resistanceinventerre - Ploutopia – 18/11/11
resistanceinventerre - Ploutopia – 18/11/11
radio-canada.ca - Vendredi 18 novembre 2011
Les indignés de Québec ont jusqu'à 8 h 30, ce matin, pour démanteler une structure en tôle à leur campement à la place de l'Université-du-Québec. La Ville de Québec a fait parvenir jeudi un avis aux manifestants d'Occupons Québec les sommant de retirer l'abri qui n'a plus rien de temporaire aux yeux des autorités municipales.
Des indignés ont déjà fait savoir qu'ils n'avaient pas l'intention de se plier à la demande de la Ville. Certains manifestants, dont Charles Fleury, menacent de s'enchaîner si la Ville tente de démanteler l'abri. « On pense qu'on pourrait s'enchaîner aux structures qu'ils désirent venir nous chercher », a-t-il affirmé.
La Ville soutient qu'elle demande seulement aux manifestants de respecter les règles. Des inspecteurs municipaux avaient déjà demandé aux indignés de démanteler un abri en toile installé au même endroit, pour des raisons de sécurité. Les manifestants se sont exécutés, mais la toile a finalement été remplacée par de la tôle. La Ville considère maintenant que la structure ressemble davantage à un cabanon qu'à un abri temporaire.
Le porte-parole de la Ville de Québec, Jacques Perron, précise toutefois qu'il n'est pas question de recourir à la force pour évincer les indignés. « Il n'est pas dans les intentions de la Ville de commencer à démonter les tentes. Nous sommes toujours dans un esprit de dialogue avec les indignés pour qu'ils démontent d'eux-mêmes leurs tentes », a-t-il précisé.
La Ville de Québec espère toujours que toutes les tentes et autres structures soient retirées du Jardin de Saint-Roch.
Du côté des indignés, on dit en avoir assez des « tergiversations » de la Ville de Québec. Ils déplorent que des inspecteurs se présentent chaque jour pour trouver un moyen de les déloger.
Aux U.S.A. des habitants des quartiers occupés par les Indignés manifestent contre le mouvement.
Depuis mardi dernier, les mouvement des Indignés aux Etats-Unis est entré dans une seconde phase de réactions de la part des milieux critiqués par ces manifestations spontanées. En effet, les municipalités et Etats américains, concernés par ces réunions publiques, se montrent désormais réactifs en communiquant dans les Médias au sujet des problèmes sanitaires, des agressions sexuelles et des morts occasionnées par le désordre qui règne au sein de ces manifestations prolongées.
Des maires réunissent leurs staffs. Sur tout le territoire américain de nombreuses attaques sont menées par les forces de l'ordre pour disperser le mouvement et restituer les places occupées aux passants et aux affaires. Le nouveau slogan est : "Le plus grand mouvement de ces dernières décennies veut-il résoudre les problèmes ou bien en crée-t-il ?"
La police de New York, armée de boucliers et de matraques, attaque les manifestants et en arrête des centaines. Ces forces de l'ordre ont édifié des barricades autour de Zuccotti Park, qui est le lieu où le mouvement est né aux U.S.A., pour empêcher les manifestants de se réinstaller. La volonté de faire table rase est évidente. Toutefois, à Washington des contacts plus pacifiés sont privilégiés par les Officiels.
On déplore plusieurs morts dans la population insurgée : un homme abattu à Oakland, un sans-abri décédé à Salt Lake City et un suicide dans le Vermont. On compte deux overdoses à downtown Portland et un abus sexuel à Philadelphia. Mais aussi des brutalités policières qui suscitent l'indignation croissante.
L'aspect le plus préoccupant est la crise sanitaire engendrée depuis deux mois par des foules de plusieurs milliers de personnes, qui vivent dehors ou sous la tente sans douches et peu de toilettes. Désormais, les forces municipales agitent cette raison et des présupposées "infections par des rats" pour effectuer des manoeuvres de type militaire, pour "nettoyer la place" selon leurs propos. Il y a 27, 8 tonnes de déchets qui entraînent des surcoûts que les municipalités ne manquent pas de mettre en avant dans les médias, certainement pour justifier leurs coups de force.
Par ailleurs, le mouvement des Indignés a perdu son plus large public. Les sondages montrent que seuls 18 % de la population encouragent encore le mouvement. Lundi, on a vu l'impensable : une manifestation de voisins indignés contre la manifestation des Indignés, qui rassemblait des centaines de résidents, commerçants et hommes d'affaires des quartiers occupés.
Finalement, un juge a décidé que les protestataires n'ont pas le droit d'installer leurs tentes dans les places et parcs publics. La police a donc accepté que les manifestants réintègrent le parc Zuccotti à New York, mais sans leurs tentes. Le but avoué est de mener ces manifestations vers un terme avant la fin de l'hiver.
Les Indignés répondent que : "Plus il y aura de réactions policières et plus d'autres Indignés viendront grossir le mouvement."
L'ancien directeur général des douanes, et futur directeur du budget, festoyant sur un bateau immatriculé au Luxembourg, puis prenant gentiment la pose à côté du marchand d'armes millionnaire, spécialiste des commissions et de l'évasion fiscale : c'est la dernière surprise de l'affaire Takieddine.
Pierre-Mathieu Duhamel, 55 ans, tout à la fois haut fonctionnaire (il a enchaîné les postes importants), homme politique de droite et «pantouflard» dans le privé, fête, en juillet 2002, sa toute récente Légion d'honneur sur le bateau de Ziad Takieddine, La Diva. Il est en compagnie de Thierry Gaubert, l'ami et l'ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy.
