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24 février 2015 2 24 /02 /février /2015 17:59

 

 

Source :www.okeanews.fr

 

 

Ce que contenait le programme refusé par Varoufakis le 16 février

Le contenu du programme que le Ministre des Finances grec Yanis Varoufakis a refusé le lundi 16 février, lors du deuxième Eurogroupe consacré à la Grèce.

23 février 2015

C'est à cette sauce que le peuple grec allait être mangé si le gouvernement de Samaras avait remporté les élections. Il s’agit du fameux e-mail du précédent ministre des finances grec, Hardouvelis, datant de la fin novembre 2014, dans lequel il expose en détail les mesures envisagées en réponse aux exigences de la Troïka (en anglais). C’est cet e-mail auquel ont fait allusion Tsipras et Varoufakis en martelant que le pays ne sera plus jamais soumis à une gouvernance venue de l’étranger.

Ce mail – ou plutôt le document qui l’accompagne et détaille les mesures à venir - est disponible sur internet. Il ne s'agit pas d'un scoop ; mais il n'a pas été suffisamment commenté hors de Grèce et il gagne à être largement diffusé pour faire comprendre ce qui s'y passait sous la botte de la Troïka (Commission Européenne, Banque Centrale Européenne et Fonds Monétaire International).

Le document (cliquez sur l'image pour ouvrir le document) :

Capture d’écran 2015-02-18 à 14.43.17

Pour rappel, les nouvelles mesures décidées par la Troïka, que Samaras a préféré éviter d’appliquer lui-même en provoquant des élections dont il était certain de ne pas sortir vainqueur, prévoyaient encore 160.000 (cent soixante mille) licenciements supplémentaires dans l’administration (en commençant par la santé et l’éducation déjà bancales dans ce pays ruiné et administré depuis 4 ans par des néolibéraux), une nouvelle baisse des retraites de 10% (en sus des précédentes qui ont pu aller jusqu’à 60%), de nouvelles taxes, une hausse de la TVA sur certains produits et domaines moteurs (dont le tourisme). Des ponctions sur les salaires et de nouvelles réductions sur les « prestations sociales » (réduites à presque rien). Tout cela constituant un train de mesures propres à achever l’économie grecque déjà agonisante...

 

*Suite de l'article sur okeanews

 

 

Source :www.okeanews.fr

 

 

 

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24 février 2015 2 24 /02 /février /2015 17:47

Source :www.okeanews.fr

 

Les critiques et les 5 questions au gouvernement de K. Lapavitsas, économiste et député Syriza

Kostas Lapavitsas est professeur d’économie à l’Université de Londres et a été élu député Syriza lors des dernières élections. Dans un article publié sur son blog le 23 février, il critique les dernières négociations de son gouvernement avec les créanciers du pays et considère que cela ne va pas dans le sens des engagements pris lors du discours de Thessalonique qui présentait le programme économique en cas de victoire. Il pose également 5 questions importantes sur la dette, l’austérité, le Plan national de reconstruction et l’avenir des négociations.

24 février 2015

Par Kostas Lapavitsas

 

 

Kostas Lapavitsas

Kostas Lapavitsas

 

L’accord de l’Eurogroupe n’est pas complété, en partie parce que nous ne savons pas encore quelles sont les ‘réformes’ que le gouvernement grec proposera aujourd’hui (lundi 23 février) et quelles sont celles qui seront acceptées.

Mais, nous qui avons été élus sur la base du programme de Syriza et qui considérons que les propositions de Thessalonique sont un engagement que nous avons pris envers le peuple grec, nous sommes profondément préoccupés. Et il est de notre devoir de consigner nos préoccupations.

Le contour général de l’accord est le suivant :

  1. La Grèce demande la prorogation de l’accord courant qui est fondé sur une série d’engagements.
  2. Le but de la prorogation est de permettre d’achever l’évaluation de l’accord courant et de donner le temps d’élaborer un nouvel accord probable ;
  3. La Grèce soumettra immédiatement une liste de ‘réformes’ qui seront évaluées par les ‘institutions’ et sur lesquelles un accord sera conclu au mois d’avril. Si l’évaluation est positive, les fonds qui n’ont pas encore été donnés au titre de l’accord courant seront dégagés, de même que seront restitués les bénéfices réalisés par la BCE ;
  4. Les fonds disponibles au Fonds de stabilité financière (ESF) serviront exclusivement à couvrir les besoins des banques et ne seront plus sous contrôle grec.
  5. La Grèce s’engage de remplir pleinement et en temps utile toutes ses obligations financières envers ses partenaires.
  6. La Grèce s’engage à assurer les excédents ‘adéquats’ afin de garantir la viabilité de la dette sur la base des résolutions de l’Eurogroupe de novembre 2012. L’excédent 2015 tiendra compte de la conjoncture économique de 2015.
  7. La Grèce ne révoquera pas de mesures, ne procèdera pas à de changements unilatéraux susceptibles d’avoir un effet négatif sur les objectifs budgétaires, la reprise économique ou la stabilité financière tels qu’évalués par les ‘institutions’.

Sur cette base, l’Eurogroupe entamera les procédures nationales en vue d’une prorogation de quatre mois de l’accord en cours et invite les autorités grecques à engager immédiatement la procédure en vue de la réalisation de son évaluation.

Il est difficile de discerner comment, au travers de cet accord, il sera possible de réaliser les mesures annoncées à Thessalonique qui incluent l’annulation de la majorité de la dette et le remplacement immédiat des mémorandums par le Plan national de reconstruction.

Nous qui avons été élus avec Syriza, nous nous sommes engagés pour la réalisation de ce Plan indépendamment des négociations concernant la dette car nous estimons nécessaire de relancer l’économie et de soulager les souffrances de la société. Il est donc nécessaire à présent d’expliquer comment cela sera réalisé et comment le nouveau gouvernement sera en mesure de changer la situation tragique dont il a hérité.

Pour être plus précis, le Plan national de reconstruction incluait quatre piliers représentant, pour la première année, le coût suivant :

  1. Lutte contre la crise humanitaire (1,9 milliards).
  2. Relance de l’économie par le biais d’allègements fiscaux, le remaniement des ‘prêts au rouge’, la création d’une banque de développement, la restauration du salaire minimum à la somme de 751 euros (total : 6,6 milliards).
  3. Plan pour l’emploi public, impliquant 300.000 emplois (3 milliards pour la première année et 2 autres milliards à la seconde).
  4. Changement du système politique par le biais d’interventions dans les collectivités locales et au Parlement.

Les sources de financement prévues pour la première année, étaient les suivantes :

  1. Liquidation des dettes envers le fisc (3 milliards)
  2. Lutte contre l’évasion fiscale et le trafic de marchandises (3 milliards)
  3. Fonds de stabilité financière (3 milliards)
  4. Cadre national stratégique pour le développement et autres programmes communautaires (3 milliards)

Compte tenu de la communication de l’Eurogroupe, je pose les questions suivantes :...

 

*suite de l'article sur okeanews

 

 

Source :www.okeanews.fr

 

 

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24 février 2015 2 24 /02 /février /2015 17:33

Source : http://cadtm.org

 

CADTM

Grèce : allons à l’encontre de la campagne de mensonges

23 février par Claude Quémar , Maud Bailly

 

L’émission de débat télévisé Ce soir ou jamais présentée par Frédéric Taddeï proposait le 30 janvier 2015 un débat intitulé « Victoire de Syriza : les conséquences d’un vote anti-austérité ». L’intérêt de cette émission est d’avoir confronté des points de vue tout à fait contradictoires. Éric Toussaint, porte parole du réseau international du CADTM, a réussi à rendre un peu de souveraineté au peuple grec, en remettant les horloges à l’heure.

