Car pour espérer profiter de la manne des marchés publics, les multinationales françaises de l’eau et des déchets se doivent d’entretenir les meilleures relations avec le monde politique. « Veolia et Suez approchent tous les élus et tentent de créer des liens particuliers avec eux », s’étouffe Jean-Luc Touly, pourfendeur infatigable de de l’eau.
Cet hyperactif multiplie les casquettes : cadre de Veolia -accusé de « diffamation » par son employeur, viré en 2006 puis réintégré en 2010- délégué syndical, Conseiller régional EELV, conseiller municipal de Wissous (Essone), responsable de l’Association pour un contrat mondial de l’eau (Acme), membre de l’association Anticor, Jean-Luc Touly a passé ses dix dernières années à alerter l’opinion publique et les autorités compétentes sur les pratiques de ces grands groupes. « Ce lobbying se fait dans les couloirs de l’Assemblée, dans les colloques organisés par ces entreprises ou par les petites attentions envers les décideurs publics. Pour arriver à leur fin, ils embauchent un maximum de collaborateurs ou d’anciens élus, profitant ainsi de leurs carnets d’adresses dans le monde politique ».
On retrouve, entre autres, dans le groupe Suez, Benjamin Fermiot, ancien Directeur de cabinet de François Bayrou et conseiller régional d’Ile-de-France mais aussi Anne-Marie Idrac, ancienne secrétaire d’Etat au Commerce extérieur et Senior Advisor depuis 2011. Chez Veolia, on croise au pôle des Affaires européennes un certain Rainier d’Haussonville passé par les cabinets de Dominique de Villepin aux affaires étrangères puis à Matignon. L’ancien Premier Ministre fera d’ailleurs un bref passage dans l’entreprise en tant que « VRP de luxe ». Dans les couloirs de l’entreprise on nous assure que ces pratiques sont d’un autre temps, « héritage de l’air Proglio ». Depuis l’arrivé d’Antoine Frérot à la tête de Veolia, la direction chercherait à pousser ce genre de profil vers la porte…
« L’autre méthode pour s’attacher les faveurs des élus est de multiplier les colloques avec des diners dans les meilleures restaurants aux frais de la princesse bien sûr ou encore des déplacements tous frais payés pour aller visiter telle installation novatrice dans des lieux souvent très agréables » raconte le conseiller régional EELV. Autre rendez-vous incontournable, le Congrès des maires qui se tient une fois par an à Paris, Porte de Versailles. « C’est au stand de Veolia qu’il y a souvent le plus d’élus que l’on voit jouer des coudes pour avaler un maximum d’huitres, de foie gras ou de champagne » nous explique Jean-Luc Touly en mimant la scène le sourire aux lèvres. « Etrangement, j’ai tenté de faire une belle photo de famille une fois en amenant des caméras filmer le stand. Mais dès que les élus ont vu l’équipe de tournage ils se sont tous écartés pour ne pas se retrouver dans le champs de l’objectif. »
Un autre moyen efficace serait de multiplier les subventions et les dons aux différentes associations environnementales ou de faire de l’entrisme dans les agences régionales de protection de l’environnement précise l’élu Vert « On retrouve Veolia et Suez un peu partout dans le giron des associations comme par exemple France Nature Environnement. Ça permet d’améliorer son image et de pouvoir prévenir ou dégonfler des initiatives qui pourraient être mauvaises pour le « système ». Un exemple de cette politique, c’est de retrouver Jean-Vincent Placé à la remise de la Légion d’Honneur d’un cadre de Veolia par André Santini ».
Effectivement, le 26 septembre 2012, le député-maire André Santini, président du Syndicat des Eaux d’Ile-de-France dont le délégataire n’est autre que Veolia, a remis la Légion d’honneur à Michel Plasse, Directeur de Veolia Eau en présence du sénateur d’Europe Ecologie Les Verts. On peut imaginer que les deux hommes se sont connus par le biais de l’Agence régional pour la nature et la biodiversité en IDF (Natureparif), Jean-Vincent Placé en étant le premier Vice-président et Michel Plasse ayant figuré dans le conseil d’administration.