Publié le 02 avril 2015 à 10h29| Mis à jour le 02 avril 2015 à 22h20
Imposante manifestation au centre-ville de Montréal
Lia Lévesque, Stéphanie Marin
La Presse Canadienne
Montréal
Plusieurs milliers de personnes ont manifesté, jeudi au centre-ville de Montréal, pour protester contre les politiques d'austérité du gouvernement Couillard.
Bien que la plus grande partie de la manifestation se soit déroulée pacifiquement, les policiers ont dû intervenir contre un petit groupe de manifestants qui refusaient de libérer la voie, après la manifestation.
À 17h, lorsqu'il ne restait plus qu'un petit groupe de manifestants refusant d'obtempérer à l'ordre de quitter, répété au moins trois fois, et de libérer la voie, le Service de police de la ville de Montréal (SPVM) a déclaré la manifestation illégale. Le groupe de manifestants récalcitrants avait formé une barricade avec des tables à pique-nique et des clôtures métalliques. Les policiers ont prévenu qu'ils procéderaient à des arrestations si les manifestants demeuraient sur place. Plusieurs ont alors quitté les lieux.
À 17h15, le Groupe tactique d'intervention a avancé vers les manifestants, a commencé son intervention, retirant les barricades. Certains manifestants ont été interpellés et maintenus au sol par des policiers.
Finalement, vers 17h45, les policiers sont partis. Et la poignée de manifestants qui restaient sur place leur ont chanté «na na na he he good bye».
Les policiers sont intervenus en lançant des capsules de gaz irritant pour disperser des manifestants.
Photo Patrick Sanfaçon, La Presse
Au départ, les marcheurs s'étaient réunis au Square Victoria, à 13h. La marche s'était mise en branle vers 13h30. La plus grande partie de la manifestation s'est déroulée dans le calme et la bonne humeur.
Vers 15h, le plus fort du contingent a mis fin à sa marche au parc Émilie-Gamelin, juste à côté de l'Université du Québec à Montréal et de la gare d'autobus. Là, certains sont restés pour écouter de la musique ou continuer à manifester pacifiquement.
Un petit groupe s'est alors formé, poursuivant sa marche. Il s'est rendu à l'angle de Maisonneuve et Amherst, où des projectiles ont été lancés et l'avenue Maisonneuve, une artère importante, a été bloquée.
Le SPVM voulait dégager l'avenue Maisonneuve pour la rouvrir à la circulation, alors que l'heure de pointe commençait vers 16h au début du long congé pascal. Mais les manifestants ont refusé de libérer la rue. Les policiers sont alors intervenus une première fois, en lançant des capsules de gaz irritant pour disperser ces manifestants.
Finalement, quelque 70 policiers se trouvaient toujours à l'est de la place Émilie-Gamelin, peu avant 16h, pour tenter d'éviter la dispersion des manifestants et tenter de les encadrer dans le parc. Au microphone, un porte-parole du Service de police a demandé aux manifestants de rester au parc.
Après 16h, les manifestants ont regagné le terrain qu'ils avaient perdu. La tension a de nouveau monté d'un cran entre des manifestants et les policiers. Certains ont lancé des bouteilles et autres projectiles aux policiers. Les deux groupes se retrouvaient face à face à l'angle de Berri et Maisonneuve et d'autres policiers sont arrivés en renfort. Des manifestants ont placé des tables et des clôtures métalliques devant les policiers pour former une barricade et les empêcher d'approcher.
En début de soirée, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a fait un bilan final pour cette manifestation d'ampleur.
«Il s'agit de la plus importante manifestation sur notre territoire des deux dernières années. Deux personnes ont été interpellées en vertu du règlement municipal P-6, ce qui est peu considérant l'ampleur du rassemblement. L'un pour port de masque, l'autre pour avoir refusé d'obtempérer aux demandes d'un agent de la paix», a indiqué Laurent Gingras, porte-parole du SPVM.
La police a rapporté un acte de vandalisme sur une voiture d'un particulier. Un manifestant serait monté sur une Volvo stationnée sur le bord de la route, en plus d'y faire un graffiti «anarchiste», selon le SPVM.
Durant le plus fort de la manifestation, groupes sociaux et syndicaux, étudiants et représentants du Parti québécois et de Québec solidaire s'entremêlaient pour protester contre les compressions budgétaires actuelles et appréhendées à la suite du dernier budget Leitao.
Ils arrivaient de partout par autobus scolaires, à pied, en groupes, de Rimouski, de Lévis, de Saguenay. Le syndicat des professeurs de l'UQAM, en grève pour la journée, a fait savoir qu'il participait à la manifestation. Des représentants de l'Association des pompiers de Montréal participaient également à la marche, des employés d'hôpitaux, des fonctionnaires, des militants pour le logement social.
Sur des pancartes, on pouvait lire «refusons l'austérité», «vous n'aurez pas notre peau», «ça suffit les coupures» ou «des alternatives existent». Une banderole a été déroulée sur laquelle on pouvait lire «des mêmes attaques naissent les mêmes luttes» et, sur une autre: «aux riches de faire leur part». Un drapeau du Québec avait été éclaboussé de peinture rouge. Plusieurs jeunes manifestants avaient d'ailleurs peint leur visage en rouge ou en noir.
Les marcheurs protestaient notamment contre le fait que le dernier budget Leitao n'a haussé le budget des ministères de l'Éducation et de la Santé que de 0,2 et 1,4 pour cent respectivement, ce qui entraînera inévitablement d'autres compressions, même après l'atteinte de l'équilibre budgétaire, puisque ces augmentations ne permettent pas de couvrir les hausses normales de la croissance des coûts dans ces ministères.
Les policiers étaient nombreux; un hélicoptère survolait la scène. Ils se sont servis de leurs véhicules et de leurs vélos pour diriger les manifestants et leur barrer certaines rues ou protéger certains édifices plus stratégiques.
Tout au long de la marche, des responsables d'édifices à bureaux déployaient leur service de sécurité et verrouillaient leurs portes, par mesure de sécurité.
Au cours d'un point de presse avant le début de la marche, la porte-parole de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ), Camille Godbout, a affirmé que 135 000 étudiants étaient actuellement en grève contre l'austérité et les hydrocarbures. «Cent trente-cinq mille étudiants en grève, ce n'est pas rien; on veut le forcer à réagir (le gouvernement)», a-t-elle lancé.
Elle a promis de «continuer d'augmenter la pression de plus en plus» jusqu'à ce que le gouvernement révise ses politiques d'austérité. «On va continuer de se mobiliser», a-t-elle prévenu.
Dans le milieu de l'éducation, ces compressions signifient des heures de bibliothèque en moins, davantage d'étudiants dans les salles de cours, moins d'aide psychologique, a déploré la représentante étudiante. Le gouvernement «a les moyens de faire autrement», notamment en taxant davantage les banques et le capital, a suggéré Mme Godbout.