Cela commençait fort avec Jean-Marc Daniel, journaliste économique au Monde et à BFM, s’étonnant de l’accueil fait en France à la victoire de Syriza, « ceux-là mêmes qui vont vous voler » ! Le ton était donné, et nous avons eu droit à la quintessence des discours tenus depuis le début de l’affaire de la dette grecque : ils ont doublé le nombre de fonctionnaires sur les dernières années, doublé leurs salaires, le budget était en déficit permanent... « Les Grecs ont fait n’importe quoi ! On ne peut dépenser 115 quand on gagne 100 », proclamait Arnaud Leparmentier, éditorialiste au même journal Le Monde. Heureusement, la romancière grecque Ersi Sotiropoulos a rappelé ce que signifiait l’austérité dans la vie quotidienne des Grecs.

Les thèmes essentiels abordés dans ce débat : la démocratie, l’« aide » européenne à la Grèce, le projet de Syriza.


Pour ce qui est de la démocratie, la question posée est la suivante : Syriza peut-il revenir sur les décisions et les engagements pris par les gouvernements grecs antérieurs vis-à-vis de la Troïka ? Bien sûr, pour les tenants de l’austérité et de la rigueur demandée par les créanciers, la Grèce doit tenir ses engagements, « vis-à-vis des peuples européens » précisent-ils.

Éric Toussaint a rappelé qu’en votant majoritairement pour Syriza, le peuple grec s’est clairement prononcé contre l’austérité, et en faveur d’un programme qui entend abolir toute une série de mesures injustes : retour au salaire minimum légal tel qu’il était en 2010, rétablissement de l’électricité aux 300 000 ménages qui en étaient privés, arrêt des privatisations, et y compris une décision peu mise en avant par les médias, l’attribution de la nationalité grecque aux enfants d’immigrés nés en Grèce... Ce vote du peuple a une plus grande signification que le vote d’un parlement soumis à l’exécutif, faisant ici référence au processus de ratification du TSCG (pacte budgétaire européen), lequel a été ratifié en France en 2012 par voie parlementaire, plutôt que par référendum – afin d’éviter les mêmes déconvenues que celles rencontrées pour le Traité de Lisbonne en 2005. Eric Toussaint a dénoncé la trahison par le président François Hollande et sa majorité parlementaire des engagements pris à l’égard des citoyens et citoyennes qui l’ont élu en mai 2012 dans l’espoir notamment de voir rejeter le TSCG.

Eric Toussaint a souligné par ailleurs que la Troïka n’a aucune légitimité, puisqu’elle n’a pas été formée par un corps constitutionnel. En outre, le peuple grec n’a pas été consulté sur les emprunts qui lui ont été imposés : lorsque Georges Papandréou, premier ministre d’alors, a annoncé fin 2011 la tenue d’un référendum en février 2012 sur le programme à venir « de soutien » à la Grèce, il s’est heurté à un refus catégorique des puissances européennes et du FMI.


Le cœur du débat a tourné autour de « l’aide » européenne à la Grèce. Arnaud Leparmentier et son confrère JM Daniel ont soutenu que la Grèce « était en train de sortir de l’enfer », « la situation est assainie, les comptes sont équilibrés », et tout cela grâce à la « solidarité européenne ». Le pays a, selon eux, bénéficié de conditions bien meilleures que le Portugal ou l’Italie, via des taux d’intérêts abaissés.

Éric Toussaint : « Tant que les créanciers feront des prêts qui violent les droits fondamentaux des peuples, ils doivent s’attendre à ne pas être remboursés »

Éric Toussaint a toutefois précisé que c’est suite à la crise des subprimes en 2007, que les banques du Centre de l’Europe empruntaient à la Réserve fédérale des États-Unis à moins de 0,25 % et recyclaient cela dans des prêts à la Grèce. Par la suite, a-t-il rectifié, les prêts accordés par la BCE ont servi à rembourser ces mêmes créanciers, afin qu’ils puissent se dégager et être remplacés par la Troïka. Le programme de « sauvetage » de 2010 visait donc, non pas à sauver la Grèce et le peuple grec, mais à sauver les banques françaises, allemandes et de quelques autres pays centraux. En 2012, quand la dette grecque auprès des créanciers privés a été restructurée et réduite, ces banques avaient déjà revendu à d’autres (y compris à la BCE) leurs créances sur les marchés secondaires. Mais surtout, le porte-parole du CADTM a insisté sur le fait que les prêts européens étaient liés à des conditionnalités qui ont entraîné des violations des droits fondamentaux : « Tant que les créanciers feront des prêts qui violent les droits fondamentaux des peuples, ils doivent s’attendre à ne pas être remboursés ». Les memorandums imposés par la Troïka interdisent de revenir sur les privatisations et sur la baisse du salaire minimum à 580 euros, quand bien même l’équilibre budgétaire serait maintenu (ce qui est sujet à caution). Il s’agit bel et bien d’un déni de démocratie.

La députée socialiste Karine Berger a affirmé qu’elle avait voté en faveur du plan de sauvetage de la Grèce en 2010 afin de permettre à la Grèce de poursuivre le versement des allocations aux retraités. Eric Toussaint l’a contredite en affirmant qu’en réalité il ne s’est pas agi d’aider les retraités grecs mais de réduire leurs retraites et de s’attaquer à une série de droits fondamentaux de la population grecque, tout cela pour rembourser les banquiers privés français (en réalité essentiellement 3 banques : BNPParibas, Crédit Agricole et Société Générale), allemands, belges, luxembourgeois,...


Troisième thème abordé, le programme de Syriza. Pour les duettistes du Monde, le programme de Syriza est irréalisable et inacceptable. Syriza a un programme intérieur visant à se libérer de la contrainte externe et à retarder les échéances, en attendant les effets de la relance. Arnaud Leparmentier exprimait peu avant l’élection grecque dans un éditorial du Monde sa haine sociale : « dette annulée ou pas, nous allons continuer de nous ruiner pour les Grecs. Après les plans d’aide passés, Syriza demande aux Européens d’annuler ou de diviser par deux leur dette,comme l’obtinrent les Allemands en 1953 à la conférence de Londres [...]. Dans une Europe de paix, notre internationale revancharde invoque les réparations de guerre pour l’occupation nazie qui n’ont jamais été versées à la Grèce », avant de résumer son analyse vis à vis de la Grèce : « les Grecs refusent de payer des impôts ».

Alexandre Delaigue, économiste également, pense que la situation des banques grecques va se jouer dans les jours qui viennent en fonction des décisions de la BCE de les refinancer ou pas. L’État grec couvre aujourd’hui par le biais de prêts à court terme.

Pour Karine Berger, la Grèce est aujourd’hui en position de force vis-à-vis des créanciers, d’autant que les politiques imposées par la Troïka ont démontré leur caractère néfaste. Eric Toussaint lui a fait remarquer que si les politiques appliquées par la Troïka en Grèce étaient néfastes depuis 2010, c’est bien la preuve qu’elle, en tant que députée, n’aurait pas dû voter le prêt de la France à la Grèce en 2010 car celui-ci était octroyé à condition que la Grèce applique la politique exigée par la Troïka.

Par ailleurs, selon Éric Toussaint, le gouvernement de Tsipras est en fin de compte « très modéré », contrairement à l’image brandie par les médias. Il veut simplement « enlever une partie du fardeau social » en « redonnant aux pauvres ce qu’on leur a pris et en prenant aux riches », afin de maintenir l’équilibre budgétaire. D’autre part, plutôt que de suspendre unilatéralement le paiement de la dette, Syriza entend renégocier sa dette |1| et mettre en place une conférence européenne sur la dette, ce qui se heurte au refus de l’Union européenne. La possible victoire à venir de Podemos en Espagne peut toutefois modifier le rapport de force. Rappelons que l’Espagne avait en 2010 une dette publique inférieure à 60 % du PIB et ce sont les mesures imposées par la Troïka qui ont aggravé la situation. Le discours tenu sur la Grèce sera donc encore moins tenable pour l’Espagne. C’est maintenant que se joue l’avenir de l’Union Européenne. Eric Toussaint a affirmé qui si on demandait aux travailleurs en France s’ils sont d’accord que les salariés en Grèce gagnent beaucoup moins qu’eux (environ la moitié du salaire), ils se prononceraient contre cette politique car ils comprennent que le fait de réduire le salaire dans d’autres pays d’Europe va renforcer la compétitivité des produits de ces pays par rapport aux produits réalisés en France.

