuses pour l’employeur. Pour une petite PME, une expertise d’une vingtaine de jours peut coûter 30 000 euros. Pour une très grande entreprise, le coût de l’ensemble des expertises peut être multiplié par 100. Mais au vu d’autres dépenses, cela reste marginal. En 2012, l’ensemble des expertises menées par les CHSCT de la SNCF ont ainsi coûté 4 millions d’euros. Un montant à relativiser quand on sait que l’entreprise a, elle, dépensé pour plus de 140 millions d’euros de prestations externes en communication [6]. « L’enjeu de la démarche d’un expert en ergonomie du travail est d’éviter les gaspillages », argumente Daniel Sanchis. « L’absentéisme pour raison de santé, la souffrance au travail, ou les cancers professionnels coûtent extrêmement chers. Ce projet aura pour conséquence de multiplier les atteintes à la santé des salariés. Qui va payer ? La sécurité sociale, car ces coûts ne sont pas supportés par les entreprises ! »

Déni de démocratie sociale

« Croire que l’on va gagner la bataille économique en jouant uniquement sur le coût du travail, comme le laisse penser le projet du Medef ou la loi Macron, est une erreur, déplore François Desriaux. Il faut au contraire être créatif et inventif, donc s’appuyer sur l’intelligence collective des salariés. Cela passe par plus de marge de manœuvre, plus de coopération, plus d’échanges, donc plus de démocratie et de dialogue social. Ce n’est pas vers cela que l’on s’achemine. »

Deux appels pour sauver les CHSCT ont été lancés par des syndicalistes et des collectifs d’experts. Ils ont ensemble recueilli 10 000 signatures en quelques jours (« Pour ne pas perdre sa vie à la gagner », que Basta ! a relayé, et « Urgence CHSCT »), dont des responsables des trois syndicats susceptibles d’accepter le projet du Medef… C’est à se demander si leurs négociateurs ont réellement pris la mesure des conséquences de ce projet alors que les 3,3 millions de salariés des très petites entreprises (TPE, moins de 10 salariés) ne disposeront toujours pas d’instance permettant leur expression collective. La restriction générale des possibilités d’actions des salariés ne s’arrête pas là : le projet de loi Macron dépénalise le délit d’entrave qui permettait d’assigner au tribunal correctionnel un employeur ne respectant pas son devoir d’information des salariés. Et instaure une protection du « secret des affaires » qui autorisera les directions d’entreprises à poursuivre les lanceurs d’alerte et les journalistes d’investigation trop curieux (à lire sur notre Observatoire des multinationales).

« L’audace réformatrice » souhaitée par François Hollande le 19 janvier risque bien, en matière de « modernisation du dialogue social », de se muer en déni de démocratie. Surtout si ces dernières séances nocturnes de négociations à huis clos se concluent sur un accord signé à l’arraché, sans que s’en suive un débat parlementaire et public. Car en cas d’accord, le gouvernement pourrait bien être tenté de transcrire le texte par voie d’ordonnances, sans passer par le Parlement. Vous avez dit démocratie sociale ?

Ivan du Roy

Photo : CC Geraint Rowland

Voir les pétitions :
- Pour ne pas perdre sa vie à la gagner
- Urgence CHSCT

Notes

[1Lire aussi sa tribune sur Alter eco plus.

[2« CHSCT, nouvelle bête noire des employeurs », titrait dès 2008 la revue Liaisons sociales.

[3Selon les chiffres de Pôle emploi, 53% des salariés travaillent dans un établissement comptant moins de 49 salariés et ne disposent donc pas de CHSCT (sauf accord d’entreprise plus favorable que la loi). 25% des salariés travaillent dans des établissements comptant entre 50 et 200 salariés, risquant ainsi de perdre leur CHSCT.

[4Un CHSCT ne dispose actuellement d’aucun budget. Mais s’il vote le recours à une expertise ou s’il se pourvoit en justice, les frais doivent intégralement être pris en charge par l’employeur. De même, que l’employeur laisse à chacun des représentants du personnel le temps nécessaire à l’exercice de ses fonctions, en ne fixant que des valeurs planchers pouvant être dépassées en cas de circonstances exceptionnelles (article L. 4614-3 du code du travail).

[5Selon la version du projet du Medef de décembre 2014. La version de janvier 2015 évoque « une part restant à la charge » du budget du conseil d’établissement, sans en préciser l’importance… Ce point n’est plus précisé dans la version envoyée pour la négociation de ce jour (22 janvier 2015), mais le texte laisse totalement en suspens la question de savoir comment seront financées les expertises commanditées par les élus. S’agira-t-il alors d’imposer le « cofinancement » dans la transcription législative de l’accord ?

[6Selon la Cour des comptes, chiffre de 2011.


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Source : www.bastamag.net

 

 

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22 janvier 2015 4 22 /01 /janvier /2015 18:06

 

Source : www.mediapart.fr

 

A Patras, au meeting de Tsipras: «Donnons-lui sa chance!»

|  Par Amélie Poinssot

 

 

 

Les Grecs sont appelés dimanche à renouveler leur parlement. Syriza, premier parti d’opposition, mène une campagne offensive avec pour objectif la fin des politiques d’austérité à l’œuvre en Grèce depuis 2010. À Patras, ce mercredi 21 janvier, Alexis Tsipras a déroulé son programme devant une foule enthousiaste.

Patras, de notre envoyée spéciale.-  Patras n’est pas une étape anodine pour Syriza. C’est la quatrième ville de Grèce, et c’est l'une des circonscriptions qui lui a rapporté proportionnellement le plus de voix aux Européennes de mai dernier : 36,6 % des électeurs y ont voté pour la Coalition de la gauche radicale (contre 26,6 % au niveau national). Autrefois bastion du PASOK, le parti socialiste, le district d’Achaïe qui entoure Patras se trouve être aussi le berceau d’origine de la famille Papandréou qui a donné trois premiers ministres au pays… Une histoire ancienne : aujourd’hui Georges Papandréou, qui s’était déjà coupé d’une grande partie de l’électorat socialiste en conduisant le pays sur la voie de l’austérité en 2010, a quitté le PASOK pour fonder son propre mouvement. Ni l’un ni l’autre ne sont assurés, pour l’heure, de passer le seuil des 3 % nécessaire pour entrer au parlement.

Mais c’est bien le cadet des soucis de la foule venue ce mercredi soir au gymnase Tofalos à la sortie de ville, à deux pas de l’université. Tous n’attendent qu’une chose : que ceux qui ont mené cette politique d'austérité laissent maintenant la place à Syriza pour faire advenir une alternative. Quelque 4 000 personnes sont présentes. « Donnons-lui sa chance ! Il n’a jamais gouverné, donc on ne peut pas le juger a priori… Certes, il ne va peut-être pas tout changer dès le premier jour, mais au moins il va faire une tentative, c’est cela qui compte ! » estiment Yorgos et Tatiana, un couple de cinquantenaires.

 

Alexis Tsipras, en meeting à Patras 
Alexis Tsipras, en meeting à Patras © Amélie Poinssot

Ville portuaire située sur la côte ouest du pays, Patras était dotée d’une importante activité industrielle, on y produisait du textile, et deux importantes usines de pneus et de frigidaires y étaient implantées. Tout cela a fermé, progressivement, entre les années 1990 et 2000. Quand la cure d’austérité arrive, en 2010, une bonne partie de la population est déjà au chômage. C’est le cas de Dimitra, venue au meeting pour avoir le sentiment de « participer ». Dans le passé, cette dame avait toujours voté PASOK. « Je me suis sentie trahie par le parti, il faut que tous ces politiciens s’en aillent maintenant. Et que l’on fasse de la place à tous les jeunes qui ont été obligés de partir à l’étranger pour travailler. » Aujourd’hui, la région Grèce-Occidentale dont fait partie Patras est l’une des douze régions du pays les plus affectées par le chômage : il s’élevait à 27,5 % au troisième semestre 2014, soit le taux le plus élevé après celui de la région Macédoine-Centrale.

