«Il n'y a pas de parallèle à faire entre la Grèce et la situation espagnole; l'Espagne, beaucoup plus compétitive, va se remettre sur pied rapidement.» C'est ce qu'a déclaré, lundi 23 juillet, le ministre des finances allemand, Wolfgang Schäuble, au quotidien
Bild. Une affirmation qui relève presque de la méthode coué: les dirigeants européens ont du mal à reconnaître la gravité de la situation espagnole, sans doute parce que la crise qui secoue la péninsule ibérique pourrait avoir des conséquences bien plus importantes pour la zone euro que la crise grecque.
Les propos du ministre allemand vont à l'encontre de la réalité. Car non, les fondements de l'économie espagnole ne sont pas sains, comme il le sous-entend dans sa comparaison avec la Grèce. Le miracle espagnol vanté dans les années 2000 repose essentiellement sur le BTP, secteur totalement amorphe depuis
l'explosion de la bulle immobilière en 2007. Auparavant, des millions d'Espagnols (près de 80% de la population) avaient massivement investi dans la pierre, encouragés par les banques qui ouvraient en grand les vannes du crédit. Les promoteurs construisaient près de 700 000 logements par an, quasiment autant que la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni réunis. Avec en prime un endettement massif des ménages : en 2007, il représentait environ 130% de leurs revenus. Et même si beaucoup ont du mal à le reconnaître, l'endettement privé est tout aussi grave que 'lendettement public sur lequel on se focalise. La crise financière survenue en 2008 n'a rien arrangé au pouvoir d'achat de la population.
Les autres indicateurs de la santé économique de l'Espagne sont au rouge: le taux de chômage est effrayant puisqu'il atteint 24,5% des actifs, soit le sommet historique de 1994, avant le boom économique. Et le chiffre risque encore d'augmenter, la tendance étant à la destruction d'emplois. Les effets de la réforme du marché du travail, mise en place en février 2012, avec un assouplissement des règles de licenciements et des conditions de travail, ne sont pas encore visibles, ou alors dans la rue,
avec la multiplication des mouvements sociaux ces dernières semaines. Corrélativement, l'activité industrielle est délabrée. Sa production se situait en février 25% en dessous de son pic de fin 2007, avec une baisse de 5,1% sur un an. L'Espagne est d'ailleurs officiellement entrée en récession au premier trimestre 2012 et le gouvernement table pour 2012 sur une contraction de l'économie de 1,5%.
Difficile dans ces conditions d'espérer réduire le déficit, ce qui impliquerait que l'Etat présente davantage de recettes que de dépenses. Malgré un nouveau plan d'austérité de 65 milliards d'euros, L'Espagne n'arrive pas à remplir les objectifs fixés par l'Union européenne. Pour 2012, le déficit devait initiallement être réduit à 5,3%. Dans l'impasse, le gouvernement de Mariano Rajoy a obtenu de la zone euro que le chiffre soit réhaussé à 6,3%.