Au bout du compte, cette émission de Frédéric Taddéi a permis de remettre en question le discours dominant sur la Grèce,en démontant le discours des journalistes présents, auxquels Eric Toussaint rappelait qu’ils appartiennent à une ’élite’ coupée des réalités sociales, mais fort proches des dominants de la Troïka et des banques. Le modèle Mario Draghi, tant loué dans les pages du Monde, a pourtant été directement lié, en tant que responsable de Goldmann-Sachs, à la manipulation des comptes grecs.

 

NB : ce compte rendu ne prend pas en compte pour des raisons d’espace le débat sur l’Union européenne et l’euro, en particulier les propos tenus par Emmanuel Todd, démographe et historien.

 

 

Source : http://cadtm.org

 

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24 février 2015 2 24 /02 /février /2015 17:17

Source : www.bastamag.net

 

 

Biens communs

Biopiraterie en France : comment des entreprises privées menacent de s’approprier des semences et des plantes

par Sophie Chapelle 24 février 2015

 

 

Aider les chercheurs à cataloguer des semences, et se retrouver ensuite privé du droit de les planter : c’est la menace qui pèse sur les paysans français. Des entreprises privées nouent des partenariats avec des instituts de recherche publique pour collecter des graines dans les champs des éleveurs et des cultivateurs. Puis déposent des brevets, qui privatisent l’utilisation future de ces plantes et de leurs vertus, grâce à des failles réglementaires qui permettent aux multinationales de s’accaparer la biodiversité. « Aujourd’hui, un paysan qui partage ses ressources génétiques avec la recherche n’est plus protégé », dénonce la Confédération paysanne. Enquête sur ces nouveaux risques de biopiraterie.

« On veut mutualiser nos semences, pas se les faire voler ! Non aux brevets sur le vivant ! ». Déguisés en bagnards, boulets aux pieds, une dizaine de paysans déambulent dans les allées du Salon de l’agriculture ce 23 février. Direction, le stand de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra). Pourquoi cet institut de recherche est-il dans la ligne de mire de la Confédération paysanne ? Tout a commencé par un banal coup de fil. Jean-Marc Arranz, animateur à la Chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques, est contacté au printemps 2014 par un centre de ressources génétiques (CRG), basé à Lusignan en Poitou-Charentes. Il a déjà entendu parler de cette « banque publique de graines » rattachée à l’Inra. Ce centre collecte, répertorie et stocke des échantillons de plantes et de graines. Ses chercheurs s’intéressent justement aux semences pyrénéennes et « souhaitaient discuter des modalités d’une collecte de graines chez des éleveurs », explique Jean-Marc Arranz.

Les éleveurs donnent leur accord sur le principe, mais certains s’inquiètent d’un risque de biopiraterie : quelles sont les garanties que, suite à la collecte de l’Inra, des entreprises privées ne brevettent les caractéristiques des plantes identifiées qui deviendront ainsi leur propriété ? « Nous ne voulons pas nous retrouver dans la situation des éleveurs en Italie : il y a eu un prélèvement de trèfle dans la montagne et des entreprises sont venues ensuite réclamer des royalties aux paysans. C’est ce qui s’est aussi passé pour le riz basmati en Inde », craint Pascale Rey, éleveuse laitière installée en vallée d’Asp. Une discussion s’engage entre les éleveurs de la Chambre d’agriculture et le CRG. Rapidement, l’échange bute sur quelques détails pour le moins... épineux.

Risque de biopiraterie

D’emblée, le CRG se défend de toute volonté d’appropriation ou de privatisation des semences. Voilà cinquante ans que ce centre collecte dans les champs différentes espèces pour le semis de prairies et de gazon. Des lots de graines sont maintenus en chambre froide, comme d’anciennes variétés de pays et des variétés améliorées issues de sélections. L’objectif de la banque publique de graine ? « Disposer de matériel génétique pour les travaux de recherche de notre unité », explique à Basta ! Jean-Paul Sampoux, animateur du CRG. Une partie de ces échantillons est aussi mise à la disposition du public [1]. Une mission d’utilité publique à première vue, pour faire face aux aléas climatiques et à l’érosion accélérée de la biodiversité cultivée.

Avant toute collecte dans les champs, le technicien de l’Inra fait signer une autorisation par l’exploitant. Dans ce document de deux pages, que Basta ! a consulté, l’Institut de recherche s’engage « à ne faire aucun usage commercial direct des matériels collectés et des informations qui leur seront associées » [2]. Mais selon Patrick de Kochko du Réseau semences paysannes, « les garanties apportées aux éleveurs ne sont pas claires ».

Une entreprise privée associée à la collecte

La collecte est présentée par l’Inra comme une mission de service public en vue de verser les graines à la collection du centre public de ressources génétiques. Mais il y a un écueil : la collecte est réalisée en partenariat avec une entreprise privée néozélandaise, Cropmark Seeds. De quoi instiller le doute chez les éleveurs. CropMarks seeds finance l’intégralité des frais logistiques (véhicule, restauration, hébergement) et participe à la collecte. En échange, Cropmark Seeds reçoit un échantillon de chaque récolte, rapporte Jean-Marc Arranz, de la Chambre d’agriculture.

CropMark Seeds est une « petite » entreprise semencière qui emploie 26 personnes. Elle se présente comme une entreprise spécialisée dans la création de variétés et la commercialisation d’espèces dédiées aux pâturages. Que va-t-elle faire de ces prélèvements de graines ? « Cette société s’est dite très intéressée par les endophytes », relate Jean-Marc Arranz. Les endophytes sont des micro-organismes et des champignons présents dans les plantes qui leur procurent des propriétés de résistance à la sécheresse, aux ravageurs et ou aux maladies. Comme le précise CropMark Seeds sur son site, elle a déjà breveté – au terme de quinze années d’études – un procédé de protection d’une graminée contre les insectes nuisibles, en inoculant un endophyte dans la plante [3]... L’entreprise prévoit ainsi de ramener des échantillons en Nouvelle-Zélande, de les croiser, puis après un travail de sélection, de contribuer à la création de nouvelles variétés qu’elle pourra ainsi breveter.

Un risque de brevetage des « gènes natifs » ?

Ce type de partenariat public-privé est-il courant à l’Inra ? Les prospections réalisées en partenariat avec les semenciers français ont été courantes par le passé. Mais celle-ci est « la première réalisée avec un partenaire non français », précise Jean-Paul Sampoux, du Centre de ressources génétiques. En acceptant cette collaboration avec CropMark Seeds, le Centre de ressources génétiques décide ainsi d’en partager les résultats, en l’occurrence les graines collectées. « Nous sommes en droit de nous interroger sur la politique de collecte des ressources par l’Inra sur le territoire français », pointe Guy Kastler, du Réseau semences paysannes.

Pour se prémunir de tout dépôt de brevet sur une variété, l’Inra a fait signer à l’entreprise un « accord de transfert de matériel » [4]. Cet accord précise que CropMark Seeds s’engage à « ne pas revendiquer la propriété du matériel qu’il recevra, ni à chercher à acquérir des droits de propriété intellectuelle (DPI) sur ce matériel, ses parties ou ses composantes ». En clair : la plante demeurera un bien commun. Ces dispositions sont-elles suffisantes pour protéger les agriculteurs de tout risque de biopiraterie ? « Il n’est pas possible de déposer de droits de propriété intellectuelle sur une variété, reconnaît Guy Kastler. Mais le risque de dépôt d’un brevet sur un endophyte ou sur un caractère de la plante existe. Et cela limiterait l’accès voire interdirait aux agriculteurs qui ont fourni cette ressource de continuer à l’utiliser ! » A moins que l’agriculteur paie des « royalties », c’est-à-dire des taxes, aux détenteurs du brevet.