L'ASSÉ a noté qu'elle n'avait pas donné l'itinéraire à l'avance au Service de police de la ville de Montréal, bien que cela contrevienne au règlement municipal encadrant les manifestations. Les policiers ont tout de même été tolérants et ne sont intervenus qu'à la toute fin, contre un petit groupe. L'ASSÉ affirme qu'ils étaient 75 000 à manifester.
Des milliers de personnes manifestent contre l'austérité à Montréal
Le Monde.fr avec AFP | • Mis à jour le
Plusieurs milliers de personnes, surtout des étudiants, mais aussi des professeurs d'université, des affiliés à des centrales syndicales et des familles, ont défilé jeudi 2 avril à Montréal pour protester contre l'austérité imposée par le gouvernement de la province de Québec.
Transportant une tête en papier mâché à l'effigie du premier ministre québécois Philippe Couillard, de jeunes manifestants ont dénoncé « l'obsession » du gouvernement à vouloir atteindre à tout prix l'équilibre budgétaire.
Avant la manifestation, la ministre de la sécurité publique, Lise Thériault, avait lancé un appel au calme aussi bien aux manifestants qu'aux policiers. La semaine dernière, une jeune étudiante avait été blessée à la bouche par un tir tendu d'une cartouche de gaz lacrymogène par la police lors d'une manifestation. Jeudi, des échauffourées ont éclaté à l'issue de la manifestation : des policiers casqués, armés de matraques et de boucliers, ont chargé et lancé des gaz lacrymogènes contre des groupes de manifestants afin de disperser le rassemblement.
Nouveau mouvement le 1er mai
La manifestation coïncidait avec une « journée de grève nationale » dans des universités et établissements d'enseignement supérieur du Québec suivie par quelque 130 000 étudiants dans la province francophone.
Le gouvernement du Québec a présenté la semaine dernière un budget limitant drastiquement l'augmentation des dépenses dans les secteurs de la santé et de l'éducation. Avant la manifestation, Philippe Couillard a défendu l'action de son gouvernement, jugeant impérieux de «reprendre le contrôle de nos finances publiques ». Les organisateurs ont appelé à une nouvelle manifestation le 1er mai à Montréal.
Depuis des décennies, les gouvernements négocient en secret des accords de libre-échange et d’investissement. Ces accords sapent nos droits, détruisent l’emploi et l’environnement dans le seul intérêt court-termiste des multinationales. Les négociations transatlantiques avec les États-Unis (TAFTA) et le Canada (CETA) en sont de parfaits exemples. Mais sur tous les continents, les mobilisations s’amplifient pour dénoncer ces traités des multinationales et promouvoir la justice sociale et écologique. Le 18 avril nous lutterons ensemble : tous et toutes dans la rue, partout en France et dans le monde, pour la journée mondiale contre les traités des multinationales !
« Si j’étais chômeur, je n’attendrais pas tout de l’autre, j’essaierais de me battre d’abord », nous a sorti dernièrement Emmanuel Macron.
Il se dit déterminé à se « battre » sans prendre le risque de perdre son combat devant l’Assemblée. Craignant de voir son projet de loi retoqué par la représentation nationale, il est passé en force avec l’article 49-3. Petit bras !
Et lui, « l’immunisé du chômage » par son statut ultra privilégié d’énarque et d’Inspecteur des Finances, le voilà qui nous donne la leçon sur la posture à adopter face à la perte d’un emploi. Comme si Liliane Bettencourt prodiguait ses conseils aux smicards pour ne pas finir dans le rouge en fin de mois. Désopilant !
Eh bien, Monsieur Macron, je vais vous conter la vraie vie du vrai chômeur que vous ne serez jamais. D’un demandeur d’emploi du bas de l’échelle, accroché à son RSA comme une moule à son rocher.
Moi, Monsieur Macron, je n’attends rien des autres qui pourtant m’empoisonnent la vie avec leur contrôle social. Tout ça pour moins de 400 euros par mois d’allocations, de quoi ne pas crever de faim.
Tous les deux mois, je dois rendre des comptes sur mes recherches d’emploi auprès du centre d’insertion qui me suit à la demande du département qui subventionne ma misère.
Tous les trimestres, j’ai obligation de déclarer l’ensemble de mes ressources et de mes avoirs à la CAF (Caisse d’allocations familiales) qui, en fonction, fixe le montant de mon RSA.
Vous savez quoi Monsieur Macron ? Comme j’ai mis de côté 30 000 euros (en 33 ans de boulot) dans lesquels je pioche pour me tenir à flot, la CAF défalque de mon RSA annuel 3% de ce montant (c’est la règle), c’est-à-dire 900 euros par an ou encore 75 euros par mois, sous prétexte que je touche des intérêts de mes « juteux placements ».
En réalité, Monsieur Macron, mes 30 000 euros ne m’en rapportent pas la moitié. Mon RSA est donc amputé injustement de 500 euros par an que je n’ai jamais perçus.
Et quand ce n’est pas le centre d’insertion qui me convoque, c’est chez Pôle Emploi que je dois traîner ma carcasse.
Là encore, passage en revue de mes actes positifs de recherche, de mes candidatures spontanées, de mes investigations, de mes réponses…
Tous les mois, Monsieur Macron, je perds une demi-journée à me justifier, à expliquer encore et toujours que personne ne veut embaucher un vieux de 57 ans. C’est bien simple, je n’ai pas obtenu un seul entretien ces 5 dernières années. Mon CV est invariablement éliminé de la liste des postulants. Pas pour insuffisance de références professionnelles et savoir-faire probants, juste pour une question d’âge.
Monsieur Macron, cela fait 8 ans que je me bats au quotidien pour retrouver un emploi digne de ce nom, que je suis ouvertement discriminé des procédures d’embauche, que je n’en dors plus, que j’en suis malade tellement mes démarches infructueuses me minent le moral, me désespèrent. Et vous savez quoi Monsieur Macron ? Je suis condamné à double peine car ces années que je passe au RSA ne m’ouvrent aucun droit à la retraite.
J’ai été un travailleur au revenu modeste. Je suis un chômeur enraciné sous le seuil de pauvreté. Je serai un « retraité » miséreux. Je mourrai indigent. Voilà la perspective des 10, 20 ou 30 ans qu’il me reste à vivre.
Je n’en aurai certainement pas le courage Monsieur Macron. À force de se battre, on s’épuise, on se résigne peu à peu à l’inéluctable. La corde au cou, une balle dans la tête, une capsule de cyanure, un cocktail mortel de médicaments… J’ai passé en revue toutes les possibilités de me foutre en l’air pour en retenir une.