Ancien patron des douanes et secrétaire général de Tracfin, le service anti-blanchiment du ministère des finances (1996-1999), il sera promu cinq mois plus tard à la puissante direction du budget au ministère de l'économie et des finances. L'homme est aujourd'hui président du comité stratégique du géant de l'audit KPMG (lire son CV sous l'onglet «Prolonger»).
« J'ai été imprudent, je veux bien concéder ça, a commenté M. Duhamel, interrogé par Mediapart. Léger aussi, peut-être, mais ces photos sur un bateau ne font pas de moi un intime de M. Takieddine.»
L'imprudence s'est pourtant prolongée de 2002 à 2006, quand M. Duhamel, devenu directeur du budget, a accepté d'autres invitations de M. Takieddine, qui dissimulait alors la totalité de ses propriétés au fisc.
Des propriétés fréquentées aussi par le ministre du budget d'alors, Jean-François Copé, et sa famille. Comme nous l'avons expliqué ici, le marchand d'armes, résident fiscal en France, a réussi l'exploit de ne payer aucun impôt durant dix ans, malgré des biens estimés par lui à 100 millions d'euros – acquis grâce à une partie de ses commissions dans la vente des frégates à l'Arabie saoudite et des sous-marins au Pakistan.
Lors d'un entretien accordé à Mediapart, Pierre-Mathieu Duhamel a tenu à souligner que le directeur du budget n'a « aucune compétence fiscale » et « ne s'occupe pas des impôts des particuliers ».
Comme Jean-François Copé avant lui, M. Duhamel prétend, sans convaincre, qu'il ignorait l'activité de son hôte. « Je savais qu'il était à l'abri du besoin, et qu'il avait réussi dans les affaires, mais pas plus, dit-il. Je ne lui ai jamais demandé "de quoi vivez-vous".» Et son absence de curiosité a été partagée par sa compagne venue elle aussi chez M. Takieddine : « Nous n'avons pas parlé de ça », assure-t-il.
Le marchand d'armes a-t-il sollicité l'intervention du directeur du budget sur son dossier ou d'autres ? « Il ne l'a pas fait, répond M. Duhamel. Je vous fais observer qu'il connaissait quand même le ministre du budget. S'il avait eu un sujet de cette nature, ce que j'ignore, il était plus simple de s'adresser à lui. »
Alors qu'il a attiré à plusieurs reprises la curiosité des agents du fisc, M. Takieddine a réussi, semble-t-il, à éloigner les curieux. La force symbolique de son carnet d'adresses ne peut pas tout expliquer. Comme Mediapart en a déjà rendu compte, le marchand d'armes était en possession de dossiers présentant les litiges fiscaux de deux particuliers. Et dans l'un de ces dossiers, l'on a retrouvé, précieusement archivée, une lettre de M. Copé.
Une écoute judiciaire réalisée, le 20 juin 2011, révèle un échange sibyllin entre Thierry Gaubert et Ziad Takieddine à ce sujet.
— M. Takieddine : « Cinq contrôles fiscaux, jusqu'à maintenant. Cinq. »
— M. Gaubert : « Ah bon. »
— M. Takieddine : « Mais tu es, tu es où là ? »
— M. Gaubert : « C'est pas grave, je m'en occupe. Ok. »
— M. Takieddine :« Bon ok. D'accord. Ok. Ciao. »
Interrogé sur cet échange, M. Gaubert a déclaré ne « pas voir de quoi il s'agit ». « Je ne me suis pas occupé de la situation fiscale de M. Takieddine », a-t-il dit.
Si ses amitiés lui ont fait traverser les deux courants de la droite, Pierre-Mathieu Duhamel est considéré comme « l'un des hommes de Juppé passés chez Sarkozy ». C'est pourtant dans les Hauts-de-Seine, comme directeur général des services du département alors présidé par Charles Pasqua, qu'il rencontre Thierry Gaubert quand ce dernier « s'occupait de manière personnelle de la communication du maire de Neuilly ».
En 1987 et 1988, il avait été conseiller commun d'Alain Juppé et d'Edouard Balladur (ministre du gouvernement Chirac) et avait sympathisé avec Nicolas Bazire. Nicolas Bazire qu'il retrouvera d'ailleurs en 1999, lors d'un passage éclair comme secrétaire général du groupe LVMH, après avoir quitté la direction des douanes. Il est resté depuis proche de MM. Gaubert et Bazire, tous les deux mis en examen par les juges Van Ruymbeke et Le Loire dans l'affaire Takieddine.
Directeur adjoint du cabinet de Jacques Chirac à la mairie de Paris en 1991 – fonction qui le fera apparaître plus tard dans l'affaire des emplois fictifs –, M. Duhamel est propulsé directeur de la comptabilité publique en 1994-95 par Nicolas Sarkozy, ministre du budget. Mais il rejoint encore Juppé, premier ministre, en 1995, comme directeur adjoint de cabinet, avant d'être nommé patron des douanes en 1996.
« Les douanes conservent de toi le souvenir "d'un chef incontesté et respecté" qui obtint pour la France le siège de l'organisation mondiale des douanes », déclare son ministre Alain Lambert, lors de la remise de la Légion d'honneur à Duhamel, en novembre 2002, qui vante sa « discrétion confinant vite au secret et « sa fidélité en amitié comme en politique ». « Tu es un soldat », lui lance-t-il. On apprend au passage que M. Duhamel « n'aime pas le poisson », mais « ne s'interdit pas la pêche au gros sous les tropiques ».