Quand une salade se fait... biopirater !

C’est ce qui est arrivé à l’entreprise française Gautier Semences. Elle sélectionne depuis longtemps des lignées de laitues contenant un caractère de résistance à un puceron. Mais une entreprise hollandaise, Rijk Zwaan, a mis au point une méthode pour obtenir ce caractère et a déposé un brevet [5]. Résultat ? Depuis 2004, la société Rijk Zwann contraint les sélectionneurs de semences potagères, comme Gautier Semences, à acquitter des redevances pour poursuivre la vente de leurs salades...

« En Europe, les demandes de brevets sur des caractères déjà présents naturellement dans les plantes se multiplient », fait valoir Guy Kastler. Les multinationales sont dans la course : Monsanto a cherché à déposer un brevet sur un gène de résistance des tomates (voir ici), Syngenta sur un caractère de résistance des poivrons à la mouche blanche (voir là), Limagrain sur une pastèque... « Les brevets sur les traits natifs sont la phase ultime de cette biopiraterie, prévient Guy Kastler. Les paysans qui ont donné aux collections publiques leurs semences et les connaissances qu’ils détiennent pensaient les offrir à tous. Ils se verront interdire de les utiliser dès qu’un semencier les aura récupérées pour breveter les séquences génétiques associées à ces qualités particulières. »

Assurer l’accès des agriculteurs à leurs semences

L’accord de transfert de matériel comporterait d’autres failles. S’il donne accès aux ressources aux chercheurs et sélectionneurs, il ne protègerait pas les agriculteurs. « L’’utilisation pour la culture et les semences produites à la ferme ne sont pas mentionnés », observe Guy Kastler. Qui demande également que le travail des agriculteurs qui participent en amont au maintien de la diversité biologique des prairies soit reconnu. Dans les prairies de Pascale Rey par exemple, installée en vallée d’Asp, plus de cinquante espèces ont été recensées. « C’est le travail de générations de gens qui, par leurs savoirs, favorisent cette diversité. C’est une question de terroirs mais aussi de rotations des cultures, de pâturages, de fauches tardives... Ce que l’on veut, c’est une reconnaissance du travail mené et des connaissances liées à cette agriculture de montagne, pratiquée dans des conditions difficiles », argumente-t-elle.

Le groupe d’éleveurs accepte donc de signer l’autorisation de collecte proposée par l’Inra, à la condition que la protection de leur droit à continuer de cultiver leurs semences y soit clairement garanti. « Nous avons aussi demandé à être tenus informés des connaissances produites à partir des échantillons, mais le service juridique de l’Inra a bloqué », déplore Jean-Marc Arranz. Le centre de ressources génétiques a donc renoncé à son opération de collecte en Pyrénées-Atlantiques. Des prospections se sont cependant déroulées chez d’autres agriculteurs ayant donné leur autorisation ( [6]). Face aux critiques, le CRG affirme avoir « mis à disposition ses accessions dans le cadre du Tirpaa ». Le Tirpaa est un traité international signé en 2005 qui vise officiellement à reconnaître « l’immense contribution » des paysans à la conservation de la biodiversité, et leurs droits à semer, échanger et vendre leur semences. Il prévoit que si les graines que l’on donne aux banques de gènes servent à sélectionner une nouvelle semence protégée par un droit de propriété intellectuelle, une part du « partage des bénéfices » générés doit revenir aux paysans.

« Une promesse avortée ! », fustige la Confédération paysanne. « 22 ans après l’entrée en vigueur de la Convention de la biodiversité et 10 ans après celle du Traité, l’industrie qui a engrangé ces bénéfices n’a toujours rien payé », commente Guy Kastler. Comment les entreprises procèdent-elles pour contourner l’obligation de partage des bénéfices ? Elles prétendent ne pas avoir prélevé ces semences dans une collection liée au traité international, ou les avoir collectées avant la signature de la Convention sur la diversité biologique en 1992...

Les paysans ont besoin de la recherche, et réciproquement

La Confédération paysanne et le Réseau semences paysannes demandent au gouvernement de respecter ses engagements internationaux, en reconnaissant les droits des agriculteurs et des communautés indigènes sur leurs ressources et en les protégeant de la biopiraterie. Le Projet de loi sur la biodiversité, qui doit être examiné au printemps à l’Assemblée nationale, sera-t-il une opportunité d’engager ce débat ? « Tout ce qui relève de la biodiversité agricole dans cette loi va être renvoyé à des ordonnances », critique Guy Kastler. Une manière pour le gouvernement d’échapper une nouvelle fois à tout débat parlementaire.

« Les paysans doivent réfléchir à deux fois avant de donner leurs semences ou les informations sur leurs plantes », avertit Guy Kastler. En cas de dépôt de brevet sur un caractère de la plante maintenue par le paysan, ce dernier pourrait passer du statut de contributeur de la recherche à celui de contrefacteur de la semence (voir notre précédent article) ! A la fin de leur action au Salon de l’agriculture, les paysans déguisés en bagnard ont enlevé leurs chaines et les ont remises à l’Inra. « Nous avons besoin de la recherche, comme la recherche a besoin des paysans, précise Guy Kastler. Nous leur demandons de venir avec nous pour changer la loi. » Reste à savoir ce que l’Inra va faire de ces chaines : les multiplier ou les briser ?

Sophie Chapelle
@Sophie_Chapelle sur twitter

Photo : CC USDA

Notes

[1] Environ 750 accessions sont mises à disposition du public (personnes physiques ou morales, de France ou de toute autre pays) dans le cadre d’une collection nationale maintenue en collaboration avec des entreprises semencières actives en France sur les espèces fourragères et le GEVES (réseau national de conservation des ressources génétiques des espèces fourragères et à gazon régi par la Charte nationale sur les ressources génétiques). Elles sont consultables sur la page Siregal du site internet du département Biologie et Amélioration des Plantes de l’INRA. Voir ici.

[2] .Télécharger le document.

[3] Voir la vidéo de présentation de CropMark Seeds.

[4] Cet accord de transfert de matériel (ATM) est l’accord type qui a été rédigé dans le cadre d’un traité international dit Tirpaa. Cliquez ici pour le télécharger.

[5] Voir le formulaire de brevet déposé par la société Zwaan.

[6] Voir la carte des zones de prospection du CRG Inra de Lusignan avec CropMark Seeds au printemps 2014

 

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Source : www.bastamag.net

 

 

 

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24 février 2015 2 24 /02 /février /2015 17:01

Info reçue par mail

 

 

Samedi 28 février à 16h, Place Montcalm à Nîmes, au pied de la plaque d'Hommage à la résistance anti-franquiste, Solidaires 30 et la CNT 30 organisent un rassemblement de soutien au mouvement social espagnol victime d'une vague répressive sans précédent depuis la fin de la dictature franquiste.

 

Ce rassemblement s'inscrit dans le cadre d'une campagne initiée par le Réseau syndical international de solidarité et de lutte, qui regroupe des dizaines de syndicats alternatifs au niveau international, dont Solidaires et la CNT.

 

Des rassemblements du même type auront lieu en simultané dans d'autres villes de France, à Paris, Metz, Perpignan et Toulouse entre autre.

 

Le tract de la campagne et l'affiche du rassemblement sont disponibles sur :

http://sudeducation30.free.fr/news/news.php?id=96

 

 

 

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24 février 2015 2 24 /02 /février /2015 16:48

 

Info reçue par mail

 

 

Mars ATTAC - 8e édition - semaine de films, débats, expos photos et peintures.