Dans la foule venue ce mercredi soir, il y a aussi les Jeunesses du parti, les vieux compagnons de route, les militants actifs... Quelque 4 000 personnes sont venues écouter le leader charismatique de Syriza. « Le parti a connu ici une croissance sans précédent, explique le secrétaire de la section locale, Andreas Rizoulis. De 300 membres en 2012, nous sommes passés à 900 membres aujourd’hui. »Mais Syriza n’a pas encore décroché ici de mandat local : aux dernières municipales, il s’est rangé au second tour derrière le Parti communiste.

Cette fois-ci, l’enjeu est autre, national, voire européen. Dans un discours tonique ponctué d’attaques visant la droite de Nouvelle Démocratie accusée de « servir les intérêts de 1 % de la population », Alexis Tsipras appelle les électeurs de Patras à donner la majorité absolue à Syriza. Ce n’est qu’ainsi, sans être obligé de former une coalition, que le parti pourra appliquer son programme, dit-il. Fidèle à son art de manier la rhétorique, il joue sur les mots, le terme grec pour désigner la « majorité absolue » se confondant avec celui d’« autonomie » : « Un Syriza autonome signifie une Grèce forte, clame Tsipras sous les applaudissements. Et un Syriza fort signifie une Grèce autonome. Cela signifie la fin de l’humiliation nationale. Cela signifie la fin des mémorandums responsables de la catastrophe. » Et ce n’est pas, conformément à la campagne de Nouvelle Démocratie, la Grèce qui va s’effondrer en cas de victoire de Syriza : « Le seul qui va faire faillite, ce sera M. Samaras ! »

Au-delà des bons mots, Tsipras confirme la stratégie du parti en cette dernière ligne de campagne : il en appelle aux électeurs de Nouvelle Démocratie. « Aujourd’hui, beaucoup croient en nous, notamment des gens qui dans le passé n’ont jamais été de gauche : des citoyens conservateurs. Eh bien, disons-leur bienvenue, tendons-leur la main afin de reconstruire ensemble la Grèce ! On sait qu’ils ne viennent pas vers nous par idéologie, mais par besoin. Alors répondons à ce besoin ! »

Continuer à se battre

En déroulant les grandes lignes de son programme, Tsipras fait apparaître un discours plus mesuré qu’en 2012, lorsque se sont tenues les dernières législatives. La campagne de Syriza était axée sur l’annulation pure et simple des mémorandums d’austérité. Il ne s’agit pas, cette fois-ci, de revenir « à la situation de 2009 ». Il s’agit, précise Tsipras, de lutter contre « les causes qui nous ont conduits à la crise ». Parmi lesquelles la corruption, les niches et l’évasion fiscales, le copinage, le commerce illégal. C’est de là que viendront, pour Syriza, les recettes budgétaires.

Autres mesures annoncées : le rétablissement du seuil d’imposition sur le revenu à 12 000 euros par an (contre 5 000 aujourd’hui), l’annulation de l’impôt foncier mis en place sous le gouvernement Samaras, la création à la place d’un impôt visant uniquement la grande propriété afin d’épargner les résidences principales de la classe moyenne. Tsipras brosse son électorat dans le sens du poil.

Car cet impôt foncier, arrivé tardivement après de nombreuses mesures d’austérité, est très mal passé auprès de l’opinion publique, dans un pays où les classes moyennes, sans être riches, sont traditionnellement propriétaires de leur logement, ayant souvent hérité de la maison familiale au village. Mal ficelé, déconnecté des prix du marché, cet impôt aurait pu au contraire contribuer à davantage de justice fiscale. Mais l’option choisie par Syriza n’est pas plus convaincante, et Tsipras ne s’engage pas dans les détails. Au siège du parti à Athènes, on nous avait précisé que seraient soumis au nouvel impôt sur la propriété les logements d’une valeur égale ou supérieure à 400 000 euros. Devant notre étonnement face à ce niveau élevé, quand ailleurs en Europe l’impôt foncier touche tous types de logements, notre interlocuteur, membre du bureau des questions fiscales, s’était repris en avouant que le seuil n’était pas figé.

Sous des applaudissements nourris, Tsipras ajoute que le parti s’engage à mettre un coup d’arrêt à la mise aux enchères des logements confisqués. « Pas une maison dans les mains des banquiers ! » répète-t-il devant le public de Patras. Il parle également de rétablir le salaire minimum à 751 euros brut par mois (contre 512 depuis 2012) et la 13e mensualité de retraite pour les pensions inférieures à 700 euros mensuels (supprimée en 2010). Tout cela, qui fait partie du programme dit « de Thessalonique » (la deuxième agglomération du pays, où il avait été présenté par le parti en septembre), s’appliquera « avant et indépendamment du lancement et du dénouement de la négociation avec les créanciers ». La ligne du parti est désormais claire : si l’effacement d’une partie de la dette publique ne peut se faire de manière unilatérale, les mesures économiques et budgétaires, elles, s’appliqueront quel que soit l’avis de la Commission européenne ou du FMI.

À la fin de son discours, Alexis Tsipras propose de relancer le tourisme dans la région… mais aussi de mettre fin aux privatisations de la zone côtière. Des mots particulièrement bien reçus au gymnase Tofalos, le port de Patras figurant sur la liste des biens publics à vendre. Au passage, le chef de Syriza annonce que les jours du TAIPED – cet organisme monté en 2011, chargé des privatisations – sont désormais comptés.

Une victoire de Syriza dimanche va-t-elle réellement permettre de tourner la page de l’austérité en Grèce ? « Il va falloir continuer à se battre, estime pour sa part Yorgos, un jeune militant, à la sortie du meeting. De tout ce programme, les milieux économiques ne sont pas prêts à accepter même 1 % ! Car s’ils commencent à lâcher du lest sur la Grèce, ils seront obligés de faire de même sur les autres pays. Il y aura un effet domino, c’est certain. » C’est précisément ce sur quoi misent les autres gauches européennes, espagnoles et françaises notamment. Ce jeudi 22 janvier, le chef de Podemos, Pablo Iglesias sera aux côtés de Tsipras pour son avant-dernier meeting à Athènes. Et du côté du Front de gauche et d’Europe Écologie-Les Verts, des délégations seront aussi en Grèce ces jours-ci pour soutenir Syriza.

 

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A Patras, au meeting de Tsipras: «Donnons-lui sa chance!»

 

 

 

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22 janvier 2015 4 22 /01 /janvier /2015 17:54

 

Source : www.reporterre.net

 

Un Notre-Dame-des-Landes résiste aux portes d’Athènes

Marie Astier (Reporterre)

jeudi 22 janvier 2015

 

 

 

Près d’Athènes, une ancienne base militaire près d’un aéroport abandonné est bradée par l’État à un grand groupe de tourisme. Contre le béton destructeur du littoral, les riverains occupent le site d’Hellinikon et le cultivent. Et, alors qu’un tiers des Grecs n’ont plus de couverture maladie, ils organisent un centre de santé gratuit. Reportage au cœur d’une lutte cruciale de la Grèce d’aujourd’hui.


La Grèce revient dans les radars des médias. La cause ? Les élections du 25 janvier, qui pourraient ébranler l’Europe des néo-libéraux. La classe dirigeante craint la victoire du parti de gauche Syriza, qu’espèrent au contraire partis de gauche et écologistes.