C'est dans les années 2000 que M. Duhamel rejoint le clan Sarkozy. Il retrouve Nicolas Sarkozy aux finances, lorsqu'il devient directeur du budget. En 2006, c'est la galaxie sarkozyste qui le récupère, et l'intègre au groupe des Caisses d'épargne, dont Thierry Gaubert conseille le président d'alors, Charles Milhaud.
En 2007, alors qu'il devient maire UMP de Boulogne-Billancourt – il occupera cette fonction pendant un an, après la démission de Jean-Pierre Fourcade, maire de la ville depuis 1995 –, Pierre-Mathieu Duhamel lance un appel à voter Sarkozy, comme en témoigne cette vidéo :
Médiapart - 17 novembre 2011 |
Face à la nouvelle vague de licenciements et de suppressions d'emplois qui menace la France, du secteur de l'automobile jusqu'à celui de la banque, en passant par d'innombrables autres activités, Nicolas Sarkozy a choisi une détestable stratégie, celle de la dénégation. Jouant sur les mots, il a ainsi eu le front d'assurer jeudi matin qu'il n'y aurait «pas de plan social» chez PSA. En réalité, il y aura -envers et contre tout- des réductions drastiques d'effectifs, même si ce ne sera pas sous la forme de licenciements secs.
Cette hypocrisie élyséenne est d'autant plus choquante que la puissance publique dispose d'importants moyens d'action: les plus gros plans sociaux sont souvent annoncés par les entreprises qui ont précisément été le plus aidées par la puissance publique, à grand renfort de subventions prélevées sur les deniers publics et qui sont venues creuser l'endettement.
De fait, la vague de suppressions d'emplois qui a enflé depuis quelques jours est impressionnante. Le groupe automobile PSA a annoncé la suppression de 6.000 postes en Europe, dont 5.000 en France et tout particulièrement 2.000 dans le secteur de la recherche et du développement.
Au même moment, le même groupe PSA a annoncé la fermeture de son usine de Dannemarie (Haut-Rhin), spécialisée dans la fabrication de moteurs de scooters Peugeot, et prévoit des reclassements ou des départs anticipés pour les 140 salariés. Selon des documents adressés aux syndicats avant un comité central extraordinaire (CCE) prévu le 25 novembre, une quarantaine de salariés seraient reclassés dans l'autre site des scooters Peugeot à Mandeure (Doubs), selon l'AFP. Des reclassements dans d'autres usines du groupe, à Sochaux (Doubs) et Mulhouse (Haut-Rhin), et des départs anticipés sont prévus pour le reste des salariés, a expliqué le délégué CGT Emmanuel Guillier.
Outre la fermeture de Dannemarie, le groupe devrait annoncer lors de ce CCE la suppression de 60 emplois à Mandeure (environ 650 salariés actuellement), a ajouté le syndicaliste, précisant que l'intersyndicale se réunissait jeudi matin pour débattre de ce plan.
De leur côté, les grandes banques françaises ont annoncé ces derniers jours une cascade de suppressions d'emploi. BNP Paribas va ainsi supprimer 1.396 postes dans ses activités de banque de financement et d'investissement (BFI), soit environ 6,5 % des effectifs du pôle. C'est ce qu'ont révélé, mercredi 16 novembre, des représentants des syndicats SNB et CFDT de la banque, à l'issue d'une réunion avec la direction. Ces suppressions devraient intervenir à hauteur de 1.023 emplois à l'étranger et 373 en France.
La Société générale va faire de même, avec un plan social qui pourrait toucher environ 1.000 personnes, dont la moitié en France. Et ces mesures devraient être complétées par un plan d'austérité salariale.
Ces annonces ne donnent qu'une faible idée du séisme social qui est en train de s'enclencher. Ces entreprises sont très connues et leurs plans sociaux sont donc visibles et commentés. Mais au-delà, c'est toute l'économie française qui est actuellement en train de piquer du nez, du fait de la coordination européenne des politiques d'austérité, générant une violente contraction de l'emploi et donc une envolée du chômage, dont on ne connaît pour l'heure que les signes avant-coureurs.
Or, avant même ce nouveau choc, les chiffres récents du marché du travail étaient déjà détestables. Voici les derniers en date, ceux arrêtés à fin septembre :
Le chômage en septembre 2011 *(voir sur le site Médiapart)
Ces chiffres font apparaître que le chômage est en très forte hausse. Le nombre des demandeurs d'emploi de la catégorie A s'élève ainsi à presque 2,8 millions de personnes, et celui des demandeurs d'emploi des catégories A, B et C atteint désormais plus de 4,4 millions, en hausse de 4,7% sur un an. Et dans un marché du travail, qui est maintenant très déréglementé, tout se passe très vite : c'est sous la forme de fins de contrats à durée déterminée (en hausse de 9,7% sur les douze derniers mois se terminant fin septembre), ou de fins de missions d'intérim (+13,6%), que les entreprises réduisent leurs effectifs. En clair, il n'y a pas même besoin de plan social.
Derrière les plans sociaux très visibles de PSA, BNP Paribas ou encore de Société générale, il y a donc des souffrances sociales d'autant plus violentes qu'elles ne sont pas visibles. Pas de plan social, pas d'émotion publique : la société n'est pas même alertée de l'onde de choc de la crise. Tout juste devine-t-on quelques semaines ou quelques mois plus tard les dégâts que cela a occasionné. A cause de signes terribles : le nombre en progression de SDF dans la rue ; le nombre de pauvres ou d'exclus qui fouillent les poubelles...
