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Cinq questions que les petites et moyennes entreprises doivent se poser sur le traité transatlantique TAFTA
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Sommaire : Dans ce document, élaboré par MORE (Movement for Responsibility in Trade Agreements), l’auteur invite les PME à se pencher sur cinq questions relatives au Transatlantic Free Trade Area, TAFTA, l’accord en cours de négociation entre l’Union Européenne et les États-Unis. Le TAFTA sera-t-il favorable à l’économie européenne dans son ensemble ? Le TAFTA sera-t-il positif pour les PME européennes ? Répondra-t-il davantage aux intérêts des grandes entreprises qu’à ceux des PME ? La revue à la baisse des réglementations européennes, l’un des objectifs affichés du gouvernement américain, sera-t-elle positive pour les PME européennes ? Le TAFTA va-t-il réduire l’influence des PME sur les processus d’élaboration des réglementations ? Les faits et commentaires exposés par l’auteur en réponse à ces questions devraient conduire les PME à réexaminer les affirmations qui prônent les bienfaits du TAFTA et à douter de la sagesse dont fait preuve l’UE en concluant cet accord.
Selon ses promoteurs, le « Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement » (Transatlantic Trade and Investment Partnership, TTIP ou Transatlantic Free Trade Area, TAFTA) profitera à toutes les entreprises, mais est-ce réellement le cas ? La Commission Européenne et les Etats-Unis affirment que l’accord aidera tout particulièrement les PME (Petites et Moyennes Entreprises) et pas seulement les multinationales. Peut-on les croire ? Une fois approuvé, il sera impossible de revenir en arrière. Depuis l’automne 2014, la Commission Européenne répète à loisir que les PME devraient profiter davantage du TAFTA que les grandes entreprises, notamment grâce à la suppression des formalités administratives et des fastidieuses procédures bureaucratiques nécessaires pour exporter vers les États-Unis. Curieusement, les PME n’étaient pratiquement pas mentionnées dans la première campagne de promotion du TAFTA. Les PME européennes doivent sérieusement se pencher sur le TAFTA avant de considérer qu’il va défendre leurs intérêts.
Le TAFTA est actuellement en cours de négociation entre les États-Unis et l’Union Européenne (UE). Les principaux défenseurs du TAFTA sont les grandes multinationales de part et d’autre de l’Atlantique qui constituent le TABC (Transatlantic Business Council) et qui travaillent en coulisses depuis des décennies pour faire en sorte qu’il aboutisse. À Bruxelles, des sociétés de lobbying engagées à grand frais pour vendre le TAFTA aux parlementaires et aux médias prônent ses bienfaits pour les 20 millions de PME européennes, qui représentent 99,8 % des entreprises répertoriées, 57 % de la valeur ajoutée au PIB du continent et emploient 66,5 % de tous les salariés(1). Pourtant, les PME ne disposent pas des ressources pour profiter du TAFTA au même titre que les grandes entreprises. MORE(2) considère que les entreprises doivent être beaucoup mieux informées sur le TAFTA et ses conséquences sur leuravenir en Europe. Ce court document répertorie les cinq principales questions qui concernent tout particulièrement les PME. Elles méritent de recevoir de meilleures réponses de la Commission Européenne et des défenseurs du TAFTA que celles obtenues jusqu’à aujourd’hui.
1: De manière générale, l’impact du TAFTA sera-t-il positif pour l’économie européenne ?
Les rapports commandés par la Commission Européenne (CE) suggèrent que le TAFTA améliorera le PIB annuel de l’Europe de 0,05 % en moyenne, soit un gain de 0,5 % cumulé sur dix ans. Les économistes ont qualifié ce gain de « dérisoire » et une croissance de 0,05 % supplémentaire par an comme une « erreur d’arrondi ». Même si ces prévisions se réalisaient, cela voudrait dire qu’une économie qui enregistre une croissance de 2 % par an, passerait à 2,05 % par an avec le TAFTA. Pensez à vos propres prévisions de ventes et de dépenses. Un changement positif ou négatif de 0,05 % par an permet-il de vous rassurer ?
