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27 février 2015 5 27 /02 /février /2015 16:05

 

Info reçue par mail

 

Le gouvernement français défend l’arbitrage privé au service des multinationales !

 

Communiqué 26 février 2015

 

 

Ce mardi 24 février, les euro-députés français ont reçu une note de recommandation sur le TAFTA. Elle concerne la résolution sur l’accord transatlantique qui sera examinée par le Parlement européen dans les semaines à venir [5].

Cette note fuitée livre des informations inédites sur la position du gouvernement et recommande en particulier de ne pas suivre la position de rejet de l’ISDS du rapporteur socialiste Bernd Lange.

 

Le gouvernement français prêt à tout pour sauver l’ISDS ?

Lors d’une réunion au sommet à Madrid samedi, les sociaux-démocrates européens se sont accordés pour sanctuariser le système de règlement des différends investisseur-État (ISDS) - en clair : pas de rejet mais des réformes mineures. Pour parfaire la plaisanterie, le gouvernement français a salué cette nouvelle reculade comme une grande victoire de la diplomatie française. Un communiqué de la majorité, au titre mensonger [1], illustre ce double discours : critiques de façade du mécanisme face au rejet largement exprimé dans l’opinion publique [2], mais travail en souterrain pour s’assurer de son maintien dans les négociations. La note communiquée ce mardi aux euro-députés français confirme ces manœuvres : alors que la résolution étudiée par le Parlement européen penche en faveur d’un rejet du mécanisme, les autorités françaises conseillent aux parlementaires d’« adopter une approche plus prudente sur ce sujet délicat ». En d’autres termes, le gouvernement demande aux parlementaires d’affaiblir la position, déjà bien timide, du rapporteur social-démocrate allemand Bernd Lange.

Le gouvernement français appelle également dans cette note à favoriser un travail plus ambitieux sur la coopération réglementaire, sur laquelle nous avons déjà exprimé de multiples inquiétudes [3].

Enfin, en dépit des ravages causés par la crise financière de 2008, le gouvernement demande l’inclusion des services financiers dans l’accord transatlantique.

 

Un décalage effarant entre les actes du gouvernement et les préoccupations des populations

Ces nouveaux éléments témoignent d’un décalage effarant entre les actes du gouvernement et les préoccupations des populations, alors que l’Initiative citoyenne européenne (ICE) lancée à l’automne dernier vient de dépasser les 1 500 000 signatures.

Le collectif Stop TAFTA dénonce l’attitude méprisante du gouvernement français et particulièrement la duplicité et la fausseté du secrétaire d’État au commerce extérieur, Matthias Fekl. Nous réaffirmons notre opposition aux négociations en cours et appelons à se mobiliser massivement lors de la journée d’action internationale du 18 avril contre les traités des multinationales [4].

 

[1]http://www.parti-socialiste.fr/communiques/les-socialistes-europeens-disent-non-au-mecanisme-darbitrage-investisseursetats

[2] Voir notre communiqué « Consultation publique TAFTA : la Commission balaye l’avis de 150 000 citoyens » et « Allô ? Le PS et le gouvernement « s’opposent à la mise en place de tribunaux arbitraux privés pour régler les litiges entre États et investisseurs » ».

[3] « Coopération réglementaire » : Une dérégulation qui ne dit pas son nom.

[4] Journée internationale d’action - 18 avril 2015. Les peuples et la planète avant les profits !.

[5] https://www.collectifstopTAFTA.org/...

 

 

Attac France — 2015
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27 février 2015 5 27 /02 /février /2015 15:53

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

Tribune 27/02/2015 à 11h16

Et pendant ce temps-là, les négociations du Tafta se poursuivent dans votre dos

Yannick Jadot, député européen écologiste

 

Tribune

Le plan com’ était pourtant calé : la négociation d’un accord de libre-échange entre l’Europe et les Etats-Unis générerait de la croissance et des emplois à gogo ! Sauf qu’à y regarder de plus près, les gains de croissance envisagés ne sont au mieux que de 0,03% par an, et une étude récente de l’université de Tufts aux Etats-Unis évalue à 600 000 le nombre d’emplois détruits par le Tafta en Europe, dont 130 000 en France. Aïe !

Making of

Depuis juillet 2013, l’UE négocie un Traité de libre-échange transatlantique (le Tafta) pour créer un marché commun avec les Etats-Unis. Les modalités du traité comprennent une uniformisation de nombreuses réglementations écologiques, industrielles et même la création d’une juridiction d’arbitrage entre les Etats et les entreprises.

Dans cette tribune, le député européen EELV Yannick Jadot, vice-président de la Commission du commerce international et coordonnateur européen des Verts sur Tafta, décrit la manière dont les mécanismes démocratiques actionnés par les citoyens pour influencer le débat ont été systématiquement méprisés par le pouvoir exécutif européen. Rue89

Surtout, les « obstacles au commerce » que veut lever ce traité sont aussi des choix de société qui touchent au cœur la régulation de notre économie et de notre société.

 

Au menu des négociations :

  • l’alimentation,
  • la santé,
  • les services publics,
  • le bien-être animal,
  • les OGM,
  • les données personnelles et les libertés numériques,
  • les droits sociaux,
  • l’environnement,
  • les services financiers,
  • les marchés publics…

Ces négociations concernent donc les citoyens au plus près, elles touchent à leur vie quotidienne comme à leurs perspectives d’émancipation individuelles et collectives. Ils sont pourtant tenus totalement à l’écart des négociations.

« Les gens » n’y comprennent rien ?

Pour quelle raison ? L’argument « coup de poing » avancé par les Etats et la Commission est la nécessité de garder la confidentialité de la stratégie de négociation et une capacité de bluff.

Comique quand on sait que la négociation du Tafta a été lancée alors qu’explosait le scandale des écoutes de la NSA et que, grâce aux révélations d’Edward Snowden, nous savons que les services américains en connaissent bien plus sur cette négociation que les Européens eux-mêmes.

Il y a fondamentalementn de la part des promoteurs du Tafta, une défiance vis-à-vis des citoyens. Leur discours est devenu rhétorique : l’opposition grandissante des Européens au projet d’accord de libre-échange entre l’Europe et les Etats-Unis est fondée sur des craintes injustifiées, des peurs irrationnelles, des fantasmes et des mensonges véhiculés par des agitateurs ignorant de la réalité du monde.

Bref, « les gens » n’y comprennent rien mais pourraient faire capoter un grand projet de civilisation. François Hollande lui-même avait déclaré lors de sa visite aux Etats-Unis en février 2014 :

« Nous avons tout à gagner à aller vite. Sinon, nous savons bien qu’il y aura une accumulation de peurs, de menaces, de crispations. »

Salle sécurisée

Il a fallu attendre dix-huit mois pour que, cédant à la pression, les gouvernements européens rendent enfin officiellement public le mandat de négociation qui avait depuis longtemps fuité sur le Web.

Mais encore aujourd’hui, si la Commission européenne a certes changé sa stratégie de communication et publie de plus en plus de documents de position jusque là confidentiels, les textes de négociation, ceux qui disent la réalité des compromis passés, restent inaccessibles aux citoyens, aux parlementaires nationaux et à l’immense majorité des eurodéputés.

Seuls une vingtaine d’entre nous pouvons y accéder dans une salle sécurisée dite « salle de lecture », où les smartphones et autres appareils électroniques sont interdits. Les ministres du commerce eux-mêmes ne peuvent les lire dans leurs pays qu’en se rendant… à l’ambassade des Etats-Unis !

Il n’y a d’ailleurs pas que les citoyens, les organisations de la société civile ou les écologistes pour contester cette opacité.

Obligations de transparence

La médiatrice européenne, dans un avis rendu en janvier dernier, conteste le refus de la Commission de rendre publics les documents consolidés de négociation et rappelle la Commission au droit européen en matière d’accès du public aux informations les concernant très directement. Elle souligne qu’en aucun cas, la Commission peut se soustraire à ses obligations de transparence sur la seule base qu’il s’agit d’un accord international et que cette transparence pourrait déplaire aux autorités américaines. Cet avis juridique est pour le moment resté sans réponse...

S’il fallait une autre preuve que la négociation du Traité de libre-échange transatlantique se fait sans, et contre les citoyens européens, il n’y a qu’à lire les conclusions de la Commission européenne sur la consultation publique à propos du mécanisme très contesté de règlement privé des différends Etats-investisseurs (ISDS).

Pour rappel, ce mécanisme prévoit d’autoriser les entreprises à attaquer devant un tribunal privé supranational les Etats ou les collectivités locales si elles considèrent que leurs activités et leurs perspectives de bénéfices sont impactées par les décisions de politiques publiques.

Ainsi, Philip Morris demande-t-elle des milliards de dollars de compensation à l’Australie et à l’Uruguay parce que ces pays ont mis en place des politiques anti-tabac.

150 000 personnes se sont exprimées

Si le traité était déjà en vigueur, des entreprises américaines auraient pu attaquer la France pour son moratoire sur les cultures d’OGM, son refus d’exploiter les gaz de schiste ou son interdiction du bisphénol A dans les biberons !