On me retrouvera probablement, un jour ou l’autre, pendu à la branche d’un chêne en forêt de Melun-Sénart. J’ai repéré l’endroit. L’arbre centenaire n’attend que moi.
Le seul infime espoir que je caresse encore, est qu’un jour on vire les comme vous à grands coups de pied où je pense. La France a su le faire parfois, se débarrasser des arrogants, des possédants, des donneurs de leçon profiteurs du système inégalitaire auquel ils nous soumettent. Je crains malheureusement qu’elle n’en ait plus la volonté, la capacité, tant les comme vous Monsieur Macron ont gagné la bataille.
En 2015, la lutte des classes est toujours d’actualité, sauf que ce sont les riches et les nantis qui l’ont remportée.
Plus que mon statut de pauvre, de chômeur, de Rsaste, cette cruelle défaite me désole. Le jour où je n’y croirai vraiment plus, je partirai me perdre en forêt de Melun-Sénart…
Ouverture du Gazette Café : Le couteau suisse du café littéraire !
La Gazette a inauguré ce mercredi le Gazette Café : un nouveau lieu culturel à cent mètres à peine de la gare St Roch. Ce café littéraire-brasserie propose sur plus de 600 mètres carrés différents espaces : une brasserie où l’on peut manger de midi à minuit, un bar à vin bio, un salon de thé 100% bio, une salle de concert, de lecture, des expositions photos, peintures... des espaces de conférence, de débats, de rencontres littéraires, et de théâtre avec 100 places assises.
Dans une ambiance calme, vous pourrez consulter la presse, des livres et BD, (et certains à la vente : une vingtaine d’ouvrages représentant la sélection du mois, en liaison avec les librairies Sauramps), jouer à des jeux de société, regardez des documentaires, courts métrages... sur un grand écran, Le Gazette Café, un véritable lieu pour créer des liens, est situé au 6, rue Levat, plein centre, entre gare SNCF et Comédie, il est ouvert du mardi au samedi de 11h à 1h.
La Grèce se prépare à nationaliser son système bancaire et à introduire une monnaie parallèle, pour rester en mesure de payer ses dettes. Selon des sources au sein du parti au pouvoir SYRIZA, le gouvernement est décidé à maintenir les services publics opérationnels et à payer les pensions, plutôt que de rembourser un prêt de 458 millions d'euros qui devait être payé au FMI le 9 Avril. (Le 8 Avril, le Premier ministre Tsipras rencontre le président russe, Vladimir Poutine, à Moscou). Le pays ne dispose pas assez d'argent dans ses caisses pour payer cette échéance, et assurer en même temps le paiement des salaires et des prestations sociales dus le 14 avril, et sans aide de l’Europe, il ne pourra donc pas remplir ses obligations.
Nous sommes un gouvernement de gauche. Si nous devons choisir entre un défaut sur le FMI ou un défaut sur notre propre peuple, le choix sera vite fait.»
Ils veulent nous soumettre au rituel de l’humiliation et nous coincer. Il essayent de nous mettre dans une position où nous serons ou bien obligés de faire défaut à notre propre peuple, ou bien de signer un accord politiquement toxique pour nous. Si c’est leur objectif, ils seront obligés de se passer de nous. Nous allons fermer les banques puis nous les nationaliserons, et après nous émettrons des IOUs (investor owned utilities, des services publics détenus par des investisseurs) s’il le faut, et nous savons tous ce que cela signifie. Nous ne deviendrons pas un protectorat de l'UE. (…) Ils veulent faire de nous un exemple, et montrer qu’aucun gouvernement de la zone euro n’a plus le droit de réfléchir par lui-même. Ils ne pensent pas que nous oserons quitter la zone euro, ou que le peuple grec nous soutiendra, et ils se trompent sur ces deux points. »
Choisir de faire défaut au FMI, même pour quelques jours seulement, est une stratégie extrêmement risquée. Aucun pays développé ne l’a jamais fait (voir graphique) et même s’il devrait s’écouler une période de six semaines avant que la Grèce ne soit techniquement déclarée en faillite par le FMI, un tel processus pourrait échapper à tout contrôle et provoquer une réaction en chaîne sans précédent.
La Grèce est dans une position intenable. Même si le pays peut débourser les sommes qu’il doit au titre du mois d’avril, il doit 200 autres millions d'euros au FMI pour le 1er mai, et 763 millions supplémentaires pour le 12 mai.
Malgré un nouveau plan de 26 pages de nouvelles propositions soumis par le gouvernement de Tsipras, l'UE maintient ses exigences d’engagements concrets. On estime que les Grecs ont besoin de 19 milliards d’euros pour faire face à leurs échéances de cette année, ce qui implique que de nouvelles tensions pourraient apparaître dès cet été, et ce, même si le pays parvient à négocier un accord qui lui permettrait de subsister à ses besoins jusqu’au mois de juin.
Grèce : Le forfait hospitalier supprimé, embauches dans la santé
- Reuters
ATHENES, 2 avril (Reuters) - Le Premier ministre grec Alexis Tsipras a annoncé jeudi la suppression du forfait hospitalier de 5 euros et l'embauche de 4.500 employés dans le secteur de la santé.
Cette mesure s'inscrit dans le cadre des efforts entrepris par son gouvernement pour lutter contre ce qu'il qualifie de crise humanitaire en Grèce provoquée par les politiques d'austérité mises en oeuvre en échange de l'aide financière internationale.
Son annonce intervient toutefois en pleine période de négociations ardues entre Athènes et ses créanciers (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international), lesquels exigent des engagements clairs en faveur de la rigueur budgétaire pour poursuivre le versement de leur aide.
La suppression du forfait hospitalier ne devrait amputer les comptes publics que de moins de 20 millions d'euros tandis que les embauches ne devraient pas empêcher la Grèce de réduire comme promis les effectifs des fonctionnaires.
"Nous voulons faire passer le secteur de la santé du statut de victime des plans d'aide, de victime de l'austérité à celui de droit fondamental pour chaque habitant de ce pays et nous nous engageons à y parvenir à n'importe quel prix", a dit Alexis Tsipras, en dénonçant les "conditions barbares" dans les hôpitaux publics et la corruption dans le secteur.
Son gouvernement entend aussi uniformiser les systèmes de données afin de renforcer la transparence et d'effectuer des économies.
Dans son programme de réformes adressé mercredi à ses créanciers, la Grèce prévoit une refonte globale de son système de santé afin de garantir un droit universel à une qualité de soins. Elle évoque un impact budgétaire compris en 2,1 et 2,7 milliards d'euros, sans préciser s'il s'agit de dépenses ou de recettes liées par exemple à la lutte contre la corruption.
La Grèce consacre environ 11 milliards d'euros par an à son système public de santé, soit environ 5% de son produit intérieur brut (PIB), ce qui, selon Alexis Tsipras, est l'un des taux les plus faibles au sein de l'UE. En 2012, selon Eurostat, les dépenses publiques de santé de la Grèce représentaient 6,2% de son PIB, soit le taux le plus faible au sein de l'UE.
