Source : www.eauxglacees.com
L’annonce que « la réalisation du projet de barrage initial n’est plus d’actualité » par la ministre de l’Ecologie le vendredi 16 janvier 2015 signe un moment décisif d’une crise qui est par ailleurs loin d’être réglée sur place, puisque pro et anti-barrage vont continuer à s’affronter dès le lundi 19 janvier, après la présentation publique à Albi des deux solutions « alternatives » privilégiées par la deuxième mission d’expertise commanditée par Ségolène Royal, qui vient de rendre un nouveau rapport conclusif. Mais cette amorce de « sortie de crise » marque surtout en coulisses l’incertaine tentative de porter un coup d’arrêt à vingt ans de laxisme face au lobby agricole des gouvernements qui se sont succédés depuis l’orée des années 2000. L’arbre de Sivens ne doit pas cacher la forêt. Le gouvernement est aujourd’hui contraint, avec vingt ans de retard, (et sans pouvoir l’afficher officiellement sauf à mettre le feu aux campagnes), d’imposer une nouvelle doctrine en matière de gestion quantitative des ressources en eau pour l’agriculture en France, sauf à voir la Commission européenne, qui a engagé des poursuites contentieuses dans le dossier de Sivens, prendre ensuite argument de l’inadéquation de la doctrine française en matière de « gestion de l’eau en agriculture » pour ouvrir un nouveau contentieux pour non respect des obligations souscrites au titre de la mise en œuvre de la Directive cadre européenne sur l’eau du 23 octobre 2000. Procédure qui se conclurait par des amendes colossales…
C’est ce contexte explosif qui explique les nouvelles tensions qui vont se faire jour localement dès lundi. Au niveau du grand Sud-Ouest, si le Parti du maïs, le Lobby de l’eau et « l’état profond » PS qui les soutiennent obstinément depuis des décennies, doivent accepter la “nouvelle doctrine” en matière de gestion de l’eau en agriculture que les ministères de l’Ecologie et de l’Agriculture ont été contraints d’élaborer dans l’urgence depuis l’automne dernier - sous l’aiguillon du contentieux européen ouvert sur le dossier de Sivens -, c’est toute une “weltanschauung”, une logique économique dépassée (le modèle agricole productiviste), un mépris affiché de l’environnement et des pratiques politiques bien ancrées (chantage, coup de force et combinaziones…) qui seraient vouées à disparaître.
La ministre de l’Ecologie précisait dans le communiqué rendu public le 16 janvier avoir "validé" les deux solutions proposées dans le rapport d’expertise qui lui aurait été remis ce même jour : le premier scénario envisage "la réalisation d’un réservoir de taille plus réduite sur le site de Sivens" et le second inclut plusieurs retenues combinées, notamment en amont du site.
Ces scénarios feront l’objet d’un débat lors de la prochaine session, programmée avant la fin du mois de janvier, du Conseil général du Tarn, maître d’œuvre du projet, ajoutait le communiqué.
Ces nouvelles propositions "sécurisent les besoins en eau découlant du projet de territoire" et "répondent à l’objectif" d’un bon état des eaux, estime le communiqué, précisant que le rapport "établit à 750.000 m3 les besoins de stockage" d’eau. Et propose "un projet de territoire reposant sur des productions à forte valeur ajoutée et génératrices d’emploi local, et sur le renforcement des circuits de proximité". Ce qui "permet de maintenir des exploitations de taille familiale".
Depuis le drame de Sivens, deux missions d’expertise successives, diligentées par le ministère de l’Ecologie, ont travaillé à élaborer un scénario de « sortie de crise », sans pouvoir faire émerger un compromis, même après avoir formalisé à la mi-décembre cinq scénarios alternatifs, dont seuls deux sont désormais retenus.
L’abandon du projet initial de barrage a été vivement critiqué dès le vendredi 16 janvier par ses partisans, qui l’estiment nécessaire pour irriguer les terres agricoles alentour. "Rayer d’un trait de plume le projet pose des soucis : qui va payer les entreprises contractées ? Et ça veut dire qu’on est reparti pour quatre ou huit ans d’études, sans aucune garantie qu’il n’y ait pas encore une fois des zadistes" sur le site du nouveau projet, s’emporte Philippe Jougla, président de la FDSEA du Tarn, le syndicat agricole majoritaire grand défenseur du barrage.