La violence de « l'ajustement social » auquel la France est en train de procéder – en même temps que son invisibilité, ou du moins sa discrétion –, tout cela est confirmé par le « Portrait social » que l'Insee a publié cette semaine (lire Le triste florilège des inégalités françaises). On y apprenait ceci : « L'intérim a été la principale variable d'ajustement de l'emploi à l'activité entre 2008 et 2010. Entre le 1er trimestre 2008 et le 1er trimestre 2009, les effectifs intérimaires se sont contractés de 35 %. Le taux de recours à l'intérim s'est effondré dans les secteurs marchands, passant de 4,1% au 1er trimestre 2008 à 2,8 % au 1er trimestre 2009. Dès la mi-2009, l'intérim est reparti à la hausse. Ce redémarrage précoce de l'intérim se poursuit tout au long de 2010 (+ 96.000 intérimaires). Au total, sur l'année, l'intérim contribue pour plus des deux tiers aux créations d'emploi. Le dynamisme de l'intérim s'essouffle cependant au 1er semestre 2011 (+ 17.000 créations) et le taux de recours se stabilise à 3,8 %, soit légèrement en deçà de ce qui prévalait avant la crise. »
Le fait que l'intérim contribue pour plus des deux tiers aux créations d'emploi est un phénomène nouveau et spectaculaire. Par contraste, au début des années 1980, près de neuf emplois sur dix créés étaient des contrats à durée indéterminée (CDI). Or désormais, la part des emplois en CDI ne cesse de baisser, comme le détaille l'Insee : « Le taux d'emploi en CDI a ainsi atteint un point haut au 4e trimestre 2008,où il s'établissait à 50,5% de la population, puis il a diminué en 2009. La reprise de l'activité n'enraye pas tout de suite cette diminution: le taux d'emploi en CDI continue de baisser tout au long de 2010 et début 2011 (48,7% au 1er trimestre 2011) pour ne repartir à la hausse qu'au 2e trimestre 2011. »
Toutes ces indications, lourdes de drames sociaux, montrent clairement comment les choses se passent désormais : plus besoin, le plus souvent, de recourir à un plan social en bonne et due forme ! Puisque l'intérim occupe une place aussi importante, il suffit d'y mettre le holà, à chaque fois que la conjoncture se retourne ! Cette tendance est particulièrement à l'œuvre dans le secteur de l'automobile, où souvent les effectifs sont composés à près de 50% d'intérimaires.
Et face à ces politiques sociales iniques qui visent à développer seulement les emplois précaires (intérim, CDD, temps partiel), quelle stratégie a choisi Nicolas Sarkozy ? Celle effectivement de la complicité et du déni. A l'occasion d'une cérémonie à l'Elysée pour commémorer le troisième anniversaire du Fonds stratégique d'intervention (FSI – Lire Les errements du (hedge) Fund stratégique d'investissement), il a joué sur les mots. Evoquant la situation de PSA, il a souligné que son dernier « plan de compétitivité » n'était pas équivalent à un plan social : « Je me suis entretenu hier soir et ce matin avec Philippe Varin (président du directoire de PSA - ndlr) et je peux vous annoncer qu'il n'y aura pas de plan social en France chez PSA. » Voici ce qu'a dit Nicolas Sarkozy (à écouter à partir de 6'10'') :
Mais évidemment, c'était une galipette. Le chef de l'Etat a voulu suggérer qu'il n'y aurait pas de suppression d'effectifs, alors qu'en réalité, il n'y aura pas de licenciement. En clair, rien n'a changé, strictement rien. Et dans la phrase suivante, Nicolas Sarkozy, presque malgré lui, l'a admis : « En particulier, les 2.000 salariés du groupe les plus directement concernés par ce projet seront tous reclassés, soit à l'intérieur du groupe, soit à l'extérieur du groupe, notamment chez des prestataires. »
Ce tour de passe-passe est d'autant plus scandaleux que la puissance publique dispose naturellement d'énormes moyens de pression sur toutes les entreprises privées, et notamment les constructeurs automobiles et les banques. Ce sont en effet d'abord ces deux secteurs économiques qui ont été le plus aidés par le gouvernement, notamment en 2008, lors des différents plans de soutien à l'économie.
Les banques ont ainsi profité d'un plan portant sur un apport de 20 milliards d'euros en liquidité et 20 milliards d'euros en fonds propres. De surcroît, elles ont mis la main dans des conditions scandaleuses sur une bonne partie des fortunes qui sont collectées au travers du Livret A et qui ont été partiellement détournées de leur objet, le financement du logement social.
Dans le cas de l'industrie automobile, de l'argent, il en est tombé depuis 2008 comme à Gravelotte. Le portail Internet du gouvernement en dresse une liste (elle est ici) qui est très loin d'être exhaustive : prime à la casse de 1.000 euros par véhicule remplacé ; 1 milliard d'euros en soutien au crédit automobile ; 400 millions d'euros à la recherche développement et 500 millions d'euros d'aide pour les véhicules décarbonés ; 300 millions d'euros d'abondement, notamment par le FSI, pour les restructurations dans l'automobile...
Ce tableau impressionnant des cadeaux faits par le gouvernement aux entreprises, et notamment les plus grandes, n'est toujours pas terminé. A ces aides sectorielles, il faut aussi ajouter les aides générales. Ainsi dans le seul cas de la suppression définitive de la taxe professionnelle, effective depuis deux ans, on sait désormais qu'elle a été la réforme la plus coûteuse du quinquennat, puisque son coût est désormais évalué à 5 milliards d'euros. De même, on peut ajouter l'impôt sur les sociétés : comme l'ont révélé les travaux de la Cour des comptes, le taux légal d'imposition est de 33,3%, mais les grandes entreprises ne paient un taux effectif que de 12%, contre 30% pour les PME. Et le gouvernement tolère cela...