Pour faire face aux critiques croissantes sur cet inacceptable transfert de souveraineté démocratique vers les entreprises, la Commission a décidé il y a un an de lancer une consultation publique.

Succès historique et inattendu : 150 000 personnes et organisations se sont exprimées... et 97% d’entre elles ont rejeté ces tribunaux arbitraux, rejoignant en cela l’avis de Parlements nationaux (dont l’Assemblée nationale et le Sénat), de nombreuses régions, des syndicats, d’organisations de PME et de très nombreuses organisations de la société civile.

Conclusion de la Commission : loin d’acter l’exclusion de ce dispositif, elle cherche à le réformer !

Déni de démocratie

Un déni de démocratie sans surprise puisque la Commission avait déjà rejeté le projet d’initiative citoyenne européenne qui demande l’arrêt des négociations transatlantiques avec les Etats-Unis et le Canada. Ce projet devenu pétition a pourtant plus de 1,3 million de signatures.

Il faut bien au contraire se féliciter de la mobilisation grandissante des citoyens qui veulent s’informer, comprendre, évaluer les risques comme les opportunités, débattre en toute connaissance de cause, interpeler leurs élus, bref être des acteurs de la vie publique, de la société, de la construction européenne et de la régulation de la mondialisation. Beaucoup refusent à juste titre ce marchandage entre la démocratie et les intérêts de quelques multinationales.

L’Europe a trop longtemps été ce que ses dirigeants en font. Il est temps qu’elle devienne ce que ses citoyens en veulent.

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 22:35

Source : www.humanite.fr

 

Le drame social des droits rechargeables

Témoignages recueillis par Cécile Rousseau

Jeudi, 26 Février, 2015

L'Humanité

 

 

Photo : Philippe Huguen / AFP

S’inscrire à pôle emploi revient à Une humiliation telle, que certains chômeurs se retrouvent à ne percevoir que 30 euros par mois !

Photo : Philippe Huguen / AFP

 

Parmi les 500 000 chômeurs lésés par les droits rechargeables estimés par l’Unedic, beaucoup de précaires, de cadres, d’intermittents, de seniors, mais aussi de jeunes… Tous les âges et catégories socioprofessionnelles sont concernés par ce fléau. Témoignages.

« Un encouragement à poursuivre. » À peine les chiffres du chômage publiés hier par le ministère du Travail, Manuel Valls s'est réjoui de la très légère baisse du nombre de demandeurs d'emploi. En catégorie A, les chômeurs n'ayant pas du tout travaillé, sont 19 100 de moins sur le mois de janvier, en baisse de 0,5 %.

 

Mais si on y ajoute les catégories B et C, les demandeurs d'emploi exerçant une activité réduite, le chômage reste en hausse de 0,3 %, soit 16 100 personnes en plus. Sur l'année, en catégories A, B et C, l'augmentation est même de 6,2 %. Au total, plus de 5,2 millions de personnes restent inscrites sur les listes de Pôle emploi. Et les droits rechargeables pourraient bien contribuer à maintenir nombre de chômeurs dans cette situation. Présentés comme une avancée dans la dernière convention d'assurance chômage, signée par la CFDT, FO et la CFTC, ils n'ont cessé depuis leur mise en place, le 1er octobre dernier, de montrer leurs effets pervers. Avant, la procédure de « réadmission » était en vigueur : un capital de droits était calculé en fonction de la période d'indemnisation la plus favorable. Désormais, avec les droits rechargeables, si une personne a accumulé deux périodes de droits au chômage, elles se succèdent l'une à l'autre.

 

Si cette première période d'indemnisation est inférieure à la seconde, le chômeur ne s'y retrouve pas et glisse encore plus dans la précarité. D'après un chiffrage de l'Unedic de juin 2014, 500 000 chômeurs seraient victimes d'une baisse d'indemnisation à cause des droits rechargeables. La CGT chômeurs rebelles du Morbihan, en pointe sur les conséquences désastreuses des droits rechar-geables, a reçu des centaines de témoignages de personnes piégées.

 

Comme l'explique Vladimir Bizet-Stefani, « les demandeurs d'emploi sont contraints de rester chez eux, d'accepter des boulots mal payés ou de travailler au noir, des solutions totalement absurdes ! » Sans possibilité de se délester de leurs droits antérieurs, les chômeurs n'ont d'autre choix que de les écluser en restant inscrits sur les listes de Pôle emploi. Ou de reprendre n'importe quel boulot pour vivre décemment. Mais, dans ce cas, il s'agit de reculer pour mieux sauter, ils conservent toujours ce reliquat d'allocations tenace. Acculées, les victimes ont contacté en masse les pouvoirs publics et les associations. Face à l'ampleur du scandale humain et médiatique, le gouvernement a été contraint de réagir. Syndicats et patronat se réuniront le 3 mars. Une journée de mobilisation est également organisée le même jour.

1. Enora, 24 ans, Punie pour avoir travaillé pendant ses études

Diplômée d’arts du spectacle, la route d’Enora semblait toute tracée : elle sera créatrice de bijoux. Avant de se lancer, elle signe deux CDD chez Zara. Quand la Rennaise s’inscrit à Pôle emploi, en ­octobre 2014, l’atterrissage est brutal. Non seulement son dossier met 57 jours à être traité, mais l’ex-ANPE lui déniche un reliquat de droits rechargeables issus d’un petit boulot étudiant de 2013. ­Pendant sa licence, la Rennaise gardait les collections du musée des Beaux-Arts deux à six jours par mois afin de mettre du beurre dans les épinards. À cause de cet emploi, elle perçoit 310 euros mensuels pendant 610 jours. Alors qu’avec son dernier emploi de vendeuse, elle aurait pu prétendre à 700 euros… Un coup de massue. « Je m’en sors moins bien que quand j’étais étudiante précaire ! C’est une punition pour tous les gens obligés de travailler pendant leurs études parce qu’ils n’ont pas papa et maman derrière et ça, ça passe très mal ! » La voix chargée de tristesse, elle explique que cette situation l’a plongée « dans une profonde remise en question ». La jeune femme vient d’entamer trois mois de bilan de compétence. Une bouée de sauvetage pour le moral et une façon d’écluser une partie de son reliquat de droits riquiqui. En formation, son allocation a été doublée, atteignant 600 euros, le minimum légal. Une fois la formation terminée, elle retombera à 300 euros. Exit ses projets de création de bijoux, sa préoccupation est désormais de faire bouillir la marmite. « Cet été, je vais travailler à l’usine sinon je ne m’en sortirai pas. On mange des pâtes, je ramasse les fruits et légumes à la fin du marché. Mon ami est aussi au chômage, je ne peux même pas m’acheter des vêtements pour aller aux entretiens, heureusement que je sais coudre ! » Pour relâcher la pression, elle voit ses amis et écrit de la poésie. « Ce sont les seules choses qui me vident la tête. » Enora a l’impression de dériver dans une mer de problèmes, sans personne pour la secourir. « J’ai choisi un cursus universitaire qui me plaisait, de suivre un parcours ­artistique. Je n’ai rien contre faire des jobs alimentaires sauf qu’il n’y a pas de boulot, on ne m’a jamais proposé de CDI ! Je suis désenchantée sur le monde du travail. » La jeune femme ne croit plus les promesses du gouvernement sur l’emploi des jeunes. « Nous ne sommes pas leur priorité. Je me sens abandonnée par le gouvernement et par mon pays. Il ne nous propose aucune solution pérenne. Jeune chômeuse, j’ai moins de droits que les autres. Je ne peux même pas toucher le revenu de solidarité active (RSA), car je n’ai pas vingt-cinq ans ! »

2. Léo, 48 ans, La double peine pour un cadre supérieur

« Le deuxième effet Kiss Cool. » Léo se serait bien passé d’écoper de deux effets pervers de la dernière convention d’assurance chômage. Son ton blagueur ne laisse pas présager la gravité de sa situation. « Je suis en faillite personnelle, lâche-t-il. Sans emploi depuis juillet 2014, je ne toucherai rien de Pôle emploi avant le mois de mars. J’ai été obligé de vendre une partie de mes affaires. Je ne peux pas m’en sortir avec 850 euros de loyer à payer, 200 euros de pension alimentaire. Je vais devoir quitter mon appartement et remonter habiter chez ma mère dans le nord, sinon je suis SDF. » Cadre supérieur d’un géant des télécommunications, licencié « pour ne pas avoir généré assez de rentabilité », précise-t-il, un premier délai de carence lui est infligé jusque octobre 2014. À son inscription à Pôle emploi, il rencontre un premier problème. Au lieu des 2 000 euros mensuels ­d’allocations dues pour son dernier travail, il se ­retrouve avec 840 euros (28 euros par jour) pendant 140 jours. Progressivement, Léo tire le fil. Trois ans plus tôt, il avait quitté un poste de chef de secteur et avait ouvert ses droits au ­chômage, soit les fameux 28 euros journaliers. Le quadragénaire tombe de l’armoire. Et ce n’est pas fini. Deuxième retour de bâton, il apprend qu’un nouveau délai de carence lui est imposé. Léo ne pourra bénéficier de son allocation famélique avant fin mars, le laissant plus de neuf mois sans aucun revenu ! Pour calculer ce délai d’indemnisation, depuis la dernière convention d’assurance ­chômage, Pôle emploi se base sur l’allocation journalière, ici 28 euros par jour, et les congés payés non pris lors de son dernier emploi dans les télécoms. « J’appelle ma conseillère, je lui explique que je n’ai pas eu de parachute doré. Je me suis fait totalement avoir. » Honteux de cette situation, Léo n’en a parlé à personne. « Mon fils devait venir me voir dans le sud pour les vacances, comme je n’ai pas les moyens, j’ai menti, j’ai dit “papa a un séminaire”, ça me brise le cœur. Je viens d’une famille italienne où le travail est particulièrement important. » Pour sortir la tête de l’eau, ce cadre se jette sur les offres d’emploi, quitte à se brader. Pas question de rester les bras croisés à attendre que ces droits très bas s’écoulent lentement. « Mais le marché du travail est pourri, surtout quand on a quarante-huit ans et mon niveau expérience. Ces 28 euros par jour pendant 140 jours, Pôle emploi n’a qu’à les garder ou les donner à la Fondation Abbé-Pierre, je n’en veux pas, retirez-moi ce truc ! »