S’affirmant "très suspicieux vis-à-vis des experts", il demeure partisan d’"un ouvrage à l’identique" avec pour seule transformation une réduction du volume d’eau alloué à l’irrigation. Tout en se déclarant prêt à soutenir un projet de barrage "réduit", mais toujours à Sivens, c’est-à-dire avec un volume d’eau d’1 million m3, au lieu d’1,5 million comme initialement prévu. Un scénario qui a également les faveurs de la chambre d’agriculture du Tarn.
Mais pas celles des « antibarrage » qui, s’ils se disent "satisfaits" que le projet initial soit "abandonné", refusent d’apporter "pour l’instant" leur soutien à l’alternative consistant à construire d’autres retenues.
"Nous demandons de nouvelles études et nous estimons qu’il sera démontré qu’aucun ouvrage ne sera nécessaire", a ainsi déclaré à l’AFP Ben Lefetey, porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet. Les opposants estiment en effet que les besoins en irrigation peuvent être satisfaits en utilisant les retenues collinaires existantes, des ouvrages de stockage d’eau construits par les agriculteurs eux-mêmes, et remplis par les eaux de ruissellement ou de pompage. S’il est prouvé que les besoins en eau ne peuvent pas être satisfaits par les retenues déjà construites, "alors, il faudra discuter d’un possible ouvrage". "Mais il faudra que ce soit le moins impactant pour l’environnement. Sinon, nous nous réservons le droit d’utiliser des recours en justice", conclut-il.
Il faut revenir en arrière, en amont du drame de Sivens, pour comprendre ce qui s’y joue aujourd’hui. En 2010 un bras de fer oppose les irrigants au gouvernement Fillon, qui devait, après le Grenelle de l’environnement, en application de la loi sur l’eau du 30 décembre 2006, et en cohérence avec la mise en oeuvre de la Directive cadre européenne sur l’eau (DCE), mieux encadrer l’usage de l’eau en agriculture.
En 2011, la présidentielle approche, Nicolas Sarkozy lâche que “l’environnement ça commence à bien faire”… NKM élabore un programme de relance de l’irrigation. Bruno Le Maire, ministre de l’Agriculture prépare deux décrets qui réouvrent en grand les vannes, en autorisant le financement des barrages et retenues collinaires sur fonds publics, sous couvert “d’adaptation au changement climatique”. Les décrets sont publiés au JO par François Fillon le dimanche du second tour de la présidentielle qui consacre la victoire de François Hollande… Peu après sa nomination comme ministre de l’Ecologie, Delphine Batho établit un moratoire sur ces deux décrets, et refuse d’accorder une dérogation au projet de Sivens, qui était opportunément ressorti des cartons, à la faveur du plan “Sarkozy-Fillon-NKM-Le Maire” de relance de l’irrigation.
Mais, sous la pression de la FNSEA, Jean-Marc Ayrault réouvre le dossier dès novembre 2012, et confie la réalisation d’un rapport à Philippe Martin, alors député et président du Conseil général du Gers.
Le “rapport Martin”, entièrement rédigé par un certain Philippe Quévremont, Ingénieur des Ponts et des eaux et Forêts, membre du CGEDD, qui avait déjà signé fin 2011 un précédent rapport qui prônait la relance massive de l’irrigation dans tout le Sud-Ouest, est remis à Jean-Marc Ayrault le 5 juin 2013. Il dissimule la réouverture des vannes de l’irrigation en la déguisant sous l’appellation de “projet de territoire pour la gestion équilibrée de la ressource en eau”.
Le Comité national de l’eau, organe central des turpitudes du Lobby de l’eau, crée un groupe de travail ad hoc qui a pour mission de valider la nouvelle doctrine pro-irrigation, sous cette appellation fallacieuse de “projet de territoire”. Une démarche cruciale car c’est cette nouvelle “doctrine” qui doit permettre à la France de se justifier, en cas de contentieux européen, à l’heure où les irrigants, dans toute la France, exigent la construction de centaines de nouveaux ouvrages.
Entretemps de nombreuses ONG de défense de l’environnement, au premier rang desquelles FNE, dénoncent le rapport Martin, qui a surtout permis d’enterrer en grande pompe un autre rapport, qui venait lui aussi d’être tout juste adopté par le Conseil économique social et environnemental (CESE), et qui prônait une toute autre approche de l’usage de l’eau en agriculture, puisqu’il défendait un nouveau modèle agricole respectueux de l’environnement…
Philippe Martin succède à Delphine Batho le 4 juillet 2013. Sa première décision officielle, un décret publié au JO le 15 juillet, repousse de deux ans la date-butoir à laquelle les irrigants devaient avoir créé des Organismes uniques, censés faciliter une meilleure régulation de l’usage de l’eau en agriculture…
Rebaptisé “Partager la ressource en respectant les milieux naturels aquatiques”, le concept de “projet de territoire” resurgit dans un document de 6 pages rédigé par des haut-fonctionnaires du ministère de l’Agriculture en juin 2013, document qui va cadrer les débats de la table ronde sur l’eau qui se tiendra à la 2ème Conférence environnementale les 20 et 21 septembre 2013, au palais d’Iéna à Paris.