C'est d'autant plus choquant que, globalement, les entreprises se portent financièrement bien malgré la crise, et tout particulièrement les entreprises les plus grandes, dont celles du CAC40. Selon une étude du cabinet d'audit et de conseil Pricewaterhouse Coopers, publiée par Le Monde (17 novembre), ces entreprises du CAC40 devraient ainsi afficher un bénéfice insolent de 87 milliards d'euros en 2011, soit pas très loin du record historique de 101 milliards d'euros enregistrés en 2007. Ceci explique d'ailleurs cela : si les entreprises, malgré la crise, affichent de tels profits, c'est que l'ajustement social est en France particulièrement violent.
S'il le voulait, le gouvernement disposerait de nombreux moyens pour contraindre les entreprises à mieux partager les richesses qu'elles créent, un peu plus à l'avantage du travail, et un peu moins à l'avantage du capital et des actionnaires : soit en rendant conditionnelles les aides qu'il apporte à ces entreprises ; soit en instaurant une taxation en cas de recours abusif aux formes d'emplois précaires.
Mais visiblement, Nicolas Sarkozy a choisi de faire la sourde oreille. Pourquoi se gênerait-il ? Il se trouve même quelques hiérarques, dans la presse, pour l'applaudir en même temps que Michel Pébereau, la figure emblématique de BNP Paribas. Dans un remarquable esprit d'à-propos, un juré composé par quelques économistes de banque, de grands patrons et des responsables de la rédaction des Echos a eu ainsi l'idée d'attribuer mercredi soir au banquier, qui a souvent conseillé Nicolas Sarkozy, le « Grand prix de l'économie 2011 » (voir l'article ici). Sur son blog, l'éditorialiste Dominique Seux (il est là), applaudit à tout rompre, en faisant cette remarque « C'est un grand banquier », tout juste en l'agrémentant de ce codicille : « même si cela paraît une provocation ».
Vraiment ? Une provocation ? Mais puisque, parole de Nicolas Sarkozy, il n'y a pas de plan social...
Publié le 15-11-11 à 15:51 Modifié le 18-11-11 à 11:30 par Guillaume Malaurie
Pendant des décennies, des millions de tétines mises à disposition des mamans et de leurs nouveaux-nés dans les hôpitaux français ont été stérilisées en infraction avec la réglementation en vigueur. Plus précisément : ces biberons jetables ont continué d’être désinfectés avec de l’oxyde d’éthylène, un gaz classé en 1994 comme cancérogène avéré par le Centre international de Recherche sur le Cancer. "Le Nouvel Observateur" a mené l’enquête. Ses conclusions sont sans équivoque.
Depuis le début des années 1990, les réglementations françaises puis européennes excluent l’oxyde d’éthylène des procédés de stérilisation dès lors qu’il s’agit de "matériaux au contact des denrées alimentaires" (MCDA). Ce qui correspond très exactement à la définition des tétines. L’arrêté du 9 novembre 1994, qui précise lui-même un décret de 1992, stipule que "ces objets ne doivent pas altérer les qualités organoleptiques des denrées, produits et boissons alimentaires placés à leur contact" et que le "traitement désinfectant" doit donc être dûment "autorisé". Or l’oxyde d’éthylène ne fait pas partie de la liste des produits qualifiés […]
Les premières alertes remontent aux années 1970
Pour en avoir le cœur net, "le Nouvel Observateur" s’est procuré l’appel d’offres 2010 de la centrale d’achats de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) qui fournit des dizaines d’hôpitaux en France, dont les maternités de Robert-Debré, Necker-Enfants malades et la Pitié-Salpêtrière. L’AP-HP y estime ses besoins à 2.163.800 tétines et biberons stériles à usage unique, 45.500 téterelles (embouts en plastique facilitant l’allaitement) et 11.600 tétines et sucettes pour prématurés. Résultat ? Deux sociétés ont emporté le marché : Beldico, un groupe belge, qui a vendu les tétines pour prématurés, et le groupe français Cair. Leur méthode "exclusive" de stérilisation ? L’oxyde d’éthylène, comme il est indiqué sans faux-semblant dans leurs documents […]
Pourtant, les premières alertes remontent… aux années 1970. Plus précisément, le 7 décembre 1979, le ministre de la Santé Jacques Barrot signe une circulaire qu’il adresse aux préfets et aux administrations centrales suite au travail de son prédécesseur Simone Veil. Dans ce texte publié au "Journal officiel" le 10 janvier 1980, le ministre préconise de réserver l’usage de l’oxyde d’éthylène à des cas extrêmes, "si aucun autre moyen de stérilisation approprié n’existe". […]
Des troubles "pouvant évoluer vers la mort"
Si le ton est à la fois pressant, détaillé et comminatoire, c’est que le ministère avait été alerté sur les cancers dont étaient victimes les travailleurs exposés à l’oxyde d’éthylène sur des sites de production en Allemagne, en Suède, en Grande-Bretagne ou en Italie.[…] Dans la circulaire, Jacques Barrot énumère les "dangers inhérents à l’emploi de ce gaz" pour ce qui concerne "notamment des sondes, tubes et tous ustensiles en caoutchouc et matières plastiques" qui peuvent provoquer chez les patients des troubles "pouvant évoluer vers la mort".