3. Martin, 28 ans, Intermittent bloqué au régime général

Le traquenard des droits rechargeables, Martin l’avait senti venir. En s’inscrivant à Pôle emploi, il se doutait qu’il ne pourrait pas entrer dans l’annexe 10 relative aux techniciens du spectacle. « J’avais pourtant réalisé mes 507 heures en dix mois, de mai à novembre 2014, des CDD d’usage de régisseur comme prévu pour dépendre du régime des intermittents. » Juste avant, pendant deux ans, il avait exercé la fonction de coordinateur en contrat aidé dans une structure culturelle, une compagnie artistique des arts de rue. Cette période de travail, indemnisée par le régime général de l’assurance chômage, est prise en compte en premier par Pôle emploi. ­Résultat, il ne peut pas accéder au régime des intermittents du spectacle. Et au lieu des 1 500 euros d’allocation auxquels il aurait pu prétendre, il ne se retrouve qu’avec 950 euros mensuels pendant 660 jours. « Un truc de malade ! » s’exclame le jeune père de famille. Pris dans cette spirale infernale, Martin a deux issues possibles. Soit, il reste chez lui en attendant que ses 660 jours de droits très bas soient éclusés. Au risque de perdre tous ses contacts dans le milieu artistique en début de carrière. Impossible à envisager. Soit, il continue à travailler et essaie de liquider une partie de ses allocations en même temps. « Je suis obligé de magouiller, j’accepte des missions. Par exemple, pendant un mois, je vais travailler mais je ne serai déclaré que celui d’après, ce qui me permet d’écouler un peu d’indemnisation chômage. C’est possible de faire ça dans les petites structures, pas dans les grandes. Tout ça me fait rater un paquet de cachets. En faisant des comptes d’apothicaires, j’ai calculé que je mettrai quatre ans à épuiser mes droits. » Pas du genre à se laisser faire, ­Martin a contacté le défenseur des droits, son député, les associations de ­chômeurs. Pour le technicien, les droits rechargeables sont aussi une manière de remettre en cause les annexes 8 et 10 : « L’intermittence définit un nouveau modèle de société, basé sur les solidarités, ça ne plaît pas à tout le monde ! J’aime cette grande indépendance : avoir plusieurs employeurs, de multiples projets… » Pour lui, la perspective d’une nouvelle négociation le 3 mars sur les droits rechargeables ne règle pas tout. « Le gouvernement se lave les mains de ce qui se passe en ce moment ! »

4. Gérard, 52 ans, Chômeur privé de tout revenu

Technicien de maintenance dans l’industrie pendant trente ans, Gérard a enchaîné les emplois précaires depuis les années 2000. Musicien harmoniste, chanteur, intervenant dans des classes-relais auprès d’enfants en grande difficulté, il vit pour son art et de petits boulots. Il y a deux ans, le Bourguignon dégote un emploi de pion dans un collège, des remplacements de congés maternité, avant d’embrayer sur des vacations dans des écoles avec la réforme des rythmes de vie scolaire deux heures par semaine. Il touche 800 euros de chômage, correspondant à ses remplacements jusqu’à fin novembre. D’un coup, c’est la dégringolade. Des droits rechargeables se déclenchent à cause de ses vacations à l’école à hauteur de 1,09 euro par jour jusqu’à mars. Depuis janvier, Gérard vit avec 30 euros par mois ! « Je me retrouve piégé dans ce machin-là, c’est une méthode pour réduire les gens en esclavage », grommelle-t-il. Tout de suite, il dépose un dossier de RSA. Refusé, au motif que le calcul s’effectue sur les trois mois précédents, période où il touchait encore 800 euros d’allocation. Gérard se retrouve le bec dans l’eau. « J’ai déposé un recours devant le conseil général pour le RSA, j’ai contacté une assistante sociale qui était scandalisée, mon seul recours est de porter l’affaire devant le tribunal administratif, donc je vais attendre. » À cinquante-deux ans, Gérard a beau se démener pour trouver un emploi, rien ne vient. « J’ai galéré par le passé, je suis du genre pugnace, mais là, je vis chez mon père de quatre-vingt-neuf ans, militant communiste et CGT, qui comprend la situation. Ce n’est pas amusant », raconte-t-il, amer. Gérard tient à ses trois luxes : son abonnement de téléphone portable, sa carte de train pour aller visiter son amie et ses cigarettes. « Ce dispositif est censé nous faire accepter n’importe quel travail, mais il nous met juste dans une ­situation de survie. »

 

Le scandale des « recalculés ». Avant les baisses d’indemnisation engendrées par les droits rechargeables, les demandeurs d’emploi avaient déjà dû subir en 2003 une rigidification des règles d’assurance chômage qui avait entraîné l’exclusion de l’indemnisation de 300 000 d’entre eux. Le Conseil d’État avait annulé en 2004 l’agrément donné
par l’État à la convention d’assurance chômage. Les demandeurs d’emploi victimes avaient pu être réintégrés. Les droits rechargeables seront-ils un nouvel épisode des « recalculés » ?

 

 

Source : www.humanite.fr

 

 

 

 

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 22:03
A Fukushima, Tepco à nouveau sous l’eau

Arnaud VAULERIN Correspondant à Kyoto 26 février 2015 à 08:26

 

 

Une pompe d'aspiration des eaux souterraines implantée dans la centrale de Fukushima opérée par Tepco, le 15 avril 2014.

Une pompe d'aspiration des eaux souterraines implantée dans la centrale de Fukushima opérée par Tepco, le 15 avril 2014. (Photo japan pool. AFP)

 

RÉCIT

L’opérateur de la centrale nucléaire japonaise ravagée en 2011 a admis avoir oublié de déclarer une fuite d'eau de pluie radioactive depuis dix mois.

 

Une nouvelle fuite constatée, suivie d’une deuxième, puis de l’aveu affligeant d’une omission ont replongé Tepco dans les affres de la gestion de l’eau contaminée depuis le début de la semaine à Fukushima. La compagnie électrique qui gère la centrale nucléaire japonaise, ravagée par le séisme et le tsunami de mars 2011, doit faire face à une volée de critiques de l’autorité de régulation du nucléaire, des associations de pêcheurs et des élus locaux. Au moment où l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) conseille de rejeter dans le Pacifique l’eau délestée d’une grande partie de ses isotopes radioactifs, ces incidents suscitent de l’inquiétude sur la manière et la transparence avec lesquelles Tepco pourrait se charger d’une telle mission.

Cette nouvelle crise a démarré dimanche. Deux alarmes, à 10 heures puis dix minutes plus tard, ont donné l’alerte car de l’eau fortement irradiée s’écoulait d’une canalisation de drainage traversant le site, qui mène à l’océan. La contamination en bêta total a atteint jusqu’à 7 230 becquerels par litre alors que Tepco ne s’engage à déverser en mer qu’une eau contaminée «à moins 5 becquerels par litre». Mercredi, l’opérateur cherchait toujours à élucider l’origine de l’écoulement quand il s’est attiré les reproches de l’autorité de régulation du nucléaire (ARN). «Je veux que soit bien comprise la cause de cet incident», a exigé le président de l’ARN Shunichi Tanaka, lors d’une réunion de l’autorité. Il a fustigé «l’erreur» de Tepco qui a mis plus d’1h30 après le déclenchement d’une alarme pour empêcher la fuite vers le Pacifique. «Un système de mesure avait beau être en place, il n’y avait pas de solution prévue» en cas de hausse soudaine de radioactivité. Il a demandé à ce qu’un «dispositif automatique d’ouverture et fermeture de conduite en cas d’anomalie» soit installé sur le site.

La veille, Tepco avait de nouveau fait sensation en annonçant une fuite dont elle avait connaissance depuis près d’un an. Cette fois, il s’agit d’eau de pluie accumulée sur le toit du réacteur 2 qui aurait dégouliné d’une gouttière dans une canalisation de drainage (drainage K) s’écoulant directement dans le Pacifique. Dans cet endroit, la «concentration de matières radioactives dans l’eau a toujours été plus élevée (une dizaine à plusieurs centaines de becquerels par litre dus à du césium 137) que dans les autres drains depuis le début des contrôles en Avril 2014», précise la compagnie.

