Sivens, Notre-Dame-des-Landes, Roybon… Tous ces dossiers ont un point en commun : ils impactent des zones humides. Menacées au nom de la rentabilité et du profit économique, ces terres, véritables réservoirs naturels, risquent d’être les victimes de ces politiques d’urbanisation. Ce ne sera pas la première fois. « En France, près de 67% des zones humides métropolitaines ont disparu depuis le début du 20ème siècle, dont la moitié en 30 ans sur la période 1960-1990 », estime le rapport présenté par le préfet Paul Bernard [1]. C’était en 1994.
Entre terre et eau, les zones humides sont pourtant indispensables à la régulation de nos écosystèmes, partout dans le monde. Ce 2 février est leur journée mondiale. L’occasion de rappeler qu’elles sont en permanence menacées. Pendant des années, on a sous-estimé l’importance de ces ressources et transformé leurs espaces. L’urbanisation, l’extension de propriétés agricoles ou la déprise de certaines terres trop difficiles à cultiver ont entrainé des modifications dans les paysages et les fonctionnements de ces milieux humides quand ils ne les ont pas tout simplement détruits. Et l’hémorragie continue.
Particulièrement sensibles et fragiles, les milieux humides sont en grand danger en France et à travers le monde. Elles sont pourtant indispensables. « En premier lieu, ce sont des sources d’eau potable. Mais elles servent également pour l’agriculture : le riz, cultivé en rizière, est l’aliment de base de trois milliards de personnes. Ou encore pour la biodiversité : deux tiers des poissons commerciaux dépendent des zones humides côtières à un moment ou l’autre de leur cycle de vie », décrit Bastien Coïx, animateur du réseau Ramsar, une association mondiale chargée de labelliser les zones humides les plus importantes. Sans compter les nombreux services moins visibles qu’elles rendent : filtration et épuration des eaux – elles peuvent retenir certains engrais, pesticides ou métaux lourds –, contrôle des crues en agissant comme des éponges, limitation de l’érosion des sols… Autant de raison de veiller à leur préservation.
Impossible de savoir si leur destruction s’accélère, stagne ou ralentit car leur surface globale est inconnue. En France, seule une petite partie des milieux humides est répertoriée, notamment par le biais de la labellisation Ramsar : 43 sites comptabilisés en métropole et outre-mer en 2014 pour une surface de 3,55 millions d’hectares (plus grand que la région des Pays de Loire). « La plupart de ces sites ont été créés sur des aires déjà protégées en totalité ou en partie par d’autres statuts (Parc naturel régional, réserve de chasse, sites du Conservatoire du littoral, site Natura 2000, etc.) », rappelle France Nature Environnement.
Pour le reste, aucunes données officielles. Plusieurs cartes ont été modélisées par des équipes scientifiques, comme l’Inra d’Orléans et Agrocampus à Rennes [2] en 2008. Mais les milieux non-répertoriés restent particulièrement vulnérables : aucun statut ne les protège. « Tout bêtement, quand on construit un centre commercial. On aménage le centre, les accès, un parking… Tout cela, ce sont des zones qui potentiellement vont être détruite. Alors, je ne dis pas qu’il n’y a que des milieux humides, mais il y en a forcément ! », alerte Bastien Coïx.
Ce 2 février est l’occasion d’informer l’ensemble du grand public au sort des zones humides. Depuis 1997, la date de l’anniversaire de la signature de la convention internationale Ramsar, est désignée comme la journée mondiale des zones humides. « Le fait d’en parler permet d’éduquer et sensibiliser les gens pour qu’ils s’investissent et protègent ces milieux, que ce soit par des actions bénévoles ou de la communication, rappelle l’animateur du réseau Ramsar. La majorité des gens n’est pas au courant de tous ces services qu’elles nous rendent quotidiennement. »
Pour ces raisons, des animations [3] proposées par diverses associations environnementalistes, plus de cinq cents pour la plupart gratuites, sont organisées sur tout le territoire, durant tout le mois. Cette année, le thème « Des zones humides pour notre avenir », sera plus que jamais d’actualité.