Depuis vendredi et jusqu’à aujourd’hui quelque 800 militants de l’association altermondialiste sont réunis à Toulouse. Très critique envers le nouveau gouvernement, elle s’apprête à mobiliser contre lui à la rentrée. Elle tente en revanche de faire une place aux mouvements sociaux comme les Indignés qui bousculent les organisations traditionnelles.
Peu après l’ouverture de son université d’été à l’université du Mirail, la direction d’Attac s’est rapidement introduite sur le terrain politique. En marge des ateliers thématiques elle a largement fustigé François Hollande. En jeu, la question du pacte budgétaire européen que le président alors candidat s’était engagé à renégocier notamment avec l’Allemagne. « Il n’a pas bougé d’une ligne et va être adopté tel quel. C’est un reniement grave », estimait Thomas Coutrot son co-président. Attac annonçait alors la mise en place d’une « campagne éclair » de mobilisation et de sensibilisation au mois de septembre notamment auprès des députés de la majorité.
« François Hollande a été élu sur des demi-mesures et il est en train de les appliquer à moitié »
« Nous vivons un basculement du monde »
Le mouvement créé n’accueille pas le nouveau gouvernement avec beaucoup d’espoir. « François Hollande a été élu sur des demi-mesures et il est en train de les appliquer à moitié. On attend rien de particulier de sa part », tranche Thomas Coutrot. Le mouvement espére malgré tout un assouplissement du traité « Merkozy » car pour Geneviève Azam, membre du comité exécutif d’Attac et professeur au Mirail, « il va entraîner la dislocation de l’Europe au moment où nous vivons un basculement du monde ».
Pour Aurélie Trouvé, co-présidente du mouvement, l’attitude du président de la République sur le sujet est un « signe politique » qui le place avec sa majorité « du côté des politiques d’austérité ».(audio)
Aurélie Trouvé, co-présidente d’Attac France by Bertrand Enjalbal
Le PS ? Pas un partenaire
Tout comme le Front de Gauche qui veut en faire un moment fort de la rentrée, Attac est favorable à un référendum sur la question du Traité Européen. Là encore, la changement de majorité ne les assure pas davantage de rencontrer une oreille plus favorable. « Nous n’avons pas de canal spécifique de discussion avec le Parti Socialiste, assure Thomas Coutrot. Il ne fait pas partie de nos partenaires habituels et maintenant qu’il est au pouvoir ça risque de l’être encore moins. Mais nous souhaitons instaurer un dialogue avec lui et le gouvernement ».
Le fossé pourrait même s’être creusé après plusieurs années de crise. Une période qui a obligé Attac à « dépasser la critique du néo-libéralisme pour aller vers la critique du capitalisme. Nous avons adopté aujourd’hui une position qui est celle du dépassement du capitalisme», juge son co-président.
« Il va falloir faire comme en Espagne ou en Grèce : un rapport de force illégal et extrêmement dur »
Indignés, Occupy vs syndicats
Finalement, la crise pourrait représenter une victoire des idées d’Attac et notamment celle qui entraîna sa création il y a quatorze ans : une taxe sur les transactions financières. Aujourd’hui elle « apparaît évidente y compris à des gouvernements conservateurs ». Mais pour le mouvement la lutte est loin d’être terminée. Elle est même en train de changer sur le terrain. Les mouvements sociaux autonomes comme les Indignés nés en Espagne ou Occupy obligent les militants à repenser les formes de mobilisation. C’est un des axes majeurs du rassemblement estival de Toulouse.
« Des nouvelles formes de résistance sont à inventer », estime Hugo Braun d’Attac Allemagne. Dans les ateliers on fustige souvent l’attitude des syndicats qui afficheraient bien trop de « méfiance » envers ces nouveaux mouvements sociaux. «Ils sont souvent menés par des jeunes, radicalement démocratiques et qui questionnent les organisations existantes comme Attac, avoue Thomas Coutrot. Notre rôle est de construire des ponts entre l’ancien et le nouveau. »
Dans les rangs on pointe également du doigt l’absence de coordination européenne. « La Confédération européenne des syndicats n’a rien fait, elle a longtemps été une maison de retraite luxueuse pour syndicalistes sans organisation, estime Alain du syndicat Sud. Les luttes intersyndicales sont moins souvent des luttes idéologiques que des luttes de places. Il faut le dire. On est scotchés par ce genre de choses. » Selon lui, « le déficit démocratique parlementaire touche aujourd’hui le politique et donc également les corps intermédiaires ».
Pour Sophie Banasiak des Indignés de Paris, ne renie pas les organisations syndicales mais à ses yeux mouvement social et organisations institutionnalisées sont antinomiques. Avec l’aggravation de la crise elle reste persuadée que l’avenir de la mobilisation passe par un mouvement tel que les Indignés.(audio)
Sophie Banasiak, des Indignés Paris by Bertrand Enjalbal
Pour Aurélie Trouvé, la période actuelle demande de « repenser la transition entre réflexion et action face à la violence des politiques d’austérité ». Les exemples espagnols et grecs ont montré la voie. « Il faut arrêter d’avoir cette incantation qu’une autre Europe est possible. Nous n’avons plus le temps de construire un rapport de force tranquillement, petitement. Il va falloir faire comme en Espagne ou en Grèce : un rapport de force illégal et extrêmement dur. »