Substances radioactives en quantité

Depuis cette date, Tepco était donc au courant de la présence en quantité de substances radioactives dans un fossé de drainage qui s’écoulait directement dans l’océan. Et la compagnie n’a rien fait pour bloquer la fuite. Ces deniers jours, en inspectant les tuyaux de branchement en amont de «drainage K», Tepco a trouvé une flaque d’eau sur le toit de l’unité 2 avec des taux de 29 400 becquerels par litre d'eau, notamment dus à du césium 137. Cette flaque pourrait expliquer ces chiffres importants.

L’aveu a «complètement choqué» Masakazu Yabuki, le président de la coopérative des pêcheurs d’Iwaki qui a rencontré la compagnie électrique, précise l’agence Kyodo. «Je ne comprends pas pourquoi vous avez gardé le silence (sur ce sujet) alors que vous en aviez connaissance.» L’omission de Tepco a «brisé la confiance», selon les mots de Hiroyuki Sato de la coopérative de pêche de Futaba. Elle a tout d’une trahison pour les pêcheurs qui ont accepté par le passé que l’opérateur relâche en mer de l’eau prélevée en amont des réacteurs afin d’éviter qu’elle s’infiltre dans le sous-sol contaminé de la centrale. Ils doivent également faire face à une pression croissante des industriels, qui souhaitent déverser dans l’océan des liquides préalablement débarrassés de l’essentiel des éléments radioactifs. Cela permettrait à Tepco de désengorger le site de Fukushima Daiichi, qui comprend plus de 1 200 réservoirs à la fiabilité et à la robustesse parfois douteuse.

Les politiques ont également pris le relai des pêcheurs. Il est «regrettable que ce problème qui inquiètent les gens de Fukushima ait eu lieu, et que l’information n’ait pas été divulguée immédiatement», a déclaré le gouverneur de Fukushima, Masao Uchibori, qui a promis des inspections de fonctionnaires et d’experts de la préfecture.

Ils devront composer avec les négligences et les omissions à répétition avec lesquelles Tepco gère le site de Fukushima-daiichi. Depuis 2013 et la révélation des incidents et des fuites d’eau en série, l’opérateur a fait la preuve de son incompétence et suscite des critiques. «Tepco est une entreprise qui ment et je doute de sa capacité à exploiter un complexe nucléaire de façon sûre», déclarait à l’automne 2013 Hirohiko Izumida, le gouverneur de la préfecture de Niigata (nord-ouest), qui héberge la plus grande centrale de l’Archipel, Kashiwazaki-Kariwa, également détenue par Tepco.

 

Source :www.liberation.fr

 

 

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 18:58

Source :www.reporterre.net

 

ENQUÊTE - 4 - Comment les agrocarburants ont conduit aux fermes-usines

jeudi 26 février 2015

 

Si Sofiprotéol a bâti sa fortune sur les agrocarburants, bien aidés par les pouvoirs publics, il assied désormais sa puissance dans le monde agricole par l’élevage. Rebondissant sur la crise du lait, il s’est positionné comme le leader de l’alimentation animale. Et favorise le développement des fermes-usines pour écouler ses stocks. Avec une nouvelle astuce pour faire accepter le tout : la méthanisation, nouvelle énergie propre à la mode.

 

Sofiprotéol a donc construit son empire sur un agrocarburant, le diester, qu’il a abondamment financé grâce aux fonds publics. Soit. Mais il reste un problème à régler : que faire des déchets issus de sa production ?

Car la trituration, l’étape industrielle qui transforme le grain de colza ou de tournesol en huile végétale, laisse à sa suite un coproduit, qu’on appelle le tourteau. Pour 1 000 kg de ces graines qui donneront le diester, on obtient 560 kg de tourteaux.

Or la production de diester se faisant plus importante avec le boom des années 2000, le volume de tourteaux disponible est devenu chaque année plus conséquent.

Heureusement pour Sofiprotéol, ce tourteau constitue une nourriture très protéinée, parfaite pour remplacer dans l’alimentation animale le soja OGM tant décrié, venu d’Amérique. Cela tombe d’autant mieux que la filière des agrocarburants ne s’avère plus si rentable : “Les tourteaux sont indispensables à l’équilibre économique de la filière huile alimentaire et carburant”, explique Luc Ozanne, à la direction des engagements Sofiprotéol.

Valorisation indispensable en alimentation animale

Compte tenu des volumes à écouler, l’avenir du diester s’avère dépendre de la capacité des animaux à absorber ces tourteaux. C’est pourquoi, en 2007, Sofiprotéol prend le contrôle de Glon-Sanders, alors le n°1 en France de l’alimentation animale. La "pieuvre Sofiprotéol“, comme la qualifie Attac, participe également à l’offre publique d’achat d’Evialis, une autre entreprise spécialisée dans l’alimentation animale.


- Logo de la marque Sanders, appartenant désormais au groupe Avril -

Le colza est mis à la mode dans l’alimentation animale. Les coopératives s’y mettent, à l’image d’InVivo qui “engage des études sur les coproduits (du colza énergétique NDLR) et leur utilisation en alimentation animale”.

Les chambres d’agriculture font de la réclame, comme celle de la Haute-Marne avec cette accroche : “Le tourteau de colza pur, ça marche aussi !!”.

Dans le même temps, afin de rendre le colza digeste pour tous les animaux, l’entreprise met à contribution la recherche, celle de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) notamment. On le teste même pour nourrir le canard.

Le tourteau se vend partout via des alliances, car "Sofiprotéol est associé à la plupart des acteurs économiques de l’agriculture, coopératives et négociants”.

Mais le résultat tarde à venir : en 2009, les incorporations de tourteaux de colza dans l’alimentation animale sont de 31 000 tonnes alors que la production de diester atteint 1,8 million de tonnes. Le compte n’y est pas.

Le défaut de l’herbe : elle pousse toute seule


- Usine Sanders en Bretagne -

Pour Sofiprotéol, il faut donc s’assurer de meilleurs débouchés. Les vaches laitières, très gourmandes en protéines, en représentent un très intéressant : la France, deuxième producteur laitier d’Europe, en compte alors pas loin de 4 millions. Problème, nos bovins consomment encore en majorité “cette herbe suspecte de pousser toute seule”, dixit un ancien dirigeant de la FNSEA.

C’est à ce moment-là qu’intervient la crise du lait, en 2008 et 2009. Elle marque le tournant. La FNPL (Fédération nationale des producteurs de lait), branche laitière de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles) prône la contractualisation comme solution à la crise.

De quoi s’agit-il ? En échange de la collecte d’un volume de lait garanti, l’éleveur doit s’engager à acheter à sa coopérative tous les produits qu’elle peut lui vendre. En tête desquels… l’alimentation animale.

- La contractualisation selon le rapport Racine :

 

 

La Fédération nationale des coopératives laitières (FNCL) avait commandé la rédaction d’un règlement intérieur de coopérative laitière au cabinet Racine de droit des affaires, en 2009, avant la contractualisation.

L’effet de levier d’un tel contrat serait une aubaine pour Sofiprotéol. Et qui est alors le vice-président de la FNSEA qui pousse dans le sens de cette contractualisation ? Xavier Beulin, qui dirige en même temps Sofiprotéol…

Mais la majorité des éleveurs refuse cette clause, tout comme de négocier un contrat en direct avec leur laiterie - souvent des géants comme Lactalis ou Sodiaal. Et devant la levée de boucliers provoquée par cette idée, le projet est plus ou moins abandonné.

Un fonds laitier géré par Sofiprotéol

Au même moment (2008), un fonds interprofessionnel laitier se crée, le Fedil, doté de 15 millions d’euros, pour soutenir la filière laitière. Et à qui est confiée la gestion du Fédil ? A Sofiprotéol.

Joli tour de passe-passe : on ouvre la porte du marché laitier à l’activité industrielle de Sofiprotéol, mais on justifie ce choix par son activité financière. Le mélange des genres est total : “Les élevages laitiers constituent le premier débouché des tourteaux de colza. Il était donc naturel que Sofiprotéol mît son savoir-faire d’établissement financier à la disposition du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (Cniel) pour gérer son Fonds de développement des entreprises de transformation laitière (FeDil)”, déclare Sofiprotéol dans son rapport d’activité 2011.

 

- L’extrait du rapport d’activité :

 

 

Les fermes tombent les unes après les autres. Les éleveurs sont pris en tenaille entre un prix du lait qui baisse et des charges en hausse : le prix de l’alimentation animale s’est envolé avec celui des céréales (en partie à cause des agrocarburants, qui réduisent l’offre), tandis que le prix du pétrole - nécessaire aux tracteurs, aux machines agricoles, aux engrais, etc. - flambe. Ils demandent une régulation des volumes de lait et un prix qui tienne compte de ces hausses. Sans être entendus. La contractualisation est finalement rendue obligatoire par la Loi de modernisation agricole en 2010. Elle impose un bras de fer très inégal. L’industrialisation de l’élevage est en route, comme le chantent les éleveurs laitiers :

- Vidéo des laitiers

Le Haut conseil à la coopération agricole (HCCA), alors présidé par… Xavier Beulin, chiffre en 2010 les conséquences dans un rapport au titre explicite : La filière laitière française : la compétitivité aura un prix, des choix inéluctables. Le scenario prévoit la reduction par deux ou par trois du nombre de fermes laitières à l’horizon 2035. Le résultat est connu : il faut compenser par de grandes fermes.