 

 

 

 

Vernissage de l’exposition de peintures et volumes de Jean Pierre Valero au Spot le jeudi 5 mars à 18h30 au Spot (8, rue Enclos Rey à Nîmes)

 

 

 

 

Mercredi 11 mars à 20h : Master of the universe (avec P. Saurin et non A.Rousseaux comme annoncé sur le flyer)

 

 

Documentaire (Allemagne, Autriche) 2014 - 1h28 - Réalisé par Marc Bauder.

Un ancien banquier décide de livrer son expérience. De ses grands débuts à sa fulgurante ascension dans les années 1980, il revient sur l'évolution du système financier, tout en dévoilant l'envers du décor...

 

Débat avec Patrick Saurin du CADTM (comité pour l'annulation de la dette du tiers-monde), du CAC (collectif pour un audit citoyen de la dette), de SUD BPCE (Banque Populaire – Caisse d’Epargne) et co-auteur du "Livre noir des banques".

 

http://gard.demosphere.eu/rv/2055

 

 

Jeudi 12 mars à 20h : Démocratie année zéro

Soirée co-organisée avec l'Université Critique et Citoyenne de Nîmes

 

Documentaire (Belgique) 2014 - 1h38 - Réalisé par Christophe Cotteret.

"Démocratie année zéro" autopsie les coulisses de la révolution tunisienne, grand bouleversement géopolitique de ce début de XXIe siècle, à travers le regard des principaux opposants et révolutionnaires.

 

Débat avec Abdessalam Kleiche, ATTAC France, spécialiste du Maghreb-Machrek.

 

A quelques jours du Forum Social Mondial de Tunis !

 

http://gard.demosphere.eu/rv/2056

 

 

 

Vendredi 13 mars à 20h : Pôle Emploi, ne quittez pas !

Soirée co-organisée avec la Ligue des Droits de l'Homme

 

Documentaire (France) 2014 - 1h18 - Réalisé par Nora Philippe.

Soutenir et surveiller, faire du chiffre, obéir aux directives politiques et aux injonctions de communication, trouver du travail là où il n’y en a pas, c'est l'impossible au quotidien pour l'équipe d'un Pôle Emploi ...

 

Débat avec Laurent Muchielli, sociologue au CNRS et directeur de l'Observatoire régional de la délinquance et des contextes sociaux à l'Université d'Aix-Marseille.

 

http://gard.demosphere.eu/rv/2057

 

Et à l’issue du débat, vernissage de l’exposition photographique « course folle à travers plaines, galets et étangs » de Didier Leclerc (cafétéria du Sémaphore).

 

 

 

Lundi 16 mars à 20h : Heritage fight

 

Documentaire (France, Australie) 2014 - 1h30 - Réalisé par Eugénie Dumont.

En Australie, Aborigènes et citoyens solidaires s'unissent pour combattre l'implantation de la plus grande usine à gaz au monde et pour défendre une terre, une vision du monde, et plus que tout, un héritage culturel.

 

Débat avec Jade Lindgaard, journaliste à Mediapart et auteur du livre "Je crise climatique".

 

http://gard.demosphere.eu/rv/2058

 

 

 

Mardi 17 mars à 20h : Le prix à payer

 

Documentaire (Canada) 2015 - 1h33min - Réalisé par Harold Crooks.

L’évasion fiscale à grande échelle, creuse l’écart des revenus entre les privilégiés et le reste du monde, appauvrit les classes moyennes, et affaiblit les fondations de nos sociétés.

Et si le prix à payer était la mort des démocraties ?

Inspiré du livre "La crise fiscale qui vient de Brigitte Alepin"

 

Débat avec Thomas Coutrot, porte-parole d'ATTAC France et auteur du livre "Jalons vers un monde possible. Redonner des racines à la démocratie".

 

http://gard.demosphere.eu/rv/2059

 

 

 

Mercredi 18 mars à 20h : Sacrée croissance

 

Documentaire (France) 2014 - 1h33 - Réalisé par Marie-Monique Robin.

Face à la crise et aux risques écologiques, la réalisatrice présente une sélection d’initiatives réussies et de modèles alternatifs viables, qui réfutent en action le modèle économique dominant.

 

Débat avec des acteurs locaux de la transition écologique et citoyenne : monnaie locale, circuits-courts (agriculture, énergie),…

 

http://gard.demosphere.eu/rv/2060

 

 

 

Et pendant toute la durée de Mars Attac :

 

Exposition photographique - cafétéria du Sémaphore :

"Course folle à travers plaines, galets et étangs"

de Didier Leclerc

 

"Je photographie à intervalles de temps réguliers, les modifications des paysages qui surviennent dans la plaine devant la Source Perrier, suite à la construction de la ligne à grande vitesse.

 

La confrontation visuelle est brutale ; l'échelle des moyens mise en oeuvre est étonnante ; une machinerie chirurgicale pour des interventions au bulldozer qui disent bien que leurs actions sont irréversibles !"

Didier Leclerc photographe janvier 2015

 

Vernissage : vendredi 13 mars à l’issue du débat (cafétéria du Sémaphore)

 

 

Exposition de peintures et volumes de Jean Pierre Valero au Spot (les jeudis, vendredis et samedis 12,13,14 et 19,20 et 21 mars)

 

Vernissage le jeudi 5 mars à 18h30 au Spot (8, rue Enclos Rey à Nîmes)

 

 

Pour plus de renseignements :

 

 

Cinéma le Sémaphore : 25 rue Porte de France, Nîmes

Tél : 04 66 67 83 11 - Web : http://www.cinema-semaphore.fr

 

Attac (Association pour la Taxation des Transactions financières

et pour l'Action Citoyenne) : Tél : 06 33 39 84 76

Web : https://france.attac.org / http://local.attac.org/attacnimes

mail : nimes@attac.org

 

Le Spot : 8 rue Enclos Rey, Nîmes

Tél : 04 66 36 85 64 - Web : http://lespotnimes.com/

 

 

 

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23 février 2015 1 23 /02 /février /2015 19:26

Source : http://www.reporterre.net

 

 

ENQUETE - 2 - Au coeur de l’agro-industrie française, les tentacules d’Avril Sofiproteol

 

Barnabé Binctin et Laure Chanon (Reporterre)

lundi 23 février 2015

 

 

 

Leader de plusieurs filières, présent de l’amont à l’aval, Sofiprotéol est un des opérateurs les plus puissants de l’agro-industrie française. Devenu groupe Avril le mois dernier, il assoit son hégémonie en diversifiant toujours plus ses activités et ouvre ses ambitions à l’international. Enquête dans les eaux où prospère la pieuvre Sofiprotéol.

C’est bien connu, le malheur des uns fait le bonheur des autres. Alors que l’ouverture du salon de l’agriculture a donné l’occasion de rappeler les difficultés du secteur, l’une de ses entreprises ne connaît décidément pas la crise. Elle a certes constaté une très légère baisse de son chiffre d’affaires à 7 milliards d’euros – pour 7,3 l’année précédente – ainsi que de son excédent brut d’exploitation de 245 à 192 millions d’euros, mais son dernier rapport d’activités est formel : 2013 lui aura permis de réaliser « le meilleur résultat net des trois dernières années ».

Qui ? Sofiprotéol. Enfin, « Avril » depuis le mois dernier. Le groupe a changé de nom et de gouvernance en vue de s’offrir « un meilleur accès à de nouveaux financements afin d’accélérer son développement » indique le communiqué de presse officiel, paru le 7 janvier dernier. Avec ses 8 200 salariés, dont 5 524 en France, Sofiprotéol-Avril se pose comme un modèle de réussite économique pour la nouvelle « Ferme France », selon l’expression de son président Xavier Beulin.

D’ailleurs, le groupe n’est jamais bien loin lorsqu’il s’agit de se porter au secours de l’agriculture française en crise. Les abattoirs porcins AIM en Normandie ? Sofiprotéol a déposé une offre de reprise jeudi dernier. Le volailler Tilly-Sabco en Bretagne ? Sofiprotéol était dans le coup.