Les 60 participants à cette table ronde, désignés par le gouvernement, qui n’auront chacun que deux minutes pour s’exprimer, dont de nombreux représentants de la FNSEA et de l’APCA, sont invités à valider le concept de “projet de territoire”. Le compte-rendu de la table ronde est repris dans un document publié trois jours plus tard sur le site internet de Matignon, document qualifié de “Feuille de route de la 2ème Conférence environnementale”.
C’est en s’appuyant sur ce document, sans aucune valeur légale, que Philippe Martin, reprenant le concept de “Projet de territoire pour la gestion équilibrée de la ressource en eau” dans un courrier qu’il adresse aux directeurs des Agences de l’eau le 11 octobre 2013, met un terme au moratoire de Delphine Batho.
Son courrier autorise en effet les agences de l’eau à financer à nouveau des projets de barrages er de retenues collinaires, sous réserve qu’ils répondent aux caractéristiques des “projets de territoires” définies par le véritable auteur du rapport Martin, Philippe Quévremont, orientations reprises par les hauts-fonctionnaires du ministère de l’Agriculture, favorables à l’irrigation, qui ont préparé la table-ronde sur l’eau de la Deuxième conférence environnementale, co-présidée par Pascal Canfin (qui y déclarera benoitement qu’il n’y connait rien !) et… Stéphane Le Foll.
Ensuite le groupe de travail ad hoc du Comité national de l’eau va “figer” ces préconisations, qui vont devenir les tables de la loi, et faire figure de nouvelle doctrine française pour l’usage de l’eau en agriculture, à la plus grande joie de la FNSEA…
Et c’est donc cet intense lobbying qui permet de relancer de manière accélérée à la fin de l’année 2013 la construction du barrage de Sivens, enlisé depuis la fin 2012 après le refus de Delphine Batho d’autoriser le lancement des travaux par dérogation.
On ne l’apprendra qu’après le drame, mais l’action de l’eurodéputée EE-LV Catherine Grèze, évoquée dans Le Monde le 19 novembre, puis dans Reporterre le 20 novembre 2014, établit sans équivoque la responsabilité du gouvernement dans le drame de Sivens
Dès 2011, bien avant que le projet contesté de barrage ne fasse l’actualité, alertée par les premiers opposants qui le combattent, Catherine Grèze interpelle la Commission européenne, l’alertant sur les innombrables manquements du dossier. Interpellations qu’elle va réitérer à six reprises jusqu’en 2014.
En novembre 2013 la Commission interpelle la France, dans le cadre d’une procédure pré-contentieuse EU-Pilot, et lui demande de lui apporter toutes les garanties que le projet respecte les réglementations française et européenne. Par l’intermédiaire du Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE), rattaché à Matignon et compétent en la matière, la France répond quatre mois plus tard à la Commission, et lui adresse un memorandum de huit pages, en défense du projet, daté du 7 mars 2014.
Le 28 juillet 2014, la Commission européenne notifie au gouvernement français qu’elle considère que ses réponses n’apportent pas les garanties du respect des directives européennes. Ce qui ouvre la porte à une procédure d’infraction.
Cette procédure, plus que probable dès le mois d’août 2014, à la lumière de la réponse de la Commission, rendrait impossible le financement européen du projet qui représentait plus de 2 millions d’euros, soit 21 % du financement global du projet de barrage.
L’attitude du gouvernement apparaît rétrospectivement totalement scandaleuse, puisqu’il était non seulement parfaitement informé qu’une procédure de pré-contentieux instruite par la Commission avait toutes les chances d’aboutir, mais qu’il aura nécessairement défendu ce projet dans la note adressée le 7 mars 2014, via le Secrétariat aux affaires européennes, directement rattaché à Matignon, aux services de la Commission.
Rappelons que le périmètre et la composition du « gouvernement de combat » de M. Manuel Valls n’ont été rendus publics que le 1er avril 2014. Jusqu’à cette date le ministère de l’Écologie, dont les services ont obligatoirement été saisis pour alimenter la réponse adressée le 7 mars 2014 par le Secrétariat aux affaires européennes à la Commission, était dirigé par un certain... Philippe Martin.