Pourtant, ces modestes bénéfices pourraient coûter cher. Les rapports de la CE prévoient également qu’au moins 1,3 million de travailleurs européens devraient perdre leur emploi en raison des déplacements de main-d’œuvre qui se produiront dans le cadre du scénario « ambitieux » du TAFTA, prôné par la Commission Européenne ; et plus de 680 000 travailleurs européens perdraient leur emploi dans le cadre d’un scénario « moins ambitieux »(3). Dans le jargon des économistes, le « déplacement de main d’œuvre » signifie que des personnes vont perdre leur emploi. Il est raisonnable de penser qu’un grand nombre de ces pertes d’emploi toucheront les PME.
Les déclarations de la CE ont fait l’objet de critiques de toutes parts. Un excellent rapport de l’OFSE (Österreichische Forschungsstiftung für Internationale Entwicklung – Fondation autrichienne pour le développement international, à Vienne) (4,5) souligne qu’elles ne tiennent pas compte des coûts de l’ajustement social et macro-économique que le TAFTA entraînerait. Ceux-ci pourraient réduire les bénéfices de 40 %. À la fin de l’année 2014, des fonctionnaires de la Commission Européenne et des gouvernements européens ont commencé à remettre en cause les chiffres figurants dans les rapports qu’ils avaient demandés, alors qu’ils avaient fondé leur défense du TAFTA sur ces derniers. En décembre 2014, l’université de Tufts aux États-Unis (6) a publié les résultats d’une étude sur les conséquences économiques du TAFTA, dans laquelle les chercheurs utilisent une méthode des Nations Unies pour évaluer l’impact de l’accord. L’étude dresse un tableau bien moins encourageant que celui annoncé par la Commission Européenne. Elle prévoit une perte nette pour l’UE aussi bien en termes d’exportations que de PIB, après une décennie d’application du TAFTA, et une réduction des salaires nets. Les chercheurs de l’université de Tufts prévoient également une perte de 600 000 emplois.
De ce fait, les fondements macro-économiques du TAFTA sont, dans le meilleur des cas, contestables.
Au vu de ces incertitudes, est-il sage que les petites entreprises européennes acceptent le TAFTA ?
2: L’impact du TAFTA sera-t-il positif pour les PME européennes ?
La Commission Européenne affirme que le TAFTA « sera tout particulièrement intéressant pour les PME, puisque les barrières douanières tendent à peser de manière disproportionnée sur les petites entreprises qui ont moins de ressources pour y faire face que les entreprises de plus grande taille » (7). Dans son rapport de novembre 2014, le Conseil de l’Atlantique Nord (8) avance que « étant donné l’impact économique majeur du TAFTA (ces bénéfices dérisoires cités dans la réponse à la Questions 1 ci-dessus), même les PME qui n’exportent pas profiteront du partenariat », sans pour autant fournir de chiffres ou une analyse pour étayer cette affirmation. Est-ce vrai ? Où sont les preuves ?
Cela peut sembler difficile à croire, pourtant il semble qu’au-delà de la simple affirmation que le TAFTA doit être bon pour les PME, il n’existe aucune preuve pour le confirmer. En revanche, il y a bien des preuves démontrant l’impact d’autres accords de libre échange sur les PME. L’exemple le plus pertinent est celui de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) entre le gigantesque marché des États-Unis et de plus petites économies, celles du Canada et du Mexique.
Les États-Unis, le Canada et le Mexique ont signé l’ALENA en 1994. Nous disposons désormais de 20 ans d’informations sur son impact sur les PME. Dans leur rapport sur l’ALENA, l’OFSE (9) et le CEPR- DC (10) concluent que l’impact de l’ALENA sur les petites exploitations agricoles au Mexique a été dévastateur. Le CEPR écrit : « L’ALENA… a eu un impact considérable sur l’emploi en milieu agricole puisque les subventions du maïs et d’autres produits ont entraîné la disparition de fermes familiales au Mexique. Entre 1991 et 2007, 4,9 millions de petits agriculteurs mexicains ont disparu alors que les travailleurs saisonniers dans les industries agro- exportatrices ont augmenté d’environ 3 millions. Cela signifie une perte nette de 1,9 millions d’emplois ».