Et la reprise du groupe Doux, à l’été 2012 ? Là encore, Sofiprotéol s’est présenté comme « sauveur », sans, cette fois-ci, emporter le morceau. Autour de la table, on retrouvait Tilly-Sabco, ainsi que Triskalia dans lequel Sofiprotéol a investi un an plus tard et LDC, avec qui il s’est allié, à l’automne dernier, pour « créer un géant de la volaille sur le marché français ».

Mais l’entente avec LDC s’en était trouvé renforcée, et l’accord entre ces deux poids lourds a permis à Sofiprotéol de prendre une nouvelle participation chez un des principaux acteurs du marché : « En parallèle de cette société, Sofiprotéol entre ‘‘de façon marginale’’ au capital de LDC et sera donc présent au conseil de surveillance avec un rôle constructif », souligne la revue professionnelle LSA-Conso.

Maitriser la chaîne du végétal à l’animal

Mais qui est donc Sofiproteol ? Son cœur de métier originel est l’huile. La firme a été créée en 1983 par des organisations interprofessionnelles, pour travaille autour des oléagineux (colza et tournesol, principalement) et des protéagineux (pois, féverole). Quel rapport, alors, avec les filières animales, comme lors de la tentative de reprise du volailler Doux ?

Pour le comprendre, il faut se référer à la doctrine officielle du groupe : l’intégration totale de filières. On peut le lire dans le livre vendu pour la modique somme de 45 €.

Son introduction présente sa « véritable ‘success story’ dans le domaine agro-industriel » :

« Au cœur de la démarche de Sofiproteol, se trouve la notion de ’filière’. Elle permet de comprendre qu’une même entreprise s’intéresse à l’huile de colza, aux œufs de poule, aux biocarburants, aux sauces ou à l’élevage des porcs. C’est en ramenant chaque partie de cette histoire à sa situation dans la filière qui naît dans les champs où poussent les oléagineux et protéagineux que l’on comprend la formation de cet ensemble par bien des aspects original. Dessinons à grands traits les contours de cette filière. En amont, plus de 2,5 millions d’hectares plantés en oléagineux et protéagineux pour une production de l’ordre de 8 millions de tonnes. […] Le groupe transforme la majorité des productions d’oléagineux et de protéagineux français, avec le souci constant d’en valoriser non seulement les parties ’nobles’ - protéines ou matières grasses -, mais aussi les coproduits, appelés tourteaux. Cela explique la grande diversité de ses marchés. Mais le terme de filière recouvre une autre dimension : l’interdépendance des stades de production. Cela explique par exemple l’intérêt du groupe pour les recherches sur les semences, en amont de l’exploitation agricole, qui déterminent en aval de la transformation les caractéristiques des produits. Tout se tient dans une filière. C’est l’un des fils rouges de l’histoire du groupe ».

Le dessin ci-dessous, réalisé par Sofiproteol, illustre cette stratégie : à partir d’un produit, envisager tous les débouchés possibles. Et s’implanter dans la filière, en prenant la main progressivement sur l’ensemble de la chaîne de production.

Plus lisible en téléchargement :

C’est ainsi que le groupe, d’abord spécialisé sur les huiles végétales, à usage alimentaire ou énergétique, a fini par devenir un acteur fondamental dans l’élevage. Comme en témoigne cet éleveur au micro de France 3, Sofiprotéol est bien « présent sur toutes les filières animales françaises ». Du porc à la volaille, il est leader en alimentation animale avec sa filiale Glon Sanders. Mais il est aussi présent en aval, grâce à des entreprises spécialisées dans la santé animale et l’hygiène de troupeaux, le conseil en conduite zootechnique et des sociétés qui travaillent à la transformation de la viande.

Jean-Philippe Puig, ancien directeur général de Sofiproteol devenu gérant de la nouvelle société Avril, conclut l’ouvrage-anniversaire en énonçant « l’objectif stratégique fondamental » : « Structurer une filière à la fois verticalement (des semences aux produits de consommation) et horizontalement (notamment l’axe végétal-animal) ». Invité de BFM Business il y a un an, le responsable se targuait d’être présent dans treize métiers quand la journaliste lui parlait d’une « liste longue comme le bras où vous êtes leader » (à écouter ici).

Pour ce groupe qui revendique un « nouveau printemps », le catalogue de ses activités est long. Reporterre propose ci-dessous une infographie n’est certes pas exhaustive, à partir de ce que le groupe affiche sur son site et dans son rapport d’activité :

Plus lisible en téléchargement :

Alimentaire, cosmétique, énergie, des produits de consommation courante aux activités intermédiaires plus discrètes, Sofiproteol est, selon Attac, « la pieuvre de l’agro-industrie française », une pieuvre déployant ses tentacules dans tout l’univers agricole. Comment cet empire a-t-il pu se constituer ?

Un empire financier

Le groupe Avril-Sofiproteol n’est pas seulement un acteur industriel : il est aussi un des principaux financeurs de l’agriculture française. Comment ? Par son activité en tant que fonds d’investissement, et qui vaut à ce dernier de continuer d’exister en tant que tel dans le nouvel organigramme d’Avril. En réalité, à sa naissance, Sofiprotéol est d’abord constitué en tant qu’établissement financier, appelé à gérer les fonds de la filière oléo-protéagineuse. D’où proviennent ces fonds ? Des "contributions volontaires obligatoires", versés par les producteurs d’oléo-protéagineux. Oui oui, vous avez bien lu, des prélèvements « volontaires obligatoires ». Même Xavier Beulin en sourit quand il s’entretient avec Reporterre :

Problème ? En 2002, la Cour des Comptes se saisit de ce dispositif et enquête sur l’utilisation des fonds récoltés. Et le rapport est sans appel, dénonçant la « lecture très extensive qu’[en ont fait] les dirigeants de Sofiprotéol » : « La légalité tant nationale que communautaire du financement d’opérations d’investissement au moyen de « cotisations volontaires obligatoires » apparaît douteuse à plusieurs titres ».

 

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

Source : http://www.reporterre.net

 

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23 février 2015 1 23 /02 /février /2015 19:21

Source : http://www.reporterre.net/Les-banques-francaises-continuent

 

Les banques françaises continuent à spéculer sur les matières premières agricoles

Oxfam

lundi 23 février 2015

 

 

 

3,5 milliards d’euros : le montant des fonds qui permettent aux clients des principales banques françaises de spéculer sur les matières premières agricoles

Il y a tout juste deux ans, sous la pression d’Oxfam France, les principales banques françaises prenaient des engagements forts pour réduire ou stopper leurs activités spéculatives sur les matières premières agricoles. Dans le même temps, les parlementaires votaient dans le cadre de la réforme bancaire des mesures de régulation de ces activités toxiques. Dans un nouveau rapport publié aujourd’hui lundi 23 février (téléchargeable ici), l’ONG fait le bilan des promesses et des progrès législatifs. Et le constat est sans appel : tout reste à faire.

En février 2013, Oxfam France présentait un classement des banques françaises impliquées dans des activités néfastes de spéculation sur les cours des matières premières agricoles. L’étude démontrait que quatre grands groupes bancaires français, la BNP Paribas, la Société Générale, le Crédit Agricole/LCL et le groupe BPCE, étaient directement impliqués dans ces activités, et géraient au moins 18 fonds permettant à leurs clients de spéculer sur les matières premières, pour une valeur totale correspondant à 2 583 millions d’euros.

« Ces activités toxiques mettent en péril le droit à l’alimentation de centaines de millions de personnes », explique Clara Jamart, auteure de l’étude pour Oxfam France. « La spéculation galopante sur les marchés dérivés de matières premières agricoles aggrave la volatilité des prix alimentaires, et prive les populations les plus pauvres de l’accès aux denrée alimentaires de base ».