De fait, après le drame, la Commission européenne annonce, le 26 novembre 2014, l’ouverture d’une procédure d’infraction contre la France pour non-respect de la législation européenne dans le cadre du projet de barrage de Sivens. Déclarant que « sur la base des informations dont elle dispose, les autorités françaises ont lancé le projet nonobstant la détérioration de l’état écologique de la masse d’eau qu’il est susceptible d’entraîner. »
La crise provoquée par le drame de Sivens dépasse dès lors très largement les rives du Tescou et le département du Tarn.
Le gouvernement doit trouver une issue à l’affaire de Sivens, qui continue localement à exacerber les tensions, puisqu’aucun consensus n’a pu se faire jour autour d’une alternative acceptable par les pro et les anti-barrages.
Mais le véritable enjeu est ailleurs. La Commission européenne a engagé une procédure contentieuse contre la France dans l’affaire de Sivens. La France doit apporter une première réponse à la Commission avant la fin du mois de janvier 2015.
Idéalement il faut pouvoir faire valoir auprès de la Commission qu’une solution satisfaisant aux contraintes de la DCE a été acceptée localement par toutes les parties prenantes, c’est le motif du communiqué de Ségolène Royal du 16 janvier, de la réunion organisée à Albi le lundi 19 janvier, puis du vote de l’assemblée délibérante du Conseil général du Tarn qui est annoncé avant la fin janvier.
Beaucoup plus important, le Comité national de l’eau a examiné dès le 9 décembre une nouvelle version, considérablement amendée (en bien…), du texte dédié aux “Projets de territoire pour la gestion quantitative de l’eau en agriculture”, qui n’a encore aucune valeur légale, puisqu’il devra être adopté en séance plénière par le CNE, avant de se transformer en arrêté, décret ou circulaire, qui établiront légalement la nouvelle doctrine française en matière d’irrigation…
Or ce texte du 9 décembre examiné par le CNE met à bas la doctrine “Quévremont-Martin”, favorable à l’irrigation à outrance, et définit de très nombreux critères qui permettraient, s’ils étaient réellement mis en oeuvre, de procéder à l’aggiornamento que la France aura mis vingt ans à réaliser.
L’enjeu de la sortie de crise de Sivens est donc bien national. Il emporte, au terme d’un conflit violent au sein même des différentes instances concernées des ministères de l’Agriculture et de l’Ecologie, l’imposition d’une nouvelle doxa, qui va bien au-delà de l’usage de l’eau en agriculture, puisqu’elle revient à promouvoir aux forceps un nouveau modèle agricole, davantage respectueux de l’environnement, comme en témoigne le document élaboré par les associations qui ont participé aux travaux de la mission d’expertise, qui privilégie une approche du "territoire" axée sur de nouvelles pratiques agricoles. Un pied de nez qui doit beaucoup à la présence dans la délégation de FNE national de Florence Denier-Pasquier, sa vice-présidente, et ex-rapporteuse du Rapport du CESE, qui avait été prestement enterré par le rapport "Quévremont-Martin" à l’été 2013...
Dans la foulée, une nouvelle mission d’expertise CGEDD-CGEEAAR va revoir de fond en comble les fonadamentaux de la gestion de l’eau en agriculture dans le grand Sud Ouest, au regard de la nouvelle doctrine française en voie d’adoption (forcée)…
La sortie de crise de Sivens conditionne dès lors pour une bonne part l’avènement, ou non, d’un “aggiornamento” lourd de conséquences que la FNSEA refuse évidemment, tandis que l’ensemble des associations participant à la concertation mettaient solennellement en garde contre la tentation d’un deuxième passage en force, dans un communiqué commun, publié le lundi 19 janvier 2015 dans la matinée, avant la rencontre prévue à la Préfecture d’Albi.
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Diffusé en 2009, ce film de 52 minutes de David Briffaud et Fabien Mazzoco, produit par Lilith Production, pointait déjà avec une acuité remarquable les dérives de la logique productiviste qui a promu à outrance la culture du maïs irrigué.
« La France produit et exporte du maïs. En été, cette culture consomme jusqu’à 80% des réserves d’eau et assèche les rivières. Les réserves de substitutions qui prélèvent l’eau l’hiver sont-elles une solution ? N’y a-t-il pas d’alternative à cette culture et à cette agriculture intensive ? À travers le portrait de deux agriculteurs, l’un, céréalier en Vendée en GAEC à quatre associés sur 500 hectares, dont 120 de maïs irrigué, l’autre en Charente-Maritime reconvertissant 140 hectares en polyculture et élevage bio, ce film pose le problème de la politique agricole du "tout maïs" et de ses conséquences économiques et écologiques.