Le colza, la solution à tous vos problèmes...

D’ailleurs, Xavier Beulin ne s’en cache pas : les troupeaux doivent s’agrandir nous dit-il. C’est le seul moyen de s’en sortir :

- Ecouter Xavier Beulin :

 

 

 

De son côté, un éleveur d’Ille-et-Vilaine, premier bassin laitier de France explique : “On fait grandir les exploitations laitières pour que les éleveurs achètent de plus en plus de colza. Plus le troupeau grandit, moins les vaches vont dehors. C’est trop compliqué de les sortir entre deux traites, de trouver assez de prairies à proximité. Vous verrez : plus il y a de vaches dans une ferme, plus les silos de granulés sont gros !” Pour lui, pas d’alternative : ses animaux consomment du colza de Glon-Sanders, première filiale dans l’alimentation animale de Sofiprotéol.

Sans surprise, la ferme-usine des Mille vaches prévoit elle aussi un régime à base de colza. Un vrai avantage selon ce document extrait du dossier présenté par l’actionnaire unique, M. Ramery, pour l’obtention des autorisations.

- Dossier de la SCEA de La Cote de la justice, promoteur de la ferme-usine des Mille vaches :

 

La ferme-usine des Mille vaches se fournit-elle chez Sofiprotéol pour son colza ? Rien ne permet de le dire.

 

 

En tout cas, pour toutes les autres fermes-usines, faites le calcul : une vache ingère en moyenne 3,5 kg de tourteau de colza par jour. Soit, pour 1 000 vaches, 3 500 kg de tourteau de colza par jour et 1277 tonnes par an. Une bénédiction pour le diester ! Comment ne pas souhaiter leur multiplication sur le territoire, quand on produit des tourteaux de colza ?

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source :www.reporterre.net

 

 

 

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 18:43

 

Source : www.bastamag.net

 

Agro-business

Aurélie Trouvé : « Il faut stopper la mise en concurrence sauvage de notre agriculture »

par

 

 

Quel avenir pour l’agriculture ? Des fermes-usines rassemblant des milliers de vaches ou de porcelets ? Une participation massive des banques et fonds de pension dans le financement de l’agriculture ? Une dérégulation totale des marchés et une augmentation des importations ? Alors que se tient cette semaine à Paris le Salon de l’agriculture, l’économiste Aurélie Trouvé, qui vient de publier Le business est dans le pré, dresse le bilan des dérives de notre modèle agricole. Pour mieux comprendre les défis actuels et les mesures essentielles à mettre en œuvre pour inventer une autre agriculture. Entretien.

Basta ! : Qui défend aujourd’hui la création de fermes-usines en France ? Pourquoi les acteurs du secteur agro-alimentaire cherchent-ils à promouvoir ce modèle ?

Aurélie Trouvé [1] : Quel est l’intérêt d’une ferme de 1000 vaches ? La diminution des coûts de collecte, tout simplement. Plus on a de grosses exploitations, plus elles sont concentrées dans l’espace, et collecter le lait revient moins cher. Ces fermes-usines permettent aussi de réaliser des économies d’échelle. Ce ne sont pas forcément des exploitations pérennes sur le long terme qui dégagent une forte valeur ajoutée, mais elles sont capables de fournir un grand volume, standardisé et avec des prix plus faibles.

Les acteurs de l’agro-industrie ont intérêt au développement de ces fermes-usines, qui leur permettent de faire des affaires. Prenons le cas du groupe français Sofiprotéol-Avril (dirigé par Xavier Beulin, président de la FNSEA, ndlr). Derrière ce géant français, il y a des producteurs d’oléagineux – de colza, soja et tournesol. Qui mange des tourteaux de soja ? Le bétail, quand il est élevé hors sol, c’est-à-dire hors pâturage. Moins les animaux pâturent – comme c’est le cas dans ces fermes-usines mais aussi dans bien d’autres exploitations –, moins les éleveurs sont autonomes. Et plus Sofiprotéol-Avril fait des affaires ! Ce conglomérat est aussi entré au capital de l’entreprise Biogemma, qui développe des OGM, ou de Glon Sanders, leader français des aliments composés pour animaux, ainsi que de tout un ensemble de sociétés qui ont un intérêt à développer l’agro-industrie (lire notre enquête sur Sofiprotéol).

A quel moment peut-on parler de « fermes-usines » ?

Aujourd’hui, la plupart des exploitations en France sont familiales, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de salariés. A partir du moment où il y a plus de travail salarié que de travail familial, on commence à se diriger vers ce modèle de ferme-usine. L’étape suivante, c’est l’apport de capitaux extérieurs au monde agricole : on passe alors d’une exploitation familiale patronale avec des salariés, à une exploitation détenue par des financiers. C’est le cas de l’entreprise de BTP Ramery par exemple avec la ferme-usine des 1000 vaches en Picardie. Ou de Sofiprotéol-Avril qui, via sa filiale Sanders, est engagée dans un projet de maternité de 23 000 porcelets par an en Vendée (lire ici).

Ce modèle demeure encore marginal en France. Mais il se répand (voir la carte des fermes géantes en France). Si l’on continue ainsi, on se dirige vers le modèle des États-Unis, où la moitié de la production de lait provient de fermes de plus de 1 000 vaches. Il risque d’y avoir un emballement très fort vers des fermes usines si l’on ne met pas de barrières. Pourtant les citoyens n’en veulent pas, comme en témoignent les mobilisations contre ces projets.

Ces exploitations géantes existent-elles essentiellement outre-Atlantique ?

C’est une spécificité de l’Ouest américain. Mais elles existent dans beaucoup de pays, où elles sont financées par des multinationales. Le groupe français Danone a ouvert à la fin des années 1990 une ferme de 32 000 bovins dans le désert d’Arabie Saoudite. En Chine, le géant suisse Nestlé et l’entreprise néozélandaise Fonterra ont prévu d’investir dans une dizaine de fermes regroupant chacune des milliers de vaches ! Il s’agit pour ces multinationales de maitriser toute la chaine alimentaire, de la production jusqu’à la distribution.

Est-ce une forme de financiarisation de l’agriculture ?

La financiarisation, c’est le fait que le secteur financier – banques, fonds de pension, assurances-vie – puisse capter une partie de la richesse créée par l’activité agricole. Cela se traduit notamment par le développement des marchés à terme : des acteurs financiers parient sur les prix alimentaires et, par ce biais, captent une partie de la richesse créée par l’agriculture (lire notre article : Les banques françaises continuent-elles de « spéculer sur la faim » ?). Mais cela passe aussi par le développement des assurances privées pour les agriculteurs. L’investissement d’acteurs financiers dans la création de fermes-usines participe aussi à cette financiarisation.

Quelles sont les conséquences pour ceux qui travaillent dans ces exploitations géantes ? Et pour la qualité des produits agricoles ?

La ferme des 1000 vaches en Picardie est trois fois moins créatrice d’emplois par litre de lait produit qu’une ferme classique. Sur le plan environnemental, un méthaniseur est prévu pour traiter les effluents d’élevage. Mais que va-t-on faire du digestat, le résidu des déjections non intégrées par le méthaniseur, qui risque de polluer les nappes phréatiques ? Ce déchet ultime va être transporté vers d’autres sites, avec son lot de nuisances sonores, d’émissions de gaz à effet de serre, d’accidents. On marche sur la tête ! Sur le plan sanitaire, la concentration du troupeau augmente les risques d’épidémies, ce qui implique un recours abondant aux vaccins, sérums et antibiotiques. Malgré les seuils réglementaires, ces substances peuvent se retrouver dans le lait et la viande consommés. Aujourd’hui, la moitié de la production mondiale des antibiotiques est destinée aux animaux [2] !

En quoi les traités de libre-échange, comme le traité Tafta en cours de négociation entre l’Union européenne et les États-Unis, risquent-t-ils d’accélérer cette industrialisation de l’agriculture ?

Le traité en cours de signature entre l’Europe et le Canada (l’accord Ceta) prévoit une baisse d’environ 90 % des droits de douane. C’est une catastrophe ! Si on harmonise nos droits de douane vers le bas, c’est nous qui serons perdants. Et que va-t-on mettre en concurrence ? Notre agriculture, avec une production laitière canadienne produite pour moitié par des usines de plus de 1000 vaches. La production agricole aux États-Unis est hétérogène, mais l’agriculture y est plus mécanisée qu’en Europe, plus intensifiée en engrais ou en OGM. Ils ont un degré de concentration, de spécialisation de leur agriculture, et d’énormes structures qui sont sans commune mesure avec les nôtres. C’est une concurrence sauvage qui nous attend, y compris sur des productions comme les céréales.