A l’automne dernier, Reporterre s’est donné deux semaines pour aller voir les Grecs. Aller s’asseoir à la terrasse d’un « kafeneio » pour écouter leurs histoires, leur quotidien, leurs indignations et leurs espoirs. Ils nous ont raconté que quand ils ne sont pas au chômage, leur salaire a diminué d’au moins un tiers. Un tiers, c’est aussi la proportion d’entre eux qui n’ont plus de couverture sociale. Certains ont découvert l’angoisse du frigo vide et de la soupe populaire.

Et du côté de l’écologie ? Ce n’est pas brillant, on vous prévient.


- Athènes, reportage

Une bande de terre est fraîchement retournée, les alignements des plants déjà dessinés. Dans chaque trou, Anna Karapa dépose un peu de fertilisant et une jeune pousse. Puis un autre jardinier passe derrière pour arroser. Ce dimanche, on plante des choux pour l’hiver.

« Ici tout est bio, et tout est commun. On décide des plants de culture ensemble et la parcelle n’est pas divisée entre chaque jardinier », explique cette architecte. Cela fait trois ans et demi que, tous les dimanches, ils sont une quinzaine de permanents, une trentaine en comptant les soutiens de passage, à cultiver ces 2.500 mètres carrés de terre.

Car ici, l’activité agricole est avant tout symbolique : on n’est pas seulement dans un jardin partagé, mais sur une terre occupée et âprement disputée. Elle est située sur une ancienne base militaire américaine, et jouxte l’ancien aéroport d’Athènes. En tout, 6,2 millions de mètres carrés et 3,5 kilomètres de côtes situés sur la commune d’Hellinikon, à quelques kilomètres seulement du centre d’Athènes.

Villas de luxe, casino et gratte-ciel

Le tout est à l’abandon depuis plus de dix ans. En 2004, quelques installations pour les jeux olympiques y ont été construites, puis aussitôt délaissées une fois les festivités terminées. Un moment, il a été question d’y installer un grand parc métropolitain. Athènes manque cruellement d’espaces verts, c’est l’une des villes les moins bien loties d’Europe.

Mais la crise a eu raison de cette idée. Le terrain a été transféré au TAIPED, le fonds créé par l’État grec pour privatiser toutes sortes de biens (dont des terres à haute valeur naturelle). Il est en bonne voie pour être vendu au fonds d’investissement Lamda Development, membre du groupe Latsis, du nom de son propriétaire Spiros Latsis. Ce milliardaire est l’homme le plus riche de Grèce. Le groupe grec est accompagné dans son projet par un promoteur d’Abu Dhabi et par le Chinois Fosun – qui, en France, est en train de racheter le Club Med.

Ces riches investisseurs ont convaincu l’État grec grâce à un projet touristique ambitieux : des villas de luxe, un casino, un gratte-ciel qui deviendrait le symbole de la capitale grecque, une marina et une plage réservée aux touristes fortunés. Le tout est assorti de la promesse de sept milliards d’euros d’investissement et de la création de plusieurs dizaines de milliers d’emplois.

La vidéo de promotion parle carrément d’« une nouvelle ère pour la Grèce ».

Une riviera espagnole

« Nous croyons que ce terrain devrait appartenir aux citoyens avec un parc et des aménagements, pour répondre à de vrais besoins sociaux », rétorque Panos Totsikas. Il est assis à l’ombre des arbres, dans le petit salon d’extérieur que se sont installés les jardiniers. « Ils veulent suivre le modèle de la riviera espagnole, en construisant de grands buildings. On a vu ce que ça a donné, ils ont détruit la côte, dénonce -t-il. Architecte lui aussi, il fait partie du Comité en faveur du Parc métropolitain. On ne croit pas que c’est un bon moyen de développer le tourisme, la preuve, en Espagne les hôtels ne sont pas pleins. »

En signe d’opposition à la vente, des habitants de la zone ont déjà commencé à créer leur parc métropolitain. Des associations sportives récupèrent les anciennes installations olympiques, des oliviers ont été plantés un peu plus loin : les 1 500 arbres ont désormais deux ans et mesurent un mètre de haut.

En soutien, l’ancien maire de la commune a donné des terrains et des bâtiments. Au jardin partagé, donc, mais aussi à la clinique sociale d’Hellinikon. Elle ne fonctionne qu’avec des bénévoles, qui sont plus de deux cents, et soigne gratuitement plus de cent patients par jour. Elle répond à une urgence sociale : aujourd’hui un tiers des Grecs n’ont pas les moyens de se faire soigner et n’ont plus de couverture maladie.

Au final, c’est l’État grec qui paiera

Anna désigne les dernières plantes d’été : les tomates ont séché sur pied, les aubergines et les poivrons produisent quelques derniers tout petits fruits. « Cet été, nous passions deux heures par jour à arroser. La terre est pauvre, il faut mettre beaucoup de fertilisants pour faire pousser quelque chose, admet Anna. Mais nous voulons démontrer qu’ici, en plus de planter des arbres, nous pouvons cultiver et nourrir Athènes. » Mais il arrive aussi que la récolte soit abondante : les jardiniers se la répartissent, et en donnent aux services sociaux de la mairie pour les plus pauvres.

Le regard de la cinquantenaire se perd au-delà des grilles du jardin. Derrière, une route où les voitures ne circulent plus, bordée de terrains vagues. « La zone sera vendue 83 euros du mètre carré, alors que le terrain constructible atteint ici les 2.000 euros du mètre carré ! » s’indigne Anna. Le TAIPED a accepté l’offre de Lamda Development à 915 millions d’euros, « alors que le tout a été évalué à 11,5 milliards d’euros », renchérit Panos.


- Anna Karapa -

Paradoxalement, l’État grec devra payer pour vendre ce terrain. « Le contrat stipule qu’il doit retirer tous les aménagements actuels, dont la tour de contrôle de l’aéroport qui se trouve toujours ici », explique Panos. « Et il devra payer les routes, les réseaux, toutes les infrastructures », complète Anna. Total de la facture annoncée : 2,5 milliards d’euros sortis des caisses publiques grecques. Quant au profit de la vente, il ira directement au remboursement des créanciers du pays.

Autre preuve que le contrat est totalement défavorable à l’État grec, selon Anna, une clause prévoit que si des vestiges archéologiques sont découverts pendant les travaux, c’est lui qui indemnisera les investisseurs qui ne peuvent pas construire ce qu’ils avaient prévu. Ce qui risque probablement d’arriver, car une cité antique s’élevait autrefois dans la zone.

Comment les dirigeants grecs peuvent-ils valider un tel contrat ? Panos rigole : « Voyons, ils sont corrompus, comme en France, vous devriez le savoir ! C’est comme cela que ça marche, c’est le capitalisme ! »

Syriza pourrait changer la donne

C’est d’ailleurs parce qu’elle ne croit plus aux politiciens que Varinia Popoli a décidé de s’impliquer dans ce jardin, ainsi que dans la clinique...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : www.reporterre.net

 

 

 

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21 janvier 2015 3 21 /01 /janvier /2015 22:50

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/edition/nucleaire


 

Areva accusé de corruption : l'Observatoire du nucléaire relaxé

 

AFP - 21 janvier 2015 - Paris - La cour d'appel de Paris a relaxé mercredi le président de l'Observatoire du nucléaire, Stéphane Lhomme, qui était poursuivi en diffamation par Areva qu'il avait accusé de corruption au Niger.En première instance, le tribunal correctionnel de Paris l'avait condamné à 1.000 euros d'amende avec sursis et lui avait ordonné le retrait des propos litigieux ainsi que la publication d'un communiqué judiciaire sur le site internet de l'Observatoire du nucléaire.

Le 11 décembre 2012, dans un communiqué, l'association avait fait état d'une contribution d'Areva au budget national nigérien d'environ 26 millions d'euros, dont 15 millions auraient été directement affectés à l'acquisition d'un avion pour le président du Niger, Mahamadou Issoufou.