Plusieurs années de coupes drastiques dans les dépenses de santé ont détérioré la qualité des soins dans les hôpitaux publics grecs, fréquemment en proie à des pénuries de matériel et à des réductions de personnel.
Environ 2,5 millions de Grecs, sur une population d'un peu plus de 11 millions, ne disposent pas d'assurance santé, selon Alexis Tsipras.
"Tous les citoyens, après cette crise terrible, devraient avoir accès aux soins qu'ils soient assurés ou non", a dit le Premier ministre. "Nous n'accepterons pas l'exploitation de la douleur humaine." (Bertrand Boucey pour le service français)
"Démanteler le droit du travail ne créera pas d'emplois"
Samedi 04 Avril 2015 à 5:00
Propos recueillis par
Marion Rousset
Plusieurs chercheurs ont enquêté auprès des salariés afin d'éclairer le quotidien de l'entreprise. Il en ressort que les Français investissent aujourd'hui le travail d'un sens très important. Pour autant, le débat public n'accorde encore qu'une place marginale à cette question. La philosophe Dominique Méda, coauteur de cette étude — "Travailler au XXIe siècle" — analyse pour "Marianne" la quête de reconnaissance grandissante des salariés.
Marianne :Dans Travailler au XXIe siècle, l'idéal de « reconnaissance » chez les salariés est présenté comme une caractéristique du temps présent. Que recouvre ce sentiment très subjectif ? Dominique Méda : C'est d'abord une demande de respect minimal : la personne désire non seulement être vue, saluée, traitée comme un être humain, mais elle souhaite également que son avis soit pris en compte et que l'activité qu'elle réalise ne soit pas absurde, ne la transforme pas en pion ou en robot. Vouloir être reconnu, c'est aussi avoir envie que le contenu de son travail soit visible et permette d'être distingué des autres. Enfin, c'est espérer que cette contribution sera estimée à sa juste valeur, ce qui s'exprime par les promotions ou la rémunération notamment. Quel que soit le secteur, le métier ou l'activité, les attentes qui se portent aujourd'hui sur le travail - surtout parce qu'il manque - n'ont jamais été aussi fortes. Il est devenu un lieu dont on attend réalisation et expression de soi, de sa singularité, un lieu que l'on espère être un vecteur d'utilité, de sens et de contacts. Toute la question est de savoir si ces espoirs sont susceptibles d'être satisfaits... Nous avons rencontré de nombreux salariés qui ont le sentiment que leur travail est extrêmement utile ou qui sont fiers de ce qu'ils font au quotidien et qui sont heureux au travail.
Cependant, l'actualité est ponctuée par des images négatives de travailleurs en proie à un stress intense...
Certains se sentent moins reconnus que d'autres. Ce sont ceux qui racontent être transparents, avoir une activité absurde qu'une machine pourrait exécuter, faire des efforts non payés de retour, se défoncer et n'avoir aucune réaction, bien réaliser sa tâche et avoir moins que le voisin, se taper tout le travail invisible et, du coup, ne jamais rien obtenir... Toutes ces situations déclenchent un sentiment d'absence de reconnaissance qui peut devenir pathologique.
Les Français, nombreux à accorder beaucoup d'importance au travail et à plébisciter son intérêt intrinsèque, occupent une place à part dans le paysage européen. Comment expliquez-vous cette spécificité nationale ?
Les Français ont en effet une position très spécifique. Ils sont toujours parmi les plus nombreux, en Europe et même dans le monde, à déclarer que le travail est « très important ». Cela regroupe 67 % de la population française, contre 45 % des Allemands par exemple. Avec l'économiste Lucie Davoine, nous avions expliqué ce phénomène par les hauts taux de chômage français - plus le travail manque, plus il est désiré - et par le fait qu'en France, sans doute plus qu'ailleurs, le métier exercé dit quelque chose du statut social, de la place que l'on occupe dans la société, des études que l'on a faites, du diplôme que l'on a obtenu... C'est un fort marqueur social.
Pour autant, ils veulent que le travail prenne moins de place dans leur vie... D'où vient ce paradoxe ?
Une partie de l'explication tient à la grande médiocrité des conditions de travail d'une partie des salariés. La dernière enquête de la Dares [Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques] sur les conditions de travail démontre, comme l'enquête européenne consacrée au même thème, que les salariés français ont moins d'autonomie dans leur travail, qu'ils connaissent plus de contraintes de rythme, sont moins satisfaits que beaucoup d'autres, que leurs relations avec les employeurs y sont moins bonnes qu'ailleurs. Mais l'explication n'est pas que négative : dans ce désir d'échapper au travail, les salariés expriment aussi le fait qu'ils ne se réduisent pas à l'état de travailleurs. Ils souhaitent notamment concilier leur activité professionnelle avec leur vie de parent, alors même que la famille revêt une très grande importance chez nous. Il y a de plus en plus de femmes avec enfants dans la population en emploi et de plus en plus d'hommes qui veulent prendre leur part à l'éducation des enfants.
Aujourd'hui, la question du sens du travail n'est plus considérée comme un enjeu majeur de la vie collective. Pourquoi ?
L'idée que c'est au sein du travail que la transformation sociale va s'organiser et que le mouvement ouvrier pourrait guider celle-ci a perdu beaucoup de terrain. Aujourd'hui, les collectifs de travail sont fragilisés et les attentes sont de plus en plus individuelles aussi parce que les modes de management les ont formatées ainsi. Surtout, les chiffres du chômage sont tellement catastrophiques que l'on n'ose plus parler des conditions ou du sens du travail, comme si c'était déjà bien d'avoir un emploi. Or, contrairement à tout ce que l'on nous raconte, les deux se tiennent : ce n'est pas en démantelant le droit du travail que l'on créera des emplois, ou alors ce seront des emplois de très mauvaise qualité qui alimenteront la spirale infernale de la dégradation des conditions de vie.
Pour le juriste Alain Supiot, si la question du rapport au travail des êtres humains a été évacuée, c'est aussi lié à l'histoire de la gauche politique et syndicale qui s'est rangée dès le début du côté du taylorisme. Qu'en pensez-vous ?
Il me semble qu'il faut remonter au-delà du taylorisme. Le ver est dans le fruit depuis Adam Smith et l'idée que c'est la grosseur de la production qui importe et rien d'autre. Les problèmes commencent à partir du moment où l'on se dit que ce qui prime, c'est l'efficacité. Ou, pour le dire dans mes termes, dès lors que le travail-facteur de production et créateur de « richesse » devient plus important que le travail-essence de l'homme et que, du même coup, le PIB comme le chiffre d'affaires apparaissent plus essentiels que l'activité même de travail. On connaît la suite : une compétition généralisée sur le coût et les normes du travail et la diffusion de plus en plus large des prescriptions de l'OCDE dès les années 80 consistant à vouloir baisser les salaires et à diminuer la protection de l'emploi.
