Leur dégradation, notre réponse: la perte, vendredi 13 janvier, par la France de son triple A financier rend d'autant plus pertinente et actuelle l'initiative prise par Attac en partenartiat avec Mediapart: l'organisation, dimanche 15 janvier, à Paris, d'une conférence internationale, initulée Leur dette, notre démocratie.
Dimanche 15 janvier, de 9 h 30 à 18 h, se tient donc à Paris une conférence internationale organisée par l'association Attac en partenariat avec Mediapart. Intitulée Leur dette, notre démocratie, cette université populaire abordera, en trois tables rondes et un intermède théâtral, la question des réponses citoyennes à la crise. Des indignés venus de Grèce, de Tunisie, d'Espagne, des Etats-Unis, d'Allemagne ou d'Islande participeront aux débats qui seront notamment conclus par Stéphane Hessel. Dans l'édition participative du Club de Mediapart consacrée à cette initiative (à lire ici), vous trouverez plusieurs textes de référence produits par Attac sur la crise financière et sa gestion catastrophique pour les peuples par nos actuels gouvernants.
Depuis sa création en 2008 et, surtout, depuis l'accélération de la crise historique que traversent nos sociétés, tout à la fois financière, sociale, démocratique, Mediapart appelle de ses vœux un sursaut populaire qui redonne force et vie aux idéaux de liberté, d'égalité et de fraternité. Certes, il va sans dire que nous souhaitons sans barguigner, comme le rappelle notre prochain ouvrage collectif Finissons-en!, suite et fin de N'oubliez pas!, tourner en 2012 la page d'une présidence sarkozyste catastrophique, accélératrice d'une dégradation nationale déjà advenue et dont le triple D se décline en division (du peuple par la désignation de boucs émissaires), destruction (du pacte social et démocratique issu du programme du CNR de l'après-guerre) et dépression (de l'esprit public d'un pays miné par la corruption, les privilèges et les oligarchies).
Mais, dans la diversité des approches de ses journalistes comme des sensibilités de ses lecteurs, notre journal participatif n'a cessé de rappeler que cette condition nécessaire ne sera pas suffisante pour inventer une réponse qui soit à la hauteur des défis que nous lance la réalité du monde dans l'affrontement incertain d'espérances nouvelles et d'inquiétudes profondes, entre progrès et régressions, guerres et révolutions, destructions et inventions, désastres et métamorphoses. Aboutissement extrême de la dérive présidentialiste qui dévitalise notre démocratie, cette présidence devrait nous avoir définitivement avertis qu'il ne suffira pas de changer de président pour changer le système qui est au ressort du déclin de notre République, ici entendue comme l'horizon toujours en chantier d'une exigence radicalement démocratique (c'est l'alerte d'un autre livre de Mediapart, Le Président de trop, paru en 2011 et présenté ici sur mon blog).
Si Indignez-vous!, le libelle de Stéphane Hessel conçu à la manière des brochures révolutionnaires qui accompagnèrent l'aube démocratique de 1789, a eu un tel succès, c'est qu'il portait cette invitation à prendre en charge notre destin nous-mêmes, dans l'engagement individuel et la solidarité collective. Ce fut l'invite d'un résistant de toujours à nous souvenir que nous sommes les premiers responsables de notre liberté et que, si les circonstances déterminent les hommes, les hommes font aussi les circonstances s'ils savent se dresser contre la fatalité et l'inéluctable, en faisant mentir une histoire qui serait écrite par avance. Dans le registre qui, professionnellement, est le nôtre – l'information –, c'est ce que Mediapart a voulu démontrer, en comptant sur ses seuls lecteurs pour dire non au journalisme de gouvernement et à la presse industrie (retrouvez ici et là nos engagements initiaux).
Chacun aura compris, avec ce rappel, pourquoi la rencontre entre Attac et Mediapart est naturelle. Née en 1998, aujourd'hui présente dans une cinquantaine de pays et comptant près de 10 000 membres regroupés dans plus de 170 comités locaux, l'Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (Attac) se définit comme « un mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action, considérant que le premier outil pour changer le monde est le savoir des citoyens » (pour tout savoir sur Attac, consultez son site ici). Soucieuse de pluralisme, ses adhérents relevant de diverses sensibilités partisanes ou intellectuelles, Attac a pour premier objectif d'impulser la réflexion dans une élaboration collective qui évite les pensées de système figées ou les systèmes de pensée rigides, se méfiant des sectarismes et des exclusives.
Attac illustre la vertu de l'entêtement et de la persévérance dans la fidélité au refus premier de l'inacceptable et de l'intolérable. Cette année 2012 commence ainsi par cette ironie de voir la mesure phare portée par l'association à son origine – une taxation des transactions financières, inspirée des travaux de l'économiste américain James Tobin – aujourd'hui reprise avec démagogie, voire muflerie par ceux-là mêmes qui n'ont cessé de la combattre, de la ridiculiser et de la piétiner (lire ici l'article de Laurent Mauduit sur le mensonge à ce propos de Nicolas Sarkozy). Faudra-t-il autant de temps pour que la dernière proposition lancée par Attac, totalement pertinente par sa rationalité et son efficacité, fasse son chemin jusque parmi des démagogues affolés par leur propre impuissance à juguler la crise ? D'emblée relayée par Mediapart, cette nouvelle campagne inaugurée à l'automne 2011 réclame un audit citoyen de la dette publique (lire ici l'article de Ludovic Lamant et là le texte de l'appel). Et combien de temps faudra-t-il pour que cesse de se déverser cette morgue qu'incarne jusqu'à la caricature l'entremetteur Alain Minc, cette boussole qui indique toujours le sud, lequel, non content d'avoir jugé « grotesquement psychologique » la crise à ses débuts, jette toute sa bile acrimonieuse sur cette indignation contre l'injustice qui n'a pas d'âge parce qu'elle sera toujours la jeunesse du monde (lire ici le billet où Laurent Mauduit lui réplique).