Il s'agit donc clairement d'une manoeuvre de corruption, probablement sur le plan légal et assurément sur le plan moral, par Areva, avait accusé l'Observatoire.

Le lendemain, Zakari Oumarou, président du groupe parlementaire du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNSD, au pouvoir), avait confirmé à l'AFP qu'Areva avait accordé au Niger une aide budgétaire de 26 millions d'euros, dont une partie a été affectée pour l'achat d'un avion présidentiel.

Areva, qui conteste cette accusation de corruption, avait assigné en justice.

Le 7 février 2014, les juges de la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris avait estimé que l'utilisation du terme corruption ne faisait manifestement preuve d'aucune prudence.

Les documents produits par M. Lhomme ne lui permettaient nullement de conclure à la corruption alléguée, ni au fait qu'Areva aurait acheté un avion au président du Niger, avait alors estimé le tribunal.

L'Observatoire du nucléaire avait alors annoncé qu'il ferait appel de ce jugement affligeant mettant gravement en cause la liberté d'expression et le droit de contester les méfaits des entreprises du lobby nucléaire.
AFP

Rappel de l'affaire : http://observ.nucleaire.free.fr/accueil-proces-areva.htm

 

 

 

Source : blogs.mediapart.fr/edition/nucleaire

 

 

 

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21 janvier 2015 3 21 /01 /janvier /2015 22:42

 

Source : www.reporterre.net

 

 

Les ZAD sont-elles l’avant-poste d’une nouvelle bourgeoisie ?

Pierrette Rigaux

mardi 20 janvier 2015

 

 

 

« Avant et arrière-gardes, ces deux composantes encerclent les ZAD, et tout en l’ignorant, forment deux appendices du même animal : le Parti du Progrès, alias le capitalisme nouvelle vague... »


« Les classes moyennes [...] ne sont donc pas révolutionnaires, mais conservatrices ; bien plus, elles sont réactionnaires : elles cherchent à faire tourner à l’envers la roue de l’Histoire. Si elles sont révolutionnaires, c’est en considération de leur passage imminent au prolétariat : elles défendent alors leurs intérêts futurs et non leurs intérêts actuels ; elles abandonnent leur propre point de vue pour se placer à celui du prolétariat. » (Manifeste du Parti Communiste, 1848)

« Il réfléchit et commence à comprendre. » (Kashima paradise,1973)

.................

Après avoir annoncé d’une seule voix la création d’un « nouveau Sivens » à Roybon, dernièrement la presse a tenté de comprendre qui étaient ces zadistes de Chambaran. Qui sont-ils, d’où viennent-ils, que veulent-ils ? Malgré le regain de tension avec certains habitants, elle s’est peu penchée sur une autre question, non moins cruciale : qui sont les « pro » ?

Qui sont ces locaux qui soutiennent les chantiers du Center Parcs à Roybon, du barrage à Sivens, ou de la LGV Lyon-Turin du côté de la Maurienne, pour ne prendre que des exemples médiatiques et récents. Ce que les journalistes ne font pas, faisons-le nous-mêmes : essayons de comprendre.

Allons-y. Hypothèse n°1 : ce sont tous des fascistes, des mafieux, des ripous ? Non, on conviendra que c’est un petit peu plus compliqué. Alors prenons les choses autrement, commençons par nous demander ce qu’ils ne sont pas, et par définir les forces en présence dans le conflit des nouvelles ZAD.

Ce texte propose de profiter du répit relatif dont nous disposons, suite à la mort d’un camarade, et grâce aux demi-victoires juridiques des écologistes et des légalistes, pour forger notre analyse et notre discours politique. Car d’autres ne nous attendront pas pour parler à notre place.

1. Le Parti du Progrès progresse partout

Revenons un instant dans les années 80 : après une phase de grandes luttes sociales, le reflux politique impose de trouver de nouvelles formes de subversion. À la marge du système, des militants et des artistes ouvrent des brèches dans les grandes villes en voie de désindustrialisation, où les bâtiments vides ne manquent pas : c’est l’expansion du mouvement des squats politiques et culturels.

C’est aussi le début d’un processus qui portera, vingt ans plus tard, à l’implantation d’une nouvelle bourgeoisie dans les faubourgs. Le modèle de la gentrification des quartiers populaires est bien connu aujourd’hui, et peut être résumé comme ceci : Squat et modes de vie alternatifs -> Abandon des luttes sociales et populaires, prédominance de la culture, de l’écologie et de la technologie attirant la petite bourgeoisie -> Flambée immobilière et embourgeoisement.

Ces forces sont hétérogènes, le phénomène n’est pas linéaire, et les groupes sociaux qui y participent sont parfois concurrents, voire opposés. Mais chaque phase est sous-tendue par un même fil rouge, une même idéologie (d’après moi, celle de la cybernétique, de la gouvernance, c’est-à-dire de l’organisation optimale du corps social, sous des formes différentes telles que l’ingénierie sociale, ou l’écologie).

Résultat du processus : l’émergence d’un nouveau groupe social à fort capital immatériel, qui engage une guerre de classe dans l’espace, puis l’emporte à la fois géographiquement et politiquement.

Cette classe sociale qui émerge puis s’impose (à Grenoble, nous l’appelons parfois ironiquement celle des « écotechs »), c’est ce que nous pourrions définir comme « le nouveau Parti du Progrès », ou plus précisément, « la nouvelle avant-garde du P.d.P. ». Elle se nourrit de culture (de gauche, libérale), d’écologie (soft) et de (high) technologie, de préférence au sein de la métropole.

Elle est individualiste, mais dit le contraire, et sait défendre ses intérêts de classe. Son progrès est celui de la croissance verte et du capitalisme 3.0., celui qui assure la continuité du système et ne réserve au peuple que chômage et consommation factice. Elle a déjà gagné beaucoup de terrain dans les grandes villes, et repoussé les pauvres dans les campagnes rurbaines.

Imaginons un instant – pure fiction – qu’une partie de cette avant-garde, déjà un peu à l’étroit en ville, commence à s’étendre au-delà des métropoles, et que certains conflits – au hasard, par exemple, les nouvelles luttes locales et parmi elles les ZAD – leur serve d’avant-poste pour s’implanter dans les territoires périphériques.

2. Prospective zadiste

Imaginons. Comme les salles de spectacle et les casabio ont fleuri en ville sur les pas des gentrifieurs, les réseaux de petits agronomes bio et de néo-ruraux entreprenants apparaissent dans certains territoires périphériques, mais stratégiques (comme dans les quartiers populaires, l’avant-garde choisit les zones où le potentiel de fructification de son capital est le plus fort), et transforment les structures économiques et sociales locales.

La chose est banale, et déjà en cours. Des héritiers gentrifiés, chassés des villes, des écotechs attirés par l’image du retour à la terre et les prix du foncier, parsèment pour le moment ces zones périphériques. Ils sont d’ailleurs généralement mal accueillis, même après des années, par les communautés post-agricoles auprès desquelles ils s’installent. C’est la guerre de basse intensité entre purin d’ortie et agro-chimie.


- Au Testet -

Ces gentrifieurs des champs sont plutôt sensibles à l’écologie, mais aussi au développement personnel, entretiennent parfois des rapports fétichistes à la nature, sont empreints de libéralisme postmoderne (chacun fait ce qu’il veut, tout dépend du point de vue), et votent volontiers pour une démocratie plus efficace. Mais surtout : ils ont renoncé à la lutte politique antagoniste, sauf par procuration. Ce qui est pratique, puisque ça permet d’être à la fois zadiste et au hammam.

Les ZAD sont les avant-postes par lesquels ces catégories pourraient acquérir enfin une légitimité locale. Même si leur position dans les ZAD est secondaire, restreinte soit à une partie de la contestation légale (que nous leur laissons bêtement), soit au soutien indirect via internet – moi aussi, je suis zadiste ! – elles pourraient en tirer profit, et obtenir une position dominante après le conflit.