Les normes sanitaires et environnementales risquent aussi d’être harmonisées vers le bas. Dans le cas des OGM, le lobby américain des biotechnologies a œuvré pour augmenter la liste des plantes génétiquement modifiées autorisées à la consommation et à la culture en Europe. La volaille désinfectée avec des solutions chlorées fait partie des sujets de préoccupation. Si ce traité passe, ce sera une immense incitation à industrialiser davantage l’agriculture européenne.

Les pouvoirs politiques soutiennent-ils ce modèle en France et en Europe ?

Ils ne le soutiennent pas directement. C’est plutôt de la lâcheté. Tout en se cachant derrière des discours promouvant l’agroécologie, les emplois ou les installations, les responsables n’ont pas le courage en France de mettre en place une véritable politique agricole qui stoppe la dérive actuelle de l’agriculture productiviste. D’autres pays comme l’Allemagne au niveau fédéral, les Pays-Bas ou le Danemark, ont fait le choix d’une agriculture productiviste, d’un élevage de plus en plus hors sol, concentré, spécialisé. Le modèle qu’ils préconisent est de moins en moins familial, avec des taux d’endettement hallucinants. Au Danemark, les exploitations ne sont même plus transmissibles ! Elles tiennent parce qu’il y a des subventions publiques ou des exonérations fiscales très fortes.

Prenons l’exemple des quotas laitiers, ces mécanismes qui permettent de plafonner la production pour ne pas produire trop de lait. Ces quotas laitiers vont être supprimés fin mars au nom du libre marché. Les Pays-Bas, le Danemark et l’Allemagne font partie des pays qui ont soutenu la fin des quotas, sans mettre en place d’autres mécanismes, convaincus qu’ils sont plus compétitifs en raison de l’industrialisation de leur élevage, qu’ils vont pouvoir capter des parts de marché à l’extérieur et sortir gagnants de l’affaire. Les responsables politiques n’ont pas été capables, au niveau européen, de demander une régulation de marché qui permette aux agriculteurs d’avoir des revenus minimums et stabilisés, et de ne pas subir de surproduction et de concentration géographique. D’un côté, il y a la volonté de certains États d’aller vers le productivisme, de l’autre, il y a de la lâcheté sans contre-offensive politique.

Derrière cette course à l’agrandissement à outrance, quel est le rôle des politiques agricoles ?

Continuons avec l’exemple du lait : il a été libéralisé presque d’un coup. Auparavant les prix garantis permettaient de rémunérer les producteurs a minima, de stabiliser les prix et de les déconnecter des cours internationaux. Les quotas laitiers, malgré leurs limites, permettaient de freiner les effets de la concurrence sauvage. Et soudainement, ces prix garantis ont été baissés, les prix en France ont été alignés sur les cours internationaux qui font maintenant le yoyo, et les quotas supprimés. C’est la loi du libre marché. Toute l’agriculture s’en trouve fragilisée. Un des conséquences a été la crise laitière de 2009, qui a accéléré la disparition des exploitations agricoles. Et qui entraine la concentration et la spécialisation des régions. C’est une aberration sur le plan social : des régions vont être désertées du point de vue de la production laitière, ce qui implique des destructions d’emplois non seulement dans l’agriculture mais aussi dans les industries agroalimentaires.

C’est un impact de la politique agricole commune (Pac), dans son volet « dérégulation des marchés ». Un autre problème, tout aussi flagrant, est l’inégalité dans la distribution des aides...

Un chiffre donne un aperçu de la situation : un agriculteur bio perçoit en moyenne deux fois moins d’aides par hectare qu’un agriculteur en production « conventionnelle ». Plus on est une grande exploitation, plus on pollue, moins on crée d’emplois et... plus on touche d’aides de la Pac par hectare ! Ces aides ne sont pas du tout distribuées en fonction des services rendus par l’agriculteur – emplois créés, protection de l’environnement –, mais comme des rentes au capital : elles sont versées par hectare, quel que soit l’état des prix. C’est pour cela qu’aujourd’hui en Ile-de-France, un céréalier a environ 100 000 euros de revenus par an, dont 60 000 euros de subventions publiques. Contre un éleveur laitier ou de bovins viande qui dans le même temps touche à peine 20 000 euros.

Le bio gagne malgré tout des parts de marché en France. Avec 5,5 % de ses surfaces agricoles cultivées en bio, la France possède la troisième surface bio d’Europe, derrière l’Espagne et l’Italie. N’est-ce pas un indicateur que nous sommes sur la bonne voie ?

Il faut lier ce chiffre à la demande croissante et au dynamisme de la Fédération des agriculteurs biologiques. Mais ces derniers ne sont vraiment pas aidés par les politiques. Le gouvernement et les collectivités locales pourraient faire beaucoup plus : d’abord en redistribuant davantage les aides du premier pilier de la Pac en fonction de critères environnementaux plus stricts, mais surtout en mettant beaucoup plus d’argent sur le second pilier et les mesures agro-environnementales qui vont pour partie aux agriculteurs bio. Le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a évoqué un grand plan en faveur des circuits courts de consommation. Eh bien, allons-y ! Investissons pour qu’il y ait du bio et des circuits courts dans toutes les cantines de France ! Ce serait vraiment un moyen de rendre le bio accessible à tout le monde. C’est tout-à-fait faisable.

On trouve de plus en plus de produits bio dans les supermarchés, mais les marges des distributeurs ne cessent aussi d’augmenter. Comment agir ?

La question de la régulation des marges de la grande distribution se pose pour tous les produits, en bio ou pas. Comme il n’y a plus de prix minimum garantis, la grande distribution peut faire du chantage au prix pour les producteurs. Le prix du lait a diminué pour le producteur, il reste stable pour les consommateurs. Un rapport du cabinet Ernst & Young réalisé pour la Commission européenne en 2013 montre très clairement que la part de la richesse créée qui va au producteur est de plus en plus faible. Et que celle captée par la grande transformation et distribution est de plus en plus importante, dans tous les pays de l’Union européenne. C’est la loi du plus fort. La régulation des marges en aval demande de rompre avec l’idéologie du libre marché. Il faut revoir totalement notre façon de réguler les marchés agricoles.

Les alternatives en matière agricole et alimentaire – Amap, filières courtes, permaculture, coopératives... – qui se multiplient sont-elles les prémisses d’un futur modèle alternatif ?

Elles incarnent déjà un modèle alternatif, mais qui n’est pas dominant. C’est cela le problème. Comment faire en sorte qu’il le devienne ? Reprenons l’exemple du lait. 15 % de la collecte concerne des produits « sous appellation de qualité », des circuits courts ou du bio. Les 85 % restants, c’est du lait conventionnel standard. Comment faire en sorte que ces 15 % représentent beaucoup plus ? D’abord, il faut redistribuer davantage les aides de la Pac en faveur de ces systèmes alternatifs. Que l’on suive la logique : plus on offre des services environnementaux, plus on crée d’emplois par hectare, et plus on touche des aides. Il faut également stopper la mise en concurrence sauvage en refusant tous les accords de libre-échange.

L’enjeu, c’est aussi de remettre en place des outils de régulation qui permettent au producteur d’avoir une stabilité dans les revenus. Sans cela, on est forcément dans une logique de court-terme, sans possibilité de se projeter. Revenir à la prairie, à des systèmes autonomes, plus économes en intrants, en engrais, en pesticides, en machines, tout en gardant des rendements intéressants, c’est possible. Mais cela demande beaucoup d’innovation. Les aides ne doivent plus être calculées chaque année à l’hectare, mais varier par exemple en fonction du prix. C’est ce que font les États-Unis aujourd’hui, en versant des aides en fonction du revenu. L’Europe est la seule à continuer à déréguler au maximum son secteur agricole. Partout dans le monde, on observe une re-régulation : ils ont compris que le libre marché ne fonctionnait pas.

Propos recueillis par Sophie Chapelle
@Sophie_Chapelle

Aurélie Trouvé, Le business est dans le pré : les dérives de l’agro-industrie, Éditions Fayard, février 2015. Pour le commander dans la librairie la plus proche de chez vous, rendez-vous sur lalibrairie.com.

Photos :
- Une : moisson de soja / CC United Soybean Board
- Fair Oak Farms aux Etats-Unis et ses 40 000 vaches / CC J Anna Koczan
- Happening contre le TTIP et le Ceta à Berlin, octobre 2014 / CC Stop TTIP

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 18:33

 

Source :www.mediapart.fr

 

McDo, roi du hamburger et de l'optimisation fiscale

25 février 2015 | Par Dan Israel

 

 

Un rapport rédigé par des ONG européennes et américaines décrit en détail la façon dont McDonald's esquive ses impôts en Europe depuis 2009. Si elle appliquait les règles de façon loyale, l'entreprise aurait dû payer un milliard d'euros de plus en cinq ans.