Le management des années 80-90 a prétendu mobiliser les travailleurs comme individus. Avec, toutefois, des effets pervers...
Avec le posttaylorisme, les entreprises ont suggéré que le travail devait devenir un engagement, que l'initiative, si longtemps condamnée, devait désormais être libérée, que les salariés devaient s'investir, prendre la parole. Elles accompagnaient ainsi, voire suscitaient, les attentes de réalisation de soi de ces derniers. Mais la promesse n'a pas été tenue, car elles ont parallèlement développé des modes de management et des formes d'organisation du travail qui ont contribué à une autonomie très «contrôlée». Tout cela s'opérait dans un contexte de chômage accru, de réduction des effectifs, de réorganisation, d'accroissement des impératifs de rentabilité et de productivité.
Le travail peut-il encore se réinventer ?
Oui. Mais il faut pour cela aller jusqu'au bout, et notamment accepter vraiment l'initiative et l'autonomie revendiquées par les salariés et promises par les entreprises. Une très passionnante étude réalisée récemment par deux chercheurs qui ont exploité l'enquête européenne sur les conditions de travail montre que les organisations qui donnent aux salariés le plus de liberté dans l'accomplissement de leur travail sont en même temps les plus favorables au bien-être et à la qualité du travail. Ces formes sont bien plus répandues dans certains pays que dans d'autres. Ainsi sont-elles beaucoup plus nombreuses dans les pays nordiques, et plus généralement dans les pays qui présentent de hauts taux de syndicalisation. Qu'ils évoquent le bicaméralisme (1) ou la redéfinition de l'entreprise, de nombreux travaux issus de plusieurs disciplines proposent aujourd'hui de redonner vraiment la parole et du pouvoir aux salariés, à la fois sur les conditions de travail, mais aussi sur l'organisation et sur la production.
D'autres recherches annoncent l'avénement d'un monde collaboratif, sur le modèle des coopératives d'activité et d'emploi. Y croyez-vous ?
Ces travaux sont de différents types. Certains renouent avec les utopies du XIXe et du début du XXe siècle, au moment de la rédaction du premier code du travail, et l'idée de coopératives où les producteurs seraient associés. C'est ce que présentent Antonella Corsani et Marie-Christine Bureau, par exemple, dans leur livre intitulé Un salariat au-delà du salariat ? (2). C'est une piste très prometteuse et qui répondrait très certainement à un grand nombre d'attentes des salariés. Je suis moins convaincue en revanche par les travaux du genre de ceux décrits dans The Future Of Work de l'Aspen Institute. Ces travaux annoncent un changement de nature du travail censé devenir une passion, ne plus présenter de différence avec le loisir, se dérouler dans des organisations non hiérarchiques où chacun deviendra entrepreneur de soi ou autoentrepreneur. Le danger de ces dernières formules est grand : elles peuvent conduire à une diminution radicale de la protection des travailleurs, les risques étant pris en charge exclusivement par les individus, et à des formes d'autoexploitation. J'ai du mal à imaginer ce monde idéal où chacun coopère à une œuvre commune sur une plate-forme collaborative en dehors de toute coordination. Ne jetons donc pas trop rapidement le salariat qui constitue un accès à la protection sociale, et surtout à toutes les règles qui permettent de civiliser le travail en fixant sa durée ou ses conditions d'exercice.
En 1995, vous posiez la question de la fin du travail. Cette hypothèse est-elle démentie aujourd'hui ?
A la différence de Jeremy Rifkin, je n'ai jamais annoncé la fin du travail. Je formulais le souhait que le travail prenne moins de place dans nos vies individuelles et dans la vie sociale, de manière que nous puissions aussi développer d'autres types de liens essentiels et d'autres activités, politiques et citoyennes, familiales, amicales, amoureuses, de libre développement personnel. Pour moi, cela passait par une redistribution radicale du volume de travail disponible sur l'ensemble de la population active. C'est pour cette raison que j'ai toujours été une fervente partisane de la réduction de la durée légale du temps de travail à temps complet. Ce qui permettrait de réduire le temps de travail de certains et d'augmenter celui d'autres, notamment des personnes qui travaillent à temps partiel... Aujourd'hui, le partage du travail tel qu'il existe en France est d'ailleurs bien préférable à celui qui a cours en Allemagne où, à côté de temps pleins certes plus longs qu'en France mais principalement masculins, une myriade de temps partiels très courts et mal rémunérés sont réservés en priorité aux femmes. Le rapport de la commission spéciale de l'Assemblée nationale a récemment rappelé que la réduction du temps de travail est l'une des manières les moins coûteuses de faire reculer le chômage. Je reste persuadée que c'est aussi la condition de l'égalité entre hommes et femmes.
Travailler au XXIe siècle. Des salariés en quête de reconnaissance, de Maëlezig Bigi, Olivier Cousin, Dominique Méda, Laetitia Sibaud et Michel Wieviorka, Robert Laffont, 315 p., 20 €.
(1) Isabelle Ferreras, dans Gouverner le capitalisme ?, PUF, 2012, propose une réforme du mode de gouvernement de l'entreprise où le directoire est élu par la chambre du capital et la chambre du travail.
(2) Presses universitaires de Nancy, 2012.
Trois anciens responsables de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, en 2012, ont été mis en examen, vendredi 3 avril. Plus tôt dans la semaine, Guillaume Lambert, Philippe Briand et Philippe Blanchetier avaient été placés en garde à vue dans le cadre de l'affaire Bygmalion, qui menace l'ancien président depuis le printemps 2014, sans pour l'instant l'atteindre directement.
L'UMP est accusée d'avoir organisé un système de fausses factures pour que les dépenses de campagne de Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle de 2012 restent inférieures au plafond autorisé par la loi.
En clair : une partie des frais occasionnés par la campagne de M. Sarkozy n'était pas réglée par son association de financement, l'Association pour le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, comme cela aurait dû être le cas. Bygmalion, l'entreprise prestataire de la campagne, les facturait en réalité à l'UMP, au prétexte d'événements plus ou moins fictifs. Le principe permettait à la campagne de M. Sarkozy de ne pas dépasser le montant de dépenses autorisées, tout en bénéficiant de prestations (l'organisation de meetings notamment) indûment facturées au parti.
Officiellement, au lieu des meetings de campagne, ce sont donc des conventions thématiques organisées pour l'UMP qui ont été facturées. Les révélations successives dans la presse ont montré que ces dernières présentaient un coût largement exagéré, parfois même fictives, certains de leurs participants – des élus de l'UMP – n'en ayant aucun souvenir, comme le racontait Libération en révélant l'affaire.
