Dans un communiqué rendu public mardi, Québec solidaire affirme qu'il soutient « la résistance pacifique et légale » à la loi 78 et ne condamne pas « la désobéissance civile pacifique ».
Québec solidaire, qui considère cette loi « injuste et liberticide », a lancé un appel à la population du Québec « à agir » pour dénoncer les gestes d'un gouvernement qui « préfère la répression à l'exercice des libertés fondamentales ».
« Il existe plusieurs solutions pour contourner et contester cette loi odieuse. Il est nécessaire de la contester juridiquement, de la soumettre à des organisations internationales compétentes, de recourir à des manifestations pacifiques et légales et d'aller voter massivement lors des partielles et des générales qui s'en viennent », est-il écrit dans le communiqué.
Par ailleurs, le parti dirigé par Amir Khadir et Françoise David appelle à « appuyer financièrement les associations étudiantes ».
Pas d'incitation à la désobéissance civile
Tout en indiquant qu'il ne peut pas encourager la désobéissance civile, le parti précise qu'il ne condamne pas « les personnes ou organismes ayant recours à des gestes de désobéissance civile pacifique à cette loi pour exercer librement leurs droits constitutionnels à la dissidence. »
Françoise David a indiqué que son parti poursuivait la réflexion sur « tous les moyens de combattre cette loi ».
Québec solidaire encourage la population à manifester pacifiquement et massivement ce 22 mai et lors d'autres rassemblements prévus afin de contester la loi 78.
Le député de Mercier, Amir Khadir, qui invite les corps de police à plus de retenue, estime que le nombre « astronomique d'arrestations » n'apparaît pas être une « réponse appropriée ».
Enfin, Québec solidaire appelle le gouvernement à retourner à la table des négociations pour ramener « la paix sociale »
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Charest juge Khadir irresponsable
Interrogé sur la position de Québec solidaire, le premier ministre Jean Charest a déclaré : « Dans le cas de M. Khadir, nous avons affaire avec un cas particulier d'une personne qui, de toute évidence, agit de manière irresponsable ».
De son côté, le bâtonnier du Québec, Me Louis Masson, estime qu'il « serait absurde de défier la loi 78 ». Selon lui, la désobéissance civile, « c'est la négation même de la règle de droit, une pratique totalement inadmissible dans une société démocratique ».
Me Masson a indiqué que le Barreau du Québec ne peut « cautionner quelque proposition que ce soit visant à encourager le non-respect de la loi 78. »
Avant l'adoption de la loi spéciale 78, le bâtonnier avait exprimé de sérieuses inquiétudes devant l'ampleur à venir des limitations apportées au droit d'association et au droit de manifester, de même qu'à la liberté d'expression.
MONTREAL — Le conflit étudiant au Québec se préparait mardi à marquer son centième jour par une manifestation géante dans les rues de Montréal, qui consacre une nouvelle revendication: la défense du droit de manifester.
Le gouvernement du Premier ministre Jean Charest a adopté vendredi dernier une loi spéciale, qui prévoit une suspension des cours jusqu'au mois d'août dans les universités et collèges touchés par la grève étudiante, une façon de casser un mouvement qui dure depuis plus de trois mois.
Si la suspension des cours a été plutôt bien accueillie au sein de la population, le reste de cette loi d'exception, notamment la restriction du droit de manifester --pour quelque raison que ce soit-- a suscité une levée de boucliers.
Car, en plus d'imposer de fortes restrictions aux libertés fondamentales, la loi prévoit des amendes de 1.000 à 5.000 dollars par jour pour les contrevenants et de 25.000 à 125.000 dollars pour les organisations, puis le double en cas de récidive.
Dès son adoption, la loi a été défiée ce week-end à Montréal et dans d'autres villes de la province, donnant une tournure plus politique et violente aux manifestations, qui ont été ponctuées de centaines d'arrestations.
Quelque 36 manifestants, pour la plupart des étudiants, sont ainsi devenus les premières personnes arrêtées en vertu de la loi, dans la nuit de lundi à mardi à Sherbrooke (sud du Québec), a annoncé la police.
A Montréal, une manifestation de plusieurs milliers de personnes s'est déroulée plutôt pacifiquement lundi soir, la police ne procédant qu'à quelques interpellations.
Des quartiers de Montréal ont aussi commencé ce week-end à vibrer au son de tintamarres de casseroles de citoyens se faisant entendre contre la loi 78 depuis le balcon de leur logement.
"Se lancer de manière précipitée dans le contrôle du droit de manifester, c'était la très mauvaise idée d'un groupe de ministres au sentiment d'assiégés", écrivait lundi un commentateur du quotidien La Presse favorable à la hausse des droits de scolarité, sujet à l'origine du conflit.
"On ne manifeste en effet plus tellement contre la hausse des droits de scolarité. On manifeste pour la liberté d'expression. On manifeste pour le droit de manifester", poursuivait le journaliste Yves Boisvert.
Un sondage publié mardi par le quotidien Le Journal de Montréal montre que si 51% de la population est d'accord avec la hausse des droits de scolarité, 53% d'entre elle estime en revanche que la loi d'exception "est beaucoup trop sévère" et 73% qu'elle ne contribuera pas au rétablissement de la paix sociale. La majorité appelle à une reprise du dialogue entre le gouvernement et les étudiants.
Des syndicats et des organisations ont annoncé leur intention de contester devant les tribunaux la loi, qui doit rester en vigueur jusqu'au 1er juillet 2013, mais cette procédure pourrait prendre plusieurs années avant d'aboutir.
La Classe, la plus radicale des organisations étudiantes en grève, a été plus directe: elle a non seulement appelé à désobéir à la loi mais a également invité les objecteurs à se porter volontaires pour des interpellations sur le site "arretezmoiquelquun.com". Plus de 3.000 personnes, photos à l'appui, avaient donné leur nom mardi matin, moins de 24 heures après le lancement de cette initiative.
Les organisateurs du rassemblement de mardi à Montréal, autorisé par la police, n'ont pas publié de prévisions d'affluence mais à en juger par deux autres manifestations précédentes, la foule pourrait dépasser les 100.000 personnes.
Des manifestations en soutien aux étudiants québécois étaient aussi prévues à New York et à Paris. Ces derniers ont également reçu le soutien de plusieurs personnalités, dont le réalisateur américain Michael Moore.
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