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26 novembre 2012 1 26 /11 /novembre /2012 18:39

 

1 100, comme le dit le syndicat Unsa ? 1 500, comme semble le penser plutôt FO ? Peut-être jusqu’à 2 000 comme le pronostiquent certains ? Un étrange jeu de devinettes s’est instauré chez SFR, en attendant le comité central d’entreprise prévu mercredi 28 novembre. Chacun y va de son pronostic mais tous sont d’accord au moins sur un point, il faut s’attendre au pire : le plan de départs volontaires, qui va être présenté par la direction du groupe de télécommunications mercredi, s’annonce massif.

L’abattement a saisi l’entreprise. Depuis des mois, les 10 000 salariés du groupe assistent impuissants au naufrage de leur maison. Ils ne reconnaissent plus leur groupe. La nouvelle direction paraît se cantonner à une position d'attente pour faire monter les enchères et trouver un repreneur qui acceptera de racheter le plus cher possible la société. Pour le reste, tout leur univers semble s’être écroulé. SFR tel qu’ils l’ont connu a vécu.

« Pour moi, SFR, c’est fini », dit un cadre prêt à raccrocher dès que les mesures de départ seront connues. Les syndicats s’attendent à ce que de nombreuses personnes saisissent l’occasion du plan de départs volontaires. Car tous ne se font aucune illusion. Ce plan qui devrait d’abord viser les activités commerciales et de marketing n’est sans doute que le premier d’une très longue série. D’autres suivront qui risquent de défaire peu à peu l’ensemble du groupe.

Impuissants, les syndicats ont la satisfaction amère d’avoir eu raison dans leurs plus sombres prédictions. Dès 2009, lors de l’annonce d’une quatrième licence de téléphonie mobile en France, ceux-ci avaient dénoncé le danger d’une explosion du secteur. « Plusieurs rapports récents démontrent que la présence de quatre opérateurs mobiles ou plus, demandée par la Commission européenne dans les grands pays d'Europe, n'est pas viable économiquement », avaient écrit l’Unsa et la CGE de France Télécom. « Cela ne peut entraîner que des suppressions d’emploi, des délocalisations, des pertes d’investissement », avait prédit dans des communiqués communs l’ensemble des syndicats du secteur. Salariés, sous-traitants, fabricants d’équipements, affiliés, tous allaient payer au prix fort cette décision mortifère, qui n’apporterait aucun bénéfice, avaient-ils averti.

Depuis le lancement en janvier de Free mobile, qui a obtenu la quatrième licence, la réaction en chaîne redoutée par les syndicats est en train de faire écrouler le secteur. Bouygues Télécom a annoncé la suppression de plus de 500 emplois et s’attend à perdre de l’argent pendant plusieurs années. Orange s’apprête à faire disparaître plus de 2 000 emplois – « sans licenciement », s’est engagé le groupe – dans la téléphonie mobile et à revoir toute l’économie de sa branche.

Si les déboires d’Alcatel-Lucent en France ne sont pas tous liés au problème de la déstabilisation de l’activité mobile en France, elle y participe. Les fabricants d’équipements et de logiciels ont vu leurs débouchés s’évanouir en quelques mois, tandis que les chaînes de magasins spécialisées dans la vente de portables et d’équipements de télécommunications se préparent à fermer nombre de points de vente dans toute la France. La publicité, si présente depuis le lancement du mobile dans les années 1990 et devenue grande pourvoyeuse de recettes pour la presse, a quant à elle quasiment disparu.

D'un trait de plume du régulateur

Et maintenant, c’est au tour de SFR. Contre toute attente, le deuxième groupe de téléphonie mobile en France est peut-être celui qui est le plus atteint. Il ne s’attendait pas à une concurrence agressive et destructrice. En quelques semaines après le lancement de Free mobile et ses offres à 2 et 20 euros, le groupe a explosé. Son PDG, Franck Esser, qui dirigeait SFR depuis douze ans, a démissionné. Une partie de l’équipe de direction a volé en éclats. Jean-Bernard Lévy, président de directoire de Vivendi, la maison mère de SFR, a été poussé vers la sortie.

Il a fallu attendre près de cinq mois pour que Vivendi désigne Stéphane Roussel, jusqu’alors directeur des ressources humaines de SFR pour prendre la succession de Franck Esser à la tête du groupe. En son sein, ce choix a vite été lu comme la décision d’un groupe qui s’apprête à engager des plans sociaux et à se vendre plutôt que le choix d’une entreprise décidée à se battre et à répliquer. L’impression n’a guère été démentie par la suite. « Sa mission est juste de rendre la mariée plus belle avant de la vendre. Pour le reste, il a l’air totalement serein sur son avenir qui semble assuré », relève un salarié.