Le coût réel des meetings de Nicolas Sarkozy, selon Mediapart
Le bleu foncé représente les montants officiellement déclarés par le candidat UMP à la commission des comptes de campagne. Le bleu clair correspond au montant des frais cachés présumés, répertoriés par Mediapart.
Ce présumé montage financier n'a pas empêché la défaite de M. Sarkozy. En outre, le Conseil constitutionnel, confirmant une décision de la Commission nationale des comptes de campagne et du financement de la vie politique, avait invalidé en juillet 2013 les comptes du candidat de l'UMP, constant un dépassement des plafonds de dépenses autorisés – ce qui avait annulé le remboursement des frais de campagne.
Mais les « sages » semblent avoir été loin du montant réel des dépassements : 18 556 175,95 euros de fausses factures, selon les conclusions de l'enquête préliminaire dont Le Monde a pu prendre connaissance. Soit une campagne au coût total d'environ 41 millions d'euros, bien au-delà du plafond légal de 22,509 millions d'euros.
La société Bygmalion a longtemps été dirigée par Bastien Millot, très proche de Jean-François Copé – elle est aujourd'hui dirigée par Guy Alves, chef de cabinet de M. Copé quand ce dernier était ministre du budget (2005-2007), qui lui a confié l'intégralité de la communication du parti à partir du moment où il en a pris la tête, en 2012.
Son chiffre d'affaires est passé du néant à 20,1 millions d'euros entre 2010 et 2012 grâce à la dernière campagne présidentielle.
Depuis l'automne, les enquêteurs de l'Office central de lutte contre les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) ont entendu plusieurs anciens cadres de l'UMP, de la campagne de Nicolas Sarkozy et de Bygmalion, afin de déterminer les responsabilités des uns et des autres.
Jérôme LavrilleuxTémoin assisté
Il était directeur de campagne adjoint de Nicolas Sarkozy et ex-directeur de cabinet de Jean-François Copé à l'UMP. En mai 2014, au bord des larmes à la télévision, il avait le premier reconnu des « dérapages » financiers pendant la campagne.
« Il y a eu des factures présentées à l'UMP qui correspondaient à des dépenses faites pour la campagne, une manière de ventiler comptablement ces dépenses », a-t-il expliqué aux enquêteurs, selon les informations recueillies par Le Monde. C'est lui qui a imposé Bygmalion à l'UMP pour assurer la communication et, surtout, qui aurait proposé le système frauduleux, a affirmé aux enquêteurs le directeur adjoint d'Event & Cie, Franck Attal :
« [Début avril], ils me disent que le rythme des meetings va encore s'accélérer mais qu'il y a un problème d'ordre financier lié au plafond de campagne qui va être complètement dépassé. Jérôme Lavrilleux propose alors de facturer des prestations relatives aux meetings de campagne sur des conventions UMP. Il me demande donc de faire des fausses factures. J'ai l'impression que tous les participants à cette réunion sont piégés. »
Nommé directeur général de l'UMP en 2008 après le départ de Nicolas Sarkozy pour l'Elysée, ce très proche de l'ancien chef de l'Etat était surnommé « l'œil de Moscou » ou, sans ambiguïté, « l'œil de Sarkozy ».
Selon Jérôme Lavrilleux, interrogé par les enquêteurs, c'est lui qui aurait organisé le système :
« Fin mai 2012, (...) Eric Cesari et Fabienne Liadzé [alors directrice des ressources de l'UMP] m'ont indiqué alors qu'il était impossible de mettre toutes les dépenses dans les comptes de campagne et qu'il faudrait donc ventiler le surplus des dépenses sur le compte de l'UMP. Je ne peux pas vous dire si c'était l'idée de M. Cesari ou s'il me transmettait la décision prise par un tiers. »
Fabienne LiadzéMise en examen
A la fois directrice financière de l'UMP et responsable du pôle finances de la campagne de 2012, elle est accusée par Jérôme Lavrilleux et Bygmalion d'avoir participé à la fraude comme « exécutante ». Mise en examen pour abus de confiance et faux et usage de faux en octobre 2014, elle aurait réalisé elle-même les fausses factures avec le comptable de Bygmalion, à en croire la version des faits de Franck Attal.
Pierre ChassatMis en examen
Il était directeur de la communication de l'UMP, et directeur adjoint du cabinet de Jean-François Copé, aux côtés de Jérôme Lavrilleux. Mis en examen pour abus de confiance et faux et usage de faux, sa signature aurait été nécessaire pour valider les factures des conventions thématiques qui ont servi à couvrir les dépenses de la campagne présidentielle – ce qu'il dément.
Guillaume LambertMis en examen
C'était le directeur de la campagne de Nicolas Sarkozy. Selon nos informations, il était la « courroie de transmission » entre la réunion stratégique quotidienne de la campagne et l'UMP.
Jérôme Lavrilleux témoigne notamment du fait que MM. Lambert et Attal (patron d'Event & Cie) lui ont explicitement indiqué « qu'il était impossible de mettre toutes les dépenses dans les comptes de campagne et qu'il faudrait donc ventiler le surplus des dépenses sur le compte de l'UMP ».
Philippe BriandMis en examen
C'était le trésorier de campagne. Aujourd'hui député et maire UMP dans l'Indre-et-Loire, il dément fermement avoir été au courant des fraudes, faisant valoir qu'il ne faisait que signer les chèques pour l'organisation des meetings, sans en être l'ordonnateur. « A aucun moment je n'ai donné d'ordre là-dedans. Je n'ai fait que valider les devis et les transmettre pour paiement », s'est-il défendu.
Philippe BlanchetierMis en examen
Il était le trésorier de l'association de financement du Club des amis de Nicolas Sarkozy. Egalement avocat de l'UMP, il a défendu Nicolas Sarkozy devant la Commission des comptes de campagne, qui avait invalidé les comptes de l'ancien président. On ignore ce qui lui serait précisément reproché.
Bastien MillotMis en examen
Cofondateur de Bygmalion, il est proche de Jean-François Copé, dont il a été le directeur de cabinet à Meaux. Sans nier l'existence des fausses factures, il a affirmé que Jérôme Lavrilleux n'avait « pas monté tout cela tout seul » et qu'il n'avait été « qu'un rouage dans une organisation plus large », sous-entendant que M. Copé aurait pu avoir été mis au courant par M. Lavrilleux de l'affaire. Bastien Millot a été mis en examen le 1er octobre 2014.