La formule "danger inhérent" n’est pas une clause de style. En 1994, le Centre international contre le cancer de Lyon (OMS) a classé la molécule d'oxyde d'éthylène dans le groupe 1 des agents cancérogènes chez l'homme […] Et en janvier 2010, une lettre de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF), conclut que "l’utilisation de l’oxyde d’éthylène n’est pas autorisée pour désinfecter des objets destinés au contact des denrées, tels que les biberons." Copie du courrier est adressée à la Direction générale de la Santé (DGS) et à l’Agence française de Sécurité sanitaire des Produits de Santé (Afssaps).
Combien de bébés concernés ?
Et pourtant, combien de bébés sont aujourd’hui encore concernés? Ecartons d’abord ceux qui tètent des biberons vendus en pharmacie ou en grande surface, encore qu’un doute subsiste sur les modèles jetables. Reste que sur les 800.000 enfants qui naissent quasiment tous (98%) dans les maternités, 400.000 ne sont pas nourris au sein. Mais exclusivement aux biberons fournis par l’hôpital. Combien de maternités concernées au total ? Pas de réponse possible sans un inventaire national. Encore que Philippe Jacquin, directeur du développement du groupe français Cair, qui stérilise exclusivement à l’oxyde d’éthylène, donne un ordre de grandeur édifiant : "Pour l’année 2010, nous avons vendu en France 4 millions de tétines et 300.000 téterelles."
Les industriels du secteur refusent de s'expliquer
Ce n’est pas tout. Depuis des décennies, les grands industriels du secteur, qui vendent aussi du lait, des couches ou des petits pots, sont à la lutte pour fournir presque gracieusement puis à prix cassés les hôpitaux en millions de "nourettes". Les nourettes? Des mini-biberons à usage unique. […] Quatre majors se partagent ce vaste créneau : Guigoz (Nestlé), Blédina (Danone), Milumel (Lactel) et Sodilac, propriété de l’espagnol Ordesa. Comment font-ils stériliser nourettes et tétines commercialisées à prix d’ami dans les hôpitaux sous leur nom?
Force est de reconnaître que, en dépit de nos demandes répétées, les réponses sont embarrassées, souvent dilatoires et jamais étayées. A aucun moment ne nous a été fourni le relevé des méthodes de stérilisation utilisées ces dernières années. […] Certes, le secret industriel existe. Mais peut-on se borner à le brandir s’agissant d’interrogations portant sur la sécurité même des bébés ? Des nouveau-nés qui n’ont que quelques heures de vie, et dont les parents sont tout de même bien en droit de savoir si le caoutchouc qu’ils leur glissent entre les lèvres cinq à huit fois par jour est oui ou non conforme à la réglementation.
Guillaume Malaurie et Fabrice Nicolino – Le Nouvel Observateur
(Extraits de l'enquête "Ces bébés qu'on empoisonne", à lire en intégralité dans "Le Nouvel Observateur "du 17 novembre 2011)
Publié le 18-11-11 à 12:34 Modifié à 13:35 par Céline Lussato
Une vingtaine de Syriens se sont retrouvés, vendredi matin 18 novembre, devant le centre culturel syrien à Paris pour demander le départ de l'ambassadrice Lamia Shakkour, alors que la répression contre les manifestants en Syrie s'est encore durcie malgré les mises en garde de la communauté internationale contre Bachar al-Assad.
Rendez-vous était donné à 8h dans le quartier de l'ambassade en vue de protester devant la représentation officielle de la Syrie mais la présence policière renforcée a poussé les manifestants à transférer leur manifestation vers le centre culturel, non loin de là.
"Lamia Shakkour, demain ce sera ton tour", ont scandé les manifestants, confirmant hors slogan "de partir, c'est tout". Encerclés par les forces de l'ordre, les manifestants ont chanté, crié, pour demander le départ de celle dont ils affirment "qu'elle ne représente plus la Syrie en France mais seulement le clan Assad".
"Le peuple veut la chute du régime"
Ils ont aussi manifesté leur soutien aux Syriens qui descendent dans la rue chaque jour dans leur pays.
"C'est très important pour nous d'être là aujourd'hui alors que nos frères se font encore torturer et tuer dans notre pays", raconte une militante. "Tandis qu'Alain Juppé a rappelé l'ambassadeur français de Syrie, nous souhaitons qu'il demande également à celle qui dit représenter la Syrie en France de partir", souligne-t-elle.
En français et en arabe, les manifestants ont donc à la fois scandé "le peuple veut la chute du régime", "vive la lutte du peuple syrien" ou encore "Bachar assassin – Shakkour complice".
En face d'eux, de l'autre côté des forces de l'ordre, deux hommes qu'ils appellent "chabiha" – les hommes de main du régime – leurs font face. Des invectives s'échangent. Des menaces aussi. "Ils nous menacent de mort vous savez, ils n'ont peur de rien, même en France", confie un manifestant qui prend à témoin des policiers : "Vous protégez des assassins", dit-il.
Criminels
"Vous défendez une ambassade de criminels, les policiers syriens, eux, n'ont pas protégé l'ambassade de France en Syrie, ils l'ont laissé se faire attaquer", souligne un autre.
En fin de semaine dernière, le consulat honoraire de France à Lattaquié et la chancellerie détachée à Alep avaient en effet été la cible d'attaques.