 

McDonald’s est aussi un « Intaxable ». Depuis plus de deux ans, c’est ainsi que Mediapart désigne les multinationales, du numérique mais pas seulement, qui maîtrisent à la perfection l’art de ne pas payer d’impôts, en jonglant avec les lois fiscales et en restant dans les limites de la légalité. Un rapport publié ce mercredi à Bruxelles démontre sans ménagement que le roi du fast food américain n’a rien à envier aux experts de l’optimisation fiscale agressive que sont Google, Apple ou Starbucks.

Signé par plusieurs syndicats européens et américains, ainsi que par l’ONG britannique War on Want, le texte décrit en détail la stratégie adoptée par McDonald’s et son impact en Europe, où la compagnie aligne 7 850 magasins, pour 20,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires (soit près de 40 % de ses revenus mondiaux). Le système McDo s’appuie sur une minuscule filiale basée au Luxembourg, qui concentre presque tous les revenus liés à la propriété intellectuelle du groupe : en Europe, chaque magasin franchisé de la marque reverse au groupe une portion de son chiffre d’affaires au titre de royalties pour la propriété intellectuelle. Et ces sommes très conséquentes sont remontées au Luxembourg, pays très arrangeant avec les grandes entreprises, comme nous l’avons raconté dans ce reportage.

 

 

 

La filiale luxembourgeoise de McDo, nommée McD Europe Franchising SARL emploie seulement 13 personnes, mais entre 2009 et 2013, elle a cumulé 3,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Et elle a payé seulement… 16 millions d’euros d’impôt. « Il est honteux de voir qu’une entreprise pesant plusieurs milliards d’euros, qui paie des bas salaires à ses employés, cherche encore à fuir sa responsabilité de payer sa juste part d’impôts, nécessaires pour financer les services publics dont nous dépendons tous », dénonce dans un communiqué Jan Willem Goudriaan, secrétaire général de la fédération syndicale européenne des services publics (FSESP), un des maîtres d’œuvre du rapport. « Nous demandons à la Commission européenne et aux administrations fiscales nationales, ainsi qu’à la Commission spéciale récemment créée au Parlement européen (lire notre article, ndlr), d’examiner de près les pratiques fiscales de McDonald’s et prendre les mesures appropriées », insiste-t-il.

En 2012 et 2013, plus d’un milliard d’euros ont été versés à McD Europe Franchising au titre des royalties. Un business très rentable pour cette filiale, qui possède une branche en Suisse à Genève, et une autre dans l’Illinois aux États-Unis. Selon ses comptes déposés au Luxembourg, consultés par Mediapart, elle a fait 172 millions d’euros de bénéfice en 2012, et 284,3 millions en 2013. Pour 2012, elle n’a payé que 1,8 % d’impôt sur ces bénéfices, et ce taux est encore descendu en 2013 à 1,46 %... Si elle avait été imposée au taux habituel de 29,22 % pratiqué au Luxembourg, cette filiale aurait dû payer en cinq ans la bagatelle de 1 milliard d’euros supplémentaires !

Par quel miracle McDonald’s parvient-il à ce juteux tour de passe-passe ? Principalement en s’appuyant sur une loi instaurée en 2009 au Luxembourg, et ce dès le premier mois de sa mise en application. Cette niche fiscale, connue sous le nom de « patent box », prévoit une exonération de 80 % pour les bénéfices issus de l’utilisation ou de la concession de droits de propriété intellectuelle tels que les brevets, les marques ou les droits d’auteur. Comme nous le racontions ici, cette « boîte à brevets » vient d’être mise en place en Irlande et en Grande-Bretagne, et fonctionne déjà au Luxembourg et en Belgique, qui y voit une façon efficace d’attirer les entreprises sur leur sol. D’autant plus que l’OCDE, à la pointe ces derniers mois pour démonter les systèmes d’évasion fiscale utilisés par les entreprises, n’a jusqu’alors pas réussi à trouver un consensus pour mettre en place des règles sur les « patent boxes ».

La commission européenne a tout de même déjà demandé des informations aux dix États-membres appliquant peu ou prou ce type de niche fiscale (la France est par exemple ciblée, pour son crédit impôt-recherche, lui aussi contestable). Après avoir résisté et même lancé une procédure devant la cour de justice européenne, le Luxembourg a finalement livré les informations demandées.

La suspicion d'un « ruling » avec le Luxembourg

Ces informations ne sont pas inédites en France. En janvier 2014, L’Express avait dévoilé le système, et révélé que le fisc hexagonal examinait de très près la situation, estimant que McDo le privait d’une somme allant de 330 à 650 millions d'euros par an. En octobre 2013, les services spécialisés français ont même effectué une descente au siège de l’entreprise. Une procédure est donc en cours, au même titre que contre Microsoft (qui vient de verser 16,4 millions d’euros pour régler un premier conflit), Amazon, Yahoo, Google, Facebook ou eBay...

Le nouveau rapport des syndicats estime que les sommes qui échappent à l’administration fiscale française sont même plus importantes, allant de 386 à 713 millions d’euros, auxquelles pourraient en théorie s’ajouter plusieurs centaines de millions d’euros de pénalités. Il est vrai que la France est le premier marché en Europe pour McD, et le deuxième plus rentable au monde, après les États-Unis : en 2013, ses 1 342 restaurants ont vendu pour plus de 4,4 milliards d’euros de nourriture (hors taxes).

Dès 2009, explique le rapport, McDonald’s France a cédé à la filiale luxembourgeoise une part importante de ses droits sur la propriété intellectuelle. Et comme par magie, puisqu’elle devait dès lors reverser une somme significative au Luxembourg, ses bénéfices se sont effondrés. « Malgré une augmentation de 37 % de son chiffre d’affaires entre 2008 (…) et 2013, son profit a en fait décliné de 14 % durant cette période », pointe le texte.

L’Express indiquait en 2014 que les franchisés français devaient verser à leur maison mère, via la Suisse et le Luxembourg, 4 % de leur chiffre d'affaires pour les frais publicitaires et « entre 10 % et 20 % sous forme de commissions d'exploitation ». Le rapport d’aujourd’hui estime à 5 % les frais à verser en plus de la publicité, en se basant sur le contrat de franchise italien notamment. Mais ce contrat évoque aussi un « loyer mensuel » supplémentaire, « calculé sur le pourcentage des ventes », sans plus de précisions.

Interrogé par Reuters, un porte-parole de la marque s’est borné à nier toute illégalité. L’an dernier, c’est Jean-Pierre Petit, président de McDonald’s France, qui avait fait de même dans “Capital” sur M6, le 26 janvier 2014. Mais il était apparu très nerveux, et sa défense était plus qu’hésitante. Après avoir assuré que l’information de L’Express était « totalement fausse », « complètement erronée en ce qui concerne la France », il avait reconnu que son entreprise faisait circuler de l’argent « par le process d’un certain nombre de pays, qui nous permet d’avoir une certaine optimisation fiscale ». « Il n’y a pas de mal à faire de l’optimisation fiscale ! » avait-il fini par déclarer.

 

 

 

 

Le cas de McDo rappelle celui de Starbucks, ciblée par une enquête de l’Union européenne. En France, Starbucks est officiellement en déficit perpétuel depuis son lancement sur le territoire en 2004, et n’a jamais payé d’impôt. Et en 2011, alors que le cafetier américain assurait à ses investisseurs qu’il avait réalisé 40 millions de dollars de profits en Europe, il avait en fait déclaré une perte de 60 millions aux administrations fiscales britanniques, allemandes et françaises (les trois pays représentent 90 % de son activité sur le continent)…

Mais en étudiant les documents comptables disponibles pour McDonald’s, la coalition des syndicats a établi un autre fait troublant : l’entreprise parvient en fait à faire baisser son taux d’imposition bien plus bas que ce qui est prévu par le régime de « patent box » luxembourgeois. Si elle appliquait ce régime à la lettre, elle aurait dû payer 194 millions d’euros de plus entre 2009 et 2013. Ce qui correspond à douze fois la somme qui a été effectivement versée !

Le rapport soupçonne donc que McDo et le Luxembourg aient conclu un accord fiscal, un de ces fameux « tax rulings » qui embarrassent tant le pays depuis qu’ils ont été révélés dans le détail par des médias de tous les pays. Une suspicion qui tombe en plein dans l’actualité, puisque la commission européenne a annoncé la semaine dernière qu’elle allait tout mettre en œuvre pour la transparence de ses « rulings », partout en Europe, notamment en proposant d’instaurer un échange automatique de ces données entre tous le États-membres concernés. Un porte-parole de la commission a fait savoir à Bloomberg que les informations du rapport sur McDonald’s seraient « étudiées avec soin » à Bruxelles.

 

Lire aussi

 

 

 

Source :www.mediapart.fr

 

 

 

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 18:19

 

Source : www.bastamag.net

 

 

Matières premières

Les banques françaises continuent-elles de « spéculer sur la faim » ?

par

 

 

Les trois principales banques françaises avaient promis en 2013 de mettre fin à leurs activités spéculatives sur les produits agricoles. Une étude de l’ONG Oxfam révèle le contraire. Cette spéculation, qui a contribué il y a quatre ans à faire exploser le prix du blé et à provoquer des émeutes de la faim dans les pays pauvres, s’est accru. Seul le Crédit agricole a tenu ses engagements. La spéculation sur les matières premières devrait être encadrée à partir de juillet 2015 par l’Autorité des marchés financiers. A moins que le gouvernement, lui aussi, ne respecte pas ses engagements.