Comme pour le TAFTA, les gouvernements avaient promis que les petites entreprises seraient les grands gagnants de l’ALENA. Cette promesse n’a pas été tenue. D’après un rapport récent de Public Citizen qui reprend des sources officielles du gouvernement américain : « la croissance des exportations des petites entreprises américaines vers les pays non-ALENA a dépassé de plus de 50 % la croissance des exportations vers les partenaires ALENA, le Canda et le Mexique, entre 1996 et 2012… Les exportations des petites entreprises vers le Mexique et le Canada dans le cadre de l’ALENA ont augmenté de moins de la moitié que celles des grandes entreprises vers les partenaires de l’ALENA (47 % contre 97 % au cours de la même période). Il en résulte que la part des petites entreprises américaines sur le total des exportations des États-Unis vers le Mexique et le Canada a baissé dans le cadre de l’ALENA »(11). Un autre point bien documenté est le niveau élevé d’investissements étrangers faits au Mexique, en grande partie provenant d’entreprises américaines (notamment dans l’industrie automobile) qui ont délocalisé leurs activités vers le Mexique pour profiter d’une main d’œuvre moins chère, contribuant ainsi à la perte d’environ 700 000 emplois aux États-Unis, d’après le Congrès américain (12).
Il n’y a actuellement pas d’informations disponibles sur l’impact économique potentiel du TAFTA sur les PME européennes, secteur par secteur, en considérant l’impact combiné des exportations vers les États-Unis et des importations vers leurs marchés nationaux à partir des États-Unis. En revanche, nous avons une montagne d’affirmations infondées selon lesquelles le « TAFTA sera bénéfique pour les PME ».
La question est donc la suivante : étant donné que les PME représentent au moins 50 % du PIB européen et 60 % de tous les emplois, et si l’on pense aux bouleversements à grande échelle qu’entraînera le TAFTA, est-il sage de mettre en péril une partie aussi importante de nos économies ?
3: Le TAFTA répondra-t-il davantage aux intérêts des grandes entreprises que des PME ?
Le TAFTA souhaite encourager les investissements directs étrangers des entreprises américaines en Europe et des entreprises européennes aux États-Unis, en partant de l’hypothèse attrayante mais non prouvée que ces investissements génèreront emplois et croissance. Pour pousser les entreprises à investir, il est proposé que le TAFTA prévoie un mécanisme d’arbitrage connus sous le nom de « mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États» (Investor-state dispute settlement, ISDS) auquel les entreprises américaines investissant en Europe pourraient avoir recours pour obtenir une réparation financière si elles peuvent prouver que la réglementation d’un État a réduit leurs profits passés, présents ou à venir. Concrètement, ce système place les pratiques des entreprises en dehors des processus législatifs normaux et de la démocratie. Il est de ce fait très controversé.
Dans ces tribunaux, qui existent déjà dans le cadre d’autres accords commerciaux, trois avocats du secteur privé siègent (souvent à huis-clos) et prononcent un jugement, généralement sans appel. Le risque de se retrouver devant un tel tribunal peut conduire un gouvernement à reconsidérer la législation actuelle ou proposée. La grande majorité des environ 600 affaires enregistrées qui ont été portées devant ces tribunaux l’ont été par de grandes entreprises(13). Elles ont souvent réussi à obtenir des compensations financières importantes. Par exemple, le Canada a été condamné à payer 13 millions de dollars à l’entreprise americaine Ethyl suite à l’interdiction par le Parlement canadien d’un additif à l’essence pour des raisons de protection de l’environnement. La société Ethyl l’avait poursuivi devant un tribunal arbitral dans le cadre des accords ALENA.