Par exemple, simple hypothèse, en gagnant des recours juridiques, et en s’emparant du leadership politique, aidés par le manque de discours de notre côté. Elles pourraient même avoir intérêt à ce que l’occupation ne dure pas trop.

Ces manipulateurs prolongeraient ainsi leur guerre de classe dans l’espace pour préserver et préparer, en marge des métropoles dont ils sont issus et dont ils tirent leur richesse (télétravail, laboratoires sociaux et économiques), leur futur cadre de vie.

3. Ce qui nous attend, et ce que nous voulons

Que la petite bourgeoisie s’allie un temps au peuple dont elle est issue pour se forger une position dominante, n’est pas une première. Mais revenons à nos moutons : ce petit détour permet à présent de répondre à notre question initiale : qui sont les « pro ».

C’est par opposition à cette partie du mouvement que nous avons définie ensemble comme la nouvelle avant-garde du P.d.P., que nous pouvons définir l’alliance hétérogène des « pro », à Roybon, à Sivens, ou en Maurienne : vieux souteneurs de l’industrie, agriculteurs forcés à l’intensif depuis cinquante ans et ne voyant plus d’autre voie, commerçants sans plan B, suivis d’une partie de leur main-d’oeuvre prolétaire, et des partis qui les représentent ; ils forment l’arrière-garde du Parti du Progrès, ceux qui ont nourri la France d’après-guerre, mais qui ont loupé le virage des années 80, de l’innovation et de l’information.

Ils ne sont pas fascistes, même si la xénophobie les traverse allègrement ; même pas forcément de droite, mais certainement tous productivistes. Laissés pour compte de la mondialisation, pas rentables, tout autant sous perfusion de subventions étatique que les allocataires RSA qu’ils montrent du doigt, ils vomissent les réformes sociétales et les taxes.

Et s’ils se mobilisent, c’est parce qu’ils sentent bien que, derrière les zadistes, les peluts, les anti-tout, il y a le nouveau modèle des dominants, intellos, verts et technophiles, avec un vrai projet de société, leur relève en quelque sorte, qui va s’approprier leur territoire. Ce sont ces « extérieurs » qui représentent une menace réelle pour les pro.

Avant et arrière-gardes, ces deux composantes encerclent les ZAD, et tout en l’ignorant, forment deux appendices du même animal : le Parti du Progrès, alias le capitalisme nouvelle vague.

Nous, les anarchistes, les militants, les zadistes, nous sommes, pour l’instant, les mercenaires aveugles (et gratos) du P.d.P. On défriche, on ouvre une brèche, et on la tient un temps, comme dans les villes depuis vingt ans. Et contrairement à ce que nous laisse supposer la situation aujourd’hui, « pro » et « anti » peuvent très rapidement s’entendre sur plusieurs points :

- Un point technique d’abord : les écotechs expliqueront aux pécores qu’il faut opter pour un projet alternatif et durable ; qu’il faut plus de zones compensatoires, plus de CNDP ; ils négocieront via la FRAPNA, la FNSEA ou d’autres (tiens, c’est le cas en ce moment même, sous l’égide du gouvernement), et s’entendront sur un modus vivendi.

Souvenons nous que EELV a soutenu le TAV [Lyon Turin] jusqu’en 2011, puis changé de camp pour réclamer, depuis, une autoroute maritime à la place d’une autoroute ferroviaire. Techniquement, tout devient possible.

- Pragmatique : les zadistes sont encombrants et ingouvernables...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : www.reporterre.net

 

 

 

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21 janvier 2015 3 21 /01 /janvier /2015 22:34

 

Source : www.marianne.net

 

 

Quand Fioraso soutient la dictature des économistes orthodoxes

Emmanuel Lévy
Opposés à ce fâcheux penchant qu'est l'économisme, Bernard Maris et l’Association française d’économie politique voulaient voir naître une nouvelle section "Economie et société" aux côtés de l’actuelle section "Sciences économiques" au sein du Conseil national des universités. Las, les économistes orthodoxes ont reçu le soutien de la secrétaire d’Etat chargée de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Geneviève Fioraso, comme le prouve la lettre que nous nous sommes procurée.
Geneviève Fioraso - SIPA

Benoît Hamon l’avait promis, sa remplaçante au ministère de l’Education Najat Vallaud-Belkacem aussi. Pourtant, la création d’une seconde section d’économie, « Economie et société », aux côtés de l’actuelle section « Sciences économiques », au sein du Conseil national des universités n’aboutira pas. Porté notamment par le regretté Bernard Maris et, avec lui, l’ensemble de l’Association française d’économie politique (Afep), le projet pour un enseignement s’ouvrant aux économistes hétérodoxes, a été enterré sans fleurs ni couronnes. Adressée à Jean-Loup Salzmann, président de la Conférence des présidents des universités, et lui même défenseur du projet, la lettre de Geneviève Fioraso que Marianne s’est procurée est sans ambiguïté.

Malgré les engagements de ses ministres de tutelle, la secrétaire d’Etat chargée de l’Enseignement supérieur et de la Recherche se contente d’y rappeler « la disposition introduite dans le nouveau décret relatif aux enseignants chercheurs pour expérimenter pendant quatre ans la suppression du contingentement des recrutements par voie normal ». Bref, en langage simple, de la diversité façon Sciences Po sans grand effet… Le système de sélection des élites professorales via la voie d’excellence, l’agrégation, demeurera donc inchangé et restera aux mains des économistes orthodoxes et néo-classiques.

C’est regrettable. Au fil du temps, notre système de formation des économistes s’est fermé. Quand il y a vingt ans encore, il pouvait produire des André Orléan, des Michel Agglieta et des Thomas Piketty, aujourd’hui il ne repose plus que sur un critère ou presque : le « marché » des idées qui fonctionne selon la « bibliométrie », c’est-à-dire sur la quantité de publications dans les revues spécialisées dont peut se prévaloir chaque chercheur. Récemment encore, André Orléan, professeur et président de l’Afep, dénonçait dans le Monde les dérives ce système.

A l’image de la revue scientifique Econometrica, les plus importantes sont en anglais… Et qui les a fait reines en France ? La section 37 du Comité national de la recherche scientifique. Autrement dit le fameux Conseil national des universités. La boucle est bouclée… Ces revues d’excellence fonctionnent un peu comme les agences de notations. Telle publication dans telle revue équivaut a un certains nombre de points, et c’est sur ces points accumulés qu’est construite la cote des universitaires. Evidemment, les revues en question ont un point de vue, des convictions. Et les plus orthodoxes en économie sont les mieux notées.

Pour les hétérodoxes, qui n’ont pas accès à ces revues, impossible donc d’entrer sur le marché international du professorat, le fameux « job market » où les patrons des grands établissements viennent faire leurs courses. Et voilà comment, notre système national d’enseignement de l’économie, est lui aussi tombé sous l’emprise de cette cotation…

Nous ne sommes pas seuls à souffrir d’un tel procédé. Andy Rodrick, professeur d’économie à Princeton s’est plaint également. Il a publié une liste des sujets d’économie à Harward en 1953… Et à la parcourir, on croirait un rêve d’économiste hétérodoxe. Grâce à Geneviève Fioraso, le rêve des économistes orthodoxes français, lui, ne touchera pas à sa fin de sitôt…

 

 

 

Source : www.marianne.net

 

 

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21 janvier 2015 3 21 /01 /janvier /2015 22:17

 

Source : ue89.nouvelobs.com

 

 

 

à lire sur Flightradar24 21/01/2015 à 15h06
Les jets privés défilent à Davos... avant les débats sur le dérèglement climatique

 

 

Voir l'image sur Twitter

1700 private jets expected to Davos in Switzerland to discuss climate change at World Economic Forum

 

Des centaines de jets privés ont atterri à Davos mardi, pour assister ce mercredi au lancement du Forum économique mondial. C’est ce que note sur son compte Twitter le site Flightradar24, qui recense justement les vols aériens dans le monde entier.