Deux ans plus tard, les résultats de cette nouvelle étude démontrent que trois groupes bancaires français proposent toujours à leurs clients des outils permettant de spéculer sur les prix des matières premières agricoles : la BNP Paribas, la Société Générale et le groupe BPCE (Caisse d’Epargne et Banque Populaire), via Natixis. Le Crédit Agricole semble bien avoir respecté ses engagements et cessé toute activité spéculative sur les marchés agricoles, mais refuse toujours de prendre des engagements fermes dans la durée. Au final, le montant total des fonds gérés par les banques françaises et exposés aux matières premières agricoles s’élève aujourd’hui à au moins 3 561 millions d’euros, dans un secteur où l’opacité reste la règle.

Pour Clara Jamart, le bilan est très maigre : « Malheureusement, force est de constater que les promesses n’ont pas véritablement fait le poids face à l’appât du gain. La Société Générale a certes fait un important effort de transparence et a globalement tenu ses promesses, mais c’est aujourd’hui la banque française qui spécule le plus sur la faim : elle doit impérativement aller plus loin ! La BNP Paribas, elle, n’a tout simplement pas respecté ses engagements. Le groupe BPCE était le seul à n’avoir pas fait de promesses en 2013, il est largement temps qu’il assume enfin ses responsabilités ».

Du côté politique, le gouvernement semble bien peu pressé de mettre en œuvre les nouvelles mesures légales de la réforme bancaire, et de jouer son rôle de régulateur. Plus d’un an et demi après le vote de la réforme bancaire, les mesures législatives concernant la transparence et la régulation des marchés dérivés de matières premières agricoles ne sont toujours pas mises en œuvre...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : http://www.reporterre.net/Les-banques-francaises-continuent

 

 

 

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23 février 2015 1 23 /02 /février /2015 18:47

 

Source : http://www.humanite.fr

 

Bonus d’arrivée indécent chez Sanofi

 

Kevin Boucaud

Lundi, 23 Février, 2015

L'Humanité

 

Photo Eric Piermont/AFP

 

Ils n’ont pas honte ! Le nouveau PDG du groupe pharmaceutique français Sanofi, nommé jeudi soir, Olivier Brandicourt, aura droit à un « bonus de bienvenue » qui pourrait atteindre 4 millions d’euros.

Selon un document consultable sur le site Internet de Sanofi, une indemnité forfaitaire brute de 2 millions d’euros est prévue pour la prise de fonction du nouveau directeur général, le 2 avril. Olivier Brandicourt pourrait également bénéficier d’une telle indemnité en janvier 2016 s’il est toujours en poste à ce moment-là. L’entreprise explique qu’elle accorde cette prime à son nouveau chef, qui s’occupe actuellement des activités pharmaceutiques du groupe allemand Bayer, en « contrepartie des avantages auxquels il a renoncé en quittant son précédent employeur ». Le groupe précise également que la rémunération de son nouveau PDG sera composée d’une part fixe annuelle brute de 1,2 million d’euros et d’une part variable cible de 150 % de la rémunération annuelle fixe et plafonnée à 250 % – soit entre 3 millions et 4,2 millions d’euros – « soumise à des objectifs à la fois quantitatifs et qualitatifs », précise Sanofi. Olivier Brandicourt touchera par ailleurs 220 000 options de souscription d’actions par an et 45 000 actions de performance. Cette annonce intervient alors que les salariés luttent depuis trois semaines afin d’obtenir une modeste augmentation de 120 euros par an, soit juste 50 centimes par jour. Une largesse que ne veut pas se permettre la direction du groupe pharmaceutique, alors que l’entreprise se porte particulièrement bien, affichant un résultat net des activités à 6,847 milliards d’euros (soit une hausse de 2,4 % par rapport à 2013) et possédant la deuxième capitalisation à la Bourse de Paris. Dans le même temps, Sanofi s’est permis de verser 3,7 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires, « soit la 21e année de hausse », précise la direction dans un communiqué. La CGT a tenu à montrer son indignation face à ce qu’elle a perçu « comme une gifle ». Niveau emploi, le PDG sortant a annoncé récemment que Sanofi n’avait pas « pris d’engagements » sur la « stabilité des effectifs ».

 

 

Source : http://www.humanite.fr

 

 

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23 février 2015 1 23 /02 /février /2015 18:37

 

Source : http://www.humanite.fr

 

Les droits des salariés dans le viseur patronal et gouvernemental

Kareen Janselme

Lundi, 23 Février, 2015

L'Humanité

 

 

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Loi sur la sécurisation de l’emploi, loi Macron, négociation sur le dialogue social : aucun texte n’épargne les comités d’entreprise. Soixante-dix ans après leur naissance, ils sont toujours craints des patrons alors qu’ils peuvent apporter des solutions alternatives pour développer l’entreprise.

Alors que la négociation sur la modernisation du dialogue social s’est soldée par un échec au mois de janvier, la CGT, FO et la CFE-CGC refusant de signer le texte patronal, le gouvernement reprend la main sur cette réforme à haut risque. Le premier ministre, Manuel Valls, reçoit les organisations syndicales et patronales mercredi dans le but d’élaborer une « loi travail », qui pourrait abonder dans le sens du Medef de fusionner les instances représentatives du personnel – IRP – (délégués du personnel – DP –, comité d’entreprise – CE –, comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail – CHSCT) en un conseil d’entreprise. La perspective d’un possible laminage des droits et prérogatives de ces instances est sur la table, l’année même où les comités d’entreprise, nés le 22 février 1945, fêtent leurs soixante-dix ans. Menacé, le CE n’a pas encore passé l’arme à gauche malgré les attaques incessantes du patronat.

Parce que le CE n’est pas juste un distributeur de spectacles à prix réduits, le patronat a toujours voulu limiter son infl uence. Contrôle des comptes de l’entreprise, expression des salariés : voici les incontestables prérogatives qui, depuis la naissance de l’institution, inquiètent malheureusement beaucoup de chefs d’entreprise. Malheureusement, car cette IRP a été conçue pour aider à mieux diriger l’entreprise… et non freiner sa croissance comme le font croire les organisations patronales, mais aussi le gouvernement aujourd’hui. Pour preuve, après la loi dite de « sécurisation » de l’emploi votée en 2013, qui a réduit les délais de consultation et d’expertise, la loi Macron a voulu restreindre la publicité des comptes et a réussi à dépénaliser le délit d’entrave au comité d’entreprise…

Prochaine étape de discussion donc : la réduction de l’infl uence des IRP, le devenir des CHSCT, un agenda simplifi é de négociations obligatoires annuelles et une possible réforme des seuils sociaux, nombre de salariés qui, pour une entreprise, déclenchent une obligation d’instaurer des formes de représentation du personnel. Quand il naît après la Seconde Guerre mondiale, le comité reconnaît aux ouvriers une place dans l’entreprise. Le patronat a été en grande partie discrédité par sa collaboration avec l’ennemi. En 1944, le Conseil national de la Résistance adopte un programme qui met en avant « le droit d’accès, dans le cadre de l’entreprise, aux fonctions de direction et d’administration, pour les ouvriers possédant les qualifi cations nécessaires, et la participation des travailleurs à la direction de l’économie ». Seulement, « les choix économiques demeureront toujours l’apanage des directions », regrette Laurent Milet, coauteur avec Maurice Cohen de l’ouvrage référence, le Droit des comités d’entreprise et des comités de groupe.