Est-il probable que les PME utilisent l’ISDS ? Bien que la Commission Européenne et les États- Unis argumentent que rien n’empêchera les PME d’avoir recours à ces tribunaux, est-ce réaliste ? Y-a-t-il des chances qu’un petit boulanger allemand, un petit agriculteur français ou une petite société de chauffage et de plomberie au Royaume-Uni saisissent les tribunaux arbitraux ? Étant donné que les frais juridiques à la charge des plaignants se sont élevés en moyenne à 8 millions de dollars par cas et que les arbitres sont rémunérés entre 600 et 700 US$ de l’heure (14), cela semble bien improbable. Puisque rares sont les PME qui pourraient se le permettre, il semble que l’ISDS soit réservé aux grandes entreprises et non aux PME. À cet égard, il est intéressant de noter que la principale association indépendante de PME allemande, la BVMW (Bundesverband Mittelständische Wirtschaft), qui compte 270 000 PME membres, a condamné publiquement l’ISDS (15), car trop onéreux et compliqué à utiliser pour ses membres, représentant donc un privilège de fait pour les multinationales.Un autre aspect pourrait aller à l’encontre des intérêts des PME. La protection que le TAFTA offre aux investisseurs (par l’intermédiaire de l’ISDS), pourrait encourager les entreprises européennes à délocaliser leurs installations de production aux États-Unis pour profiter d’une main d’œuvre moins chère. Cela peut représenter un risque pour les PME qui fabriquent des composants et qui se sont installés à proximité de leur principal client, comme c’est souvent le cas dans le secteur automobile. Si leur client délocalise ses usines aux États-Unis, elles pourraient alors perdre leur principale activité. Cela peut également affecter d’autres PME qui fournissent des marchandises ou des services à de grandes entreprises. De nombreuses entreprises américaines ont profité de l’ALENA pour délocaliser leur production au Mexique, comme cela est indiqué plus haut. De ce fait, les dispositions de protection des investissements prévues dans le TAFTA s’avèrent plus avantageuses pour les grandes entreprises que pour les PME.
Un « chapitre » PME (16), actuellement en cours de négociation, va être ajouté au TAFTA. Les détails sur la manière dont le TAFTA devrait aider les PME ne sont pas encore connus, mais les premiers textes suggèrent que le chapitre devrait inclure des échanges d’information, des sites Web et la création de bases de données. Cela pourrait apporter une certaine aide aux PME européennes qui souhaitent exporter vers les États-Unis, mais est-ce suffisant pour pousser les PME qui n’exportent pas actuellement à le faire ?
D’après le Conseil de l’Atlantique-Nord «seul 25% des plus de vingt millions de PME européennes exportent en dehors de leurs frontières nationales, et seulement 13 % exportent à l’extérieur de l’Europe. » Les exportations vers les États-Unis constituent seulement une petite partie de la contribution des PME au PIB de l’Europe. Si le TAFTA multipliait par deux cette contribution (en restant très optimistes), l’augmentation nette du PIB européen que cela représenterait serait toutefois négligeable. En outre, beaucoup de PME ont passé des années, voire des générations, à construire des relations, fondées sur les bonnes pratiques, avec des clients locaux, régionaux, nationaux et européens. Alors que certaines PME exportent hors des frontières européennes, beaucoup d’entre elles ne disposent pas des ressources internes ou du capital risque pour investir dans le personnel nécessaire à l’exportation vers les États-Unis, ou n’ont pas besoin de le faire. La plupart de leurs marchandises et de leurs services sont également destinés aux marchés européens. L’hypothèse en matière de modélisation économique selon laquelle le marché américain et les marchés locaux européens sont équivalents à tous égards peut s’appliquer aux fabricants de marchandises, comme les voitures, qui sont vendues à l’échelle internationale, mais n’est probablement pas applicable à des produits comme la nourriture qui sont influencés par les cultures locales, nationales et régionales. Cela n’a pas été pris en compte dans les modèles économiques simples du TAFTA.
La question est donc : pourquoi la Commission européenne a décidé de ne pas indiquer quelles sont les entreprises pour lesquelles le TAFTA a été conçu ? S’agit-il d’entreprises comme la vôtre ?
4: La revue à la baisse des réglementations européennes sera-t-elle positive pour les PME européennes ?
Le TAFTA n’est pas comme d’autres accords commerciaux dont vous avez entendu parler. Réduire les barrières douanières (frais de douane) n’est en réalité qu’une mesure secondaire et non sa principale fonction. Son objectif premier est d’éliminer, ou « d’harmoniser » (en fait, réduire) la réglementation dans des domaines tels que la qualité alimentaire, la santé, la sécurité, la nutrition et l’environnement aux États-Unis et en Europe, ce qui constitue, dans le langage des documents officiels de la Commission européenne, des « barrières » ou des « entraves » au commerce. Alors que supprimer les procédures inefficaces et redondantes est un objectif louable, que les PME soutiendraient sans aucun doute vivement, la question qui intéresserait vraiment ces dernières est : quel sera l’impact de cette suppression des « barrières aux échanges » sur mon entreprise ?