Selon sa base de données, pas moins de 1 700 jets sont attendus à Zurich dans le cadre du forum.

Flightradar24 n’oublie pas un détail croustillant : une bonne partie des participants venus en avion privé débattent ce mercredi des moyens de lutter contre le dérèglement climatique. Dont l’une des causes importantes est le transport aérien.

 

 

 

 

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21 janvier 2015 3 21 /01 /janvier /2015 22:06

 

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21 janvier 2015 3 21 /01 /janvier /2015 21:28

 

Source : www.mediapart.fr

 

Secret des affaires : journalistes et lanceurs d'alertes risquent d'être réduits au silence

|  Par martine orange

 

 

 

Profitant du projet fourre-tout d'Emmanuel Macron, une loi sur le secret des affaires a fait son apparition au travers d'un amendement. Un texte réclamé par le monde des affaires depuis plus de quatre ans. Les dispositions sont si floues et si larges qu’elles menacent la liberté d’information et les lanceurs d’alerte.

 

C’était samedi en fin de soirée. La commission spéciale mise en place pour étudier à toute vitesse les 106 articles du projet de loi pour la croissance et l’activité (voir Macron et son projet fourre-tout passent une première étape) expédiait une liste d’articles. Il fallait faire vite afin de dégager le terrain pour le dimanche, pour justement étudier le texte très attendu sur le travail le dimanche. Entre un amendement sur le sort réservé aux déchets liés à la mérule (champignon qui prospère sur les structures en bois des habitations) et un sur les retraites chapeau, Richard Ferrand, rapporteur général de la commission, présenta un amendement intitulé sobrement « après l’article 64 », qu’il avait déposé en son seul nom le 12 janvier.

Le texte proposé n’a d’amendement que le nom. C’est en fait un vrai projet de loi qui a été inclus dans le dispositif législatif ! Il s’agit d’intégrer dans le code civil et pénal un délit pour violation « du secret des affaires ».

Cela fait plus de trois ans que le monde des affaires tente de faire passer ce texte. La première tentative avait été faite en 2012. Soutenu par le ministre de l’industrie d’alors, Éric Besson, le député UMP Bernard Carayon avait présenté un texte pour poursuivre tous ceux qui divulgueraient des informations protégées des entreprises. Mais la proposition de loi avait été enterrée avec les élections. Dès octobre de la même année, le ministre de l’économie, Pierre Moscovici, exhumait le projet, sous la forte pression de Bercy. Alors qu’un projet de directive européenne sur le même thème est en cours d’élaboration, à la demande de tous les lobbies d’affaire, la France a préféré prendre les devants et, comme pour la loi bancaire, écrire son propre texte. À l’été, le président socialiste de la commission des lois à l’assemblée nationale, Jean-Jacques Urvoas, déposait sur le bureau de l’Assemblée une nouvelle proposition de loi sur le secret des affaires, préparée comme il se doit dans le plus grand secret.

C’est ce texte qui a fait sa réapparition, au détour de la loi Macron, sans que personne manifestement s’étonne de son irruption soudaine, sans au moins un débat préalable. Nous n’avons pas pu joindre le rapporteur général Richard Ferrand pour lui demander les raisons de ce soudain amendement. La méthode comme le texte illustrent en tout cas une nouvelle fois la capture de la loi, du politique, par le monde des affaires. 

Cette proposition de loi ne justifiait-elle pas au moins d’être présentée à part plutôt que de rejoindre le grand fourre-tout de la loi Macron ? « Nos possibilités de présentation de propositions de loi sont limitées. Nous n’en avons que trois par session. Mettre le texte sur le secret des affaires dans le véhicule législatif de la loi Macron nous permet de présenter d’autres textes, à côté. Nous souhaitons notamment présenter une proposition sur la responsabilité sociale des entreprises, les rapports avec les sous-traitants. Nous avons tous des priorités », explique la députée PS Sandrine Mazetier. Cette proposition sur la responsabilité sociale des entreprises a cependant été rejetée ce mercredi par la commission des lois, les députés PS votant contre...

Concernant le secret des affaires, ce procédé d’empiler texte sur texte dans un même véhicule législatif, au risque de faire perdre tout sens à la loi, n’a-t-il pas suscité quelque débat dans la commission ? S’est-elle au moins penché sur le texte qui lui était soumis à la va-vite ? « Non, je ne me souviens pas qu’il y ait eu des réactions ou des discussions au sein de la commission. Cela s’est passé très vite », raconte le député écologiste Jean-Louis Roumegas. « Il n’a pas fait l’objet de discussion », confirme la députée socialiste Colette Capdevielle. Avant d’ajouter : «  C’est un texte qui est terriblement attendu par les entreprises. Nous sommes un des rares pays où il n’existe pas de protection sur le secret des affaires. Mais je ne connais pas le texte. Pourquoi, il pose un problème ? »

Des problèmes, le texte législatif en pose de redoutables. Il prévoit de sanctionner toute atteinte au secret des affaires. Reprenant les dispositions prévues dans la proposition de loi présentée en 2012 par Bernard Carayon – un texte que la gauche avait alors refusé de voter –, il stipule que toute violation du secret des affaires est passible d’une peine de trois ans de prison et d’une amende de 375 000 euros. La peine est doublée et portée à 7 ans de prison et de 750 000 euros d’amende, « lorsque l’infraction est de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou aux intérêts économiques essentiels de la France ». Pour mémoire, l’abus de biens sociaux est passible d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 375 000 euros. C’est dire si la violation du secret des affaires, aux yeux des parlementaires,  est grave, bien plus grave que bien d’autres délits et crimes économiques.

Mais que signifie le secret des affaires ? Que veut protéger la loi ? Selon le texte présenté : « Est protégée au titre du secret des affaires, indépendamment de son incorporation à un support, toute information : 1) Qui ne présente pas un caractère public en ce qu’elle n’est pas, en elle-même ou dans l’assemblage de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible à une personne agissant dans un secteur ou un domaine d’activité traitant habituellement de ce genre d’information ; 2) Qui, notamment en ce qu’elle est dénuée de caractère public, s’analyse comme un élément à part entière du potentiel scientifique et technique, des positions stratégiques, des intérêts commerciaux et financiers ou de la capacité concurrentielle de son détenteur et revêt en conséquence une valeur économique ; 3°) Qui fait l’objet de mesures de protection raisonnables, compte tenu de sa valeur économique et des circonstances, pour en conserver le caractère non publié. »

« Il est à craindre que quelques scandales récents (Mediator, implants mammaires…) n'auraient pas éclaté avec une telle loi », s’était déjà inquiété le président de l’association des journalistes économiques et financiers au moment de la présentation de la proposition de la loi Carayon. Les mêmes craintes réapparaissent aujourd’hui. Le secret des affaires, tel que le texte le prévoit, va bien au-bien de l’espionnage industriel ou de l’usurpation de certains procédés techniques, de brevets, de la protection de données. Au vu de définitions si larges, si floues, on se demande quelle information n’est pas concernée. Plus que des concurrents dévoyés, ce sont plutôt la presse et les lanceurs d’alerte qui pourraient être le plus visés par ce texte.

Complaisance

Si toute information qui n’est pas publique relève du secret des affaires, autant dire que l’information économique n’a plus que pour mission de reproduire les communiqués gentiment dispensés par les entreprises, fabriqués à prix d’or par des communicants. Impossible de dénoncer des pratiques douteuses, de raconter les manœuvres d’enrichissement ou d’abus de biens sociaux. Comment raconter le système industrialisé d’évasion fiscale d’UBS, si ce n’est en mettant des documents confidentiels sur la place publique ? Quel sort sera réservé alors aux lanceurs d’alerte, qui ont pris le risque de dénoncer ces pratiques ? En plus de perdre leur travail, seront-ils aussi poursuivis par la justice pour violation du secret des affaires ?

