Bernard Accoyer, président de l'Assemblée nationale, Paris, le 8 novembre 2011 (Philippe Wojazer/Reuters)
Ça m'ennuie beaucoup d'être d'accord avec Lionnel Luca, le député UMP niçois tendance Droite populaire... Mais le refus des députés, lundi, de suivre sa proposition de loi en faveur d'une baisse de 10% des indemnités des élus de la République est, à mon sens, une faute politique.
Lionnel Luca, suivi par trente autres députés allant du non-inscrit de droite Nicolas Dupont-Aignan à l'élu Europe Ecologie - Les Verts François de Rugy, a déposé un amendement rejeté après un débat décrit par l'AFP comme « bref et dépassionné ».
Les opposants à cette mesure parlent de « démagogie », de « gadget », de « populisme », et font valoir que l'économie réalisée, environ cinq millions d'euros par an, représenterait une goutte d'eau dans le déficit public français qui s'élève cette année à 98,5 milliards d'euros (3 123 euros par seconde, selon le compteur de la dette...).
Certains élus ont même fait valoir qu'ils travaillent beaucoup et méritent bien leurs indemnités (5 200 euros par mois), contrairement à certaines idées reçues, alimentées par l'absentéisme parlementaire et l'hémicycle vide pour certaines séances.
Effort européen
Toutes ces critiques sont sans doute valables, sauf qu'elles ignorent la dimension d'exemplarité de la mesure, et qu'en période de crise, surtout lorsque des sacrifices sont imposés à chacun, les symboles ont un sens.
Il est intéressant que l'initiative ait été prise par un des chefs de file de la Droite populaire, qui laboure sur les mêmes terres que le Front national. Ce dernier trouvera dans ce refus des élus de s'appliquer à eux-mêmes un sacrifice au moment où ils votent chaque semaine de nouvelles mesures de rigueur un argument de poids pour son « tous pourris ».
Lionnel Luca faisait valoir, sur son site, que sa mesure constituait « une occasion à ne pas gâcher pour réconcilier les Français avec leurs élus ».
Ce ratage est à rapprocher de la décision démagogique du dernier plan Fillon de « geler » les salaires des ministres et du président de la République. A six mois de la fin de la législature, c'est un geste vide de sens, à comparer avec la décision de nombreux gouvernements européens depuis un an de baisse de 5 à 15% les salaires des ministres et des hauts fonctionnaires. Partout, sauf en France.
Lionnel Luca avait sans doute de bonnes arrières-pensées politiques en prenant son initiative. Mais les députés, de droite comme de gauche qui ont rejeté son amendement, ont fait preuve d'une bonne absence de sens politique dans leur attitude.
Ils risquent de le regretter lorsqu'ils rentreront dans leur circonscription ce week-end, et se frotteront aux réactions de leurs électeurs sur les marchés...