Considérons que des entreprises américaines, qui produisent des produits ou des services conformément à des réglementations moins exigeantes (et donc moins coûteuses à respecter), seront en mesure de proposer des produits de manière rentable à un prix inférieur à celui des entreprises européennes devant se conformer à des réglementations plus contraignantes. Si tel est le cas, alors les entreprises américaines devraient être en mesure de conquérir des parts de marché importantes des PME dans de nombreux secteurs. Les PME seraient alors confrontées à deux options tout aussi difficiles l’une que autre : soit réduire leurs coûts de base de 30 %-40 % (la différence moyenne entre les salaires américains et européens) pour rester compétitifs, soit complètement transformer leur offre et leurs systèmes de production en très peu de temps. Après quelques années de lutte infructueuse, de nombreuses PME européennes finiraient probablement par faire faillite, contribuant à augmenter le chômage et la désolation de beaucoup de communautés qui vivent grâce aux petites et moyennes entreprises. Il convient de rappeler que plus de 60 % des travailleurs en Europe sont employés par des PME. Ce qui est sûr, c’est que même si ce qui précède ne devait se réaliser que partiellement, les PME devraient se sentir concernées par la réduction ou l’élimination des réglementations prévues par le TAFTA. Il est intéressant de souligner que les organismes officiels qui représentent les PME dans plusieurs grands pays d’Europe (le FSB au Royaume-Uni, la CGPME en France et le DIHK en Allemagne) soutiennent ouvertement le TAFTA. Pourtant, ils n’ont pas réussi à convaincre des avantages économiques du TAFTA, surtout pour les PME.
La question est donc : pourquoi aucune autorité ne semble être consciente des conséquences potentiellement désastreuses du TAFTA pour les PME et, si c’est le cas, pourquoi ne sont-elles pas honnêtes quant à l’impact que le TAFTA pourrait avoir sur les PME ? 
5: Le TAFTA va-t-il réduire l’influence des PME sur les processus réglementaires ?
L’une des principales mesures envisagées dans le cadre du TAFTA consistera à établir un processus de « coopération réglementaire », où les régulateurs de part et d’autre se réuniront régulièrement et décideront quelles réglementations et normes doivent être modifiées ou introduites à l’avenir. D’après les propositions publiées en janvier 2015 par la Commission européenne (17), plusieurs « acteurs » comprenant de grandes entreprises et vraisemblablement des PME (ou plus probablement uniquement leurs associations professionnelles), seront consultés à différentes étapes de ce processus avant que de nouvelles réglementations soient autorisées. Si nous reprenons les mots de l’ancien Commissaire chargé du commerce extérieur de la Commission européenne, Karel de Gucht, l’objectif est que le TAFTA devienne un « accord vivant », qui adapte constamment la réglementation pour favoriser le commerce.
Cette invitation qui propose aux entreprises d’avoir une voix, ou peut-être même un véto, dans le processus d’élaboration des réglementations est un écart considérable par rapport au processus démocratique existant en Europe. D’après le rapport (18) du très respecté Corporate Europe Observatory basé à Bruxelles, ce processus de « coopération réglementaire » est un danger pour la démocratie en Europe et creuse l’écart entre les citoyens les moins bien protégés, ce qui inclut les PME, et ceux qui ont le pouvoir d’introduire des lois et réglementions.
La plupart des PME ne jouent pas un rôle important dans leurs associations professionnelles, même lorsqu’elles en ont un. Beaucoup de directeurs ou de propriétaires de PME sont trop occupés à assurer le fonctionnement de leur petite entreprise pour pouvoir se consacrer à ces activités. Certaines font partie de groupements d’entreprises qui incluent également des entreprises bien plus grandes. En fait, les PME sont peut-être même moins impliquées dans les décisions relatives au TAFTA que les citoyens ordinaires et dépendent des représentants politiques pour défendre leurs intérêts.