Impossible de dénoncer les scandales des Caisses d’épargne, du Crédit lyonnais, d’Areva ou de Vivendi, si on suit à la lettre la définition de ce projet d’article. Parler des retards de l’A380 ou de l’A400M, n’est-ce pas mettre aussi en cause les intérêts commerciaux d’Airbus ? De même, quelle information ne revêt pas une valeur économique ? Aucune. Les milieux financiers et d’affaires se repaissent de toutes ces informations et prennent position à partir d’elles. C’est même une des bases de l’économie néolibérale, qui considère l’information comme une valeur essentielle pour déterminer le prix de marché.

Selon le rapporteur général, toutes les garanties sont données pour permettre la liberté d’information. « J’ai posé la question lors de la réunion. Il m’a assuré qu’il n’y avait aucun risque », raconte la députée socialiste Karine Berger. Le texte précise que « l’exercice légitime de la liberté d’expression ou d’information ou la révélation d’un acte illégal » n’entraînent pas une violation du secret des affaires. Le rapporteur a même rédigé un amendement à cet effet pour l’inclure dans la loi sur la presse de juillet 1881« Cet ajout sécurise la capacité des journalistes à révéler des infractions éventuellement commises par une entreprise », est-il précisé. Dans les faits, cet amendement permet juste aux journalistes de présenter des documents et des informations relevant du secret des affaires pour leur défense, en cas de procès pour diffamation. De même, la loi sur le secret des affaires ne s’appliquerait pas au lanceur d’alerte « qui informe ou signale aux autorités compétentes des faits susceptibles de constituer des infractions aux lois et règlements en vigueur dont il a eu connaissance ».

Les députés écologistes avaient déposé un amendement en commission en vue d’assurer une grande protection pour les lanceurs d’alerte, dénonçant des pratiques liées à la santé et à l’environnement. Ils ont finalement renoncé à le défendre. « On a préféré le retirer pour porter la discussion en séance », explique Jean-Louis Roumegas qui convient que le groupe est encore en train d’étudier le texte. « Pour nous, il est essentiel de préserver deux choses : les lanceurs d’alerte et la liberté de la presse », dit-il. Mercredi, les porte-parole d’EELV ont publié un premier communiqué dénonçant un texte qui « porte une menace sur la liberté d’informer ».

« C’est un texte confus, qui risque de provoquer des débats », dit Sandrine Mazetier, qui reconnaît qu’elle n’a pas encore pris le temps de l’étudier, étant plus sur les questions de logement et du travail le dimanche. « Nous sommes prêts à faire tous les amendements nécessaires pour garantir la liberté d’information et la protection des lanceurs d’alerte. Il ne doit y avoir aucune ambigüité sur le sujet », rajoute Karine Berger.

Mais le temps est très court. Le débat pourra-t-il être développé dans le cadre d’une loi Macron touchant à tout et étudiée dans le cadre d’un examen accéléré ? Les parlementaires sont-ils même convaincus de la nécessité de mettre des garde-fous ? Beaucoup ont déjà admis le principe même du secret des affaires et de la restriction du droit à l'information, même pour des dossiers relevant de l’intérêt général. Ainsi, lors de la commission d’enquête parlementaire sur Ecomouv et l’écotaxe, les parlementaires ont accepté sans rechigner que le contrat qui liait la société Ecomouv à l’État soit gardé secret « au nom des intérêts commerciaux » de la société. Il s’agissait pourtant de marché et d’argent public. La dénonciation de ce contrat coûte 883 millions d’euros à l’État, sans qu’il ait été possible d’en connaître la première ligne.

En dépit des promesses de transparence, le secret pour les affaires fait de plus en plus d’adeptes. Un amendement déposé par la députée socialiste Bernadette Laclais prévoit même de dispenser à l’avenir les sociétés de publier leurs comptes. À ce rythme, le chiffre d’affaires d’une entreprise va bientôt relever du secret-défense. L’amendement, dit-on dans les rangs parlementaires, n’a aucune chance d’être adopté mais il en dit long sur l’état d’esprit du monde politique.

En choisissant des définitions volontairement floues, un procédé expéditif, le gouvernement socialiste s’est rallié à l’omerta défendue par les entreprises, contre la liberté d’information des citoyens. Au nom de la compétitivité, de la défense des entreprises, des intérêts économiques, la classe politique soutient sans réserve l’opacité et le secret cultivé avec un goût prononcé par le monde français des affaires. Elle montre une grande complaisance face aux délits et crimes économiques, à la corruption, à l’évasion fiscale.

Un silence assourdissant a entouré la condamnation de BNP Paribas par la justice américaine à payer une amende de 8,6 milliards d’euros pour corruption. Pas un responsable politique n’a posé ne serait-ce qu’une question aux responsables de la banque et particulièrement au premier d’entre eux, Michel Pébereau. Le seul émoi des politiques porte sur la justice américaine, ses procédés, ses manières intrusives. Un amendement est d’ailleurs prévu pour limiter la capacité d’enquête et de demandes de documents des avocats américains auprès des entreprises françaises. La mesure est peut-être justifiée. Mais pas un seul responsable politique ne semble s’interroger sur les raisons d’une telle intrusion : si la justice américaine se montre si dure, n’est-ce pas parce que la justice française, elle, se montre beaucoup trop compréhensive ?

Les délits économiques ne sont presque jamais punis ou dans un tel délai que cela n’a plus de signification. Il a fallu attendre vingt ans avant que la justice se prononce sur le scandale de Crédit lyonnais. Douze ans se sont écoulés entre la chute de Jean-Marie Messier et sa condamnation – allégée – à dix mois de prison avec sursis pour abus de biens sociaux. L’arbitrage de Bernard Tapie, dénoncé par Laurent Mauduit dès 2008, n’est toujours pas devant la justice. Le scandale des Caisses d’épargne, la même année, est encore à l’instruction. Le signalement fait auprès du procureur de Paris par les syndicats du Printemps, dénonçant des pratiques de corruption et d’évasion fiscale de la direction, est encore au stade de l’enquête préliminaire, dix-huit mois après. Un an s’est écoulé depuis que la Cour des comptes a signalé les pratiques d’Areva au parquet et là encore l’enquête est toujours au stade préliminaire.

Face à une justice si lente, si compréhensive, seule la presse enquête, dénonce, fait bouger les choses, informe les citoyens. Sans elle, sans les lanceurs d’alerte, rien ne se serait passé dans l’affaire UBS, alors que toutes les autorités, de la DCRI à l’autorité de contrôle prudentiel en passant par l’administration fiscale, avaient eu des alertes et des dossiers constitués depuis 2009. Et ce sont ces dernières voix que le texte sur le secret des affaires risque de réduire au silence.

 

Lire aussi

 

Source : www.mediapart.fr

 

 

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21 janvier 2015 3 21 /01 /janvier /2015 21:17

 

 

Source : www.reporterre.net

 

 

À Bure, une fleur de résistance s’épanouit contre les déchets nucléaires

Emmanuel Daniel (Reporterre)

mercredi 21 janvier 2015

 

 

 

Pour s’opposer à l’enfouissement des déchets radioactifs à Bure, dans la Meuse, des militants ont créé la « maison de la résistance à la poubelle nucléaire ». Un lieu pour faciliter la lutte et l’organisation mais aussi pour mettre en pratique d’autres modes de vie, à contre-courant de la « société nucléarisée ».