Malgré l’intention du Conseil national de la Résistance, l’ordonnance du 22 février 1945 créant les comités d’entreprise leur offre peu de compétences. Il faudra attendre 1946, après la démission du général de Gaulle, la victoire des partis de gauche à l’Assemblée constituante et l’arrivée d’Ambroise Croizat, communiste, ex-secrétaire général CGT de la métallurgie, comme ministre du Travail pour remettre sur le tapis un texte qui intègre dans les prérogatives des CE un droit de regard et d’intervention des salariés dans la gestion de l’entreprise. La loi du 16 mai 1946 double le nombre de sociétés pouvant bénéficier de comités d’entreprise en abaissant le seuil obligatoire de 100 à 50 salariés. En plus d’être informé, le CE gagne l’obligation d’être consulté sur l’organisation et la marche générale de l’entreprise. Un expert-comptable peut l’assister. Mais déjà le patronat critique la limitation de la notion de secret professionnel et le temps payé aux élus pour exercer leur fonction.

Les CE arrivent à stopper des procédures de licenciement

Le CE va aussi devenir, pour la première fois, gestionnaire à part entière des activités sociales et culturelles. « Cette autonomie dans le domaine social constitue une véritable école de gestion, souligne Laurent Milet. Historiquement, le transfert des œuvres sociales patronales aux élus des salariés a constitué une importante conquête sociale. Cela n’a pas toujours été de soi. Et l’histoire nous a montré que certaines grandes entreprises ont été réticentes sur ce point : Michelin, dans les années 1950, la SNCF, dans les années 1980, sans parler d’EDF où la direction a carrément confié à des administrateurs, nommés par la direction, la gestion des activités sociales entre 1951 et 1964. » Petit à petit, les élus salariés vont s’emparer des outils de l’institution. Mais il faudra de nouveau l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 pour redonner de l’élan aux comités d’entreprise. « Le pouvoir économique est le moins partagé de tous », déplore Jean Auroux, qui fut ministre du Travail en 1982 et instigateur des lois portant son nom (voir ci-contre). Quatre textes, votés en 1982, vont apporter pas moins de 70 améliorations : l’obligation annuelle de négocier sur les salaires, la durée et l’organisation du travail, l’extension des prérogatives de l’expert-comptable, la création du comité de groupe avec la prise en compte de l’internationalisation du capital, la protection contre la discrimination politique et syndicale, le droit d’expression des salariés sur leurs conditions de travail… Enfin une dotation minimale de fonctionnement est attribuée au comité d’entreprise égale à 0,2 % de la masse salariale brute. Ce budget de fonctionnement est totalement séparé de celui des activités économiques et sociales. L’un et l’autre ne peuvent en aucun cas se remplacer ou se compléter. Le budget de fonctionnement est entièrement dédié au contrôle économique de l’entreprise : il donne des moyens aux élus et une indépendance vis-à-vis de l’employeur. Les comités d’entreprise vont dès lors connaître un regain d’activité dans le domaine économique. Et depuis, à chaque négociation sur les instances du dialogue social, le patronat va tenter de fusionner les budgets pour recentrer le comité d’entreprise sur la gestion des activités culturelles et sociales et éloigner son regard des comptes de la société. Récemment, la loi dite de « sécurisation » de l’emploi de 2013, en introduisant une nouvelle expertise sur les orientations stratégiques de l’entreprise, impose qu’elle soit financée en partie par le comité. Faute de moyens, les petits CE vont moins exercer leur droit de regard. Les autres expertises, si elles restent entièrement payées par l’employeur, sont désormais enserrées dans des délais restreints. Il a fallu du temps pour que les CE s’approprient leurs attributions économiques. Passant à l’offensive, ces instances, qui doivent être informées et consultées, agissent en justice lorsque l’employeur les contourne ou ne les renseigne pas suffisamment. La jurisprudence progresse. Les CE arrivent à stopper et à retarder les procédures de licenciements collectifs. Ainsi, en 1995, le plan social d’Éverite, filiale de Saint-Gobain, est frappé de nullité par la Cour de cassation pour « manque d’indications sur le nombre et la nature » des reclassements proposés. En 1997, l’arrêt Samaritaine va plus loin. Non seulement le plan social prononcé en 1993 est annulé mais la Cour de cassation somme l’enseigne de réintégrer les salariés licenciés. En 2011, la cour d’appel de Paris annule le plan social de Viveo et cette fois-ci pour absence de motifs économiques, suite à la démonstration des données fournies par l’expertise du CE. La Cour de cassation reviendra sur cette décision affirmant que les juges ne peuvent pas annuler un PSE pour défaut de cause économique puisque ce n’est pas inscrit dans la loi. La haute juridiction ferme la porte à de nombreux recours possibles qui inquiétaient sensiblement les grands patrons. Il est clairement signalé aux comités d’entreprise qu’ils ne peuvent que retarder ou améliorer un plan de sauvegarde de l’emploi. Et pourtant…

Depuis 2003, plusieurs lois ont grignoté les prérogatives des CE

En 2009, dans le Morbihan, le propriétaire de la fonderie SBFM veut réduire les effectifs de moitié. Mandaté par le comité d’entreprise, le cabinet d’expertise Secafi démontre la viabilité de l’entreprise et va permettre sa reprise par le donneur d’ordres Renault. « Nous avons démontré que le propriétaire avait dilapidé l’argent des caisses et que nous avions entre les mains un véritable savoir-faire puisque nous sommes les seuls en France à fabriquer de la fonte pour les pièces de sécurité automobile, explique Maël Le Goff, membre du comité d’entreprise de la Fonderie de Bretagne, ex-SBFM. Le couperet est tombé le 27 juin 2009, les 550 salariés ont été repris par Renault dans une filiale qui a pris le nom de Fonderie de Bretagne. » Dernièrement, des expertises ont permis d’investir dans une nouvelle ligne de moulage : « Sans investissement, on était mort. » Face aux avancées jurisprudentielles, les lois s’engouffrent dans des vents contraires. Depuis 2003, plusieurs textes sont revenus sur les droits sociaux légaux et ont permis des accords d’entreprise dérogatoires. En 2004, le rapport Virville propose un conseil d’entreprise unique rassemblant CE, délégués du personnel, délégués syndicaux. Le Medef propose, lui, de « moderniser le Code du travail » en niant le droit du CE à choisir son expert, en supprimant les sanctions pénales, etc. Un esprit qu’on retrouvera dans la loi de « sécurisation » de l’emploi, avec l’accélération de la procédure d’information-consultation des CE et la limitation de l’expertise dans le temps. « À dix ans d’intervalle, on retrouve le même discours à travers la rhétorique du coût du travail, constate le juriste Laurent Milet. Même les IRP représentent un coût : il faut donc, dans l’esprit patronal, rationaliser les consultations, avoir moins d’élus, leur consacrer moins de temps avec une seule négociation annuelle obligatoire, et une seule instance représentative. » Dans les entreprises, les menaces de la loi Macron et les propositions patronales actuelles pour rénover le dialogue social inquiètent : « Deux fois par an, nous mandatons un expert pour étudier les comptes annuels, les investissements, les choix stratégiques, rapporte Maël Le Goff. L’expert obtient des chiffres qui ne nous sont pas communiqués en CE. Si la publication des comptes n’était plus autorisée comme a essayé de le faire la loi Macron au nom du secret des affaires, le comité d’entreprise n’aurait plus de raison d’être ! Nous sommes tous dubitatifs par rapport à la loi sur la modernisation du dialogue social à venir, suite à l’échec des négociations. Les salariés sont très inquiets de la volonté de créer une instance unique qui entraînerait la disparition du CHSCT (comité hygiène sécurité et conditions de travail). » Plutôt que de réduire les droits, l’évolution de l’entreprise (mondialisation, course à la rentabilité, etc.) commanderait plutôt d’en élargir l’accès, d’accorder par exemple la possibilité aux élus du CE de posséder un « droit de veto » sur les décisions stratégiques.

 

 

Source : http://www.humanite.fr

 

 

 

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                 tous les soirs

      devant la maison carrée

 

       A partir du 16 Juillet 2014

            et pendant l'été

                     RV

       chaque mercredi à 18h

                et samedi à 13h

    sur le terrain de Caveirac

                Rejoignez-nous  

et venez partager ce lieu avec nous !



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