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Il suffit de pas grand-chose pour comprendre qu'un dossier embarrasse le gouvernement. Quand des ministres d'habitude bavards refusent de parler, quand il faut harceler les conseillers pour qu'ils décrochent leur téléphone, quand ceux qui vous répondent se contredisent ou se contentent de bonnes intentions, c'est qu'il y a un malaise.
En annonçant sa volonté de supprimer 7 500 postes d'ici à 2016, c'est peu dire que Renault crée l'embarras au sommet de l'Etat. Première question : qui était au courant de quoi et quand ? A Bercy, on assure avoir été informé vendredi 11janvier des intentions du constructeur, tout en précisant que le "chiffrage exact" n'a été connu que lundien fin d'après-midi.
A l'Elysée, lundi soir, on affichait à l'inverse une totale surprise : "D'où sort ce truc ? Nous ne sommes au courant de rien, ici." Une chose est sûre : le gouvernement n'entend pas être mêlé de trop près à ce dossier empoisonné. Il faut dire que le moment choisi par Renault pour faire son annonce, quatre jours après la conclusion d'un accord entre partenaires sociaux sur la "sécurisation de l'emploi", tombe particulièrement mal. D'autant que l'Etat détient encore 15 % du capital de l'entreprise.
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A Matignon, on se contentait mardi matin de promettre "vigilance" et "détermination": "La négociation doit être exemplaire, et le gouvernement va regarder ça de très près. Heure par heure s'il le faut, et même demi-heure après demi-heure, comme nous le faisons pour tous les grands dossiers industriels", assure le cabinet du premier ministre.
"LIGNES ROUGES À NE PAS FRANCHIR"
Pour l'heure, le gouvernement se garde d'attaquer Renault. Les annonces du constructeur n'ont rien à voir avec le plan social annoncé en juillet 2012 par PSA et qualifié à l'époque d'"inacceptable" par le président François Hollande, argue-t-il. "L'objectif est d'avoir le maximum d'activité en France, tout en restant réaliste sur les conditions de marché", explique David Azéma, commissaire aux participations de l'Etat.
Afin de garantir ce "maximum d'activité", Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif, a d'ores et déjà posé quatre exigences, qu'il qualifie lui-même de "lignes rouges à ne pas franchir": aucun licenciement, pas de fermeture d'usines en France, un accord avec les syndicats et un "plan de charge pour les sites français du groupe, qui soit adossé à Nissan et à Daimler".
Selon nos informations, Bercy pousse le groupe à transférer en France une partie de la production réalisée par Nissan en Royaume-Uni. "Renault est venu au secours de Nissan en 1999, lorsque le Japonais connaissait des difficultés. Aujourd'hui, alors que c'est Renault qui souffre, il ne nous paraît pas anormal de demander à Nissan de renvoyer l'ascenseur", assure une source gouvernementale.
"CELA RESSEMBLE À UN BRAS D'HONNEUR"
L'exécutif ne veut pas apparaître tonitruant. A Bercy, on le reconnaît en "off" : "Personne n'est à l'aise avec cette annonce. On comprend le besoin de Renault de se réorganiser pour encaisser la chute du marché européen. Mais à quelques jours de la signature de l'accord emploi-compétitivité, déjà très critiqué, ce n'est pas envoyer un signal très positif." Signataire de cet accord, la direction de la CFDT n'a pas souhaité commenter l'annonce de Renault, renvoyant ses interlocuteurs sur la Fédération générale des mines et de la métallurgie (FGMM-CFDT). "On est un peu surpris de cette annonce alors que nous sommes engagés avec la direction dans la discussion d'un accord de maintien dans l'emploi", observait mardi soir le secrétaire général de la FGMM-CFDT, Dominique Gillier.
Non-signataire de l'accord, Force ouvrière (FO) ne se prive pas en revanche d'ironiser sur l'annonce de Renault. "Cela ressemble à un bras d'honneur et cela prouve que les grandes entreprises mondialisées n'ont pas besoin de signer des accords de compétitivité pour faire du chantage à l'emploi", explique Stéphane Lardy, secrétaire confédéral de FO et chef de file de l'organisation syndicale lors de la négociation.
Emmanuel Maurel, le leader de l'aile gauche du PS, est, lui, encore plus direct. "Ce que fait Renault est dégueulasse", s'insurge le vice-président du conseil régional d'Ile-de-France, dénonçant un "véritable chantage à l'emploi". M. Maurel estime "encore plus justifiée" sa critique de l'accord emploi et de son chapitre compétitivité, dernier maillon d'une "logique globale" englobant selon lui le traité budgétaire européen, le pacte compétitivité et le crédit d'impôt aux entreprises. " Combien de millions d'euros reçoit Renault avec le crédit d'impôt ?", interroge-t-il, amer.