- Bure (Meuse), reportage

Une église, pas de commerces, et soixante-dix habitants qui ne sortent de chez eux que pour prendre leur voiture. Bienvenue à Bure, un village quasi fantôme, à la frontière de la Meuse et de la Haute-Marne. Ce n’est pas un hasard si cette zone faiblement peuplée et à la population vieillissante a été choisie pour recevoir, enterrés à 500 mètres de profondeur, les déchets radioactifs de France et de Navarre.

Pour s’y opposer, il y a dix ans, le réseau Sortir du nucléaire et l’association Bure Zone libre ont acheté un corps de ferme de 600 m² à Bure. La « Maison de la résistance à la poubelle nucléaire » est née. L’idée était de proposer aux militants un pied à terre pour pouvoir s’organiser et s’opposer efficacement au projet.


- Le dortoir -

Organisation et alternatives

« Quand les gens venaient de loin, ils n’avaient aucun endroit pour se réunir ou rester dormir après les manifestations », explique Sidonie [parmi la dizaine de militants rencontrés, la plupart disent s’appeler Michel ou Michèle pour préserver leur anonymat. Afin de faciliter la lecture, les prénoms ont été changés], cheveux bruns coupés courts et regard pétillant, régulièrement présente depuis trois ans.

Progressivement, la bâtisse a été retapée par les visiteurs et les soutiens locaux. Deux « occupants permanents » qui tournent tous les six mois environ habitent le lieu et un dortoir d’une vingtaine de places abrite les activistes et les curieux qui viennent pour quelques jours ou quelques semaines. Les dons et les efforts des visiteurs ont transformé la vieille ferme en lieu de vie confortable. Une salle spacieuse accueille également les activités militantes (réunions, projections de film…).

Un peu partout, des cartes, des magazines, des films, des livres et des prospectus divers font de la Maison de la Résistance un « point d’info » sur l’énergie nucléaire et plus particulièrement sur le projet Cigeo (Centre industriel de stockage géologique, nom donné au projet d’enfouissement des déchets).

Le lieu a aussi pour but de prouver par l’exemple que le nucléaire ne constitue pas un horizon indépassable et qu’il existe des alternatives. Un chauffage au bois assure une chaleur confortable dans les pièces à vivre, un panneau thermique installé sur le toit contribue à chauffer l’eau, tandis qu’une éolienne construite sur place avec l’association Tripalium produit une partie de l’énergie consommée.

Un abonnement à Enercoop (fournisseur d’énergie alternatif) fournit le reste. Régulièrement, des chantiers participatifs et des ateliers (isolation du dortoir, construction de l’éolienne, stage de « grimpe »…) sont organisés. C’est l’occasion de partager des savoirs et d’attirer de nouvelles personnes.

A la Maison de la résistance, on croise des profils variés. Militants associatifs multicartes, zadistes en transit, opposants locaux de longue date et riverains à la recherche d’informations ou de convivialité. « Pour moi, ce qui se passe à Bure est l’une des deux choses les plus graves en France avec les migrants à Calais, explique Fatima, de retour en Meuse après un passage sur la ZAD du Testet. C’est plus grave qu’un projet d’aéroport ou de barrage. Un aéroport, tu casses le bitume et c’est reparti. Là, les déchets restent actifs pendant 100 000 ans », dit-elle.

Quant à Sidonie, elle a décidé de venir à Bure quand elle a découvert les conditions de travail dans les mines d’uranium au Niger. « C’est impossible d’avoir un impact là-bas, alors j’ai décidé d’agir ici », raconte-t-elle. Une troisième est arrivée « un peu par hasard », sur les conseils de la famille lors d’un tour de France en vélo. Si c’est la question du nucléaire qui les a majoritairement amenés là, d’autres motifs les poussent à rester ou à revenir.

Bienvenue en zone libre

Tous mettent en avant la convivialité du lieu. Il faut dire que l’ambiance est bonne à la Maison de la résistance. Les repas, préparés à plusieurs, se terminent souvent sur des airs de guitare et des chants, de préférence révolutionnaires. La grande table du salon se transforme alors en percussion géante. Les meubles, les mains ou les couverts deviennent des instruments de musique. Bien sûr, chaque nouvel arrivant a droit à une visite détaillée du lieu. Et quand la nuit tombe, les gens de passage se voient proposer de rester dormir plutôt que de reprendre la route. « On s’y sent vite chez soi », résume Fatima.

La maison n’est pas qu’un point de rendez-vous entre militants anti-nucléaires. Elle sert aussi de lieu d’expérimentation d’une forme de vie collective basée sur l’autogestion. Les visiteurs sont invités à prendre part aux tâches quotidiennes et aux travaux du moment.

Pendant mes quelques jours sur place, j’ai par exemple aidé à ranger l’atelier et à monter un échafaudage afin de repeindre un mur. Certains réguliers travaillent à l’extérieur ou font des saisons, d’autres vivent du RSA (revenu de solidarité active). Mais personne ne chôme. Entre activités militantes, préparation des repas, travaux dans le jardin et la maison, chacun s’active sans qu’aucun chef ne vienne donner d’ordre.

Un peu partout dans la maison et sur sa façade, on peut lire l’inscription « Bure Zone Libre ». Zone libérée du nucléaire bien sûr, mais aussi « de son monde », souligne Archibald, visiteur fréquent venu d’Alsace, en référence au slogan des opposants à l’aéroport de Notre-Dame des Landes.

« Une société nucléarisée ne peut pas être démocratique, poursuit-il. Elle ne peut pas fonctionner sans secrets d’État, corruption et conflits d’intérêts. On ne veut plus de toutes ces choses. » Pour beaucoup ici, le scandale nucléaire n’est qu’une conséquence de l’accaparement des pouvoirs par quelques-uns. La maison de Bure se veut un exemple en actes de comment pourrait fonctionner une société libérée du joug de l’oligarchie, comme l’explique Francis, mèche brune dépassant de son chapeau : « On recherche l’autonomie, l’autogestion et on essaie de se libérer du diktat de la consommation. »

Apéro et nucléaire

Pendant les repas, on discute OGM, péril fasciste, risque de récupération des initiatives locales ou souvenirs de soirées arrosées pendant les vendanges. Mais la question nucléaire occupe une large place dans les conversations. Une militante raconte avec moult détails la tentative de passage en force de l’Etat sur le dossier Cigeo.

D’autres commentent l’absurde document produit par l’ANDRA (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) qui se demande dans quelle langue signaler aux populations qui habiteront le territoire dans des dizaines de milliers d’années la présence d’un danger en sous-sol.

Aucun scientifique spécialiste du nucléaire n’habite la maison mais ses habitants connaissent bien leur sujet. Trop parfois : « C’est tellement scandaleux que par moments, on est obligés de prendre ça à la rigolade sinon on deviendrait dingues », me glisse Sidonie.

Actions et différentes formes de lutte

La maison de la résistance à la poubelle nucléaire entend aussi être une « épine dans le pied de l’ANDRA », dont les infrastructures déjà existantes sont situées à quelques coups de pédale de là. La maison est un espace propice à l’organisation des activistes. Elle a notamment facilité la tenue de l’assemblée du Grand t’Est, à l’origine du projet Bure 365 qui invite les militants de France et d’ailleurs à mener des actions décentralisées contre CIGEO pendant une année.

Certains, qui s’adonnent à la désobéissance civile, préfèrent rester discrets sur les actions qu’ils mènent. Mais d’autres évoquent volontiers leurs activités récentes : occupation de rond-points, perturbation des visites des installations par des clowns activistes, mise en lumière des failles techniques ou juridiques du dossier, ou travail de sensibilisation auprès des habitants de Bure. « La maison est ce que les gens en font. Et chacun choisit les modes d’action qui lui correspondent », résume Archibald.

Cela fait près de vingt ans que la mobilisation dure...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : www.reporterre.net

 

 

 

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