En pleine tourmente, les salariés ont vu la direction générale partir en vacances en août. Elle semble continuer à mener grand train. Ces dernières semaines, ce fut un départ en jet privé à Marrakech à l’invitation de Jean-René Foutou pour participer à un séminaire de réflexion dans son riad marocain. Jean-François Dubos, pilier de Vivendi depuis trente ans devenu président du groupe après l’éviction de Jean-Bernard Lévy, sèche, pour sa part, souvent les réunions : les télécoms n’ont guère l’air de le passionner.

Pourtant, cela reste encore la principale source de revenus et de profits du groupe. Mais l’intérêt n’y est plus. En quelques mois, Vivendi – comme Bouygues et Orange – a vu tout son modèle s’effondrer. « Le marché de la téléphonie mobile en France est arrivé à son point de maturité. Avec près de 60 millions d’abonnés, il est illusoire d’essayer de gagner de nouvelles parts de marché en tablant sur la croissance. Il était évident qu’une concurrence plus agressive par les prix allait se mettre en place, chacun essayant de prendre des clients à l’autre. Mais en décidant d’amener un quatrième concurrent, l’Arcep (l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes) a dynamité le processus. On s’est tous retrouvés du jour au lendemain plongés dans un combat à mort », explique un cadre de SFR.

« Le changement réglementaire de l’Arcep provoque une destruction sans précédent », souligne un connaisseur du dossier. « Jusqu’alors, le régulateur avait décidé de régir la concurrence dans le secteur par les investissements dans les infrastructures et les réseaux. Il a laissé prospérer l’opacité et les ententes sans s’en soucier. Aujourd’hui, il a changé radicalement de doctrine et prône au contraire la mutualisation des réseaux, en poussant notamment Orange à louer ses réseaux à Free. Du coup, les marchés financiers en ont déduit que les réseaux, qui ont pourtant une valeur bien réelle, ne valaient plus rien, tandis qu’ils valorisent le portefeuille client, même s’il n’y a aucun revenu. »

Pour les adeptes de Schumpeter et de la « destruction créatrice », la disparition d’emplois et d’usines, de savoir-faire et de technique, n’est sans doute rien. Elle s’inscrit dans le cycle « fécond » du renouveau. Mais feront-ils le même constat pour la seule chose qui mérite attention à leurs yeux : l’argent ? En quelques mois, par le seul trait de plume du régulateur, France Télécom, la maison mère d’Orange, a vu se volatiliser quelque 7 milliards d’euros de capitalisation boursière, Bouygues plus de 2,5, Vivendi près de 4 avant que le groupe n'annonce son plan de scission qui lui a permis de se rétablir partiellement.

Iliad, la maison mère de Free, fort de ses 4 millions de nouveaux abonnés, dont la moitié au moins à perte, selon les estimations, a enregistré un bond de 40 % de sa capitalisation boursière à 8 milliards d’euros, depuis le début de l’année.

Une faute de 8 milliards

Les malheurs de SFR, cependant, ne sont pas seulement liés à la décision du régulateur. La direction de l’entreprise y est aussi pour beaucoup. « Tant que le système fonctionnait, qu’ils pouvaient gagner beaucoup d’argent sans rien faire, ils n’ont touché à rien. Il était évident que nous avions des offres beaucoup trop chères, beaucoup trop opaques. Rien que la crise aurait dû nous pousser à changer. Ils ont préféré croire que l’environnement était immuable », reconnaît ce cadre de SFR.

La preuve de cet aveuglement, pour beaucoup, est dans les choix faits par la direction de SFR et de Vivendi de racheter à l’automne 2011 les 40 % que détenait encore le groupe britannique de télécommunications Vodafone dans la société, pour le prix mirifique de 8 milliards d’euros. À l’époque, le conseil d’administration de Vivendi avait approuvé ce rachat, sans y trouver rien à redire. « C’est la démonstration parfaite qu’ils n’avaient rien compris, rien anticipé sur ce qui allait se passer. L’arrivée de Free était pourtant annoncée depuis longtemps », souligne un analyste. « Les salariés de SFR risquent de payer chèrement la faute commise par la direction. Pour la masquer, Vivendi est prêt à en commettre une plus grosse encore », déplore ce cadre sur le départ.

Alarmé par la chute du cours de l’action de Vivendi – le seul critère qui le préoccupe –, Jean-René Fourtou, le président du conseil de surveillance du groupe, a repris le collier depuis le début de l’année. Dans une lettre stupéfiante adressée au printemps à ses actionnaires, il avait étalé publiquement ses réflexions sur une possible scission et la vente par appartement de ses activités, dont celle des activités de télécommunications, en vue de faire remonter l’action.