« La culture du maïs vaut-elle le prix à payer en termes d’épuisement des ressources en eau et de pollution ? Certains, qu’ils soient agriculteurs, citoyens ou associations, doutent que les solutions proposées soient les bonnes dès que la logique productiviste n’est pas remise en cause.
« La rivière du Mignon, en Charente-Maritime, est asséchée : une situation qui est devenue chronique à cause des prélèvements opérés pour arroser le maïs au détriment du milieu naturel. Le maïs est cultivé depuis le 15e siècle en France, en Aquitaine et en Alsace. Les maïs hybrides ont permis d’étendre ces cultures à d’autres zones. La culture du maïs est destinée à l’alimentation des animaux d’élevage. LA PAC en 1992 a mis en place des primes à l’hectare, en particulier pour les cultures irriguées. Or, l’irrigation en été consomme 80% des ressources en eau et, en France, ce sont la moitié des zones humides qui ont été asséchées en 30 ans. La culture du maïs contribue aussi au lessivage des terres et à la pollution des rivières par les intrants.
« En octobre 2000, la Directive Cadre Européenne sur l’eau impose à la France de retrouver un "bon état des eaux et des milieux aquatiques" d’ici 2015. Si l’eau vient à manquer l’été, on peut la récupérer l’hiver : l’eau est partout et pour tout le monde, et la crue dérange. La solution consiste alors à construire des bassins pour les réserves de substitution avec l’eau prélevée en hiver. En 2008, la crise de l’ostréiculture révèle la mauvaise santé des eaux. Le 31 janvier 2008, l’Europe a condamné la France pour violation répétée de la réglementation sur la qualité des eaux potables dans trois départements : les Deux-Sèvres, la Vendée et la Charente-Maritime.
« Pourtant la logique d’agriculture intensive n’est pas stoppée. Les subventions pour les réserves d’eau alimentent la course au stockage de l’eau et "l’artificialisation" du milieu, alors que le financement à 70% des réserves d’eau de substitution pour maintenir la culture du maïs crée une dette pour 20 ans !
« Face au problème, la résistance citoyenne s’organise et certains agriculteurs en sont partie prenante. Le sorgho, la luzerne peuvent être utilisés pour l’élevage, mais ces cultures ne sont pas favorisées car le poids du lobby "Monsanto," dont l’activité est exclusivement tournée vers le maïs, est très fort. Les céréales sont cotées en bourse et souvent destinées à l’exportation.Les règles sont définies au plan mondial avec une démarche de spécialisation des zones de production. C’est ainsi que les céréales se croisent (exportation de maïs et importation de soja, par exemple).
« Il y a actuellement 6,7 milliards de personnes sur la planète et en repensant les systèmes de production (conversion en agriculture bio notamment), on pourrait en nourrir 9 milliards (Source : FAO). Hélas, aucune mesure n’est prise pour renverser la situation : le maïs passe pour assurer le meilleur revenu et explique le choix que font les agriculteurs, les aides allant prioritairement aux cultures irriguées et à la constitution de réserves d’eau.
« Avec une sensibilité certaine à la beauté de la nature, ce documentaire révèle les contradictions que doit affronter le monde agricole et dégage avec clarté les enjeux majeurs. »
Avec la participation de :
Claude Poitiers, agriculteur céréalier en Vendée, en GAEC à 4 associés, sur 500 hectares dont 120 de maïs irrigué.
Julien le Guet, animateur nature batelier dans le Marais Poitevin.
Marc Benoît, agronome, directeur de recherche à l’INRA.
Benoît Biteau, agriculteur en Charente-Maritime, en reconversion en polyculture et élevage biologique sur 140 hectares.
Luc Servant, président de la Chambre d’agriculture de Charente-Maritime.
Patrick Picaud et Claude Matard, Association Nature Environnement 17 (La Laigne).
Michel Bertin, ostréiculteur, Bassin de Marennes d’Oléron.
Michel Barnier, ancien ministre de l’Agriculture.
Christine Dumont, habitante du Marais Poitevin.
François-Marie Pellerin, Ingénieur géologue - CORDE Marais Poitevin.
Commander le DVD du film sur le site de Voir et Agir (12 euros).
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