La question que nous nous posons est la suivante : pourquoi les gouvernements européens et leurs parlements voudraient soutenir une telle atteinte à leur pouvoir et est-ce que cela va dans l’intérêt des citoyens européens ?
Richard Elsner MORE
E-mail : richard.elsner172@gmail.com
MORE (Movement for Responsibility in Trade Agreements, Mouvement pour la responsabilité dans les accords commerciaux), est une association de PME et de citoyens européens créée pour veiller à ce que les accords commerciaux tels que le TAFTA répondent équitablement aux intérêts des entreprises et de la société ainsi que pour protéger les PME en Europe et aux États-Unis. MORE a établi de solides relations de collaboration avec des associations de PME indépendantes en Europe. L’initiative est apolitique et financée par des fondations européennes, notamment la Schöpflin Stiftung en Allemagne qui en est le membre fondateur.
3.3.15
Références
(1) Rapport annuel de la Commission européenne sur les PME européennes 2012-2013
(2) MORE. Ce court document a été rédigé par MORE (Movement for Responsibility in Trade Agreements, Mouvement pour la responsabilité dans les accords commerciaux), une association de citoyens européens créée pour veiller à ce que les accords commerciaux tels que le TTIP répondent équitablement aux intérêts des entreprises et de la société ainsi que pour protéger les PME en Europe et aux États-Unis. Son site Web sera bientôt disponible.
(3) Reducing Transatlantic Barriers to Trade and Investment: Center for Economic Policy Research. Mars 2013
(4) TTIP – A GOOD DEAL? Werner Raza, Fondation de la recherche autrichienne pour le développement international (ÖFSE) ; Lance Taylor, The New School for Social Research ; Bernhard Tröster, (ÖFSE) et Rudi von Arnim, Université d’Utah à Salt Lake City, Schwartz Center for Economic policy Analysis, Policy Note, Décembre 2014 – étude qui passe en revue les quatre principaux exercices de modélisation économique utilisés pour défendre le TTIP. http://www.economicpolicyresearch.org/images/docs/research/globalization_trade/Taylor _Policy_Note_1.9.15_FINAL.pdf
(5) Assess TTIP: Assessing the Claimed Benefits of the Transatlantic Trade and Investment Partnership, W Raza, J Grumiller, L taylor, B Tröster, R v Arnim, OFSE 2014
(6) The Transatlantic Trade and Investment Partnership: European Disintegration, Unemployment and Instability, Jeronim Capaldo, TUFTS University. Octobre 2014
(7) TTIP: The Opportunities for small and medium-sized enterprises. Office des publications de l’Union européenne, ISBN 978-92-79-36461
(8) TTIP: Big Opportunities for Small Business, The Atlantic Council, Novembre 2014
(9) Ex-ante versus ex-post assessment of the economic benefits of Free Trade Agreements: Lessons from NAFTA, J-A Grumiller. Mai 2014
(10) Did NAFTA help Mexico? An assessment after 20 years; M Weisbrot, S Lefebvre et J Sammut, CEPR, Washington DC
(11) Raw Deals for Small Businesses: US Small Firms have endured slow and decling Exports under “Free Trade” Deals: Public Citizen. Février 2015
(12) NAFTA at 20: Overview and Trade Effects : Congressional Research Service: Villareal & Fergusson. Avril 2014
(13) http://www.economist.com/news/finance-and-economics/21623756-governments-are- souring-treaties-protect-foreign-investors-arbitration
(14) For instance using ISDS in the Hong Kong – Australia trade agreement, tobacco company Philip Morris challenged the introduction of plain packaging on cigarettes in Australia, http://insidestory.org.au/philip-morris-australia-and-the-fate-of-europes-trade-talks/
(15) BVMW (Bundesverband Mittelständische Wirtschaft). Communiqués de presse d’août à décembre 2014
(16) SMEs Chapter X: Proposal from the EU to the US, publié en janvier 2015
(17) Initial Provisions for Regulatory Cooperation. Publiées par la Commission européenne le 30 janvier 2015
(18) « The crusade against red tape » Rachel Tansey, CEO. Octobre 2014
Source : http://www.moreforsmesthanttip.eu