Franck AttalMis en examen
Patron de la filiale événementielle de Bygmalion, il a témoigné ainsi des pressions et des demandes du staff de campagne : « Je me souviens avoir rencontré, début avril, à l'UMP, Fabienne Liadzé [directrice des ressources de l'UMP], Jérôme Lavrilleux et Eric Cesari [...]. Et c'est là qu'ils me disent que le rythme des meetings va encore s'accélérer mais qu'il y a un problème d'ordre financier lié au plafond de campagne qui va être complètement dépassé. Jérôme Lavrilleux propose alors de facturer des prestations relatives aux meetings de campagne sur des conventions UMP. Il me demande donc de faire des fausses factures. »
Guy AlvesMis en examen
Autre cofondateur de Bygmalion, il a été mis en examen le 1er octobre 2014. Il justifie d'avoir accepté les fraudes pour pouvoir payer ses sous-traitants :« Je suis face à une demande de franchissement de la ligne jaune, c'est-à-dire accepter des fausses écritures. Mon choix est alors soit d'accepter ces irrégularités ».
Matthieu Fay
Comptable de Bygmalion, il a affirmé aux enquêteurs avoir facturé à l'UMP 35 conventions, pour environ 300 000 euros chacune. Il est ressorti libre de sa garde à vue, en octobre 2014.
Le président-candidat avait toutes les chances de connaître l'existence de ces fausses factures. Plusieurs éléments vont dans ce sens :
Une note de Pierre Godet, l'expert-comptable qui signait les comptes de campagne, adressée à Nicolas Sarkozy, le 26 avril 2012, soit cinq jours après le premier tour. Cette note mentionne que les dépenses prévisionnelles ou engagées pour le premier tour (18 399 000 euros) sont déjà supérieures au plafond autorisé (16 851 000 euros).
Un entretien entre le président-candidat et Jean-François Copé, alors patron de l'UMP. En témoigne un SMS de Guillaume Lambert à Jérôme Lavrilleux, déjà évoqué par Le Figaro, dans lequel le premier explique au second : « Nous n'avons plus d'argent. JFC en a parlé au PR [président de la République] ».
Jérôme Lavrilleux assure de son côté qu'il a gardé Nicolas Sarkozy et Jean-François Copé dans l'ignorance, « pour éviter les conséquences politiques prévisibles ».
L'UMP est pour le moins dans l'embarras. L'enquête préliminaire semble éliminer la piste de l'enrichissement personnel ou du détournement de la part du « clan Copé », mais indique bien qu'il s'agissait ici de financer une campagne présidentielle dont les budgets explosaient les plafonds autorisés.
L'information judiciaire ouverte pour « faux, usage de faux, abus de confiance et tentative d'escroquerie » pourrait déboucher sur d'autres chefs de poursuite, notamment celui de fraude électorale, passible de 3 750 euros d'amende et d'un an de prison.
Les grands groupes évoqués ici suivent la définition de l'Insee. Il s'agit des entreprises de plus de 5 000 salariés ou ayant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 1,5 milliard d'euros.
C’est une des stratégies les plus secrètes de la firme Monsanto, promoteur mondial des semences transgéniques : investir les différentes entreprises qui font de la recherche sur les abeilles. Aux Etats-Unis, les apiculteurs s’inquiètent de la politique du géant des OGM.
Après les semences, les pesticides, les engrais... Voilà que Monsanto s’intéresse à la pollinisation. Ou plus précisément, aux abeilles. Un tiers de notre alimentation dépendrait de leur patient travail, un service évalué à 153 milliards d’euros par an par une équipe de chercheurs de l’INRA.
Depuis quelques années, Monsanto s’intéresse à la mauvaise santé des abeilles, et explique vouloir les sauver à coup de recherche génétique. Le principal promoteur des plantes transgéniques débarque dans un contexte très difficile pour les apiculteurs.
Depuis la fin des années 1990 en France, et l’hiver 2006-2007 aux Etats-Unis, les essaims semblent victimes d’un mal mystérieux. Environ 30 % (presque un tiers !) des ruches meurent chaque année, sans explication apparente. Alors qu’une mortalité « normale » selon les apiculteurs, s’établit autour de 10 %.
Les scientifiques n’ont pas réussi à trouver une seule explication à ce « syndrome d’effondrement des colonies », mais un ensemble de causes qui provoqueraient la disparition des colonies d’abeilles :
des causes « pathogènes » comme certains parasites, virus ou champignons,
le manque de diversité génétique (les abeilles ont été sélectionnées pour leur productivité, mais sont moins adaptées à leur milieu),
le manque de nourriture dû à une agriculture intensive qui réduit la biodiversité,
les pratiques des apiculteurs, qui notamment aux Etats-Unis transportent les ruches à travers tout le pays pour polliniser les cultures et affaiblissent leurs essaims par ces voyages incessants,
enfin (et surtout ?) les pesticides : « Le catalogue des produits phytopharmaceutiques dénombre aujourd’hui 5 000 produits commerciaux dont l’utilisation selon des méthodes non autorisées est susceptible de provoquer des dommages irréversibles sur les colonies d’abeilles », indique un rapport de l’ANSES daté de 2008.
Monsanto rachète une entreprise de préservation des abeilles
Pour endiguer cette disparition, les recherches vont bon train. Et c’est là que Monsanto entre en scène. En 2011, la multinationale rachète Beeologics, une entreprise spécialisée dans la recherche et la production de solutions pour améliorer la santé des abeilles. « Notre mission est de devenir les gardiens de la santé des abeilles partout dans le monde », indique son site internet.
Dans un communiqué de presse la firme américaine justifie ce rachat : « Monsanto sait que les abeilles sont une composante clé d’une agriculture durable dans le monde. »
Beeologics a développé un produit à base d’ARN (une sorte de copie de l’ADN qui permet aux cellules de fabriquer les protéines dont elles ont besoin) pour lutter contre certains virus : « Une copie d’une séquence d’ARN du virus est introduite dans la nourriture des abeilles et leur organisme le perçoit comme un signal pour détruire le virus » explique Jay Evans, chercheur spécialiste de la génétique des abeilles au ministère de l’agriculture des Etats-Unis. Ce traitement, appelé Remebee, « réduit le syndrome d’effondrement des colonies », promet Beeologics.
« La technologie à l’air sûre et c’est un succès, c’est pour cela que Monsanto a racheté Beeologics », poursuit le chercheur, joint au téléphone.
Mais Christoph Then, vétérinaire, spécialiste des biotechnologies et ancien expert pour Greenpeace, ne partage pas cet enthousiasme : « Le procédé utilisé a été découvert il y a seulement quelques années. On ne connaît pas encore tous ses effets, il y a débat dans la communauté scientifique. » Surtout, Beeologics a testé les conséquences de son produit sur les abeilles, mais qu’en est-il sur d’autres organismes ? « L’ARN utilisé n’est pas stable et peut passer d’un organisme à l’autre, poursuit cet expert. Donc à ce stade, cette technologie n’est pas assez sûre pour être utilisée dans l’environnement. »
Pourtant au ministère de l’Agriculture américain, Jay Evans prédit déjà un bel avenir à ce remède pour les abeilles : « La technologie va se développer dans les prochaines années. » Beeologics espère même commercialiser un produit qui, grâce au même procédé, rendrait les abeilles résistantes au varroa, l’un de leurs parasites les plus destructeurs et contre lequel les apiculteurs sont de plus en plus démunis. Ce marché des traitements pour abeilles est dans doute minuscule comparé à celui des semences ou des pesticides, mais cela permet au moins à Monsanto de se racheter une image auprès de certains apiculteurs.
