« Nous avons fait beaucoup en baissant la taxe professionnelle, ce n'est pas suffisant.» Le 16 Novembre dernier, au micro de RTL, Laurence Parisot cachait mal sa satisfaction pleinement manifestée dans ce « nous », non de majesté, mais de coordination avec le gouvernement pour la réforme de la taxe professionnelle. Mais la patronne du Medef aurait-elle des dons de voyance ? Car la voici exhaussée : le cadeau aux entreprises est encore plus gros que prévu. A l’économie de 9,3 milliards d’euros en 2010 année de transition, devait leur demeurer un gain en régime de croisière de 5,8 milliards pour les années suivantes. Le dernier rapport de Gilles Carrez indique que la facture finale sera de 6,8 milliards d’euros par an, soit un milliard de bonus, par rapport aux calculs du gouvernement de 2009.
« Ce n’est pas la première fois que l’appréciation du cout de la réforme de la TP change », s’étonne-t-on dans les rangs de l’opposition. Idem, chez les proches de Gilles Carrez : « Sur ce sujet, le gouvernement souffre de sous évaluation chronique.»
La Cour des comptes estimait en mai 2011 avec ses pincettes légendaires que « la suppression de la taxe professionnelle et son remplacement par d’autres impôts ont constitué une réforme importante et complexe. »
Important: il s’agit de compenser par un nouvel impôt, la Contribution économique territoriale (CET), 30 milliards de recettes pour les collectivités locales, principales bénéficiaires de ce prélèvement.
Complexe parce que l’Etat s’est engagé à prendre à sa charge le différentiel entre les deux impôts. Mais qu’importe le coût pourvu que cela soit mis au crédit de la compétitivité, comme ce fut évidemment le cas.
Résultat : une moindre autonomie fiscale des collectivité locales, désormais appointées aux budgets de l’Etat.
Mais d’où vient ce milliard supplémentaire? Il y a d’abord une grosse erreur de calcul : 420 millions d’euros. Mais tout dans cette réformes aura été fait à la va vite. Alors que le premier projet de loi présenté par le gouvernement fut totalement réécrit par les parlementaires, c’est maintenant une décision du Conseil constitutionnelle qui vient ébranler le fragile édifice, comme l’annonce notre confrère Les Echos. Les « sages » ont retoqué la taxation des professions libérales sous le régime des bénéfices non commerciaux. Une aubaine de 770 millions d’euros qui resterons dans les poches des dentistes, kinés et agents immobiliers et autres experts de tous poils. Tandis que 850 000 petites et très petites entreprises figurent parmi les perdantes de cette reforme pourtant hyper généreuses. En moyenne, les entreprises toutes tailles confondues ont réduit leur fiscalité de 31 % avec cette réforme.
La rigueur ce n’est donc pas pour tout le monde. Alors que les ménages doivent assumer l’essentiel des « efforts » des 4 lois de finances rectificatives pour 2011 et de la loi de finances 2012, avec notamment le passage de 5,5% à 7% de la TVA pour 1,8 milliard d'euros, les entreprises, elles, ont vu leur fiscalité se modérer sensiblement sur les dernières années : le Crédit impôts recherche, le passage de la TVA restauration à 5,5% et la réforme de la Taxe professionnelle. Cette dernière aura à elle seule assuré aux entreprises une économie de 23 milliards sur le quinquennat. En rythme annuel, les 6,8 milliards sont équivalents à presque 4 fois ce que les consommateurs vont être amenés à payer avec la hausse de la TVA.