De même que nous avions accompagné – et que nous accompagnerons encore – le travail salutaire des « économistes atterrés » (lire ici nos premiers articles et là le compte-rendu de notre réunion publique), dont certains sont parallèlement animateurs d'Attac, qui ont tiré à temps un signal d'alarme sur la crise que n'ont pas voulu entendre des élites dirigeantes asservies au système capitaliste, Mediapart a donc accepté comme une évidence d'être partenaire de la conférence internationale organisée par Attac dimanche 15 janvier à Paris. C'est ainsi que Martine Orange, Ludovic Lamant et Laurent Mauduit animeront les trois tables rondes de la journée que j'introduirai aux côtés d'Aurélie Trouvé, co-présidente d'Attac.
Sous l'intitulé Leur dette, notre démocratie, ce sera une journée de réflexion et de discussion (de 9 h 30 à 18 h) autour de l'analyse de la crise, de ses causes véritables et des réponses possibles qui ne seraient pas une nouvelle capitulation devant le monde tel qu'il est et court à la catastrophe, et par conséquent un renoncement à le transformer. Susan George, du collège des fondateurs d'Attac, et Jean-Marie Harribey, de son conseil scientifique, tireront la conclusion des travaux en compagnie de Stéphane Hessel. L'entrée est libre, et en venant nombreux vous signifierez qu'au-delà de l'alternance par le bulletin de vote, vous souhaitez une alternative pour laquelle vous êtes disponibles.
Voici le programme complet de cette journée:
Conférence internationale
« Leur dette, notre démocratie »
Paris, 15 janvier 2012
Espace Reuilly, 21, rue Hénard, Paris XIIe
9h30-10h Introduction Edwy Plenel (Mediapart), Aurélie Trouvé (Attac)
10h-12h La dette publique contre les peuples
animation: Martine Orange (Mediapart)
– comment la dette publique est-elle instrumentalisée pour placer les pays (à commencer par la Grèce) sous tutelle de l'Union européenne et du FMI ?
– d'où vient-elle ? à quoi sert-elle dans le capitalisme d’aujourd’hui ?
– est-elle légitime, peut-on la restructurer et comment ?
– comment remettre la dette dans le champ du débat démocratique ?
Geneviève Azam (CS Attac), Marie Laurence Bertrand (CGT), Annick Coupé (Solidaires), Raquel Freire (Movimento 12 Março), Dominique Plihon (CS Attac), Chafik Ben Rouine (Comité pour l'audit de la dette tunisienne), Eric Toussaint (CADTM)
12h-13h Déjeuner
13h-15h Indignation et luttes citoyennes : comment dépasser les limites de la représentation ?
animation : Ludovic Lamant (Mediapart)
– quelle est la portée de la critique des banquiers et des politiciens par les Indignés, d’Europe et d’ailleurs ?
– de quelles pratiques démocratiques, de quelle nouvelle citoyenneté les mouvements de résistance à l'hyperaustérité sont-ils porteurs ?
– démocratie directe, délibérative, participative, tirage au sort : quelles innovations institutionnelles pour une souveraineté populaire active ?
Cristina Asensi (Movimiento 15M, Attac Espagne), Aris Chatzistefanou et Katerina Kitidi (réalisateurs de Debtocracy, Grèce), Isham Christie (Occupy Wall Street), Thomas Coutrot (Attac), Nicolas Haeringer (CS Attac), Yves Sintomer (politiste), Katrin Oddsdottir (membre de l’Assemblée constituante islandaise), Jean-Baptiste Eyraud (DAL)
15h-15h45 Le tribunal populaire des banques
(une coproduction théâtrale Naje-Attac)
Courte pièce satirique sur les délires et les dérives de la finance, coproduite par la Compagnie Naje (voir son site ici) et Attac.
16h-17h30 Quels remèdes à la crise démocratique européenne ?
animation: Laurent Mauduit (Mediapart)
– ils veulent accélérer l’intégration européenne pour rassurer les marchés : l’austérité permanente sous tutelle des agences de notation est-elle durablement compatible avec la démocratie ?
– pour une alternative à l'Union européenne : sur quelles bases refonder l'Europe, avec quelles forces ?
Max Bank (Attac Allemagne), Philippe Corcuff (sociologue), Bernadette Groison (FSU), Pierre Khalfa (Fondation Copernic), Frédéric Lordon (économiste)
17h30 -18h Conclusion : Susan George, Stéphane Hessel, Jean-Marie Harribey.