Depuis, dans l’espoir de doper le cours et donner une nouvelle impulsion au groupe, il a accepté que Vincent Bolloré devienne le premier actionnaire du groupe, après l’apport de la participation de sa chaîne Direct 8 à Canal +. Mais la direction, qui n’a jamais eu d’autre projet et ambition pour le groupe que celui d’une grosse Sicav depuis l’éviction de Jean-Marie Messier en 2002, sait qu’il lui faut donner plus de signes.

« Jean-René Fourtou se fait un devoir de redresser le groupe avant son départ. Il veut apporter la preuve que sa présidence, contrairement à tout ce qui a pu être dit, n’était pas usurpée et inutile. Mais il n’a pas beaucoup de temps. Il lui faut apporter des preuves d’ici à l’assemblée générale de juin prochain », explique gentiment un proche du dossier. Stéphane Roussel, le PDG de SFR, a tenu à peu près le même discours aux syndicats du groupe lors d’une récente réunion : « Vivendi doit être capable de venir avec une stratégie claire pour la prochaine assemblée des actionnaires de juin 2013 », leur a-t-il expliqué. En bref, Vivendi doit être capable à ce moment-là de raconter une belle histoire boursière.

L’histoire a déjà commencé à s’écrire. Vivendi ne fait plus mystère de sa volonté de sortir du secteur des télécommunications, maintenant que la rente est en voie d’épuisement. Une stratégie totalement approuvée par son nouvel actionnaire, Vincent Bolloré, qui n’a jamais apprécié ces activités trop dévoreuses de capitaux selon lui : entré par effraction dans le capital de Bouygues, il avait milité pour une sortie précipitée des télécoms.

Vente à l'encan

« Il vaudrait mieux pour SFR que Vivendi vende rapidement GVT et Maroc Télécom, pour que nous ayons du temps côté SFR », a  reconnu devant les syndicats Stéphane Roussel. Mais le scénario idéal n’a pas l’air de se dérouler comme prévu. Sans attendre, Vivendi a annoncé officiellement la vente de sa filiale brésilienne de télécoms GVT. « La pépite du groupe », dit un familier. L’ennui est que la pépite ne semble pas attirer pour l’instant les repreneurs. Le groupe a aussi l’intention de céder les 49 % qu’il détient dans Maroc Télécom aux côtés du gouvernement marocain. Mais là encore, la cession de ce qui fut une autre « pépite » du groupe dans le passé ne va pas aussi vite que le souhaiterait Vivendi. Tout donc repose sur SFR.

Depuis plusieurs semaines, des rumeurs persistantes de vente circulent à l’intérieur du groupe. Une fois, il est question de discussions avec Numericable, une autre de pourparlers avec Free, une autre encore de manœuvres d’approche avec Bouygues, ou encore avec Vodafone. Selon nos informations, toutes sont avérées. Sans état d’âme, la direction de SFR est en discussion avec tout candidat qui pourrait être intéressé par le rachat. « Il ne s’agit pas de rapprochement pour créer un groupe plus solide, ou engager une consolidation du secteur. Nous avons beau être les deuxièmes après Orange, nous sommes à vendre à l’encan au plus offrant », constate désabusé un salarié.

Mais la cession se heurte à de nombreux obstacles. D’abord, réglementaires. Il serait curieux que l’ouverture à la concurrence « libre et non faussée » voulue par l’Arcep aboutisse à la disparition d'un des quatre opérateurs de licence. Ensuite, financiers. Les repreneurs potentiels n’ont pas la taille pour absorber une société si grosse. Numéricable est minuscule et endetté jusqu’au cou. Bouygues en pleine difficulté lui-même n’a guère envie de se surcharger encore dans le secteur. « Xavier Niel, le PDG de Free, n’est pas fermé au projet, mais à condition que ce soit lui qui commande », rapporte un connaisseur du dossier. Quant à Vodafone, il pourrait peut-être regarder le dossier, si le prix est bradé.

Dans les discussions préliminaires, les faiblesses de SFR ont tout de suite été pointées. Outre sa complète désorganisation face à la concurrence, les uns et les autres ne cessent de revenir sur les 8 milliards d’euros dépensés en 2011 et qui pèsent lourd dans le bilan de l’entreprise.

« Ils seront obligés de faire une dépréciation d’actifs », dit un analyste. Tout l’enjeu pour la direction de Vivendi est qu’elle se voie le moins possible, voire pas du tout. D’où la volonté de céder vite d’autres filiales, d’où la nécessité de faire des plans sociaux peut-être plus importants que nécessaires pour mieux habiller les comptes, d’où le désir de trouver vite et presque à n’importe quel prix un repreneur pour lui céder le tout. La logique du démantèlement est à l’œuvre et les salariés vont en ressentir le goût amer. 


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