Une fois le message passé, les manifestants décident tranquillement qu'il est temps de partir. Certains veulent réessayer de se rendre vers l'ambassade, mais d'autres leur objectent qu'ils ont fait ce qu'ils avaient à faire sans créer de problème. "Nous sommes pacifistes", nous dit-il.
En Syrie, d'autres manifestations ont lieu. Sous les tirs des forces de sécurité.
Céline Lussato – Le Nouvel Observateur
Lors de la manifestation anti-Assad à Paris vendredi matin (CL) |
LEMONDE.FR | 18.11.11 | 11h08 • Mis à jour le 18.11.11 | 12h38
Le Conseil avait estimé, le 30 juillet 2010, que le régime français de garde à vue n’était pas suffisamment protecteur des droits de la défense. Il avait donné un an au gouvernement pour revoir la loi, garantir le droit au silence et la présence d’un avocat. La loi a été finalement adoptée le 14 avril 2011, mais elle n’avait pas été soumise à un contrôle a posteriori du Conseil. La haute juridiction l’a jugé vendredi globalement conforme à la Constitution, en dépit des protestations des avocats qui estimaient qu’elle ne leur permettait pas une assistance effective de leurs clients.
Les avocats réclamaient un accès au dossier pendant les gardes à vue, le droit de s’entretenir librement avec leur client, d’assister à tous les actes, comme les perquisitions ou les reconstitutions, et ils contestaient au procureur le droit de retarder leur arrivée au commissariat. Le Conseil constitutionnel estime, lui, que la loi assure, "entre le respect des droits de la défense et l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée".
LE CONSEIL ÉMET UNE RÉSERVE
Restait le point un peu aveugle de l’audition sans avocat. Les enquêteurs ont le droit d’entendre librement et sans avocat une personne, pendant moins de quatre heures, s’il "n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction". (article 62 du code pénal). Si pendant l’audition, le témoin devenait suspect, il était alors placé en garde à vue.
C’est la seule réserve qu’émet le Conseil. Si "la personne soupçonnée ne fait l’objet d’aucune mesure de contrainte et consent à être entendue librement", l’avocat n’est pas obligatoire. En revanche, dit le Conseil, "le respect des droits de la défense exige qu’une personne à l’encontre de laquelle il apparaît, avant son audition ou au cours de celle-ci, qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction pour laquelle elle pourrait être placée en garde à vue" ne peut plus être entendue librement par les policiers, sauf si "elle a été informée de la nature et de la date de l’infraction qu’on la soupçonne d’avoir commise et de son droit de quitter à tout moment les locaux de police ou de gendarmerie".
En clair, on peut être entendu comme témoin – pendant moins de quatre heures, sans avocat ni garde à vue. Si le policier a tout à coup un soupçon, il se doit d’interrompre l’audition et dire clairement de quoi on est soupçonné et rappeler qu’on a le droit de partir. Le choix risque d’être cornélien : si le suspect veut partir, on peut le coller en garde à vue pendant au moins vingt-quatre heures mais il pourra bénéficier de la présence d’un avocat. S’il accepte de rester, il sera entendu sans avocat, mais moins de quatre heures.
AMERTUME DES AVOCATS
Le Conseil va encore plus loin : on peut entendre un suspect sans avocat même si on a des soupçons "avant son audition", et pas seulement si le soupçon est survenu pendant l’interrogatoire, comme le précisait la loi, à condition que la personne entendue soit d’accord. C’est le retour de "l’audition libre" que le gouvernement n’avait pu sauver en faisant voter le texte.
Evidemment le ministre de la justice est satisfait. Michel Mercier s’est félicité de la décision du Conseil et "constate que les travaux parlementaires ont permis de trouver un juste équilibre entre les deux exigences constitutionnelles qu’il avait constamment rappelées". Les avocats, en revanche, sont consternés. "Le Conseil a voulu ménager la sécurité juridique et la recherche des infractions, analyse Me Patrice Spinosi, qui défendait une QPC déposée par le barreau de Marseille. Il est même en recul sur la loi en réinstallant l’audition libre. Tout est parti, pour la garde à vue, de la Cour européenne des droits de l’homme. Tout finira là-bas."
Franck Johannès
Après l'accident de Fukushima, les experts en sûreté ont annoncé un changement radical de leur « doctrine » : il leur faut désormais « imaginer l'inimaginable ». En clair, imaginer des inondations, des séismes ou des accidents industriels a priori improbables, et regarder l'effet que ces aléas pourraient produire sur les centrales nucléaires françaises. C'est chose faite.
L'IRSN, appui technique de l'autorité de sûreté nucléaire (ASN), après l'analyse des rapports rendus par les exploitants du nucléaire (EDF, Areva, CEA...) dans le cadre des évaluations complémentaires de sûreté commandées à la suite de la catastrophe japonaise, a rendu ce jeudi ses conclusions (rapport, avis et résumé sont à lire ici). Le résultat est sans appel : les centrales, dans ces conditions, sont défaillantes.
Ces « stress tests » révèlent en effet que, dans « un certain nombre de scénarios extrêmes » (inondations, séismes...), les dispositifs « assurant tout ou partie des fonctions de sûreté essentielles pourraient être mis en échec du fait de la survenue d'agressions extérieures de grande ampleur ». Et en particulier si ces aléas entraînent une perte prolongée des sources d'énergie électrique – c'est ce qui s'est produit à Fukushima – ou des sources froides, indispensables au refroidissement du réacteur et de la piscine de combustible usagé.