Elles s’étaient engagées à ne plus « spéculer sur la faim ». Les quatre principales banques françaises – BNP, Crédit agricole, Société générale et BPCE – avaient été critiquées en 2013 pour avoir lancé des fonds indiciels indexés sur les matières premières agricoles. La valeur de ces fonds repose sur un « panier » de produits agricoles : un peu de blé, de maïs, de soja, de cacao ou de café, éventuellement accompagnés d’hydrocarbures (pétrole, gaz) et de métaux. La rentabilité que ces fonds procurent dépend ensuite de l’évolution des prix de ces matières premières. En 2013, les quatre banques françaises avaient investi, pour compte propre ou pour leurs fortunés clients, plus de 2,5 milliards d’euros dans les matières premières alimentaires, selon une étude réalisée à l’époque par l’ONG Oxfam et le cabinet néerlandais d’expertise financière, Profundo.

Les banques françaises étaient ainsi accusées de participer au vaste mouvement spéculatif sur les matières premières lancé par les grandes banques d’affaires anglo-saxonnes lors de la crise financière de 2008. Cette spéculation est estimée à 600 milliards de dollars, dont le tiers investi sur les produits agricoles. Un véritable tsunami financier qui a déséquilibré les prix et contribué à leur instabilité, fragilisant les revenus des agriculteurs et l’accès à ces biens de première nécessité pour les populations pauvres. « Les activité des fonds indiciels ont joué un rôle clé dans la flambée des prix alimentaires », soulignait la Banque mondiale en 2008. Le prix du blé est alors multiplié par trois, provoquant des émeutes de la faim dans plusieurs pays d’Afrique et d’Asie.

En France, cette activité spéculative augmente de 40%

Suite au rapport d’Oxfam, BNP-Paribas, la Société Générale et le Crédit Agricole s’étaient engagés par écrit « à réduire leurs activités spéculatives sur les marchés agricoles, en fermant un certain nombre de leurs fonds indiciels ou à cesser toute activité spéculative sur les matières premières agricoles », explique Clara Jamart, d’Oxfam France. Natixis, la banque d’affaires du groupe BPCE, était la seule à ne pas avoir répondu. Les autres ont-elles tenu leurs engagements ? Pas vraiment, estime Oxfam. Pire : selon les données de l’ONG publiées ce 23 février, la spéculation de ces banques sur les produits agricoles s’est même accrue de 40%, dépassant 3,5 milliards d’euros fin 2014 !

Le Crédit agricole est la seule banque à avoir entièrement mis fin à cette activité. BNP Paribas, qui nuance les chiffres avancés par Oxfam, a bien fermé deux fonds mais en possèderait encore une dizaine, pesant 1,3 milliard d’euros [1]. Attitude similaire pour la Société générale, qui fait cependant des efforts en matière de transparence : « La Société Générale est la seule banque à avoir fait preuve d’une totale transparence en nous communiquant le détail des données pour l’ensemble de ses fonds », note Oxfam. Ailleurs, l’opacité règne. « Les directions des banques nous répondent que ce ne sont pas des produits spéculatifs mais ne nous apportent pas la preuve que leurs investissements bénéficient bien à des acteurs du secteur », illustre Clara Jamart.

Oxfam continue de demander aux banques « de renoncer à toute forme d’activité purement spéculative sur les marchés agricoles et alimentaires ». Et rappelle à François Hollande, et à son gouvernement, les engagements pris : « Il sera mis fin aux produits financiers toxiques qui enrichissent les spéculateurs et menacent l’économie », avait assuré le président lors de sa campagne (engagement n°7). La réforme bancaire minimaliste votée en 2013 prévoit bien de rétablir des « limites de position » en matière de spéculation sur les matières premières. Ces limites de position empêchent un établissement financier – qui n’est ni un producteur, ni un consommateur final de matières premières – de détenir sur les marchés plus d’une certaine quantité de blé ou de soja. Et d’éviter ce qui s’est par exemple produit en 2010, quand la spéculation avait atteint un niveau invraisemblable : l’équivalent de huit fois la production mondiale de blé ou de 43 fois la production mondiale de soja s’était échangée sur les marchés ! Ces limites de position, dont les aspects techniques sont à l’étude, doivent être mise en œuvre au 1er juillet 2015 par l’Autorité des marchés financiers (AMF). Elles ont déjà été rétablies aux États-Unis. La zone euro reste le seul espace économique où la spéculation sur les produits alimentaires n’est pas encadrée.

Ivan du Roy

Photo : CC paul bica

 

 

 

 

 

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26 février 2015 4 26 /02 /février /2015 17:24

 

Source : www.okeanews.fr

 

La présidente du Parlement annonce la constitution d'une commission d'audit de la dette

 

Zoe Konstantopoulou a expliqué qu’il s’agissait d’un « outil qui permettra de rétablir une injustice majeure commise à l’encontre du peuple grec ».

25 février 2015

 

Zoe Konstantopoulou

Zoe Konstantopoulou

 

La présidente du parlement grec, Zoé Konstantopoulou, a annoncé la création d'une commission d'audit de la dette et a également annoncé le lancement des enquêtes sur les mémorandums, pour répondre à la question de savoir comment le pays en est arrivé là.

Elle a également confirmé la reconstitution de la commission de revendication des réparations de guerre allemandes...

 

*Suite de l'article sur okeanews

 

 

Source : www.okeanews.fr

 

 

 

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25 février 2015 3 25 /02 /février /2015 19:55

 

Source www.reporterre.net

 

L’agrobusiness : toujours plus d’argent, toujours moins de paysans

Noël Mamère

mardi 24 février 2015

 

 

 

En termes de politique agricole, les pouvoirs publics se couchent toujours « devant la FNSEA, maitre d’œuvre acharné de l’agriculture industrielle », et n’ont d’autre mot à la bouche que celui de « compétitivité ». « Mais que signifie la ’compétitivité’ en agriculture ? Sinon le développement forcené d’un modèle, l’agrobusiness, qui détruit la paysannerie et ne perçoit l’environnement que comme une contrainte. »

Le Salon de l’Agriculture sera cette semaine encore la vitrine d’une agriculture fêtée et fantasmée par les urbains. Mais pour les paysans ce grand bazar n’est qu’une mascarade qui cache mal, très mal, la réalité de leur mort programmée, au sens propre comme au figuré. Les suicides à la ferme, le burn-out des paysans, en sont les premiers symptômes. Chaque année, des milliers d’exploitations disparaissent en silence. La concentration financière devient la règle.

Habillage rhétorique

La Confédération paysanne vient de rendre publique la carte de France de l’industrialisation à marche forcée de l’agriculture ; vingt-neuf fermes géantes, calquées sur le modèle de la ferme des « mille vaches », vont accélérer le processus en marche depuis le début des années soixante.

Cette fuite en avant vers l’agrobusiness est en contradiction avec la volonté affichée par le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, de « changer de modèle » : sa loi d’avenir agricole, pourtant largement votée au Parlement, l’année dernière, par la gauche, les écologistes et les centristes, vante les vertus de l’agro-écologie qui permet de produire autant tout en respectant la nature.


- Stéphane Le Foll -

La réalité prouve qu’il ne s’agit là que d’un habillage rhétorique et marketing vide de sens. La pollution des eaux par les nitrates continue ; les algues vertes dénaturent le littoral ; les impacts des pesticides sur la santé publique en général et sur la santé des paysans en particulier pèsent chaque jour un peu plus.

Pire, le bilan des Groupes de travail sur l’agriculture, annoncé lors du Conseil des ministres mercredi dernier, entérine les mesures préconisées par la FNSEA : allégement des démarches des éleveurs de volailles qui souhaitent créer un élevage ou l’agrandir. A l’instar des porcheries, le seuil est relevé à 40.000 animaux pour déclencher une procédure d’exploitation classée, entre 30.000 et 40.000 volailles une simple procédure d’enregistrement suffira et en dessous de 30.000 volailles, aucune démarche ne sera nécessaire.

La FNSEA a gagné

Au nom de la modernisation des bâtiments d’élevage et du soi-disant « manque de compétitivité », la filière productiviste se voit renforcée dans sa démarche. Une fois de plus, la FNSEA, maitre d’œuvre acharné de l’agriculture industrielle, a gagné… Pour le plus grand profit de son président, Xavier Beulin, à la tête du puissant groupe Avril- Sofiproteol, en situation de domination sur les huiles et oléagineux, présent dans la génétique animale et actionnaire par l’intermédiaire de nombreuses filiales, de la plupart des projets de fermes usines.

Il est aujourd’hui le vrai ministre de l’agriculture. Ce syndicalisme-là est à l’agriculture ce qu’était celui de Jimmy Hoffa, le patron des teamsters américains dans les années soixante : une mafia censée réguler un secteur pour, en fait, mieux le « nettoyer » de ceux qui n’entrent pas dans le moule de l’agriculture intensive...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source www.reporterre.net

 

 

 

 

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