Un « sommet sur la santé des abeilles »
D’ailleurs, pour montrer son implication dans la protection des abeilles, Monsanto est allé jusqu’à organiser en juin de l’année dernière un « sommet sur la santé des abeilles »à son siège de Chesterfield.
Réunissant chercheurs, apiculteurs et industriels, l’initiative a étonné aux Etats-Unis. Au programme des discussions, les multiples causes du syndrome d’effondrement des colonies. A savoir la destruction des habitats et des sources de nourriture des abeilles, le varroa... et les pesticides.
- Siège de Monsanto à Chesterfield -
Au programme des discussions, les multiples causes du syndrome d’effondrement des colonies. A savoir la destruction des habitats et des sources de nourriture des abeilles, le varroa... et les pesticides.
Il s’agirait d’une belle opération d’enfumage, pour faire oublier que les pesticides sont les principaux responsables de la disparition des abeilles, estime l’association environnementale Pesticide Action Network. Elle dénonce les « efforts insidieux de Monsanto et des autres fabricants de pesticides pour discréditer les études scientifiques sur les impacts des pesticides sur les abeilles ». Selon elle, Monsanto tente de faire croire que les pesticides ne sont qu’un problème mineur et que c’est le varroa destructor, ce parasite des abeilles, qui serait la menace la plus sérieuse...
« Les abeilles dérangent, rappelle Henri Clément, porte-parole de l’UNAF (Union National des Apiculteurs de France), elles posent la question de la qualité de l’environnement. Elles sont des lanceurs d’alerte et ont été les premières touchées par les pesticides. »
Les néonicotinoides, nouveau danger
Surtout, remarquent les apiculteurs, l’apparition du syndrome d’effondrement des colonies coïncide étrangement avec la mise sur le marché d’une nouvelle classe de pesticides à partir des années 1990 : les néonicotinoides.. Produits par Bayer ou Syngenta (par ailleurs producteurs, eux aussi, de semences transgéniques), ils enrobent aussi les semences de Monsanto, notamment les graines de maïs.
Leur action consiste à attaquer le système nerveux central des insectes. Chez les abeilles, une étude a ainsi montré, pour un néonicotinoide couramment utilisé, qu’il désoriente les abeilles : elles ne retrouvent plus la ruche. « Cela entraîne un risque de disparition de la colonie », indiquent les chercheurs.
Ces pesticides affaibliraient aussi les défenses imunitaires des abeilles, indique une autre publication scientifique, les rendant plus sensibles aux parasites, aux maladies, ou au manque de nourriture quand la saison n’est pas clémente... Bref, ils seraient l’élément déclencheur, davantage que tous les autres facteurs responsables du syndrome d’effondrement des colonies.
Les soupçons sur ces pesticides nouvelle génération sont suffisamment étayés pour que l’Union Européenne ait décidé de suspendre l’utilisation de trois néonicotinoides pendant deux ans (depuis le 1er décembre 2013). Mais les apiculteurs demandent une interdiction ferme. « Les abeilles sont des empêcheurs de tourner en rond, un grain de sable dans l’engrenage de Monsanto », poursuit Henri Clément.
Monsanto continue de détourner l’attention. Par exemple, l’entreprise est fière de citer parmi les « co-organisateurs » de son sommet sur la santé des abeilles le Project Apis m, un programme qui déclare fournir du matériel aux laboratoires et proposer des bourses aux jeunes scientifiques. Mais surtout, il incite les agriculteurs à semer des plantes nourrissantes pour les abeilles en période de pollinisation. Une autre action pour « sauver » les abeilles, financée par Monsanto.
Monsanto rachète une firme stratégique du royaume des abeilles
Le congrès de Chesterfield a également été l’occasion pour l’entreprise de se faire des contacts intéressants. Autre « co-organisateur », le Honey Bee Advisory Council ou Comité de conseil sur les abeilles. C’est une organisation créée par Monsanto, qui se vante d’y réunir « des membres de l’industrie apicole, des experts et des membres du monde académique ». On y trouve notamment un ancien président de l’Association américaine des apiculteurs, mais aussi Gus Rouse, propriétaire de Kona Queen, la plus grosse entreprise de production de reines d’abeilles aux Etats-Unis. Une firme qui mérite la plus grande attention.
Située à Hawaii, Kona Queen produirait plus de 200 000 reines par an - le chiffre exact reste secret. Car ce marché ne compte que trois grands producteurs qui, pour des raisons de concurrence refusent de les dévoiler. Même avec les statistiques officielles, Danielle Downey, représentante du ministère de l’agriculture américain auprès des apiculteurs d’Hawaii ne peut faire que des estimations : « Environ 25 % des reines des Etats-Unis et 50 % des reines au Canada viennent d’Hawaii ».
L’Etat du Pacifique sous bannière étoilée profite de son climat favorable pour produire des reines presque toute l’année. « Ce sont les premières de la saison, les apiculteurs d’Amérique du Nord les font venir pour pouvoir développer leurs colonies plus tôt au sortir de l’hiver, raconte Danielle Downey. Avec l’apparition du syndrome d’effondrement des colonies, les apiculteurs ont de plus en plus besoin de reines pour remplacer les essaims perdus. La demande dépasse la production, et l’industrie est en pleine croissance ».
La production de reines est donc un secteur économique qui pourrait s’avérer de plus en plus rémunérateur, même s’il ne dépasse pas là pour l’instant quelques millions de dollars. Se rapprocher du principal producteur de reines des Etats-Unis permet aussi à Monsanto de mettre un pied dans la sélection génétique des abeilles, une des pistes aujourd’hui privilégiées par les chercheurs pour améliorer leur santé.
- Gus Rouse, fondateur de Kona Queen -
Dans une ruche, il n’y a qu’une seule reine, mère de toute la colonie. Son patrimoine génétique est de première importance. Depuis longtemps, les reines ont été sélectionnées pour leur productivité. Désormais, on les sélectionne aussi pour leur résistance à ces multiples facteurs responsables du syndrome d’effondrement des colonies. A Hawaii, « nous travaillons sur des abeilles résistantes au varroa par insemination artificielle », indique Danielle Downey.
Des abeilles transgéniques ?
Alors Monsanto envisage-t-il de créer des abeilles transgéniques ?...