« La protection de ces équipements de sauvegarde vis-à-vis des aléas environnementaux est dans certains cas insuffisante », écrit l'IRSN. Par exemple, les « filtres à sable », dispositifs de dépressurisation et de filtration de l'enceinte des réacteurs, qui doivent retenir le césium, un élément radioactif, en cas de rejet dans l'environnement, par exemple s'il y a fusion du cœur, « ne sont pas actuellement conçus » pour faire face à un séisme d'intensité imprévue.
Concrètement, s'il se produisait aujourd'hui en France un aléa naturel aussi improbable que le fut la conjonction du tsunami et du séisme au Japon en mars dernier, le système électronucléaire hexagonal ne serait pas en meilleure capacité de réagir que l'ont fait Tepco et les autorités japonaises. Pourquoi ? Parce qu'il est toujours régi par le postulat qu'« un accident grave ne peut être engendré par un phénomène naturel externe à l'installation », écrit le rapport. C'est ce principe historique que l'INRS veut bousculer en conduisant les exploitants à s'adapter à une nouvelle philosophie du risque autour de « noyaux durs » permettant se surprotéger un petit nombre d'équipements jugés essentiels.
« La sûreté n'est pas statique, on ne peut pas dire, parce que l'on demande des dispositions nouvelles, que les installations n'étaient pas sûres auparavant », précise Jacques Repussard, directeur-général de l'IRSN, avant d'ajouter: « Elles sont raisonnablement sûres mais il ne faut pas s'interdire de faire encore mieux. » Pour André-Claude Lacoste, président de l'ASN, « on est face à des investissements massifs » qui vont « prendre des années ».
Aujourd'hui, aucune installation hexagonale ne présente de danger imminent. Mais toute une série de fragilités ont été identifiées. Les problèmes se situent à plusieurs niveaux : non-respect du référentiel de sûreté, sous-estimation de certains risques naturels (crues de fleuves, séisme), et surtout : le vaste impensé du risque a priori « inimaginable ».
Or, c'est l'une des premières leçons qui semblent pouvoir être tirées de Fukushima, ajoute Jacques Repussard : « Les petits défauts apparamment anodins peuvent avoir des conséquences très graves. » Par exemple, les générateurs diesel, indispensables pour assurer l'alimentation électrique en cas de coupure d'accès au réseau, énergie elle-même indispensable au refroidissement du réacteur – pour éviter qu'il ne s'emballe –, ne disposent pas d'assez de réserve de fioul pour fonctionner longtemps.
Autre exemple : les batteries de secours des réacteurs ne sont pas étanches, ce qui pose un problème en cas d'inondation. Pour Jean-Christophe Niel, directeur-général de l'ASN, la nouveauté, c'est d'insister sur les risques de cumul d'écarts, plutôt que de les envisager indépendamment. « Ce ne sont pas des défauts majeurs mais en cas de situation grave, cela fragilise l'installation » car « cela réduit les marges disponibles », ajoute Jacques Repussard. C'est ce que les initiés appellent l'« effet falaise » : il suffit de pas grand-chose pour qu'une situation bascule.
De façon significative, cette critique du petit défaut pouvant contribuer, par accumulation, à la catastrophe, c'est exactement ce que dénoncent ces derniers mois certains agents EDF (voir notamment la tribune de Laurent Dubost sur un incident en salle des machines à la centrale de Belleville-sur-Loire).
L'IRSN publie ainsi ce graphique très intéressant : en vert, c'est le domaine de dimensionnement actuel pour lequel un bon niveau de défense contre les aléas est établi. En rouge, les zones à redéfinir. On y voit que plus la crise est grave, moins bonne est la protection contre les aléas.
Ce que les experts mettent en cause, c'est à la fois le manque de certains matériels et de réactivité, et la mauvaise remontée de certaines informations. Les sous-traitants sont-ils assez bien formés à la culture de sûreté ? En capacité de réagir comme il le faut en cas de problème ? Pour l'IRSN, la réponse n'est pas claire. Des agents de la centrale de Belleville-sur-Loire signalent à Mediapart la présence de personnel non francophone sur le chantier de leur dernier arrêt de tranche, et l'absence de traducteurs. Comment les uns se coordonneraient-ils aux autres en cas de problème ?
Pour Philippe Saint-Raymond, président du groupe permanent d'experts pour les laboratoires et les usines auprès de l'ASN, « sur toutes les installations, on constate des problèmes de conformité, petits ou plus importants ». Autre exemple, les salles de contrôle des centrales nucléaires « ne tiennent pas au séisme », et « le risque de toxicité chimique n'est pas pris en compte de façon suffisante ». Le risque terroriste n'a lui-même pas été envisagé par ces évaluations de sûreté. Quant aux sites d'Areva (dont La Hague et Melox, où se fabrique le désormais fameux Mox), s'ils sont bien dotés de moyens de gestion de crise, ils ne sont pas assez « robustes », explique Philippe Saint-Raymond.
Face à ses analyses critiques, l'observatoire du nucléaire, association fondée par l'ancien porte-parole de Sortir du nucléaire, Stéphane Lhomme, considère que « pour l'IRSN, les centrales nucléaires peuvent continuer à fonctionner... malgré leur sûreté défaillante ». C'est la règle du jeu de ces évaluations de « faire ressortir les points faibles majeurs », répond Jacques Repussard. Tous les yeux se tournent maintenant vers l'ASN qui doit rendre ses conclusions à partir des analyses de l'IRSN d'ici le début de 2012. Seules ses conclusions pourraient revêtir un caractère de contrainte. Au niveau européen, les autorités de sûreté doivent rendre un rapport commun pour juin 2012.
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